Plan d`action sur 5 ans du Ministère de la Santé

DGS/GTNDO Mise à jour 28/03/03
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DENUTRITION DU SUJET AGE
Objectif général
¾Réduire de 20% le nombre de personnes âgées de plus de 70 ans dénutries (passer de
350-500 000 personnes dénutries vivant à domicile à 280-400 000 et de 100-200 000
personnes dénutries vivant en institution à 80-160 000) ; réduire de 20% la prévalence
des personnes âgées ayant un taux d'albumine sérique inférieur à 35g/l.
Mortalité, morbidité
Le nombre de personnes souffrant de dénutrition est estimé entre 350 000 et 500 000 pour les
personnes vivant à domicile et au minimum entre 100 000 et 200 000 pour celles vivant en
institution gériatrique. La dénutrition est la source de pathologies secondaires, de retards de
cicatrisation et d’une augmentation de la durée d’hospitalisation. Le taux de mortalité est
proportionnel au niveau de dénutrition observé. La population à risque est constituée de
personnes de plus de 70 ans, isolées, anorexiques, dépressives, dépendantes, atteintes de
polypathologie chroniques ou lors de la survenue d’une pathologie aiguë même de courte durée.
La malnutrition protéino-energétique (MPE) est beaucoup plus fréquente dans les milieux
défavorisés. Sa prise en charge y entraîne plus souvent une institutionnalisation. Une part de la
morbidité et de la mortalité est évitable.
Stratégie d’action efficace ou recommandée
La stratégie d’action doit articuler de façon cohérente les points suivants :
- Développer les politiques locales d'aide et de maintien à domicile,
- Favoriser l'accès des personnes âgées, à une alimentation de qualité (en qualité gustative et en
densité), y compris lorsqu'elles sont hébergées en institution (voir PNNS),
- Etablir et diffuser des recommandations de bonnes pratiques sur le dépistage et la prise en
charge des patients à risque de dénutrition auprès des professionnels de santé,
- Améliorer la formation des personnes intervenant en institution et au domicile des personnes
âgées,
- Développer l'enseignement de la nutrition gériatrique à destination des personnels de santé,
- Favoriser le développement de la nutrition entérale et orale à domicile.
Indicateurs
On peut citer :
i. Distribution des taux d'albumine sérique chez les personnes de plus de 70 ans (par
âge, sexe et selon le lieu de vie)
ii. Prévalence de la perte de poids
Besoins d’information ou de surveillance non couverts, connaissances scientifiques à
développer dans une perspective de santé publique
Quantification du rôle de la dénutrition dans l'aggravation des polypathologies des
personnes âgées
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1 Description
1.1 Définition
La dénutrition est la conséquence d'une insuffisance d'apport protéique (dénutrition exogène) ou d'un
hyper-catabolisme lié par exemple à un cancer ou à une infection (dénutrition endogène). Chez le sujet
âgé, les deux mécanismes sont souvent impliqués.
La dénutrition protéino-énergetique s'apprécie par le taux d'albumine sérique (on considère qu’il existe
une dénutrition modérée à partir d’un taux d’albumine inférieur à 35g/l), la perte de poids et la valeur de
l’indice de masse corporelle (IMC).
La population à risque est constituée de personnes de plus de 70 ans, dépendantes, isolées, anorexiques,
dépressives, atteintes de polypathologies chroniques ou lors de la survenue d’une pathologie aiguë même
de courte durée.
Les taux de prévalence sont estimés entre 1,6 et 7,4 % pour les personnes vivant au domicile1 et entre 16
et 60% pour les personnes vivant en institution2. Ces taux varient selon l’âge des personnes concernées,
leurs pathologies et les institutions … Au total, le nombre de personnes souffrant de dénutrition est
estimé entre 350 000 et 500 000 pour les personnes vivant à domicile3 et au minimum entre 100 000 et
200 000 pour celles vivant en institution gériatrique.
