UNIVERSITÉ STENDHAL-GRENOBLE 3 ⎜ UFR LLASIC ⎜ LETTRES & ARTS DU SPECTACLE LICENCE 3 ⎜ SEMESTRE 5 ⎜ ANNÉE 2011-2012 Littérature française classique ⎜ gr. 3 : M. Roukhomovsky ⎜ mercredi 13h30-15h30 ⎜ salle C102 Courriel : [email protected] ⎜ Permanence : mercredi 15h30-17h30, bureau B228 DU MONDE CLOS À L’UNIVERS INFINI LITTÉRATURE ET RÉVOLUTION SCIENTIFIQUE Œuvres étudiées (à se procurer dans l’édition indiquée*) CYRANO DE BERGERAC, L’Autre monde ou les États et Empires de la Lune, suivi de Les États et Empires du Soleil, éd. Jean Prévot, Gallimard (Folio). FONTENELLE, Entretiens sur la pluralité des mondes, éd. Christophe Martin, Flammarion (GF Dossier). Supports textuels complémentaires : extraits mis à disposition par l’enseignant. *Liste communiquée à la librairie « Le Square / Librairie de l’Université », pl. du Docteur-Martin, 38000 Grenoble. L’envol de Cyrano vers les États et Empires de la Lune et du Soleil (gravure anonyme du XVIIe siècle). ÉVALUATION : 1-La note de contrôle continu (40% de la note semestrielle) est la moyenne de 2 notes correspondant aux 2 exercices suivants : -1 devoir écrit (commentaire composé au S5) à remettre impérativement le 09/11 (voir sujet page suivante) ; -1 travail oral (durée 20mn) ou écrit : il s’agit d’une explication de texte linéaire ou d’une étude littéraire (voir calendrier des exercices page suivante : les étudiants qui ne seront pas inscrits pour une présentation orale remettront un travail écrit correspondant à l’un des exercices proposés (au choix, à remettre au plus tard à la date de la présentation orale correspondante). 2-La note d’examen final (60% de la note semestrielle, 100% pour les dispensés de contrôle continu) : il s’agira au S5 d’un commentaire composé (texte extrait de l’une des deux œuvres au programme). CALENDRIER DU SEMESTRE 21/09 SÉANCE INTRODUCTIVE 1 1/Organisation du semestre 2/ Brève introduction générale 3/ Repères méthodologiques 28/09 SÉANCE INTRODUCTIVE 2 (apporter impérativement les 2 livres) De la science à la littérature 05/10 SÉANCE INTRODUCTIVE 3 (apporter impérativement les 2 livres) Les sources philosophiques et littéraires SÉQUENCE 1 : Cyrano 12/10 Sous le signe de Prométhée Explication 19/10 Logique du chiasme Étude litt. 02/11 Le procès : p. 109 (« Me voilà donc décagé… ») à p. 112 (« …croyiez”. ») Renversement et paradoxe Étude litt. 09/11 L’incipit : p. 45 (« La lune était en son plein… ») à p. 46 (« …confirmer. ») Plaidoyer pour le chou : p. 122 (« Voilà les discours… ») à p. 125 (« …CHOU CABUS. ») Le sillage épicurien Explication Variation sur l’infini : p. 126 (« Il me reste à prouver… ») à p. 127 (« …océan. ») SÉQUENCE 2. Fontenelle 16/11 Le spectacle du monde Étude litt. 23/11 Dialogue avec Pascal Explication 30/11 L’incipit : p. 58 (« Nous allâmes donc… » à p. 65 (« …montrer le monde. ») Perspective : p. 142 (« Vous m’offrez… ») à p. 144 (« …de tous les mondes possibles. ») Fonction de la fiction Étude litt. Les abeilles : p. 116 (« Êtes-vous contente… ») à p. 118 (« …vous le dire. ») 07/12 SÉANCE CONCLUSIVE 1 1/ Bilan de correction du commentaire composé 2/ Brève conclusion générale 14/12 SÉANCE CONCLUSIVE 2 1/ Compléments et prolongements 2/ Perspectives de recherche en vue du master IMPORTANT : les étudiants veilleront à relire attentivement avant chaque cours le(s) passage(s) appelé(s) à faire l’objet d’une explication et à apporter leur exemplaire en cours. 