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N°28
La Gazette
de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique
Octobre - Novembre 2009 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours
Bureau de la SOFOP
Président : J.M. Clavert
1er Vice-Président : C.Morin - 2e Vice Président : C. Bonnard - Futur 2e Vice Président : C. Romana
Ancien Président : J.F. Mallet
Secrétaire Général : J.L. Jouve
Trésorier : P. Lascombes
Membres du Bureau : B. de Billy, S. Bourelle, A. Kaelin, P. Mary, P. Wicart
Editorial SO.F.O.P.
« Tout ce que vous vouliez savoir sur la maladie de
Marfan et sur son pédiatre éponyme »(1) , c’est ainsi
que je titrerais ce numéro de la Gazette. Il n’y a probablement rien à ajouter à ces textes, tous intéressants et instructifs.
Pour tenir mon rôle d’éditorialiste, il me faut trouver
ailleurs que dans la critique ou la dérision.
J’ai donc cherché des personnages illustres touchés
par l’arachnodactylie. JC Léonard et C Morin l’avaient
fait avant moi et donnent Lincoln, Paganini et Rachmaninov. Je ne puis ajouter qu’Amenophis 4.
L’aspect du pharaon monothéiste nous est connu
par les sculptures et les bas-reliefs du musée du
Caire.
Niccolo Paganini est mort en 1840 ; nous n’en avons
donc pas de photographies. Heureusement, Ingres
a fait de lui un magnifique portrait au crayon.
Abraham Lincoln a été statufié assis et il trône ainsi,
magnifique, à Washington au Lincoln Memorial. Je
n’ai pas trouvé de photographie de lui mais les tableaux le représentant, seul ou dans le cadre de ses
activités politiques, sont nombreux.
Rachmanninov a été photographié en mille occasions puisqu’il a vécu jusqu’en 1943.
Ces représentations de nos quatre «Marfan» célèbres ne permettent aucune certitude diagnostique.
Il faut s’appuyer sur certaines particularités physiques connues chez chacun d’eux pour oser parler
de syndrome de Marfan.
Le doute est maximal pour Amenophis, bien sûr. Au
point que l’on a parlé pour lui, autant de Marfan que
de syndromes de Frölich ou de Barraquer Simons.
Lincoln était très grand, 1m93, longiligne avec un
visage allongé et de grandes oreilles. Cela ne fait
pas un diagnostic.
Paganini avait une hyperlaxité importante des
doigts, lui permettant une extraordinaire virtuosité.
« Il imprimait à ses premières phalanges des doigts de
la main gauche qui touchait les cordes un mouvement
de flexion(2) extraordinaire qui le portait, sans que sa
main ne se dérange, dans le sens latéral à leur flexion
naturelle et cela avec facilité, précision et vitesse ».
Fondateur
J.C. POULIQUEN † (Paris)
Editorialiste
H. Carlioz (Paris)
Rédacteur en chef
C. MORIN (Berck)
Membres :
J. CATON (Lyon)
P. CHRESTIAN (Marseille)
G. FINIDORI (Paris)
J. L. JOUVE (Marseille)
Rachmanninov avait la même taille que Lincoln.
Surtout, il avait un écartement des doigts considérable ; sa main gauche pouvait couvrir plus de
treize notes, presque deux octaves. D.A.B Young a
publié sur «Rachmaninov and Marfan’s syndrom»(3)
un article sans conclusion. Il donne cependant à
l’appui du diagnostic la grande taille du musicien,
1m93 comme Lincoln, son nez long et mince dans
un long visage, ses oreilles proéminentes et le peu
de graisse sous-cutanée ! La myopie et les douleurs
dorsales intenses ne peuvent pas être des preuves
des complications ophtalmologiques et rachidiennes de la maladie.
Il n’y a donc que des suspicions rétrospectives de
syndrome de Marfan pour nos quatre célèbres patients.
Pour nous amuser, essayons d’en tirer un peu plus.
Deux d’entre eux furent de grands hommes d’état,
Aménophis 4 et Abraham Lincoln. Aménophis,
contemporain de Moïse et confondu avec lui par
des historiens sérieux, a été, comme lui, un monothéiste militant. Lincoln a sauvé l’unité des USA au
terme de la sanglante guerre de sécession. Est-ce
de la dolichosténomélie qu’ils tiennent leur «envergure» de chefs d’états ? En jouant avec les mots, oui,
bien sûr !
Les deux autres ont été des compositeurs de génie.
Mais ils furent aussi, Paganini comme violoniste,
Rachmaninov comme pianiste, des interprètes de
virtuosité inouïe. La longueur et la laxité de leurs
doigts y était-elle pour beaucoup ? Sans doute, mais
« it was artistic genius, not long hands, that made his
performance so memorable ». (cf. D.A.B. Young)
Rêvons encore aux effets de ces particularités morphologiques. Je me rappelle cet ami chirurgien
ambidextre, qui dessinait au pavillon d’anatomie,
simultanément des deux mains, les os symétriques
comme le sphénoïde ; je ne m’étonnais pas de le voir
le lendemain, en salle d’opération, réussir si bien la
réparation d’une fente labiale bilatérale.
En revanche, cet autre orthopédiste pédiatre, seulement droitier, n’obtenait jamais une perfection
R. KOHLER (Lyon)
P. LASCOMBES (Nancy)
G. F. PENNEÇOT (Paris)
M. RONGIERES (Toulouse)
J. SALES DE GAUZY (Toulouse)
R. VIALLE (Paris)
et le “ GROUPE OMBREDANNE”
Correspondants étrangers
M. BEN GHACHEM (Tunis)
R. JAWISH (Beyrouth)
I. GHANEM (Beyrouth)
Editeur
SAURAMPS MEDICAL
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CS 79525
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Tél. : 04 67 63 68 80
Fax : 04 67 52 59 05
symétrique dans ses ostéotomies pelviennes bilatérales.
Alors, un myope est-il prédestiné à devenir un très
bon micro-chirurgien ?
Et la cyphose d’un autre l’a-t-elle aidé à se pencher
mieux que beaucoup d’entre nous sur les douloureux problèmes de ses petits malades ?
Qui me donnera des réponses ?
Henri Carlioz
(1) Voir le N°24 de la Gazette !
(2) La suite de la phrase prouve qu’il s’agit d’inflexion latérale.
(3) British Med Journal. 293, 26-27, déc. 1986
Edito.........................................................................1
par Henri Carlioz
Qui était-il ? Bernard Jean Antonin
Marfan(1858-1942).............................................2
par Jean-Claude Léonard
et Christian Morin
Le syndrome de Marfan
de l’enfant et de l’adolescent
signes cliniques, suivi et traitement.............6
par Bertrand Chevallier et al.
Le syndrome de Marfan
physiopathologie et apport
de la biologie moléculaire............................. 12
par Chantal Stheneur et al.
Les déviations rachidiennes
dans le syndrome de Marfan....................... 14
par Christian Morin et al.
Les «charnières»
dans le syndrome de Marfan....................... 16
par Vicken Topouchian
Déformations du thorax
dans le syndrome de Marfan....................... 19
par Zagorka Pejin et al.
La hanche et le pied
dans le syndrome de Marfan....................... 23
par Zagorka Pejin et al.
International Society for the Study
of the Lumbar Spine (ISSLS)......................... 25
par Raphaël Vialle
Note complémentaire à l’article
«Qu’auriez-vous fait
dans cette maladie de Blount ?»
par Dimitri Popkov......................................... 27
la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée
à partir de votre ordinateur via notre adresse : www.livres-medicaux.com
Qui était-il ? Bernard Jean Antonin Marfan
(1858-1942)
par Jean-Claude Léonard et Christian Morin
Sa vie
«Je considère ma carrière médicale comme «normale»,
largement favorisée par la chance, en tous cas mille fois moins
importante et intéressante que celle de A.Marfan (son père),
qui tant par son rôle à Paris que par ses œuvres sur l’histoire de
Castelnaudary, constitue une gloire pour notre cité.»
Fig. 1 : portrait du Pr Marfan par Henry Bataille en1892
(Coll. BIUM)
La trame est tissée : la modestie est la marque de notre
brillant confrère, et l’admiration pour son père, médecin,
politicien, et sa région est exprimée avec force.
Bernard Jean Antonin Marfan (Fig. 1), telle est la véritable
identité de cet homme selon l’extrait de l’acte de naissance
fourni aimablement par la mairie de Castelnaudary, est né le
23 juin 1858 à 2 heures du matin à Castelnaudary (Aude), fils
d’Antoine Prosper Marfan docteur en médecine et d’Adelaïde
Thuries sans profession. (Acte de naissance N°142)
Parlons de suite de son père qu’il a admiré : né le 24 Juin
1827 et décédé en 1898, Antoine Marfan était médecin et
également maire de Castelnaudary en 1888 puis député de
l’Aude de 1894 à 1898. Durant son mandat il déposa une
proposition de loi sur les calamités agricoles et les aides à
apporter. On voit déjà l’attrait du père-notable aux multiples
fonctions sur un fils certainement plus paisible et plus
discret. Le portrait du père est toujours présent dans une
des salles de la mairie.
Revenons à notre sujet : Bernard J-A Marfan fait ses études
secondaires dans sa ville natale, décroche le baccalauréat
série lettres et sciences la même année comme cela se faisait
couramment. Malgré les réticences de son père, il s’inscrit
en 1877 à l’Ecole de Médecine de Toulouse, et en 1879
présente le concours de l’externat à Paris dans le service
du Pr. Lasègue. Interne ensuite dans le service du Pr Auger
(1882), puis médecin en 1887 avec pour sujet de thèse : « Troubles et lésions gastriques dans la phtisie pulmonaire. »
2
De cette thèse sera élaborée la loi de Marfan : tout enfant
qui a eu une atteinte tuberculeuse extra pulmonaire initiale,
ganglionnaire par exemple, sera protégé d’une tuberculose
pulmonaire ultérieure.
Les bases de l’immunité acquise sont avancées et serviront
de tremplin pour la vaccination par le BCG.
Il devient agrégé des hôpitaux en 1892, supplée J.J Grancher,
et en 1901 le pionnier de la pédiatrie moderne oriente
son activité vers les enfants et tout particulièrement ceux
atteints de diphtérie, en devenant aux Enfants Malades chef
de service de ce secteur. Il organise la première consultation
de nourrissons en prodiguant des conseils de nutrition et
d’hygiène chaque semaine.
En 1910 il occupe la chaire de thérapeutique ; en 1914 il est
élu à l’Académie de Médecine et la même année la nouvelle
chaire d’hygiène de la première enfance lui est attribuée :
il va lutter maintenant officiellement contre la mortalité
infantile effroyable de l’époque en enseignant sans répit par
la voix et les écrits des principes de diététique et d’hygiène.
En effet en 1880 les chiffres de mortalité infantile en France
étaient de 168 pour 1000 naissances. Il transfère sa chaire
à l’Hospice des Enfants Trouvés (ou des Enfants Assistés,
futur Hopital Saint Vincent de Paul) dés 1920, et fonde avec
Pinard l’Ecole de Puériculture. Durant la même période il
crée la revue Nourrisson et devient Président du Comité
national de l’Enfance, après Strauss. Puis il devient président
de l’Oeuvre Grancher fondée en 1903, initialement appelée
Association de Préservation de l’Enfance par son créateur
Jacques Joseph Grancher (1843-1907).
Comme tout médecin de l’époque où chacun mettait au point
un procédé chirurgical ou un instrument médicochirurgical,
Marfan met par exemple au point la seringue stérilisable en
métal, à piston d’amiante pour huile mentholée (Fig. 2) et
la seringue tout en verre pour huile mentholée. Il préconise
en même temps la ponction péricardique par voie sous
xyphoïdienne et donnera son nom à une technique de
ponction lombaire (Fig. 3).
Nous citerons trois de ses plus illustres élèves : Robert Debré
qui fut son interne aux Enfants Malades en 1906, Eugène
Apert celui du syndrome d’Apert (acrocephalosyndactylie
décrite en 1923) et Benjamin Weill-Halle qui généralisera la
vaccination par le BCG avec Calmette dés 1921.
Marfan prend sa retraite en 1928 alternant les séjours entre
Paris et Castelnaudary.
Pour l’histoire nous rapporterons que le premier à évoquer
le «syndrome de Marfan» est un hollandais d’Utrecht,
H.Jacobus Marie Weve en 1931 car «nul n’est prophète en
son pays…». En 1934, Marfan est récompensé par la Société
Royale Anglaise de Médecine.
Marfan décède le 11 février 1942 à Paris, est inhumé à
Castelnaudary avec les membres de sa famille dont le frère
Louis-Albert décédé en 1952. Nous ne savons rien de sa
famille, épouse ? enfants ?
Qui était-il ? Bernard Jean Antonin Marfan
(1858-1942)
par Jean-Claude Léonard et Christian Morin
Fig. 2 : instruments imaginés par le Dr Marfan : abaisse-langue pour
nourrissons (A), seringue tout en verre (B) et seringue stérilisable en métal, à piston d’amiante (C) pour huile mentholée (in Catalogue des instruments de chirurgie Michel Bruneau 1913- Coll. BIUM)
Son œuvre
Pour synthétiser ses écrits et ses actions nous les classerons
arbitrairement en trois pôles d’intérêt.
1) La pneumologie et principalement la tuberculose, qui
créait une hécatombe dans la population française, pauvre
surtout mais également riche (se rapporter à la création de
l’Hôpital Maritime de Berck par l’Impératrice Eugénie dont le
fils était atteint de tuberculose osseuse). Cette catastrophe
sanitaire avait tendance à endormir l’esprit médical et
à considérer que l’on ne pouvait être que syphilitique,
tuberculeux ou rien. Cependant des esprits critiques et
curieux sont sortis de ce carcan de pensée unique tels Calvé
par exemple et Marfan dont nous conterons la description
du syndrome qui l’a rendu célèbre. Il écrira le chapitre
« Maladies des bronches, maladies chroniques du poumon,
phtisie pulmonaire et maladies du médiastin » dans le livre
collectif de Charcot, Bouchard et Brissaud en 1892. En page
798 il écrit et s’insurge : « la cure à l’air libre et au repos ne
peut être prescrite qu’aux phtisiques qui ont des loisirs et de
la fortune. Pour les phtisiques indigents, elle est impossible à
réaliser ; cela est vraiment lamentable et cruel. Ceux qui font
profession de s’occuper des besoins de la société devraient bien
voir qu’il y a une plaie vive. Il faut, de toute nécessité, créer des
hôpitaux spéciaux pour le traitement des phtisiques pauvres…
mais jusqu’ici l’administration ne parait pas s’être émue de
l’état de choses actuel. On nous dit que l’objection principale
adressée à l’institution des sanatoria pour phtisiques indigents
est de l’ordre sentimental….on prétend qu’il serait inhumain
de faire entrer un malade (riche) dans un établissement sur la
porte duquel on lirait : Hôpital pour phtisiques. Rien n’oblige
d’abord à décorer un portique de cette inscription. » !!!
2) Les maladies infectieuses, en particulier la diphtérie
(1905), Les affections des voies digestives dans la première
enfance (1923), Les affections des voies respiratoires et les états
de dénutrition de la première enfance… A côté il publie des
Fig. 3 : technique de la ponction lombaire avec en B la méthode de Marfan, en A celle de Quincke et en C celle de l’auteur du livre ( in Chirurgie
opératoire du système nerveux. Tome second : chirurgie de la moelle et
des nerfs d’ Antony Chipault- Coll. BIUM)
écrits sur le Rachitisme (1912, 1928) et les effets bénéfiques
des ultra violets, Les vomissements périodiques avec
acétonémie en 1921, appelé par la suite Maladie de Marfan.
Sans oublier le Traité des maladies de l’enfant en 5 volumes, en
coopération avec JJ Grancher et J Comby en 1897.
3) L’alimentation et particulièrement l’allaitement des petits
enfants : Marfan publie son premier Traité de l’allaitement et
de l’alimentation des enfants du premier âge en 1899, puis en
1938 un article Conseils aux mères pour allaiter, nourrir et élever
leurs enfants. En 1930 dans le Traité de l’allaitement maternel
il prône des évidences de nos jours mais qui, à l’époque,
modifiaient les habitudes : « L’enfant pourra être mis au sein
12 heures après l’accouchement ». On retrouve d’autres
citations sur ce sujet : « la quantité de lait prise à chaque tétée
est variable », ceci étant toujours d’actualité pour ne pas
décourager les mamans. On retrouve également des diktats
utilisés encore dans les années 1970-80 : « Lorsqu’on a acquis
la certitude que le cri est dû aux caprices ou à la gourmandise,
il faut laisser l’enfant crier. », « toutes les émotions dépressives,
surtout lorsqu’elles sont brusques peuvent diminuer ou tarir
la sécrétion lactée, au moins de façon temporaire. La frayeur,
la colère, le chagrin peuvent supprimer la sécrétion lactée ou
même la modifier ou la rendre délétère. »
Poursuivant son combat pour les apports lactés propres,
il conduit à Berlin la délégation française au congrès des
Gouttes de lait en 1911. Rappelons que le premier centre La
Goutte de Lait a été créé à Fécamp en Normandie en 1894
par le Dr Léon Dufour.
Même reportées dans le contexte de la fin du 19ème siècle,
certaines affirmations font sourire : nous avons retrouvé dans
le mémoire d’Agnès Fine intitulé Le nourrisson à la croisée des
savoirs certaines directives ou vérités aujourd’hui désuètes.
Marfan a pris parfois des positions maximalistes : une mère
enceinte ne doit pas allaiter son nourrisson plus de 6 mois
3
Qui était-il ? Bernard Jean Antonin Marfan
(1858-1942)
par Jean-Claude Léonard et Christian Morin
pour ne pas troubler la grossesse en cours, « la menstruation
diminue la sécrétion de lait ou en altère la composition »,
« le lait fourni par les bêtes en période de rut ou atteintes de
nymphomanie est toxique ». A cette époque certains avaient
émis l’idée que le sang des menstruations pouvait contaminer
le lait maternel par un effet rétroactif….Marfan n’a toutefois
pas pris cette direction étrange…mais il écrit toutefois à
propos des nourrices réglées : « Il est possible que le lait de
la période menstruelle renferme des substances de l’ordre des
toxines dont la chimie ne peut déceler la présence ».
Pour en finir avec cette lecture quelque peu sarcastique des
écrits de Marfan nous nous arrêterons avec force sur l’a priori
transmis depuis des siècles à propos des humains aux cheveux
roux. Les romains les tuaient à la naissance, et à l’époque de
Marfan les femmes rousses étaient encore assimilées à des
êtres de sang…et il écrit « les femmes rousses ne doivent être
acceptées (comme nourrices) que lorsqu’on a constaté que leur
transpiration n’exhale pas une odeur forte. » !!!!
Tout ceci peut prêter à sourire, mais rétrospectivement
n’avons-nous pas eu à transmettre auprès des mères et de nos
élèves des pseudo vérités qui se sont révélées obsolètes par
la suite !
Mais Bernard J-A Marfan est indissociable de la maladie qui
est toujours d’actualité et toujours qualifiée d’orpheline,
même si quelques divergences dans la description princeps
apparaîtront.
L’Histoire de Gabrielle
Le 28 février 1896, le Pr. agrégé Marfan présente à la Société
Médicale des Hôpitaux de Paris le cas de « Gabrielle P… (Fig. 4
et 5) âgée de cinq ans et demi. » [1]
Fig. 5 : Gabrielle P…(Coll. BIUM)
La présentation s’intitule : « Un cas de déformation congénitale
des quatre membres, plus prononcée aux extrémités,
caractérisée par l’allongement des os avec un certain degré
d’amincissement. » La description est purement clinique, mais
avec force détails et mensurations de chaque segment de
membre et de phalanges.
A la lecture de l’article on est un peu surpris de lire : « la
déformation des extrémités des membres a été remarquée à la
naissance par la sage femme » puis « par la mère dès les premiers
jours de la vie. » Ceci aura un intérêt par la suite.
Marfan confirme son impression clinique par les dessins des
membres (Fig. 6) en notant : « les déformations sont symétriques,
plus prononcées aux extrémités qu’à la racine des membres ».
Il complète : « l’aspect général (des mains) est celui de pattes
d’araignée. »
Fig. 4 : publication du cas de la petite Gabrielle dans la Semaine Médicale des Hopitaux le28 février 1986 (Coll. BIUM)
Fig. 6 : Dessin des mains et des pieds
de Gabrielle P…(Coll. BIUM)
4
Qui était-il ? Bernard Jean Antonin Marfan
(1858-1942)
par Jean-Claude Léonard et Christian Morin
Plus loin on lit qu’il existe une « rétraction fibreuse des tendons » en
particulier visible dans la région poplitée. Le rachis de Gabrielle
est rectiligne et le crâne est légèrement « dolichocéphale ».
Mais notre confrère est surpris par « l’état d’émaciation » de
l’enfant qu’il appelle « atrophie », par opposition aux séquelles
paralytiques : en effet elle n’a pas d’atteinte neurologique ou
viscérale.
Marfan conclue avec modestie : « En résumé cette fillette est
atteinte d’une déformation congénitale des quatre membres, plus
prononcée aux extrémités, caractérisée surtout par l’allongement
des os, avec un certain degré d’amincissement. On pourrait peutêtre donner à cette malformation le nom de dolichosténomélie…
J’ai tenu surtout à vous présenter un cas qui m’a semblé
exceptionnel. » Gabrielle dans un état pseudo grabataire est
présentée en photographie dans l’article (Fig. 5).
Marfan signifiait par ce mot d’origine grecque que Gabrielle
avait des membres-longs-étroits.
L’histoire de Gabrielle ne s’arrête pas là : en 1902 devant la
même Société Médicale, H.Mery et L.Babonneix [2] présentent
Gabrielle avec des signes cliniques évolutifs : existence d’une
« gouttière médiane et verticale » au niveau thoracique et
une « cyphoscoliose dorso-lombaire d’apparition récente ». En
reprenant les mesures précises de Marfan ils constatent « une
tuméfaction épiphysaire du cubitus et de l’humérus gauches
». L’utilisation récente de la radiographie leur fait croire à
une nouvelle forme d’atteinte osseuse qu’ils appellent «
hyperchondroplasie ». L’hérédosyphilis est pointée et l’enfant
reçoit « des frictions mercurielles et d’iodure de potassium… ».
En fait Gabrielle présente un abcès froid du bras gauche et elle
se retrouve à Berck-sur-Mer. Ces deux médecins ne resteront
pas dans la mémoire médicale.
Gabrielle est décédée de la tuberculose, Marfan le signale
en 1938. Il n’est pas évoqué de troubles cardiovasculaires ou
oculaires.
Nous avons relevé quelques détails à la lumière des
connaissances actuelles concernant la maladie de Marfan et la
description princeps : le caractère congénital des rétractions
en particulier. Beals en 1971 [3] et Hecht en 1972 ont d’ailleurs
imaginé avec 76 ans de recul que Gabrielle présentait
les signes du syndrome Arachnodactylie et Contracture
Congénitale connu maintenant comme syndrome de Beals
ou CCA syndrom (Congenital Contractural Arachnodactyly)
secondaire à des mutations du gène pour la fibrilline 2 sur le
chromosome 5.
Marfan pouvait dormir en paix, seule la biologie avait dissocié
les différentes fibrillines et différencié les deux types d’anomalie
clinique ouvrant le chapitre des maladies du collagène et du
tissu élastique.
La retraite
Amoureux de sa région natale et de ses habitants, il écrit en
1933 Figures Lauragaises paru chez Librairie Académique
Perrin avec des biographies détaillées de Saint Pierre Nolasque,
de Martin Dauch, Sophie de Soubiran, du Général Laperrine.
Il cultive son jardin et aime Venise…
Conclusion
Bernard Jean Antonin Marfan a eu une vie complète marquée
par une ascension professionnelle méritée, fruit d’un combat
permanent contre les maladies de l’enfant, souvent aggravées
par la malnutrition. Il peut sans contestations être reconnu
comme le premier grand pédiatre de notre pays, le père de la
puériculture, flambeau que son élève Robert Debré portera au
plus haut degré.
Régulièrement se tient à Castelnaudary le rendez vous annuel
de l’association des malades atteints de la maladie hétérogène
de Marfan, où interviennent les meilleurs spécialistes.
L’hommage au maître y est régulier, en attendant une
thérapeutique spécifique et pas seulement symptomatique.
Maladie classée orpheline, elle touche toutes les classes
sociales, même si dans la littérature médicale on ne parle que
d’Abraham Lincoln, et des musiciens aux longs doigts comme
Nicolo Paganini ou Sergei Rachmaninov.
Pour rendre hommage à notre maître es pédiatrie, modeste et
humaniste, nous lui dédierons ces quelques mots de Michel de
Montaigne: « C’est une absolue perfection, et comme divine, de
sçavoyr jouyr loiallement de son estre. Nous cherchons d’autres
conditions, pour n’entendre l’usage des nostres, et sortons hors de
nous, pour ne savoir quel y est fait. Si, avons-nous beau monter
sur des eschasses, car sur des eschasses encores faut-il marcher
de nos jambes. Et au plus eslevé throne du monde, si ne sommes
assis que sus nostre cul. Les plus belles vies sont, à mon gré, celles
qui se rangent au modèle commun et humain, avec ordre, mais
sans miracle et sans extravagance. »
Les Essais, III-8
Références
1. Marfan AB. Un cas de déformation congénitale des quatre membres. Bull
Mem Soc Med Hop Paris 1896 ; 13 : 220-7
2. Mery H, Babonneix L. Un cas de déformation congénitale des quatre
membres. Hyperchondroplasie. Bull Mem Soc Med Hop Paris 1902 ; 19 :
671-6
3. Beals RK, Hecht F. Congenital contractural arachnodactyly. J Bone Joint
Surg 1971 ; 53A : 987-93
5
Le syndrome de Marfan de l’enfant
et de l’adolescent
signes cliniques, suivi et traitement
par Bertrand Chevallier*, Magda de Saint Jean,
Chantal Stheneur et Guillaume Jondeau
Le Syndrome de Marfan (SM) est la plus fréquente des affections héréditaires du tissu conjonctif après l’ostéogénèse
imparfaite. L’atteinte musculo-squelettique est au premier
plan de l’expression clinique du syndrome. Elle constitue un
ensemble de symptômes physiques formant un des critères
majeurs du diagnostic avec l’atteinte cardiaque et oculaire.
Le diagnostic précoce du SM dès l’âge pédiatrique permet
de mettre en place une série de mesures préventives qui ont
permis d’allonger significativement l’espérance de vie de ces
patients et de prévenir la survenue de handicaps et de déficits.
Le repérage précoce des enfants et des adolescents passe par
une bonne connaissance des divers symptômes devant faire
évoquer la possibilité d’un SM [1] .
Les signes cliniques
L’atteinte musculo-squelettique sera abordée ultérieu-
rement.
L’anomalie phénotypique la plus évocatrice est l’excès de
croissance squelettique des membres. Une réduction du tissu
musculaire et adipeux accentue l’aspect de membres longs et
graciles (dolichosténomélie).
La taille des enfants et adolescents atteints du SM est élevée et
se situe en moyenne à + 2 DS sur les courbes de référence. Les
adultes atteignent une taille moyenne de 187 cm (hommes)
et 176 cm ( femmes). Peu de patients dépassent 2m (hommes)
ou 185 cm(femmes) [2]
La dolichosténomélie est une caractéristique clinique fondamentale du SM : différentes méthodes de calcul sont possibles : la plus simple est le calcul du rapport de l’envergure des
membres supérieurs sur la taille. Normalement proche de 1
dans la population générale, il atteint 1,03 chez plus de 80%
des sujets atteints du SM et devient un critère majeur lorsque
le rapport atteint ou dépasse 1,05.. Le rapport segment inférieur/segment supérieur, classiquement proposé, est plus délicat à apprécier.
L’atteinte neuro-méningée. L’ectasie durale fait partie
des signes majeurs du SM quelle que soit la classification utilisée (Berlin ou Gand). L’ectasie durale peut être repérée par
une simple radiographie du rachis lombo-sacré de profil : elle
est responsable d’une érosion du mur vertébral postérieur .
Celle ci se traduit typiquement par une image radiologique
de scalopping vertébral postérieur : aspect concave du bord
postérieur des corps vertébraux . Seuls, l’IRM ou le scanner
permettent de confirmer ou d’infirmer la dilatation du cul de
sac dural. Une étude récente effectuée chez l’adolescent et
l’adulte au moyen d’une IRM systématique montre que l’ectasie durale est observée chez 92% des SM. Dans notre série
de patients pédiatriques, nous n’avons jamais pu mettre en
évidence d’ectasie sur des signes radiologiques avant 6 ou 7
ans. La traduction neurologique clinique d’une ectasie durale
est généralement absente. Elle est cependant souvent associée à des douleurs dorsales, des céphalées ou des douleurs
des membres inférieurs [4] Rarement l’ectasie est importante
*Service de Pédiatrie et Centre de référence national du Syndrome de Marfan
CHU Bichat, APHP
6
au point de réaliser un méningocèle qui peut être responsable
d’une compression des structures de voisinage.
