Orientations de travail par Thierry CALAME, rapporteur général Sarah MATHESON et John OSHA, rapporteurs généraux adjoints Anne Marie VERSCHUR, Sara ULFSDOTTER et Kazuhiko YOSHIDA assistants du rapporteur général Q238 Revendications de deuxième application ou indication thérapeutique Introduction 1) Cette question vise à établir la nature, l’étendue et le caractère exécutoire de la protection par brevet pour de nouvelles applications de composés chimiques connus lorsqu’une nouvelle application thérapeutique d’une substance connue est découverte. Par souci de commodité, cette application sera désignée « deuxième application thérapeutique » dans les présentes orientations. Divers types de deuxième application thérapeutique sont décrits ci-dessous. 2) L’octroi d’une protection par brevet pour les deuxièmes applications thérapeutiques pourrait fortement encourager l’identification et le développement de solutions de nature à répondre aux besoins thérapeutiques non satisfaits. Les brevets pour deuxième application thérapeutique peuvent également se poser comme un outil essentiel des sociétés pharmaceutiques innovantes dans le cadre de la gestion du cycle de vie de leurs brevets. Toutefois, les travaux de R&D supplémentaires sont laborieux et onéreux. La protection par brevet est importante, mais l’adéquation des incitations visant à favoriser la recherche sur les deuxièmes applications thérapeutiques réside dans la possibilité de se prévaloir de droits de brevets qui aient force exécutoire et soient de portée réelle. 3) À l’heure actuelle, la possibilité même d’obtenir une protection par brevet des deuxièmes applications thérapeutiques et, si tel est le cas, la forme des revendications admises, varient d’un pays à l’autre. La capacité à faire appliquer les revendications admissibles et l’étendue de la protection accordée varient également en fonction de la juridiction. Or, l’absence d’harmonisation affecte aussi bien les sociétés pharmaceutiques innovantes que les laboratoires génériques en suscitant un climat d’incertitude tant pour les titulaires de brevets que pour les contrefacteurs présumés. 4) L’octroi d’une protection par brevet pour les deuxièmes applications thérapeutiques a des effets positifs et négatifs contradictoires sur la disponibilité de médicaments efficaces pour le public. En effet, la protection par brevet pourrait permettre aux sociétés pharmaceutiques de générer les revenus nécessaires pour financer de nouvelles innovations ; un avantage à long terme pour le public. Toutefois, la baisse des prix rendue possible par l’arrivée sur le marché de produits génériques présente également un avantage d’intérêt public en ce qui concerne le coût supporté par les gouvernements finançant les produits pharmaceutiques, ainsi que le coût d’achat pour le public. 5) À tout le moins pour les raisons exposées ci-dessus, le niveau approprié de protection par brevet à accorder aux deuxièmes applications thérapeutiques reste incertain. -2Les travaux antérieurs de l’AIPPI 6) L’AIPPI a, par le passé, examiné des questions concernant la deuxième application thérapeutique à l’occasion d’ateliers organisés dans le cadre d’un certain nombre de réunions récentes de l’AIPPI. a) Congrès de Paris (2010) - Atelier industrie pharmaceutique 4 intitulé « Questions propres aux brevets protégeant des inventions pharmaceutiques ». Cet atelier s’est penché sur la brevetabilité des inventions pharmaceutiques allant au-delà de la simple molécule. Les inventions de deuxième application thérapeutique ont été examinées aux côtés d’un certain nombre d’autres catégories d’inventions pharmaceutiques. b) Forum/ExCo d’Hyderabad (2011) - Atelier industrie pharmaceutique 1 intitulé « Protection de nouvelles applications thérapeutiques en droit des brevets ». Cet atelier s’est penché sur les premières et deuxièmes applications thérapeutiques, ainsi que sur les pratiques visant à encourager les investissements dans les nouvelles applications de composés connus. c) Forum/ExCo d’Helsinki (2013) - Atelier industrie pharmaceutique 2 intitulé « Les brevets de deuxième application thérapeutique ». Cet atelier a examiné l’étendue et le caractère exécutoire des revendications de brevet portant sur de nouvelles applications de médicaments connus. Parmi les sujets abordés, citons : • l’existence d’une protection ; • la contrefaçon par fournitures de moyens ; • la protection contre la responsabilité pour contrefaçon de brevet de différentes catégories de personnes/institutions ; • ce qui oppose le droit des brevets et les régimes de réglementation des médicaments. 7) Il est à souligner que chaque panel d’experts participant aux ateliers susvisés comptait parmi ses rangs des orateurs représentant les points de vue américain (États-Unis), indien et européen. Compte tenu du rôle important que les deuxièmes applications thérapeutiques jouent au niveau de la santé publique, ainsi que des répercussions économiques de la protection par brevet des revendications de deuxième application thérapeutique pour l’industrie pharmaceutique, pour les gouvernements et pour le public, il est opportun que l’AIPPI examine cette question dans une perspective plus large. 