108
Fin de Vie & Psychanalyse
Qu’est-ce à dire ?
Avec la psychanalyse, l’acte auprès du patient est toujours singu-
lier, il n’y a pas d’extrapolation ni de reproductibilité à l’identique
possibles : cette expérience n’est pas généralisable.
De même, là où la méthode scientique dite « dure » s’appuie
sur l’objectivité maximum qui permet à la subjectivité du clinicien
de n’interagir théoriquement en rien avec celle du patient, la psy-
chanalyse exige un engagement subjectif spécique. Autrement dit,
lorsque nous nous engageons dans la méthode, nous ne pouvons plus
faire l’économie de la prise en compte de notre propre psychisme. Le
psychanalyste comme le patient sont tous les deux soumis à la même
loi du langage en tant que celle-ci implique l’inconscient. La dimen-
sion de la rencontre tend alors vers une plus grande symétrie et ce
qui est mis en jeu, c’est à dire les surgissements de l’inconscient, ne
peuvent, pour l’un comme pour l’autre des protagonistes, se calculer
à l’avance. Avec la psychanalyse, rien ne peut être prévu à l’avance.
C. G. Bruère-Dawson résume bien les choses lorsqu’il évoque « la
différence entre la pratique de la médecine, objectivante par essence,
qui n’aborde l’intime de la souffrance que dans un supplément d’âme
et par surcroît, et la pratique analytique dont la visée est de permettre
dans une rencontre transférentielle une « série de dires » sur la subjec-
tivité de celui que nous rencontrons à travers la nôtre » (2000, p. 35).
Le changement radical tiendrait donc au fait qu’en psychanalyse,
l’être l’humain est considéré comme entièrement constitué par la
parole et le langage : c’est un être de parole et de désir avant d’être
le lieu d’une affection morbide. C’est précisément ce sujet parlant et
désirant, affecté par son histoire et ses signiants, qui est, même en
cas de maladie somatique grave, l’objet de la psychanalyse. On re-
marque combien la psychanalyse a précisément pour objet ce qui se
situe hors du champ médical, c’est-à-dire la vie psychique et l’accès
à l’inconscient.
psychanalyse au risque de mourirv3.indd 108 12/04/16 08:59