Les signes cutanés et tégumentaires
La survenue de vergetures chez les sujets porteurs du SM est
fréquente, à partir de la dixième année. Les localisations privilégiées sont les hanches, les fesses, la face interne des cuisses
et les seins chez les jeunes filles. La constatation de vergetures
linéaires, horizontales, médianes en regard du rachis dorsal ou
dorsolombaire est l’élément caractéristique mais ce type de
vergetures est également retrouvé chez des sujets de grande
taille constitutionnelle. Une cicatrisation imparfaite (gaufrée),
des ecchymoses faciles, une érythrocyanose des mains et des
pieds sont rapportées mais ne semblent pas spécifiques. La
survenue plus fréquente d’hernies (inguinales, ombilicales,
diaphragmatiques, ou sur cicatrice opératoire) est retrouvée
chez 20 % des enfants et adolescents atteints.
Les signes pulmonaires
Un pneumothorax récidivant peut révéler le SM : la préexistence de bulles apicales radiologiquement décelables n’est
pas constante. La scoliose et les déformations thoraciques, en
carène ou en entonnoir peuvent entraîner rarement un syndrome restrictif invalidant.
Les signes oculaires
L’atteinte oculaire est une atteinte majeure du SM. Elle peut
démarrer tôt dans la vie, dès les premières années. L’ectopie
du cristallin, manifestation majeure, est l’un des signes qui
peuvent révéler le SM. Le suivi des anomalies, la prévention
des complications oculaires doivent éviter les graves séquelles
ophtalmologiques du SM que sont la cécité par décollement
de la rétine ou bascule du cristallin. La prise en charge de l’atteinte oculaire permet à l’enfant des apprentissages satisfaisants.
Physiopathologie
La fibrilline rentre surtout dans la composition des fibres zonulaires (quasi exclusivement constituées de la fibrilline-1, codée par le gène FBN-1) et de leurs attaches sur l’équateur du
cristallin. En dehors de cette localisation principale, la fibrilline
est également présente dans d’autres structures de l’œil.
Anomalies de la courbure cornéenne
La kératométrie moyenne d’une cornée standard est de 7,7
mm ou 43 dioptries (43D). La cornée des patients atteints de
syndrome de Marfan est souvent plate avec des valeurs inférieures à 40D (ce qui correspond aux rayons de courbure
élevés. D’autres associations, quoi que plus rares, entre les
anomalies de la courbure cornéenne et le syndrome de Marfan, ont été rapportées comme le kératocône (amincissement
progressif, non inflammatoire du stroma cornéen, entraînant
un astigmatisme majeur et évolutif ) ou la mégalocornée (diamètre cornéen supérieur ou égale à 13mm ou supérieure à 12
mm avant l’âge de 1an) [5]
Le syndrome de Marfan de l’enfant
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Chantal Stheneur et Guillaume Jondeau
Particularité de l’épaisseur de la cornée
Les sujets atteints de syndrome de Marfan ont souvent une
cornée fine avec les valeurs de la pachymétrie (mesure de
l’épaisseur de la cornée) basses, inférieures à 500µm. La seule
conséquence clinique pourrait être une non éligibilité de ces
patients pour une éventuelle chirurgie réfractive cornéenne.
Troubles de la réfraction
* Myopie
Dans le syndrome de Marfan, la myopie est fréquente, avec, de
plus, une incidence importante des myopies fortes (supérieures à -6,5D). Elles sont dues soit à une longueur du globe oculaire trop important, induit par une croissance exagérée (myopie axile) soit à un indice de réfraction trop fort des milieux
intraoculaires (myopie d’indice). La myopie d’indice résulte
le plus souvent d’un déplacement postérieur du cristallin au
cours d’une ectopie cristallinienne, voire d’une modification
de la courbure du cristallin (sphérophakie ou microsphérophakie) [6]
* Complications des myopies fortes axiles
- Anomalies choroïdiennes et rétiniennes :
Les lésions de dégénérescence myopique sont dues à un processus d’amincissement choroïdien et peuvent aller jusqu’à la
disparition complète de la choroïde. Ces lésions peuvent être
associées à des ruptures (craquelures) de la membrane de
Bruch pouvant, elles-mêmes se compliquer d’hémorragies et
de développement de néovaisseaux.
- Lésions du pôle postérieur :
Les atteintes maculaires (centre de fixation de la rétine) grèvent le pronostic visuel. Aux stades avancés, la région maculaire est touchée par une atrophie choriorétinienne complète.
- Lésions périphériques :
Leur fréquence est de 8 à 10 % dans les yeux forts myopes et
certaines entre elles sont susceptibles de provoquer un décollement de rétine (déchirures, palissades). Leur détection
se fait au cours de l’examen du fond d’œil, et leur traitement
consiste à une photocoagulation au laser Argon. La myopie
forte est associée à un risque accru de décollement de rétine,
qui, chez des patients atteints de syndrome de Marfan devient
souvent bilatéral (entre 60 et 70 % de décollements de rétine
traités) [7]
- Glaucome chronique à angle ouvert :
La myopie forte induit une fréquence plus importante du
glaucome chronique à angle ouvert.
Cataracte
La myopie forte se complique plus souvent de la cataracte,
donc le traitement chirurgical est plus difficile chez des sujets
atteints de la maladie de Marfan du fait de la fragilité zonulaire
potentiellement compliquant le geste chirurgical.
Anomalies orbitaires
L’enophtalmie (globes oculaires enfoncés) et l’orientation antimongoloïde des fentes palpébrales sont des signes classiques
bénins rentrant dans le cadre de la dysmorphie faciale du syndrome de Marfan.
Troubles oculo-moteurs
L’association du strabisme et de la forte myopie est classique,
non spécifique des fibrillinopathies et se rencontre également
chez des patients atteints du syndrome de Marfan.
Anomalies de l’uvée
- Anomalies iriennes :
Il s’agit essentiellement de l’atrophie du dilatateur irien ce qui
induit un myosis et des difficultés à obtenir une mydriase lors
de l’examen du fond d’œil.
- Anomalies choroïdiennes :
Certaines des anomalies choroïdiennes sont acquises comme
l’atrophie dans les myopies fortes tandis que d’autres sont
congénitales, à savoir le colobome choroïdien, la persistance
de l’artère hyaloïde, allongement des procès ciliaires et l’élargissement de la base du vitré.
Anomalies du cristallin
Les atteintes cristalliniennes peuvent être présentes à la naissance (congénitales) ou ne se révéler que plus tard, toujours
avec un risque d’entraîner de graves conséquences [8]
- Sphérophakie et microsphérophakie :
Le cristallin est de petite taille et de forme sphérique, avec,
pour conséquence, une myopie de courbure cristallinienne
(myopie d’indice).
- Ectopie cristallinienne :
La prévalence de l’ectopie cristallinienne atteint 70 % dans
le syndrome de Marfan et elle constitue le signe ophtalmologique majeur. Néanmoins, l’ectopie cristallinienne familiale
se rencontre également chez des patients qui ne remplissent
pas de critères systémiques de la maladie de Marfan. Après la
dilatation pupillaire, l’examen montre le cristallin déplacé le
plus souvent vers le haut (ectopie supérieure) à la différence
de l’ectopie inférieure au cours de l’homocystinurie. L’ectopie
du cristallin peut être également associée à la microsphérophakie. La position anormale du cristallin entraîne un astigmatisme majeur, souvent évolutif et difficilement compensé par
une correction optique.
- Colobome cristallinien :
Se présente comme une encoche de la partie inférieure de
l’équateur du cristallin.
Les signes cardio-vasculaires
L’atteinte cardiaque observée au cours du syndrome de Marfan associe essentiellement une dilatation de l’aorte initiale
qui risque de se compliquer de dissection, de rupture, et de
régurgitation aortique rarement massive, et d’autre part une
atteinte valvulaire mitrale par prolapsus qui peut également
se compliquer de régurgitation, le plus souvent modérée.
Suivant l’âge auquel est rencontré le syndrome, les signes
qui dominent la scène diffèrent. Les formes néonatales sont
en fait très rares si bien que le problème de beaucoup le plus
fréquent est celui de l’enfant ou l’adolescent qui est double :
1) poser le diagnostic devant des signes incomplets, car les
signes cardio-vasculaires apparaissent au cours de la vie et témoignent d’une « fatigue » des tissus, et 2) initier le traitement
7
Le syndrome de Marfan de l’enfant
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préventif de la dilatation aortique, basé sur les béta-bloquants
et la surveillance échocardiographique du diamètre aortique ;
la chirurgie est rarement nécessaire à cet âge. Dans la série du
John Hopkins, les patients de moins de 18 ans en représentaient que 11% des patients Marfan opérés (26 sur 245) [9]
L’atteinte aortique
- Risques de l’atteinte aortique
* Insuffisance aortique
L’insuffisance aortique résulte du déplacement des valvules
aortiques semi-lunaires par la déformation de la racine de
l’aorte sur laquelle s’appuient les attaches des valvules. L’insuffisance aortique croit donc généralement avec la dilatation.
* Dissection de l’aorte
La dissection de l’aorte descendante est une complication plus
rare du syndrome de Marfan (30 de 415 Marfan dans notre série, soit 7,2 %, et toujours chez des adultes). Dans ¾ des cas
elle correspond à l’extension d’une dissection de l’aorte ascendante, laquelle a justifié un traitement chirurgical en urgence.
Cette complication est surtout observée chez les adultes jeunes, à 33 ans en moyenne dans notre série, et nous n’avons observé qu’un cas de dissection aortique chez l’enfant. L’attitude
thérapeutique va donc être préventive, avec la limitation des
sports et le traitement béta-bloquant. La surveillance échocardiographique régulière doit permettre de dépister une dilatation d’une aorte jusque là stable : l’examen doit alors être
répété, le diamètre doit être confirmé au besoin par une autre
technique d’imagerie et il faut considérer l’intervention avant
que la dissection ne survienne [11]
L’atteinte mitrale
L’atteinte mitrale est fréquente, mais se limite généralement à
un prolapsus mitral avec fuite minime ou modérée. L’évolutivité de cette pathologie est généralement modérée. Le remaniement de la valve est souvent moins marqué que lors d’une
maladie de Barlow habituelle, même s’il arrive qu’un aspect
franchement myxoide soit retrouvé. Son traitement repose
surtout sur la prévention de l’endocardite d’Osler.
Fig. 1 : technique de mesure du diamètre aortique sur une coupe parasternale
échocardiographique (les mêmes précautions doivent être respectées avec
d’autres techniques d’imagerie). La mesure est perpendiculaire au grand axe du
vaisseau, incluant la paroi antérieure et non la paroi postérieure, et le diamètre
maximal est souvent observé au niveau des sinus de Valsalva alors que le diamètre au dessus est normal. (Ao aorte, VG: ventricule gauche, OG: oreillette gauche)
Surveillance et traitement
- Topographie
La dilatation est donc initialement limitée à la partie initiale de
l’aorte au niveau des sinus de Valsalva (en « bulbe d’oignon »),
d’où l’importance de mesurer le diamètre aortique de façon
standardisée, perpendiculaire au grand axe du vaisseau, habituellement sur une coupe échocardiographique parasternale
grand axe du ventricule gauche (Fig. 1).
La surveillance annuelle du squelette s’impose pendant toute la phase de croissance staturale car l’ensemble
des manifestations sont évolutives tout au long du développement de l’enfant et de l’adolescent. Cette surveillance
comprend une mesure régulière de la taille, une évaluation
de la maturation osseuse, du développement pubertaire, de
la statique rachidienne, des déformations thoraciques et des
pieds.
- Histoire naturelle de la dilatation aortique
La dilatation apparaît progressivement au cours de la vie, et
chez la plupart des patients atteints de forme classique, le
diamètre aortique n’est que peu supérieur aux limites supérieures des valeurs normales ; par ailleurs, les valeurs normales
sont difficiles à établir chez les enfants. Les valeurs normales
publiées par Roman restent la référence [10]. Dans notre population, une dilatation de l’aorte initiale est présente chez
95% des enfants, mais la spécificité de ce signe est faible (79 %)
illustrant également la difficulté d’affirmer la valeur pathologique d’une dilatation modérée.
La surveillance de la taille par des mesures annuelles dont
les points sont indiqués sur une courbe de référence permet
d’apprécier la vitesse de croissance et le gain statural annuel.
Une évaluation de la maturation osseuse par la mesure de
l’âge osseux permet entre 7 et 8 ans chez la fille et entre 9 et
10 ans chez le garçon une estimation de la taille prédictive.
Différentes méthodes de taille prédictives (TP) peuvent être
utilisées mais les résultats préliminaires d’une étude menée
au sein de notre consultation multidisciplinaire montre que
les tables de Bayley-Pinneau sont les plus précises. Les indications de traitement hormonal visant à réduire la taille finale
8
Le syndrome de Marfan de l’enfant
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sont rares dans le SM mais peuvent dans certains cas se poser
notamment chez des filles dont la TP dépasse 185 cm : l’induction d’une puberté avancée (vers 9 ans) ou l’accélération d’une
puberté démarrée par un traitement oestro-progestatif sont
deux stratégies envisageables après avoir vérifié par un bilan
métabolique et de la coagulation l’absence de contre-indications à ce type de traitement hormonal. Quelques observations de traitement par un analogue de la somatostatine [12]
lors de la puberté ont permis une réduction de 4 a 8 cm selon
les auteurs : quelques effets indésirables digestifs ( nausées,
douleurs abdominales, lithiase vésiculaire) sont rapportés.
Les traitements des déformations rachidiennes sont abordés
dans un chapitre spécifique cette Gazette.
Le suivi et les traitements oculaires
La myopie en tant que telle, peut être à l’origine de complications lorsqu’elle est qualifiée de forte (au-delà de -6 à -8 Dioptries) : fragilité rétinienne périphérique, provoquant des déhiscences (trous, déchirures, etc…) et pouvant se compliquer de
décollements de rétine. Un suivi régulier permet de repérer les
premiers signes, évitant les complications pouvant entraîner
une perte de la vue.
Le traitement chirurgical de l’ectopie
Le principe est de retirer le cristallin. L’importance du déplacement, le retentissement sur la vision sont autant d’indications
formelles. La correction de la vue après ablation du cristallin
est variable pour chaque patient, en fonction de son âge, de
ses besoins, et des caractéristiques de ses yeux : plusieurs options sont possibles : a) corriger la puissance du globe par des
lunettes à verres progressifs. Le problème est que les verres
risquent d’être très épais, peu esthétiques, et que la vision risque d’être très basse sans la correction portée. b) port de lentilles de contact pour la vision de loin, et en ajoutant une paire
de lunettes pour la vision de près. c) implant en avant de l’iris :
généralement dans le même temps opératoire. d) implant
derrière l’iris : c’est la solution la plus satisfaisante lorsqu’elle
est mise en place, car la plus stable à long terme, et la plus
protectrice vis-à-vis de la cornée [13].
Les traitements cardio-vasculaires
Le traitement de la dissection de l’aorte doit être préventif. Il
repose sur l’éducation du patient, les béta-bloquants, la surveillance échocardiographique régulière et la chirurgie de
remplacement de l’aorte préventive.
Le traitement médical
Repose sur une limitation des sports, le traitement béta-bloquant et éventuellement la prévention de l’endocardite.
il existe une classification des sports par l’American College
of Cardiology qui peut être utilisée pour guider les patients
(Tableau 1)
Tableau 1 :
Les sports et le Marfan
Les 2 grands types de sport
• Les exercices dynamiques (isocinétiques) s’accompagnent d’une modification de la longueur des muscles et d’un mouvement des articulations, mais la force intramusculaire générée est peu importante. La marche, la natation en sont des exemples. Au cours de ces efforts, il faut que
l’oxygène libéré au niveau du muscle squelettique qui participe à l’exercice soit maximal. Les vaisseaux périphériques se dilatent, si bien que la
pression artérielle s ‘élève peu malgré l’augmentation du débit cardiaque.
La pression appliquée sur la paroi aortique n’est donc que peu élevée.
• A l’opposé, les efforts statiques (isométriques) supposent une grande
force avec peu de mouvement. L’haltérophilie en est l’archétype. Au cours
de ces efforts très intenses de courte durée, la compression musculaire
empêche la dilatation des vaisseaux qui sont dans le muscle. La pression
artérielle augmente beaucoup, d’autant plus que la masse musculaire impliquée dans l’effort est importante, et que l’effort est intense. La pression
appliquée sur la paroi aortique est donc très élevée, ce qui favorise la dilatation et la dissection aortiques.
Au cours de la maladie de Marfan les sports risquent :
• De favoriser la dilatation aortique et sa dissection si on ne respecte
pas les règles ci dessous, et ce d’autant plus qu’on ne prend pas de bétabloquants (qui vont limiter l’augmentation de fréquence cardiaque et de
pression artérielle au cours de l’effort).
• De favoriser une luxation du cristallin, par les chocs et les accélérations et décélérations brutales.
• De compliquer les problèmes orthopédiques (même les personnes
qui ne présentent pas d’hyperlaxité… ont des problèmes orthopédiques
du fait des sports).
Il est donc la règle de recommander :
• De faire des sports sans esprit de compétition.
• Limiter les arrêts brutaux, les chocs avec les autres joueurs.
• Se limiter à 50% de la capacité maximale.
• Éviter les sports isométriques. Porter plusieurs fois de petites charges
est préférable à porter une fois une grosse charge.
• Éviter de tester ses limites.
Voici une liste des sports et leur degré de contre-indication dans votre
cas.
Autorisés sans restriction :
Golf – Billard – Bowling – Cricket –Tir à la carabine – Tir à l’arc- Yoga – Taï
chi.
Autorisés en dilettante :
Ping-pong – Marche – Footing – Bicyclette – Natation – Plongée – Equitation – Voile – Baseball – Volleyball – Danse.
Autorisés avec les enfants :
Football – Tennis en double – Jeux de volants.
Interdits :
Lever de poids – Musculation – Bobsleigh – Luge – lancer de marteau
– Sports Martiaux – Escalade – Ski nautique – Planche à voile – Escrime
– Saut en hauteur – Rodéo – Rugby – Sprint – Ski de descente – Squash –
Tennis – Basket – Hockey – Boxe – Combat – Décathlon – Canoé - Kayak
– Course automobile – Course de moto – Badmington – Gymnastique –
Step – Reeboock – Athlétisme – Aviron.
- Réduction des activités sportives
Le patient doit éviter les efforts au cours desquels la pression
artérielle systolique et donc la contrainte appliquée sur la racine de l’aorte s’élève brutalement et de façon importante ;
9
Le syndrome de Marfan de l’enfant
et de l’adolescent
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- Les β-bloquants diminuent la vitesse d’éjection aortique et
ainsi la vitesse de distension de l’aorte, et probablement surtout la fréquence (Fig. 2). Leur bénéfice a été confirmé par une
étude randomisée contre placebo en simple aveugle, réalisée
par l’équipe de l’hôpital John Hopkins, chez 70 patients de
plus de 12 ans (14). Chez les enfants, aucune étude n’a définitivement établi un bénéfice équivalent, mais Il semble logique
de protéger l’aorte avant qu’une dilatation (qui témoigne déjà
d’un remaniement important de l’aorte) ne soit survenu, dès
que la fragilité de l’aorte est établie. Le bénéfice des béta-bloquant est établi y compris pour les patients dont le diamètre
aortique est initialement normal. La molécule généralement
utilisée est l’atenolol, à la dose de 100mg chez l’adulte. Le
traitement β-bloquant doit être poursuivi après chirurgie de
remplacement de l’aorte ascendante, car l’ensemble de l’aorte
est modifiée par la maladie et une dissection de l’aorte descendante reste possible.
Fig. 2 : bénéfice du traitement béta-bloquant sur la dilatation aortique. En ordonnée, le rapport entre le diamètre mesuré et le diamètre théorique est illustré, en
abscisse, la durée de suivi en mois. Quelque soit le diamètre initial, son augmentation au cours du temps est ralentie par le traitement béta-bloquant (les 2 patients
isolés par une flèche ne prenaient pas leur traitement).
Il a été montré récemment que certaines caractéristiques de
la maladie ressortent d’une signalisation hyperactive dans la
voie moléculaire du facteur de croissance transformant bêta
ou TGFß. En se servant d’un modèle du syndrome de Marfan
chez des souris, Habashi note qu’une augmentation de la signalisation TGFß accompagne la formation d’anévrysmes de
l’aorte. Dans cette étude, l’hypotenseur losartan, qui peut bloquer la signalisation TGFß, a rétabli la structure normale de
la paroi aortique même après la manifestation d’anévrysmes
chez les souris. Plusieurs études cliniques et échographiques
10
prospectives et multicentriques en cours visent à démontrer
l’efficacité de cette molécule sur le Marfan humain [15]
Traitement chirurgical
- L’intervention sur l’aorte
* Le traitement chirurgical repose sur le remplacement de l’aorte
ascendante. Dans la série chirurgicale de Gillinov [16]. La dilatation aortique était la principale cause de chirurgie chez les
enfants (81 %), et le diamètre aortique préopératoire allait de
5 à 10 cm. L’intervention de Bentall consiste à remplacer l’aorte
ascendante et la valve aortique par un tube de dacron dans lequel a été cousue une valve prothétique généralement mécanique. Les coronaires sont réimplantées ensuite dans le tube
en Dacron aortique de préférence directement. On peut tenter de conserver la valve aortique native lors du replacement
de l’aorte ascendante en dehors du contexte d’urgences (intervention de Yacoub ou de Tyrone David). Ces interventions
comprennent une résection complète de l’aorte ascendante,
et ne laissent aucune collerette aortique au dessus des valves.
* La surveillance après l’intervention
Après remplacement de l’aorte ascendante, les patients justifient toujours d’une surveillance régulière : comme il est souligné plus haut, c’est l’ensemble de l’aorte qui est fragile chez
les patients présentant un syndrome de Marfan. En conséquence :
1) Le traitement β-bloquant doit être poursuivi après l’intervention. Ce traitement est encore plus impératif lorsqu’une
dissection de l’aorte a touché l’aorte descendante qui n’a très
généralement pas été remplacée, au moins d’emblée.
2) L’aorte doit être surveillée par un examen permettant de la
visualiser dans son intégralité, tels que le scanner spiralé ou
la RMN, à réaliser dans des centres habitués à la mesure des
paramètres aortiques. On peut proposer une surveillance tous
les 2 ans en l’absence de dissection ou de dilatation importante, surveillance à renforcer en cas de complication.
3) Le traitement anticoagulant doit être poursuivi en cas de
prothèse mécanique aortique en obtenant un INR entre 2 et 3.
4) La prévention de l’endocardite doit être réalisée comme
pour tout patient valvulaire.
- L’intervention sur la valve mitrale
L’intervention sur la valve mitrale n’est nécessaire que chez
une minorité des patients présentant un syndrome de Marfan et un prolapsus valvulaire. Il est presque toujours possible
de faire une plastie valvulaire. Chez les enfants, les formes nécessitant la chirurgie sont très rares (10 enfants dans la plus
grande série mondiale) Quelque soit la chirurgie réalisée, il est
important de suivre régulièrement les enfants, un grand nombre nécessiteront une réintervention.
Prise en charge psychologique [17]
Le SM induit un grand nombre de problèmes psychologiques
dont il faut tenir compte lors de la consultation. Une histoire
familiale douloureuse (père ou mère décédé), la multiplicité
Le syndrome de Marfan de l’enfant
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des interventions chirurgicales proposées ou prévues (œil,
coeur, squelette), l’acceptation difficile de ses particularités
physiques (grande taille, lunettes épaisses, voussure thoracique), l’interdiction de toute activité sportive, la fatigabilité
importante concourent à faire de l’enfant porteur d’un SM
un enfant différent, dans son aspect, son comportement, ses
activités. Le retentissement psychologique est certain et justifie un soutien régulier. Les explications fournies sur la maladie, sa prise en charge, la fixation de repères permettent
à l’enfant et l’adolescent de comprendre et de participer à
la prise en charge thérapeutique. Un soutien psychomoteur
permettant de corriger les anomalies de la psychomotricité
fine doit être mis en place avant l’entrée en CP. Une orientation professionnelle doit être discutée avec l’enfant et sa
famille afin d’éviter les professions « trop physiques ».
Conclusions
L’atteinte squelettique du SM est souvent au premier plan
chez l’enfant et représente la principal signe d’appel en dehors des histoires familiales évocatrices. La qualité de vie des
enfants et adolescents porteurs du SM passe par une prise
en charge adaptée dès le plus jeune âge, la correction des
troubles fonctionnels et anatomiques. Le pronostic reste à
l’atteinte cardio-vasculaire et à ses complications. La mise
en place d’un traitement préventif cardio-vasculaire et d’un
suivi régulier devrait progressivement permettre une espérance de vie la plus proche possible de la population générale [18]. L’accompagnement de l’enfant, médical, psychologique et social est essentielle pour son développement,
l’acceptation de sa maladie et son choix éclairé d’une orientation professionnelle adaptée à sa situation.
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Le syndrome de Marfan
physiopathologie et apport de la biologie moléculaire
par Chantal Stheneur, Bernadette Oberkampf, Bertrand Chevallier,
Guillaume Jondeau et Catherine Boileau*
Le syndrome de Marfan (SM) est une maladie rare (1/50001/10000 naissances) autosomique dominante, témoin dans
la grande majorité des cas d’une mutation du gène de la fibrilline de type 1 [1]. Il est généralement admis que sa pénétrance est complète mais son expressivité variable [2]. C’està-dire que tout sujet présentant une mutation est malade
mais que les signes cliniques et la gravité sont variables.
La fibrilline de type 1
Le gène FBN1 est localisé sur le chromosome 15, en 15q21.
Sa taille est très grande : 235kilobases. Le gène est fragmenté en 65 exons codants et 3 exons non codants. Il code
pour un seul ARNm de 10 kb qui lui-même code pour une
protéine de 2871 acides aminés. Au plan structural, la protéine fibrilline-1 est constituée de 47 domaines présentant
des homologies avec un facteur de croissance : l’Epidermal
Growth Factor et de 8 modules ayant une homologie avec la
protéine de liaison du Transforming Growth Factor β (Fig. 1).
3
6
9
11
16
21 24
32
37 41
50
57
63
exons
NH2
COOH
module «EFG-like»
module «cb EFG-like»
module «TFG β-bp»
module «hybride»
région riche en proline
module «LTBP-like»
module «Fibuline-like»
Fig. 1 : schéma de la fibrilline de type 1 et de ses différents modules
Aucune fonction n’est encore connue pour ces modules mais
il est possible qu’en cas d’absence de la protéine fibrilline-1,
le TGFβ se retrouve sous forme libre dans la matrice extracellulaire et soit donc plus actif. [3]. En effet, une activation de
la voie de signalisation du TGFβ a été mise en évidence dans
le modèle animal de souris Marfan. Cette activation a été retrouvée dans le tissu valvulaire mitral et dans le poumon (4).
En cas de traitement de ces animaux par des anticorps anti
TGFβ, il existe une reconstruction des tissus lésés. Aussi, le
TGFβ joue-t-il probablement un rôle important dans la physiopathologie du syndrome de Marfan, mais des études plus
poussées ne nous ont pas permis de mieux comprendre son
mécanisme exact.
En plus de son rôle de « capteur du TGFβ, la fibrilline de type
1 a un rôle de maintien de la matrice extracellulaire. Plusieurs protéines de fibrilline-1 s’associent pour former des
macroaggrégats complexes: les microfibrilles, qui sont importantes pour l’intégrité et l’homéostasie des tissus élastiques et non élastiques.
Les mutations de la fibrilline
Plus de 560 mutations ont été identifiées dans le gène FBN1.
Elles sont réparties sur l’ensemble du gène, sans présence de
localisation plus fréquente sauf pour les formes néonatales
dont les mutations sont surtout localisées entre les exons
24 à 32. Les mutations sont essentiellement privées, c’est*Service de pédiatrie, Hôpital A. Paré et centre de référence national du syndrome
de Marfan CHU Bichat, APHP.
12
à-dire que chaque famille présente sa propre mutation. La
recherche d’une mutation au sein du gène est donc longue
et difficile car il faut le séquencer en entier. De plus beaucoup de mutations sont des mutations faux sens : un acide
aminé est remplacé par un autre. Or, il est très difficile de
déterminer sur une séquence protéique si ce changement
d’acide aminé aura une conséquence fonctionnelle sur la
protéine ou si cela est juste une variante de la normale. Aussi
le conseil génétique est-il particulièrement compliqué dans
cette maladie.
Relation génotype-phénotype
Il n’existe pas actuellement de véritable corrélation génotype-phénotype malgré l’étude de plus de 1000 proposants
avec mutation identifiée, réunis dans une base de données
internationale [5].
La région située entre l’exon 24 et l’exon 32 est globalement
associée à des formes plus sévères de la maladie. Mais, dans
cette même région, il existe des mutations associées à des
formes adultes classiques, voire à une ectopie du cristallin
isolée. De plus, une même mutation peut être associée à
des phénotypes très différents allant d’une atteinte oculaire
ou squelettique isolée à une forme complète du syndrome,
c’est ce que l’on appelle l’expressivité variable. Il existe donc
un groupe de pathologies regroupées sous le terme de fibrillinopathies de type 1 composées de patients ayant une
mutation dans le gène FBN1 mais ne présentant que peu de
signes du syndrome de Marfan. Pour ces patients, le risque
de complications cardiaques n’est pas clair. Actuellement
nous les traitons et les surveillons comme des patients atteints de syndrome de Marfan.
Les autres gènes
Depuis des années, une famille française, avec de nombreux
membres, a été étudiée par notre groupe. Dans cette famille,
un nombre important de parents présentait un SM, avec la
particularité clinique d’avoir peu ou pas d’atteinte oculaire.
Le gène de la fibrilline de type 1 a d’abord été exclu, puis
la liaison entre la transmission de la maladie dans cette famille et la transmission du gêne, codant pour le récepteur 2
du TGF-β (TGFBR2) a pu être établie [6]. Depuis, d’autres familles ont été rapportées dans le monde, pour lesquelles le
gène responsable de la maladie est également le gène TGFBR2 [7] et plus récemment le gène TGFBR1. La découverte
de l’implication de ces deux gènes dans la physiopathologie
de certains syndromes de Marfan renforce l’idée de l’implication du TGFβ dans la symptomatologie du SM.
Intérêt de la biologie moléculaire
Une des principales caractéristique du SM est l’extrême variabilité de ses manifestations cliniques, tant en terme de
fréquence qu’en terme de gravité, à la fois en inter et intra
familial (Fig. 2). La forme la plus grave du SM est appelée
Marfan néonatal et en l’absence de chirurgie cardiaque, en
Le syndrome de Marfan
physiopathologie et apport de la biologie moléculaire
par Chantal Stheneur, Bernadette Oberkampf, Bertrand Chevallier,
Guillaume Jondeau et Catherine Boileau*
des indications précises. Il nous semble intéressant de rechercher la mutation lorsque le diagnostic est incertain mais que
plusieurs systèmes sont atteints, ou pour aider au dépistage
familial. Se pose alors le problème du diagnostic prénatal ou
du dépistage précoce de formes asymptomatiques chez le très
jeune enfant pour lequel aucune prise en charge en dehors de
la surveillance n’est encore recommandée.
Fig. 2 : arbre généalogique montrant la variabilité d’expression de la maladie de
Marfan au sein d’une même famille.
traîne la mort par insuffisance cardiaque dans les deux premières années. A l’autre extrémité, l’atteinte peut être si minime
qu’elle passe inaperçue sans un screening approfondi. Dans
ce contexte, la recherche d’une mutation dans le gène FBN1
est importante mais, la grande taille du gène, la présence de
mutations privées et la possibilité de mutations dans d’autres
gènes font de la recherche d’une mutation dans FBN1 une recherche longue, difficile et coûteuse. Aussi les indications doivent être précisées. Les laboratoires ont l’habitude de proposer
une recherche de mutation dans les trois cas suivants : 1-chez
les patients remplissant les critères de Gand afin de permettre
un diagnostic facile dans la famille, 2-chez les enfants suspects
de SM mais qui ne remplissent pas (ou pas encore) les critères
diagnostiques, 3-dans le cadre du diagnostic prénatal pour les
couples à risque.
Afin d’affiner ces recommandations, nous avons étudié 586
probands ayant bénéficié d’une étude de biologie moléculaire. Nous avons montré que 72,5% des probands répondant
aux critères de Gand (SM confirmé) avaient une recherche
positive de mutation dans le gène FBN1 contre 58% des patients présentant plusieurs systèmes atteints mais un seul de
façon majeure, et seulement 14,3% des patients suspects de
SM mais sans aucune atteinte majeure. Le meilleur indice de
prédiction de trouver une mutation est la présence de signes
cliniques dans au moins trois systèmes dont l’un atteint de façon majeure, ou la présence d’une ectopie du cristallin. Nous
recommandons donc en plus des indications habituelles, de
rechercher une mutation lorsque le patient présente au moins
deux systèmes atteints dont l’un de façon majeure surtout s’il
s’agit d’une atteinte oculaire.
Au total : Le diagnostic du syndrome de Marfan repose en première approche sur des constatations cliniques, échographiques et radiologiques. La recherche de mutation dans le gène
FBN1 n’est pas actuellement un test diagnostique de première
intention. L’exploration de ce grand gène très polymorphe est
longue et coûteuse et justifie d’en restreindre l’exploration à
Références
1. Boileau C, Jondeau G, Mizuguchi T, Matsumoto N. Molecular genetics
of Marfan syndrome. Curr Opin Cardiol 2005;20(3):194-200.
2. Pyeritz RE. The Marfan syndrome. Annu Rev Med 2000;51:481-510.
3. Collod-Beroud G, Boileau C. Marfan syndrome in the third Millennium.
Eur J Hum Genet 2002;10(11):673-81.
4. Ng CM, Cheng A, Myers LA, Martinez-Murillo F, Jie C, Bedja D, et al.
TGF-beta-dependent pathogenesis of mitral valve prolapse in a mouse model
of Marfan syndrome. J Clin Invest 2004;114(11):1586-92.
5. Faivre L, Collod-Beroud G, Loeys BL, Child A, Binquet C, Gautier
E, et al. Effect of mutation type and location on clinical outcome in 1,013
probands with Marfan syndrome or related phenotypes and FBN1 mutations:
an international study. Am J Hum Genet 2007;81(3):454-66.
6. Mizuguchi T, Collod-Beroud G, Akiyama T, Abifadel M, Harada N,
Morisaki T, et al. Heterozygous TGFBR2 mutations in Marfan syndrome. Nat
Genet 2004;36(8):855-60.
7. Stheneur C, Collod-Beroud G, Faivre L, Gouya L, Sultan G, Le Parc
JM, et al. Identification of 23 TGFBR2 and 6 TGFBR1 gene mutations and
genotype-phenotype investigations in 457 patients with Marfan syndrome
type I and II, Loeys-Dietz syndrome and related disorders. Hum Mutat
2008;29(11):E284-95.
Nouveauté
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NICOLAS ANDRY N°3
L. Obert, J.M. Crolet, C. Meyer,
B. de Billy
Isbn : 978 284023 645 0
134 pages
novembre 2009
20 €
« De même que les yeux des oiseaux nocturnes
sont éblouis par le soleil, le regard de notre pensée se détourne de ce qui porte en soi le plus de lumière ».
Comme le remarquait Aristote, il est toujours malaisé d’affronter la complexité,
particulièrement dans un univers familier qui nous porte presque instinctivement à nous satisfaire de ce que nous croyons voir… et savoir. Le plus difficile
est alors de regarder ce qui est comme s’il s’agissait pour nous d’une découverte afin de reprendre conscience de ses implications et de s’ouvrir à ses mystères,
à ses questionnements inédits, jusqu’à faire parfois vaciller les idées reçues.
Soucieux de refléter l’importance de cette pluralité d’approches en matière
chirurgicale, le Cercle Nicolas Andry entend offrir aux praticiens l’opportunité
de participer à une vaste réflexion collaborative dans des domaines variés et
originaux, dans une perspective d’ouverture de la discipline chirurgicale aux
multiples savoirs scientifiques qui l’environnent. En effet, face à l’évolution parfois frénétique de techniques toujours plus performantes, un tel compagnonnage humaniste semble aujourd’hui nécessaire pour envisager la chirurgie au
coeur de réflexions croisées, à la fois consciente du passé et tendue vers l’avenir,
marquant ainsi notre vie professionnelle en nous apportant un enrichissement
tant individuel que collectif. (Jean-Louis Husson)
13
Les déviations rachidiennes
dans le syndrome de Marfan
par Christian Morin, Javier Bisogno, Daniel Chopin, Jean Paul Padovani,
Vicken Topouchian et Christophe Glorion
n’empêche que ce traitement doit être mis en route chez les
jeunes enfants avec des moyens puissants plâtre puis corset
plein temps même si un devenir chirurgical paraît certain,
en prenant soin au maximum de la cage thoracique et de
son contenu.
Le traitement chirurgical
Il est indiqué comme c’est classique dans beaucoup de scolioses pour des angles de Cobb qui dépassent 40 à 50° en fin
de croissance, surtout quand s’y associent un déséquilibre
frontal ou des troubles de la statique de profil. Nous avons
revu pour une table ronde au congrès de 2008 des sociétés médico-chirurgicales [3] les dossiers des patients opérés
pour cette pathologie à l’Institut Calot de Berck, aux enfants
malades et à Garches, ce qui sur une période de 50 années
représente 30 patients. L’angulation moyenne était de 74°
avec 6 courbures qui mesuraient plus de 100°.
Fig. 1 : aspect pseudo idiopathique de cette scoliose “Marfan” mais avec un profil inversé (lordose thoracique, cyphose lombaire haute), assez caractéristique
de cette étiologie
Introduction
Considérées comme critère diagnostique majeur, les déviations rachidiennes surtout les scolioses sont très fréquentes
au moins un patient sur deux. Elles peuvent dans quelques
cas mettre en jeu le pronostic vital.
Histoire naturelle
Si on les compare aux scolioses idiopathiques, le potentiel
évolutif paraît plus sévère expliquant ainsi leur découverte très précoce. Ainsi dans certains cas l’évolutivité de ces
scolioses est elle tout à fait comparable aux pires courbures
infantiles malignes. Par contre, le type d’évolution spontanément favorable comme dans certaines scolioses idiopathiques du petit enfant, est plutôt l’exception dans le syndrome
de Marfan.
L’arthrodèse postérieure à été l’opération standard, avec une
amélioration des suites opératoires et des résultats à court
et long terme au fur et à mesure que s’amélioraient les techniques opératoires, du simple greffon tibial au Harrington
puis au CD plus stable qui permettra une meilleure prise en
compte des déformations sagittales et une meilleure correction de face tout évitant les manœuvres dangereuses de
distraction.
De cette série, certes disparate et étagée dans le temps, peuvent être transmis quelques messages :
. tout d’abord la préparation par traction peut améliorer
la fonction respiratoire sans accentuer l’ostéoporose rachidienne si elle ne cloue pas le patient au lit et si elle n’est pas
trop étendue dans le temps.
. la correction fusion postérieure doit être étendue à la
totalité des courbures scoliotiques, l’économie de niveau
pouvant s’avérer catastrophique.
Particularité des courbures
Si l’histoire naturelle diffère de celle des scolioses idiopathiques, les caractéristiques des courbure sont parfois originales avec certaines atypies à la fois dans la répartition des
types de scoliose et dans la position des vertèbres limites et
apicales [1].
On note surtout la fréquence des perturbations du profil
bien plus marquées que ce que l’on voit dans les courbures
idiopathiques, avec lordose thoracique et cyphose thoraco
lombaire ou lombaire pouvant être détectées très précocement (Fig. 1).
Le traitement orthopédique
Très efficace dans les scolioses idiopathiques surtout quand
il est débuté précocement, il est loin d’avoir la même réputation quand il s’adresse aux scolioses de la maladie de Marfan. Moins de 20% de succès pour Sponseller [2] qui a publié
la plus large série de patients traités orthopédiquement. Il
14
Fig. 2 : contrôle post opératoire de la correction fusion postérieure du cas de la
Fig. 1; méconnaissance de la cyphose lombaire haute qui aurait dû être inclue
dans l’instrumentation
Les déviations rachidiennes
dans le syndrome de Marfan
par Christian Morin, Javier Bisogno, Daniel Chopin, Jean Paul Padovani,
Vicken Topouchian et Christophe Glorion
Pneumothorax et pince mésentérique sont des complications parfois rapportées,
Il faut s’attendre à un saignement un peu plus conséquent
que dans les idiopathiques.
Les complications neurologiques ou vasculaires (dissection
aiguë de l’aorte) rapportées dans la littérature sont supposées en relation avec des manœuvres exagérées de distraction, manoeuvres définitivement à proscrire.
Conclusion
La scoliose n’est qu’un élément certes grave mais qu’un
élément frappant un patient fragile. C’est dire l’importance
d’une prise en charge pluridisciplinaire dont nos anesthésistes ne sont pas le moindre maillon
Fig. 3 : dysplasie des corps vertébraux avec aspect en diabolo de certains corps
vertébraux lombaire
. il ne faut pas méconnaître les fréquentes perturbations
du plan sagittal et ne pas s’arrêter au sommet d’une zone
cyphotique en thoraco lombaire ou lombaire car une détérioration sous l’arthrodèse serait alors à craindre (Fig. 2).
. une arthrodèse antérieure doit être envisagée quand il
existe une cyphose anormalement importante, mais également en cas de dysplasie vertébrale, qu’il s’agisse de dysplasie antérieure à l’origine de contrainte en cyphose, ou
de dysplasie postérieure qui rend difficile l’instrumentation
postérieure (Fig. 3).
. dans des scolioses malignes débutant très précocement
et s’aggravant rapidement, persévérer dans le traitement
orthopédique peut avoir de grave répercussion sur la fonction respiratoire. C’est dans ces cas que peut se discuter
raisonnablement une indication d’instrumentation postérieure sans arthrodèse avec remise en tension régulière des
implants jusqu’à ce que l’âge de l’arthrodèse définitive soit
atteint.
. sur ces rachis déformés et fragiles il n’y a aucune honte
en postopératoire de protéger ces patients par un corset orthopédique, bien sûr pour les instrumentations sans arthrodèse et ce jusqu’à l’intervention finale mais également après
une correction fusion postérieure, et ce pour quelques mois,
quand les constatations opératoires n’ont pas été très favorables.
Références
1. Glard Y. Analyse tridimensionnelle de l’équilibre du rachis dans la maladie de Marfan [Thèse]. Marseille, 2006:48.
2. Morin C, Bisogno J, Chopin D, Padovani JP, Topouchian V, Glorion C. Les déviations rachidiennes dans le syndrome de Marfan. Archives
de Pédiatrie 2008;15-5:568-70
3. Sponseller PD, Bhimani M, Solacoff D et al. Results of brace treatment of scoliosis in Marfan syndrome. Spine 2000; 25-18:2350-4.
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septembre 2009
Complications du traitement
Les complications mécaniques sont classiques. Sur nos trente patients opérés il faut déplorer 5 complications mécaniques, pseudarthrose, évolution sous jacente en cyphose.
Les complications infectieuses voient leur gravité augmentée par la possible survenue d’une greffe oslérienne.
Le risque de brèche durale est classique aussi bien au cours
de la chirurgie antérieure que postérieure en cas de dystrophie osseuse.