8) Par ailleurs, bien que des questions de travail antérieures de l’AIPPI aient englobé des questions liées à la deuxième application thérapeutique, notamment dans le cadre des questions Q202 « L’influence des questions de santé publique sur les droits exclusifs de brevet » (Boston 2008) et Q209 - « Les inventions de sélection: le critère d’activité inventive, autres conditions de brevetabilité et étendue de la protection » (Buenos Aires, 2009), l’AIPPI ne s’est pas encore penchée sur la question à part entière de la deuxième application thérapeutique. Portée de cette question 9) Il existe différents types de deuxième application thérapeutique (ou « application thérapeutique ultérieure »), des exemples en étant cités ci-après dans la rubrique intitulée « Types d’applications ». Toutes ces applications se trouvent englobées dans l’expression « deuxième application thérapeutique » telle qu’utilisée dans ces orientations et relèvent de la portée de cette question. 10) Cette question se limite aux aspects suivants : l’admissibilité des revendications de deuxième application thérapeutique, les types de revendications admissibles, ainsi que l’étendue de leur protection et donc leur caractère exécutoire, quant aux contrefaçons aussi bien directes qu’indirectes (lesquelles sont désignées dans ces orientations sous le terme de « contrefaçon par fourniture de moyens »). Compte tenu de l’importance des considérations énoncées dans -3l’introduction, cette question vise également à étudier les considérations politiques pertinentes. 11) À moins que cela ne soit pertinent en ce qui concerne l’admissibilité des revendications de deuxième application thérapeutique, la brevetabilité des méthodes de traitement thérapeutique à proprement parler (« première application thérapeutique ») ne s’inscrit pas dans la portée de cette question. Il a été établi dans la question Q202 que bien que les méthodes de traitement thérapeutique soient uniquement brevetables en Australie et aux États-Unis1, bien d’autres pays encore admettent au moins une certaine forme de revendications de deuxième application thérapeutique. 12) Bien que les critères de validité, notamment ceux de la nouveauté et de l’activité inventive, puissent avoir leur importance quant à la logique sous-tendant l’admissibilité (ou non) des revendications de deuxième application thérapeutique, l’appréciation de la nouveauté et de l’activité inventive, ainsi que celle d’autres critères de validité, ne rentre pas dans le cadre de cette question, à moins qu’elle ne relève de la portée de cette question telle que définie au paragraphe 9) ci-dessus. 13) Sous réserve de cette même restriction, les questions de prolongation de la durée de validité des brevets, de licence obligatoire, de droits et des certificats complémentaires de protection (lorsqu’ils existent) ne s’inscrivent pas non plus dans la portée de cette question. Discussion Types d’applications 14) Le cas classique de deuxième application thérapeutique est lorsqu’un médicament est dans un premier temps développé à des fins thérapeutiques particulières et que des travaux de recherche continue ou ultérieure permettent de découvrir que ce médicament est efficace dans un autre domaine thérapeutique. Tel a été le cas de l’aspirine. Initialement utilisée en tant qu’antipyrétique et antalgique, elle s’est ultérieurement avérée être un anticoagulant, puis un anti-AVC et un anti-ischémique, efficace. Un exemple plus récent est celui du groupe des composés pyrazolopyrimidinone qui constituaient un traitement reconnu des maladies cardiovasculaires. Or, en 1994, Pfizer s’est aperçu que l’un de ces composés, le citrate de sildénafil, était également efficace pour traiter la dysfonction érectile. Commercialisé sous le nom de Viagra, ce produit connaît un énorme succès et génère plusieurs milliards de dollars de chiffre d’affaires. 15) Il peut aussi y avoir des cas dans lesquels la première application connue du composé n’a pas connu de succès, mais une nouvelle application débouche sur un médicament important. La nimodipine (commercialisée par Bayer sous le nom de Nimotop) avait, à l’origine, été développée pour traiter l’hypertension. Rarement utilisée à cette fin, sa principale application à l’heure actuelle est le traitement des troubles cérébraux. Parmi les autres médicaments rentant dans cette catégorie, citons notamment Evista (chlorhydrate de raloxifène), initialement développé comme agent anticancéreux et désormais commercialisé pour traiter l’ostéoporose, ou encore Straterra (atomoxétine), initialement développé comme antidépresseur, mais désormais uniquement commercialisé pour traiter le Trouble du Déficit de l’Attention avec Hyperactivité (TDAH). 16) Il arrive que des composés déjà découverts à des fins non thérapeutiques se révèlent par la suite efficaces dans le cadre d’applications thérapeutiques. Un exemple de ce type est le débat actuel sur la possibilité d’utiliser la marijuana à diverses fins thérapeutiques. 17) Dans la décision G2/082 de la Grande Chambre de recours (GCR) de l’Office européen des brevets, une nouvelle posologie a été jugée brevetable alors qu’il s’agissait de l’unique 1 Rapport de synthèse Q202, « L’influence des questions de santé publique sur les droits exclusifs de brevet », Partie I, Question 5). Voir également le paragraphe 46) ci-dessous. 2 19 février 2008 -4caractéristique nouvelle d’un médicament reconnu pour traiter une maladie connue. La revendication contestée concernait l’utilisation d’un acide nicotinique à effet retard dans le traitement de taux anormaux de lipides dans le sang. La nouvelle caractéristique résidait en ce que le médicament était administré « une fois par jour avant le coucher ». Dans l’affaire G2/08, la GCR a conclu que la nouveauté pouvait résider dans des caractéristiques telles que le groupe de patients à traiter, un mode d’administration différent ou un effet technique différent. Protection 18) L’article 27, paragraphe 1, des ADPIC stipule que les brevets peuvent être délivrés pour « toute invention, de produit ou de procédé, dans tous les domaines technologiques, à condition qu'elle soit nouvelle, qu'elle implique une activité inventive et qu'elle soit susceptible d'application industrielle ». Reste à savoir si les ADPIC imposent ou non la protection des revendications de deuxième application thérapeutique, bien que certains commentateurs affirment que refuser la brevetabilité aux revendications de deuxième application thérapeutique est contraire aux ADPIC, et notamment à l’article 27, paragraphe 1. 19) L’article 27, paragraphe 3, point a), des ADPIC permet d’exclure de la brevetabilité les méthodes diagnostiques, thérapeutiques et chirurgicales pour le traitement des personnes ou des animaux. Certains membres justifient le refus de la protection par les brevets aux revendications de deuxième application thérapeutique au motif que ces revendications sont liées à une méthode de traitement thérapeutique ou constituent tout simplement une autre forme de méthode de traitement thérapeutique, et par conséquent peuvent, en toute licité, être exclues de la brevetabilité. 20) La justification du refus de protection par brevet des deuxièmes applications thérapeutiques peut reposer sur une définition stricte de la nouveauté - à savoir sur le fait que la structure chimique du composé fait déjà partie de l’état de la technique. Certains commentateurs ont également suggéré que l’attribution de la nouveauté à des revendications de deuxième application thérapeutique revenait à confondre les critères de brevetabilité distincts que sont la nouveauté et l’activité inventive.3 Une telle définition n’attribue ni nouveauté ni activité inventive à l’identification et à la décision de poursuivre le développement d’un composé connu afin de l’utiliser dans le traitement d’une maladie ou d’une affection pour laquelle il n’avait pas encore été utilisé. (Voir également les paragraphes 34 à 39 ci-dessous.) 21) L’Inde, l’Egypte, les Philippines ainsi que des pays du Pacte andin4 font partie des pays n’autorisant pas la protection par brevet des deuxième applications thérapeutiques. En Inde, les composés chimiques et pharmaceutiques n’étaient pas du tout brevetables avant janvier 2005. Suite à diverses réformes liées aux ADPIC, la loi indienne sur les brevets interdit encore à ce jour qu’une simple nouvelle application d’une substance connue soit brevetable. 22) L’article 21 de la décision 486 du Régime commun concernant la propriété intellectuelle de la communauté andine prévoit que les « produits ou processus déjà brevetés et inclus dans l’état de la technique… ne feront pas l’objet de nouveaux brevets au seul motif de leur utilisation dans le cadre d’une application différente de celle envisagée à l’origine par le brevet initial ». Cette interdiction ne vise pas spécifiquement les revendications de deuxième application thérapeutique mais s’applique à tous les domaines technologiques. Toutefois, lorsque le Pérou a promulgué un décret législatif en 1997 clarifiant le fait que les brevets peuvent être délivrés pour de nouvelles applications si les critères de nouveauté, d’activité inventive et d’applicabilité industrielle sont satisfaits, habilitant ainsi l’Office péruvien des brevets à délivrer à Pfizer un brevet concernant le Viagra, suite à une plainte déposée par l’association péruvienne des fabricants de produits génériques, la Cour de justice de la communauté andine a jugé que le gouvernement péruvien avait enfreint la législation régionale sur les brevets en délivrant ce brevet. 3 Juan Pablo Coy Navarro, « A critical study of the denial of first and second medical use patents in the Andean Community; the Viagra case », thèse présentée dans le cadre des travaux nécessaires à l’obtention du Master de droit, spécialité droit économique international de l’Université de Warwick, septembre 2003. 4 La Bolivie, la Colombie, l’Équateur et le Pérou -523) Dans le contexte européen, avant la décision de la GCR dans l’affaire G05/835, l’article 52, paragraphe 4, de la Convention sur le brevet européen (CBE) de 1973 faisait obstacle à la protection par brevet des revendications de deuxième application thérapeutique. En vertu de l’article 52, paragraphe 4, les méthodes de traitement thérapeutique étaient, quelque peu artificiellement, considérées comme des inventions mais n’étaient pas brevetables pour défaut d’applicabilité industrielle. Dans le cadre de la décision G05/83, la GCR a adopté les revendications « de type suisse » pour contourner les dispositions de l’article 52, paragraphe 4, concernant les deuxièmes applications thérapeutiques. (Voir également les sections intitulées « Types de revendications » et « Concepts de 'traitement', 'traitant', 'utilisé pour traiter' et similaires » ci-dessous). 24) Par contre, aux États-Unis, la situation a été réglée avant la recodification de la législation américaine sur les brevets en 1952 avec, entre autres, une définition du terme « procédé » (comme objet brevetable) qui comprend « une nouvelle application d’un procédé, …, d’une composition de matière ou de matériau connu(e) ».6 25) En Australie, alors que cela faisait plusieurs décennies que la brevetabilité des méthodes de traitement thérapeutique et des deuxièmes applications thérapeutiques était perçue comme un droit constant, le fabricant canadien de produits génériques, Apotex, a récemment remis en cause ce principe en introduisant un pourvoi devant la Haute cour australienne. Dans une décision définitive rendue en décembre 20137, il a été clairement établi que les méthodes de traitement thérapeutique et les deuxièmes applications thérapeutiques étaient brevetables en Australie.8 Types de revendications 26) Il y a lieu de souligner que seuls les États-Unis et l’Australie autorisent les revendications relatives à une méthode de traitement à proprement parler ; les autres pays autorisent les revendications relatives à l’utilisation d’un composé pour préparer un médicament destiné à traiter une maladie (revendications de type suisse) ; certains pays autorisent les revendications relatives aux formulations pharmaceutiques destinées à une fin spécifique, ou les revendications relatives au composé lorsque ce dernier est utilisé pour traiter une maladie. 27) Comme cela est indiqué ci-dessus, la décision G05/83 de la GCR a vu l’autorisation de la revendication de type suisse, laquelle est une revendication de procédé. Ainsi baptisées du fait de la pratique de l’Office fédéral suisse de la propriété intellectuelle de l’époque, les revendications de type suisse se présentent généralement sous la forme suivante : « Utilisation d’une substance X dans la fabrication/préparation d’un médicament pour le traitement de l’affection Y » La revendication relative à l’« utilisation d’une substance X dans la fabrication/préparation d’un médicament » porte sur un procédé de fabrication et n’est pas perçue comme une revendication relative à une méthode de traitement thérapeutique. De la même façon, « … pour le traitement d’une affection Y » décrit l’utilisation du médicament et constitue le fondement de la nouveauté de la revendication (voir, toutefois, la discussion des enjeux concernant les concepts de « traitement », « traitant », « utilisé pour traiter » et similaires aux paragraphes 34 à 39 ci-dessous). 28) 5 Aux alentours de la même époque que la décision G05/83 mais indépendamment de celle-ci, les tribunaux allemands ont mis au point leur propre type de revendication de deuxième application thérapeutique sous la forme suivante : du 5 décembre 1983 Article 100, paragraphe b), de la loi américaine sur les brevets (US Patent Act) (1952), 35 USC. 7 Apotex Pty Ltd/Sanofi-Aventis Australia Pty Ltd & Ors [2013] HCA 50. 8 Cette décision n’a toutefois pas résolu de manière définitive tous les problèmes ayant trait à la validité des revendications de deuxièmeapplication thérapeutique en vertu du droit australien. 6 -6« Utilisation d’une substance X pour le traitement de l’affection Y » 29) Lorsque la CBE 2000 est entrée en vigueur en décembre 2007, l’exclusion des méthodes de traitement a été transférée de l’article 52, paragraphe 4, à l’article 53, point c), mettant ainsi fin à l’idée fausse selon laquelle le critère s’opposant à la brevetabilité était le défaut d’applicabilité industrielle. L’article 54, paragraphe 5, a codifié l’impact de la décision G05/83 en prévoyant la nouveauté des revendications de deuxième application thérapeutique. 30) La décision G2/08 de la GCR a établi que les revendications de type suisse n’étaient plus nécessaires aux termes de la CBE 2000. En revanche, une méthode de traitement peut être protégée par une revendication de substance se présentant généralement sous la forme suivante : « Substance X destinée à être utilisée dans le traitement de l’affection Y » Depuis janvier 2011, l’Office européen des brevets (OEB) n’admet plus les revendications de type suisse; les revendications devant désormais se présenter sous la forme des revendications de substance proposées à une fin spécifique (« purpose-limited » product claims) prévues par la CBE 2000. Néanmoins, compte tenu de la longévité des brevets, les deux formes de revendications continueront à coexister pendant un certain temps encore, suscitant des questions quant à leur portée. (Voir également le paragraphe 42 ci-dessous.) 31) Les revendications américaines couvrant les deuxièmes applications thérapeutiques suivent la voie de la « méthode de traitement » plutôt que celle de l’« utilisation ». La forme des revendications portant sur l’« utilisation » n’est généralement pas acceptée aux Etats-Unis dans la mesure où des problèmes d’imprécision pourraient découler d’une revendication portant sur un procédé ne définissant pas les étapes que comprend le procédé. Quelques exemples sont fournis ci-dessous à titre de comparaison.9 Exemple – cas général Revendications portant sur l’ « utilisation » « Utilisation d’un composé X pour le traitement d’une maladie Y » « Utilisation d’un composé X pour la fabrication d’un médicament destiné au traitement de la maladie Y » « Composé X destiné à être utilisé dans le traitement de la maladie Y » Exemple – groupe traité particulier « Utilisation d’un composé X pour le traitement d’une maladie Y chez un patient présentant un taux de biomarqueur A dans le sang d’au moins 5 pg/ml » Exemple – nouvelle posologie « Utilisation d’un composé X pour le traitement d’une maladie Y, o dans laquelle 10 à 30 μg/ml de composé X sont administrés par voie sous-cutanée au patient une 9 Revendications américaines relatives à la « méthode de traitement » « Méthode de traitement d’un patient atteint d’une maladie Y, comprenant : o l’administration au patient d’une quantité efficace de composé X » « Méthode de traitement d’un patient atteint d’une maladie Y, comprenant : o l’obtention d’une mesure du taux de biomarqueur A dans le sang du patient ; et o l’administration au patient d’une quantité efficace de composé X si le taux de biomarqueur A est supérieur à 5 pg/ml » « Méthode de traitement d’un patient atteint d’une maladie Y, comprenant : o l’administration au patient, par voie sous-cutanée, d’un composé X en une quantité de 10 à 30 μg/ml une Tiré de la présentation effectuée par Elizabeth Doherty, de Finnegan LLP, dans le cadre de l’atelier industrie pharmaceutique 2 : Les brevets pour deuxième application thérapeutique – La perspective américaine, du Forum/ExCo d’Helsinki de l’AIPPI, le 6 septembre 2013. -7fois tous les 7 jours en combinaison avec un agent chimiothérapeutique » 32) o fois tous les 7 jours ; et l’administration au patient d’un agent chimiothérapeutique » Au Canada, un pays où les méthodes de traitement thérapeutique ne sont pas brevetables, les brevetés ne peuvent pas se prévaloir de l’approche américaine. Ce faisant, le Canada adopte également la voie de l’ « utilisation » pour le libellé des revendications (similaire à la revendication allemande du type « utilisation »), comme par exemple : « Utilisation d’un composé X pour traiter une affection Y » 33) En Australie, les revendications relatives à une « méthode de traitement », une « utilisation » ou de type suisse sont toutes autorisées et souvent utilisées de façon combinée dans le même jeu de revendications au motif qu’elles ont (ou, à tout le moins, pourraient avoir) des portées différentes tant en termes de validité que d’application. Les concepts de « traitement », « traitant » et « utilisé pour traiter » et similaires 34) L’élément clé qui est commun et essentiel à tous les types de revendications de deuxième application thérapeutique est que le composé identifié est « destiné à », « préparé pour » ou « utilisé dans » une méthode « pour traiter » ou pour le « traitement de » une ou plusieurs maladies, affections ou symptômes indiqués. 35) Pour les uns, les termes « méthode de traitement » dans les revendications de deuxième application thérapeutique n’impliquent rien de plus qu’un certain degré, non précisé, d’efficacité et d’innocuité. Pour les autres, ces revendications pourraient être perçues comme définissant une « méthode de traitement » de la maladie ou de l’affection indiquée qui est suffisamment sûre et efficace pour être administrée par des praticiens aux patients nécessitant un traitement pour cette maladie ou affection. 36) Un autre problème potentiel concernant le terme « traitement », l’élément clé des revendications de deuxième application thérapeutique, réside en la définition de ses limites et, notamment, la distinction entre celui-ci et les autres effets physiologiques du composé ou de la méthode, y compris ceux qui sont bénéfiques. Le terme « traitement » véhicule-t-il une notion d’amélioration, aussi faible soit-elle, des facteurs déterminants de la maladie ou de l’affection ? Ou le traitement implique-t-il l’obtention d’un résultat thérapeutique précis ? 37) L’existence ou non d’une contrefaçon d’une revendication de deuxième application thérapeutique peut dépendre du caractère délibéré ou non de l’administration (ou de la prescription), par le médecin prescripteur, du composé identifié à une personne atteinte de la maladie ou affection indiquée afin de traiter cette maladie ou affection donnée, plutôt qu’une quelconque autre maladie ou affection. Le fait que le « traitement » (selon la norme adoptée) soit accompli effectivement ou non par la deuxième application thérapeutique revendiquée est également un élément fondamental de l’utilité ou de l’applicabilité industrielle des revendications de deuxième application thérapeutique. 38) La décision rendue très récemment par la Haute cour australienne dans l’affaire Apotex / Sanofi-Aventis10 comportait des commentaires attestant de la volonté d’interpréter les revendications de deuxième application thérapeutique comme englobant une exigence d’ « intention ». Bien que s’inscrivant dans le contexte de la discussion d’une infraction indirecte, la Haute cour a clairement affirmé que l’administration du composé identifié devait être délibérément destinée au traitement de l’affection en question et non pas à celui d’une autre affection, et ce même lorsque l’affection en question pouvait également être traitée. 