Glaucome
Luxation antérieure du cristallin
dans le cadre d’un syndrome de Marfan
Syndrome de Marfan • Glau-
come aigu • Implant à fi xation
sclérale.
Marfan syndrom • Acute glau-
coma • Scleral fi xated IOLs.
Images en Ophtalmologie
•
Vol. III
•
n° 1
•
janvier-février-mars 2009
20
Cas clinique
Anterior lens dislocation in Marfan syndrom
C. Khammari, O. Le Quoy, J. Zerbib, D. Gatinel
(Fondation ophtalmologique Adolphe de Rothschild, Paris)
Mme T., âgée de 48 ans, atteinte d’un syndrome de Marfan, se présente aux
urgences avec des douleurs aiguës à l’œil droit accompagnées de cépha-
lées et de nausées.
L’examen met en évidence un œdème de cornée, une luxation en chambre antérieure
du cristallin, dont l’équateur se situe en avant de l’iris sauf en supérieur, et une
tension oculaire mesurée à 65 mmHg à l’aplanation
(fi gures 1 et 2)
.
L’examen de l’œil adelphe montre une acuité visuelle à 7/10 avec – 8,50 (– 3,00 à 30°),
une ectopie cristallinienne supérieure et un fond d’œil normal.
Le traitement médical instauré en urgence, associant des hypotonisants locaux et
généraux, une dilatation pupillaire et un repos en décubitus dorsal, a échoué à faire
reculer le cristallin et baisser la tension oculaire.
Le traitement chirurgical a été planifi é en deux temps.
Une première intervention réalisée par un abord cornéen sous anesthésie topique
complétée par une injection de lidocaïne en chambre antérieure a permis de réinté-
grer le cristallin luxé en chambre postérieure. La tension oculaire s’est rapidement
normalisée, ce qui a permis d’éclaircir la cornée, puis de réaliser un calcul d’ implant
(fi gure 3)
.
Une seconde intervention a comporté une phacoémulsifi cation par voie antérieure
dans le sac cristallinien
(fi gure 4)
ainsi qu’une vitrectomie complète avec ablation
de la hyaloïde postérieure et vérifi cation de la périphérie rétinienne. La correction
de l’aphaquie a été effectuée par un implant en PPMA d’optique de 7 mm et d’un
diamètre total de 13 mm (Morcher 81F) qui est suturé à la sclère. L’incision scléro-
cornéenne est temporale supérieure, autoétanche, sans suture, de 8 mm de large
(fi gure 5)
, tunellisée sur 5 mm. La fi xation est assurée par quatre points d’ancrage au
niveau du sulcus ciliaire repéré au préalable par transillumination. La
fi gure 6
montre
l’état de l’œil immédiatement après l’opération.
Les suites opératoires ont été simples, avec une normalisation durable des chiffres
tensionnels.
Discussion
Le syndrome de Marfan a été décrit pour la première fois en 1896. C’est une maladie
héréditaire du tissu conjonctif qui se transmet sur le mode autosomique dominant,
à pénétrance incomplète et à expressivité variable. Elle est due à une mutation du
gène fi brilline-1 (FBN1), qui se trouve sur le chromosome 15. Sa prévalence varie de
1/ 5 000 à 1/ 20 000
(1)
. Elle se manifeste au niveau des organes dérivés du mésoderme,
essentiellement l’œil, le squelette et l’aorte. Les manifestations oculaires, fréquentes,
surviennent dans 60 à 87 % des cas. L’examen ophtalmologique est primordial dans
le diagnostic et le suivi de cette maladie. Les critères ophtalmologiques de diagnostic
de la maladie de Marfan comportent un critère majeur et des critères mineurs. Le
critère majeur est l’ectopie cristallinienne, qui a une grande valeur diagnostique :
Légendes
Figure 1. Conséquences cornéennes de
la luxation cristallinienne antérieure :
œdème stromal et plis de la membrane de
Descemet.
Figure 2. Cristallin luxé en chambre anté-
rieure : image en rétro-illumination.
Figure 3. Après réintégration du cristallin
en chambre postérieure : visibilité de l’équa-
teur au niveau de l’aire pupillaire et rupture
zonulaire.
Figure 4. Phacoémulsifi cation dans le sac
capsulaire du cristallin ectopique évitant
l’ essaimage des masses cristalliniennes dans
la cavité vitréenne
Figure 5. Dissection du volet sclérocornéen
autoétanche supérieur par lequel va être
glissé l’implant.
Figure 6. Aspect postopératoire.