30 €
La scoliose idiopathique représente un problème de santé publique
majeur. L’histoire naturelle des scolioses, souvent mal connue de la
majorité des cliniciens, nécessite une prise en charge spécialisée.
‘objet de cet ouvrage multidisciplinaire est de présenter les divers
aspects du diagnostic et de la prise en charge des scolioses idiopathiques de l’enfant et de l’adulte.
15
Les « charnières »
dans le syndrome de Marfan
par Vicken Topouchian
Introduction
L’atteinte rachidienne dans la maladie de Marfan est secondaire à une atteinte du tissu conjonctif du système musculosquelettique [1]. La déformation rachidienne, en particulier la
déformation scoliotique constitue l’atteinte la plus fréquente
de l’appareil locomoteur dans cette pathologie. Les déformations dans le plan sagittal sont aussi retrouvées. La lordose
thoracique en est la plus fréquente. On retrouve aussi une
cyphose lombaire ou thoracolombaire. Les atteintes du rachis
cervical sont fréquentes mais ne sont souvent pas associées à
une symptomatologie clinique [2].
Charnière cervico-occipitale
et syndrome de Marfan
Les études faites de façon systématique et en particulier le travail de Hobbs et Sponseller [3] sur le rachis cervical de patients
atteints d’un syndrome de Marfan, montrent la présence de
trois types d’atteintes. On peut retrouver une cyphose cervicale dans 16% des patients atteints d’une maladie de Marfan,
une mobilité exagérée de l’articulation atlanto-axiale dans
54% des cas, cette situation étant nettement plus fréquente
aux alentours de l’adolescence. Cette mobilité exagérée se réduit progressivement à l’âge adulte [4]. Enfin une impression
basilaire est retrouvée chez 36% des patients (Fig. 1).
des clichés dynamiques du rachis cervical de profil centrés sur
la charnière crânio-rachidienne à la recherche d’une instabilité
C1-C2 et à la base du crâne entre les masses latérales de l’atlas
et l’occipital [5,6].
Les techniques d’imagerie actuelles peuvent être réalisées,
en particulier le scanner avec des reconstructions 3D qui permettent de montrer des malformations, une instabilité, des
anomalies de rotation. L’IRM permet aussi d’évaluer un risque
neurologique potentiel mais elle nécessite une anesthésie
chez les jeunes patients agités ou trop craintifs.
Si l’instabilité est isolée, réductible entre les deux premières
vertèbres cervicales, on peut se contenter d’une arthrodèse
C1-C2. Mais souvent, les anomalies sont plus complexes avec
des instabilités associées à une laxité anormale à la base du
crâne, parfois avec une brièveté de l’arc postérieur de l’atlas et
une sténose du trou occipital qui nécessitent des interventions
pour libérer le névraxe (craniectomie occipitale, laminectomie
de C1) et pour stabiliser le rachis par des arthrodèses (Fig. 2).
Fig. 2 : IRM postopératoire montrant
une bonne libération postérieure et
une arthrodèse cervico-occipitale.
Fig. 1 : IRM de la charnière cervico-occipitale montrant une
impression basilaire.
Il s’agit le plus souvent d’une malformation de Arnold Chiari
de type 1. Cette anomalie radiologique est rarement associée
à des troubles neurologiques. Néanmoins il est recommandé
chez les patients atteints du syndrome de Marfan, d’éviter les
sports de combat et les sports à haut risque de traumatisme
pour le rachis cervical.
La surveillance orthopédique est très importante, des complications potentielles bien spécifiques sont prévisibles et des
soins adaptés seront nécessaires. Il est préférable de ne pas
attendre la survenue de ces complications et en tout cas, de
les traiter à temps. Il nous paraît utile d’établir une surveillance
orthopédique régulière dont la fréquence est variable et fonction de l’âge du patient, du contexte familial et médical.
La recherche d’une complication neurologique liée à une
instabilité crânio-rachidienne doit être systématique, en particulier avant toute anesthésie générale : par l’interrogatoire
(cervicalgies, torticolis), par l’examen neurologique (essentiellement sur des signes pyramidaux témoignant d’une souffrance médullaire). L’imagerie doit systématiquement comporter
16
Fig. 3 : radiographie postopératoire
avec immobilisation par halo cast.
Cette arthrodèse peut être complétée par une ostéosynthèse
crânio-rachidienne avec une immobilisation post opératoire
par halo céphalique pendant toute la durée de la consolidation (3 – 4 mois). Ce type de maintien est efficace, assez confortable, bien toléré, avec moins de problèmes cutanés qu’une
immobilisation classique plâtrée (Fig. 3). Les fusions osseuses
ainsi obtenues sont plus satisfaisantes. Notre série comporte
44 patients suivis en orthopédie dans le cadre du syndrome
de Marfan. Nous avons observé deux cas d’impression basilaire et un cas d’instabilité C1-C2. Ces patients ont été opérés
d’une libération postérieure avec arthrodèse vertébrale postérieure sans ostéosynthèse interne mais avec immobilisation
par halo cast.
Charnière lombo-sacrée et syndrome de Marfan
Le spondylolisthésis désigne par l’usage le déplacement de
tout ou partie d’une vertèbre et du rachis sus-jacent en avant
de la vertèbre sous-jacente (Fig. 4). Le spondylolisthésis est
une affection assez fréquente s’observant chez environ 5 %
des sujets normaux. Les spondylolyses s’accompagnent d’un
glissement vertébral dans plus de la moitié des cas. Elles sont
plus fréquentes chez les sportifs, surtout exposés à des sports
en hyperlordose.
Dans le syndrome de Marfan l’association d’une cyphose
thoraco-lombaire à une hyperlordose lombaire participe à
Les « charnières »
dans le syndrome de Marfan
par Vicken Topouchian
Fig. 4 : Radiographie de profil chez un patient de 17 ans présentant un spondylolisthésis (L5-S1) à grand déplacement dans le cadre d’un syndrome de Marfan.
Fig. 6 : Scanner postopératoire montrant la fusion intercorporéale L5-S1.
Les « charnières »
dans le syndrome de Marfan
par Vicken Topouchian
l’apparition d’une lyse isthmique au niveau de la charnière
lombosacrée en particulier au niveau de l’isthme de L5. Ceci
a comme conséquence l’apparition d’un spondylolisthésis
L5-S1 par lyse isthmique due à l’effet de « casse noisette » au
niveau de l’isthme de L5. Ce mécanisme est favorisé par l’hyperlaxité exagérée dans la maladie de Marfan. L’association
d’un spondylolisthésis au syndrome de Marfan est estimée à
18% dans la littérature. Il peut également être associé à une
anomalie transitionnelle ou une scoliose [7,8]. On retrouve sur
le bilan radiologique un aspect trapézoïdal de L5 avec un aspect biconcave des plateaux et un arrondissement en dôme
du plateau supérieur sacré (Fig. 5). Le traitement est avant tout
médical surtout dans les faibles déplacements, le traitement
chirurgical n’étant envisagé qu’en cas d’échec d’un traitement
médical suivi correctement et suffisamment longtemps [9].
Dans notre série trois cas de spondylolisthésis à grand déplacement ont été retrouvés. Ils ont été opérés par une arthrodèse circonférentielle non instrumentée. Une arthrodèse postérolatérale (L4-S1) avec une greffe iliaque est complétée par
une arthrodèse antérieure (L5-S1) avec une greffe tibiale. Les
patients ont été immobilisés en post opératoire par un corset
pendant quatre mois (Fig. 6).
Conclusion
Les anomalies des charnières cervico-occipitale et lombosacrée sont rares dans le Syndrome de Marfan et sont souvent
asymptomatiques. Le risque étant la survenue d’une complication neurologique, la prévention reste le meilleur traitement
par le dépistage précoce d’une instabilité ou la détection du
moindre signe neurologique pouvant conduire à un traitement chirurgical.
Références
1. Dietz HC, Cutting GR, Pyeritz RE, et al. Marfan syndrome caused by
a recurrent de novo missense mutation in the fibrillin gene. Nature. 1991 Jul
25,352(6333),337-9.
2. Sponseller PD, Hobbs W, Riley LH 3rd, Pyeritz RE. The thoracolumbar
spine in Marfan syndrome. J Bone Joint Surg Am. 1995 Jun,77(6),867-76.
3. Hobbs WR, Sponseller PD, Weiss AP, et al. The cervical spine in Marfan
syndrome. Spine. 1997 May 1,22(9),983-9.
4. Place HM, Enzenauer RJ. Cervical spine subluxation in Marfan syndrome.
A case report. J Bone Joint Surg Am. 2006 Nov,88(11),2479-82.
5. Levander B, Mellström A, Grepe A. Atlantoaxial instability in Marfan’s
syndrome. Diagnosis and treatment. A case report. Neuroradiology. 1981
Feb,21(1),43-6.
6. Herzka A, Sponseller PD, Pyeritz RE. Atlantoaxial rotatory subluxation
in patients with Marfan syndrome. A report of three cases. Spine. 2000 Feb
15,25(4),524-6.
7. Tallroth K, Malmivaara A, Laitinen ML, et al. Lumbar spine in Marfan syndrome. Skeletal Radiol. 1995 Jul,24(5),337-40.
8. Garreau de Loubresse C, Mullins MM, et al. Spinal and pelvic parameters in Marfan’s syndrome and their relevance to surgical planning. J Bone
Joint Surg Br. 2006 Apr,88(4),515-9.
9. Nallamshetty L, Ahn NU, Ahn UM, et al. Plain radiography of the lumbosacral spine in Marfan syndrome. Spine J. 2002 Sep-Oct,2(5),327-333.
Fig. 5 : Scanner préopératoire avec reconstruction 2 D
34
ème
SÉMINAIRE D’ENSEIGNEMENT DE LA SOFOP
Séquelles et reprises
en traumatologie
de l’enfant
18 - 19 Mars 2010
à la Saline Royale d’Arc en Senans
18
Déformations du thorax
dans le syndrome de Marfan
par Z. Péjin, V. Topouchian,Th. Odent, S. Pannier,
J.P. Padovani, Y. Révillon, Ch. Glorion
La déformation du thorax fait partie des signes squelettiques du syndrome de Marfan. Elle est de deux grands types :
le thorax en entonnoir ou pectus excavatum, le thorax en carène ou pectus carinatum. Ces déformations posent plus le
problème de leur retentissement esthétique que de leur retentissement fonctionnel bien que la restriction respiratoire
soit possible dans les pectus excavatum sévères. Le traitement a changé dans les dix dernières années pour le pectus
excavatum avec l’apparition d’une technique « mini invasive
» qui permet de proposer une chirurgie moins lourde avec
des résultats esthétiques très bons et durables et une morbidité moindre.
Le thorax en entonnoir
1- Présentation
Le thorax en entonnoir est une déformation qui entraîne
une dépression de la partie basse et antérieure du thorax,
au dessus de l’appendice xyphoïde. Il peut avoir deux formes principales [1] : plat, intéressant une grande partie du
plastron, ou infundibulaire au creux bien localisé (Fig. 1).
Fig. 1 : Fillette de 7 ans, syndrome de Marfan, thorax en entonnoir
(Coll. Ch. Glorion)
La déformation est rarement symétrique et pose, dans beau
coup de cas, de sérieux problèmes esthétiques. Cet aspect
disgracieux, outre les autres dysmorphies observées dans
le syndrome de Marfan, a un retentissement psychologique
parfois important surtout à l’approche de l’adolescence.
Déformations du thorax
dans le syndrome de Marfan
par Z. Péjin, V. Topouchian,Th. Odent, S. Pannier,
J.P. Padovani, Y. Révillon, Ch. Glorion
2- Retentissement
Il est surtout esthétique, cependant, un syndrome respiratoire restrictif modéré est possible. On peut le quantifier
avec des épreuves fonctionnelles respiratoires. Une étude
récente multicentrique nord-américaine [2] a montré que
la fonction respiratoire des patients ayant un thorax en entonnoir était altérée avec une capacité vitale en moyenne
de 90% par rapport à la théorique et un volume expiratoire
réduit à 89% de la théorique.
En fait, les grands enfoncements affectent surtout la psychologie des jeunes patients qui sont souvent introvertis et
gênés par leur aspect.
3- Imagerie
La radiographie du thorax est nécessaire pour rechercher
des anomalies intra-thoraciques. Pour étudier la morphologie du thorax, c’est la radiographie de profil avec une chaînette au fond de la déformation qui met le mieux en évidence l’importance de la déformation. (Fig. 2a)
Le scanner montre bien l’aspect de la trame pulmonaire, la
forme de la déformation dans le plan horizontal et les rapports de la plèvre et du péricarde avec la partie postérieure
du sternum. Cette exploration a surtout un intérêt en vue de
la correction chirurgicale de la déformation. (Fig. 2b)
4- Correction chirurgicale du thorax en entonnoir
a- Historique
C’est Ravitch [3] qui a fait la première publication d’une correction chirurgicale du thorax en entonnoir. L’intervention
de retournement, non pédiculé, du plastron, a été décrite
en 1954 par J. et R. Judet [4]. Elle a été abandonnée à cause
des complications infectieuses fréquentes. La technique
consistait à isoler le plastron en sous-périosté et sous-périchondral ; après chondrectomies étagées et ostéotomie
transversale de la partie supérieure du sternum, le plastron
était complètement isolé, retourné, remodelé et fixé.
supérieure et verticale médiane. Le sternum déconnecté
des arcs costaux par chondrectomie aux points d’inflexion,
est mobilisé, relevé, modelé à la demande et fixé par ostéosynthèse interne à l’aide de broches transfixiant côtes et
sternum. Une plastie diaphragmatique est associée, la coupole se trouve ainsi allongée, le cul-de-sac costo-diaphragmatique antérieur creusé entre le diaphragme et la ligne
blanche.
Toutes ces techniques avaient en commun d’être une chirurgie lourde avec une morbidité importante malgré des résultats esthétiques assez bons à long terme [7].
Elles ont été complètement remplacées par la correction par
technique mini invasive décrite par Nuss.
b- La technique de Nuss
La technique développée par Nuss [8] a évolué en 1998 avec
l’utilisation de la thoracoscopie en routine. Elle repose sur
un principe de réduction et d’étayage de la déformation
s’appuyant sur l’arc antérieur des côtes au niveau du point
le plus profond de la déformation. Elle demande 2 incisions
horizontales de 25 mm sur la ligne axillaire moyenne. Il faut
introduire un « sabre » qui va faire la dissection rétro sternale
dans l’espace cellulo-graisseux pré péricardique après être
passé à droite en intra pleural sous contrôle de la vue par la
thoracoscopie et ressortir du côté gauche, également en intra pleural mais de façon aveugle, en un point symétrique du
premier. La réduction est ainsi presque complètement faite
et elle sera achevée et stabilisée par une barre pré cintrée
qui reprend le même chemin par un simple va et vient en
s’aidant d’un lac qui permet de repasser au même endroit.