1.2 Conséquences
¾
Morbidité
La dénutrition est la source de pathologies secondaires, retards de cicatrisation et d’une augmentation de
la durée d’hospitalisation. Les complications les plus fréquemment observées concernent des pathologies
infectieuses (leur fréquence est proportionnelle au niveau de malnutrition observée : 30% pour des gens
ayant un niveau d’albuminémie de 32 g/l et 70% quand le niveau est de 22 g/l4), chutes et fractures du col
du fémur, escarres (survenant d’autant plus souvent que le niveau de malnutrition est plus grand5). La
dénutrition est un facteur aggravant de la maladie d’Alzheimer et accroît la mortalité au cours des
poussées d'insuffisance cardiaque. Elle aggrave aussi l'insuffisance respiratoire chronique, l'insuffisance
rénale chronique et/ou terminale, … Certains déficits cognitifs et des défaillances cardio-vasculaires
peuvent également être induits par l’insuffisance d’apports en certains nutriments (vitamines B,
micronutriments anti-oxydants).
Les complications liées à la dénutrition entraînent souvent des hospitalisations de longue durée, sources
de désafférentation dont la conséquence principale est une impossibilité de retour au domicile et un
placement institutionnel. Le retentissement de la dénutrition sur la qualité de vie est important. Toutefois
les études sur la qualité de vie sont exceptionnelles en gériatrie et on ne dispose en fait que de mesures
très indirectes.
Les consommations de soins induites sont importantes, qu'il s'agisse de soins ambulatoires lorsque le
maintien à domicile demeure possible (soins infirmiers pour la prévention ou le traitement des escarres,
kinésithérapie, soins de nursing, aide à la toilette quand l’état est trop altéré, nutrition entérale à domicile
… ) ou de soins hospitaliers.
1 Alix 1994, Expertise collective INSERM, 1999).
2 Etudes INSEE ; Etude Sullivan1995; expertise collective INSERM 1999.
3 Enquête EURONUT/SENECA, enquête du Val de Marne.
4 SULLIVAN 1990.
5 Lesourd Journal des Plaies et Cicatrisation 2001.
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¾
Mortalité
Le nombre de décès attribuables à la dénutrition est difficile à évaluer. Le taux de mortalité est
proportionnel au niveau de dénutrition observé. Les décès à l’hôpital concernent plus de 50% des gens
âgés dénutris. En institution gériatrique, le taux de décès et de complications est proportionnel au niveau
de malnutrition protéino-énergétique (MPE) observé6. Après hospitalisation aiguë pour insuffisance
cardiaque, le taux de décès est multiplié par 4 en cas de dénutrition associée7. Dans des études de cohorte
nord-américaines, la diminution du taux d’albumine sérique a été associé à une augmentation du risque de
décès à 5 ans (toutes causes), indépendamment du degré d’incapacité et de la présence d’une pathologie
chronique8.
¾
Mortalité évitable
Une part de la mortalité est cependant évitable comme l'ont montré des études mettant en évidence une
réduction nette des conséquences de la dénutrition à l’hôpital9 et plus encore dans des structures
spécialisées10.
¾
Inégalités sociales
La malnutrition protéino-énergétique est beaucoup plus fréquente dans les milieux défavorisés. Sa prise en
charge y entraîne plus souvent une institutionnalisation car les frais ne peuvent être assurés par la famille.
Les inégalités proviennent d’un accès inégal aux aides à domicile, en particulier l’aide au repas, mais aussi
en termes de capacités financières d’achat de produits alimentaires. Actuellement, la prise en charge de
l’alimentation est laissée à la charge du patient quels que soient ses revenus. Les compléments
nutritionnels ne sont pas inscrits au TIPS dans l’indication de la malnutrition du sujet âgé (contrairement à
celle des patients cancéreux).
