Nombres p-adiques - Laboratoire de Mathématiques

Nombres p-adiques : prise de notes
Jo¨el Cohen
20 octobre 2010
Table des mati`eres
1 Motivation 1
1.1 Perspective .............................................. 1
1.2 Equationsdiophantiennes ...................................... 2
2 Construction de l’anneau Zp3
2.1 D´enition ............................................... 3
2.2 Extension de Z............................................ 4
3 Topologie de Zp5
3.1 Valuation p-adique .......................................... 5
3.2 Norme p-adique............................................ 5
3.3 Arithm´etique de Zp.......................................... 5
3.4 Topologie ............................................... 6
3.5 Propri´et´es de la topologie de Zp................................... 6
3.5.1 Compact ........................................... 6
3.5.2 Ultram´etrique......................................... 6
3.5.3 Totalementdiscontinu .................................... 7
4 efinition et topologie de Qp7
5 Lemme de Hensel 7
Ce sont les notes personnelles d’un expos´e d’introduction aux nombres p-adiques donn´e pour le s´eminaire
des doctorants du laboratoire de Math´ematiques de l’Universit´e Blaise Pascal, Clermont-Ferrand. Rien de
plus.
1 Motivation
1.1 Perspective
Pour chaque ppremier, on va construire de “nouveaux nombres”, appel´e nombres p-adiques. D’une part
un anneau topologique not´e Zp(entiers p-adiques) qui ´etend l’anneau Zdes entiers, et d’autre part un
corps topologique not´e Qp(nombres p-adiques) qui ´etend le corps Qdes rationnels. Les nombres p-adiques
Qpforment le corps des fractions des entiers p-adiques Zp(c’est-`a-dire que tout ´el´ement de Qpest un quotient
de deux ´el´ements de Zp), tout comme Qest le corps des fractions de Z. Il est essentiel de noter que ces deux
1
1 MOTIVATION 2
ensembles sont munis conjointement d’une structure alg´ebrique (anneau ou corps) et d’une topologie (ce qui
fait en grande partie leur inerˆet).
Zcompl´etion
//
fractions
Zp
fractions
Qcompl´etion
//Qp
Il s’agit bien de constructions vraiment nouvelles au sens o`u Qpmuni de sa topologie ne peut pas s’injecter
dans Cde mani`ere continue, et le corps Qpest strictement plus grand que Q(et de dimension inifinie sur
Q). Par ailleurs les nombres p-adiques d´ependent r´eellement du choix du nombre premier p. En effet, pour
p6=ldeux nombres premiers distincts, les anneaux Zpet Zlsont diff´erents (non isomorphes) et de mˆeme
pour Qpet Ql.
1.2 Equations diophantiennes
Probl`eme : Soit fZ[X1, . . . , Xd] un polynˆome `a dvariables `a coefficients entiers, on cherche dentiers
(x1, . . . , xd)Zdtels que
f(x1, . . . , xd) = 0 (1)
C’est ce qu’on appelle une ´equation diophantienne. C’est un probl`eme souvent tr`es difficile, notamment parce
que Zest un ensemble infini (il n’est pas question d’essayer toutes les possibilit´es unes `a unes) et relativement
pauvre en structures (pas d’inversion, pas de limites etc).
Exemple 1.1. On peut citer les exemples classiques d’´equations diophantiennes :
1. Savoir si le polynˆome P=Pn
k=0 akXkposs`ede une racine rationnelle revient `a chercher des solutions
(x, y)Z2`a
n
X
k=0
akxkynk= 0
avec y6= 0, auquel cas le quotient x
yest racine de P. Par exemple, montrer que 2est irrationnel
revient `a montrer que l’´equation f=X22Y2n’admet pas de z´eros entiers non nuls.
