La Canso
800 ans apres la Croisade contre les Albigeois
Le succès rencontré par les tables
rondes récemment organisées et par
l’exposition « Au temps de la Croisade »
témoigne, s’il en était besoin, de l’intérêt
marq par le grand public pour cette
période de notre histoire.
En mettant sur pied le programme de
développement « Pays cathare », le
Conseil général a toujours eu le souci de
répondre à cette attente. Et pour ce faire,
il fallait mettre en valeur ce patrimoine
auquel nous sommes tous très attachés,
préserver l’authenticité des sites tout en
en facilitant l’accès.
C’est dans cette perspective qu’ont
été conçus les aménagements
touristiques de notre département :
proposer des lieux de loisirs et de
détente sans pour autant négliger une
certaine exigence culturelle.
Une promenade militaire
(1226)
Le 28 janvier 1226, le roi de France
Louis VIII réunit à Paris prélats et
grands barons du royaume et obtient
leur assentiment et leur soutien pour
la croisade qu’il compte lancer. Deux
jours après, Louis VIII prend la croix. Les
problèmes d’intendance et de financement
sont rapidement réglés et le 17 mai
1226, l’armée croisée quitte Bourges et
emprunte la vallée du Rhône comme
l’avaient fait auparavant les croisés de
1209. Le roi de France Louis VIII est à sa
tête. Les troupes ne rencontrent que peu
de résistance : « à leur arrivée, les consuls
des villes et des places qui appartenaient
au comte de Toulouse venaient au
devant d’eux, leur livraient les ouvrages
fortifiés et donnaient des otages à leur
discrétion » (Guillaume de Puylaurens).
La ville d’Avignon seule refuse de se
rallier et l’armée croisée décide d’en
faire le siège. Le 3 juin, la ville de Nîmes
se soumet. Le 16 juin, par l’intermédiaire
de Benoît d’Alignan, abbé du monastère
bénédictin de Lagrasse, les consuls
de Carcassonne, refusant de suivre
le comte de Foix qui les exhorte à
résister, font porter les clés de la
ville au roi de France, toujours
devant Avignon. Le 12 septembre
1226, Avignon capitule. L’armée
croisée peut prendre possession
du pays ; c’est une promenade
militaire qu’entreprend alors
Louis VIII : Béziers, Carcassonne où le
légat du pape destitue l’évêque Bernard
Raimond de Rochefort, le remplaçant
par Clarin, chapelain puis chancelier de
Simon de Montfort.
Avant de quitter Carcassonne pour
Pamiers, Louis VIII nomme l’officier
royal chargé de gouverner l’ancienne
vicomté Trencavel, devenue sénéchaussée
royale de Carcassonne et de Béziers :
Adam de Milly.
De Pamiers, le roi de France passant
par Belpech se rend à Castelnaudary.
Après cette campagne victorieuse et
l’hiver arrivant, il a décidé de regagner
le royaume de France, il reviendrait au
printemps suivant. Après avoir laissé « la
garde du pays à messire Imbert de Beaujeu,
homme doué pour la guerre et endurant,
avec une grande troupe de combattants »
(Guillaume de Puylaurens), Louis VIII et
le légat font route vers l’Auvergne. Mais à
Montpensier, le 8 novembre 1226, le roi
malade meurt.
Des foyers de résistance
(1227-1228)
Si la plupart des villes en pays d’Aude
se sont soumises, Limoux n’est pas
du nombre. Les Limouxins se rangent
aux côtés de Roger-Bernard comte de
Foix et de Raimond Trencavel, le fils de
Raimond Roger mort dans les prisons
de Carcassonne en 1209. On sait peu de
choses de cette « guerre » de Limoux :
la population fut déclarée « faidite et
rebelle » et fut excommuniée au concile
provincial de Narbonne au printemps
1227. En 1228 toutefois, il semble que la
résistance de Limoux est jugulée. D’autres
places résistent aux croisés. C’est le cas
de Cabaret, dans la Montagne Noire, qui
refuse de se soumettre.
La Croisade royale
n°7 - octobre 2009
Édito
Marcel Rainaud
Sénateur de l’Aude
Président du Conseil général
En avant-
première
Conférence le 20
octobre 2009 à 20 h 30 à
Carcassonne aux Archives
départementales de Marie-
Elise Gardel, archéologue
Les fouilles du
cimetière de
Cabaret à Lastours :
premières approches d’une
population médiévale (XIIe-
XIIIe siècles)
Vous pouvez en ce moment admirer
dans l’exposition « Au temps de la
Croisade » organisée à la Maison des
Mémoires quelques uns des objets
découverts lors des différentes
campagnes de fouille organisées
de 1987 à nos jours par Marie-Elise
Gardel dans le cadre de l’Amicale
laïque de Carcassonne.
C’est un autre aspect que nous
dévoilera le 20 octobre prochain
Marie-Elise Gardel. En effet elle nous
fera part de ses dernières découvertes
et nous fera comprendre ce qu’était la
vie (et la mort) pour cette population
du castrum de Cabaret, ce village
déserté au milieu du XIIIe siècle.
Si vous avez visité l’exposition « Au
temps de la Croisade » présentée
en ce moment à la Maison des
Mémoires, vous avez pu constater
que notre connaissance de la vie
quotidienne médiévale provient
essentiellement des résultats de
fouilles archéologiques. Certes,
les textes littéraires, les chartes,
les registres de comptes nous
parlent incidemment des activités
agricoles, des aliments consommés,
des meubles, des vêtements et des
ustensiles de cuisine, mais on ne saurait
véritablement se les représenter sans le
concours des archéologues.
Les objets du quotidien
présentés dans l’exposition
proviennent de deux sites
archéologiques majeurs :
les castra de Cabaret et de
Montségur, deux places fortes
qui jouèrent un rôle important
dans l’histoire de la Croisade
contre les Albigeois. Les fouilles
entreprises en ces deux lieux
ont livré des témoignages de
choix sur la vie aux XIIe et XIIIe
siècles en temps de paix mais
aussi pendant la croisade. Les
destructions, qui ont succédé à
la reddition des châteaux, ont
fossilisé sous les décombres ce
qui faisait le quotidien de toute
une population.
L’archéologie, une
source historique de
premier plan
Pièce de jeu d’échecs (roi ou reine)
Provenance : fouilles du castrum de Cabaret
(photographies Amicale laïque
de Carcassonne)
Sceau de Raimond II Trencavel, 1247
Moulage en plâtre d’un original en cire
conservé aux Archives nationales
(cliché Archives départementales de l’Aude)
Le castrum de Cabaret
(cliché Amicale laïque de Carcassonne)
Cruche (fin XIIe-début XIIIe siècle)
Provenance : fouilles du castrum de Cabaret
(photographies Amicale laïque
de Carcassonne)
N’oubliez pas
Au temps de la Croisade
Sociétés et pouvoirs au XIIIe siècle
L’exposition réalisée par les Archives
départementales de l’Aude est
ouverte jusqu’au 28 novembre
prochain. Sont réunis pour l’occasion
manuscrits originaux, œuvres d’art,
objets religieux, civils ou militaires
provenant des collections locales
(musées de Lastours, de Montségur,
du Quercorb, Musée des Beaux-arts
et Bibliothèque de Carcassonne,
évêché, etc.) mais aussi d’horizons
plus lointains (Archives nationales,
Bibliothèque
nationale de
France, Musée
de l’Armée,
etc.).
Maison des
Mémoires à
Carcassonne,
53 rue de
Verdun
Ouvert au
public du mardi
au samedi de 9
h à 12 h et de
14 h à 18 h
Edité par le Conseil général de l’Aude
Centre administratif départemental
11855 Carcassonne cedex 9
Directeur de la publication :
Alain Tarlier
Rédaction :
Archives départementales de l’Aude
41 avenue Claude Bernard
11855 Carcassonne cedex 9
Responsable de la rédaction :
Sylvie Caucanas
Photographies : A. Estieu,
A. Fernandez (Archives
départementales)
ISSN : 4141-0180 R
Tirage : 3 000 exemplaires,
publication gratuite
Compogravure :
t2p numéric 04 68 77 22 22
Impression : Maraval
de l’enclos de l’évêché). Le dimanche 30
septembre 1240, Trencavel regroupant
chevaliers, arbalétriers et sergents
mène l’assaut contre la barbacane du
château. Mais l’attaque se brise sur la
vigoureuse défense des assiégés menés
par le sénéchal en personne. « Quand on
eut combattu ainsi pendant presque un
mois, un secours fut envoyé de France
que les ennemis n’osèrent pas attendre »
(Guillaume de Puylaurens). Après 34 jours
de siège, Trencavel se replie sur Montréal
il est assiégé. « On se battit plusieurs
jours, et enfin les comtes de Toulouse
et de Foix arrivèrent et négocièrent
la paix » (Guillaume de Puylaurens).
Trencavel reprend alors le chemin de
l’exil. Le 16 novembre 1240, Guillaume
de Peyrepertuse et Gaucelin de Capendu
font leur soumission à l’armée royale.
Géraud de Niort à son tour abandonne au
roi ses châteaux du pays de Sault : Niort,
Castelpor et Dourne. Le 16 mars 1244,
s’achève le siège de Montségur et plus
de deux cents hérétiques montent sur le
bûcher. En 1255, la chute de Quéribus
marque la fin des opérations militaires
menées contre des seigneurs faidits.
De fait, le roi de France, en s’assurant
cette forteresse, consolide ses forces
face au roi d’Aragon avec lequel il est en
tractations pour régler le contentieux
qui les oppose : Jacques Ier fait valoir la
suzeraineté qu’il exerçait sur la vicomté
de Carcassonne tandis que Louis IX
revendique des droits sur le comté de
Barcelone. Les négociations durèrent près
de trois ans. Finalement, par le traité de
Corbeil, en date de juillet 1258, les deux
souverains renoncent à leurs prétentions.
La frontière entre les deux Etats est alors
définitivement fixée : le Peyrapertusès et la
vallée de la Boulzanne (avec Puylaurens)
appartiennent désormais à la couronne de
France tandis que le Fenouillèdes reste à
l’Aragon. Les forteresses royales marquent
désormais les limites du royaume.
Au cours de l’hiver 1226-1227,
Raymond VII, comte de Toulouse,
décide d’intervenir. Il fait fortifier
Labécède en Lauragais et reprend
plusieurs localités sur les garnisons
françaises. Lorsque vient l’été, Humbert
de Beaujeu met le siège devant Labécède,
le comte de Toulouse a mis « comme
garnison des hommes énergiques,
Pons de Villeneuve, Olivier de Termes
et d’autres guerriers ». « Le château
fortement attaqué par des machines
est pris. Les chevaliers et les gens à
pied s’enfuirent de nuit en assez grand
nombre. Tous les autres que l’on trouva
périrent, partie par l’épée, partie par le
pal. Les hérétiques… furent brûlés aux
flammes des bûchers » (Guillaume de
Puylaurens).
S’il perd Labécède en
l’été 1227, Raimond VII
s’empare de Saint-Paul-
Cap-de-Joux l’hiver suivant
et de Castelsarrasin au
printemps 1228. Mais
durant les trois mois de
l’été 1228, l’armée croisée,
avec à sa tête Humbert
de Beaujeu, ravage le
Toulousain, détruisant
vignes et récoltes.
Raimond VII reste sans
réaction. La résistance
s’effrite.
La soumission
Le roi de France, en plein accord avec
la papauté, fait des propositions de
paix à Raimond VII. Ce dernier ratifie en
janvier 1229 à Meaux ce qu’il est convenu
d’appeler les « préliminaires de la paix ».
Raymond VII demeure en possession
du comté de Toulouse (le territoire du
diocèse de Toulouse, privé toutefois de
la seigneurie de Mirepoix donnée à Guy
de Lévis et relevant directement de la
Couronne). En contrepartie, le comte de
Toulouse doit donner sa fille Jeanne en
mariage à un des frères du roi de France,
Alphonse de Poitiers. Il se voit contraint
d’écarter de sa succession tout héritier
mâle qu’il pourrait avoir ultérieurement.
Le comte s’engage en outre à rechercher
et à poursuivre les hérétiques sur ses
terres. Le 12 avril suivant, à Paris, devant
le portail de la cathédrale Notre-Dame,
se déroule la cérémonie officielle qui
officialise le traité de paix.
Le traité de Meaux-Paris met fin à
vingt années de guerres, croisade des
barons puis croisade royale. Le pays est
soumis et les Eglises cathares contraintes
de passer à la clandestinité.
La révolte de Trencavel
Raimond II Trencavel, qui était
rentré brièvement en possession
de son héritage en 1224, puis qui
avait combattu les troupes royales aux
côtés du comte de Foix, est contraint à
nouveau à l’exil, après la signature du
traité de Meaux. Réfugié à la cour du roi
Jacques Ier d’Aragon, il participe aux
opérations militaires que celui-ci mène
en Espagne contre les musulmans.
En 1240, profitant de l’impopularité
de l’administration royale en place
et de l’exaspération des populations
provoquée par les procédures
inquisitoriales, Raimond II Trencavel,
« assisté de grands seigneurs, Olivier
de Termes, Bernard d’Orzals, Bernard
Hugues de Serralongue, Bernard de
Villeneuve, Hugues de Roumegoux son
neveu et Jourdain de
Saissac, envahit la terre
du roi dans les diocèses
de Narbonne et de
Carcassonne et beaucoup
de châteaux passèrent
de son côté : Montréal,
Montolieu, Saissac,
Limoux, Azille, Laure
et tout ce qu’il voulut
dans cet assaut et cet
ébranlement » (Guillaume
de Puylaurens).
Accueilli en libérateur,
Raimond II Trencavel
parvient jusqu’au bourg
de Carcassonne. Le siège
de la Cité, le troisième
depuis 1209, nous est bien
connu grâce au rapport
qu’en fit, avec force
détails, à la reine Blanche
de Castille le sénéchal de
Carcassonne Guillaume
des Ormes. Les hommes
de Trencavel cherchent
à faire des brèches dans
les murailles : pour cela,
ils sapent la base des
murailles à différents
endroits (au pied de la
barbacane de la porte Narbonnaise, près
Retour sur la
table ronde du
11 septembre
« La société au
XIIIe siècle »
Le 11 septembre dernier se tenait
au Théâtre des Trois-Ponts, mis
gracieusement à disposition
par la Ville de Castelnaudary, la
troisième des cinq tables rondes
organisées dans le cadre de la
commémoration de la Croisade.
Les quatre communications
présentées avaient pour objectif
de présenter au grand public
les principaux acteurs de la
Croisade, en les replaçant dans le
contexte de la société du temps.
La communication d’Hélène
Débax, maître de conférences
à l’Université de Toulouse-Le
Mirail, évoquait les spécificités
de la féodalité méridionale,
appuyant sa démonstration sur
le cartulaire des Trencavel, tandis
que Laurent Macé, lui aussi maître
de conférences à l’Université de
Toulouse-Le Mirail, mettait en
évidence les différentes prise de
position des comtes de Toulouse
face à la Croisade. En contrepoint,
Nicolas Civel, docteur en histoire,
présentait de manière nouvelle
et très documentée la société
féodale d’Ile-de-France. Sylvie
Caucanas, directeur des Archives
départementales, esquissa
un tableau des différentes
composantes de l’Eglise romaine
(clergé séculier et régulier,
mise en place de l’Inquisition
pontificale).
Le château de Quéribus
(photographie Pierre Davy, Comité
départemental du Tourisme de l’Aude)
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