1.3 Objectif(s) envisageable(s) à 5 ans
¾Réduire de 20% le nombre de personnes âgées de plus de 70 ans dénutries (passer de 350 -500 000
personnes dénutries vivant à domicile à 280-400 000 et de 100-200 000 personnes dénutries vivant en
institution à 80-160 000) ; réduire de 20% la prévalence des personnes âgées ayant un taux d'albumine
sérique inférieur à 35g/l.
1.4 Indicateurs souhaitables pour suivre l’atteinte des objectifs
-Distribution des taux d'albumine sérique chez les personnes de plus de 70 ans (par âge ; sexe, et lieu de
vie, en tenant compte d’un éventuel état inflammatoire).
-Distribution des IMC et des évolutions des poids.
6 SULLIVAN (1990, 1995, 1998)
7 CEDERHOLM, AJCN 1995
8 Corti MC, Guralnik JM, Salive ME, Sorkin JD. Serum albumin level and physical disability as predictors of
mortality in older persons. JAMA 1994;272:1.36-42.
Volpato S, SG Leveille, M Corti et al : The value of serum albumine and high-density lipoprotein cholesterol in
defining mortality risk in older persons whith lower serum cholesterol. J Am. Geriatr. Society 2001 ; 49 : 1142-
1147
9 FERRY Ann.Biol.Clin. 1990
10 LESOURD, Age & Nutrition 1997
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1.5 Besoins de recherche
Quantification du rôle de la dénutrition dans l'aggravation des polypathologies des personnes âgées.
2 Facteurs associés à la prévalence ou aux conséquences
2.1 Facteurs portant sur la fréquence
¾
Déterminants endogènes
Le vieillissement est évoqué comme un facteur de diminution des stimuli de la prise alimentaire.
¾
Déterminants liés aux comportements individuels et aux habitudes de vie
Les habitudes de vie sont peu en cause mais l’isolement (50% des personnes de plus de 80 ans vivant en
ville), les comportements dépressifs (30-50% des personnes de plus de 80 ans) et les démences débutantes
(120 000 nouveaux cas de maladies d’Alzheimer par an) le sont souvent.
¾
Déterminants liés à l’environnement physique et à l'environnement social
Les difficultés physiques restreignent les possibilités d’approvisionnement (> 10-15% des plus de 80 ans).
Ce facteur est potentialisé en cas d’isolement en milieu rural ou d’isolement social en ville. L'importance
de ces facteurs peut être réduite par le développement d'une politique locale d'aide aux personnes âgées.
¾
Déterminants liés au système de san
La dénutrition n’est pas suffisamment perçue comme un problème de santé par les professionnels de
santé ; elle est souvent considérée comme un problème d’alimentation et n'est pas suffisamment prise en
charge par le système de soins sauf lors des complications importantes retentissant sur l’état général.
Par ailleurs, dans le système actuel d’évaluation de l’activité, hospitalière notamment, l’absence de
valorisation de la prise en charge de ces patients est un frein à son développement : si le dépistage de la
dénutrition ne prend pas beaucoup de temps, la recherche de sa cause peut être beaucoup plus longue
(notamment en cas de troubles du comportement alimentaire).
2.2 Facteurs portant sur la gravité du problème
¾
Déterminants liés au système de san
:
Le dépistage de la dénutrition n’est que rarement fait bien qu’il puisse être fait rapidement. La recherche
des causes de cette dénutrition nécessite par contre beaucoup de temps, insuffisamment valorisé dans les
dispositifs de financement actuels. La prise en charge thérapeutique nécessite une approche différente du
traitement d’une pathologie aiguë, et demande également du temps. Les médecins généralistes sont par
ailleurs peu sensibilisés et mal formés.
3 Stratégies d’action
3.1 Description
¾Développer les politiques locales d'aide et de maintien à domicile,
¾Favoriser l'accès des personnes âgées à une alimentation de qualité (en qualité gustative et en densité),
y compris lorsqu'elles sont hébergées en institution (voir PNNS),
¾Favoriser le développement de la nutrition orale et entérale à domicile, et le remboursement des
compléments alimentaires.