La barre qui a été modelée en forme de U est retournée de
180°. Elle est stabilisée latéralement par un stabilisateur métallique ou encore par des fils de sutures passés autour des
côtes afin de prévenir une mobilisation secondaire de l’implant. Pour les déformations importantes chez des grands
patients, deux barres peuvent être utilisées. La barre est
laissée en place 3 ans afin de permettre au squelette de se
modeler (Fig. 3 et 4).
Fig. 2a : Radiographie du thorax de profil avec une chaînette dessinant le fond
du thorax en entonnoir (Coll. Ch. Glorion).
Fig. 2b : Scanner en coupe horizontale montrant le contact du péricarde avec
la partie postérieure du sternum (Coll. Ch. Glorion).
La sternochondroplastie a été décrite par Brunner en 1954
[5], utilisée et rapportée en France par Bedouelle [6]. Elle
consiste à libérer le plastron par sternotomie transversale
20
Fig. 3 : Fillette de la Fig. 1, résultat 2 ans après correction d’un thorax en entonnoir par la technique de Nuss (Coll. Ch. Glorion).
Déformations du thorax
dans le syndrome de Marfan
par Z. Péjin, V. Topouchian,Th. Odent, S. Pannier,
J.P. Padovani, Y. Révillon, Ch. Glorion
Fig. 4 : Radiographie du thorax de face et de profil après correction du thorax
en entonnoir par la technique de Nuss (Coll. Ch. Glorion).
Le point essentiel est la gestion de la douleur en postopératoire. Dans notre expérience (45 cas) un bon contrôle de la
douleur a été obtenu par toutes les méthodes : péridurale
thoracique, rachianesthésie, PCA.
Un pneumothorax de faible importance est fréquent malgré
l’exsufflation et se résorbe tout seul. Un hématome sur la voie
d’abord a été observé une fois, une mobilisation secondaire
de la barre a été observée une fois et doit être prévenue par
une bonne fixation aux côtes et par l’interdiction stricte d’ activités physiques pendant 3 mois.
3- Traitement
Si le patient est assez jeune, il
est toujours possible de modeler la déformation avec un
corset à pelote. Ce corset est
contraignant, mais il a la capacité d’améliorer la forme du
thorax s’il est porté régulièrement, au mieux à temps complet (Fig. 6). Si la déformation
est très importante et qu’elle
n’est pas acceptée par le patient, on peut faire une correction chirurgicale. C’est une
intervention importante qui Fig. 6 : Essayage d’un corset à pelote
consiste en un raccourcisse- pour modeler un thorax en carène
(Coll. Ch. Glorion)
ment des cartilages chondrocostaux associé à une ostéotomie sternale. Il faut également
un modelage postopératoire par corset (Fig. 7).
c- La chirurgie thoracique associée
Elle est possible pour des interventions sur le parenchyme
pulmonaire [9]. Dans le syndrome de Marfan une chirurgie de
l’aorte ascendante associée à une correction du thorax en entonnoir par la technique de Nuss est possible. Elle a été décrite
chez un homme de 23 ans avec un résultat satisfaisant [10].
Le thorax en carène
1- Présentation
Il s’agit d’une protrusion antérieure de la cage thoracique,
très souvent asymétrique, due à l’allongement des cartilages
chondro-costaux. Cet allongement est du à l’anomalie du collagène.
2- Retentissement
Il est uniquement esthétique car il n’y a pas de restriction pulmonaire (Fig. 5).
Fig. 5 : Garçon, 14 ans, syndrome de Marfan, thorax en carène inesthétique et
asymétrique (Coll. Ch. Glorion)
Fig. 7 : Garçon, 14 ans, syndrome de Marfan, thorax en carène très inesthétique et
asymétrique. Aspect après correction chirurgicale (Coll. Ch. Glorion)
Références
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2. Kelly RE Jr, Shamberger RC, Mellins RB et al. Prospective multicenter study of surgical correction of pectus excavatum: design, perioperative
complications, pain, and baseline pulmonary function. J Am Coll Surg. 2007
Aug,205(2),205-16.
3. Ravitch M. The operative treatment of pectus excavatum. Ann Surg
1949,129,429-444.
4. Judet J et Judet R. Thorax en entonnoir. Un procédé opératoire. Rev Chir
Orthop 1954, 40, 248-257.
5. Brunner A. Zur operative behandlung der Trichterbrust. Chirurgie, 1954,
25, 303-310.
6. Bedouelle J. Thorax en entonnoir. Ann Orthop Ouest 1975, 7, 15-24.
7. Jawish R, Rigault P, Padovani JP et al. Résultats à long terme du
thorax en entonnoir opéré chez l’enfant. Rev Chir Orthop Reparatrice Appar
Mot.1992, 78(1), 38-44.
8. Nuss D. Recent experiences with minimally invasive pectus excavatum repair “Nuss procedure”.Jpn J Thorac Cardiovasc Surg. 2005 Jul, 53(7), 338-44.
9. Metzelder ML, Ure BM, Leonhardt J et al. Impact of concomitant
thoracic interventions on feasibility of Nuss procedure. J Pediatr Surg. 2007
Nov,42(11),1853-9.
10. Javangula KC, Batchelor TJ, Jaber O et al. Combined severe pectus
excavatum correction and aortic root replacement in Marfan’s syndrome. Ann
Thorac Surg. 2006 May,81(5),1913-5
21
ANOMALIES OSSEUSES
CONSTITUTIONNELLES
G. Genin
Isbn : 978 284023 534 7
684 pages
2700 images
octobre 2008
198 €
L’ouvrage des anomalies osseuses constitutionnelles tire son originalité d’une approche pluridisciplinaire, permettant de rapprocher dans un seul livre les compétences de différents spécialistes : pédiatres, obstétriciens, généticiens, radiologues et orthopédistes pédiatriques.
Il s’agit d’un travail de synthèse en accord avec le fonctionnement actuel des centres d’expertise périnatale.
Il s’agit du seul ouvrage dans la littérature française et anglosaxone qui permette d’aller au-delà des seules
données de la radiologie conventionnelle, en développant l’importante contribution des autres méthodes
d’imagerie, incluant l’échographie 3D ou 4D, l’IRM anténatale, le scanner anté- et post-natal. Ces méthodes
tendent à bouleverser le dépistage et la prise en charge médico-chirurgicale des anomalies osseuses constitutionnelles. L’iconographie est enrichie par la qualité des experts, plus particulièrement pour l’imagerie anténatale qui ne
cesse de se développer et qui fait désormais partie intégrante du conseil génétique.
Comme dans tous les domaines de la pathologie médicale, la génétique a bouleversé la prise en charge des anomalies osseuses constitutionnelles, et ce livre permet d’en décrire les données les plus récentes et leurs conséquences
pratiques sur le conseil familial. Nous avons volontairement rappelé les définitions du « langage génétique » dans
la deuxième partie de l’ouvrage intitulée « glossaire » pour permettre une meilleure communication entre les différents spécialistes concernés par cette pathologie.
Pour éviter l’écueil d’un catalogue interminable sur les anomalies osseuses constitutionnelles, l’auteur propose de
compartimenter le livre pour acquérir plusieurs niveaux de compétences. La première partie de l’ouvrage est volontairement limitée à la description détaillée des plus fréquentes anomalies osseuses constitutionnelles pour permettre au lecteur d’avoir rapidement une connaissance appronfondie des maladies les plus courantes.
La deuxième partie de l’ouvrage offre des gammes étiologiques et un glossaire pour aider les experts à reconnaître
les nombreuses étiologies plus rares d’anomalies osseuses constitutionnelles et leurs nombreux diagnostics différentiels.
Etant donné l’introduction de la notion de « handicap potentiel », il a été développé les données d’une approche
thérapeutique pédiatrique globale, essentiellement orthopédique, psychologique et kinésithérapique. Il s’agit là encore d’une spécificité de cet ouvrage de décrire à la fois les données cliniques et les bases thérapeutiques.
Enfin pour conclure l’ouvrage, l’auteur a bénéficié de l’immense culture de l’américain Philippe Jeanty. En plus de
nous avoir offert l’iconographie de son site internet d’échographie anténatale, il a fait une étonnante synthèse du
regard des artistes au fil de l’histoire sur le terme du « nanisme ». Cela démontre la constance du caractère normatif
de notre société et nous encourage à donner un regard plus humaniste sur cette « pathologie », au-delà de tout
préjugé, avec l’acceptation inconditionnelle de la notion de différence comme préliminaire d’un enrichissement
mutuel.
22
La hanche et le pied dans le syndrome de Marfan
par Zagorka Pejin, Stéphanie Pannier, Vicken Topouchian
et Christophe Glorion
Introduction
ligne ilio-ischiatique de Kohler supérieur à 3 mm chez l’homme, à 1 mm chez le garçon, à 6 mm chez la femme et à 3 mm
chez la fille,
. Le croisement de la ligne ilio-pectinée par la ligne acétabulaire
. Le croisement du « U » radiologique.
Pour Steel [4] le critère radiologique le plus spécifique de la
protrusion acétabulaire est le croisement de l’acétabulum par
la ligne ilio-pectinée. Dans les cas sévères, la protrusion s’arrête lorsque le grand trochanter entre en contact avec le bord
latéral du bassin.
La hanche
Do et al [5] ont étudié l’influence de la densité osseuse dans la
genèse de la protrusion acétabulaire et retrouvent une diminution de celle-ci chez les patients atteint d’un syndrome de
Marfan par rapport à la population générale. Il n’existe cependant pas de relation significative entre la baisse de la densité
osseuse et le risque de protrusion acétabulaire. Selon eux, la
diminution de la densité osseuse ne contribue pas au développement de la protrusion acétabulaire. Il s’agirait plutôt
d’une extensibilité anormale du cartilage en Y qui favoriserait
cette protrusion.
Il n’y a pas non plus de corrélation entre la présence radiologique de la protrusion acétabulaire et les symptômes cliniques
(douleurs, raideur et la limitation de la mobilité).
Le syndrome de Marfan peut associer un certain nombre de
manifestations orthopédiques : une scoliose, une hyperlaxité
articulaire, des déformations de la cage thoracique, une protrusion acétabulaire, des pieds plats symptomatiques, une
instabilité de la rotule ou un spondylolisthésis. Leur origine
d’après Wenger [3] est probablement liée au même désordre
du tissu conjonctif.
La connaissance des manifestations cliniques associées au
syndrome de Marfan permet un diagnostic précoce et une
prise en charge appropriée.
La protrusion acétabulaire est la principale anomalie de la
hanche observée dans le syndrome de Marfan. Il s’agit d’un
déplacement médial, vers le petit bassin, du cotyle et de la
tête fémorale. Cette déformation peut faire partie d’autres
tableaux cliniques et c’est seulement depuis 1978 qu’elle est
associée au syndrome de Marfan. Hohle [1] rapporte les deux
premiers cas de protrusion acétabulaire chez des patients porteurs de syndrome de Marfan. En 1980, Steel [2] présente une
série de 46 cas de protrusion acétabulaire chez des patients
atteints d’un syndrome de Marfan et conclut qu’il s’agit d’une
anomalie fréquente et sévère.
Fréquence
La protrusion acétabulaire est retrouvée, selon les séries, dans
23 à 100% des cas [2,4-7]. Une étude récente internationale
et multicentrique sur cinq continents retrouve 23% de protrusion chez 298 patients [7].
Traitement
Steel [2,4] a proposé de réaliser une épiphysiodèse du cartilage en Y vers l’âge de 8-10 ans chez les patients atteints d’un
syndrome de Marfan et ce uniquement en cas d’aggravation
documentée : progression de l’angle VCE, déformation du « U »
radiologique, diminution des amplitudes articulaires. Selon le
même auteur, une fois que la ligne de Kohler est croisée par
la ligne acétabulaire, il est trop tard pour réaliser cette intervention.
Fig.1 : Différents aspects du « U » radiologique dans la protrusion acétabulaire : A ouvert, B fermé, C croisé, D inversé avec le dessin de la ligne
ilio-ischiatique de Kohler
Diagnostic
L’examen clinique de la hanche, en cas de protrusion acétabulaire, peut retrouver une diminution progressive de la mobilité, surtout de la flexion et de l’abduction. Dans les formes sévères, certains patients peuvent développer une hyperlordose
lombaire pour compenser la bascule du bassin.
Fig.2 : Patiente de 25 ans ayant un syndrome de Marfan et une protrusion acétabulaire bilatérale avec une arthrose importante; aspect avant arthroplastie
La radiographie de bassin est demandée systématiquement
chez les malades porteurs d’un syndrome de Marfan (4-6).
Les critères radiologiques de la protrusion acétabulaire sont
(Fig.1) :
. L’angle VCE > 40°,
. Le déplacement médial de l’acétabulum par rapport à la
Pour Sponseller [6], qui a revu 173 patients avec syndrome de
Marfan, entre 3 et 64 ans, la protrusion acétabulaire s’aggrave
lors des vingt premières années de la vie puis se stabilise. La
protrusion ne s’accompagne que très rarement de problèmes
fonctionnels et il n’est noté qu’une discrète diminution des
amplitudes articulaires. Il conclut que pour la majorité des
23
La hanche et le pied dans le syndrome de Marfan
par Zagorka Pejin, Stéphanie Pannier, Vicken Topouchian
et Christophe Glorion
patients, il n’y a pas d’indication à réaliser d’épiphysiodèse du
cartilage en Y.
Nous avons revu les dossiers de 72 patients atteints d’un syndrome de Marfan, dont 51 documentent radiologiquement
les hanches. Plus de la moitié des patients présente une protrusion acétabulaire sur la radiographie du bassin. Une seule
patiente a été opérée d’une arthroplastie totale de hanche
bilatérale à l’âge de 25 ans (Fig. 2). On a également observé
plusieurs antéversions exagérées dans notre série. Seule une
ostéotomie de dérotation bilatérale a été réalisée.
Conclusion
La protrusion acétabulaire bien que fréquente dans le syndrome de Marfan, ne s’accompagne que très rarement de problèmes fonctionnels. Le traitement chirurgical par épiphysiodèse
du cartilage en Y doit être réservé aux cas sévères avec évolutivité bien documentée.
Les pieds
Il existe peu d’études concernant les problèmes des pieds dans
le syndrome de Marfan. Le pied de Marfan est généralement
décrit comme un pied plat valgus secondaire à l’importante
hyperlaxité ligamentaire [7, 8, 9].