39) Cette interprétation des revendications non seulement restreint considérablement le champ d’application des revendications de deuxième application thérapeutique mais elle peut 10 Apotex Pty Ltd/Sanofi-Aventis Australia Pty Ltd & Ors [2013] HCA 50, paragraphes [278] [285]. -8également avoir des ramifications considérables quant à leur validité en les rendant plus difficiles à prévoir ou évidentes mais plus faciles à contester pour insuffisance de la description, absence de fondement ou de base équitable et/ou manque de clarté. Caractère exécutoire 40) Le débat suscité quant à la façon d’établir l’existence d’une contrefaçon d’un brevet de deuxième application thérapeutique est le résultat de la nature même d’une revendication de deuxième application thérapeutique. Lorsqu’un quelconque brevet relatif au composé ou à la première application thérapeutique expire, les produits génériques concurrents peuvent accéder au marché en toute légitimité. Lorsqu’il n’existe aucun brevet relatif au composé ou à une quelconque « première » application thérapeutique, le composé peut en toute légitimité être utilisé pour d’autres traitements ou fins que la deuxième application thérapeutique brevetée. Toutefois, dans les faits, les pratiques de commercialisation, de prescription, de délivrance et d’utilisation de produits pharmaceutiques sont telles que de tels produits génériques ou produits concurrents peuvent être prescrits ou utilisés pour des traitements contrefaisant les brevets de deuxième application thérapeutique. 41) La forme de toute revendication de deuxième application thérapeutique autorisée dicte nécessairement son interprétation et donc la portée de sa protection ainsi que son opposabilité. Par définition, les actes qui constituent une contrefaçon sont différents pour les revendications relatives à un produit et pour celles relatives à un procédé. Par exemple, la loi britannique sur les brevets (UK Patents Act) dispose qu’une revendication relative à un produit sera (directement) contrefaite en cas de mise à disposition, d’offre de mise à disposition, d’utilisation, d’import ou de conservation du produit. Une revendication relative à un procédé sera contrefaite en cas d’utilisation, ou d’offre d’utilisation, du procédé revendiqué (sous réserve de la satisfaction d’une condition de connaissance), ou en cas de mise à disposition, d’offre de mise à disposition, d’utilisation, de conservation ou d’importation d’un produit directement obtenu au moyen du procédé revendiqué. L’Accord relatif à une juridiction unifiée du brevet prévoit d’ailleurs des dispositions similaires. 42) Il y a également débat quant à savoir si les revendications se présentant sous la forme prévue par la CBE 2000 sont de portée identique aux revendications de type suisse. S’il est clair que les revendications de type suisse sont des revendications relatives à un procédé et que celles de la CBE 2000 sont relatives à un produit limité à une application précise, les notes explicatives du projet suisse d’article 54, paragraphe 5, de la CBE 2000 suggéraient que la protection offerte par le nouvel article 54, paragraphe 5, « était équivalente, en ce qui concerne les autres applications, à celle offerte par la revendication de type suisse ». Cependant, le Tribunal fédéral suisse a, depuis, fait la déclaration suivante : « On peut s’attendre à ce que la nouvelle catégorie de revendications prévue aux termes de l’article 54, paragraphe 5, de la CBE 2000, celle des revendications proposées à une fin spécifique, entraîne une protection plus large qu’auparavant pour le breveté… »11 43) Que ce soit pour des raisons réglementaires, incitatives ou de pratique, les praticiens de nombreux pays inscrivent sur l’ordonnance le principe actif d’un produit et non pas le nom du produit. Or, il se peut que le pharmacien exécutant l’ordonnance ne soit pas au courant de l’indication pour laquelle le produit est prescrit, qu’il soit dans certaines circonstances habilité (d’un point de vue légal) à délivrer un produit générique même lorsque le nom du princeps figure sur l’ordonnance, voire même qu’il soit activement incité par la politique de remboursement des médicaments à utiliser un substitut générique plutôt que la marque du princeps. 44) Lorsque le ou les brevets relatif(s) au produit à proprement parler et/ou la première application thérapeutique a/ont expiré ou n’a/n’ont jamais existé dans une juridiction donnée ou où que ce soit mais qu’il existe un brevet en vigueur relatif à la deuxième application 11 Tribunal fédéral suisse, BGE 137 III 170 (Alendronate). -9thérapeutique, la capacité de la société pharmaceutique innovante à intenter des poursuites pour contrefaçon peut dépendre de l’homologation ou non du produit générique pour la deuxième application thérapeutique brevetée et/ou de la mention spécifique de cette deuxième application thérapeutique brevetée dans la notice du produit. Parmi les autres facteurs pertinents potentiels citons les mesures (au-delà des questions d’étiquetage) que le fabricant de produits génériques propose de prendre pour éviter que ses produits ne soient utilisés comme prévu dans la deuxième application thérapeutique brevetée, telles que la notification périodique des médecins et/ou pharmaciens ou la mise en place d’avis relatifs aux indications au niveau des logiciels ou systèmes de prescription et/ou de délivrance. En tout état de cause, il peut y avoir aussi bien contrefaçon directe que contrefaçon par fourniture de moyens (contributory infringement) des revendications de deuxième application thérapeutique. Cela se traduit souvent par le cas relativement simple de « on-label use », à savoir l’utilisation (dans ce contexte contrefaisante) d’un médicament générique conforme à son ou ses indication(s) autorisée(s). 