09/11 Date limite de remise du devoir (contrôle continu) Commentaire composé : p. 113 (« Vous vous étonnez… ») à p. 115 (« …de l’encens. ») Littérature et Révolution scientifique - 2 REPÈRES BIBLIOGRAPHIQUES Il est rappelé que la lecture des ouvrages critiques ne doit en aucun cas se substituer à la fréquentation personnelle et assidue des textes au programme, qu’elle a vocation à éclairer, à nourrir et à compléter. OUTILS DE TRAVAIL Cayrou (Gaston), Dictionnaire du français classique. La Langue du XVIIe siècle, rééd. Livre de Poche, 2000. La 1re édition (1694) du Dictionnaire de l’Académie française est consultable à l’adresse http://artfl.atilf.fr/dictionnaires/ACADEMIE/PREMIERE/premiere.fr.html suivante : 2. LES TEXTES 2-1. Cyrano Bertrand (Dominique), « Science et littérature : polyphonies burlesques ou de la Lune à la Terre », dans De la science en littérature à la science-fiction, sous la dir. de D. Jacquart, Paris, Éditions du CTHS, 1996. Darmon (Jean-Charles), Philosophie épicurienne et littérature au XVIIe siècle, Paris, Presses universitaires de France, 1998. Darmon (Jean-Charles), Le Songe libertin. Cyrano de Bergerac d’un monde à l’autre, Paris, Klincksieck, 2004. Seguin (Maria Susana), « Raison et invention dans Les États et empires de la lune et du soleil : du discours scientifique au discours littéraire », Littératures classiques, n° 5, 2004 p. 159-172. 2-2. Fontenelle Boch (Julie), « Éloge de la myopie : Fontenelle opticien », dans L’Optique des moralistes de Montaigne à Chamfort, textes recueillis et présentés par B. Roukhomovsky, Paris, H. Champion, octobre 2005. Delon (Michel), « La marquise et le philosophe », Revue des sciences humaines, n° 182, avril-juin 1981, p. 65-78. Mortureux (Marie-Françoise), « Les Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle : discours scientifique, discours littéraire », Littérature, n° 4, 1971. 3. LE CONTEXTE 3-1. Histoire de la révolution scientifique (de Copernic à Newton) Blay (Michel), La Naissance de la science classique au XVIIe siècle, Paris, Nathan, coll. 128, 1999. Giordano Bruno/Galilée, revue Europe, n° 937, mai 2007. Hallyn (Fernand), La Structure poétique du monde. Copernic, Kepler, Paris, Seuil, 1987. Hallyn (Fernand), « Du cosmos à l’univers : les images du monde », in Histoire de la France littéraire. Classicismes, sous la dir. de J.-C. Darmon et M. Delon, Paris, PUF, 2006, p. 157-179. Kuhn (Thomas), La Révolution copernicienne, Paris, Fayard, 1973 [éd. originale 1959] Koyré (Alexandre), Du monde clos à l’univers infini, Paris, Gallimard, 1973. 3-2. Littérature et science dans la période étudiée (XVIIe-XVIIIe s.) L’Art d’écrire la science. Anthologie de textes savants du XVIIIe siècle français, textes rassemblés et présentés par Frédéric Charbonneau, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006. Ehrard (Jean), L’Idée de nature en France dans la première moitié du XVIIIe siècle, Paris, Flammarion, 1970. Fricheau (Catherine), « Savoirs, techniques et esthétiques de l’espace à l’âge classique », in Histoire de la France littéraire. Classicismes, sous la dir. de J.-C. Darmon et M. Delon, Paris, PUF, 2006, p. 215-290. Hocquet (Thierry), Buffon. Histoire naturelle et philosophie, Paris, Champion, 2005. Littérature et anatomie (XVIe-XVIIe siècle), textes rassemblés par L. Van Delft, Cahiers de l’Association Internationale des Études Françaises, n° 55, 2003. Lotterie (Florence), « Mutation des savoirs au XVIIIe siècle », in Histoire de la France littéraire. Classicismes, sous la dir. de J.-C. Darmon et M. Delon, Paris, PUF, 2006, p. 198-214. Roger (Jacques), Les Sciences de la vie dans la pensée française du XVIIIe siècle, Paris, Armand Colin, 1973. Roukhomovsky (Bernard), « “Comme l’anatomie a trouvé dans le cœur…” : la métaphore anatomique chez les moralistes classiques », in Lambertiana, éd. par P.