¾Établir et diffuser des recommandations de bonnes pratiques sur le dépistage et la prise en charge des
patients à risque de dénutrition auprès des professionnels de santé,
¾Améliorer la formation des personnes intervenant au domicile des personnes âgées et en institution,
¾Développer l'enseignement de la nutrition gériatrique à destination des personnels de santé,
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3.2 Résultats attendus
Les résultats attendus peuvent être approchés par ceux des interventions sur la dénutrition de la
Nutritional Screening Initiative (NSI) aux USA11 et de l’étude de prévention au domicile pour des sujets
fragiles d’H. Payette au Canada12. La NSI a permis de mettre en place un système de dépistage de la
Malnutrition Protéino Energétique (MPE) dans les nursing homes des USA. Les résultats sur le dépistage
sont probants. Par contre, les résultats sur la prise en charge semblent moins concluants, bien que
certaines études montrent l’efficacité d’interventions portant sur les qualités gustatives des aliments ou sur
les conditions de repas13. D’autres enquêtes, y compris françaises, plus ponctuelles, apportent des données
similaires sur le dépistage. Très peu d’études ont étudié l’efficacité de mesures de prise en charge en
institution et moins encore au domicile.
L’étude de H. Payette est centrée sur la prise en charge des personnes âgées fragiles, à risque de MPE au
domicile. L’évaluation de la prise en charge sera faite sur l’évolution de la prévalence de la MPE dans les
populations concernées, sur l’efficacité des traitements entrepris et sur l’évolution de la qualité de vie des
sujets âgés, tout en prenant en compte le coût de cette prise en charge, y compris le temps médical et
paramédical nécessaires. Ces travaux pourraient servir de modèle au développement du dépistage en
France.
D’autres études plus ponctuelles et souvent moins rigoureuses ont montré le bénéfice d’une prise en
charge de certains déterminants de la prise alimentaire en institution. Elles convergent toutes sur
l’insuffisance du dépistage, la prise en compte de l’alimentation dans la prévention en institution et les
difficultés de prise en charge, qui nécessite un travail permanent au jour le jour, travail qui n’est pas
vraiment pris en compte dans l’évaluation du temps des soignants, dès lors qu’il y a un problème de
dépendance alimentaire.
Une étude de prévention réalisée dans 3 villes européennes, dont Toulouse auprès de patients atteints de
maladie d’Alzheimer a montré la préservation possible sur une plus longue durée, non seulement des
capacités fonctionnelles, mais aussi des capacités cognitives. Ce programme européen associe une
formation des malades et des familles, la surveillance du poids et de la consommation alimentaire des
malades et des aidants, des conseils régulièrement dispensés14.
3.3 Conditions préalables à la mise en œuvre
Améliorer la perception sociale du problème de santé
3.4 Indicateurs souhaitables pour suivre la mise en œuvre des actions
A déterminer ultérieurement
3.5 Besoins de recherche sur les actions
A déterminer ultérieurement
11 Fiatarone J Nut Heal Agi 2000 ; 4 : 5
12 Gray-Donald K et al J Am Coll Nutr 1994 ; 13: 277-84 et Payette et al J Am Diet Assoc 2002 : 102 : 1088-95
13 Mathey MF, Siebelink E, de Graaf C, Van Staveren WA. Flavor enhancement of food improves dietary intake
and nutritional status of elderly nursing home residents. J Gerontol A Biol Sci Med Sci. 2001 ; 56:M200-5.
Mathey MF, Vanneste VG, de Graaf C, de Groot LC, van Staveren WA. Health effect of improved meal
ambiance in a Dutch nursing home: a 1-year intervention study. Prev Med. 2001 ; 32:416-23.
14 Lauque S. Et al dans Maladie d’Alzheimer (recherche et pratique clinique) Serdi 2000 : 260-69
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