Une étude comparative [9] des appuis monopodaux chez 63
patients atteints d’un syndrome de Marfan et chez 21 patients
sains, a montré dans 74,8% des cas une arche plantaire conservée malgré l’hyperlaxité ligamentaire. Cette hyperlaxité a été
objectivée chez 60 % des patients atteints sans corrélation significative avec les pieds plats ou les hallux valgus.
Les problèmes fonctionnels des pieds sont rares dans la population de Marfan, aussi les indications de traitement sont peu
fréquentes.
Nous avons observé dans notre série plusieurs patients avec
des pieds plats, mais seulement deux d’entre eux présentaient
une déformation sévère (Fig.3) ayant nécessité une correction
chirurgicale par l’intervention du « cavalier ». Un patient a été
opéré pour un hallux valgus important.
Dans notre série, de façon un peu paradoxale, trois patients
atteints de syndrome de Marfan ont développé un pied creux.
Un a été opéré par tarsectomie. Il a progressivement développé un hallux valgus sévère qui a été traité chirurgicalement.
Les pieds ont régulièrement un aspect caractéristique avec
une grande taille, mais posent finalement peu de problème
fonctionnel et ne demandent que très rarement un traitement
chirurgical. En revanche, il faut savoir adapter le chaussage et
avoir recours aux semelles voire aux coques moulées afin de le
rendre confortable.
Références
1. Hohle B. Familial occurrence of protrusion acetabuli. Beitr Orthop
Traumatol.1978,25,261-5. German.
2. Steel HH. Protrusio acetabuli, its occurrence as a constant in Marfan’s syndrome and a surgical
approach to the problem by closure of the triradiate epiphysis. Orthop Trans.
1980,4,353
3. Wenger et al. Protrusio acetabuli in Marfan’s syndrome. Clin Orthop Relat
Res. 1980,147,134-8.
4. Steel HH. Protrusio acetabuli : its occurrence in the completely expressed Marfan syndrome and its musculoskeletal component and a procedure
to arrest the course of protrusion in the growing pelvis. J pediatr Orthop.
1996,16,704-18.
5. Do T, Giampietro PF, Burke SW, et al. The incidence of protrusion acetabuli in Marfan’s syndrome and its relationship to bone mineral density. J Pediatr Orthop. 2000,20,718-21.
6. Sponseller PD, Jones KB, Ahn NU, et al. Protrusio acetabuli in Marfan
syndrome: age-related prevalence and associated hip function. J Bone Joint
Surg Am 2006, 88,486-95
7. Faivre L, Collod-Beroud G, Loeys BL, et al. Effect of mutation type
and location on clinical outcome in 1,013 probands with Marfan syndrome of
related phenotypes and FBN1 mutations: an international study. Am. J. Hum.
Genet. 2007,81,454-66
8. Joseph KN, Kane HA, Milner RS, et al. Orthopedic aspects of the Marfan
phenotype. Clin Orthop 1992,277,251-61
9. Lindsey JM, Michelson JD, MacWilliams BA, Et al. The foot in Marfan
syndrome: clinical findings and weight-distribution patterns. J Pediatr Orthop
1998,18(6),755-9
Fig.3 : Pieds plats sévères chez une jeune fille de 9 ans. Aspect pré-opératoire (a) et post-opératoire (b)
24
International Society
for the Study of the Lumbar Spine (ISSLS)
Compte-rendu de la 36ème réunion annuelle (4- 8 mai 2009)
par Raphaël Vialle
La 36ème réunion annuelle de l’ISSLS se tenait cette année en
Amérique du Nord, dans la presqu’ile de Miami Beach, Etat de
Floride, USA.
Originellement créée sous le nom d’Ocean Beach en 1915, elle
changea de nom pour Miami Beach en 1917. Cette ville de
90000 habitants, très cosmopolite (55,5 % de sa population est
née à l’étranger) regroupe un important ensemble architectural « Art Deco » (Fig. 1). En 1979 l’Art Deco District History de la
ville a été inscrit au Registre National des lieux Patrimoniaux.
L’Art Deco District est la plus grande collection architecturale
d’art déco dans le monde.
du sport automobile, il a fait une remarquable mais également
effroyable conférence sur l’évolution des lésions constatées,
notamment au niveau rachidien, lors des accidents sur les circuits de courses automobiles [2]. La prévention de ces lésions
fait actuellement l’objet d’études biomécaniques poussées
qui permettent de limiter toujours plus l’étendue de ces traumatismes (Fig. 2).
Fig. 1 : hôtel Shelley sur Collins Avenue
Le programme scientifique du congrès était, comme, à l’accoutumée, dense et de très haute qualité. Au total plus de 130
communications orales et près de 300 posters regroupaient
les congressistes des cinq continents autours de sujets très variés se rapportant tous à l’étude du rachis lombaire.
Les études évaluant le coût et l’efficacité des traitements médicaux et chirurgicaux de la lombalgie ont attiré une fois de
plus l’intérêt de l’auditoire. On notera également une très
importance « percée » du nombre de communications consacrées aux arthroplasties totales de disques et aux dispositifs «
dynamiques » de toute sorte, preuve que les études méthodologiquement incontournables commencent à faire parler
d’elles !
Le programme consacré à la recherche fondamentale était
une fois de plus de très haut niveau. On regrettera cette année
l’absence de nombreuse équipes asiatiques et notamment japonaises pour des raisons d’embargo aérien lié à la pandémie
grippale. Les travaux des équipes nordiques ont été salués ?
tout comme un remarquable travail de l’équipe de Schollum
et collaborateurs de l’université d’Auckland ? sur la micro-architecture des fibres de collagène au sein de l’annulus discal
[1].
Cette année, l’orateur invité à présenter une conférence était
le Dr Stephen OLVEY de l’université de Miami. Spécialiste incontesté aux Etats-Unis de la traumatologie liée à la pratique
Fig. 2 : la couverture du dernier ouvrage du Dr Stephen Olvey consacré à l’accidentologie du sport automobile aux USA
Les orthopédistes pédiatres auront été sensibles à plusieurs
travaux anatomiques portant notamment sur la morphologie
du sacrum en cas de spondylolyses sus-jacentes. Ces deux
études cadavériques démontrent le rôle potentiel joué par la
morphologie du sacrum et plus globalement du bassin dans la
survenue de contraintes probablement anormales sur la partie caudale du rachis lombaire [3, 4]. Les travaux, notamment
français, sur l’équilibre sagittal du rachis et l’incidence pelvienne font donc progressivement leur chemin…
Une étude très poussée de biomécanique sur des modèles de
spondylolyses réalisés en éléments finis a également clairement émis l’hypothèse d’une lésion initialement de la portion
ventrale de la région isthmique et non d’un conflit de la portion craniale de l’isthme avec l’articulaire sus-jacente comme
cela est habituellement admis [5]. Enfin l’équipe de l’Université
de Pennsylvanie a présenté une analyse exhaustive des coûts
engendrés par le traitement chirurgical des scolioses idiopathiques. Les différentes catégories de dépenses liées aux implants, aux structures d’hospitalisation, aux frais médicaux
25
International Society
for the Study of the Lumbar Spine (ISSLS)
Compte-rendu de la 36ème réunion annuelle (4- 8 mai 2009)
par Raphaël Vialle
Fig. 3 : Répartition des différentes dépenses liées au traitement chirurgical des scolioses idiopathiques.
etc… ont été détaillées (Fig. 3) et discutées sur la base d’une
meilleure rationalisation des postes de dépenses [6].
La participation des équipes Européennes et particulièrement
Françaises à cette réunion scientifique est, cette année encore, restée très discrète ce que l’on peut regretter d’autant
que les travaux cliniques et chirurgicaux sont généralement
bien acceptés. La 37ème réunion annuelle de l’ISSLS se tiendra à
Auckland en Nouvelle Zélande en juin 2010. La date limite de
soumission en ligne des résumés (http://www.issls.org/) est
fixée au 15 novembre 2009.
26
Références
1. M Schollum, P Robertson, N Broom, Auckland, New Zealand. A
fibre-level elucidation of the disc’s translamellar bridges.
2. Dr Stephen Olvey, University of Miami. Prevention of lumbar spine
and central nervous system injury. High velocity impact: “Lessons learned
from motor sports”
3. E Schnaser, J Toy, S Qureshi, P Gause, J Tinley, J Eubanks, N Ahn,
Cleveland, OH, USA. Disc degeneration is increased in subjects with spondylolysis at lumbar levels other than L5.
4. J Tinley, J Toy, P Gause, S Qureshi, J Eubanks, N Ahn, Cleveland, OH,
USA. Correlation of sacropelvic parameters with disc degeneration in spondylolytic cadaver specimens.
5. T Terai, K Sairyo, V Goel, N Ebraheim, A Biyani, A Faizan, T Sakai, N
Yasui, Toledo, OH, USA, Tokushima, Japan. Stress fracture as the initiation of spondylolysis is due to higher stresses in the vertebral aspect of pars
interarticularis: A clinical and biomechanical study.
6. J Kamerlink, M Quirno, J Auerbach, A Milby, L Dean, J Dryer, T Errico, B Lonner, Philadelphia, PA, New York, NY, Washington, USA. Cost
analysis of adolescent idiopathic scoliosis correction surgery in 125 consecutive cases.
Note complémentaire à l’article
« Qu’auriez-vous fait dans cette maladie de Blount ? »
par Dimitri POPKOV
En page 16 de la précédente Gazette, Dimitri POPKOV a envisagé les différentes propositions thérapeutiques à partir d’une revue de la
littérature. Malheureusement, pour des raisons de place, les références n’ont pas été citées. Nous rappelons que cette observation, présentée lors du séminaire de la SOFOP à Nancy, avait fait l’objet d’une discussion fructueuse raison pour laquelle nous avions souhaité
rappeler les principaux travaux publiés dans le n°27 de la Gazette. » Pierre LASCOMBES
La Gazette s’empresse de réparer cette omission. NDLR
1. Accadbled F, Laville JM, Harper L. One-step treatment for
evolved Blount’s disease: four cases and review of the literature. J Pediatr Orthop. 2003 Nov-Dec;23(6):747-52.
2. Bushnell BD, May R, Campion ER, Schmale GA, Henderson
RC. Hemiepiphyseodesis for late-onset tibia vara. J Pediatr Orthop.
2009 29(3): 285-9.
3. Canadell J, de Pablos J. Correction of angular deformities by
physeal distraction. Clin Orthop Relat Res. 1992 Oct; (283):98-105.
4. Chotigavanichaya C, Salinas G, Green T, Moseley CF, Otsuka NY. Recurrence of varus deformity after proximal tibial osteotomy in Blount disease: long-term follow-up. J Pediatr Orthop. 2002
22(5):638-41.
5. Clarke SE, McCarthy JJ, Davidson RS. Treatment of Blount Disease: a compaarison between the multiaxial correction system and
other external fixators. J Pediatr Orthop. 2009 29(2):103-9.
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distraction. An experimental study. Int Orthop. 1986; 10(3):163-70.
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10. Eidelman M, Bialik V, Katzman A. The use of the Taylor spatial
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11. Khok M, Shevchenko SD, Korzh NA, Popsushapka AK. Correction of crural deformity in children and adolescents with ErlacherBlount syndrome. Ortop Travmatol Protez. 1990 Mar; (3): 23-9.
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13. Laville JM, Chau E, Willemen L, Kohler R, Garin C. Blount’s
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16. Miller SM, Radomisli T, Ulin R. Inverted arcuate osteotomy
and external fixation for adolescent tibia vara. J Pediatr Orthop 2000
20(4): 450-4.
Réunions à venir
21-22 janvier 2010
Toulouse
9ème journée SOFAMEA
(analyse du mouvement)
www.sofamea.org
3-7 mai 2010
Waikoloa, Hawaii
Réunion annuelle
de la Posna
http://www.posna.org
30 janvier 2010
Paris
8ème Forum de l’Institut Marcel Kerboull
Malformation luxante
de la hanche
www.imk-forum.com
7-8 mai 2010
Nantes
42ème réunion du GES
organisateur : Simon Le Naelou
[email protected]
18-19 mars 2010
Arc-et-Senans
34ème séminaire
de la SOFOP
Organisateurs : Benoit de Billy et Michel Dutoit
16-19 juin 2010
Paris- Palais des Congrès
Congrès des Sociétés
de Pédiatrie
Séminaire paramédical (16-17 juin)
[email protected]
7-10 avril 2010
Zagreb
29ème réunion de l’Epos
www.epos.efort.org/zagreb2010
22-26 juin 2010
Genève
12ème congrès de l’AOLF
www.aolf2010.com
27
Nouveauté
Sauramps Médical
MARCHE PATHOLOGIQUE DE L’ENFANT
PARALYSÉ CÉRÉBRAL
G.F. Penneçot
Isbn : 978 284023 610 8
336 pages
novembre 2009
72 €
SOMMAIRE
LA MARCHE
THÉRAPEUTIQUE
Chapitre 1 — La marche normale
Chapitre 2 — Anatomie fonctionnelle
Chapitre 3 — La marche anormale
Chapitre 4 — Les troubles de rotation
Chapitre 5 — Le laboratoire d’analyse de la
marche
Chapitre 14 — Introduction et stratégie
Chapitre 15 — La kinésithérapie
Chapitre 16 — Moyens médicamenteux
par voie générale
Chapitre 17 — Utilisation de la toxine botulique type A chez l’enfant atteint
de paralysie cérébrale
Chapitre 18 — Orthèses : appareillage de
l’IMC marchant
Chapitre 19 — Moyens thérapeutiques :
neurochirurgie
Chapitre 20 — Chirurgie orthopédique
Chapitre 21 — La rééducation et les soins
infirmiers postopératoires immédiats
(après chirurgie orthopédique multisite)
Chapitre 22 — Rééducation en centre
LA PARALYSIE CÉRÉBRALE
Chapitre 6— Généralités sur la paralysie
cérébrale
Chapitre 7 — Les troubles de la marche liés
à la spasticité : physiopathologie
Chapitre 8 — Analyser les troubles de la
marche
Chapitre 9 — Reconnaître l’origine des
troubles de la marche
Chapitre 10 — Analyse des troubles de rotation et recherche de leur origine
Chapitre 11 — En pratique la démarche à
suivre
Chapitre 12 — L’hémiplégique
Chapitre 13 — Le diplégique spastique
28
ÉVALUATION
Chapitre 23 — Evaluation et traitement de
la douleur chez l’enfant handicapé
Chapitre 24 — Evaluation
Chapitre 25 — Exemples - Etude de cas
Chapitre 26 — Tableaux
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