-E. Bour et S. Roux, Paris, Vrin, 2010, p. 15-35. Rousseau et les sciences de la vie, sous la dir. de B. Bensaude-Vincent et B. Bernardi, Paris, L’Harmattan, 2003. 3-3. Littérature et science : références complémentaires, généralités Conversations entre la littérature, les arts et les sciences, sous la dir. de L. Dahan-Gaida, Presses universitaires de Franche-Comté, 2006. De la science en littérature à la science-fiction, sous la dir. de D. Jacquart, Paris, Éditions du CTHS, 1996. Hallyn (Fernand), Les Structures rhétoriques de la science, Paris, Seuil, 2004. Hallyn (Fernand), « Littérature et science », Littérature, n° 82, 1991. Raichvarg (Daniel) et Jacques (Jean), Savants et ignorants. Une histoire de la vulgarisation des sciences, Seuil, 1991. Roukhomovsky (Bernard), « De la science à la littérature : passeurs et passerelles », Nouvelle Revue Pédagogique / NRP Lettres Lycée, n° 36, septembre 2009, p. 10-19. Serres (Michel), La Naissance de la physique dans le texte de Lucrèce. Fleuves et turbulences, Paris, Éd. de Minuit, 1977. Vierne (Simone), « Liaisons orageuses : la science et la littérature », dans Science et imaginaire, Ellug, 1985. Littérature et Révolution scientifique - 3 REPÈRES CHRONOLOGIQUES La révolution scientifique 1543 1584 1596 1600 1604 1610 1618 1628 1632 1633 1637 1647 1664 1672 1687 1727 1738 Nicolas Copernic (De Revolutionibus) présente un modèle d’univers héliocentrique et fini André Vésale (De humani corporis fabrica) inaugure l’histoire moderne de l’anatomie Giordano Bruno avance l’idée d’un univers infini (L’Infini, l’univers, et les mondes) Kepler (Mysterium cosmographicum) adopte et défend le système copernicien Giordano Bruno est brûlé vif à Rome Kepler (Paralipomènes à Vitelion) bouleverse la science de l’optique Galilée (Sidereus Nuncius) publie ses premières observations à la lunette (satellites de Jupiter) Construction du premier microscope Villiam Harvey découvre le principe de la circulation sanguine Galilée publie le Dialogue sur les deux grands systèmes du monde (ptoléméen et copernicien) Procès et abjuration de Galilée Descartes publie le Discours de la Méthode suivi de la Dioptrique, les Météores et la Géométrie Pascal publie les Expériences nouvelles touchant le vide Publication posthume du traité de Descartes, Le Monde ou Traité de la lumière Newton présente à Londres sa théorie de la lumière et des couleurs Newton publie à Londres ses Philosophiae naturalis principia mathematica Fontenelle publie ses Éléments de la géométrie de l’infini Vaucanson présente ses automates (joueur de flûte et canard « digérateur ») Littérature et science •Lucrèce (Ier siècle av. J.-C.), De Rerum Natura (De la Nature) •Pontano (XVe siècle), les Météores et l’Uranie •Peletier du Mans, L’Amour des Amours (1555) •Ronsard, L’Hymne du Ciel (1556) •Du Bartas, La Semaine ou Création du Monde (1578) •Habert, Météores (1585) •Christophe de Gamon, La Semaine ou Création du monde (1599) •Kepler, Le Songe ou Astronomie lunaire (1634) •Francis Godwin, L’Homme dans la lune (1638) •Cyrano de Bergerac, Les États et empires de la Lune et du Soleil (1657-1662) •Bernard Lamy, Entretiens sur les sciences, dans lesquels on apprend comme l’on doit se servir des sciences pour se faire l’esprit juste et le cœur droit (1675) •Fontenelle, Entretiens sur la pluralité des mondes (1686) •Montesquieu, Observations sur l’histoire naturelle (1721) •Abbé Pluche, Le Spectacle de la nature (1732-1750) •Voltaire, Éléments de la philosophie de Newton, mis à la portée de tout le monde (1738) •Rousseau, Institutions chimiques (1747) •Buffon, Histoire naturelle, 44 vol. (1749-1804), Discours sur le style (1753) •Lebrun-Pindare, Ode sur les Causes physiques des tremblements de terre (1755), À Buffon (1771). •Diderot, Le Rêve de d’Alembert (1769), Principes philosophiques sur la matière et le mouvement (1770), Éléments de physiologie (1778) •Fontanes, L’Astronomie (1781) Impact(s) thèmes / formes « Littérature » Rôle(s) Révolution scientifique rhétorique / heuristique Littérature et Révolution scientifique - 4 REPÈRES MÉTHODOLOGIQUES L’EXPLICATION DE TEXTE L’explication de texte (durée globale = 20mn) se déroule en six étapes distinctes qu’il convient cependant d’enchaîner avec souplesse et sans jamais perdre de vue la cohésion de l’ensemble. 1. La situation du texte Elle doit être précise et concise, éclairante et porteuse de sens : on s’en tiendra résolument aux indications directement utiles à l’intelligence du texte et à l’explication, en se situant d’emblée dans la perspective de cette explication. Situer le texte, s’il s’agit d’un extrait, dans l’économie générale de l’œuvre dont il est tiré n’est pas résumer tout ce qui le précède. On évitera de même les fragments de notices biographiques et autres entrées en matière qui ne se justifient pas dès lors qu’elles n’amorcent pas en effet la dynamique de l’explication. 2. La lecture du texte Il importe de ne pas négliger cette étape (comme on le voit trop souvent). Rien n’indispose davantage qu’une lecture monotone, monochrome, inattentive et mécanique. C’est au contraire donner un gage de votre bonne compréhension du texte que d’en respecter l’agencement, le mouvement et la ponctuation, de marquer avec discrétion la construction des phrases et la valeur des mots, etc. 3. La structure du texte Ce que la lecture à haute voix aura su faire apparaître (ou suggérer), il faut à présent le décrire brièvement : il s’agit de rendre compte de l’organisation du texte — de son mouvement interne — et d’en marquer les articulations ; en aucun cas il ne s’agit de le “démembrer”, de le “saucissonner”, de débiter en tranches ce texte dont précisément on se propose (c’est la “philosophie” de l’exercice et son horizon) de mettre en évidence la cohérence et l’unité. 4. Le projet de lecture C’est à ce point critique qu’intervient l’étape la plus importante (et, malheureusement, la plus souvent négligée ou bâclée…) : mettre en évidence la cohérence du texte (ou ce qui la fonde), c’est en effet dégager une idée directrice pertinente et efficace pour l’ensemble du texte, c’est-à-dire un projet de lecture tout à la fois ferme et compréhensif — ni trop large (sauf à manquer la spécificité du texte), ni trop restreint (sous peine d’en amoindrir l’intérêt et la portée). Ne pas oublier non plus qu’un projet de lecture n’est pas un bilan de lecture : il s’agit de tracer une perspective, d’annoncer ce que l’on va s’efforcer de faire, il ne s’agit pas de conclure prématurément (sous peine d’émousser la curiosité de l’auditoire). 5. L’explication linéaire Sensiblement plus développée que les étapes précédentes, l’explication linéaire, comme son nom l’indique, épouse le mouvement du texte et en respecte les articulations (en d’autres termes : l’explication linéaire est un propos organisé, mais son organisation coïncide avec celle du texte expliqué). Il ne s’agit nullement d’accumuler “au fil de la lecture“ des remarques disparates et dispersées, minutieuses mais fragmentaires (c’est le défaut le plus grave et malheureusement… le plus courant). Une explication qui se tient — qui ne s’atomise pas en une poussière de remarques ou d’impressions discontinues — est cimentée par la perspective de lecture définie (étape précédente) : il importe de ne jamais perdre de vue ce projet fédérateur, de sélectionner et d’organiser l’ensemble des remarques de manière à les faire entrer dans ce projet, à les inscrire dans cette perspective. 6. La conclusion Point d’aboutissement de l’enquête, la conclusion a vocation à résumer avec vigueur et netteté les résultats qu’elle a permis de dégager, c’est-à-dire à évaluer la pertinence (et pour ainsi dire le “rendement”) du projet de lecture retenu. Littérature et Révolution scientifique - 5 REPÈRES MÉTHODOLOGIQUES LE COMMENTAIRE COMPOSÉ (ÉCRIT) L’ÉTUDE LITTÉRAIRE (ORAL : 20MN) 1. L’INTRODUCTION a/ situation du texte : D’abord, situer le texte à commenter à l’intérieur d’un ensemble plus vaste (vie et œuvre de l’auteur, genre ou courant littéraire, champ thématique…) mais aussi à l’intérieur de l’œuvre dont ce texte est tiré : dans tous les cas, les informations données à titre liminaire ne doivent pas l’être sans raison(s), en quelque sorte gratuitement, elles doivent mener à quelque chose, elles doivent amener logiquement à la présentation du texte. b/ présentation du texte et du projet de lecture : Le texte à commenter brièvement identifié, il convient de présenter, avec élégance et concision, ses caractères remarquables, thématiques et/ou formels — caractéristiques susceptibles d’en faire apparaître l’intérêt et, dans le même temps, de déterminer ou sélectionner une certaine manière de l’aborder, en d’autres termes : d’assigner au commentaire un objectif central et fédérateur. Il est important d’énoncer fermement ce projet de lecture et de le garder constamment présent à l’esprit : c’est le plus sûr moyen d’éviter de tomber dans le “patchwork” ; un commentaire composé n’est pas un “montage” d’analyses indépendantes. c/ le “plan” ou progression : Il reste pour finir à décliner cette orientation générale, c’est à dire à définir les axes de lecture ou, si l’on préfère, annoncer le plan du commentaire. De fait, dans le cas du commentaire composé, à la différence de l’explication suivie, ce n’est pas la continuité du texte qui commande la construction du devoir, mais les angles de vue (= axes de lecture) adoptés (2, 3 ou 4 au maximum), c’est-à-dire les aspects (thématiques ou formels) que l’on se propose d’étudier par vagues successives et l’ordre selon lequel on se propose de les étudier. Insistons sur un point capital : il ne s’agit pas de dissocier différents aspects du texte, mais au contraire de montrer que ces différents aspects sont étroitement solidaires, solidarité qui fonde la cohérence interne dudit texte : les “parties” du développement s’inscrivent donc bel et bien dans l’économie d’une progression d’ensemble. 2. LE DÉVELOPPEMENT L’organisation du développement : Un commentaire composé — il faut le répéter — est un commentaire construit, ce n’est pas une collection dispersée de remarques indépendantes. Il importe donc de s’astreindre à respecter méthodiquement la progression définie, d’en souligner les étapes et d’en mettre en évidence les articulations par des transitions judicieusement ménagées. Il faut éviter, en la matière, deux travers symétriques : le premier consiste dans un excessif cloisonnement entre les différents aspects étudiés, ce qui a pour effet d’escamoter le dynamisme propre au texte ; le second consiste au contraire à multiplier les redites et les rappels, au risque de lasser le lecteur, mais aussi de l’égarer. Il importe également de prendre en compte, s’il est remarquable et signifiant, le mouvement propre du texte, sans pour autant réintroduire subrepticement dans l’exposé, localement ou globalement, une démarche d’explication linéaire. D’un texte à l’autre - l’inscription du texte commenté dans le texte-commentaire : Le texte commenté doit être régulièrement allégué, convoqué par le texte-commentaire : il s’agit pour celui-ci d’interroger ou de prendre à témoin celui-là, il ne s’agit évidemment pas de le dupliquer, voire de le reformuler (cela, c’est de la paraphrase — ce qu’il ne faut jamais faire). Littérature et Révolution scientifique - 6 a/ les citations : Outre le respect des usages typographiques (emploi des guillemets, barre oblique en limite de vers…), il convient de choisir avec discernement, en s’efforçant de les diversifier, entre plusieurs formes possibles d’intégration : - citation détachée (introduite par deux points) ; - citation insérée dans la phrase (sans en interrompre le mouvement) ; - très brèves citations entre parenthèses (ne pas abuser de ce procédé). Dans tous les cas, la citation doit s’intégrer utilement et logiquement au devoir, c’est-à-dire servir à des fins de démonstration et/ou d’illustration : elle doit venir étayer le commentaire, en aucun cas en tenir lieu : un commentaire composé n’est pas un montage de citations, même classées… Il convient aussi de proscrire les citations trop longues, trop nombreuses, inopportunes ou redondantes. b/ autres éléments : Mais la citation ne constitue pas le seul et unique moyen de prendre à témoin le texte commenté. Au contraire, un bon commentaire sait prendre appui sur un ensemble diversifié et cohérent d’éléments significatifs : faits de langue et de style, faits de syntaxe, composition, opposition et/ou répétition de motifs thématiques, champs lexicaux, dispositif(s) énonciatif(s)… tout cela peut s’avérer particulièrement signifiant. Quels que soient les aspects envisagés, il convient d’être particulièrement attentifs -aux effets de redondance d’une part, -aux effets de rupture de l’autre. Pour commenter un texte il faut donc constamment le citer — mais dans le sens juridique du terme (“citer” un témoin à comparaître) : citer le texte à comparaître pour infirmer ou confirmer vos hypothèses ; et, s’il rechigne à parler, ne pas hésiter à… mettre le texte à la question. 3. LA CONCLUSION Elle a pour fonction : a/ de faire œuvre de récapitulation (retracer les étapes de l’analyse). b/ d’évaluer globalement la pertinence de l’orientation générale de lecture définie dans l’Introduction (volet “b”). c/ de faire œuvre d’ouverture : suggérer un élargissement de la perspective, par exemple à l’œuvre à laquelle appartient le texte, à l’époque historique dont il est le miroir ou le produit, au corpus au sein duquel, à des titres divers, il est susceptible de prendre place, etc. « L’étude des textes ne peut jamais être assez recommandée ; c’est le chemin le plus court, le plus sûr et le plus agréable pour tout genre d’érudition. Ayez les choses de la première main ; puisez à la source ; maniez, remaniez le texte ; apprenez-le de mémoire ; citez-le dans les occasions ; songez surtout à en pénétrer le sens dans toute son étendue […]. Les premiers commentateurs se sont trouvés dans le cas où je désire que vous soyez : n'empruntez leurs lumières et ne suivez leurs vues qu’où les vôtres seraient trop courtes ; leurs explications ne sont pas à vous, et peuvent aisément vous échapper ; vos observations au contraire naissent de votre esprit et y demeurent […]. Achevez ainsi de vous convaincre par cette méthode d’étudier, que c’est la paresse des hommes qui a encouragé le pédantisme […] à faire périr le texte sous le poids des commentaires […]. » LA BRUYÈRE, Les Caractères, « De quelques usages », 72. Littérature et Révolution scientifique - 7