2. Pour f=X2+Y2Z2, on trouve une ´equation qui admet de nombreuses (une infinit´e) solutions
non triviales appel´ees triplets pythagoriciens, comme (3,4,5). On peut donner une description compl`ete
de tous les triplets pythagoriciens. Le triplet (x, y, z)est pythagoricien si et seulement s’il existe des
entiers u, v, w Ztels que (`a permutation pr`es de xet y)
x=w(u2v2)
y= 2uvw
z=w(u2+v2)
3. Pour p3premier et f=Xp+YpZp, on retrouve l’´equation de Fermat. Ce dernier avait conjectur´e
qu’elle n’admettait pas de solution hormis celles ´evidentes obtenues en annulant x,you z. Il a fallu
environ 350 ans pour parvenir `a le prouver (A. Wiles, 1994).
2 CONSTRUCTION DE L’ANNEAU ZP3
Une id´ee est de r´eduire l’´equation (1) modulo n(pour nN), ce qui ram`ene `a un probl`eme fini dans
(Z/nZ)d. La philosophie est que si l’´equation (1) admet une solution, alors l’´equation r´esiduelle (modulo n)
admet une solution.
(1) admet une solution =(1) admet une solution modulo n
Ou en contrapos´ee
(1) n’a pas de solution modulo n=(1) n’a pas de solution
Exemple 1.2. Donnons pour illustrer une d´emonstration de l’irrationnalit´e de 2qui utilise ce principe.
Posons f=X22Y2. Supposons par l’absurde que f(x, y)=0admet une solution (x, y)Z2non nulle.
Quitte `a diviser xet ypar leur pgcd (ce qui reste solution), on peut supposer qu’ils sont premiers entre eux.
Modulo 3, on a
x22y2≡ −y2mod 3
Comme xet ysont premier entre eux, l’un d’eux est non nul modulo 3, et donc finalement aucun n’est nul
modulo 3. En particulier, yest inversible modulo 3, notons y1son inverse modulo 3. On a donc
xy12≡ −1 mod 3
Mais par le petit th´eor`eme de Fermat, on trouve par ailleurs
xy121 mod 3
Ce qui est manifestement absurde. En conclusion f(x, y) = 0 n’admet aucune solution non nulle, et 2est
irrationnel.
Malheureusement, la r´eciproque est fausse en g´en´eral. Donc bien souvent, regarder modulo un seul entier
nne suffit pas. Une id´ee pour augmenter les chances d’une r´eciproque consiste `a consid´erer ensemble un
“paquet” d’´equations r´esiduelles (modulo npour tout nN). On peut effectuer deux r´eductions du fait
que ces ´equations r´esiduelles ne sont pas ind´ependantes les unes des autres. La premi`ere r´esulte du th´eor`eme
suivant.
Th´eor`eme 1.3 (Th´eor`eme des restes chinois 1).Si a, b Zsont deux entiers premiers entre eux, alors on
a un isomorphisme d’anneaux
Z/aZ×Z/bZ'Z/abZ
Le th´eor`eme nous assure que r´esoudre l’´equation (1) modulo aet b(dans ses notations) ´equivaut `a la
r´esoudre modulo ab. Si on veut, on peut donc se contenter de regarder l’´equation modulo pnpour tout
nombre premier pet entier 2nN.
2 Construction de l’anneau Zp
2.1 D´efinition
Dans toute la suite, on fixe donc pun nombre premier (p= 2,3,5,7,...,243112609 1, . . . ). La seconde
r´eduction est que si l’on connaˆıt la solution de (1) modulo pn+1, on la d´eduit modulo pn(o`u nN).
1. C’est le th´eor`eme qui est chinois.
2. L’´equation modulo p0= 1 n’a pas grand inerˆet, mais je la rajoute pour des questions de notation.
2 CONSTRUCTION DE L’ANNEAU ZP4
Formellement, si nN, on a dispose du morphisme d’anneaux
ϕn:Z/pn+1ZZ/pnZ
xmod pn+1 7−xmod pn
qui est bien d´efini (au sens o`u l’image ne d´epend pas du choix du repr´esentant x) parce que si xy
mod pn+1, alors en particulier xymod pn. Et ϕntransforme une solution modulo pn+1 en solution
modulo pn(puisque ϕnest un morphisme d’anneaux). En d´efinitive, le “paquet” des solutions modulo pn
vit donc dans l’anneau suivant (les op´erations somme et produit sont d´efinies terme `a terme).