45) Toutefois, lorsque le produit générique est uniquement homologué pour une utilisation non brevetée ou que la notice du produit générique n’inclut pas la moindre référence à l’utilisation brevetée (une pratique dite de « skinny labelling ») ou exclut expressément une telle utilisation, la substitution par un produit générique ne saurait, dans de telles circonstances, donner lieu à une contrefaçon directe. Ces scénarios sont désignés sous les termes respectifs d’« off-label use » et de « cross-label use » – l’ « off-label use » étant l’utilisation d’un principe actif pour le traitement d’une affection autre que celle pour laquelle il a été autorisé alors que la « cross-label use » est l’utilisation d’un médicament générique pour une affection non inclue (voire même expressément exclue) par le génériqueur mais qui figurait sur la notice du princeps ou d’autres données réglementaires. Dans de tels cas de figure, il est parfois difficile pour le breveté de prouver que le médicament est fabriqué ou vendu pour la deuxième application thérapeutique brevetée. Tel est d’ailleurs ce qui est ressorti de diverses décisions rendues au R.-U, en Allemagne et, plus récemment, en Australie. 46) Les conditions particulières de la contrefaçon par fourniture de moyens peuvent varier sensiblement d’une juridiction à l’autre. Toutefois, la contrefaçon par fourniture de moyens implique souvent une certaine connaissance (réelle ou présumée) du fait que le produit fourni sera utilisé de façon contrefaisante. Il s’ensuit que le résultat de toute action en justice dépendra dans une large mesure des faits propres à l’affaire en question. Dans deux arrêts rendus en 2010 par la Cour d’appel britannique concernant la responsabilité pour contrefaçon par fourniture de moyens12 (en fournissant de quelconques moyens concernant un élément essentiel de l’invention), il a été établi que les conditions de connaissance et d’intention prévues par le droit britannique étaient satisfaites si, au moment de la fourniture ou de la proposition de fourniture, « le fournisseur sait, ou s’il est évident compte tenu des circonstances, que les utilisateurs finaux mettront en œuvre l’invention ». 47) On aurait pu s’attendre à une conclusion similaire en Australie jusqu’à ce que la Haute cour rende sa décision dans l’affaire Apotex / Sanofi-Aventis. Bien que la Cour ait confirmé que les revendications de deuxième application thérapeutique et méthodes de traitement thérapeutique étaient brevetables, Sanofi-Aventis a obtenu un jugement finalement peu satisfaisant de contrefaçon par fourniture de moyens. La revendication en cause concernait une méthode destinée à prévenir ou traiter le psoriasis par administration d’une composition contenant le principe actif leflunomide. Le composé avait fait l’objet d’un brevet antérieur ayant expiré. Or, Apotex souhaitait commercialiser une version générique du leflunomide qui était uniquement enregistrée pour l’arthrite psoriasique et la polyarthrite rhumatoïde. La cour a jugé que cette proposition de fourniture ne constituerait pas une contrefaçon du brevet, infirmant ainsi sur ce point la décision du tribunal de première instance ainsi que la décision rendue en appel par la chambre plénière de la Cour fédérale. Cette décision s’explique en ce que la revendication a été interprétée comme étant l’administration délibérée du composé pour prévenir ou traiter le psoriasis. La cour a également jugé qu’Apotex n’avait pas de raison de penser que les utilisateurs de son produit l’utiliseraient d’une façon contraire aux indications figurant dans la notice approuvée d’Apotex. 12 Grimme Maschinenfabrik/Scott [2010] EWCA Civ 1110; KCI/Smith & Nephew [2010] EWCA Civ 1260. - 10 48) La question du « skinny labelling » a, ces derniers temps, été au centre de bien des commentaires. À l’un des extrêmes, en Australie, le projet de rapport suite au récent Examen des brevets pharmaceutiques recommande que la loi australienne sur les brevets (Australian Patents Act) soit modifiée afin de stipuler que la fourniture d’un produit pharmaceutique couvert par un brevet qui est utilisé pour une indication non brevetée ne constitue pas une contrefaçon si des mesures raisonnables ont été prises pour s’assurer que le produit serait uniquement utilisé de façon non contrefaisante. Il devra être présumé que des « mesures raisonnables » ont été prises dès lors qu’aucune indication contrefaisante ne figure parmi les indications mentionnées sur la notice du produit13. Indépendamment du fait qu’elles trouvent le juste équilibre ou non et qu’elles soient efficaces ou non, ces propositions ont pour objet principal d’aider les tribunaux à concilier les contradictions entre, d’un côté, le risque de priver un breveté du bénéfice d’un monopole légal accordé en toute régularité et, de l’autre, étendre indûment le monopole de sorte que les utilisations non contrefaisantes se trouvent également englobées et que toute concurrence émanant des produits génériques est totalement écartée. 49) En Europe, la règle générale est que les informations relatives à un produit générique doivent contenir les mêmes informations que le princeps, et notamment les indications, la posologie et le mode d’administration14. Toutefois, un produit générique peut ne pas inclure de référence aux indications ou formes galéniques qui sont protégées par des brevets en vigueur dans les informations pertinentes relatives au produit. L’autorisation de ne pas inclure ces informations est accordée au niveau national. Il appartient à chaque État membre d’établir s’il est nécessaire ou non que le laboratoire n’incluant pas ces informations explique les raisons de l’absence de certaines indications ou formes galéniques. 50) À l’autre extrême, bien que la réglementation fédérale américaine permette une approche similaire à celle de l’Europe, nombreux sont les États américains qui imposent aux pharmacies de remplacer le médicament de marque par un médicament générique homologué pour toutes les indications, même si certaines d’entre elles ne figurent pas sur l’étiquette de ce dernier. En vertu de la réglementation fédérale, s’il existe la moindre différence au niveau de l’étiquette concernant l’innocuité ou l’efficacité, les indications doivent rester sur l’étiquette. Il semble donc que le champ d’application ou l’utilité du « skinny labelling » soit, dans la pratique, plus étroit aux États-Unis. 51) À supposer que la contrefaçon puisse être établie, les tribunaux pourraient encore hésiter à accorder une injonction afin d’empêcher l’utilisation contrefaisante d’un brevet de deuxième application thérapeutique lorsque, dans les faits, seule une partie des produits génériques commercialisés sont utilisés à des fins contrefaisantes. S’agissant de l’affaire australienne Apotex/Sanofi-Aventis, si (malgré la confiance dont a fait preuve la Haute Cour) les médecins prescrivaient ou les pharmaciens délivraient, sciemment ou non, le leflunomide pour le psoriasis, les tribunaux pourraient être réticents à l’idée d’accorder une injonction même si celle-ci était expressément limitée à l’utilisation contrefaisante. Les raisons de cette réticence pourraient comprendre l’incertitude quant à la portée de l’injonction et les difficultés pour surveiller son respect. 52) Aux États-Unis, les médecins et hôpitaux sont exonérés de toute responsabilité pour contrefaçon de brevet. Les revendications américaines de deuxième application thérapeutique de type « méthode de traitement » américaine ont force exécutoire sur la base d’une incitation à la contrefaçon (induced infringement) ou d’une contrefaçon par fourniture de moyens. Le fabricant et/ou distributeur est poursuivi en rapport avec le produit utilisé par le médecin ou patient. L’incitation à la contrefaçon consiste à encourager activement autrui à contrefaire une revendication de brevet. Cela peut se faire par le biais des consignes sur la boîte ou au moyen de pratiques marketing,commerciales ou publicitaires encourageant les tiers à mettre en œuvre le procédé revendiqué. Des difficultés d’ordre pratique pour prouver la contrefaçon peuvent survenir si le procédé revendiqué ne figure pas sur la notice du produit générique. 13 Recommandation 6.4, Examen des brevets pharmaceutiques, projet de rapport, avril 2013. Voir par exemple l’article 11 de la Directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. 14 - 11 53) 15 16 Seul pays, outre les États-Unis, à admettre comme brevetables les méthodes de traitement thérapeutique, l’Australie ne prévoit pas de telle exonération de responsabilité pour contrefaçon de brevet pour ses médecins et hôpitaux, un fait remarquable. S’il a par le passé été suggéré qu’il faille aux praticiens souhaitant utiliser des méthodes et traitements thérapeutiques brevetés demander une licence obligatoire15, les observations des juges de la Haute Cour dans la récente affaire Apotex / Sanofi-Aventis suggèrent que les activités ou procédures des médecins et autres personnels médicaux relatives au traitement physique des patients devraient être considérées comme non brevetables et ce faisant, totalement exonérées de toute contrefaçon de brevet. Cette conclusion serait davantage en adéquation avec le paragraphe 5, de la résolution Q20216, contrairement à ce qui est actuellement le cas pour le droit australien. Toutefois, sur le plan pratique, il est évident que les sociétés pharmaceutiques innovantes n’ont pas intérêt d’un point de vue commercial à engager des poursuites contre les médecins qui prescrivent leurs médicaments et les patients qui les achètent et les consomment. Bristol-Myers Squibb & Co / FH Faulding & Co Ltd (2000) 170 ALR 439 Résolution Q202, « L'influence des questions de santé publique sur les droits exclusifs de brevet », Congrès de Boston (2008), paragraphe 5 : « Dans la mesure où le droit des brevets prévoit la brevetabilité des méthodes de traitement médical, la loi devrait prévoir une exception aux droits du breveté, permettant au personnel médical de faire usage des méthodes de traitement médical brevetées, sans l’autorisation du breveté, lorsque la situation factuelle rend impossible de négocier une licence avant la mise en œuvre du traitement ».