La scène de théâtre, élément encore inexploré et pourtant clef dans de
nombreux romans, questionne les liens entre l’œuvre et le médium enchâssé. À
l’aide d’un corpus de romans français et canadiens-français, parus entre 1871 et
1949, cette étude repère les traits récurrents de la scène de théâtre, quels que soient
l’époque, l’esthétique ou le lieu d’écriture du romancier. Topos privilégié pour le
texte qui opère par ce biais un « retour sur lui-même », les questions de la réflexivité
et de la spécularité éclairent ce que peut le théâtre dans le texte. À partir d’une
lecture sociocritique, articulant l’art et le social, notre étude de la scène de théâtre
couvre à la fois la dimension propre à l’art dramatique et celle inhérente au théâtre
envisagé comme outil de classification sociale. Le costume, le corps des artistes, les
lumières, ainsi que les espaces théâtraux, les types de public et la mondanité à
l’œuvre dans la salle sont, entre autres, autant de facettes que notre analyse met au
jour. Le prisme de la scène de théâtre ainsi révélé transcende l’intériorité de l’art et
l’extériorité du social par le truchement du corps. Entre ce qu’André Belleau nomme
le « code » et la « parole », la scène de théâtre incarne les deux aspects, elle les lie
étroitement et les dépasse grâce aux corps tout à la fois érotisés et socialisés.
The theater scene, key element of several novels yet unexplored, questions the
bounds between the medium and the œuvre within. Supported by a corpus made of
French and French Canadian novels published between 1871 and 1949, this work
argues the recurrent specificities of the theater scene, whatever the time, the
aesthetics or the place from which the novelist writes. Becoming a privileged topos
for the text that operates « a return on itself », the questions of reflexivity and
specularity enlighten what theater can do to the text. From a sociocritic reading
articulating social and art matters, our study on the theater scene covers not only the
dramatic art’s aspect but also the theater aspect thought as a social classification
tool. The costume, the body of the artist, the lights, but also the theatrical spaces, the
category of public and the society life happening in the theater hall are, if anything
else, some facets our work would like to point out. The prism of the theater scene
once revealed goes beyond the interiority of art and the exteriority of the social
behavior through and thanks to the body. Between what André Belleau calls the
« code » and the « parole (speech)», the theater scene embodies both aspects, links
them both tight and goes past them thanks to the bodies that are both eroticized and
socialized.