Zp=((xn)nNY
nN
Z/pnZ, ϕn(xn+1) = xn)= lim
ϕn
Z/pnZ
2.2 Extension de Z
On a alors le morphisme de plongement diagonal
i:ZZp
x7−(xmod pn)nN
qui est injectif (si xmod pn= 0 pour tout nN, alors tous les pndivisent x). Ce qui permet de consid´erer
ZZp
Exemple 2.1. Pour illustrer que Zpest strictement plus grand, regardons Z3. Dans Z3on consid`ere l’entier
3-adique suivant
x= (
n1
X
k=0
3kmod 3n)nN
C’est effectivement un entier 3-adique puisque la suite v´erifie bien la condition de r´eduction (on a Pn
k=0 3k
Pn1
k=0 3kmod 3n). On v´erifie par ailleurs que
2x= (3n1 mod 3n)nN
= (1 mod 3n)nN
=1
Donc xest dans Z3mais pas dans Z.
On prolonge l’exemple pr´ec´edent si on remarque qu’un entier est inversible dans Z/pnZsi et seulement si
pne le divise pas. On en d´eduit que tous les entiers premiers `a pont un inverse dans Zp(les inverses modulo
pnexistent tous et sont compatibles aux morphismes de r´eductions ϕn). Mais pn’admet pas d’inverse dans
Zp. Si lest un nombre premier distinct de p, alors Zpposs`ede un inverse `a lmais pas `a p, tandis que Zl
poss`ede un inverse `a pmais pas `a l. Cela montre que Zpet Zlsont deux anneaux non isomorphes, et qu’aucun
n’est inclus dans l’autre.
3 TOPOLOGIE DE ZP5
3 Topologie de Zp
3.1 Valuation p-adique
efinition 3.1. Soit x= (xk)kNZp, on d´efinit la valuation p-adique de x, not´ee vp(x), par
vp(x) = max {kN, xk= 0}
Avec la convention que le maximum d’un ensemble non born´e est +, ce qui donne vp(0) = +
Si xZest un entier, alors vp(x) correspond `a l’exposant de pdans la d´ecomposition de xen facteurs
premier. On ´etablit facilement les propri´et´es suivantes.
Proposition 3.2. Pour tous x, y Zp, on a
1. vp(x)=+∞ ⇐x= 0
2. vp(xy) = vp(x) + vp(y)
3. vp(x+y)min(vp(x), vp(y))
Ajoutons, que si x, y Zpsont deux entiers p-adiques de valuation diff´erente, alors l’in´egalit´e 3 devient
une ´egalit´e.
3.2 Norme p-adique
efinition 3.3. Pour xZp, on d´efinit la norme p-adique de x, not´ee |x|p, par
|x|p=pvp(x)
avec la convention |0|p= 0.
Exemple 3.4. On a |10|2=1
2,|10|3= 1 et |10|5=1
5.
Par exponentiation, on d´eduit les propri´et´es de la norme p-adique `a partir de celles de la valuation
p-adique.
Proposition 3.5. Pour tous x, y Zp, on a
1. |x|p= 0 x= 0
2. |xy|p=|x|p|y|p
3. |x+y|pmax(|x|p,|y|p)≤ |x|p+|y|p
3.3 Arithm´etique de Zp
On remarque que les propri´et´es 1 et 2 de la norme p-adique entrainent en particulier que l’anneau Zpest
int`egre (c’est-`a-dire que xy = 0 entraine x= 0 ou y= 0). Et un entier p-adique est inversible si et seulement
si il est de norme 1 (c’est clairement n´ecessaire, et r´eciproquement c’est le mˆeme argument qu’en 2.2 pour
les entiers premiers `a p). En cons´equence, l’arithm´etique de Zpest simple. Moralement, pest le seul nombre
premier de Zp(tous les autres sont devenus inversibles). Pr´ecis´ement, on a le r´esultat suivant.
Proposition 3.6 (Zpest local).L’anneau Zpest int`egre, et poss`ede un unique id´eal maximal c’est pZp,
l’id´eal engendr´e par p, qui est aussi l’ensemble des entiers p-adiques de norme strictement inf´erieure `a 1.
On a
Zp/pZp'Z/pZ
1 / 8 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !