UNIVERSITE DE NANTES UNITE DE FORMATION ET DE RECHERCHE D’ODONTOLOGIE ------------------------Année : 2006 Thèse N°: 12 PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE DU PATIENT HIV+ ------------------------- THESE POUR LE DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN CHIRURGIE DENTAIRE Présentée et soutenue publiquement par BOUVIER Adeline Née le 10 juin 1980 Le 17 mai 2006 devant le jury ci-dessous : Président : Monsieur Le Professeur Olivier LABOUX Assesseur : Monsieur le Professeur Alain JEAN Asseseur : Mademoiselle le Docteur Valérie ARMENGOL Directeur de thèse : Monsieur le Docteur Gilles AMADOR DEL VALLE Directeur de thèse : Monsieur le Docteur Eric BILLAUD 1 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION 5 1 DESCRIPTION DE LA MALADIE 6 1.1 Définition 1.1.1 La définition de l’OMS 1.1.2 Quelques définitions pour les linguistes 6 6 6 1.2 6 L’historique de la problématique du SIDA 1.3 Les modes de transmissions 1.3.1 La transmission par voie sexuelle 1.3.2 La transmission par voie sanguine 1.3.3 La transmission mère-enfant 1.3.4 Les autres voies de transmission mises en doute : le rôle de la salive 1.3.5 Les risques de la vie courante 7 7 8 8 8 10 1.4 Les classifications 1.4.1 La classification de 1986 1.4.2 La classification de 1993 1.4.3 Tableau de la classification de 1993 10 11 11 13 1.5 Histoire naturelle du SIDA 1.5.1 La phase aiguë de primo-infection 1.5.2 Progression : la phase d’infection chronique 1.5.3 ARC (AIDS-related complex) 1.5.4 SIDA 1.5.5 Schéma de l’évolution de l’infection par le VIH 1.5.6 Les non-progresseurs à long terme 1.5.7 Les résistants à l’infection 14 14 15 16 16 17 17 18 2 PHYSIOPATHOLOGIE 20 2.1 Caractéristiques générales et classification des rétrovirus. 2.1.1 Définitions 2.1.2 Organisation du génome 2.1.3 Classification des rétrovirus 20 20 20 21 2.2 Biologie moléculaire. 2.2.1 La morphologie du VIH 2.2.2 Le modèle VIH-2 21 22 25 2.3 Le cycle de réplication. 2.3.1 L’attachement du virus dans la cellule (schéma 5) 2.3.2 L’internalisation du virion 2.3.3 La rétro transcription et intégration 2.3.4 Transcription et synthèse des protéines virales 2.3.5 Le bourgeonnement 2.3.6 Conclusion sur le cycle de réplication 2.3.7 Tropisme 25 26 27 28 29 29 30 30 2 2.3.8 2.3.9 2.4 La dynamique de l’infection Le réservoir viral 31 32 Variabilité génétique et ses conséquences 34 2.5 La réponse immunitaire 2.5.1 L’immunité innée 2.5.2 L’immunité acquise 35 35 36 2.6 Les conséquences biologiques 2.6.1 Troubles hématologiques 2.6.2 Troubles Immunitaires 43 43 50 3 LE DIAGNOSTIC 54 3.1 Chez l’adulte 3.1.1 Le test de dépistage 3.1.2 Le diagnostic précoce 3.1.2.2 Le moyen de dépistage précoce : l’antigénémie p24 54 54 58 58 3.2 Chez l’enfant. 3.2.1 Rappels 3.2.2 Les techniques utilisées 3.2.3 Les prélèvements 59 59 59 60 4 LE TRAITEMENT DE L’INFECTION VIH 62 4.1 Rappels 4.1.1 Inventaire des possibilités thérapeutiques 4.1.2 Les molécules médicamenteuses 4.1.3 Les résultats sur l’efficacité des antirétroviraux 4.1.4 Les perspectives thérapeutiques 62 62 64 66 67 4.2 Protocole thérapeutique : d’après le rapport Delfraissy 2004 4.2.1 Quand débuter un traitement ? 4.2.2 Quel traitement ? 4.2.3 L’observance des patients 4.2.4 Le traitement pendant et après la grossesse. 4.2.5 Les modifications thérapeutiques 4.2.6 Les pauses thérapeutiques 4.2.7 Les effets secondaires du traitement 4.2.8 Les vaccinations 68 68 69 70 70 70 73 73 74 4.3 Les co-infections VIH : Hépatite A, B, C 4.3.1 La co-infection avec l’hépatite B 4.3.2 La co-infection avec l’hépatite C 4.3.3 La co-infection avec l’hépatite A 75 75 78 80 4.4 Le traitement des infections opportunistes (IO) : 4.4.1 Les parasitoses 4.4.2 Les mycoses 4.4.3 Les viroses 4.4.4 Les infections bactériennes 80 81 82 83 86 4.5 Le vaccin 4.5.1 Rappels sur les vaccins et spécificité pour de du VIH 4.5.2 Les obstacles au développement d’un vaccin anti-VIH 4.5.3 Des essais en trois phases 90 90 91 92 3 4.5.4 4.5.5 5 Les approches scientifiques pour un vaccin Conclusion 92 97 LE SUIVI MEDICAL 98 5.1 Le taux de lymphocytes T CD4+ circulants est supérieur à 200/mm³ (ou supérieur à 15% des 98 lymphocytes totaux). 5.1.1 Le suivi clinique 98 5.1.2 Le suivi biologique 100 5.2 6 Le taux de lymphocytes T CD4+ circulants est inférieur à 200/mm³ CONDUITE A TENIR EN ODONTOLOGIE 110 113 6.1 Le patient se dit séronégatif 6.1.1 Les précautions universelles de sécurité 6.1.2 Application des règles universelles ou « standards » (23) (100) 6.1.3 L’élimination des déchets de soins 6.1.4 La désinfection et la stérilisation (CSH Hygiène en pratique dentaire : mars 1997) 113 113 113 114 114 6.2 Le patient dit qu’il est séropositif 6.2.1 Introduction 6.2.2 Les règles universelles : Cf 6.1.2 6.2.3 L’interrogatoire 6.2.4 Ce qu’il faut savoir 6.2.5 L’examen bucco-dentaire 6.2.6 Les soins dentaires et conduite à tenir 116 116 116 117 118 121 132 6.3 145 Le patient n’a pas avoué initialement sa séropositivité mais le dit a posteriori. 6.4 Conduite à tenir chez un soignant en cas d’accident avec exposition au sang 6.4.1 Rappels 6.4.2 Transmission patient – chirurgien-dentiste (94) 6.4.3 Conduite à tenir en urgence : fiche technique de la médecine du travail (tableau 9 p : 143) 146 146 147 147 7 ETUDE DE LA FREQUENCE DES ANOMALIES BIOLOGIQUES DANS LA 158 POPULATION VIH DU CISIH DE NANTES 7.1 Les conditions de l’étude 158 7.2 Les objectifs 158 7.3 Les résultats 158 7.4 Conclusion de cette étude 159 8 CONCLUSION 160 9 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 161 10 TABLE DES ILLUSTRATIONS 180 11 DROITS DE DIFFUSION D’IMAGE : 182 4 INTRODUCTION Identifié en 1981, le Syndrome d’Immunodéficience Acquise (SIDA) est une maladie létale caractérisée par une déficience immune progressive et sévère causée par un rétrovirus : le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH). En octobre 2005, on compte 40 millions de séropositifs, soit 1,2% de la population mondiale parmi lesquels 37,2 millions d’adultes dont 17,6 millions de femmes. En France, le ministère en charge de la santé dénombre 150 000 séropositifs répertoriés, sans compter les cas d’infection, non diagnostiqués à ce jour. Aujourd’hui, les médecins-spécialistes du sida parlent d’une maladie chronique, avec une espérance de vie qui ne cesse de s’accroitre par l’intermédiaire des thérapeutiques antivirales actuelles. Par conséquent, tout chirurgien-dentiste peut s’attendre à soigner des séropositifs à son cabinet, aussi peut-on s’interroger sur l’existence ou non de différences thérapeutiques dans la prise en charge dentaire de ces patients. Afin de mieux comprendre cette infection virale si particulière, nous étudierons, dans un premier temps, son histoire naturelle puis, sa physiopathologie. Une troisième partie sera consacrée aux méthodes de diagnostic. Ensuite, nous visiterons l’éventail des traitements antiviraux actuels ainsi que la rigueur du suivi médical qui en dépend. Une approche De la conduite à tenir en odontologie sera établie, illustrée par une étude menée auprès des patients séropositifs du CISIH de Nantes, sur les différentes anomalies biologiques rencontrées chez ces patients. 5 1 DESCRIPTION DE LA MALADIE 1.1 Définition 1.1.1 La définition de l’OMS D’après la définition de l’OMS, le SIDA se définit comme une Déficience Acquise de l’Immunité cellulaire résultant de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et caractérisée par une numération des lymphocytes T CD4+ inférieure à 200/ml ou à 15% des lymphocytes totaux, une sensibilité accrue aux infections opportunistes et aux néoplasmes malins. Ces éléments reprennent les critères de définition du SIDA établis par les Center for Disease Control (CDC) en 1993. 1.1.2 Quelques définitions pour les linguistes D’après le dictionnaire historique de la langue française (2000), Séropositif, séropositive provient de positif, qui signifie « qui représente une réaction positive lors d’un diagnostic ». Le substantif à propos du diagnostic du SIDA s’est largement répandu, comme l’adjectif, avec l’extension de cette maladie. Sida s’est d’abord écrit S.I.D.A, puis SIDA, Sida et enfin sida. Plusieurs dérivés sont attestés depuis 1985, sidatique très critiqué, en général remplacé par sidéen sidéenne (1988) et sidologue, spécialiste du sida (1985). 1.2 L’historique de la problématique du SIDA Le VIH est étroitement lié aux virus entraînant des maladies semblables au SIDA, chez les primates, et il est possible que le virus du SIDA ait été transféré de l’animal à l’homme au début du 20e siècle, bien que certains indices montrent que dans certains cas 6 isolés, ce transfert se serait produit plus tôt. La source animale ainsi que l’époque du premier transfert ne sont pas connues. Un virus presque identique au VIH a été identifié chez les chimpanzés. Toutefois rien ne permet d’affirmer que le transfert se soit fait des chimpanzés vers les humains, ni que les humains et les chimpanzés aient été infectés par une troisième source. Les études scientifiques ont suggéré que le virus serait apparu initialement en Afrique de l’Ouest, mais il est possible qu’il y ait eu plusieurs sources distinctes. Le premier exemplaire de virus fut découvert en 1959 dans l’actuelle République Démocratique du Congo. On a recueilli également d’autres cas auprès d’un américain homosexuel en 1969 et un marin hétérosexuel norvégien en 1976. 1.3 Les modes de transmissions Depuis le début de l’épidémie, trois modes de transmissions ont été observés : - la transmission par voie sexuelle - la transmission par voie sanguine - la transmission de la mère à l’enfant. Le virus a été également retrouvé dans la salive, les larmes et les urines mais en raison de la faible concentration virale de ces liquides biologiques, le risque de transmissibilité est considéré comme nul. 1.3.1 La transmission par voie sexuelle La plupart des infections par le VIH ont été ou sont encore contractées à l’occasion de rapports sexuels non protégés. La transmission sexuelle se fait par contact entre les sécrétions sexuelles (ou sang contaminé par le virus) et les muqueuses rectale, génitale ou buccale. 7 1.3.2 La transmission par voie sanguine Ce mode de contamination concerne tous les usagers de drogues injectables, les hémophiles et les transfusées. Les professionnels de santé (soins infirmiers, laboratoires) sont aussi concernés, bien que plus rarement. Il ne faut pas négliger les risques de contamination par aiguilles souillées et non ou mal désinfectées (tatouages). 1.3.3 La transmission mère-enfant La transmission du virus mère-enfant peut survenir in utero dans les dernières semaines de la grossesse et au moment de l’accouchement. L’allaitement présente aussi un risque de contamination du bébé de l’ordre de 5%, ce qui explique qu’il soit déconseillé en cas d’infection de la mère. En l’absence de traitement, le taux de transmission de la mère au fœtus est de l’ordre de 20%. Actuellement, les traitements disponibles alliés éventuellement à une césarienne programmée ont réduit le taux à 1%. (6) 1.3.4 Les autres voies de transmission mises en doute : le rôle de la salive Très tôt dans l’épidémie du sida, la salive a été mise en cause dans les cas de transmission non sexuelle. On suspectait dans ces cas de transmission, un rôle non négligeable de la salive (partageant un couvert de table ou une brosse à dent). Plusieurs études épidémiologiques ont démontré que la transmission du virus dépendait d’un contact avec des fluides biologiques du corps, principalement du sang et des sécrétions sexuelles. C’est par ces intermédiaires que l’on définit la transmission orale. (101) Le virus dans la salive : Dans une étude américaine (BARR CE et coll. 1992), le premier rapport ayant détecté le virus dans la salive a été rapidement suivi d’une évaluation sur la concentration du virus dans ce fluide en comparaison avec celle du sang. D’après une autre étude, la proportion de détection du virus dans la salive restait insignifiante (1%) par rapport au taux viral retrouvé dans le sang de ces mêmes patients (38%). 8 Un protocole d’étude sur les mécanismes d’infectiosité des sécrétions salivaires, mené par SHINE et coll (2001) concluait qu’il restait à élucider avec précision la balance entre la quantité de sécrétions infectieuses de la salive et les effets inhibiteurs reconnus pour celle-ci. L’inhibition par la salive Parallèlement au rapport suggérant le faible taux viral dans la salive, des études ont très vite mis en évidence certains composants salivaires inactivant le HIV. Beaucoup de mécanismes inhibiteurs ont été suspectés et testés comme la rupture cellulaire, les anticorps solubles et les composants anti-VIH. (101) Shine et coll se sont intéressés aux secrétions sous-maxillaires, submandibulaires et parotidiennes, pour discuter des différents modes d’inhibition virale de la salive. Bien que la plupart des protéines solubles aient été identifiées, plusieurs (cystatine, lysozyme et lactoferrine) démontrent une activité inhibitrice à des concentrations beaucoup plus importantes que trouvées physiologiquement. L’intérêt porte sur les leucocytes inhibiteurs de protéase (SLPI). Ils ont montré que le SLPI présentait des propriétés inhibitrices sur l’infection des macrophages à des concentrations physiologiques et que l’activité anti-VIH-1 était dose-dépendante. Cependant, le manque de colonisation dans l’épithélium ou les acini salivaires après une infection, suggèrerait que le rôle du SLPI est de prévenir la transmission plutôt que de lutter contre l’établissement de l’infection. Son activité inhibitrice serait due à son interaction avec les molécules de surface cellulaire autres que le récepteur au HIV, et peut provoquer l’inhibition de la protéase sur la membrane cellulaire et/ou l’interaction avec d’autres co-facteurs essentiels à l’internalisation du virus. Les anticorps dans la salive La présence d’anticorps dans la salive est reconnue depuis maintenant 10 ans. MALAMUD et FRIEDMAN (1993), par 15 études, ont démontré une concordance à 97% des dosages d’anticorps anti-VIH dans chaque paire de salive et de sérum. Cependant, ces immunoglobulines anti-HIV ne sont pas valables pour le diagnostic de la maladie. Aujourd’hui, leur rôle contre la transmission orale reste à être clarifié. (110) 9 La transmission mère-enfant: La transmission par l’allaitement a été établie, mais les mécanismes en jeu ne sont pas encore élucidés. Contrairement à la salive, la charge virale est plus élevée dans le lait. Bien que le taux de SLPI augmente à la fois dans le colostrum et le lait maternel, aussi bien que la salive chez le nouveau-né, seul le lait montre une diminution significative de SLPI dans les premières semaines post-partum. On s’intéresse aujourd’hui aux risques potentiels de transmission virale par des petites ulcérations du mamelon, des abcès du sein ou des lésions de la muqueuse orale du bébé. (101) 1.3.5 Les risques de la vie courante Un virus très fragile : Le VIH est un virus fragile. Il est inactivé par la chaleur dès 56° C et par la plupart des désinfectants courants : eau de javel, alcool à 70°, détergents liquides, etc. En revanche, il résiste bien au froid, aux rayons ultraviolets et aux rayons X. Contact avec des objets ayant pu être contaminés : Bien que minime, le risque d’une contamination avec des objets piquants ou tranchants, ayant été en contact avec des liquides biologiques ou les muqueuses d’une personne contaminée, existe. De même, le partage d’ustensiles d’hygiène personnelle pouvant être contaminés par du sang (rasoir, brosse à dent, thermomètre, etc.) constitue un risque. 1.4 Les classifications Il existe deux classifications pour décrire la progression de l’infection VIH, basées sur les manifestations cliniques et les anomalies biologiques. 10 1.4.1 La classification de 1986 En mai 1986, le CDC (Center for Diseases Control) propose la classification suivante pour les manifestations cliniques provoquées par le VIH : - Stade I : après une période d’incubation variable (de 2 à 56 jours en moyenne), la primo-infection à VIH, suivie de la séroconversion, peut se traduire par un syndrome mononucléosique ou un syndrome pseudogrippal associé ou non à une méningite aseptique. - Stade II : Phase asymptomatique : absence de manifestations cliniques importantes mais présence de lésions mineures. Le bilan biologique est normal ou non (lymphopénie global ou concernant surtout les T4, thrombopénie). - Stade III : Syndrome lymphadénopathique - Stade IV : Phase symptomatique caractérisée par l’apparition de manifestations avec persistance ou non d’adénopathies. Ce stade se divise en 5 groupes sans tenir compte de leur gravité : IVA Signes généraux : (correspond au stade ARC) fièvres prolongées et/ou diarrhée persistante et/ou perte de poids supérieure à 10% IVB Lésions neurologiques (démence, myélopathie, neuropathie périphérique) IVC Infections opportunistes, majeure (IVC 1) et mineure (IVC 2) Limites de cette classification : Cette classification n’offrait aucune possibilité pour un même patient d’appartenir simultanément à 2 groupes ni de revenir, au cours de son évolution, à un stade classant antérieur. 1.4.2 La classification de 1993 Depuis le 1er janvier 1993, une nouvelle définition du SIDA est appliquée aux Etats-Unis. Par rapport à la précédente, trois critères cliniques et un critère biologique ont été ajoutés aux 11 autres symptômes. Il s ‘agit de la tuberculose pulmonaire, des pneumopathies bactériennes récurrentes, du cancer invasif du col et du nombre de lymphocytes CD4 inférieur à 200/mm³. En France, seuls les critères cliniques ont été retenus. (102) Cette nouvelle définition s’est accompagnée d’une révision du système de classification de l’infection à VIH, classée en trois catégories (A, B, C) subdivisée en trois sous catégories en fonction du taux de CD4. - Catégorie A : Un ou plusieurs critères cités ci-dessus chez un adulte infecté par le VIH, s’il n’existe aucun critère des catégories B et C. - Catégorie B : Manifestations cliniques chez un adulte ou un adolescent infecté par le VIH, ne faisant pas partie de la catégorie C et qui correspond au moins à l’une des conditions suivantes : - Elles sont liées au VIH ou indicatives d’un déficit immunitaire. - Elles sont une évolution clinique ou une prise en charge thérapeutique compliquées par l’infection VIH. - Catégorie C : Elle correspond à la définition du SIDA chez l’adulte. Lorsque le patient présente une des pathologies suivantes, il est définitivement classé dans la catégorie C. 12 1.4.3 Tableau de la classification de 1993 Catégories cliniques Nombres de (A) (B) (C) lymphocytes CD4+ Asymptomatique, Symptomatique, SIDA primo-infection sans critères (A) ou (C) A1 B1 C1 A2 B2 C2 A3 B3 C3 ≥ 500/mm³ Ou >29% 200-499/mm³ Ou 14-28% <200/mm³ Ou <14% Catégorie A : un ou plusieurs des critères ci-dessous. S’il n’existe aucun des critères des catégories B ou C, on parle d’infection VIH asymptomatique. S’il y a une lymphadénopathie persistante généralisée : stade de la primo-infection symptomatique. Catégorie B : Manifestations cliniques ne faisant pas partie de la catégorie C : angiomatose bacillaire candidose oropharyngée, vaginales persistante, ou répondant mal aux traitements dysplasie du col fièvre>38.5° C ou diarrhée >1 mois leucoplasie chevelue de la langue zona récurrent ou envahissant purpura thrombocytopénique idiopathique neuropathie périphérique Catégorie C : c’est la définition du SIDA - candidose bronchique, trachéale ou pulmonaire et de l’œsophage, cancer invasif du col, cryptococcose extra pulmonaire ou intestinale, infection au CMV (autre que foie, rate ou ganglions) : rétinite, encéphalopathie au VIH, infection herpétique cutanée (avec ulcères chronique>1 mois), bronchique, pulmonaire ou œsophagienne, histoplasmose, maladie de Kaposi, lymphome de Burkitt ou immunoblastique, lymphome cérébral primitif, infection à Mycobactérium avium, ou mycobactérium tuberculosis, pneumonie à pneumocystis carinii, (récurrente), leuco-encephalopathie multifocale progressive, septicémie à salmonelle récurrente, toxoplasmose cérébrale, syndrome cachectique dû au VIH. Tableau 1 : classification des stades cliniques de l’infection VIH de 1993 D’après un tableau Site éditeur Université Joseph Fourier, Faculté de médecine de Grenoble 13 1.5 Histoire naturelle du SIDA 1.5.1 La phase aiguë de primo-infection Elle peut survenir dans les 15 jours à 3 mois qui suivent la contamination, quel que soit le mode de contamination, sexuel ou sanguin. 50 à 70% des personnes contaminées vont avoir des manifestations cliniques pendant cette phase. 1.5.1.1 L’aspect clinique Elle est asymptomatique (silencieuse) ou symptomatique. L’aspect le plus fréquent de cette phase de primo-infection est un syndrome mononucléosique. Il se présente sous forme d’adénopathies disséminées cervicales et axillaires, associées à une fièvre pouvant durer jusqu’à 1 mois, des courbatures et des douleurs musculaires, une éruption cutanée à type de rash ou plutôt d’urticaire, une dysphagie douloureuse et une arthralgie. L’évolution vers le SIDA est plus rapide après une primo-infection symptomatique (on constate en effet une charge virale très élevée). 1.5.1.2 La Biologie Généralement, on observe une inversion de formule leucocytaire avec parfois la présence de mononucléaires bleutés avec parfois une augmentation des transaminases. L’augmentation des lymphocytes porte alors sur les CD8 et il existe une déplétion en lymphocytes CD4. L’apparition d’anticorps est concomitante de cette phase de primo-infection : c’est la séroconversion. Le sujet devient alors séropositif. Elle se fait dans les 6 à 12 semaines après l’exposition au virus. L’antigène P24, qui est habituellement présent à ce stade, est utile au diagnostic. La virémie plasmatique est rapidement élevée et décroit progressivement pour atteindre un plateau d’équilibre 4 à 6 mois après la contamination. 14 1.5.1.3 L’importance du dépistage de la primo-infection La primo-infection fait l’objet d’un grand intérêt depuis qu’il a été démontré que la mise en route d’un traitement anti-rétroviral dès ce stade pouvait modifier l’évolution de la maladie. En effet, lors de cette première étape, il existe une réplication virale précoce et massive entraînant une dissémination très large du virus dans les organes lymphoïdes et le tissu nerveux central. La mise ne route d’un traitement le plus précocement aura pour objectif de diminuer ou de bloquer la réplication virale et limiter la diffusion de la maladie. Le pronostic sera alors modifié. (62) 1.5.2 Progression : la phase d’infection chronique Elle fait suite à la primo-infection et s’étend sur une période de 7 à 10 ans. L’infection chronique par le VIH se traduit par une manifestation clinique ou tout au plus par une polyadénopathie fluctuante. C’est la phase la plus longue pour les patients. Ils vivent totalement normalement durant cette période. 1.5.2.1 Lymphadénopathie généralisée persistante 1.5.2.2 La biologie Les anticorps anti-VIH continue a être détectable dans le sang. Le taux de virus dans le sang et dans les organes lymphoïdes chute jusqu’à un niveau très bas et le taux de réplication viral est minime mais persistant. Le nombre de lymphocytes CD4 reste normal et généralement supérieur à 350 cellules/mm³. 1.5.2.3 La thérapie anti-rétrovirale Le rôle des antirétroviraux durant cette phase asymptomatique est discuté. La décision d’indication des médicaments se base sur le taux de CD4 et sur la virémie. L’objectif du traitement est de maintenir la réponse immunitaire en supprimant la réplication virale. (74) 15 1.5.3 ARC (AIDS-related complex) Il s’agit d’une entité mal définie s’adressant au patient manifestant des symptômes de l’infection VIH mais ne présentant pas pour autant de véritables critères du SIDA. 1.5.4 SIDA Les critères du SIDA varient selon les régions du monde y compris dans les pays où les niveaux sanitaires sont comparables. Ainsi les Etats-Unis ont étendu en 1993 leur définition du SIDA à tous les patients dont le taux de lymphocytes CD4 était inférieur à 200/mm³ alors que l’Europe a maintenu la nécessité d’une manifestation clinique appartenant à la liste indiquée dans le tableau n°1 (cf 1.4.2). En plus des signes et des symptômes présentés ci dessus, des infections opportunistes infectieuses, néoplasiques et neurologiques sont observées au stade SIDA. Ces manifestations correspondent à une immunodépression avancée. Le délai moyen de survie après le diagnostic de SIDA sans traitement est de l’ordre de 18 mois à 2 ans. 16 1.5.5 Schéma de l’évolution de l’infection par le VIH Tableau 2 : schéma de l’évolution des paramètres biologiques face au virus VIH-1 d’après Gilles Furelaud et Benjamin Pavie sur le site http://www.snv.jussieu.fr/vie/dossiers/SIDA/3cycle.htm 1.5.6 Les non-progresseurs à long terme Dans la majorité des cas, les signes cliniques de déficit immunitaire apparaissent pendant les dix années suivant la séroconversion. Néanmoins, un nombre de sujets (5 à 10%) demeurent cliniquement sains et immunologiquement normaux au-delà d’une décennie (jusqu’à 18 ans, à ce jour). « Ce sont les non-progresseurs à long terme ». Les critères retenus pour les non-progresseurs à long-terme sont : une séropositivité depuis au moins 8 ans un état clinique asymptomatique un taux de CD4 stable > 500/ml pas de traitement antirétroviral Chez ces sujets, la charge virale plasmatique est basse voire indétectable, mais persistante. 17 Ce groupe de patients est hétérogène : certains sont véritablement « non-progresseurs au long cours » voire à vie tandis que d’autres subissent une détérioration beaucoup plus lente de leur système immunitaire. Chez les premiers, il existerait une relation hôte-virus fondamentalement différente de celle de la majorité des sujets infectés. Cependant, il faudrait savoir si la souche virale est génétiquement différente avec une pathogénicité réduite ou si leur réponse immunitaire est particulièrement efficace face à ce virus. (73) 1.5.7 Les résistants à l’infection On a remarqué dans des groupes de sujets à haut risque (homosexuels dont les partenaires étaient morts du sida, hémophiles ayant reçu du sang contaminé) que quelques sujets n’étaient pas cliniquement atteints du sida. Ces sujets sont homozygotes pour une mutation portant sur le gène codant le co-récepteur CCR5 : protéine mutée qui a perdu son domaine transmembranaire. Elle est absente de la membrane et ne peut donc plus jouer son rôle de co-facteur pour l’entrée du VIH (cf § 2.3.1 ). Cette anomalie atteindrait environ 1% de la population blanche. 18 POINTS DE REPERE Les voies de transmission Les portes d’entrée: muqueuse, voie sanguine, voie cutanée Ne sont pas contaminants : la salive, la sueur, les larmes, l’urine… La transmission: par voie sexuelle, par voie sanguine, par voie materno-fœtale. L’évolution de l’infection 1. Contamination : de 0 à 48 heures maximum Exposition au virus par voie sexuelle ou sanguine → entrée du virus dans l’organisme Il existe un traitement préventif d’urgence pour tenter d’éliminer le virus. Pas de dépistage 2. Primo-infection : entre 10 et 40 jours Multiplication intense du virus qui devient apparent dans le sang. Le virus peut être détecté dans le sang mais les anticorps peuvent être encore absents. dépistage possible du virus par la technique spécifique de PCR l’antigénémie p24 devient positive à partir du 14 ou 15e jour. Test Elisa à partir du 21e jour. Traitement de la primo-infection afin de diminuer la multiplication du virus. 3. Infection chronique : à partir de 30 jours Apparition des anticorps anti-VIH détectables dans le sang. L’infection peut rester de longues années silencieuse. dépistage sérologique traitement par multi thérapie possible après confirmation sérologique du diagnostic. Surveillance de la charge virale et des taux de lymphocytes CD4 4. Stade SIDA : 10 ans et plus 19 2 PHYSIOPATHOLOGIE 2.1 2.1.1 Caractéristiques générales et classification des rétrovirus. Définitions Les rétrovirus constituent une grande famille de virus, connus chez les animaux depuis le début du 20ème siècle. Ils se définissent par leur structure. Ce sont des particules de 100nm de diamètre, possédant un génome composé d’un ARN bicaténaire. Les particules sont entourées d’une enveloppe et sortent de la cellule dans lesquelles elles se répliquent par bourgeonnement. Mais plus que leur structure, c’est le mode de réplication qui les caractérise, la rétro transcription. C’est donc l’enzyme qu’ils contiennent, appelée reverse transcriptase (RT), qui les caractérise. (103) 2.1.2 Organisation du génome La rétro transcription de la molécule d’ARN transforme le matériel génétique du virus en une molécule d’ADN. La fonction naturelle de la transcriptase inverse est, dans la cellule infectée par le rétrovirus, de synthétiser un ADN double brin à partir de l’ARN monobrin contenu dans la particule virale. Cet ADN est susceptible de s’intégrer dans l’ADN chromosomique de la cellule hôte pour devenir un provirus, qui se comporte ultérieurement comme un gène de la cellule infectée. Ce provirus peut rester silencieux, en se contentant d’être transmis aux cellules filles à chaque mitose, ou s’exprimer, c’est-à-dire être transcrit en différents ARN eux - même traduits en protéines virales. ARN et protéines vont s’associer pour former de nouvelles particules virales infectieuses qui quittent la cellule infectée par bourgeonnement au niveau de la membrane. 20 2.1.3 Classification des rétrovirus La famille des rétrovirus inclut trois groupes qui prennent en compte leur pathogénicité : Le groupe des spumavirus, virus très répandus, mais dont on ne connaît pas le pouvoir pathogène. Le groupe des oncovirus est le plus anciennement connus. C’est par l’intermédiaire d’un oncogène qu’ils ont un pouvoir transformant. Ils sont responsables des leucémies, lymphomes, sarcomes ou tumeurs. Le groupe des lentivirus est connu pour causer des maladies d’évolution très lente avec atteinte du système nerveux central, des poumons ou des articulations. Ils sont connus pour leur variabilité au sein de l’hôte durant l’évolution de l’infection et par la virémie pérenne. Le virus du VIH est l’un des premiers lentivirus humains identifiés. Deux types de VIH peuvent être distingués par des moyens sérologiques. Le VIH-1 de loin le plus fréquent et le plus étudié, le VIH-2 qui a relativement peu diffusé en dehors de l’Afrique de l’Ouest. 2.2 Biologie moléculaire. En microscopie électronique, les particules virales présentent une partie dense centrale (nucléotide ou « core ») relativement petite. Elles contiennent essentiellement deux ARN viraux associés à des protéines, codées par cet ARN viral, et des constituants cellulaires, dont la liste n’est pas encore exhaustive : il y a notamment les ARN de transfert, les lipides et glucides, notamment membranaires et plusieurs protéines comme celle du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH). 21 2.2.1 La morphologie du VIH Les particules virales possèdent un diamètre de 100nm. Chaque virus enveloppé par la nucléocapside est entouré par une bicouche lipidique membranaire, portant des protéines virales et cellulaires. Chaque particule contient 72 complexes de glycoprotéines qui sont intégrés dans la membrane lipidique. Ils sont organisés en trimères avec une glycoprotéine externe gp120 ou transmembranaire comme pour la protéine gp41. La gp 120 peut être détectée dans le sérum aussi bien que dans les tissus lymphoïdes des patients infectés. Entre cette membrane et la nucléocapside se situe une matrice de protéines P17. Figure 1 : le virus HIV-1 d’après Gilles Furelaud et Benjamin Pavie sur le site http://www.snv.jussieu.fr/vie/dossiers/SIDA/3cycle.htm 2.2.1.1 Les Protéines de l’enveloppe Les VIH ont deux glycoprotéines caractérisées par leurs poids moléculaire, produites par un clivage d’un précurseur gp 160. Au cours de leur transport vers la membrane cellulaire les trimères de la gp 160 s’assemblent et une protéase cellulaire les clive en deux sous unités gp 120 et gp41 qui restent associées de manière non covalente. Bien que certains domaines de 22 sa partie externe soient accessibles aux anticorps, on peut considérer que la gp41 reste masquée par la gp120. Celle-ci est responsable des contacts avec la surface cellulaire, notamment par le biais des récepteurs, les CD4. 2.2.1.1.1 La sous-unité gp120 Le gène env qui code pour les protéines d’enveloppe est très variable d’une souche à l’autre, notamment une partie qui correspond au gp 120. Il existe néanmoins des domaines conservés mais qui semblent peu accessibles aux anticorps. Les parties variables (V1àV5) de la protéine forment des boucles exposées à la surface. Aujourd’hui, les travaux se penchent sur la région V3 qui influencerait le tropisme cellulaire du VIH pour les molécules portant un récepteur CD4 en surface. 2.2.1.1.2 La sous-unité gp 41 Seules les parties transmembranaires et extracellulaires de la protéine gp41 semblent intervenir dans le processus d’entrée du virus dans la cellule hôte. Le rôle de la partie intracellulaire reste encore méconnu. Le domaine externe est composé de deux hélices α capables de se lier par des liaisons hydrophobes. Ces interactions sont nécessaires pour un changement dans la structure spatiale du complexe gp120/gp41 permettant à la gp41 d’adopter sa conformation active dite « fusiogène ». 2.2.1.2 L’organisation du génome 2.2.1.2.1 Les gènes classiques - Gag : c’est l ‘ensemble des protéines du nucléotide. Il s’agit des protéines de la capside et de la matrice. - Pol est un gène qui code pour les protéines de réplication : la reverse transcriptase (RT) et intégrase (IN) et pour une protéase (PR) nécessaire à la maturation des protéines de gag. - Env correspond aux glycoprotéines de l’enveloppe : Enveloppe externe de surface et enveloppe transmembranaire (TM). Les protéines d’enveloppe interagissent avec les 23 molécules de surface qui constituent le récepteur viral et catalysent l ‘entrée du virus dans la cellule. - LTR : long terminal repeat sont les deux régions extrêmes du monobrin qui jouent un rôle essentiel dans l’intégration du virus et de sa transcription. 2.2.1.2.2 Les autres gènes Ce qui caractérise le génome du VIH, c’est le grand nombre de gènes régulateurs, codant pour des protéines qui régulent la réplication virale dans les cellules infectées. Ils sont responsables de la complexité de l’organisation génétique des VIH. Ce sont les tat, rev, vif, nef, vpr et vpx. Ils sont classés comme gènes accessoires. Ils apparaissent très tôt dans le cycle viral de réplication. Tat et rev stimulent la transcription du génome, l’élongation de l’ARN et l’initiation du transport de l’ARN du noyau vers le cytoplasme pour la synthèse des protéines. Nef est capable de réguler l’expression des molécules CD4, HLA de classe I et II à la surface des cellules infectées par le VIH. Ceci représente une échappatoire pour le virus pour éloigner la réponse cellulaire cytotoxique CD8+ et empêcher la reconnaissance des CD4. Aussi, nef interviendrait dans l’activation des cellules T en se liant à des protéines régissant le signal intracellulaire de transduction. Vpr semble jouer un rôle essentiel dans la réplication virale en inhibant la division cellulaire comme dans les macrophages. Vpu intervient dans le processus d’échappatoire du VIH car en mutant il permet la persistance des particules virales à la surface des cellules. 24 Figure 2 : schéma du génome du virus hiv-1 d’après ENV 5 LTR GAG POL vif vp ne LTR 3 rev Polymérase tat 2.2.2 Le modèle VIH-2 L’histoire naturelle de l’infection par le VIH-2 montre que ce virus a une pathogénicité moindre que celle du VIH-1. Il a été isolé en 1985 de patients originaires d’Afrique de l’Ouest. Chez les sujets infectés, le taux de progression vers le sida est plus faible que lors de l’infection au VIH-1. Il a été montré aussi qu’ils ont une charge virale moindre que lors de l’infection au VIH-1, à taux CD4 comparable. Mais l’origine de cette moindre pathogénicité du VIH-2 n’est pas connue. Elle ne semble pas par être expliquée par le tropisme de ce virus, ni sa moindre variabilité génétique. L’hypothèse la plus plausible est celle d’une régulation différente de l’expression virale entraînant une efficacité prolongée de la réponse immune cellulaire. Comme pour les VIH-1, les isolats VIH-2 sont actuellement classés en différents sous-types (de A à E), selon l’homologie des séquences des gènes gag et env. Les protéines surtout de l’enveloppe sont antigéniquement distinctes du type VIH-1. En effet, la protéine de l’enveloppe du VIH-2 n’est pas reconnue par les anticorps anti-enveloppe de VIH-1. (19) 2.3 Le cycle de réplication. Le cycle de réplication peut être divisé en deux étapes. La première se termine par l’intégration du virus dans le génome cellulaire, et s’effectue uniquement par des enzymes 25 virales, sans expression des gènes viraux ni intervention des mécanismes cellulaires. La deuxième est caractérisée par la synthèse des nouveaux virions, régulée à la fois par des mécanismes cellulaires et viraux. Chaque étape du cycle peut être la cible d’intervention thérapeutique. (13) 2.3.1 L’attachement du virus dans la cellule (schéma 5) Le virus s’attache à son récepteur spécifique, la molécule CD4, par l’intermédiaire de sa glycoprotéine d’enveloppe externe, la gp120. En fait, la protéine de l’enveloppe gp120 se liant directement au CD4 a une affinité de 4.10¯9 M (LASKY et coll 1987). Pourtant, il apparaît une très haute spécificité entre les molécules. L’identification de protéines à sept domaines transmembranaires virales type récepteur a confirmé le rôle essentiel de liants intermédiaires, appelés chémokines. Certaines souches VIH infectent préférentiellement des macrophages alors que d’autres se lient à la lignée des cellules T CD4. Le tropisme viral différent reflète alors l’entrée en jeu de corécepteurs distinct. En effet, la liaison avec les molécules CD4 de la lignée T utilise généralement le récepteur à chémokine CXCR4. L’infection de telles cellules par ces virus peut être bloquée par un ligand naturel sur les récepteurs. Aussi, le VIH se sert du CCR5 récepteur pour amarrer les macrophages. (60) Les corécepteurs : Ces corécepteurs des VIH sont des récepteurs des chémokines, substances dont le rôle est d’attirer les cellules immunes au niveau des foyers inflammatoires. Ces corécepteurs comportent un domaine extracellulaire (sept domaines transmembranaires qui forment des boucles) et un domaine intracellulaire. (52) Bien que plusieurs corécepteurs aient été identifiés, CCR5 and CXCR4 sont les récepteurs aux chémokines les plus importants : leurs rôles n’ont pas été entièrement clarifiés mais une étude montrera que les différentes étapes de la différenciation cellulaire et les cellules de la lignée CD4 peuvent profondément affecter leur susceptibilité à l’infection par le 26 VIH. Pourtant les mécanismes de compétition des corécepteurs pour l’association à la glycoprotéine du VIH-1 restent à élucider. L’expression du CCR5 ou du CXCR4 sur les leucocytes humains désigne les cellules potentielles, futures cibles du VIH-1. Aussi, l’expression dominante d’un ou l’autre corécepteur présent modifie le modèle dynamique et la réponse immunitaire comme les étapes de différenciation cellulaire. Les résultats de l’étude menée par JOLY et coll. révèlent que malgré le degré de compétition des corécepteurs, qui a limité l’influence de l’infectiosité R5, l’infection par la voie du CXCR4 dépend entièrement de l’expression des CD4, selon le modèle proposé par LEE et coll (2000). Comprenant le rôle in vivo des densités des CD4, CCR5 et des CXCR4 sur l’entrée du VIH-1, s’ouvrirait alors le développement de stratégies de contrôle de la maladie. Figure 3: Adsorption virale auprès d’une cellule cible ; d’après une présentation de G.Furelaud et B.Favie (http://www.snv.jussieu.fr/vie/dossiers/SIDA/4entree.htm) 2.3.2 L’internalisation du virion Après l’attache du virion à la cellule hôte, les protéines virales de l’enveloppe fusionnent avec la membrane de la cellule cible. Les récepteurs liant le VIH sont internalisés par la fusion médiée par la protéine env de la gp 41. Cette glycoprotéine contient une région qui ancre les protéines de l’enveloppe (gp 120 et gp41) ensemble de la bicouche lipidique du 27 virion et le domaine fusionnique amino-terminal. La gp120 du VIH se fixe sur le domaine extracellulaire et la première boucle du récepteur de chémokine CCR5. Le changement conformationnel induit par l’interaction de la gp120 avec le CD4 et le récepteur chemokine provoque l’activation du domaine fusionnique de la gp 41 conduisant à la fusion entre la particule virale et la membrane de la cellule cible, exposant ainsi l’ensemble des composants viraux à l’intérieur de la cellule. (52) 2.3.3 La rétro transcription et intégration Une fois entrée dans la cellule, l’ARN viral encore associé à des protéines de capside est rétrotranscrit dans le cytoplasme en ADN complémentaire par la reverse transcriptase. Celle-ci est également responsable de la destruction du modèle ARN par sa fonction RNase H. Aussi, elle copie l’ADN viral monocaténaire en ADN double brin qui passe dans le noyau de la cellule. Il s’intègre dans l’ADN chromosomique grâce à l’intégrase virale, produit enzymatique issu du gène pol. Le transfert de cet ADN viral se fait sous forme d’un complexe contenant la protéine de la matrice, la protéine vpr et la protéine de nucléocapside p7. Figure 4: Rétrotranscription et translation virale d’après G.Furelaud B.Favie (http://www.snv.jussieu.fr/vie/dossiers/SIDA/4entree.htm 28 et 2.3.4 Transcription et synthèse des protéines virales Le signal de transcription est lié à l’activation cellulaire. Le promoteur du VIH est soumis à une régulation complexe dans laquelle interviennent à la fois des protéines du VIH, des protéines cellulaires et le cas échéant, des molécules transactivatrices induites par d’autres virus (CMV, HBV…). Des cytokines telles que interféron α, l’Il6, et le GM-CSF peuvent contrôler la réplication virale en particulier dans le cas des cellules de la lignée monocytaire. La transcription du génome viral en ARN messager s’effectue par l’ARN polymérase cellulaire à partir de la zone de promoteur situé dans le LTR5’. Après maturation, les ARN messagers viraux sont synthétisés et forment différents molécules résultant d’un épissage multiple : de petits ARNm codant pour les protéines de régulation (tat, rev, nef) sont les premiers à être transcrits. Ils codent pour des protéines régulatrices. La protéine tat active la réplication virale. Les gènes nef régulent négativement la réplication en interagissant avec les séquences régulatrices (NRE) situées dans le LTR5’. La protéine rev favorise le transport du noyau vers le cytoplasme des ARNm où ils seront codés en protéines de structure. (109) Les ARNm correspondant aux gènes gag-pol, sont traduits en une polyprotéine qui sera clivée en protéines internes et enzymes par la protéase virale au moment du bourgeonnement du virus hors de la cellule hôte. Secondairement, les gène rev sont traduits par les ribosomes de la cellule hôte en protéines qui seront glycolysés et clivées en gp120 et gp41. Elles seront ensuite acheminées vers la membrane cytoplasmique. L’encapsidation et la dimérisation de l’ARN viral font intervenir des protéines de la nucléocapside. (64) 2.3.5 Le bourgeonnement En bourgeonnant, la particule virale s’entoure au passage d’une membrane, héritée de la cellule infectée. La sortie du virus se fait sous forme immature. La maturation extracellulaire est liée à l’action de la protéase virale. (cf figure 5) 29 Figure 5: transcription, assemblage et bourgeonnement viral d’après G.Furelaud et B.Favie (http://www.snv.jussieu.fr/vie/dossiers/SIDA/4entree.htm Transcription cellulaire Bourgeonnement Protéines virales ADN proviral intégré ARN assemblage Protéines d’enveloppe Membrane cellulaire 2.3.6 Conclusion sur le cycle de réplication Selon le type de cellules infectées, on distingue : - un cycle de réplication rapide où de nouveaux lymphocytes CD4+ naïfs sont infectés en permanence. Leur demi-vie est appréciée à un jour. - un cycle de réplication lente, dans les cellules présentatrices d’antigènes, où le virus infecte des cellules à demi-vie plus longue (de 6 à 25 jours pour les macrophages). 2.3.7 Tropisme Le VIH parasite le système immunitaire en utilisant à son propre compte diverses molécules de ce système. La sélectivité du tropisme du VIH et la sévérité du déficit 30 immunitaire induit sont en grande partie liées à l’interaction spécifique entre la glycoprotéine d’enveloppe du VIH, la gp 120 et la molécule CD4. Schématiquement, deux catégories de cellules exprimant la molécule CD4 sont infectées par le VIH : - Le virus se réplique donc dans les lymphocytes CD4+, dits T helpers, ayant pour fonction de coordonner l’ensemble des réactions immunes humorales et cellulaires. Ils sont impliqués dans un cycle hautement réplicatif du virus. - Les cellules présentatrices d’antigènes : les macrophages et les monocytes, dans la microglie du système nerveux central, les cellules folliculaires dendritiques des ganglions, dans les cellules dendritiques du sang, les cellules de Langherans. Elles sont impliquées dans un cycle peu réplicatifs et participent à la diffusion et la dissémination du virus, elles constituent, entre autres, un pole réservoir du VIH. Cependant, ces cellules qui fixent le VIH à leur surface mais ne sont pas détectables. Les diverses cellules sont présentes au sein de tout le système lymphoïde (ganglions, thymus, intestin…) au niveau de la peau, des muqueuses génitales, du placenta, du cerveau… leur circulation est assurée par les voies lymphatiques et sanguines. 2.3.8 La dynamique de l’infection La primo-infection est caractérisée par une réplication virale massive. Le principal site de réplication est constitué par les ganglions. Toutefois, la charge virale sanguine, en particulier plasmatique, dépend du niveau de réplication ganglionnaire. Les organes lymphoïdes constituent le site à l’origine de la dissémination du virus dans l’organisme. Au cours de la primo-infection, la charge virale a une cinétique parallèle dans le plasma et dans le ganglion, mais dix fois plus élevé dans ce dernier. Ensuite on observe une diminution variable du titre viral ganglionnaire et du nombre de cellules infectées. Dans tous les cas la production virale persiste. L’ARN viral est détecté dans un délai moyen de 20 jours après la contamination. Puis un pic survient pour atteindre une valeur 31 maximale dans les jours suivants l’apparition des symptômes (7 jours). Ensuite la charge virale diminue rapidement jusqu’à un plateau 70 à 200 jours après le début des symptômes. Le taux viral plasmatique provient essentiellement des lymphocytes CD4 infectés produisant les virus et situés dans les tissus lymphoïdes, la demi-vie de ces cellules étant de 1 jour. Les monocytes–macrophages et cellules folliculaires dendritiques infectés produisent moins de virus et leur demi-vie serait de 14 jours. (90) 2.3.9 Le réservoir viral Qu’est-ce que l’infection latente ? Il s’agit de la persistance du virus dans certaines cellules quiescentes, « au repos », non activées, sans qu’il ne se produise de multiplication virale active. Dans le cas du VIH, les réservoirs de virus sont essentiellement constitués par des cellules CD4 (T4) sans correspondre à un compartiment anatomique particulier : on les retrouve dans les ganglions, l’appareil génital, le cerveau. (91) Les cellules réservoirs : Tandis que la majeure partie de la réplication du VIH se passe dans les cellules CD4 activées dans les organes lymphoïdes, les autres populations cellulaires peuvent être infectées et jouent ainsi un rôle important dans la persistance du virus. Les cellules T restantes constituent un réservoir du VIH latent pouvant être activées en terminant leur cycle de réplication. Le virus est intégré sous forme d’ADN dans le patrimoine génétique des cellules hôtes. Le VIH se met ainsi à l’abri en exploitant l’une des caractéristiques fondamentales du système immunitaire, celle de stocker de façon durable la mémoire des infections que nous avons rencontrées au cours de notre vie, afin d’être capable de répondre rapidement à une nouvelle agression du même envahisseur facilement reconnu par les cellules en questions. Elles sont d’ailleurs appelées les CD4 mémoire. Leur particularité est de pouvoir survivrent pendant plusieurs années, à la différence des cellules CD4 activées, qui elles, sont entrées en action contre le virus. De plus, il a été montré in vivo que le virus peut infecter des cellules 32 encore incomplètement activées. Ce réservoir de virus est stable chez un individu et ne semble pas bouger quantitativement au fil du temps même sous traitement actif. En effet, les cellules en phase G0 du cycle cellulaire sont incapables de soutenir la réplication HIV car bloquées au niveau de la transcription inverse ou même l’entrée du virus dans le noyau. De multiples facteurs cellulaires et la protéine Tat réguleraient la transcription. Les cellules ont un niveau d’activation qui peut changer sous l’influence de différentes stimulations. Si elles sont activées, (lors de l’arrêt du traitement par exemple), elles recommencent à produire du virus en grande quantité dans le sang et le tissu lymphatique. (91) Une réplication persistante : Le stockage dans ces cellules permet l’archivage du virus de type « sauvage », c’est à dire qui a infecté le sujet initialement. Sont aussi stockés des variants résistants à l’un ou l’autre des traitements mis en place. Ceci rentre en considération pour les stratégies thérapeutiques. Quand le traitement actuel est parfaitement efficace, sur les critères de suppression de la charge virale, il persiste tout de même une minime réplication virale indétectable avec les techniques usuelles. Elle apparaît sans conséquence sur l’évolution des résistances et les réservoirs de virus. On continue alors avec le traitement efficace et bien suivi. En cas d’échec, le virus porteur de multiples mutations de résistance, dit de type « sauvage » a la capacité de réplication la plus élevée et présente dès lors une virulence accrue. Il est alors plus bénéfique de maintenir un traitement incomplètement efficace que de stopper tout traitement. 33 Figure 6 : La dynamique de l’infection à VIH et les cellules mémoires CD4+ mémoire infection latente ½ vie : 120 jours CD4+ infection productive ½ vie : 1 jour CD4 non infectés VIH 1 ½ vie 6h virus sur les cellules folliculiculaire dendritiques ½ vie : 1 à 14 jours CD4 activés non infectés Macrophages tissulaires infectés ½ vie : 6 à 14 jrs 2.4 Variabilité génétique et ses conséquences Depuis que le VIH1 et le VIH2 ont été reconnus comme des agents du sida, de multiples isolats ont été clonés et leurs séquences nucléosidiques analysées. Ces variations virales résultent des erreurs de copies effectuées par les enzymes responsables de la réplication du génome (la transcriptase inverse, RNAse polymérase). Chaque erreur correspond à une variation (mutation). Il survient environ une erreur pour 1000 nucléotides copiés. Le génome compte environ 10 000 nucléotides, il se produit donc un changement par cycle réplicatif. Il n’existe donc jamais deux génomes viraux identiques. Les enzymes concernées réalisent parfois des erreurs et ne comportent pas de système de réparation. Donc la diversité génétique du virus est due seulement à la dynamique de réplication. 34 Chez le sujet récemment infecté, lors de la primo-infection, les virus circulants sont généralement très homogènes et ceci même s’il a été contaminé par un patient porteur de plusieurs souches différentes. Cette population virale va évoluer. Progressivement, une diversité de virions apparaît chez le sujet infecté. La variabilité dépend essentiellement du gène env, les gènes gag et pol étant les plus conservés. Au niveau de la gp120, cinq domaines hypervariables (V1 à V5) et six domaines constant (C1 à C6) ont été identifiés. La boucle V3 intervient dans la pénétration du virus dans la cellule et dans la neutralisation du VIH1. Elle constitue donc la cible principale des anticorps capables de neutraliser le virus. La boucle est formée d’un enchainement de 30 à 40 acides aminés qui se détachent à la surface de l’enveloppe. Seuls trois acides aminés sont constants et tous les autres peuvent varier. L’hyper variabilité pose de gros problèmes dans la composition d’un vaccin. La variabilité existe d’un patient à l’autre mais aussi à moindre degré chez un même individu. On parle alors non pas de virus mais d’une population virale, ensemble polymorphe dont chaque élément peut présenter des propriétés uniques. Mais il s’est avéré que d’un virus à l’autre il existe d’importantes différences de propriétés biologiques, notamment en ce qui concerne le type cellulaire infecté ou de la virulence. La présence au sein d’une population virale de propriétés bien diversifiées constitue l’une des principales forces du virus : la capacité adaptative. (120) 2.5 La réponse immunitaire 2.5.1 L’immunité innée Appelée auparavant non spécifique, l’immunité innée est la première barrière de défense de l’organisme face à l’introduction du virus. Cela regroupe les actions des macrophages, des cellules dendritiques, des polynucléaires ou des monocytes qui sont capables de distinguer un virus, une bactérie, voire une cellule infectée ou abîmée de nos propres cellules saines. Il existe donc bien une spécificité de reconnaissance. Il existe des récepteurs responsables de leur activation, appelés Toll Receptor. De même, des récepteurs 35 d’acides nucléiques viraux sont capables de fixer les molécules et signaler cet événement aux cellules de l’immunité innée, en vue de les activer. Les processus qui en découlent sont de deux types : la phagocytose et les processus inflammatoires locaux (recrutement de cellules sur le site de l’infection). Ces cellules sont aussi impliquées dans l’infection par le VIH. Aujourd’hui, les études ont mis en évidence la présence essentielle de co-récepteurs assurant la pénétration du virus dans de nombreuses cellules, notamment via des interactions avec la protéine virale gp120. Ces récepteurs n’ont pas été fabriqués par le système immunitaire uniquement pour recevoir le VIH. Ce sont des récepteurs de chémokines. Le CCR5 est présent au niveau de la membrane cellulaire des monocytes, des cellules dendritiques et des macrophages. Son ligand principal est une chémokines responsable de l’attraction et de la migration sur le site infectieux des cellules de défenses (notamment les leucocytes qui sont dotés de récepteurs de chémokines). 2.5.2 L’immunité acquise 2.5.2.1 Le rôle primordial des cellules présentatrices d’antigènes 2.5.2.1.1 Les cellules dendritiques Les cellules dendritiques, macrophages et monocytes ainsi que les cellules B sont les principales Cellules Présentatrices d’Antigène (CPA) du système immunitaire. Les cellules dendritiques (DC) sont les principaux inducteurs et responsables de la réponse primaire. Les cellules dendritiques précurseurs migrent depuis la moelle osseuse vers les organes lymphoïdes primaires (rate) et dans les sous-muqueuses de certains organes (respiratoires, génitaux). Elles sont capables de capturer des antigènes solubles et migrer vers les organes lymphoïdes secondaires, les ganglions, d’où elles activeront les cellules T spécifiques de ces mêmes antigènes. Les cellules dendritiques sont un groupe hétérogène de cellules avec différentes capacités et expression de marqueurs de phénotypes, dépendant du microenvironnement local et de leur degré de maturation. Immatures, elles sont capables de capturer des antigènes du non soi, sans pouvoir activer par la suite les cellules T. Pourtant, une fois matures, elles acquièrent cette capacité. Les cellules dendritiques de Langerhans 36 situées dans la peau et dans la muqueuse, rentrent en contact avec le virus et deviennent infectées. Les protéines virales sont alors produites dans leur cytoplasme, puis dégradées et transloquées vers l’endoplasme où elles sont liées à une molécule du complexe d’histocompatibilité majeur (CMH) de classe 1. Ce complexe spécifique antigène-CMH1 est ensuite exprimé à la surface de la cellule. Elles migrent dans les tissus lymphoïdes. Elles y acquièrent un phénotype dit mature. 2.5.2.1.2 L’interaction des cellules dendritiques et des cellules B/T Les lymphocytes B et T sont les principaux acteurs de la réponse immunitaire spécifique. A partir des antigènes présentés en surface de CPA via une molécule du CMH, l’activation se fait par l’intermédiaire des récepteurs TCR ou BCR. Les cellules B reconnaissent l’antigène en le liant à son récepteur (RCB). La reconnaissance par les lymphocytes T demande une présentation de l’antigène via une molécule du CMH par la DC : une molécule de CMH1 pour activer les cellules CD8+, ou un CMH2 pour activer les CD4+. La capacité des DC pour cette activation dépend essentiellement de la sécrétion de cytokines immuno-stimulatrices comme l’Interleukine 12. En résumé, les cellules dendritiques jouent un rôle indispensable dans la mise en route de l’activation des cellules immunitaires telles que les lymphocytes T ou B. Souvent les cellules infectées par le virus n’expriment pas ces molécules de co-stimulation ce qui ne permet pas l’expansion clonale des cellules T effectrices, ceci démontre l’importance des DC, système spécialisé de présentation de l’antigène de l’hôte, dans la phase initiale de défense. Elles sont à l’origine de la prolifération clonale des cellules T. 2.5.2.2 L’immunité cellulaire 2.5.2.2.1 Le système HLA Les cellules T CD8 reconnaissent leur antigène (peptide) avec une molécule de classe I sur les CPA tandis que les cellules CD4 nécessitent une molécule de classe II. L’activation d’une réponse immunitaire spécifique du VIH dépend des gènes HLA. 37 2.5.2.2.2 L’entrée en jeu des cellules CD8 L’infection aigue est souvent accompagnée d’un état fébrile et d’une dissémination du virus dans le tissu lymphoïde, le système nerveux central ou d’autres sites. Le pic de réplication virale est représenté principalement dans le plasma et les tissus lymphoïdes. Le taux de réplication semble diminué avec l’apparition systémique des cellules T spécifiques CD8+ cytotoxiques (Tc). Ces lymphocytes sont capables de lyser les cellules infectées de l’hôte et atténuer la réplication virale. Ces lymphocytes apparaissent pendant la primoinfection et persistent pendant la période asymptomatique avec un niveau d’activité très élevé pour ne disparaître qu’en fin d’évolution. (67) Les lymphocytes reconnaissent des nonapeptides provenant d’un ensemble de protéines virales (env, gag, pol, nef et vif). De multiples épitopes T immunodominants ont été identifiés dans env, p24 et dans les régions centrales de la protéine nef. Ces nombreux épitopes déterminent la polyclonalité caractéristique de la réponse Tc au VIH. Leur stimulation et leur formation se font en fonction du mode de présentation de l’antigène - CMH classe 1 par la CPA. Le récepteur de surface de la cellule T (TCR) rentre alors en contact reconnaissant la molécule du CMH. Seulement ce dernier peut montrer une faible affinité de liaison avec le complexe. La forte densité de molécules de co-stimulation de surface des DC augmente le lien avec le CMH. Il en résulte la destruction de la cellule infectée produisant le virus. Cette fonction est largement médiée par des perforines libérées qui génèrent des micro pertuis dans la membrane permettant le passage du granzyme qui détruit la cellule. Cette réponse Tc spécifique serait un facteur de meilleur pronostic pour l’évolution ultérieure de l’infection. Cette réponse cellulaire Tc assure le contrôle de la réplication virale au cours de la phase asymptomatique. Bien que la majeure partie de l’activité cytolytique se résume par les perforines, les cellules CD8 T expriment à leur surface un récepteur capable de reconnaître le ligand Fas (CD95) de la surface des cellules cibles et d’induire le phénomène d’apoptose de ces mêmes cellules. Finalement, Les cellules CD8 T peuvent libérer plusieurs facteurs solubles à l’origine d’une activité antivirale, notamment la libération de l’interféron γ qui permet via une cascade d’interaction rendre les cellules plus résistantes à produire des particules virales. Aussi, elles produisent des βchemokines MIP-1a, MIP-1b (protéines inflammatoires des macrophages), 38 RANTES (molécule de régulation de l’activation des cellules T) et CAF qui une fois liées au CCR5 diminuent la capacité du VIH à entrer dans les cellules concernées. Bien qu’il soit irréfutable que les cellules CD8 jouent un rôle important dans le contrôle de la réplication virale, les processus ne sont cependant pas entièrement clairs. La protéine nef peut ralentir les antigènes HLA Classe I et ainsi diminuer la reconnaissance des cellules infectées par les cellules cytotoxiques. Malgré l’entrée en action des cellules T CD8 chez l’individu infecté, la suppression complète de la réplication virale n’est pas atteinte. L’échappée virale par des mutations rend les cellules infectées par le virus indétectables par les lymphocytes T cytotoxiques. De plus, un dysfonctionnement des cellules T CD8 spécifiques du VIH a été mis en évidence par une étude in vitro avec une nette diminution de l’activité cytolytique, une prolifération moindre et une baisse d’expression des molécules de signalement. Cependant, les causes restent à être déterminées mais des travaux évoquent aujourd’hui sur trois possibilités, ce phénomène serait dû aux conséquences d’une exposition permanente à un nombre important d’antigène, d’un déficit en cellules CD4 helpers ou de la présence de produits viraux toxiques et des effets d’une inflammation chronique. 2.5.2.2.3 La réponse immune CD4 Dépendant de la sécrétion des cytokines, les cellules CD4+ peuvent se différencier en cellules Th1 et Th2. Les CD4 Th1, appelés auxiliaires, produisent de l’interleukine-2 (IL-2) et de l’interféron γ, responsables des fonctions du système immunitaire (CTL, macrophages, NK). Les cellules Th2 produisent de l’IL-4, IL-10, IL-5, IL-6, qui permettent le développement de la réponse humorale. Le rôle des cellules Th1 apparaît déterminant dans deux situations : chez les sujets asymptomatiques à long terme (ALT) (la réponse spécifique anti-VIH semble responsable de la non-progression de l’infection) et chez les primo-infections traitées précocement par antirétroviraux. Ces lymphocytes amplifient la réponse cytotoxique (CTL). Le taux d’IFNγ produit par ces cellules est inversement corrélé à la réplication virale et constitue un marqueur de l’efficacité de la réponse immune. 39 Il existe aussi des cellules T ayant un profil Th0, qui sont des effecteurs partiellement différenciés produisant à la fois des cytokines Th1 et Th2. L’environnement cytokinique détermine la différenciation des cellules en Th1 et Th2. La présence précoce de l’interleukine IL4 stimulera la différenciation de cellules TH2 alors que la présence d’IL 12 et d’interféron γ favorisera les Th1. Une approche biologique a montré une altération des lymphocytes Th1 en particulier une diminution importante de cellules T produisant de l’Il2. Cette dernière étant essentiellement produite par des CD4 naïfs, on en déduit donc que la disparition progressive des compartiments de génération des lymphocytes incapables de produire des CD4 naïfs tout au long de l’infection est responsable de la prédominance des cellules Th2. Aussi, au cours de la maladie, les cellules CD4 disparaissent car non renouvelées et l’immunité humorale devient plus importante. Cette déplétion est caractéristique dans l’infection VIH non traitée. Le dénombrement des lymphocytes T CD4 est désormais une mesure globale de la compétence immune et signe un pronostic sur l’apparition des maladies opportunistes. Très tôt au décours de la maladie apparaît le syndrome de lymphadénopathie généralisée caractéristique de l’accumulation des lymphocytes dans les ganglions lymphatiques inflammatoires. Des cellules T CD4 mémoires sont aussi détectées mais disparaissent de la circulation sanguine puis des tissus lymphoïdes au cours de la progression de la maladie. 2.5.2.2.4 Les Natural Killers (NK) Les NK sont des lymphocytes avec des capacités cytolytiques. Cette capacité est très efficace contres les cellules tumorales et les cellules infectées par un virus qui voient leur marqueur d’histocompatibilité (CMH) classe I diminué à leur surface. Ils sont utilisés en liant un antigène pour la présentation au récepteur de la cellule T. Les Natural Killer appartiennent au compartiment du système de défense de l’hôte ayant une activité contre les cellules qui échappent au système. La lyse des cellules peut aussi être dirigée contre les cellules qui reconnaissent les anticorps de l’hôte en liant un des fragments de la partie constante de l’immunoglobuline sur un récepteur membranaire de la NK. Donc, les Natural Killers contribuent à initier et adapter une défense immunitaire. (2) 40 2.5.2.3 La réponse immunitaire humorale Le système humoral spécifique du VIH est caractérisé paradoxalement par une hyper activation et une moindre réponse immunitaire. L’hyper activation reflète une prolifération polyclonale d’hyperglobulines, mais dont seulement une petite quantité est dirigée contre les antigènes HIV. La formation des plasmocytes se fait dans la moelle osseuse. Ce plus haut degré de maturation des lymphocytes B et la présence d’anticorps dans le plasma montrent la mise en place d’une activité humorale intense. La réponse humorale est composée d’anticorps dirigés contre les protéines du VIH : protéine d’enveloppe gp120, gp41, protéines de la capside p24, P18, RT, nef… La séroconversion survient dans les 3 à 12 semaines après la contamination. Elle est caractérisée par l’apparition des anticorps spécifiques dont la progression persiste en plateau jusqu’à la phase de progression de la maladie où le taux d’anticorps anti-p24 diminue régulièrement. Seuls les anticorps neutralisants pourraient avoir un rôle protecteur mais ils n’apparaissent que tardivement, après le 2ème mois. Ils sont dirigés contre la gp120, plus particulièrement contre la boucle V3 du virus responsable de la contamination. Cependant, quelques mois plus tard, bien que les anticorps soient toujours présents, le virus que l’on peut isoler du patient n’est plus sensible à leur action neutralisante. L’analyse de la séquence de ce nouveau virus montre que les variations responsables de cette résistance affectent la boucle V3. Pendant ce temps, un autre type d’anticorps neutralisants apparaît mais de façon retardée et à des taux plus faibles. Tout se passe comme si le virus orientait la réponse immunitaire contre une région de son enveloppe qu’il est capable de muter sans perdre ses propriétés infectieuses. L’hyperactivité des cellules B peut contribuer à l’apparition de lymphome chez les personnes infectées, bien que le lien n’ait pas encore été établi. En parallèle, l’efficacité de la réponse par une stimulation antigénique des plasmocytes a été démontrée in vitro. De plus, la coopération avec les cellules CD4 helpers est indispensable ; on parle de réponse « cellule T dépendante ». Bien que les anticorps puissent être induits en l’absence de peptides liant, la réponse n’est pas optimale. Pourtant les lymphocytes B nécessitent des supports de cellule T helper. Le déficit en CD4 au cours de la maladie souligne ainsi la réponse atténuée. 41 2.5.2.4 Les résultats de la réponse immunitaire de l’hôte face au virus 2.5.2.4.1 Une destruction cellulaire accélérée : phénomène de l’apoptose En somme, la dynamique de l’infection est caractérisée par un développement d’une profonde immunodéficience mais aussi par une réponse permanente immune voire une hyper activation. En fait, il s’agit d’une dysfonction et d’une déficience immunitaire. La réponse est visible par des marqueurs du sang (lymphocyte T, lymphocyte B, et des molécules inflammatoires telles que les cytokines). Les lymphocytes ont été activés pour rentrer dans le cycle cellulaire. Souvent ce cycle est avorté et les cellules activées tendent à mourir par le processus de mort cellulaire programmée (apoptose). (5)(93)(105) 2.5.2.4.2 Une production diminuée En revanche, même si quelques cellules CD8 peuvent mourir après leur activation, certaines populations court-circuitent leur programme cellulaire et voient leur turn-over augmenté. En parallèle, il est évident que la production cellulaire auto-immune s’amoindrit en fonction des stades de l’infection. La maladie avancée, il existe une hypoproductivité cellulaire de la moelle osseuse. Apparaît alors une pancytopénie mise en évidence par une biopsie soulignant une hypoplasie médullaire. Notons que sous traitement antirétroviraux, les cytopénies sont moindres. La maturation des lymphocytes se fait dans le thymus dans lequel les cellules T reconnaissent leur récepteur les molécules de HLA. Le rôle du thymus dans l’infection HIV est complexe. Bien que sa taille soit préservée, une étude a démontré que la fonction thymique augmente durant la maladie, non traitée. Pourtant les thymocytes (qui présentent une molécule CXCR4) peuvent être infectés. 2.5.2.4.3 L’échappée virale Les recherches sur les modes de détournement du virus HIV-1, face aux mécanismes des lymphocytes T cytotoxiques, sont essentielles pour comprendre la pathogénicité de l’infection et développer une vaccination efficace. Une étude menée par YOKOMAKU et coll (2004) suggère que l’échec du système de présentation antigénique des CPA aux lymphocytes cytotoxiques s’opère assez souvent, il 42 apparait alors comme le principal mode d’échappée du virus VIH-1. Son équipe a reconnu trois sortes de variant de la protéine Gag, normalement épitopes de reconnaissance des CTL. Les virus esquivent le processus cytolytique des CTL, donc leur échappée semble liée aux modifications qui se déroulent durant le processus de présentation des épitopes sur les cellules infectées. (122) Les CTL peuvent exercer une sélection qui provoque une habilité virale à se transformer. Tous les clones de CTL ne sont pas susceptibles d’entrainer des mutations. La pression immunitaire et l’aptitude des virions à muter peuvent être influencées par les épitopes cibles, les protéines membranaires et la structures du TCR par la sélection des clones CTL. (120) La restriction du système HLA fait que les épitopes CTL varient selon l’haplotype HLA-57, qui s’accompagne alors d’une inhibition de l’expression du HLA à la surface des cellules infectées, les rendant ainsi invisibles aux CTL. 2.6 Les conséquences biologiques 2.6.1 Troubles hématologiques La modification des paramètres biologiques chez un patient séropositif au VIH est multifactorielle et les différentes perturbations biologiques sont en relation avec l’atteinte virale sur les cellules de l’organisme et l’effet toxique des chimiothérapies. En général, les anomalies hématologiques progressent en fréquence et en sévérité avec l’évolution de l’infection depuis la phase asymptomatique jusqu’aux stades symptomatiques des plus graves de la maladie. 2.6.1.1 Au stade asymptomatique ou stade d’infection chronique La thrombopénie est considérée d’origine périphérique avec un myélogramme riche en mégacaryocytes et fréquemment associée à la présence d’immunoglobulines liées aux plaquettes. Le nombre de thrombocytes descend sous la valeur de 150 000 éléments/mm³. Cette thrombopénie n’a pas d’influence sur l’évolution de la pathologie VIH. 43 → Il faut considérer la thrombopénie modérée (50 000 à 150 000/mm3) et les thrombopénies sévères survenant chez des patients au stade évolué. La présence d’Immunoglobulines liées aux plaquettes Ig G-P chez des patients séropositifs non thrombopéniques n’argumente pas une réelle cause à effet immédiate et infirme l’hypothèse d’une hyperdestruction plaquettaire due aux immunoglobulines. Cependant, on s’orienterait vers l’existence d’anticorps antiplaquettaires et de complexes immuns à l’origine de cette thrombopénie. Des anticorps antiplaquettaires, fixant un antigène de la membrane plaquettaire, viennent d’être trouvés mais un approfondissement de ces recherches reste en cours. La thrombopénie a pour conséquence directe un risque hémorragique qui, quand il devient majeur, peut contre-indiquer certains actes chirurgicaux. Une numération du taux de plaquettes supérieur à 50 000/mm³ permet d’envisager une intervention. Avant tout acte, il faut alors procéder rigoureusement à des examens biologiques combinant une numération plaquettaire, le temps de saignement, le taux de prothrombine et le taux de céphaline activée. Si les constantes sont normales, la chirurgie se fera comme à l’habitude. Sinon, il faudra jauger de la nécessité de l’intervention en fonction du déficit trouvé. (75) Le traitement ne diffère pas de celui proposé au cours du purpura thrombopénique auto-immun (PTAI). La corticothérapie à la posologie de 1 mg / kg / j permet d'obtenir une augmentation du taux de plaquettes chez les deux tiers des patients sur trois. L'AZT est en fait actuellement le traitement de première intention. En cas d'échec, la dapsone (Disulone®) peut être utilisée mais son mode d'action est inconnu. La splénectomie permet, comme au cours du PTAI, d'obtenir 80 % de succès durables et n'augmente pas le risque d'évolution vers le sida. Lorsqu'une ascension rapide du taux de plaquettes est nécessaire pour un acte chirurgical ou pour le traitement d'un syndrome hémorragique, les immunoglobulines polyvalentes d'origine humaine, à la posologie de 1 à 2 g / kg par voie intraveineuse et administrées en deux à cinq jours, permettent d'obtenir dans 80 % des cas une ascension en un à deux jours du taux de plaquettes. En effet, les transfusions de plaquettes n'ont peu ou pas de place ici, étant immédiatement détruites comme les plaquettes autologues. (97) 44 2.6.1.2 2.6.1.2.1 Au stade tardif Déficits centraux Les modifications médullaires vont toucher les cellules souches et les progéniteurs hématopoïétiques. La physiopathologie est encore inconnue et reste encore discutée. L’atteinte de toutes les lignées conduit à une véritable aplasie médullaire au cours du SIDA confirmé. Le tableau hématologique associé au VIH est une pancytopénie avec une moelle riche en précurseurs granuleux et en mégacaryocytes, avec des anomalies morphologiques des érythroblastes. Les anomalies médullaires s’expliqueraient par un déficit en lymphocytes CD4, la fibrose médullaire, de l’érythrophagocytose, des phénomènes auto-immuns et par l’agression toxique du VIH. 2.6.1.2.1.1 Les progéniteurs hématopoïétiques atteints Des anomalies quantitatives au niveau des progéniteurs hématopoiëtiques apparaissent comme la conséquence de l’absence de synthèse de cytokines (IL-3, GM-CSF, IL-1). Ces molécules participent à la maturation des cellules souches. Elles sont produites par les lymphocytes et les monocytes qui au cours de l’infection deviennent de plus en plus rares. Mais il n’est pas possible d’exclure le rôle des traitements anti-infectieux qui pourrait entraîner une fragilisation des cellules souches. Aussi trouve-t-on une réduction de la croissance des colonies des progéniteurs hématopoïetiques (CFU-GEMM), de ceux des mégacaryocytes (CFU-MK) ainsi que ceux progéniteurs érytroïdes ( BFU-E). Ce serait l’effet secondaire des cellules Natural Killers. (58) 2.6.1.2.1.2 L’hémophagocytose On retrouve exceptionnellement un syndrome d’hémophagocytose chez les sidéens avec une immunodépression sévère. C’est une prolifération d’histiocytes avec une hémophagocytose. Les mécanismes sont encore inconnus. Ils sont associés souvent à une hyperthermie, une hépatosplénomégalie et une polyadénopathie. 45 2.6.1.2.1.3 L’effet myelosuppresseur Les effets myelosuppresseurs du sérum sont expliqués par l’infection des cellules progénitrices qui portent à leur surface des antigènes du VIH (gp120, gp41). Les anticorps de l’hôte pourraient inhiber directement la prolifération des progéniteurs par un phénomène de cytotoxicité cellulaire dépendante des anticorps. (115) 2.6.1.2.2 Déficit périphérique 2.6.1.2.2.1 Anémie Approximativement, 7% des sujets asymptomatiques présentent une anémie. La prévalence de l’anémie augmente de 30 à 40% dans les maladies qui se déclarent très tôt et dans le stade de sida déclaré. L’anémie est normocytaire et normochrome, excepté pour les patients recevant de la zidovudine où elle est macrocytaire. Le taux de réticulocytes est normal ou diminué, reflétant l’incapacité partielle de la moelle osseuse à corriger cette anomalie. Les causes potentielles de cette anémie : Elles sont nombreuses et l’ordre d’importance de chacune se révèle très difficile à établir. On observe une diminution du taux de fer et une augmentation de la ferritine dans le sérum. Le temps de demi-vie des globules rouges raccourci s’accompagne de la séquestration du fer par les macrophages empêchant sa réutilisation. On parle aussi d’une inhibition de la différenciation érythrocytaire par les facteurs inflammatoires. Quelques agents infectieux comme le Mycobactarium avium complex MAC peuvent perturber l’érythropoïèse par invasion de la moelle osseuse. Cette bactérie supprimerait les progéniteurs par une production d’interféron inhibiteur. Enfin, les traitements utilisés contre le VIH et ses complications provoquent aussi une diminution du taux des globules rouges. Cependant, les traitements des complications 46 infectieuses apparaissent myelosuppressifs et peuvent provoquer une anémie. Les toxicités de ces médicaments seraient atténuées si le patient reçoit de l’AZT. 15 à 20% des patients HIV+ sont infectés par le virus de l’hépatite C. Aussi le traitement par la ribavirine et l’interféron provoque une anémie. Le traitement d’une anémie : Il est variable et se fait au cas par cas. L’ajustement des doses et le choix des antirétroviraux sont la première mesure pour retarder les effets destructeurs immunologiques. Secondairement, des transfusions peuvent résoudre des anémies par manque d’EPO induit par l’AZT. (14)(119) 2.6.1.2.2.2 La thrombopénie D’autre part, il faut aussi compter sur un phénomène médullaire qui au cours de la maladie se développe sous forme d’hypoplasie et de fibrose associée. Tout cela explique alors une hypocellularité centrale. Un laboratoire a démontré le rôle direct entre l’infection des mégacaryocytes et la thrombopénie par l’expression d’antigènes viraux à la surface membranaire de ces derniers. (29) 2.6.1.2.2.3 Leucopénie Lorsque la numération est inférieur à 4.10³ éléments /mm³, on parle de leucopénie. Elle est très fréquente chez les personnes séropositives. La formule leucocytaire permet de mettre en évidence tous les types cellulaires de cette famille et de nous renseigner sur le niveau d’immunodéficience. Elle regroupe une neutropénie et une lymphopénie. 2.6.1.2.2.3.1 Lymphopénie Les lymphocytes sont des cibles cellulaires de l’infection VIH. La déplétion de ces cellules est d’origine multifactorielle. Il en résulte un déficit immunitaire et apparaît comme un élément prédictif de l’évolution de la maladie. En effet, cela met en jeu la cytotoxicité des 47 anticorps avec les phénomènes auto-immuns, la mort cellulaire programmée, la production des cytokines, l’infection des progéniteurs lymphocytaires, les cofacteurs infectieux (viraux EBV,CMV, HHV6 ;VHB, VHC et bactériens tel que le Mycobactérium). La lymphopénie apparaît lorsque le nombre de lymphocytes est inférieur à 1500 éléments par mm3. Les différents types de cellules sont alors touchées : les cellules T et B. La lymphopénie à CD4 résulte d’une perte progressive de 50 à 70 éléments/mm³/an. La demi-vie des lymphocytes CD4 infectés a pu être évaluée in vivo à 1 à 2 jours. Les anomalies immunitaires ne sont pas seulement restreintes à la déplétion des CD4 mais aussi à un déficit fonctionnel. Une réponse de type TH1, normalement prédominante, semble être remplacée par une réponse de type TH2, avec la production IL10 à l’origine d’effets néfastes sur les lymphocytes T. Le décompte cellulaire CD4+ mesuré en laboratoire est l’examen central de la surveillance biologique de la maladie. Une diminution en-deçà de 500 cellules par mm³ présage l’apparition du SIDA clinique et en-deçà de 200 le risque d’apparition de maladies opportunistes. Le degré d’immunodéficience des individus est en fonction de la numération des CD4 (une personne normale a un décompte de 800-1000 cellules CD4 par mm³). On considère généralement l’utilisation d’antiviraux quand les lymphocytes CD4+ sont inférieurs à 350. Au cours d’une thérapie antivirale, les CD4 remontent progressivement. Celle ci peut être lente voire sur plusieurs années. La lymphopénie à CD8 est comprise entre 100 et 300 éléments/mm3 soit 20 à 40% des lymphocytes. La diminution des CD4 et l’augmentation des CD8 surviennent dès la séroconversion VIH. Ce qui compte dans une analyse sanguine c’est le changement de valeur du rapport CD4/CD8 (<1) significatif de la primo-infection. Ce rapport normalement doit être compris entre 1 et 2, reflétant l’équilibre entre ces deux populations cellulaires. Pendant la phase asymptomatique, le nombre de CD8 augmente et persiste pendant plusieurs mois. En phase terminale, le nombre de lymphocytes chute. Le déficit des cellules T contraste avec l’activation polyclonale des cellules B. L’atteinte des cellules B semble précoce et se traduit par une activation excessive de la lignée. Par conséquence, l’hyperimmunoglobulinémie polyclonale IgG, IgM, IgA et IgE ressemble à 48 la physiopathologie des maladies auto-immunes. Parallèlement, la réponse immunitaire est altérée avec un déficit de production d’anticorps spécifiques. La présence d’anticorps et de complexes immuns circulants est fréquente. Chez un séropositif, les stimulations antigéniques permanentes conduisent à la formation de ces complexes immuns : il s’agit de fragments IgM et des fractions de compléments avec une molécule virale. Des plages d’hémolyse se forment alors spontanément. Cette hyperactivation serait induite par le VIH lui même. (15) 2.6.1.2.2.3.2 La neutropénie Elle se caractérise par une diminution des polynucléaires neutrophiles en dessous de 1500 cellules/mm³. Ces derniers apparaissent comme étant aussi des cibles pour le virus et disparaissent au fur et à mesure de l’évolution de la maladie. Ces agents cellulaires occupent la première ligne de défense et détruisent les cellules du non soi ou des cellules du soi altérées. Ils phagocytent les corps étrangers et les dégradent en utilisant des enzymes puissants. Les polynucléaires agissent donc contre le risque infectieux, aussi est-il indispensable de les décompter lors d’un examen biologique. Les polynucléaires sont produits dans la moelle osseuse au rythme de 80 millions par minute et ont une durée de vie courte. Ces leucocytes regroupent trois types de cellules : neutrophiles, éosinophiles et basophiles. La quantification des PNN est en relation étroite avec l’apparition des signes cliniques. Un taux <500/ml prédispose à l’apparition des maladies bactériennes. (75) 2.6.1.2.2.3.3 Autres cytopénies Le syndrome mononucléosique est la conséquence des infections virales (CMV, virus de l’hépatite,…) mais caractérise aussi la primo-invasion par le VIH. On le retrouve souvent associé à une leucopénie et une thrombopénie. On observe un ensemble de lymphocytes hyperbasophiles ressemblant à ceux de la mononucléose infectieuse. 49 2.6.2 Troubles Immunitaires 2.6.2.1 Anomalie thymique La plupart des dommages immunitaires provoqués par le VIH résultent certainement de la réplication virale et de ses conséquences dans les organes lymphoïdes. Au cours du sida, le thymus est atrophique avec une déplétion lymphocytaire profonde et une perte de l’architecture épithéliale. Cette dysplasie thymique est à l’origine d’une hypoplasie cellulaire. Rappelons que les cellules T immatures nées de la moelle osseuse n’ont alors pas exprimé leurs récepteurs membranaires TCR. On les appelle des thymocytes quand ils résident dans le thymus. Dans la médullaire, ils vont être en contact avec différents types de cellules thymiques qui vont les sélectionner selon des critères immunologiques. C’est la première sélection dite positive. Les thymocytes qui reconnaissent les molécules du soi du système HLA survivent. Au même moment, il y a une spécialisation entre les cellules helpers et cytotoxiques. Celles qui reconnaissent le HLA de type I deviennent des CD8 et perdent leur génotype CD4 et inversement celles qui reconnaissent la classe II du HLA seront exclusivement des CD4. Ensuite les thymocytes parcourent plus profondément le thymus et subissent la sélection dite négatives où les récepteurs membranaires TCR qui réagissent aux molécules HLA portant un peptide du soi sont éliminés. Les survivantes seront alors libérées dans la circulation. Les changements observés dans le thymus d’une personne infectée sont partiellement dépendants du stade de la maladie et de l’âge de la personne. Très tôt, même les cellules périvasculaires des thymocytes de la région du cortex sont touchées. C’est l’endroit où se font la différenciation et la prolifération des cellules T. L’infection des précurseurs des cellules T porteurs de la molécule CD4 explique l’absence de repopulation à partir des précurseurs T. Pourtant, il a été démontré que ces lésions du thymus sont réversibles et que cet organe se régénère quand le HIV est supprimé par une trithérapie active (HAART : Highly Active Anti-retroviral Therapy ). En fait, on observe une remontée des cellules T naïves qui migrent vers le thymus pour donner un pool de cellules actives. Il reste cependant des doutes sur le mécanisme de cette reconstitution immunitaire et sur les effets à long terme si on change les traitements au fur et à mesure des années. De plus, des observations récentes montrent que le 50 pic de nouvelles cellules T décline avec l’âge : les scientifiques se questionnent sur la pérennité de cette reconstitution immunitaire dans le temps. (10) 2.6.2.2 Anomalie splénique La rate possède 4 fonctions principales : rôle immunologique, de réservoir et d’organe hématopoïétique et de filtration du sang, principale fonction. Malgré cette dernière, de nombreux globules rouges anormaux aussi bien que du matériel antigénique continuer de circuler. La progression de la maladie entraine un épuisement des fonctions spléniques jusqu’à provoquer dans les stades avancés de la maladie des lésions bénignes voire malignes. Pour certaines indications, la splénectomie s’avère nécessaire. Elle entraine donc une réduction de la phagocytose et la prolifération de micro-organismes avec la possibilité de développer par la suite des infections de post-splénectomie (OPSI). Aussi, l’administration d’une vaccination appropriée est recommandée par le Center for Desease Control and Prevention (CDC). 2.6.2.3 Adénite chronique Au début de l’infection, un des symptômes communément admis est la lymphadénopathie généralisée. Dans ces conditions, les ganglions sont remplis de lymphocytes T CD4 ou CD8 représentés dans les mêmes proportions que leur taux plasmatique. Dans une infection HIV non traitée, les ganglions présentent une inflammation avec un haut degré d’expression de cytokines telles que l’interféron γ, l’IL-1, l’IL-2 et l’IL12. On observe aussi un nombre important de molécules d’adhésion intercellulaire et celles des cellules vasculaires. Ce statut inflammatoire et d’adhérence résulte de la séquestration des lymphocytes circulants dans ces sites. Plus la maladie progresse, plus l’architecture lymphoïde est altérée. Certains experts parlent d’une adénite chronique active en se rapprochant du modèle de l’hépatite virale chronique. En effet, cette infection persistante dans les hépatocytes entraîne une destruction progressive des structures cellulaires et fonctionnelles du foie. Cette destruction n’est pas le fait même de la réplication virale elle-même mais de celui de la réponse immune antivirale, accompagnée de son cortège inflammatoire et de fibrose. Par analogie, ces experts s’interrogent sur un déficit immunitaire lié au SIDA comme conséquence d’une adénite rétrovirale chronique active. Elle serait secondaire à une réponse 51 excessive dirigée contre le virus qui se réplique dans les ganglions. S’en suit une destruction de l’anatomie des organes et leur dysfonction. L’insuffisance ganglionnaire décompense et devient inactif entraînant des troubles tels que l’immunodéficience. Les adénopathies sont ainsi classées d’origine infectieuse (en rapport avec une maladie opportunistes), malignes (en cas de sarcome de Kaposi ou lymphome) ou réactionnelles dites dys immunitaires. (102) 2.6.2.4 Les infections opportunistes L’infection par le virus de l’immunodéficience humaine est par l’intermédiaire du déficit immunitaire qu’elle induit, à l’origine de complications infectieuses opportunistes variées et de cancers. Le profil de la maladie s’est considérablement modifié depuis la mise à disposition de traitements anti-rétroviraux plus actifs. La phase asymptomatique s’est allongée. Sourde pendant de nombreuses années, l’infection du VIH se complique par des manifestations secondaires en fonction du degré d’immunodépression. Ce sont les infections opportunistes dues à des agents infectieux habituellement peu pathogènes chez les personnes immunocompétentes. Les microorganismes (virus, bactéries, agents fongiques, parasites) sont persistants et font intervenir l’immunité cellulaire dans l’organisation de défense de l’organisme. Elles peuvent toucher différents organes tels que les poumons, le système nerveux, le tube digestif ou l’œil. Certaines restent localisées tandis que d’autres évoluent vers une forme disséminée comme les mycobactérioses. Le profil des complications opportunistes s’est modifié au cours du temps sous l’influence de traitements et de prophylaxies. Leur apparition reste liée à la progression du déficit immunitaire. Lorsque celui-ci est modéré, avec des CD4 entre 200 et 350/mm³, les complications sont dites mineures telles que le zona ou la candidose buccale. Si les CD4 sont inférieurs à 200/mm³, surviennent des infections plus graves avec des lymphomes mettant en jeu le pronostic vital. 52 POINTS DE REPERES La dynamique de l’infection : - Les cellules cibles: deux catégories de cellules exprimant la molécule CD4. - Les lymphocytes CD4+, dits helpers, ayant pour fonction de coordonner l’ensemble des réactions immunes humorales et cellulaires. - les CPA : monocytes et macrophages, cellules de Langerhans, cellules folliculaires dendritiques ganglionnaires, cellules microgliales du système nerveux central. - l’infection chronique et persistante après une période intense de production virale (primoinfection), il persiste une réplication continue de VIH, dont l’intensité est inversement proportionnelle à celle de la réaction immune (en quantité et en qualité). - L’infection à VIH se caractérise par un état d’équilibre entre le nombre de particules virales générées et détruites, entre le nombre de lymphocytes CD4 détruits et remplacés. L’évolution de l’infection s’accompagne d’une altération progressive des fonctions immunes, en qualité et en quantité, le taux de lymphocytes CD4 décroit jusqu’à rupture de cet équilibre précaire CD4 = 200/mm³ où la survenue des manifestations opportunistes signifie le passage au stade SIDA. Les anomalies biologiques en rapport avec le VIH Au stade de l’infection chronique, on retrouve principalement des thrombopénies (plaquettes <50 000/ml) avérées plus ou moins importantes. Une anémie (<10g/ml) doit être recherchée systématiquement lors d’une co-infection avec le VHC du fait de la toxicité du traitement interféron + ribavirine Au stade tardif, il faut rechercher des anomalies hématologiques telles que l’anémie et la thrombopénie, les effets myelosuppresseurs, les leucopénies (lymphopénie et neutropénie). La lymphopénie, une diminution des lymphocytes <350/mm³ prévisage l’apparition du SIDA clinique et < 200/mm³ l’apparition des infections opportunistes. Il n’y a pas de risque infectieux bactérien majoré tant que les lymphocytes T CD4>350/mm³ 53 3 LE DIAGNOSTIC 3.1 Chez l’adulte 3.1.1 Le test de dépistage 3.1.1.1 Conseil avant le test Une bonne information est nécessaire tant avant le prélèvement sanguin pour pratiquer un test de dépistage que lorsque le test revient positif. Il faut accompagner les patients à surmonter l’angoisse de l’attente des résultats des tests ainsi que les conséquences sociales et psychologiques de la séropositivité. Il ne s’agit pas d’un test permettant de faire un diagnostic de sida. En effet, les anticorps anti-HIV n’apparaissent pas le lendemain de la contamination, donc il est impossible de trouver immédiatement les immunoglobulines. Les anticorps apparaissent dans le sang un à deux mois après l’exposition. Cet intervalle de temps entre l’infection et le développement des anticorps est appelé la fenêtre sérologique. En général, les cliniciens recommandent un délai de trois mois avant de faire le test pour être sûrs qu’un test est réellement négatif. Cependant une exposition accidentelle ne doit pas attendre et faire l’objet immédiat d’un test. Le test indique simplement une exposition préalable au virus du SIDA. Il ne donne aucun pronostic, aucun degré de sévérité. (47) 3.1.1.2 - Mesures légales Le test de dépistage n’est pas obligatoire mais l’incitation au test volontaire doit être renforcée. Seul est rendu obligatoire le dépistage de l’infection VIH pour les dons d’organe, les dons du sang et les dons de spermes. (circulaire du 20 janvier 1998). - Le test doit être proposé systématiquement (mais n’est pas obligatoire) en consultations prénuptiales et prénatales. 54 - Le test ne peut pas être demandé à la visite médicale d’embauche (Loi du 12 juillet 1990, Circulaire n° 90-602). - Seul le sida avéré est soumis à la déclaration obligatoire non nominative (Contrôle et protection par la Commission Nationale Informatique et Liberté, CNIL). - Un test positif ne doit pas limiter la titularisation dans la fonction publique. - Les assurances sont autorisées à questionner les demandeurs sur la soumission à un test VIH et ses résultats (Convention du 3 septembre 1991). Tout dépistage pratiqué à l’insu du patient ou sans remise de résultat est proscrit. Depuis fin 1992, tout assuré social auquel un médecin aura prescrit un test de dépistage des anticorps VIH est remboursé à 100%. Toute personne, même non assurée, peut bénéficier de deux consultations médicales et d’un test gratuit en s’adressant à l’une des structures suivantes : - Les centres de dépistage anonymes et gratuits (CDAG) - Les dispensaires antivénériens. - Les consultations de protection maternelle et infantile (PMI). - Les centres de planification et d’éducation familiale (CPEF). - Le réseau médecin de ville-hôpitaux. 3.1.1.3 Les différentes techniques 3.1.1.3.1 Le diagnostic du trou sérologique Le diagnostic sérologique détecte la présence des anticorps dirigés contre les protéines constitutives des virus et repose sur un test ELISA confirmé par le Western Blot (WB). 3.1.1.3.1.1 Le test ELISA Le principe de base ELISA signifie Enzym Linked ImmunoSorbent Assay. Il s’agit donc d’un test de dépistage basé sur la mise en évidence des anticorps ou des antigènes circulants. 55 La détection des antigènes viraux, constitués de protéines virales purifiées, se fait par fixation au fond des puits d’une plaque en matière plastique. Ces antigènes sont issus soit de protéines de recombinaison génétique soit de peptides synthétiques. Les prélèvements à tester sont déposés dans les puits. Les anticorps anti-VIH éventuellement présents, se fixent par reconnaissance des antigènes viraux correspondants. Après plusieurs lavages pour éliminer tout ce qui n’est pas fixé, est rajouté un anticorps anti-immunoglobuline marqué par une enzyme spécifique de l’anticorps anti-VIH. Les complexes antigène-anticorps formés sont révélés par l’ajout de substrat de l’enzyme (chromogène). Sa fixation provoque une réaction colorée traduite par densitométrie, lu par un spectromètre. 3.1.1.3.1.1.1 Les avantages de cette technique C’est une méthode rapide (trois heures en moyenne) car semi automatisable. Elle est utilisable pour des dépistages de masse (donneurs de sang). Sa sensibilité est très grande et sa spécificité est bonne. C’est donc un test de première intention. 3.1.1.3.1.1.2 Les tests ELISA de troisième génération Leurs particularités réside dans le conjugué qui n’est plus une immunoglobuline antiIgG comme dans le test de deuxième génération habituellement utilisés. On utilise des antigènes recombinants marqués par une enzyme, détectant les anticorps plus précocement. Aussi, une séroconversion typique peut être décrite le premier jour après le pic d’antigénémie, détectée par les tests de 3ème génération, 3 jours après apparaissent les bandes du Western Blot, et deux jours plus tard la positivité est révélée par le ELISA de deuxième génération. Il faut savoir que l’antigénémie disparaît après neuf jours. Ces tests auraient un intérêt dans les tests de confirmation et chez des patients à risque réel de séroconversion. (49) 3.1.1.3.2 Le Western Blot 3.1.1.3.2.1.1 Test de confirmation Ce test est basé sur la technique d’immuno-empreinte. Historiquement, la technique a été inventée par E.M Southern par le transfert par capillarité de l’ADN sur nitrocellulose. 56 Ensuite, elle a été appliquée aux molécules d’ARN (d’où Northern Blot et aux protéines (Western Blot). 3.1.1.3.2.1.2 La technique L’immuno-empreinte utilise des antigènes du VIH purifiés et séparés par électrophorèse. Elle permet de déterminer si les anticorps détectés par ELISA sont spécifiques des antigènes du VIH ou s’il s’agit de réaction croisée avec d’autres composants, non viraux, du système ELISA. Une bandelette référente, existe pour comparer avec les antigènes connus tels des protéines (« p ») ou des glycoprotéines (« gp ») du VIH dont le poids moléculaire variable est exprimé en kilodaltons (kDa). Chaque bande définissant par un sigle correspond à une glycoprotéine. Le Western Blot 2 est identique et utilise comme antigènes des particules virales de VIH-2 (Gp140, gp105, gp36, p26). 3.1.1.3.2.1.3 Les Résultats On considère que le test est positif (que ce soit VIH-1 ou VIH-2) uniquement sur la présence d’anticorps dirigés contre les protéines de l’enveloppe (gp41, gp120, gp60) associés au moins à un anticorps dirigé contre la protéine interne du virus :gag (p55,p25,p18) ou pol. La positivité est probable si la présence d’anticorps anti gp160 et p25 ou contre les deux glycoprotéines d’enveloppe gp160 et gp120. Seront à recontrôler les profils gp160 seule, p24 seule ou p36. 3.1.1.3.3 La chronologie des tests Il est nécessaire d’effectuer deux tests pour rendre un résultat : - Si les tests ELISA sont négatifs, le Western Blot n’est pas pratiqué. Seulement s’il subsiste un doute sur un contact contaminant, une recherche d’anticorps pratiqué après le 3ème mois. Si le doute persiste, on effectuera une recherche d’antigène par la technique ELISA. 57 - Si le test ELISA est positif et le Western Blot négatif, on considère qu’il n’y a pas d’infection chez un patient mais son sang ne pourra pas être utilisé en transfusion. - Si le résultat de Western Blot est douteux, on répètera le test à quelques mois d’intervalle. - S’il y a confirmation par le Western Blot, le malade est considéré comme infecté. 3.1.2 Le diagnostic précoce 3.1.2.1 Les intérêts Des données scientifiques récentes laissent penser qu’une prise en charge précoce est bénéfique pour la personne infectée. Des arguments virologiques expliquent l’efficacité du traitement de la primo-infection. En effet, la population virale semble homogène, il y a moins de probabilité de rencontrer des souches résistantes. Une prise en charge rapide va améliorer le pronostic d’évolution de l’infection. Actuellement, le test de dépistage « classique » repose sur la réalisation de deux tests ELISA différents. Comme explicité au paragraphe 3.1.1.3.1.1.1, ce test implique l’apparition des anticorps anti-VIH, et donc, une attente d’au minimum 3-4 semaines. Ce délai est trop long si on se place dans l’optique du traitement précoce. A ce jour, on mesure l’antigénémie p24 qui apparaît positive vers le 16e jour après la contamination et peut persister une dizaine de jours. Aussi apparait t-il comme un test de référence pour diagnostiquer la primo-infection. 3.1.2.2 Le moyen de dépistage précoce : l’antigénémie p24 Basée sur une technique d’immuno-capture, un anticorps p24 fixé sur une phase solide est mis en contact avec le sérum prélevé. Aussi la présence de l’antigène est mise en évidence par ELISA lorsqu’il y a fixation spécifique. Seulement la brièveté de la présence des taux 58 d’antigènes détectables en limite l’utilisation. La détection de l’antigène p24 totale (Ag p24 libre ou combiné à l’anticorps) permet une meilleure sensibilité du test. 3.2 Chez l’enfant. 3.2.1 Rappels Chez l’enfant né de mère séropositive, un diagnostic précoce s’impose. Les anticorps maternels sont susceptibles de persister jusqu’à l’âge de 15 mois. De nos jours, il existe des traitements efficaces qui réduisent le risque de transmettre le virus à l’enfant. Sans traitement, le risque est évalué à un sur sept, mais avec un traitement tardif on le réduit à un sur cent. 3.2.2 Les techniques utilisées Il existe deux techniques virologiques mises en place. Il s’agit de l’isolement du virus et les techniques d’amplification génétique. 3.2.2.1 L’isolation du virus L’isolation du virus à partir des lymphocytes infectés ou du plasma de l’enfant est une méthode de diagnostic de cultures cellulaires lourdes. Il s’effectue dans des laboratoires spécialisés dits sécurisés (laboratoire de sécurité de type II). En co-culture, les lymphocytes infectés de l’enfant sont mis en contact avec ceux d’un donneur séronégatif qui ont été préalablement stimulés. L’isolement viral passe par l’évaluation de la réplication virale. Cette dernière est définie soit par l’analyse de l’antigénémie p24 (cf.3.1.2.2) par la technique ELISA soit par détection de l’activité transcriptase inverse dans le surnageant soit par immunofluorescence des anticorps monoclonaux. L’isolement est fait au bout de 8 à 15 jours. 59 3.2.2.2 La technique de PCR sur L’ADN viral dans les lymphocytes périphériques C’est une technique de biologie moléculaire. IL faut donc isoler le virus, extraire l’ADN dans un système in vitro qui amplifie spécifiquement les séquences du VIH, grâce à une enzyme, la TAQ polymérase. 3.2.3 Les prélèvements Chez un enfant un premier prélèvement pendant la première semaine, à 1 mois, puis 2 semaines après le traitement préventif et à 3 mois. Pour considérer qu’un enfant est infecté, deux prélèvements consécutifs doivent être positifs, par PCR ou culture virale. Chez un nourrisson n’ayant pas reçu de traitement préventif, une positivité dès la naissance traduit une transmission in utero. 60 LES POINTS DE REPERE - Un diagnostic précoce pour que le patient bénéficie au plus vite de traitements efficaces : Jusqu’à maintenant, pour connaître sa situation par rapport au VIH, il est préconisé une recherche d’anticorps au minimum trois mois après sa dernière prise de risque : aujourd’hui, on sait qu’il y a intérêt à intervenir beaucoup plus tôt, dans les heures ou les jours qui suivent. C’est pourquoi, quel que soit le délai écoulé, il est important de savoir si l’on a été contaminé. Un diagnostic possible avant trois mois. - Avant même la séroconversion et le développement d’anticorps, un diagnostic peut être établi, dès le 15ème jour après la contamination, grâce à l’antigénémie p24. - Si le diagnostic d’une contamination est possible avant trois mois, il faut rappeler que la confirmation de l’absence de contamination n’est possible que trois mois après la prise en charge. LES RECOMMANDATIONS - Le diagnostic se fait en 2 étapes : 1- dépistage : effectué à l’aide de deux tests ELISA (3ème et 4ème génération). Un test est dit de 4ème génération lorsqu’il permet de détecter simultanément les anticorps anti-VIH et l’antigène p24. 2- la confirmation : la présence d’anticorps anti-VIH doit être impérativement confirmée sur un second prélèvement par un test de confirmation : le Western Blot. Sur un second prélèvement, 2 tests ELISA doivent être à nouveau réalisés. 61 4 LE TRAITEMENT DE L’INFECTION VIH 4.1 Rappels 4.1.1 Inventaire des possibilités thérapeutiques La sélection de médicaments anti-VIH est fondée sur les études de la structure et le cycle de réplication du VIH. Les étapes clés constituent des cibles potentielles pour d’éventuels antirétroviraux : - la fixation - la sortie de la coque protéique - la transcription inverse - la traduction - la modification des protéines - l’assemblage et le bourgeonnement 62 Figure 7 : schéma des cibles potentielles pour les antirétroviraux pour l’élaboration d’une thérapeutique anti-VIH, d’après G.Furelaud et B.Favie (http://www.snv.jussieu.fr/vie/dossiers/SIDA/4entree.htm) Inhibiteurs de récepteurs et co-récepteurs ARN antiprotéase Inhibiteur de la protéase Protéase Reverse Transcriptase ADN Intégrase Polymérase ADN Inhibiteurs de transcription 63 4.1.2 4.1.2.1 Les molécules médicamenteuses Les inhibiteurs de la transcriptase inverse - Les analogues nucléosidiques : NRTI AZT : ou zidovudine (ZDV) (AZT®, Retrovir®) Indications : sida avéré, sida avec lymphocytes CD4 <350 par mm³, chute rapide des CD4 < 500/mm³ et lymphocytes CD4<200/mm³. Interactions médicamenteuses : ganciclovir, pyriméthamine, paracétamol, AINS, benzodiazépine. Posologie : per os 200 à 300 mg 6 fois par jour. Les effets secondaires : pancytopénie, neutropénie, anémie, céphalée, nausée, asthénie, insomnie. La ddI : didéoxyinosine ou didanosine (Videx®). Indications : résistance ou intolérance à l’AZT. Les effets secondaires : pancréatite, xérostomie, crampes abdominales, hyperuricémie ; myocardiopathie, hépatite cytolitique. La ddC : didéoxycitidine ou zalcitabine (Hivid®). Indications : les mêmes que ddI. Les effets secondaires : stomatite et aphtes buccaux, éruptions, fièvres, pancréatite, arthrite et arthralgie. La 3TC : lamivudine (Epivir®). Indications : En cas d’intolérance aux antiviraux disponibles. Elle est employée seule ou en association avec l’AZT. Cette molécule semblerait active dans le traitement de l’hépatite B chronique. Les effets secondaires: troubles digestifs, toxicité hépatique, pancréatique et hématologique. La d4T : ou stavudine (Zérit®). 64 Elle présente les effets indésirables à type de neuropathies périphériques, hépatopathies, pancréatites, pancytopénies et troubles digestifs. Abacavir (Ziagen®) Il présente le risque de survenue d’un syndrome d’hypersensibilité, souvent grave et pouvant conduire à l’arrêt cardiaque en cas de réintroduction du médicament. - Les analogues non nucléosidiques : Ils agissent aussi sur la transcriptase inverse mais de façons différentes. Il s’agit de l’éfavirenz (Sustiva®), et la névirapine (Viramune®), la delavirdine (Rescriptor®). Effets secondaires communs : ils imposent un strict respect des doses. Ils induisent des rashs cutanés chez 10 % des patients. Des syndromes de Lyell ont été également décrits. Ils provoquent, encore plus fréquemment, des troubles neurologiques (vertiges, modifications de l'humeur) qui imposent l'arrêt des traitements. Ils ont également une toxicité hépatique, des cas d'hépatite fulminante ayant été décrits avec la névirapine. 4.1.2.2 Les inhibiteurs de protéase Ils présentent une haute potentialité antivirale et une toxicité faible. Ils apparaissent alors comme essentiels aux thérapeutiques d'association. - Le saquinavir (Invirase®) : C’est un analogue moléculaire de la protéase du VIH et agit donc comme un inhibiteur sélectif. - l’indinavir. (Crixivan®) présente des effets indésirables à type d’hyperbilirubinémie dose-dépendante (15% des patients) et des lithiases rénales. - Le ritonavir (Norvir®) entraîne fréquemment des troubles digestifs (nausée, diarrhée), des paresthésies péribuccales, une augmentation des transaminases et des triglycérides. - le nelfinavir (Viracept®) entraîne des diarrhées. 65 - l’amprénavir (Agénérase®) et le lopinavir-ritonavir (Kaletra®) semblent présenter moins d’effets secondaires. 4.1.2.3 Les inhibiteurs de la fusion virale En voie de développement (pentafuside, FP 21399). 4.1.2.4 Les associations Compte tenu d’une activité antirétrovirale relativement faible de la majorité des médicaments antirétroviraux et de la propension du VIH à développer des résistances par des mutations, le traitement optimal doit impliquer une association de médicaments. C’est la trithérapie : 2 analogues nucléosidiques et une anti-protéase. Par exemple AZT/ddI/ Indinavir ou AZT/ddC/ritonavir. 4.1.3 Les résultats sur l’efficacité des antirétroviraux L’efficacité des multithérapies dans la lutte contre le virus VIH n’est plus à démontrer. Leur capacité à baisser la charge virale dans le plasma sanguin jusqu’à des taux indétectables semblait indiquer qu’un traitement prolongé pouvait éradiquer l’infection. Une équipe américaine (2005) (info science actualités- 10 avril 2005) vient de découvrir que le VIH peut rester à l’état latent dans l’organisme pendant très longtemps. Selon leurs calculs, son élimination complète d’un réservoir de seulement cent mille cellules pourrait prendre soixante ans ! Cette découverte des américains est basée sur l’isolement de virus capables de se répliquer et donc susceptibles de relancer l’infection en cas d’arrêt du traitement antirétroviral. Le taux de décroissance de la charge virale latente est si bas (43 ans pour réduire la moitié des cent mille cellules de départ) qu’il imposerait alors une prise continue de médicaments pendant plusieurs années. Seulement il y a un risque de toxicité à long terme de ces molécules. Il faut donc envisager d’autres stratégies thérapeutiques… 66 4.1.4 Les perspectives thérapeutiques - Le développement des molécules anti-VIH. De nombreuses cibles au niveau de la réplication n’ont pas encore été exploitée pour la recherche de nouvelles molécules : l’intégrase, les gènes NEF et REV… - Immunothérapie : o L’immunothérapie passive est déjà avancée et des études concernant des perfusions d’anticorps monoclonaux ou des lymphocytes T cytotoxiques sont en cours. Des inhibiteurs de cytokines activatrices de la réplication virale sont également étudiés comme la thalidomine ou la pentoxifylling. o L’immunothérapie active se développe avec la compréhension des mécanismes physiologiques immunitaires et ses implications en présence du virus. Ainsi la diminution de la cytokine IL2 serait le premier signal immunitaire de progression vers le sida. Des études sont en cours concernant des injections régulières d’IL2 et leur efficacité sur la lymphocytose CD4. - Thérapie génique : Elle consiste à modifier les gènes de certaines cellules. Au stade expérimental, les projets ont pour base d’introduire dans l’organisme des cellules modifiées par l’action d’un nouveau gène ou de créer des lymphocytes CD4 et des macrophages rendus résistants au VIH. Un autre projet se base sur la production d’un facteur anti-viral par les cellules de l’hôte. - L’hydroxyurée, un médicament utilisé contre le cancer par voie orale peut être associée dans le traitement anti-VIH car elle augmente la concentration sanguine de certains médicaments contre le virus. 67 4.2 Protocole thérapeutique : d’après le rapport Delfraissy 2004 4.2.1 Quand débuter un traitement ? Ö Patients n’ayant jamais reçu de traitement anti-rétroviral : - La moitié des patients chez qui se posent l’indication de débuter un traitement antirétroviral est vu à un stade symptomatique avancé (CD4<200/mm³). La décision de débuter un traitement se fait de manière individualisée. En général, le facteur biologique CD4 < 350/mm³ est à l’origine de l’introduction d’un traitement médicamenteux chez les patients infectés. Tout en considérant la notion du bénéfice/risque, considérant l’évolution des paramètres biologiques, en particulier le taux de CD4 et la rapidité de sa chute, la charge virale et la sévérité des manifestations cliniques. Les risques encourus sont ceux d’un traitement à long terme avec des anomalies métaboliques (lipodystrophie). 1 Lymphocytes T CD4 < 200/mm³ (ou <15p.100) ou patients symptomatiques Le traitement est nécessaire dans tous les cas 2 Lymphocytes T CD4 entre 200 et 350/mm³ Le patient doit être préparé à la mise sous traitement dès que les CD4 sont < 350/mm³ 3 Lymphocytes T CD4 > 350/mm³ (≥ 20p.100) Non recommandé sauf si il y a une charge virale plasmatique > 100 000 copies/ml Tableau 3: La prise de décision d’instaurer un traitement antirétroviral en fonction du taux de lymphocytes CD4 d’après le rapport Delfraissy (2004). 68 En cas d’infection opportuniste associée au VIH nécessitant un traitement particulier il est recommandé de reporter à 2 ou 3 semaines l’instauration de la trithérapie. Le but du traitement est la suppression de la réplication du VIH dans tous les liquides et les tissus de l’organisme, la charge virale permettant de suivre l’évolution de la pathologie. Cependant, les options thérapeutiques existant à l’heure actuelle ne permettent pas d’inhiber complètement la prolifération virale, c’est pourquoi l’observance thérapeutique est un facteur principal dans la décision d’instaurer un traitement. Ainsi, il faut que le patient se sente vraiment prêt pour commencer les médicaments. 4.2.2 Quel traitement ? D’après le rapport 2004 Delfraissy, les options thérapeutiques à préférer sont l’association de deux inhibiteurs nucléosidiques de transcriptase inverse soit avec un inhibiteur non nucléosidique soit avec une anti-protéase potentialisée par une faible dose de ritonavir. Les associations d’antirétroviraux 2IN + 1NN ou 1IP / r + Zidovudine Fosemprénavir/r Ou Ténofovir Ou Didanosine + Lamivudine Efavirens ou Ou Emtricitabine Névirapine Ou Indinavir Ou Lopinavir/r Ou Ou Abacavir Saquinavir/r Tableau 4 : Les associations d’antirétroviraux dans la thérapeutique des patients séropositifs d’après le rapport Delfraissy (2004). 69 4.2.3 L’observance des patients L’efficacité des multithérapies sur le mieux-être des sujets infectés par le VIH dépend essentiellement du suivi rigoureux du traitement prescrit. En effet, pour être efficace, un médicament anti-VIH doit être en permanence en quantité suffisante dans le sang : pour cela, la posologie quotidienne doit être respectée. Il en est de même pour les conditions d’administration : certains médicaments ne diffusent dans l’organisme que s’ils sont pris à jeun, d’autres nécessitent la prise concomitante de nourriture. Si les conditions ne sont pas remplies, il n’y a pas assez de molécules dans le sang pour contrôler l’activité du VIH : la charge virale risque d’exploser. Un traitement doit donc s’adapter au mode de vie du patient. 4.2.4 Le traitement pendant et après la grossesse. D’après le rapport Delfraissy, il est recommandé d’instaurer une multithérapie composée de deux inhibiteurs nucléosidiques (AZT si pas de contre indication et 3TC) et d’une anti-protéase (le saquinavir potentialisé par du ritonavir). Ce traitement est efficace pour la prévention de la transmission mère-enfant s’il est effectif pendant le dernier trimestre et que la charge virale soit indétectable à l’accouchement. Une étude à Rome (G. M. Pacifici 2005) été faite sur le taux de transmission des antirétroviraux via le placenta. Les résultats ont montré que les inhibiteurs nucléosidiques traversent effectivement le placenta en produisant un effet pharmacologique grâce à des concentrations suffisantes dans le sang fœtal. Par contre, les inhibiteurs de protéase ne semblent pas passer la barrière maternelle. (85) 4.2.5 Les modifications thérapeutiques Sous traitement anti-rétroviral, une charge plasmatique inférieure à 500 copies/ml et une absence de déficit immunitaire notable, il n’est pas recommandé de changer ou de renforcer le traitement en cours. (Rapport Delfraissy 2004) Il est déconseillé de tenter d’alléger une trithérapie efficace (que ce soit en supprimant un IP ou une IN). En effet, deux essais cliniques ont montré que même si on parvint à rendre 70 la charge virale inférieure à 500 (et même 50/ml) par un traitement initial associant deux IN et une IP, l’allègement secondaire (après 3 mois ou après 6mois) se traduit par des rechutes virologiques plus fréquentes. La prévention de l’échec thérapeutique doit être une préoccupation constante. D’après les statistiques de la base française de données hospitalières (FHDH, 2004) 35% des patients traités présentent à 6 mois une charge virale supérieure à 500 copies/ml. → Circonstances faisant envisager un changement thérapeutique : - Toxicité ou intolérance : il convient d’analyser attentivement la nature des troubles et le ou les médicaments en cause. - Réponse virologique non maintenue. C’est le retour à une charge détectable progressivement. Il est possible de temporiser si les CD4 sont stables, tant que l’ARN VIH n’atteint par au moins 5000 à 10000 copies afin d’éviter l’usure prématurée d’un trop grand nombre de médicaments. Néanmoins, ces situations correspondent à l’installation de résistances et on doit tenter le changement thérapeutique tant que la charge virale est faible. - L’évolution du nombre de lymphocytes CD4. Le plus souvent l’évolution du nombre des lymphocytes CD4 s’effectue en miroir avec celle de la charge virale, avec un décalage dans le temps. Dans les 6 premiers mois de traitement, des infections opportunistes peuvent survenir au–dessus du seuil habituel de lymphocytes CD4 permettant leur apparition. → Conduite à tenir : - En cas de toxicité, il faut changer le médicament incriminé. Sinon, il est préférable d’arrêter en bloc la totalité du traitement, afin de permettre à l’effet toxique de s’apaiser. Ensuite, on réintroduira selon les cas, soit le même traitement soit un différent. Mais il ne faut jamais diminuer les doses. 71 - Personnes sous bithérapie nucléosidique ayant une charge virale mal contrôlée. Il est recommandé de proposer une trithérapie avec au moins si possible un ou deux IN et un IP. - Personne en échec de trithérapie. o Si le traitement associe deux IN et un INN, il convient de changer les deux IN et de substituer un IP à l’INN. Le changement d’INN n’est pas recommandé car la fréquence des résistances croisées est très élevée. o Si le traitement comportait déjà un IP, il n’existe pas de solution satisfaisante en raison de résistances croisées entre les IP. Une étude a montré que le deuxième traitement avec une antiprotéase est moins efficace que ce qu’on observe habituellement en première intention. L’association saquinavir–ritonavir peut être efficace en seconde intention au moins à moyen terme. Les autres associations d’antiprotéases sont encore peu évaluées. Dans les situations difficiles, il est nécessaire de revoir en détail tous les traitements reçus antérieurement, car l’échec virologique semble très souvent lié à une mauvaise observance et l’abandon précoce du médicament. Certains patients peuvent encore y demeurer sensibles. Il est recommandé : - De réaliser un test génotypique de résistance en cas d’échec thérapeutique et en cas de primo-infection. - De réaliser des tests de résistance en cas échec virologique alors que le patient est sous traitement antirétroviral. - De ne pas prescrire de test phénotypique de résistance car ils n’ont pas fait leur preuve clinique. 72 4.2.6 Les pauses thérapeutiques Des études portent actuellement sur ce qui peut se passer, si pendant un temps déterminé, on interrompt totalement un traitement combiné. Peut-on envisager dans certaines conditions des pauses thérapeutiques sans pour autant que le système immunitaire continue à perdre ses défenses immunitaires contre le VIH ? En cas de pause dite structurée, contrôlée et définie, on peut observer dans des études que le problème réside dans les durées de demi-vie différentes des médicaments et qu’ils sont éliminés à des vitesses variables. Il en résulte des substances qui persistent dans l’organisme pouvant inhiber la prolifération virale, alors que d’autres se présentent à des concentrations inefficaces. L’arrêt des médicaments favoriserait la diffusion de variantes résistantes du VIH. Si un patient suit assidûment son traitement depuis son instauration, l’interruption répétée de ce dernier provoque une sollicitation limitée dans le temps mais répétée du système immunitaire en entraînant une forte réaction immunitaire contre le VIH. (74) Une étude californienne récente menée par LAWRENCE (2003) montre même que les arrêts programmés pourraient être néfastes pour certains malades. 22 des 139 patients qui avaient suspendus leurs traitements sont décédés ou montraient des signes de progression de la maladie. 4.2.7 Les effets secondaires du traitement Comme tous les médicaments, la thérapie anti-VIH peut causer des effets secondaires, ce qui peut rendre difficile le suivi du traitement. Ces effets secondaires, s’ils apparaissent, sont plus souvent observés en début de traitement. Ils varient selon les médicaments. La fatigue se fait ressentir par des insomnies, des douleurs chroniques, anémie, et souvent une dépression. Dans la plupart des cas, ces symptômes diminuent progressivement après deux ou trois semaines. 73 Des neuropathies périphériques, des nécroses vasculaires, fièvre, nausée, diarrhées et douleurs abdominales et vomissement sont fréquents. Sans compter les pancytopénies. Des anomalies concernant le sucre et les graisses dans le sang (cholestérol, triglycérides) ou la répartition des graisses dans le corps (lipodystrophie) peuvent survenir au cours du traitement antirétroviral. C’est pourquoi des examens biologiques sont pratiqués régulièrement en cours de traitement pour surveiller les éventuelles conséquences des médicaments sur certains organes ou liquides corporels. Les répercussions dans la sphère oro-faciale sont fréquentes : - xérostomie et ses conséquences : caries, parodontopathies, infections bactériennes et fongiques 4.2.8 - aphtes géants et ulcérations buccales - stomatites Les vaccinations Les vaccins recommandés sont : - tétanos (rappel tous les 10 ans) - poliomyélite (rappel tous les 10 ans) - hépatite A et B - grippe - pneumocoque Dans la mesure du possible, il est préférable d’éviter toute vaccination quand le taux de CD4 est inférieur à 200/mm³ et/ou quand la charge virale est élevée. Toute stimulation immunitaire pouvant entrainer une augmentation transitoire de la charge virale plasmatique. 74 4.3 Les co-infections VIH : Hépatite A, B, C Les hépatites virales : Dans la première décennie de l’épidémie HIV, le décès survenu par maladie du foie restait rare. Pourtant, depuis l’introduction de la thérapie active HAART, les virus HBV et HCV sont devenus des causes signifiantes de morbité et de mortalité chez les personnes infectées par le VIH. On estime à 30% les porteurs du VHC chez les séropositifs au VIH. Ces chiffres varient beaucoup d’une étude à l’autre et selon les populations : de 4 à 8% chez les homosexuels et les bisexuels, de 70 à 90 % chez les usagers de drogues injectables. Les progrès enregistrés dans le traitement antirétroviral du VIH et l’allongement de l’espérance de vie des séropositifs au VIH rendent encore plus visibles les effets des hépatites. Les hépatites ont une primo-infection, qui peut être symptomatique et se définissent comme hépatite aigüe (A, B, C). Contrairement au VIH, pour les hépatites virales, les primo-infections peuvent être curatives et ne pas devenir chroniques. Si le virus est toujours présent et se réplique pendant 6 mois après la contamination, on entre dans la phase de portage chronique. 4.3.1 La co-infection avec l’hépatite B Rappels sur l’histoire naturelle de l’hépatite B : L’hépatite B est une infection du foie. La plupart des personnes infectées ne présentent aucun symptôme au début. Les signes apparaissent généralement de deux à six mois après la contamination. Elle se transmet par le sperme, la salive, et est fréquemment retrouvée chez les homosexuels et les professionnels de santé. 10% des séropositifs sont porteurs de l’antigène HBs, 70% ont des anticorps. De plus, le virus delta (VHD) ne se réplique qu’en présence du virus de l’hépatite B, la co-infection VIH-VHB-VHD se rencontre essentiellement chez les usagers de drogues par voie intraveineuse (3% environ). Le pronostic est alors sévère. 75 Les rapports entre les infections HIV et HBV : → Les interactions du virus HIV sur l’infection hépatite B : - La survenue de l’infection hépatite B dépend de la réponse immunitaire de l’hôte face au HBV, et l’immunodéficience secondaire au HIV est associée à un taux élevé de chronicité HBV. - Les pathologies du foie létales sont plus fréquentes depuis la mise en place de la thérapie HAART (Highly active antiretroviral therapy). Cette dernière utilise un cocktail de médicaments sous forme de multithérapie. - La mortalité par pathologie du foie augmente donc mais reste un fait à rapporter avec une diminution de mortalité d’autres causes. → Les interactions du virus de l’hépatite B sur le VIH : - L’effet du VHB sur le pronostic du HIV est moins clair, bien que la plupart des études montrent qu’aucune aggravation de l ‘infection HIV ne se produit en présence du virus HBV. L’hépatite B peut pourtant apporter d’autres complications telles que l’augmentation de l’hépatotoxicité avec la HAART. - La co-infection avec le VHB représente un risque non négligeable d’évolution péjorative quand elle n’a pas guéri spontanément avant l’infection à VIH et l’immuno-dépression qui en résulte. (39) Le virus HBV a besoin pour sa réplication dans les cellules de foie, d’une enzyme analogue à celle du VIH, la reverse transcriptase d’où l’activité des molécules appartenant à la famille des inhibiteurs nucléosidiques (traitement du VIH) telles que la lamivudine. Si bien qu’un traitement contre l’hépatite B avec une infection VIH stable (sans institution médicamenteuse) peut entraîner des résistances aux virus VIH. Il existe un vaccin contre l’hépatite B, toutes les personnes ayant potentiellement des pratiques à risque et non immunisées doivent être vaccinées. 76 Les symptômes : - douleurs musculaires et tendineuses - douleur dans l’abdomen - coloration jaunâtre des yeux et de la peau (ictère). Dans la pathologie chronique : - cirrhose : - veines variqueuses (œsophage) Transmission : sang, salive, urine, sécrétions vaginales. Le dépistage : On recherche les marqueurs sérologiques de l’infection hépatite B, définissant le statut d’infection chez le patient. Aussi, la technique d’immunomarquage des antigènes HBs a évoluée et présente une sensibilité de 89 à 99 % et une spécificité de 97 à 100%. Cependant, l’émergence de souches mutantes remet en cause son résultat technique et lui demande de s’adapter. Aujourd’hui, la quantification d’ADN HBV (par PCR , par le Cobas Taqman 48 hbvRoche système) permet d’augmenter la sensibilité des tests. Il indique la présence et l’activité de l’ADN polymérase. Pourtant subsistent quelques failles qui empêchent l’uniformalisation des protocoles et donc la standardisation des résultats. (L’unité reste en UI/ml alors que les recommandations sont faites en copies/ml). (45) Le traitement : L’hépatite B stable ne demande pas de thérapie médicamenteuse avec un taux de charge virale HIV bas et de CD4 élevé. La priorité est de surveiller l’évolution vers la fibrose hépatique. 77 Mais : - un taux d’ADN HBV supérieur à 105 virions / ml. - un taux de réplication virale bas avec un risque élevé de fibrose et de carcinome hépatocellulaire. - un taux VIH élevé et une immunodépression accrue → Nécessite un traitement contre l’hépatite B. Le traitement adapté doit être lié à celui de l’infection VIH : C’est par un traitement antirétroviral, la lamivudine (3TC) (300mg/j) que l’on maîtrise le virus. Il existe de fréquentes résistances à la lamivudine, on associe dès lors cette dernière soit à l’adefovir soit au ténofovir, ces deux traitements ayant une activité antirétrovirale devant être prise en compte. Même si chacune des infections a sa propre consultation, une communication entre hépatologue et spécialiste du VIH est indispensable, délivrer une médication inappropriée pour l’une ou l’autre pathologie s’avère être catastrophique. Les effets indésirables restent modérés, le plus souvent : fatigue, maux de tête, troubles digestifs (nausées, flatulences, diarrhée). Le risque de toxicité rénale est faible. 4.3.2 La co-infection avec l’hépatite C Rappels sur l’infection : Près d’un tiers des patients VIH sont également infectés par le virus de l’hépatite C. Cette co-infection n’est pas sans conséquence puisqu’elle est devenue la première cause de mortalité de cette population. Généralement, 50 à 80% des patients développeront une 78 hépatite C chronique avec une virémie HCV plus élevée et une évolution plus rapide en une fibrose. Les répercutions réciproques : L’impact du traitement du HCV sur le VIH se voit car l’interféron peut réduire la charge virale (0,5 log10). Aussi peut-on distinguer une diminution des CD4 peu marquée et un faible développement d’infections opportunistes. L’impact de la thérapie HAART peut provoquer un syndrome de reconstitution immunitaire associée à une hépatite ictérique symptomatique parfois. (65) Traitement : Pourquoi ? Il s’agit de ralentir l’évolution de la maladie si les CD4 sont inférieurs à 200/mm³, possiblement guérir la maladie si les CD4sont inférieurs à 200/mm³ et éviter une cirrhose. La guérison d’une hépatite C réduit les problèmes d’hépatotoxicité chez le VIH+. Conduite à tenir : → On traite le VIH d’abord s’il n’est pas stabilisé ou si les CD4 <350-500/mml car il y aura le risque de passer sous les 200 avec le traitement du HCV. → On traite le HCV d’abord quand les patients ne tolèrent pas le traitement VIH et que les fonctions du foie se dégradent ou si les CD4 >500. Le traitement de l’hépatite C repose désormais sur l’association de deux médicaments, l’interféron (PEG-interféron α) administré une fois par semaine par voie sous-cutanée et la ribarivine absorbée oralement (4 à 6 comprimés par jour). La durée de ce traitement varie de 6 mois à 1 an. Il est recommandé d’après le rapport Delfraissy de continuer jusqu’à 48 semaines. Le taux de succès chez ces patients uniquement infectés par le VHC atteint 50% en fonction du génotype du virus (plus de 80% pour le génotype 2 et 3). (53) 79 4.3.3 La co-infection avec l’hépatite A Les symptômes : Le diagnostic se fait sur une fatigue, de la fièvre, diarrhée, des douleurs, des urines noires, ictère. La période d’incubation est d’environ 28 jours. La transmission se fait par contact la nourriture, l’eau, le contact avec une plaie, un rapport sexuel, des matières fécales. Pour le diagnostic, on procèdera par un test sanguin pour dépister les anticorps Ig M anti HAV. Le traitement : Généralement, l’hépatite A régresse spontanément et n’est grave que dans un cas pour mille (hépatite fulminante). Il existe un vaccin qui est hautement efficace quand il est conjugué avec une immunoglobuline pour une protection maximale. Ce sont des anticorps donnés pendant les deux semaines après exposition. On recommande notamment un vaccin préventif pour les séropositifs. 4.4 Le traitement des infections opportunistes (IO) : On appelle « infection opportuniste » l’atteinte d’un organisme par un germe habituellement non pathogène chez le sujet sain ou la localisation exceptionnellement grave d’une infection. Les fluctuations du statut immunitaire modulent le spectre d’agents pathogènes. Aussi doit-on être vigilants quant aux complications infectieuses menaçant les malades. (61) 80 4.4.1 Les parasitoses • Pneumocytose : Signes : Syndrôme de détresse respiratoire aiguë : tachypnée, toux, cyanose et fièvre. Traitement : Triméthoprime-sulfaméthazole : 20mg/kg/j en 3 ou 4 prises pendant 3 semaines. • Toxoplasmose : Signes : syndrome lymphadénopathiques, choriorétinites, infections disséminées. Au stade sida, c’est essentiellement une atteinte cérébrale : hémiparésie, hémianopsie, crises comitiales. Parfois, on observe des troubles du comportement et de la vigilance, hallucinations et syndrome démentiel. Traitement : Pyriméthamine (Malocide®) + sulfadiazine (Adiazine®) 75 à 100mg/J et 4 à 6g/j associé à l’acide folique (50mg IM de folinate de calcium/semaine) pour contrer les complications hématologiques. Prophylaxie : - si CD4< 200/mml ou si signes cliniques, fièvre inexpliquée, candidose… Ö cotrimoxazole (Bactrim Forte® 1 à 2/j 3 fois par semaine • Autres parasitoses : Cryptosporiose Signe : Diarrhée massive avec atteinte de l’état général, grande déshydratation, fièvre, douleurs abdominales et amaigrissement. Traitement : Mesures symptomatiques (réhydratation, solutions électrolytiques), anti diarrhéiques. 81 4.4.2 Les mycoses • Candidoses : - cutanées : Traitement : Application biquotidienne de pommade à base de nystatine, d’amphotéricine B ou des imidazolés (kétonazole). - Oropharyngées : Signes : Muguet buccal reposant sur une base érythémateuse et siégeant sur les faces internes des joues, le dos de la langue, le palais, le pharynx. Il peut être associé à une dysphagie, une dysphonie ou être asymptomatique. Les candida peuvent aussi être responsables de stomatites, de glossites érythémateuses (langue rouge dépapillée), d’une langue noire et de perlèche. Traitement : Bain de bouche d’eau bicarbonatée associé à des bains de nystatine (Mycostatine®) 2 à 5 millions d’unités/j chez l’adulte ou d’amphotéricine B (Fungizone®) 1ccafé/10kg/J. Si cela ne suffit pas, il faut rajouter une thérapeutique par voie générale : Fluconazole (Triflucan®) 50mg/j pendant 1à 2 semaine - Oesophagiennes et bronchiques dites majeures : Signes : Dysphagie, anorexie, amaigrissement, fièvre, douleurs rétro sternales ou asymptomatique. Traitement : Fluconazole, kétonazole, itraconazole pendant un mois au moins. Amphotéricine B 0,7 à 1mg/kg/j 82 Indications de prophylaxie des candidoses: - chez les malades soumis à un traitement antibiotique, à une corticothérapie, à un traitement anticancéreux, à une radiothérapie. - En prévention des rechutes chez les malades ayant déjà développé une candidose oropharyngée à répétition. - En prévention des rechutes chez les sidéens ayant développé une candidose viscérale. • Cryptococcose : Signes : signes méningés et/ou forme disséminée (septicémie) : céphalée fébrile rebelle aux antalgiques, vomissement, parfois des signes hémisphériques. Traitement : Amphotéricine B (Fungizone®) 0,7mg/kg/j pendant 8 à10 semaines. Ou association fluctosine (Ancotil®) 150à200mg/kg/j et amphotéricine B (0,3mg/kg/j) pendant 6 semaines. • Histoplasmose : Signes : Tableau septique majeur, détresse respiratoire, insuffisance rénale, encéphalopathie, coagulation intra vasculaire. Traitement : Amphoptéricine (fongizone®) : 0.5 à 1 mg/kg en IV par jour pendant 4 à 8 semaines 4.4.3 Les viroses • L’infection à Herpès Les symptômes : L’infection est due au virus herpès simplex (HSV). A la suite de la contamination initiale, le virus établit une infection latente dans les ganglions sensitifs, desquels apparaissent des résurgences symptomatiques quand le sujet est immunodéprimé. Des études ont montré que la co-infection rendait plus vulnérable aux virus. Les crises peuvent survenir à tout moment, mais elles sont liées à une fatigue physique ou à un choc émotionnel. Les 83 manifestations physiques sont de petites vésicules, qui se transforment vite en plaies à vif ou ulcérations un peu rouges. La douleur est alors intense. Le virus HSV1 responsable de l’herpès labial, mais peut atteindre d’autres parties du visage comme le nez, le menton ou les yeux. Sous la forme de 5 à 10 vésicules qui se dessèchent en une huitaine de jours, les lésions buccales se présentent comme des bouquets. Le HSV2 infecte essentiellement la sphère génitale. Au stade sida, les lésions herpétiques deviennent fréquentes et pénibles, il s’agit de lésions graves et étendues. Ces ulcérations sont parfois cratériformes à fond rouge ou recouvert d’un enduit fibrineux grisâtre, à croissance centrifuge et à bords légèrement surélevés. Au niveau cutané, les lésions vont se recouvrir de croûtes. Fréquemment des ganglions volumineux apparaissent, avec de la fièvre, un état général diminué et des maux de tête. Traitement : L’herpès génital, anal ou buccal est traité coup par coup, par des antiseptiques et l’acyclovir en cas de récidives fréquentes (Zovirax®, 4 à 5 comprimés par jour pendant 5à10 jours ou Zelitrex® deux comprimés par jour). L’herpès chronique doit être traité par voie intraveineuse (5 à 10 mg/kg toutes les huit heures en perfusions d’une heure). Zovirax® existe aussi en pommade ce qui est bien utile en complément des comprimés, surtout dans les cas d’un herpès labial. Remarque : il faudra ajuster la posologie en cas de grande insuffisance rénale. S’il n’y a pas d’antibiothérapie en cours pour une autre infection, on pourra y associer un antibiotique à large spectre. En prophylaxie, un comprimé de Zovirax® par jour permet de protéger un séropositif qui se sent vulnérable. 84 • Cytomégalovirose : Signes : Asymptomatique ou tableau non spécifique (fièvre prolongée, amaigrissement). Sous forme de pneumopathie à CMV, encéphalite, atteinte digestive, atteinte hématologique ou atteinte surrénalienne. Traitement : Le traitement spécifique de l’infection à CMV est peu efficace : Ganciclovir (Cymévan®) 5mg/kg toutes les 12 heures en perfusion d’une heure. Il existe une forme orale pour améliorer le confort des patients : 3 fois 4 gélules à 250 mg/j. Prophylaxie : Une prévention primaire de la rétinite à CMV se fait puisque qu’elle apparaît chez 30 à 40% des patients ayant moins de 50 CD4/ml. Un examen du fond de l’œil trimestriel est recommandé. • Infection par le virus d’Epstein-Barr (EBV) : Signes : Symptomatologie non spécifique au cours d’un déficit immunitaire, fièvre, adénopathie, aggravation de l’immunodépression, lymphome. Traitement : aucun traitement n’est efficace. • Zona : Signe : L’atteinte est uni métamérique mais peut atteindre deux dermatomes ou être disséminé. Le zona ophtalmique serait de mauvais pronostic. Traitement : Les formes sévères nécessitent des dose d’aciclovir (Zovirax®) 500mg/m² 3 fois par jour en IV pendant 7 à 10 jours. Les formes moins agressives peuvent être traitées oralement par aciclovir 200mg, 20c/j ou 500mg, 5c/j. 85 • Leucoplasie chevelue de la cavité buccale : Signe : Une affection caractérisée par des plaques épaisses, blanches, adhérentes, siégeant sur les bords de la langue. Plusieurs virus y ont été isolés et observés : papilloma virus, herpes virus, EBV. Traitement : Régression spontanée des lésions possible. Amélioration obtenue par l’aciclovir, l’acide rétinoïque ou la trétinoïne (gel) 4.4.4 Les infections bactériennes • Syphilis : Rappels : Cette infection sexuellement transmissible est due à une bactérie, le treponema pallidum, dont les symptômes varient selon les stades de l’infection. La syphilis se transmet habituellement lors de rapports sexuels et peut être aussi transmise par contact direct (toucher, baiser) des muqueuses avec un chancre ou une lésion syphilitique. Elle est très contagieuse à tous les stades de son évolution. Selon les degrés d’infectiosité et d’évolution, on distingue différentes étapes de la maladie, primaire, secondaire, latence précoce (syphilis asymptomatique qui date d’un an ou moins), latence tardive ( qui date de plus d’un an) et tertiaire. On ne peut traiter la syphilis que si un dépistage a été réalisé. La syphilis est loin d’avoir disparue et les cliniciens doivent toujours y penser. Face à la résurgence de la syphilis ces trois dernières années, les pouvoirs publics ont mis en place en mai 2002 à Paris, une incitation au dépistage, en s’appuyant sur les associations de lutte contre le VIH. Cette campagne se déroulait auprès du public homosexuel dans les centres de Dépistage anonyme et gratuits (CDAG), les dispensaires antivénériens (DAV). Les premiers résultats ont mis en évidence une prévalence du VIH chez les consultants ayant une sérologie négative pour la syphilis de 0,94% tandis qu’elle atteint 11% chez les séropositifs. La syphilis est en effet associée dans environ 66% des cas 86 à une sérologie VIH. La plupart de ces consultants (85%) n’avaient pas de symptômes décelables à l’interrogatoire. Les signes de la maladie : Dans la sphère oro-faciale : - Une angine ou pharyngite traînante chez une femme ou un homosexuel masculin, correspond à un chancre oral (1% des cas) dont l’ulcération n’est pas toujours visible. Cela doit alarmer le médecin. - Les éruptions maculaires correspondent à une roséole secondaire. Elle apparaît en 2 ou 3 jours. Les macules sont rondes ou ovalaires, de 3 à 10mm de diamètre, mal limitées mais respectant des intervalles de peau saine. L’absence de prurit et de desquamation devrait permettre d’éliminer les diagnostics d’allergie alimentaire ou médicamenteuse et faire des recherches des lésions muqueuses. Il s’agit de macules érosives superficielles rouge vif, à limites nettes, souples, recouvertes d’une pellicule opaline dont les aspects les plus caractéristiques sont la perlèche fissuraire et des plaques arrondies et dépapillées du dos de la langue. Ces éruptions peuvent durer 1 à 2 mois et éventuellement laisser des taches brunâtres (collier de Vénus) à la base du cou des femmes. - des ulcérations de muqueuses orales sont rares lors du stade secondaire de la maladie mais peuvent surgir et seul le dentiste les diagnostiquera. Certaines seront sous forme d’érosions, de fentes sur la gencive ou sur les lèvres. Autres signes : o les ulcérations génitales ou chancres surtout chez les hommes. Elles peuvent être multiples ou géantes (surtout dans les co-infections au VIH). o Un gène plus ou moins sensible d’un creux inguinal liée à une adénopathie dont les caractères évocateurs sont d’être indolore, multiples, unilatérale et sans péri adénite. o Un tableau infectieux pseudo viral peut se déclencher (rare) : fièvre, céphalées, arthrites, myalgie, poly adénopathies, hépato et splénomégalie. 87 o Des manifestations cutanéo-muqueuses peuvent durer plusieurs mois. Elles sont papuleuses ou papulo-squameuses, plus ou moins disséminées de façon symétrique mais prédominent aux paumes, aux plantes et dans les régions périorificielles. Le dépistage : Les tests sérologiques classiques VDRL et TPHA sont suffisants pour confirmer le diagnostic. Lorsque les résultats sont négatifs, ils doivent être répétés en cas de suspicion clinique, en raison du décalage de la positivité de ces tests par rapport au chancre (1 à 2 semaines). On peut aussi faire appel au test FTA Abs dont la positivité est précoce, en mettant en évidence les IgM. C’est dans ce cas de lésions précoces que la recherche du tréponème au microscope à fond noir trouve son indication. De nouveaux tests par immuno blot sont en cours de validation. D’après une étude menée à l’hôpital de Westminster, à Londres en 2002 (45), une surveillance intensive de résurgence de syphilis systématiquement lors d’un contrôle de routine des séropositifs a permis de détecter 50% de nouveaux cas d’infections syphilitiques. Une sérologie tous les 3 mois révèle la maladie très tôt et permet ainsi d’intervenir rapidement dès le début de la maladie et réduire considérablement l’infectiosité. Le traitement de la syphilis : L’association benzathine-pénicilline à la dose unique de 2,4 millions d’unités reste le traitement le plus efficace des syphilis primaires, secondaires ou latentes (absence de signes cliniques) de moins de 2 ans. Sinon, on augmentera les doses jusqu’à 12 millions d’unités/24h de pénicilline G intraveineuse dans les cas d’infection plus évoluées. Seule l’allergie à la pénicilline pose un problème, on mise alors sur la doxicycline 200mg/24h/14J ou érythromycine 2g/24h/14j chez la femme enceinte. 88 La surveillance : En cas de co-infection avec le VIH, le traitement initial doit être surveillé rigoureusement en prévoyant une nouvelle cure renforcée si la décroissance des constantes biologiques n’est pas satisfaisante. • Mycobactériose : Tuberculose: due au Mycobacterium tuberculosis Signes : Localisation primaire pulmonaire commune, la présentation sous forme de miliaire ou d’infection généralisée (fièvre au long court, amaigrissement…) Traitement : Quatre antibiotiques : isoniazine (Rimifon®) 5 à 15mg/kg/j, rifampicine (Rifadine®) 8 à 12mg/kg/j, éthambutol (Myambutol®) 15à 25 mg/kg/j, pyrazinamide (Pirilène®) 20 à 35 mg/kg/j . Infection à Mycobacterie atypique comme le MAC : → Cette infection est un évènement « classant » c'est-à-dire qu’il fait rentrer le patient dans le sida déclaré. Signes : tableau clinique d’une mycobactériose disséminée, avec une fièvre prolongée, sueurs, altération de l’état général, hépatosplénomégalie, anémie, voire diarrhée, syndrome inflammatoire majeur Traitement : clarithromycine (Zéclar®) 1 à 2g/j associée à de l’éthambutol et cloyazimine • Salmonellose : Signes : Syndrome infectieux sévère (fièvre, AEG, signes neurologiques) Traitement : Ampicilline (12g/j IV), triméthoprime (10mg) et Sulfaméthoxazole (50mg/kg/j) 89 le • Autres infections bactériennes : - Pneumonie. - endocardite : chez les héroïnomanes séropositifs - septicémie. - entérite. Traitement : selon l’antibiogramme, utilisation d’antibiotique mais tout en considérant l’état immunodéprimé et l’insuffisance rénale. 4.5 Le vaccin Introduction : La mise au point de vaccin préventif ou thérapeutique contre le VIH connaît des obstacles et est certainement l’un des défis scientifiques les plus difficiles. Depuis le premier essai vaccinal, plus de 80 phases I et II ont été conduites en majorité entre l’Europe et les Etats-unis. Une quarantaine d’essais sont en cours aujourd’hui. 4.5.1 Rappels sur les vaccins et spécificité pour de du VIH Le vaccin anti-VIH est devenu une priorité. Les mélanges des médicaments antiviraux montrent leurs limites: il s’agit de traitements de longues durées, contraignants, aux effets secondaires graves permettant une mise en rémission et non une guérison. Un vaccin efficace facile à administrer serait la solution idéale. 90 Les vaccins contribuent à stimuler le système immunitaire pour produire des anticorps et des cellules immunitaires capables d’identifier les antigènes (ou les protéines étrangères) du vaccin. En effet, dans les autres maladies infectieuses, l’organisme produit une réponse immunitaire afin de se protéger et contribuer à sa guérison. Le VIH, quant à lui, bloque la réponse immunitaire de l’organisme et le rend incapable de lutter contre l’infection ou de prévenir la maladie. Le défi à relever est particulièrement ardu en raison d’une part des particularités du virus, d’autre part de l’insuffisance des connaissances scientifiques concernant les réponses immunitaires nécessaires pour protéger l’homme de l’infection ou de la maladie. Quel type de vaccin ? Vaccin préventif ou vaccin thérapeutique ? 4.5.2 Les obstacles au développement d’un vaccin anti-VIH Les caractéristiques de l’infection par le VIH-1 et VIH-2 diffèrent, des infections virales pour lesquelles un vaccin efficace a été élaboré. Les caractéristiques principales de l’infection VIH qui s’opposent à la réalisation d’un modèle vaccinal sont diverses : Le premier mode de contamination est transmuqueux. Aujourd’hui encore, on connait peu de choses sur l’immunité muqueuse. Le virus HIV est hypervariable, notamment sa boucle V2 et V3 de la gp120. Il n’est pas facile d’obtenir une réponse cellulaire (CTL) efficace car les épitopes HLA de surface varient rendant la liaison CTL-CPA impossible et les cellules infectées apparaissent invisibles aux CTL. Les connaissances actuelles de l’histoire naturelle de l’infection révèlent de nombreux autres obstacles à la conception d’un vaccin anti-VIH : latence virale, réservoirs macrophagiques et émergence de variant d’échappement. Les isolats de VIH-1 sont constitués de 3 groupes et 10 sous-types. 91 En fait, pour être sûrs que la vaccination n’entraîne pas l’infection à VIH, les chercheurs s’obligent à expérimenter avec des fragments de virus (contrairement aux autres vaccins existants de virus ou de bactéries entiers, tués ou inactivés). De plus, du fait des multiples variantes génétiques et des formes recombinantes du virus, on ne sait même pas s’il sera possible de fabriquer un vaccin polyvalent ! 4.5.3 Des essais en trois phases Les vaccins expérimentaux sont d’abord essayés sur les animaux puis les meilleurs sont choisis pour des essais chez les êtres humains. Ceux-ci se font en trois phases sur des volontaires séronégatifs pour le VIH. Les essais en phase I portent sur 20 à 40 sujets, volontaires sains non exposés aux virus et sont destinés à confirmer l’innocuité du vaccin et à déterminer s’il déclenche suffisamment de réponses immunitaires spécifiques au VIH. Les essais en phase II se font sur des centaines de sujets. Ils permettent de vérifier de manière plus approfondie l’innocuité du vaccin testé et d’évaluer le niveau des réponses immunitaires. Quant aux essais de phase III qui impliquent des milliers de volontaires sur le terrain et peuvent durer jusqu’à quatre ans, ils ont pour but de mesurer si le vaccin protège effectivement de l’infection à VIH ou du déclenchement du sida. A l’issu de la phase précédente, les producteurs de la nouvelle molécule peuvent déposer une demande d’autorisation de mise sur le marché. Après la commercialisation, la phase IV permet de suivre les effets du médicament et de découvrir de nouvelles réactions secondaires ou de nouvelles indications. (8) 4.5.4 Les approches scientifiques pour un vaccin 4.5.4.1 Le vaccin préventif Description du vaccin Lors de la conférence de Barcelone en juillet 2002, la Thaïlande a annoncé le plus vaste essai de vaccin thérapeutique contre le sida. Il est mené en parallèle avec les Etats-Unis. 92 Le schéma thérapeutique prévoit l’injection d’un vaccin préparé par la firme Aventis-Pasteur qui suscite une réponse cellulaire, avec un rappel par un autre vaccin de la firme Vaxgen (AIDSVAX) qui va engendrer une réponse humorale. Une quinzaine de candidats vaccins sont actuellement en essai dans le monde en phase I (phase de tolérance), de phase II (immunogénicité) et en phase III (efficacité). Les candidats-vaccins sont : des fragments synthétiques de peptides seuls ou couplés avec des lipides (ou lipopeptide) correspondant à des protéines de structures (env, gag ou pol) ou de régulation (Tat, nef) du VIH. De l’ADN contenant des gènes du VIH destinés à s’exprimer après la vaccination. Des vecteurs viraux non pathogènes pour l’homme pour exprimer des gènes du VIH. Autres perspectives : Le fait que certaines personnes ne s’infectent pas malgré une exposition importante au VIH est un des éléments les plus encourageants pour l’élaboration d’un vaccin. Chez ces individus, exposés mais non infectés, apparait une délétion homozygote sur un allèle du gène codant pour le récepteur CCR5 le rendant non fonctionnel. Ils sont alors génétiquement protégés. 93 4.5.4.2 Le vaccin thérapeutique 4.5.4.2.1 L’objectif du vaccin thérapeutique Le vaccin thérapeutique est destiné aux personnes déjà infectées par le VIH. Ce concept repose sur plusieurs observations : la mise en évidence du rôle de la réponse immunitaire dans le contrôle de la multiplication du VIH dès la primo-infection et pendant plusieurs années. Le nombre de patient conservant une réponse immunitaire et n’évoluant pas vers le sida, après 20 ans d’infection, en l’absence de traitement antirétroviraux. L’existence de sujets qui développent une forte réponse immunitaire après exposition au VIH, restant toujours non infectés. L’objectif du vaccin thérapeutique est de stimuler et/ou d’amplifier les réponses immunitaires spécifiques du virus chez des patients infectés. Le but à terme est la possibilité de la possibilité d’interrompre, pour les individus vaccinés, leur traitement antiviral sans remontée signifiante de la charge virale. 4.5.4.2.2 Les principes des recherches Trois types de vaccins sont en développement : les vaccins peptidiques (glycoprotéines d’enveloppe) les vecteurs recombinants vivants (inclusion d’un gène codant pour une protéine virale dans les adénovirus, la vaccine, le BCG ou une salmonelle). Les cytokines • Par l’intermédiaire des protéines de structure du virus Un vaccin consiste à provoquer des réponses immunitaires via des anticorps contre les protéines de l’enveloppe du virus, 94 comme la gp120. C’est le cas du vaccin actuellement testés aux Etats Unis par un essai de phase III. Une démarche possible a pour objet la protéine Tat, laquelle provoque la prolifération virale et la dissémination dans l’organisme. On estime que cette protéine est toxique pour de nombreuses cellules immunitaires dont le fonctionnement se voit inhibé bien qu’elles ne soient pas directement attaquées par le VIH. Une forme apparentée de la protéine tat n’entraîne pas les effets néfastes mais déclenche la réaction des anticorps qui s’attaquent à la protéine tat. Chez un groupe de patients, cette molécule est bien tolérée mais sans observer de modification de la charge virale pour autant. Plusieurs études ont été réalisées dans ce sens. Une seule a fourni des résultats encourageants. Aussi a-t-on recueilli un plasma riche en anticorps contre l’antigène p24 du VIH dans le sang de séropositifs. On a administré ce plasma à d’autres personnes toutes les deux semaines. On a pu constater que la première affection révélatrice du stade sida apparaissait plus tard chez les personnes ayant participé à l’essai comparativement à un groupe de contrôle. Malheureusement, deux autres études ne fournirent pas les mêmes résultats. Aujourd’hui, il est en cours d’essai de type II. Il s’agit d’un vaccin utilisant des virus inoffensifs pour l’être humain comme co-vecteurs vivants porteurs d’éléments du VIH, se révélant prometteurs dans la mesure où ils peuvent être adaptés aux différentes souches du virus. (28) • Par l’intermédiaire des cytokines de l’immunité Une autre stratégie était l’injection de cytokines afin de stimuler le système immunitaire afin de l’inciter à lutter contre le virus. Les cytokines sont des cytohormones puisqu’elles sont fabriquées par des cellules en petites quantités et distribuées pour stimuler les fonctions d’autres cellules. L’interleukine-2 joue un rôle décisif en stimulant la formation de lymphocytes T tels que les CD4 ou les CD8. Des études sont en cours d’expérimentation. 95 L’interféron-α a été testé mais il n’y a pas eu de résultats réellement concluants. Enfin, interféron-γ ainsi que le facteur nécrosant des tumeurs (TNF) font l’objet d’étude en ce moment. Dans ce contexte, le médicament pentoxiphylline ne manque pas d’intérêt. Ce médicament des traitements des troubles de l ‘irrigation sanguine possède des propriétés inhibiteurs du TNF. En supposant que le TNF accélère l’évolution de l’infection à VIH, on l’a introduit dans les traitements des séropositifs. Pourtant, les études effectuées n’ont pas permis d’observer d’effet sur le taux de CD4, mais sa combinaison avec l’AZT abaisse la charge virale. Les résultats des études sont à surveiller car prometteurs. 4.5.4.2.3 Les résultats des premiers essais 4.5.4.2.3.1 Les résultats des tests en France Deux essais de phase I ont été conduits en France dès 1992 en partenariat entre l’ANRS et Pasteur Mérieux Sérums et vaccins. Le premier essai (VAC 01) concernait 20 volontaires qui s’injectaient 2 doses de Canarypox exprimant la gp 160, puis deux doses de gp 160 recombinante hybride. Les essais suivants (VAC 2, 3, 4) s’attachait à d’autres glycoprotéines (gp 120 par exemple). On obtenait un développement d’anticorps spécifiques. Aujourd’hui, quelques études portent sur les lipopeptides et leur pouvoir d’induction de cellules cytotoxiques (CD8), capables d’éliminer les cellules VIH. Produits par synthèse chimique, ce qui ne présente aucun danger pour l’homme, les lipopeptides sont des molécules hybrides alignant les peptides Gag, Pol, Nef et RT (transcriptase inverse) du VIH attaché à une queue de lipides. Cette partie lipidique leur permet de pénétrer plus facilement dans les cellules qui vont les fragmenter et les présenter comme des agents étrangers aux CTL. Seules deux études de phase II sont en cours. En parallèle, on évalue d’autre mode d’administration, intradermique plutôt qu’intramusculaire. VAC 16 étudie les injections sous la peau, espérant de provoquer une réaction cytotoxique contre les épitopes viraux. 96 4.5.4.2.3.2 Les résultats des tests dans le monde Dans les deux essais présentés à Boston en 2003 (15), (70 patients dans le premier groupe et 48 dans le second), la vaccinothérapie a été capable d'induire une réponse immunitaire chez environ 60 % des personnes infectées. L'efficacité du vaccin se traduisait par un meilleur contrôle de la multiplication virale. Après 4 injections de vaccin et 3 mois d'interruption de traitement, la quantité de virus dans le sang d'un patient vacciné sur 4 était toujours bien contrôlée, sans médicament. Et pour ceux qui présentaient une augmentation de la charge virale obligeant à une reprise du traitement, ce rebond était plus tardif. D’autres essais sont en cours : Ainsi, coupler lipopeptides et vecteurs viraux pour optimiser au mieux la réponse immunitaire donnait des résultats concluants. Le système vecteur canarypox vient d’être poursuivi en phase II en collaboration avec le National Institut of Allergy and Infectious Diseases américain (NIAID). 179 personnes ayant reçu une préparation de 5 lipopeptides (LIPO-5) associé à un vecteur canarypox (vCP 1452). 4.5.5 Conclusion La plupart des mécanismes protecteurs semblent correspondre à des réponses immunes adéquates et tout particulièrement à des réponses CTL. Le Directeur de l’Agence Nationale de recherche sur le sida (ANRS) a rappelé que la première génération de vaccin ne permettra d’obtenir qu’une maladie atténuée. On s’oriente donc en France vers l’induction d’une réponse cellulaire susceptible de permettre une protection vaccinale partielle. Ce qui signifie que le vaccin de première génération n’empêchera pas l’infection, mais diminuera la charge virale au décours de la primo infection. On allongerait la phase asymptomatique de la maladie, en évitant le recours aux antirétroviraux pendant plusieurs années. 97 5 LE SUIVI MEDICAL Une consultation tous les six mois est en règle suffisante, en l’absence de symptôme, lorsque le taux de CD4 dépasse 400/mm³. Les consultations seront plus fréquentes en dessous de ce taux ou si la cinétique de décroissance des CD4 est rapide. La consultation doit comporter un examen clinique et un bilan biologique. Le médecin traitant doit pouvoir prendre en charge la totalité de ces cas ; cependant il est préférable d’avoir un correspondant hospitalier régulier en cas de doute ou de problème. D’après le Décret 93-667 du 27 mars 1993, il y a une prise en charge à 100% au titre des affections de longue durée pour tous les patients infectés par le VIH. Par ailleurs, les patients séropositifs peuvent bénéficier du tiers payant (hospitalisation, consultations hospitalières, pharmacie). Les patients ayant un SIDA et en arrêt de travail bénéficient au-delà du troisième mois d’indemnités journalières pendant trois ans. En cas de perte d’emploi, les droits d’assurance maladie sont maintenus douze mois. 5.1 Le taux de lymphocytes T CD4+ circulants est supérieur à 200/mm³ (ou supérieur à 15% des lymphocytes totaux). 5.1.1 Le suivi clinique Un suivi clinique s’effectue avec un interrogatoire complet de l’histoire de la maladie et de l’affection morale du patient. 98 5.1.1.1 Le suivi psychologique Il faut aussi motiver les patients en évoquant les situations de risques auxquelles ils font face et leurs habitudes nocives : le tabac, l’utilisation de drogues illicites, les violences domestiques dans certains cas sociaux ou leur activité sexuelle. 5.1.1.2 L’interrogatoire Un interrogatoire complet et compréhensible doit être parfaitement mené sous forme d’un questionnaire sur les principaux symptômes relatifs au VIH. C’est-à-dire la fièvre, les sueurs nocturnes, la perte de poids, les gastrites, les troubles de la vue, les ulcérations orales, les difficultés de déglutition, les symptômes respiratoires, diarrhées, les lésions de la peau ou les difficultés neurologiques. La dépression est fréquente chez ces patients, il faut donc questionner tranquillement sur le changement d’humeur, de libido, de troubles de sommeil, perte d’appétit, de troubles de concentration ou de mémoire. 5.1.1.3 Examen physique Un examen complet doit être fait lors du premier rendez-vous et les réévaluations de chaque examen sont codifiés mais variables en fonction de la situation clinique. L’examen de la peau est très précieux pour mettre en évidence des dermatites séborrhéiques, des sarcomes, folliculites, des infections linguales ou un psoriasis. L’examen de l’oropharynx : noter les candidoses, leucoplasies, les sarcomes de Kaposi, les aphtes ulcérés et les maladies parodontales. Un examen dentaire doit être effectué tous les 6 mois. La palpation peut mettre en évidence une polyadénopathie généralisée, que cela soit une lymphadénopathie, hépatomégalie ou une splénomégalie. Cela peut être le signe, d’une infection secondaire malignes ou non, qu’il faudra évaluer avec des examens complémentaires. 99 Un examen ano-génital. La palpation des testicules se fait lors de l’examen annuel. Une mammographie se fera systématiquement après 40 ans. Un contrôle de la vision se fera annuellement par un spécialiste ou tous les 6 mois si la numération des CD4 est inférieure à 100/mm3. Un examen neurologique peut associer une révision des fonctions cognitives et des tests sensoriels. 5.1.2 Le suivi biologique Pourquoi une surveillance biologique d’une infection VIH ? Il est important de réaliser une surveillance biologique régulière chez une personne infectée par le virus VIH. Cette surveillance spécifique se base sur le contrôle du statut immunitaire du patient, puisque la principale conséquence de cette maladie est l’immunodéficience. Le bilan viral : Chez un patient non traité, cette surveillance permet d’apprécier l’évolutivité de l’infection afin de prescrire, dès que nécessaire un traitement anti-rétroviral adapté. Ceci se fait afin de prévenir la multiplication virale. Aussi permet-elle d’anticiper l’apparition des maladies opportunistes en ajoutant un traitement antibiotique. Chez un patient traité, cette surveillance permet de suivre l’efficacité du traitement et de l’adapter en fonction des résultats. Le bilan non spécifique : Ce bilan consiste notamment en cas de symptômes particuliers, à rechercher certaines infections opportunistes comme une toxoplasmose, une infection à cytomégalovirus… Ce bilan est variable selon les patients suivant leur résilience, leur mode de vie ou leur immunodéficience avancée. 100 5.1.2.1 Le bilan viral 5.1.2.1.1 La charge virale 5.1.2.1.1.1 Définition La charge virale est la quantification de virus présente dans l’organisme. Il est admis que le degré de multiplication virale est étroitement corrélé à l’aggravation clinique progressive au cours de l’infection par le VIH. L’étude de la charge virale permet de quantifier le réservoir lymphocytaire et la réplication virale. En pratique, la charge virale sanguine peut être mesurée par la détermination de la virémie cellulaire (cellules contenant le VIH intégré sous forme de provirus) ou de la virémie plasmatique (particules virales ou ARN plasmatiques libres). Plus il y a de particules virales dans le sang, plus de nombreux lymphocytes CD4 sont détruits, plus la maladie progresse vers le stade SIDA. (48) 5.1.2.1.1.2 La méthode Parmi les techniques permettant la quantification de l’ARN plasmatique du VIH-1, seules trois trousses commerciales bien standardisées et aptes à évaluer un grand nombre de prélèvement ont été considérées: Quantiplex HIV RNA (Chiron), Nasba System (Organon Teknica) et Amplicor HIV-1 Monitor (Roche diagnostic Systems). Chacune des trousses ayant des caractéristiques qui lui sont propres, il n’est pas possible de recommander plus particulièrement l’une d’elle. Ces tests mesurent la quantité d’ARN à VIH par mm³ présente dans un échantillon de sang donné. Rappelons les conditions d’utilisation : la mesure de l’ARN doit s’effectuer sur du plasma à partir de sang recueilli sur citrate ou EDTA. Le transport du sang total jusqu’au laboratoire ne doit pas excéder deux heures pour la trousse Organon, trois heures pour le test de Roche et six heures pour celui de Chiron. Dès sa réception au laboratoire, le sang doit être centrifugé et le plasma gardé à -80°C. Des infections aigües (grippe, herpès) et les vaccinations peuvent modifier transitoirement la charge virale. Il convient donc d’éviter un test et de le reporter. 101 Il y a une bonne concordance entre les résultats des différents tests sur un même échantillon plasmatique. Principes et descriptions des techniques : Les trois trousses utilisent des techniques différentes d’amplification pour la mesure de l’ARN plasmatique. Le test Quantiplex HIV RNA® (Chiron) utilise une amplification du signal d’hybridation moléculaire. Après fixation de l’ARN viral sur une microplaque, des sondes d’ADN branché marquées à la phosphatase alcaline amplifient 1800 fois la molécule de départ. Après l’adjonction de substrat, on évalue la réaction de chimioluminescence par un luminomètre. Puis, la quantité d’ARN est mesurée par un logiciel à partir d’une courbe d’étalonnage. Le Nasba QR System® (Advance BioScience Laboratories/ Oraganon Tecknica) utilise une amplifIcation isotherme de l’ARN. L’ARN est retranscrit en ADN, par la reverse transcriptase du virus de la myeloblastose aviaire à partir d’amorces. Ensuite l’ARN est détruit par une RNAse H. L’ADN viral est transcrit en ARN par une T7 RNApolymérase qui génère 100 copies d’ARN. En utilisant des sondes oligonucléotidiques différentes marquées par électrofluorescence, le nombre de copies est calculé par un logiciel à partir du rapport du signal de l’échantillon. L’Amplicor HIV-1 Monitor® (Roche) est basée sur la technique de PCR, utilisant une ADN polymérase avec des amorces qui reconnaissent 142 paires de bases dans le gène gag. Après la reverse transcription et amplification par PCR, la quantité des antigènes viraux s’effectue par dilution sur une microplaque où sont fixées des sondes spécifiques. Un spectrophotomètre 102 quantifie une réaction fluorescente issue de la fixation de sondes marquées sur les produits amplifiés. 5.1.2.1.1.3 Les résultats La charge virale est reportée en un nombre de particules par chaque millilitre de plasma (soit en nombre de copies/ml). Le taux peut s’étendre de moins de 50 copies/ml jusqu’à 20 millions de copies/ml. Les changements entre deux mesures sont souvent reportés par des logarithmes. Ce terme mathématique permet d’évaluer les changements d’un facteur 10. Quand un médecin dit à son patient que son taux de charge virale a diminué « d’un log », cela signifie qu’il a diminué d’un facteur 10 depuis son dernier prélèvement. Le seuil de détection est de 50 copies/ml, avec une grande spécificité (c’est à dire qu’il est positif seulement par la présence du virus) et une reproductibilité de résultat entre deux tests. Cependant la variabilité totale incluant celle de la technique et la variabilité biologique peut chez un même patient être de 0,5 log, soit d’un facteur 3. Il est alors recommandé d’utiliser le même test chez un patient donné. Il faut souligner qu’actuellement le test organon a des problèmes de reconnaissance de certains sous-types du VIH-1. Aucun des tests ne permet de quantifier le VIH-2. 5.1.2.1.1.4 Les fréquences de mesure de la charge virale Lors d’un diagnostic. L’évaluation de la charge virale lors d’un diagnostic, se fait sous forme de deux mesures à 2 semaines d’intervalle pour évaluer si le patient nécessite un traitement. La numération des cellules CD4 peut s’effectuer en même temps. Ainsi la décision de commencer ou non un traitement se prendra en fonction des deux résultats biologiques. 103 Après institution d’une thérapeutique Il est recommandé de répéter une mesure de la charge virale après institution d’une thérapeutique entre la 2e et la 4e semaine après le début afin d’évaluer la réponse au traitement. Des tests supplémentaires peuvent s’opérer tous les 4 à 6 mois ou jusqu’à ce que le virus deviennent indétectable. Chez le patient traité Il est recommandé que le taux de charge viral et de numération des cellules CD4 soient recherchés tous les 3 mois lors d’une infection traitée par anti-rétroviraux pour évaluer l’efficacité du traitement et voir s’il maintient un faible taux de particules virales. Chez le patient non traité Lorsqu’à la première mesure le taux de charge virale est bas et le nombre de CD4 élevé, un médecin et son patient peuvent opter pour ne pas commencer un traitement de suite. Le patient devra alors mesurer sa charge virale tous les 3 mois. Le résultat de cet examen biologique rendra compte de l’efficacité de l’organisme à combattre le virus. 5.1.2.1.1.5 Les conséquences D’après le rapport Delfraissy, la valeur pronostique de la charge virale à l’instauration d’un traitement tend à s’effacer devant celle des lymphocytes CD4 lorsqu’elle est inférieure à 100 000 copies/ml. En revanche, dans la cohorte MACS, chez des patients dont les CD4 sont compris entre 200 et 350/mm³, la probabilité d’évolution vers le stade sida dans les 3 ans est d’autant plus grande que la charge virale plasmatique est élevée. En France, on se basera donc sur le niveau des lymphocytes T CD4 pour initier le traitement. (71) 104 5.1.2.1.1.6 Qu’est ce que la charge virale dite indétectable Tous les examens de charge virale possèdent un seuil sous lequel ils ne peuvent plus détecter le VIH. Ce point s’appelle la limite de détection (aujourd’hui 50 copies/ml). Mais cela ne veut pas dire que le virus a disparu entièrement. Le virus est toujours dans le sang. Avoir une charge indétectable est désirable pour deux raisons : - un risque très bas de développer le sida - un risque très bas de développer une résistance aux médicaments. Certains médecins pensent qu’une charge virale indétectable devrait être un objectif du traitement. Typiquement, la charge virale peut augmenter de moins de 50 copies à plus de 100 à 200 copies au cours d’une seule analyse, et être indétectable au cours du prochain examen. 5.1.2.1.1.7 Les perspectives D’autres tests de mesure de l’ARN VIH-1 plasmatique sont actuellement à l’étude. Les quantifications de l’ADN proviral intégré et des ARNm viraux intracellulaires sont aujourd’hui en cours d’étude, ce qui permettrait d’observer la quantification virale dans des compartiments tels que les ganglions ou le sperme. 5.1.2.2 Les examens de progression de la maladie 5.1.2.2.1 Evaluation de l’atteinte du système immunitaire Typage des sous-populations lymphocytaires CD4-CD8: Le test compte le nombre de CD4 par millimètre cube de sang. Le taux normal chez un séronégatif en bonne santé peut varier de 600 à 1200/mm³. En pourcentage, on évalue aussi la proportion de cellules de lymphocytes qui sont des CD4. C’est le pourcentage de CD4. Chez les personnes séronégatives, ils représentent 40%. Un pourcentage de 15% est considéré comme représentant un risque d’infection grave. 105 Dans la phase asymptomatique, seule l’augmentation absolue des CD8 peut être l’unique perturbation observée. Mais la diminution progressive du nombre des CD4 correspond à leur destruction par l’attaque du virus. Plus leur nombre est faible, plus la probabilité de développer des manifestations cliniques devient grande. Dans le sida, le nombre absolu de lymphocytes totaux baisse et on observe une baisse du rapport CD4/CD8. Les médecins suggèrent d’évaluer le taux de CD4 tous les 3 à 6 mois si le taux est relativement élevé, c’est la phase asymptomatique. Les relevés seront plus fréquents lorsque se pose la question d’entamer un traitement ou si des symptômes liés au VIH apparaissent avec une déplétion rapide du taux initial. NFS : les anomalies hématologiques indiquant un risque d’évolution sont la lymphopénie, la neutropénie, l’anémie, et une augmentation de la VS. Les plaquettes : Il existe un rôle direct entre l’infection des mégacaryocytes et la thrombopénie, par fixation d’antigènes viraux à la surface membranaire de ces derniers. La coagulation apparait de plus en plus difficile, existe alors un risque hémorragique important. IgG, IgA : l’activation polyclonale des lyphocytes B provoque l’apparition rapide des anticorps dirigés contre l’enveloppe er le cœur du virion. Cela se traduit par une augmentation du chiffre des immunoglobulines, essentiellement de la classe des IgG et des IgA. Un taux élevé d’IgA sanguin serait de mauvais pronostic. 5.1.2.2.2 Evaluation du taux de réplication virale (ou efficacité des traitements) Elle est basée sur l’antigénémie p24 qui était positive au moment de la primo-infection avant l’apparition des anticorps. Elle montre ainsi l’efficacité biologique des premiers rétroviraux qui négativisent cette antigénémie. Elle reste faible durant les premières années de l’infection pour ensuite augmenter progressivement au cours de la maladie. C’est le marqueur de la réplication virale où les lymphocytes CD4 infectés produisent des particules virales complètes et des antigènes du virus (notamment le P24) dans le sang. 106 5.1.2.2.3 Le test de résistance aux anti-rétroviraux 5.1.2.2.3.1 Définition de la résistance médicamenteuse Le phénomène de résistance au VIH représente la diminution de la sensibilité du virus aux molécules antirétrovirales mesurées in vitro dans un système de culture cellulaire. 5.1.2.2.3.2 La fréquence des résistances Le traitement prolongé (plus de 6 mois) par la zidovudine (Retrovir) entraînerait l’émergence de souches virales résistantes in vitro à ce médicament. 5.1.2.2.3.3 Les recommandations d’utilisation des tests de résistance La pratique des tests de résistance est difficile car ils sont peu standardisés et leur interprétation est complexe. La prescription de ces tests doit résulter d’une concertation entre clinicien et le virologiste qui revoient l’ensemble de l’histoire thérapeutique du patient, l’évolution de la charge virale et le nombre de CD4, les problèmes d’adhérence, d’intolérance et d’interactions pharmacocinétiques. Selon le rapport Delfraissy (2004), il est recommandé : o de réaliser un test génotypique de résistance en cas d’échec thérapeutique et en cas de primo-infection. o de réaliser les tests de résistance en cas d’échec virologique alors que le patient est sous traitement antirétroviral. o de ne pas prescrire les tests phénotypiques de résistance. Leur intérêt n’a pas été démontré. 5.1.2.2.3.4 Le test génotypique Ce test recherche les mutations associées à la résistance et détermine si, à chaque positions de gènes de la RT ou de la protéase, les codons sont mutés. L’analyse de la séquence complète des gènes de la RT ou de la protéase par différents types de séquenceurs est la technique de référence. Les résultats sont obtenus en quelques jours. 107 Remarque : Les tests phénotypiques mesurent la capacité du virus à se multiplier en présence d’un antiretroviral et permettent de définir les concentrations inhibitrices. La seule technique actuellement est celle du recombinant virus assay (RVA). Les gènes de la RT ou de la protéase de l’ARN viral plasmatique du patient sont amplifiés par PCR puis mis en présence d’un plasmide délété pour ces gènes. La recombinaison va former des particules virales qui sont cultivés en présence de plusieurs concentrations de l’antirétroviral. 5.1.2.3 Le bilan non spécifique 5.1.2.3.1 La consultation d’entrée o La mesure de la G6PD : glucose-6-phosphate deshydrogénase. o La déficience en G6PD traduit une condition biologique qui tend à une augmentation de l’hémolyse par la toxicité des traitements pris en ambulatoire. Les médicaments qui parviennent à traiter les patients infectés à l’origine d’une hémolyse G6PD dépendante sont la dapsone, primaquine ou les sulfamides. Il existe différentes formes de déficience dont deux répertoriées chez la race noire et chez les méditerranéens et asiatiques. Chez ces derniers, la déficience peut être compensée à vie. Cependant, chez ces susceptibilités raciales, il est recommandé de mesurer cette G6PD dans les bilans de base avant de commencer une thérapeutique avec des traitements aussi toxiques. o La recherche des co-maladies aux VIH. La détection de ces co-infections s’effectue d’emblé lors d’une primo-infection et se contrôlera annuellement ou dès que besoin. Le VHB. Le VHC. la syphilis, gonorrhée, infection à chlamidia, HPV. 108 Des vaccins sont alors réalisés et renouvelés selon les fréquences ci-jointes : Le vaccin contre l’hépatite A se fera sous forme de série en un temps dès que la prise de sang met en évidence une déficience en anticorps HAV. La vaccination contre l’hépatite B se fera s’il n’existe pas d’anticorps HBV. Un vaccin contre l’influenza annuellement. Tous les 5 ans, un vaccin contre le pneumocoque doit être injecté. Un rappel contre le tétanos se fera tous les 10 ans chez des patients avec des CD4<200/mm³. 5.1.2.3.2 En suivi → Le dépistage de la tuberculose: le patient infecté doit être testé pour détecter une tuberculose par une injection intradermique TST. Une induration de plus de 5 mm est considérée comme un résultat positif et demande par la suite de faire un cliché pulmonaire. Un examen annuel doit être effectué chez des patients qui ont eu un précédent test négatif et qui sont exposés à la tuberculose. → Le taux de testostérone: Les hommes malades présentent un risque d’hypogonadisme surtout dans les stades avancés de la maladie. Une prise de sang peut être considérée lorsqu’un homme se plaint de fatigue, de perte de poids, perte de libido ou de dysfonction érectile. → Les taux de cholestérol et triglycérides: beaucoup d’antirétroviraux augmentent le taux de cholestérol et de triglycérides. Il faut donc faire une prise de sang juste après la mise en place d’un traitement. Ensuite, un suivi se fera tous les 6 mois sous HAART ou annuellement après 35 ans s’il n’y a pas de traitement instauré. → Un cliché pulmonaire: il permettra de détecter d’une tuberculose asymptomatique et d’autres complications pulmonaires fréquentes chez des patients HIV. → Autres tests: leur indication se fera en fonction de l’âge et du sexe du patient. Il s’agit d’analyse urinaire, d’ECG, coloscopie, mammographie ou test de grossesse. 109 5.1.2.4 La fréquence des consultations Après l’instauration d’un traitement antirétroviral, la prise en charge comporte non seulement l’évaluation de celui-ci mais également la surveillance clinique et psychologique. 5.1.2.4.1 La consultation précoce de suivi (d’après le rapport Delfraissy 2004) Une consultation 8 à 15 jours après l’initiation du traitement permet de s’assurer : de la bonne compréhension de la posologie et du schéma thérapeutique par le patient. de renouveler les conseils pour une prise optimale du traitement de détecter les difficultés d’observance de vérifier la tolérance initiale et la survenue des effets secondaires 5.1.2.4.2 Le suivi ultérieur La fréquence des consultations ultérieures est fonction de l’état clinique du patient (visite plus fréquente si le patient est traité tardivement avec des CD4 <200/mm³) et de ses difficultés avec le traitement. Il est d’ailleurs recommandé, d’après le rapport Delfraissy, de programmer une visite 1 mois après l’initiation du traitement, puis tous les 3 mois pour la première année, puis en cas d’évolution favorable et de bonne tolérance 3 à 4 fois par an. 5.2 Le taux de lymphocytes T CD4+ circulants est inférieur à 200/mm³ C’est la prophylaxie des infections opportunistes. Les infections opportunistes (IO) causent la plupart des maladies et des décès parmi les gens atteints du sida. Le National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID) aux Etats-Unis est sans doute l'organisme qui effectue le plus de recherches sur ces infections très sérieuses. On 110 tente de définir constamment les traitements idéaux, seuls ou en combinaison, pour prévenir et traiter les IO. La prophylaxie est indispensable et doit être dirigée contre les infections les plus fréquentes et les plus graves, essentiellement la pneumocystose pulmonaire (prophylaxie primaire facile) et la toxoplasmose cérébrale (prophylaxie primaire plus difficile). CD4/mm³ Manifestations possibles Candidose orale, infection ORL et respiratoires De 500 Tuberculose à 200 Maladie de Kaposi Pneumocystose Cryptosporidiose chronique, Herpès Toxoplasmose cérébral <200 Lymphome, cancer Leucoencéphalite multifocale Infection à CMV Mycobactérioses atypiques Tableau 5 : Tableau des risques des infections opportunistes d’après JACOMET (49). 111 LES POINTS DE REPERE - Le suivi médical d’un séropositif est constitué d’un bilan biologique et d’un examen clinique. L’interrogatoire ne doit pas oublier d’évaluer la psychologie du patient pour lui apporter un soutien face à cette maladie. - Une consultation précoce de suivi (1 mois après l’initiation du traitement) pour faire l’évaluation de la tolérance et le renfort de l’adhérence aux médicaments. - Il n’est pas recommandé d’interrompre un traitement en cas de succès immunovirologique. - Tout patient ayant moins de 200 CD4/mm³, doit recevoir une prescription d’une prophylaxie pour la pneumocystose et la toxoplasmose. - Une infection opportuniste peut survenir au cours de l’arrêt de traitement antirétroviral en raison du risque de diminution très rapide des lymphocytes CD4. LES RECOMMANDATIONS - le bilan initial d’un patient séropositif doit comporter les examens suivant : NFS, plaquettes, transaminases Charge virale plasmatique (ARN VIH), taux de lymphocytes CD4 et CD8 Sérologies VHB, VHC, syphilis, toxoplasmose, CMV IDR à la tuberculine, radiographie du thorax - Le suivi : Tous les 3 à 6 mois en l’absence de traitement rétroviral (tous les 4 à 6 mois si CD4 >500 et tous les 3 mois si CD4 entre 200 et 400) et tous les 3 mois en cas de traitement antirétroviral. Demander les mêmes examens que ceux du bilan initial avec : glycémie, lipase ; triglycéridémie, cholestérol. - Les tests de résistance : Le groupe d’expert du rapport Delfraissy recommande de réaliser un test génotypique de résistance en cas d’échec thérapeutique et en cas de primo-infection. Ne pas réaliser les tests phénotypiques de résistance car ils n’ont pas démontré leurs performances. 112 6 CONDUITE A TENIR EN ODONTOLOGIE 6.1 Le patient se dit séronégatif 6.1.1 Les précautions universelles de sécurité Dans la circulaire relative à la transmission du VIH chez le personnel de santé, datée du 3 août 1989, la Direction générale de la santé et la Direction des hôpitaux du Ministère en charge de la Santé définissaient de la façon suivante les règles de sécurité en milieu de soins (0). Il s’agit de règles simples, applicables à toutes personnes car les limiter aux personnes séropositives entraînerait une fausse sécurité. En effet, on peut toujours avoir affaire à des sujets infectés non porteurs d’anticorps, en cours de séroconversion, ou à des sujets infectés non reconnus (102). 6.1.2 Application des règles universelles ou « standards » (23) (100) Il est impératif de porter des gants, des lunettes et une blouse (sur-blouse) lors d’un soin. La protection concerne aussi bien le praticien, son assistante et le personnel de service. se laver de manière adéquate et fréquente les mains, avant et après chaque soin, et immédiatement après un contact avec du sang ou des liquides biologiques en utilisant de l’eau et du savon puis un désinfectant. Il est nécessaire de couvrir les plaies du personnel soignant, en particulier au niveau des mains. Prendre toutes les précautions pour éviter de se blesser avec les instruments souillés par des substances potentiellement contaminantes : sang, autres sécrétions biologiques. Désinfecter, avec une technique adaptée, toutes surfaces, touts récipients, matériaux ou instruments souillés ou ayant contenu de telles substances. 113 Utiliser de préférence des matériels à usage unique quand cela est possible ou un matériel stérilisé à chaud ou désinfecté avec des produits chimiques efficaces. Tous les acteurs de santé doivent être vaccinés (et à jour) contre le VHB. Les objets piquants et tranchants doivent être recueillis, sans être regainés, dans des containers adaptés, stables, incinérables disposés à portée de mains. 6.1.3 L’élimination des déchets de soins Déchets d’activité de soins à risque infectieux (DASRI) : matériels et matériaux piquants ou coupants déchets mous en contact avec du sang et/ou liquides biologiques ou pathologiques 6.1.4 déchets anatomiques humains, non aisément identifiables La désinfection et la stérilisation (CSH Hygiène en pratique dentaire : mars 1997) 6.1.4.1 Nettoyage des postes de travail et des locaux unit : nettoyer toutes les surfaces, la tablette, les poignées, le fauteuil, la lampe, l’appareil RX, la têtière ainsi que les interrupteurs et boutons de commande que l’on a touchés pendant le soin. Le crachoir en dernier lieu On utilise de préférence des linges à usage unique ou des serviettes en papier imprégnées d’une solution détergente (et de préférence désinfectante), puis on applique un désinfectant actif. Nettoyage des autres zones de travail Les objets touchés avec des mains contaminées seront aussi désinfectés : combiné téléphonique, les stylos et crayons, robinets et plans de travail. 114 6.1.4.2 Traitement des instruments 6.1.4.2.1 Inactivation du VIH (9) - Moyens physiques : 50° C pendant 30 minutes ou 80° C pendant 10 minutes. Ceci est obtenu par : ébullition, autoclave, stérilisation sèche, machine à laver. - Moyens chimiques : Le virus est inactivé après 5 à 10 minutes dans : De l’alcool à 70° Une solution de 1% de glutaraldéhyde Une solution à 0.2% d’hypochlorite de soude : 15 minutes Une solution à 2-4% de chloramine Une solution à 3% de peroxyde d’hydrogène. 6.1.4.2.2 Nettoyage des instruments avec une brosse à récurer ou nettoyage par ultrasons. 6.1.4.2.3 Désinfection des instruments Désinfection thermique : les instruments sont mis dans une cassette immergée dans un bain nettoyant à ultrasons. Certains autoclaves peuvent pratiquer une désinfection thermique par contact avec l’eau bouillante (plus de 90°C) pendant 3 à 10 minutes. Désinfection chimique : instruments dans un bain de désinfectant à large spectre, (virucide et fongicide). La plupart des désinfectants chimiques sont efficaces contre le VIH. 6.1.4.2.4 Stérilisation des instruments le stérilisateur à air chaud (Poupinel®) l’autoclave 6.1.4.2.5 Traitement hygiénique des contre-angles, pièces à mains et turbines. Faire fonctionner à vide l’instrument avec son spray durant une dizaine de secondes, pour rincer les conduites des fluides. 115 Laver la face externe, soit avec une brosse et un détergent, soit avec un auto laveur. Injecter durant plusieurs secondes le lubrifiant recommandé Oter les traces d’huile et nettoyer les fibres optiques à l’alcool Avant de réutiliser l’instrument, le faire fonctionner durant quelques secondes à vide, avec son spray. C’est une procédure minimale, car en théorie, le nettoyage et la stérilisation des instruments rotatifs devraient se faire après chaque utilisation. Mais peu de praticiens appliquent cette procédure en raison du coût global élevé et la nécessité de plus de rotatifs. 6.2 Le patient dit qu’il est séropositif 6.2.1 Introduction Comme les manifestations bucco-pharyngées des maladies systémiques, le chirurgien- dentiste ne pose pas seulement le diagnostic mais joue un rôle majeur dans la prise en charge thérapeutique. Les chirurgien-dentistes ont un rôle encore plus important à jouer dans le cadre des manifestations bucco-dentaires liées à l’infection par le VIH. 6.2.2 Les règles universelles : Cf 6.1.2 116 6.2.3 L’interrogatoire Document fiche clinique type 1- Coordonnées du médecin traitant :……………………………………………………………… Tel :………………………………………………................ du médecin référant VIH :………………………………………………………… Tel : …………………………………………….................. 2- Les antécédents de la maladie VIH : - charge virale (date): …………………………………………………………………………. - taux de lymphocytes CD4 (date): ………………………………………………………….. - traitement : absent ou en cours ……………………………………………………………. si oui : le(s)quel(s) : ……………………………………………… …………………………………………………………….. → attention aux interactions médicamenteuses avec le sustiva®, viread®, norvir®, kaletra® 3- Autres infections : - Tuberculose, mycobactériose………………………………………………………………. - sérologie (HBV, HCV):………………………………………………………………………. - si positive quel(s) traitement(s) :…………………………………………………………… 4- Les analyses biologiques - Polynucléaires neutrophiles (PNN) ………………………………………………………... - Plaquettes…………………………………………………………………………………….. - Hémoglobine…………………………………………………………………………………. 5- Une antibiothérapie est elle en cours ?............................................................................... …………………………………………………………………………………………………………… C’est un dialogue ! 117 Parfois, les patients n’osent pas avouer l’échec du suivi de leur traitement à leur spécialiste sûrement par peur, mais il important pour le chirurgien-dentiste de mettre les patients à l’aise pour acquérir leur confiance. Aussi, leurs difficultés d’observance peuvent être reportées au médecin spécialiste car le contrôle de la maladie en souffre. Parfois la conversation peut mener le patient à raconter l’origine de sa contamination : Le patient aura besoin de savoir que cela n’est pas une question de curiosité mais que certaines transmissions du virus peuvent avoir des implications dans d’autres organes. La transfusion sanguine peut indiquer la présence de désordres sanguins pouvant interférer avec les différents actes dentaires. Les pratiques dentaires peuvent être reportées jusqu’à ce que l’usage de drogues par un patient soit totalement fini. En effet, plusieurs carpules d’anesthésie locale peuvent être sans danger pour la plupart des patients, mais peuvent aussi bien provoquer une overdose si le patient a récemment pris de la cocaïne. Aussi, ces patients présentent un plus grand risque d’endocardite infectieuse (66). 6.2.4 Ce qu’il faut savoir 6.2.4.1 Le risque hémorragique Un bilan de coagulation doit être effectué car les anomalies hématologiques sont courantes que ce soit par la progression de la maladie ou l’usage des anti-rétroviraux. Il faut aussi se pencher sur d’autres étiologies possibles associées : anémie, hépatite, insuffisance rénale, maladie gastro-intestinale, cancer ou alcoolisme. Dans le journal de l’Association Américaine Dentaire en 1995 (129), il est préconisé que tout soin dentaire peut être envisagé si les plaquettes sont supérieures à 50 000/ mm³, une hémoglobine de plus de 7g/dL et un temps de saignement de moins de deux fois le temps normal. 118 6.2.4.2 Le risque infectieux 6.2.4.2.1 Prophylaxie de l’endocardite infectieuse Elle est identique à celle du patient sain Posologie et voie d’administration Produits Prise unique dans l’heure précédant le geste (posologies pédiatriques per os) Pas d’allergie aux β-lactamines Amoxicilline Clindamycine Allergie aux β-lactamines (Dalacine ®) Pristinamycine (pyostatine®) 3g per os (75mg/kg) 600mg/per os (15mg/kg) 1g per os (25mg/kg) Tableau 6 : prophylaxie de l’endocardite infectieuse selon la conférence du consensus de mars 1992 (108). 6.2.4.2.2 Le taux de neutrophiles Acteurs de l’immunité non spécifique, indispensables pour lutter contre les infections bactériennes et mycosiques. → Un bain de bouche à base de chlorhexidine est obligatoire avant tout acte comme chez un patient sain afin de réduire la concentration de bactéries orales. 119 En 1999, L’alliance dentaire des soins auprès des séropositifs en coopération avec l’Association Dentaire Américaine (ADA) préconisent une antibioprophylaxie dans les cas de neutropénie chez les patients HIV : Lors de neutropénie sévère (< 500/mm³) : bain de bouche à la chlorhexidine + antibioprophylaxie (en coopération avec le médecin traitant). Lors de neutropénie modérée (entre 500 et 1000 /mm³) : la plupart des soins dentaires ne demande pas de prophylaxie. Une étude au Mali sur 56 patients infectés par le VIH-1 a démontré que l’immunité non spécifique de ces malades semble plutôt être stimulée et ne semble pas montrer de défaillance jusqu’à un stade évolutif tardif de la maladie (114). → En résumer, selon l’ADA, les patients infectés avec une neutropénie modérée ne présentent pas un risque plus élevé pour une infection bactérienne, mais la décision dépendra du jugement du praticien (30). Les neutropénies sont plus fréquentes au stade tardif de la maladie et survient généralement quand le taux de CD4 est très bas. DONC : - Donc pour des CD4 < 200/mm³, il faut demander le taux de neutrophiles avant tout actes dentaires y compris le sondage parodontal (66). 120 Mais en général, quel que soit le taux de CD4 (< ou > 200/ml), il est bon de rechercher la numération des PNN. En effet, car les patients sous interféron pour traiter une hépatite C, montrent une baisse du taux de PNN. 6.2.4.2.3 Absence d’interaction potentielle avec des drogues Non seulement les médicaments utilisés pour les thérapies HAART sont connues pour des interactions avec des molécules anesthésiques ou des analgésiques, il faut aussi prendre en compte les usages quotidiens de drogues. Tout réside sur le recueil d’informations auprès du malade. Si l’échange s’avère difficile, un contact avec le médecin spécialiste peut s’avérer nécessaire. 6.2.5 L’examen bucco-dentaire 6.2.5.1 Les lésions muqueuses et cutanées 6.2.5.1.1 Les lésions buccales non spécifiques : Elles peuvent survenir chez tous les patients, en dehors de toute contamination par le VIH. Mais chez une personne séropositive, plusieurs caractéristiques les rendent suspectes : - apparition soudaine, sans raison apparente, d’extension et localisations multiples, résistantes aux traitements classiques. - adénopathies cervico-faciales uniques ou multiples généralement bilatérales. 121 Il y a notamment : Un zona buccal (douloureux) Des lésions aphtoïdes : (56) Les aphtes ulcéreux récurrents : ulcérations superficielles avec un halo jaune-gris sur une zone inflammatoire, très douloureuses au niveau des muqueuses orales non attachées. Fréquence : 2 à 4 % des séropositifs, surtout dans le stade avancé de la maladie. Conséquences: difficulté pour manger, parler, avaler et affecte la qualité de vie des patients. Figure 8 : Aphte géant chez un patient séropositif : photographie et autorisation de diffusion d’Arthur Adolpho. 122 Figure 9 : Aphtes ulcéreux récurrents d’un patient VIH (photographie d’A.Adolpho) Candidose buccale : linguales, jugales, vélo palatines, Fréquence: 12 à 88% Localisée ou diffuses, d’aspect érythémateux, pseudomembraneux ou hyperplasique Figure 10 : candidose (érythémateuse) du palais, d’un patient séropositif : photographie et autorisation de diffusion d’Arthur Adolpho. 123 Figure 11 : candidose pseudomembraneuse du dos de la langue spécifique du VIH+ Lésions herpétiques : figure 12 et 13. Bouquet de vésicules coalescentes sur une muqueuse kératinisée inflammée. Figure 12 : Stomatite herpétique du voile du palais chez un patient séropositif : photographie d’A. Adolpho. Figure 13 : Herpes labial photographie d’A. Adolpho. récurrent : . 124 Chancres syphilitiques Figure 14 : chancre de syphilis au bord latéral de la langue Le chancre apparaît après une période d’incubation de 2 à 3 semaines. Il apparaît comme une lésion unique et érosive, rouge, avec une perte de substance superficielle. Elle est indolore et dure. Les lésions du stade secondaire de la syphilis apparaissent après 6 semaines à 6 mois de latence. Ce sont de multiples lésions pleines et surélevées. Rapidement, une érosion se produit au centre des lésions, puis un film membraneux blanc-gris les recouvrent. Figure 15 : plaques syphilitiques de la face interne des joues Inflammations des glandes salivaires (parotide, submandibulaire) (83) Hypertrophie parotidienne Surtout connue chez les enfants séropositifs (rare chez l’adulte). C’est une tuméfaction discrètement douloureuse, sans inflammation autour du canal de sténon. 125 Figure 16 : hypertrophie de la glande parotidienne chez une enfant VIH (photographie d’A.Adolpho) Des hémorragies bucco-gingivales spontanées, avec purpura et bulles hémorragiques lorsqu’il existe une thrombopénie. 6.2.5.1.2 Les lésions buccales spécifiques : 6.2.5.1.2.1 La leucoplasie chevelue Avec parfois une extension dorsale ou ventrale de la langue. Les tissus sont souvent d’aspects lisses, irréguliers de couleur blanchâtre o prévalence 4 à 33% o due au Epstein-Barr Virus (EBV) Figure 17 : Leucoplasie de la langue (photographie d’A. Alphonso) Elle se présente comme une lésion blanchâtre, de superficie rugueuse, fixedes bords latéraux de la langue. 126 6.2.5.1.2.2 La maladie de Kaposi Elle siège généralement au palais, mais aussi parfois au niveau des gencives et de la langue. Elle se présente sous forme de macules ou de lésions saillantes en plaques ou en nodules, parfois ulcérées, de couleur rougeâtre, violacées ou brunâtres. Figure 18 : Sarcome de Kaposi (photographies d’A.Alphonso) La lésion commence par une zone érythémateuse et violacée persistante. La localisation habituelle est le palais. On peut voir aussi en voir au niveau de la langue. Cette lésion va progressivement s’élevée pour se transformer en une masse tumorale qui va se creuser rapidement 6.2.5.1.2.3 Les tuméfactions buccales des organes lymphoïdes Ce sont généralement les amygdales, correspondant à des lymphomes non Hodgkiniens. 6.2.5.1.2.4 Des carcinomes épidermoïdes 127 6.2.5.1.2.5 Conclusions sur les lésions buccales Le caractère précoce des manifestations orales est connu. Ceci peut placer l’odontostomatologiste en première ligne pour déceler l’immunodéficience, alors même que le patient peut ignorer son état ou l’aggravation de celui-ci. Le diagnostic et le traitement des lésions faciales doivent être les plus précoces possibles en raison de leur caractère visible (80). 6.2.5.2 Les pathologies gingivales et parodontopathies 6.2.5.2.1 Erythème linéaire gingival (113) Bande rouge le long de la gencive marginale, pouvant être ou non associée à un saignement et un inconfort. Le plus souvent situé au niveau des dents antérieures, l’érythème peut s’étendre jusqu’aux dents postérieures et sur la gencive attachée sous forme de pétéchies. Il n’est pas en relation avec la plaque bactérienne. Figure 19 : Gingivite et VIH (photographie d’A. Adolpho) 128 6.2.5.2.2 Gingivite de type ulcéro-nécrotique aiguë Elle est caractérisée par une ulcération localisée ou généralisée de la gencive avec des papilles interdentaires nécrotiques (provoquant des pertes de tissus gingivaux), le plus souvent recouvertes de tissus fibrineux de couleur grise. Le patient présente de la fièvre, des saignements gingivaux et une halitose marquée. Figure 20 : GUNA (photographie d’A. Adolpho) Dépôt membraneux blanchâtre Papilles interdentaires nécrotiques 6.2.5.2.3 Parodontite agressive Le diagnostique de parodontite est établie par la mesure de profondeur de poche et du niveau d’attache de l’épithélium. Elle est caractérisée par des destructions tissulaires importantes et rapides (environ 2 ans). Les examens radiologiques aideront à préciser le diagnostic : des lyses osseuses de type angulaires sont spécifiques. 129 6.2.5.2.4 Parodontite ulcéro-nécrotique (99) Les signes cliniques sont identiques à ceux de la GUNA. Les ulcérations et les nécroses sont localisées aux tissus gingivaux accompagnées d’une exposition et d’une rapide destruction de l’os alvéolaire. Elle est souvent liée à des signes généraux tels que la fièvre, adénopathies cervicales et atteinte pharyngée (angine de Vincent). 6.2.5.3 Les pathologies dentaires (123) Des caries généralisées provoquant une destruction rapide de l’ensemble des couronnes dentaires sont rencontrées principalement chez les héroïnomanes. Malgré un système immunitaire affaibli, les soins bucco-dentaires invasifs pratiqués chez les personnes vivantes avec le VIH n’amènent pas plus de complications (infections secondaires ou problèmes de guérison) que dans la population générale. 6.2.5.4 Les désagréments des traitements antirétroviraux 6.2.5.4.1 La sécheresse buccale Une étude menée par Navazesh (2000) démontre la prévalence de xérostomie et d’hypo fonction des glandes salivaires très significatives dans un groupe de femmes HIV-1 positive en comparaison d’un groupe témoin séronégatif. Une expérience a mis en évidence que l’immunodépression mesurée par le taux de CD4 est corrélée avec le niveau de xérostomie (79). 130 Le syndrome sec apparaît dès la prise de ddI, d’indinavir, de ddC, de ritonavir et plus particulièrement des anti-dépresseurs. La xérostomie ou sécheresse buccale peut profondément affecter la qualité de vie des patients, interférant avec des fonctions basiques quotidiennes comme l’alimentation, la parole ou le sommeil. La réduction du volume de salive et par conséquent, la perte des propriétés anti-bactériennes, accélère l’apparition d’infection, de caries et les parodontopathies (54). Les désagréments de la xerostomie sont répertoriés dans le tableau suivant, par ordre décroissant : Sécheresse des muqueuses Lèvres sèches et craquelées Candidose orale Caries cervicales Gingivites et parodontites Dépapillation de la langue Troubles pour avaler, parler et manger Dysgueusie Tableau 7 : Les conséquences de la xérostomie chez un patient séropositif d’après un tableau selon QUISHORE en 2005 (54). 6.2.5.4.2 La dysgueusie C‘est un état caractérisé par des altérations du goût, d’intensité moyenne à sévère, y compris de flagrantes déformations de la qualité du goût. Elle est souvent associée à la prise d’indinavir, de saquinavir, de ritonavir, de l’AZT et plus rarement, du lopinavir (18). 131 6.2.6 Les soins dentaires et conduite à tenir 6.2.6.1 Les soins dentaires 6.2.6.1.1 Prévention conseils alimentaires et encouragement à l’arrêt du tabac apprentissage de la méthode de brossage prescription personnelle : brosse à dent, dentifrice fluoré, chewinggum au xylitol. Remarque : une étude a mis en évidence que le taux de salive stimulé par un chewing-gum n’était pas si différent entre des femmes séropositives et séronégatives. (79) prescription de fluorures si besoin (sous forme de gouttière, de dentifrice, ou de vernis). 6.2.6.1.2 Anesthésie 6.2.6.1.2.1 Anesthésie locale Il n’y a pas de contre-indication. 6.2.6.1.2.2 Anesthésie locorégionale Lors d’une conférence des anesthésistes en 2001, il a été prouvé que la pratique d'une anesthésie tronculaire ou endo-veineuse chez le patient VIH ne doit subir aucune réserve (95). 6.2.6.1.2.3 Le protoxyde d’azote L'effet du protoxyde d'azote sur l'hématopoïèse potentialiserait celui de l'AZT. Cette action resterait théorique et n'apparaîtrait qu'après une exposition prolongée (95). 132 6.2.6.1.3 Odontologie conservatrice - sealents dentaires pour les enfants - pas de différences pour les restaurations conservatrices ou prothétiques avec un patient sain (3). Une étude américaine (J.A.PHELAN et coll, 2004) montre qu’il n’y a aucune prédisposition à la carie chez des femmes séropositives par rapport à un groupe témoin séronégatif. L’apparition de caries cervicales se fait en fonction de l’âge, du tabagisme et de la réduction de la salive. Aussi les traitements antirétroviraux sont présentés ici comme n’étant pas un facteur de risque pour les caries dentaires (92). 6.2.6.1.4 Endodontie 6.2.6.1.4.1 Dent non infectée Dans un rapport de décembre 2000, l’Institut National Américaine des Recherches Craniofaciales et dentaires (NIDCR) et l’agence pour les recherches et la qualité des soins (AHRQ) ont réuni le très peu d’articles relatant les études sur d’éventuelles complications d’actes invasifs dentaires auprès de personnes HIV positives. Seule une étude a démontré qu’un patient HIV+ sur 48 a présenté une douleur et une suppuration dans les 3 mois qui ont suivi le traitement canalaire. Il a suivi un débridement local et aucune autre complication n’est apparue. Aussi une étude a démontré qu’aucune complication associée à un traitement endodontique n’apparaissait sur des patients infectés qu’ils reçoivent ou non une antibioprophylaxie. → Antibioprophylaxie seulement en cas : de neutropénie sévère de risque d’endocardite infectieuse. Cf § 6.2.4.2.1 133 6.2.6.1.4.2 Dent infectée Le traitement canalaire se fera comme à un sujet sain : antibiothérapie (amoxicilline, métronidazole ou amoxicilline /acide clavulanique. - Clamoxyl® 500mg: 1 gélule matin, midi et soir pendant 5 jours - Birodogyl® : 1 gélule lmatin et soir pendant 6 jours - Augmentin® : 1 comprimé matin et soir pendant 6 jours 6.2.6.2 Les soins parodontaux 6.2.6.2.1 Erythème linéaire gingival (113) - détartrage et polissage - prescription de bain de bouche chlorhexidine 0,12% 2-3 fois par jours pendant 2 semaines - conseil hygiène oral et apprentissage 6.2.6.2.2 Gingivite (idem sujet sain) - détartrage et polissage - prescription de bain de bouche chlorhexidine 0,12%, 2-3 fois par jour, pendant 2 semaines. - Conseils d’hygiène et motivation. 134 6.2.6.2.3 GUNA et PUNA (idem sujet sain) Au premier rendez-vous: (4) - détersion des débris superficiels pseudomembraneux à l’aide de boulettes de coton imbibées d’eau oxygénée à 30 volumes, suivi d’un rinçage de cette zone à l’eau tiède. - un détartrage superficiel supra-gingival (attention saignement important) - prescription : antiseptiques : une solution à 50% d’eau oxygénée et 50% d’eau chaude en bain de bouche pendant 2 minutes deux fois par jours, ainsi qu’une solution de chlorhexidine (0,12%) en rinçage biquotidien durant 1 minute. Metronidazole (Flagyl®) 4 fois 250mg par jour pendant 5 jours (attention effet antabuse si alcoolisme) - Ibuprofène (Advil®) 800mg 3 fois par jour en cas de douleur Enseignement à l’hygiène : conseiller brosse extra-souple 15/100 voire 7/100 Deuxième rendez-vous : J+3-4 (20) - vérifier le contrôle de plaque - terminer le détartrage et surfaçage d’une façon plus approfondie sous anesthésie locale - effectuer un nettoyage à la Bétadine 135 6.2.6.2.4 Parodontite chronique (idem sujet sain)(20) Premier rendez-vous: - enseignement du contrôle de plaque et prescription d’une ordonnance spécialisée - détartrage et polissage - Deuxième rendez-vous J+7 - réévaluation du contrôle de plaque et motivation Deuxième séance : détartrage (voire sous gingival) : finition Autres rendez-vous : faire bilan radiologique et évaluer si nécessité de surfaçage. 6.2.6.3 Les soins chirurgicaux Des complications peuvent survenir après des actes dentaires chez n’importe quel patient en bonne santé. D’après les quelques articles scientifiques publiés, personne n’a pu démontrer que le statut HIV des patients augmente le risque de complications suite à des chirurgies orales (57). Une étude menée en 2002 a réuni la faible littérature publiée jusqu’à nos jours sur les quelques complications de chirurgie orale chez des patients HIV. Elle a ensuite démontré que les articles ne relataient que des cas isolés et ne constituaient en rien une généralité. Aussi conclue t-elle que la bibliographie scientifique publiée ne pouvait mettre en évidence une possible augmentation des risques lors d’actes invasifs oraux avec le statut HIV de patients (87). 136 6.2.6.3.1 Ce qui faut savoir pour toute chirurgie dentaire 6.2.6.3.1.1 Précautions à l’égard des troubles de l’hémostase et de la coagulation (100) En raison des risques de thrombocytopénie et/ou de thrombopathie ainsi que les troubles hépatiques associés, il faut impérativement demander : - le nombre de plaquettes - le temps de saignement (TS) - le taux de prothrombine (TP) 6.2.6.3.1.1.1 Le nombre de plaquettes sanguines - RAS > 50 000 plaquettes/mm³ - si 20 000< >50 000 : prescription d’une corticothérapie (Cortancyl®) à la posologie de 3 fois 20mg/j pendant 3 jours (à commencer 2 jours avant). Elle permet d’obtenir une augmentation du taux de plaquettes chez deux tiers des patients. - si < 20 000 : s’abstenir 6.2.6.3.1.1.2 TP/TC: les temps de prothrombine et de céphaline activée - si le TP est normal (70 à 100 % du témoin, INR voisin de 1), les actes chirurgicaux pourront être envisagés selon les protocoles habituels. - Si le TP est anormal (INR supérieur ou égal à 1,5), les actes chirurgicaux seront différés et envisagés après consultation du médecin traitant. 6.2.6.3.1.1.3 TS: le temps de saignement - normal (t = 5 à 10 mn) : les actes chirurgicaux pourront être réalisés selon les protocoles habituels. - Si le TS allongé et selon le bilan global (TP, TCA), toute procédure sera remise ultérieurement jusqu’à entretien avec le médecin traitant qui, après réévaluation et obtention des informations concernant la nature des actes envisagés, donnera son avis. 137 6.2.6.3.1.2 Précautions à l’égard du risque infectieux Ces précautions s’adressent plus particulièrement aux patients ARC et SIDA. Elles reposent sur l’introduction d’une antibioprophylaxie anti-infectieuse. Aujourd’hui, aucun consensus n’a pu établir un protocole de base en ce qui concerne le choix de l’antibiotique et sa prescription, aussi est-il de mise de pratiquer l’antibioprophylaxie selon les principes généraux admis pour un patient sain. Ce sont les mêmes germes qui sont en cause il n’y a donc pas lieu de modifier les antibiotiques sauf en cas d’interaction. Regarder le nombre de PNN si >500/mm³ : RAS si <500/mm³ : antibiothérapie est recommandée (55) 138 6.2.6.3.1.3 Précautions à prendre dans le cadre de l’anesthésie Il n’y a pas de précaution particulière si ce n’est un usage prudent du matériel afin d’éviter toute contamination accidentelle par effraction tissulaire. 6.2.6.3.2 Les avulsions dentaires → Avant toute extraction : faire un bain de bouche (chlorhexidine) et continuer pendant une semaine après l’extraction. Les complications : Les principales complications post-extractionnelles résident essentiellement dans les retards de cicatrisation, les alvéolites, les surinfections. Mais heureusement, ces complications sont rares et peu sévères: Elles peuvent être appréhendées comme pour un patient sain (26). Une étude a démontré que la fréquence des complications augmentait avec le niveau plus sévère de la maladie (27). 6.2.6.3.3 Les implants Bien qu’il n’y ait que relativement peu d’études faites sur les effets des implants sur les séropositifs, il apparaît que la pose d’implant se révèle être un succès pour beaucoup de patients concernés. Les experts ont même suggéré qu’il n’y a aucune différence quant au taux de complications post chirurgicales ou d’ostéointégration par rapport à un patient sain (57). 6.2.6.3.4 La chirurgie apicale L’incidence des complications de la chirurgie endodontique chez des patients HIV est similaire à celle rapportée de la population générale. Par conséquence, il est suggéré de n’apporter aucune autre précaution et la prophylaxie antibiotique et anti-inflammatoire n’est pas recommandée (57). 139 6.2.6.4 Les soins des lésions de muqueuses et des pathologies cutanées 6.2.6.4.1 La xérostomie(123) - Des agents lubrifiants sous forme de gels, de bains de bouche et de dentifrices peuvent soulager les désagréments du manque de salive avec des résultats plus ou moins efficaces. - Conseiller de sucer des friandises et des chewing-gums sans sucre sans oublier toujours bien s’hydratater. - Une hygiène orale méticuleuse. - Des examens dentaires réguliers - La salive artificielle sous prescription (non remboursée) est aussi à notre disposition. Deux molécules utilisent des agents cholinergiques qui stimulent la sécrétion des glandes salivaires: la pilocarpine et la cevimeline : (54) Pilocarpine : agoniste parasympathique des récepteurs muscarinique M3 à acétylcholine. Posologie : 5 à 10 mg 3 fois par jour (comprimé de 5mg) Cevimeline : analogue de l’acétylcholine pour les récepteurs muscarinique. Posologie: 30 mg 3 fois par jour 6.2.6.4.2 Candidose buccale et bucco-pharyngée : bain de bouche (chlorhexidine) médication antifongique (54) 140 Thérapeutiques antifongiques agent dosage adulte enfant 3 fois/j pdt 2 sem 2 à 5 MU, 4 à 6 fois/j Fluconazole 50 mg/j pdt 2 sem 3 à 5 ml, 4 à 6 fois/j Itraconazole 100 mg/j pdt 2 sem 100 mg/j (>3ans) Topique Suspension buvable de nystatine Application topique (Nystatine ou amphotéricine) Systémique ketonazole 5 à 10 mg/kg/j Tableau 8 : Les prescriptions face aux candidoses d’après le HIV clinician special dental issu, mars 2005. ATTENTION : → Il ne faut jamais associer les prescriptions de médicaments topiques et le systémique Le rapport Delfraissy préconise dans les formes sévères ou à rechutes fréquentes : fluconazole (Triflucan®) : 100mg/j en une prise. 141 6.2.6.4.3 Chéilite angulaire Traitement par agent topique antifongique directement appliqué sur les aires concernées 4 fois par jours pendant 2 semaines. 6.2.6.4.4 Aphtes ulcéreux ou aphtose (113) - - Topiques : dexaméthasone elixir 0,5mg/5ml en gargarisme d’une minute. chorhexidine Systémique : Prednisone Colchicine Thalidomine : 100 mg pendant 2 semaines puis 100 mg tous les 5 jours ou 50 mg/ pendant 8 jours. (Seulement si l’application de corticoïdes reste sans effet) - Antalgiques topiques ou systémiques pour soulager la douleur. 6.2.6.4.5 Angiomatose épithéliale bacillaire (99) Ressemble au sarcome de Kaposi, représentée par des plaques ou des nodules rouges pouvant secondairement diffuser au niveau de la muqueuse buccale. Le traitement repose sur : - Erythromycine 500 mg 4 fois/j - Doxicycline (100 mg 2 fois/j) 142 6.2.6.4.6 Leucoplasie chevelue(112) Lésion qui ne disparaît pas avec les bains de bouche → Diagnostic différentiel : candidose, carcinome desquamatif, lichen plan : confirmé par une biopsie → Traitement : Aucun traitement nécessaire et motivation à l’hygiène → Si test non valide : en attente, aciclovir 800 mg 5 fois/j pendant 1-2 semaines jusqu’à disparition des symptômes. 6.2.6.4.7 Stomatite herpétique - topique oral : Aciclovir (Zovirax®) 200 mg 5 fois par jour pendant 5 jours - systémique : CD4> 200/ml : valaciclovir (Zelitrex®) 500mg 2 fois /j) CD4 <200/ml en IV : aciclovir (Rapport Delfraissy 2004) 6.2.6.4.8 Sarcome de Kaposi - Chez un patient non traité, l’instauration d’un traitement antirétroviral constitue le traitement de fond de la maladie de Kaposi, avec une amélioration totale à terme (entre 3 et 6 mois). - Sur le plan cutané, les thérapeutiques sont locales : cryothérapie, laser, bléomycine, chimiothérapie intralésionnelle ou acide rétinoïque en gel (Panretin®) (22). - Si les lésions de la cavité buccale sont très étendues et gênent la mastication, il faut procéder à une exérèse chirurgicale (25). 143 6.2.6.5 Les prescriptions odontologiques 6.2.6.5.1 Rappels pharmacocinétiques et antirétroviraux Les caractéristiques de la ddI, ddC et la d4T sont peu favorables aux interactions d'ordre pharmacocinétique : fixation aux protéines plasmatiques négligeable, pas ou peu de métabolisme hépatique ; en revanche, l'élimination urinaire est importante. En revanche, l'élimination de l'AZT par glucuroconjugaison conduit à un certain nombre d'interactions médicamenteuses. De plus, les interactions d'ordre pharmacodynamique mettent en jeu des mécanismes synergiques ou antagonistes au niveau des sites d'action, qui peuvent majorer ou minimiser les effets secondaires des antirétroviraux. 6.2.6.5.2 Les interactions (130) - Paracétamol : Bien que le paracétamol et l'AZT soient éliminés par glucuroconjugaison, il n'existe pas d'interaction pharmacocinétique entre ces deux substances (95). - Autres antipyrétiques et analgésiques : Il n'existe pas de travaux démontrant le risque de myélosuppression en cas d'utilisation combinée d'aspirine et d'AZT. Les effets combinés de l'ibuprofène (400 mg toutes les 6 heures) et de l'AZT (100-200 mg cinq fois par jour) sur la tendance aux saignements, les fonctions plaquettaires et la pharmacocinétique de ces deux drogues ont été étudiées dans un groupe de patients hémophiles masculins infectés par le VIH. La tendance aux saignements augmente chez 30 % des patients après une prise prolongée d'ibuprofène et d'AZT. - Les antibiotiques : Les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse nevirapine et la delavirdine (NNRTI) ont des effets secondaires tel un rash cutané sévère. L’utilisation d’augmentin® et d’antibiotique combiné contenant de l’acide 144 clavulanique durant la période initiale de traitement avec les NNRTI augmenterait l’incidence du rash (42). - Les sédatifs: o en intraveineuse : L’indinavir et le ritonavir interagit avec les imidazoles en augmentant la profondeur et la durée de la sédation. Le ritonavir semblerait provoquer les mêmes caractéristiques avec le diazépam. o sédation orale : les faibles doses de témazepam réduisent les effets cités précédemment. Ainsi aucune contre-indication n’a été révélée. - Les antifongiques : Le fluconazole inhibe la glucuroconjugaison de l'AZT. 6.2.6.5.3 En cas de doute - En cas de doute pour toute prescription, le praticien devra contacter le médecin traitant pour savoir si le traitement en cours présenterait des contre indications avec l’ordonnance odontologique. 6.3 - consulter le VIDAL - les sites internet sur les interactions : - http://hivinsite.uesf.edu/insite - http://www.hiv-druginteractions.org/new_home_2004.asp Le patient n’a pas avoué initialement sa séropositivité mais le dit a posteriori. Cela ne change rien. Seulement, un soin dentaire invasif, aurait pu lui déclencher un risque infectieux. L’intérêt de notre fiche clinique et l’interrogatoire signé prend toute son importance en cas de litige. Penser aux précautions universelles pour les séances ultérieures 145 6.4 6.4.1 Conduite à tenir chez un soignant en cas d’accident avec exposition au sang Rappels Il est rappelé que depuis 1984, dans le monde, 79 cas de séroconversion prouvée après accident professionnel, ont été rapportés chez des professionnels de santé : 73 par piqûres ou blessures, 6 par projection cutanéo-muqueuse. Le risque de transmission professionnelle du VIH avec du sang contaminé par une exposition transcutanée est évalué à approximativement 0,3% alors que le risque associé à une exposition d’une muqueuse est évalué à 0,009% et que celui d’une exposition par la peau est encore plus faible. Une exposition professionnelle par un contact avec du sang ou un liquide contaminé par le VIH, lors : - d’une piqûre avec une aiguille - d‘une coupure avec un objet tranchant - d’un contact avec du sang ou du liquide contaminé, sur une plaie, une peau non intacte, une muqueuse. Le risque de transmission est évalué à : - 0,32 % après une exposition percutanée - 0,03 % après une projection sur peau lésée ou sur la muqueuse Le risque de transmission est directement lié à : - la profondeur de la blessure 146 - l’utilisation d’une aiguille creuse contenant du sang et ayant été utilisée en intraveineux ou intra-artériel direct. - 6.4.2 la charge virale du patient source. Transmission patient – chirurgien-dentiste (94) Les blessures sont fréquentes chez les dentistes et le personnel dentaire. Elles consistent principalement en éclaboussures dans les yeux, en blessures par les fraises et autres instruments tranchants ainsi qu’en ponction avec des aiguilles (27). Compte tenu de leurs contacts fréquents avec le sang et la salive potentiellement contaminés les dentistes ont été considérés comme des sentinelles des infections professionnelles au virus de l’hépatite B. Par contre, contrairement à ce virus, des analyses ont montré que le VIH est rarement détecté dans la salive des patients infectés, et quand il est détecté, sa concentration est beaucoup plus faible que celle habituellement trouvée dans le sang contaminé (44) La contamination professionnelle se ferait chez le dentiste non par contact avec la salive, mais par exposition à du sang contaminé par le VIH, tout comme chez les autres acteurs de la santé. 6.4.3 Conduite à tenir en urgence : fiche technique de la médecine du travail (tableau 9 p : 143) 6.4.3.1 Nettoyage de la plaie Après piqûre ou blessure cutanée, - Nettoyer immédiatement la plaie à l’eau courante et au savon - Rincer 147 - Réaliser une antisepsie avec un soluté de Dakin ou eau de javel à 12° diluée au 1/10e ou à défaut à l’alcool à 70° ou Bétadine en solution dermique, en assurant un contact d’au moins 5 minutes. 148 En cas de projection sur les muqueuses - rincer abondamment de préférence au sérum physiologique, sinon à l’eau pendant 5 minutes. 6.4.3.2 Consulter la médecine du travail ou les urgences Consultation dans les 4 heures suivant l’accident, pour évaluer le risque infectieux, une éventuelle prescription anti-rétrovirale et des prélèvements sérologiques initiaux. - Il faut aussi penser à faire une déclaration d’accident de travail. Ceci doit se faire dans les 48h, selon les procédures de l’établissement. - Une prise en charge administrative - Une prise en charge par la médecine du travail - Mise en oeuvre des assurances 6.4.3.2.1 Evaluation du risque infectieux - évaluation de la sévérité de l’exposition Plus la blessure est profonde, plus le risque de contamination est élevé. Les aiguilles creuses contenant du sang sont les plus dangereuses. - Les piqûres avec aiguilles sous-cutanées ou intramusculaires, aiguille à sutures, piqûres à travers des gants, projections cutanéo-muqueuses, présentent un risque moindre de contamination. 6.4.3.2.2 Nature du liquide biologique responsable : seul le sang est à l’origine des cas de contamination professionnelle. 149 6.4.3.2.3 Statut sérologique du patient source (37) - - si la personne source est connue comme infectée par le VIH : rechercher les traitements antérieurs le niveau immunitaire la charge virale Si le statut sérologique de la personne source est inconnu, il est capital avec l’accord de celle-ci de le rechercher : Le médecin responsable prescrit en urgence une sérologie pour le VIH, VHC et VHB. 150 Tableau 9 : CAT en cas d’exposant au sang, médecine du travail CHU Nantes 2001 151 6.4.3.3 Prise en charge Selon la circulaire DGS/DH/DRT/DSS n° 98/338 du 9 avril 1998 relative aux recommandations de mise en œuvre d'un traitement antirétroviral après exposition au risque de transmission du VIH 6.4.3.3.1 Mise en œuvre d’un traitement Les indications de traitement : - la personne source est atteinte d’une affection VIH ou appartient à un groupe à forte prévalence. - La pratique exposante comporte un risque réel. Nature de Malade sida ou Malade non sida l’exposition charge virale VIH+ ou charge élevée virale faible Dominante1 recommandée Intermédiaire 2 recommandée Petite3 Possible recommandée Possible Non conseillée 1. Piqûre profonde, dispositif intravasculaire, aiguille de gros calibre. 2. Coupure avec un bistouri à travers des gants. 3. Blessure superficielle avec aiguille pleine ou de petit calibre. Tableau 10: Indications du traitement prophylactique en fonction de la nature de l'accident d'exposition au sang. D’après .POURRIAT, 2001. (95) 152 La mise en place : Un traitement anti-rétroviral après exposition doit être envisagé dans les quatre premières heures et au plus tard dans les 48 heures suivant l’exposition au risque (37). Le Protocole : Un traitement puissant est recommandé en général une trithérapie (133) - Combivir (AZT/zidovudine + 3TC/lamivudine): 1 Cp matin et soir. Indifféremment par rapport aux repas - Viracept (nelfinavir): 5 cp matin et soir ou 3 cp à 250 mg matin, midi et soir Informations : Dans tous les cas, le médecin devra présenter aux patients les informations relatives aux risques d’échec malgré le traitement, aux risques d’effets secondaires des traitements, à l’importance de l’observance et à l’intérêt de la prévention dans la protection contre le VIH à adopter pendant les 6 mois de suivi jusqu’aux résultats finaux. → Le patient peut refuser la prophylaxie : un consentement signé n’est pas nécessaire. 6.4.3.3.2 Surveillance sérologique sans traitement A J0, une prise de sang est alors réalisée pour détecter des anticorps anti-VIH, faire une sérologie anti-VHC, anti-VHB. Puis une surveillance sérologique sera indispensable : à 15 jours, à 1 mois, 2 mois, 3 mois, à 4 mois, à 6 mois et 12 mois (Cf tableau 13 page 143). 153 6.4.3.4 Consultation ultérieure. Toutes les personnes exposées, traitées ou non seront adressées en consultation à un médecin référent qui les recevra dans les 48h pour réévaluer la nature de l’accident et pour discuter de la poursuite ou non du traitement initial (66). Le suivi sérologique sera réalisé par le Médecin du travail 154 Tableau 11: Le suivi sérologique après AES du service Médecine et Santé du travail CHU Nantes- juin 2005.) 155 LES POINTS DE REPERE → Connaître les manifestations buccales et péribuccales du SIDA : - Primo-infection : Adénopathies, éruption cutanée, candidose buccale et ulcérations buccales. - Infection chronique (> 200/mm³) : Parodontopathies, dermite séborrhéiques de la face, candidoses, folliculite, furoncle, anthrax, verrues, condylomes, leucoplasie chevelue des bords latéraux de la langue, syndrome sec, parotidite… - stade de SIDA déclaré : apparition des manifestations infectieuses sévères, tumeur de Kaposi, candidose bucco-pharyngée, herpes, syphilis buccales, zona…. → Tout acte dentaire chez un patient HIV+ est similaire à celui délivré chez un patient sain. Aussi avant tout soin, il faut impérativement demander les constantes biologiques (datant de moins de 6 mois) car se pose la question de l’antibioprophylaxie dès que les polynucléaires <500/mm³. → En cas d’AES graves : il est indispensable de débuter un traitement anti-rétroviral dans les 4 heures qui suivent l’exposition. LES RECOMMANDATIONS : • L’interrogatoire médical doit inclure : - le taux de CD4, - la charge virale, - le nombre de PNN - les plaquettes - la liste des traitements. 156 • Tout acte chirurgical : - doit impérativement se dérouler comme le moins traumatisant possible, limitant les saignements. - est impossible si : * le taux d’hémoglobine est inférieur à 7.0g/dl, * un temps de saignement augmenté (>9 minutes). → TOUJOURS : Exploration des constantes biologiques. - Une extraction dentaire doit être retardée si le taux de plaquettes est < 50 000/ml et le temps de saignement augmenté. • Si le taux de CD4 est < 350/mm³, l’antibioprophylaxie ou thérapie est à instaurer en accord avec le médecin traitant. • Les antibiotiques doivent être judicieusement prescrit pour un séropositif. La décision d’introduire des antibiotiques doit se faire selon le jugement du praticien. Une antibioprophylaxie de routine est contre-indiquée. • Le traitement des lésions péri apicales doit être précoce pour éviter l’aggravation rapide dans les stades avancés de la maladie. 157 7 ETUDE DE LA FREQUENCE DES ANOMALIES BIOLOGIQUES DANS LA POPULATION VIH DU CISIH DE NANTES 7.1 Les conditions de l’étude Lors de cette étude, tous les patients suivis au CISIH de Nantes ainsi que leurs constantes biologiques (le nombre de plaquettes, le taux d’hémoglobine, le taux de CD4 et le nombre de polynucléaires neutrophiles) ont été répertoriés en avril 2005. Tous ces patients sont ou non sous traitement antirétroviraux et peuvent parfois être co-infectés avec le VHC, VHB ou autres…. 7.2 Les objectifs L’étude a pour objectif de mettre en évidence les anomalies biologiques les plus fréquentes auprès des patients infectés par le VIH, lesquelles auraient des répercutions sur les actes dentaires et impliqueraient impérativement des précautions à prendre avant d’engager les soins. 7.3 Les résultats Lors de cette étude, sur les 1000 personnes répertoriées, 76 patients présentent un taux de CD4<200/mm³. Parmi ces derniers, aucun ne possède un nombre de polynucléaires neutrophiles inférieurs à 500/mm³. Sachant que le risque bactérien est cliniquement significatif pour des PNN en dessous de 500/mm³. 158 Aussi, en se référant aux données médicales de la population étudiée, il n’y a aucun des patients qui possèdent un réel risque bactérien lors de soins dentaires. C’est-à-dire un risque de bactériémie suite aux soins dentaires, avec un système immunitaire est inefficace. Leur taux de CD4 < 200/ml signifie que les maladies opportunistes vont se développer. Lors de l’évaluation du risque hémorragique, l’étude reflète que seules 4 personnes détiennent un taux de plaquettes inférieur à 50 000/ml soit 0,4%, ceci montrant une thrombopénie sévère et un risque hémorragique modéré. De même, dans 0,1% des cas, le taux d’hémoglobine se retrouve inférieur à 10g/ml. 7.4 Conclusion de cette étude La prise en charge de l’infection par le VIH est désormais celle d’une maladie au long cours sous traitement. Le praticien est donc amené à voir au cabinet dentaire des patients infectés par le VIH. Les patients suivis à l’hôpital, par cette étude, démontre que la fréquence des anomalies biologiques interférant avec le geste de soin dentaire n’est que minime. Aussi seuls 0,5% des patients présentent un risque réel d’hémorragie sévère mais aucun ne nécessite une antibioprophylaxie/thérapie car le risque bactérien est nul. Aussi le rapport de cette étude porte essentiellement sur l’aspect des contre-indications relatives ou absolues de soins dentaires chez les séropositifs. Au-delà de ces cas isolés, il n’y a aucun frein à délivrer des soins dentaires et stomatologiques aux patients. Il suffit de recueillir toutes les informations nécessaires en interrogeant leurs médecins traitants ainsi que leurs dossiers cliniques. 159 8 CONCLUSION Le sida est une maladie traitée au long cours. La mise à disposition des moyens thérapeutiques actuels associant les effets bénéfiques de plusieurs molécules (multithérapie) allonge l’espérance de vie des séropositifs. Pourtant, reste encore à élaborer un vaccin efficace afin d’éradiquer le virus et guérir de cette maladie. De plus, malgré les campagnes de prévention, le nombre de personnes infectées en France continue d’augmenter. Aussi, les chirurgiens-dentistes sont amenés à soigner des séropositifs puisque des pathologies bucco-dentaires spécifiques du virus ou non, sont très fréquentes et parfois même, représentent les premiers signes de l’infection à VIH : les chirurgiens-dentistes jouent un rôle prépondérant dans le dépistage de nouveaux cas. Le virus a la particularité de s’attaquer à l’un des composants essentiels du système immunitaire, les lymphocytes T. Aussi, pouvait-on s’inquiéter d’un risque infectieux lors de la prise en charge au fauteuil des patients séropositifs, préférant ainsi transférer les patients vers des structures hospitalières où la coordination des services dentaires avec les services spécialisés du sida est optimale. Cependant, l’étude, menée auprès du CISIH de Nantes, montre que les anomalies biologiques associées au VIH ne représentent pas des contre-indications aux soins dentaires délivrés en cabinet libéral. Il suffit d’une coordination avec le médecin traitant et d’un interrogatoire clinique type avec des examens biologiques à jour. Ceci orientera les éventuelles prescriptions préopératoires, mais ne modifie en rien le geste thérapeutique habituel. Il s’agit, comme un patient sain, de prendre les précautions universelles, d’autant plus que tout patient, se croyant séronégatif, ne connait pas véritablement statut sérologique. Aussi peut-on s’interroger sur l’accord au chirurgien–dentiste de prescrire une recherche sérologique HIV chez un de ses patients, en cas de doute. Aujourd’hui, il ne peut qu’orienter son patient vers un généraliste. 160 9 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. ALCAM J. Advances in the immunopathogenesis of HIV infection. 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Adolpho. .....................................................................................................................124 Figure 13 : Herpes labial récurrent : photographie d’A. Adolpho. .............................................124 .................................................................................................................................124 Figure 14 : chancre de syphilis au bord latéral de la langue ...................................................125 Figure 15 : plaques syphilitiques de la face interne des joues .................................................125 180 Figure 16 : hypertrophie de la glande parotidienne chez une enfant VIH (photographie d’A.Adolpho) ................................................................................................................................126 Figure 17 : Leucoplasie de la langue (photographie d’A. Alphonso) .........................................126 Figure 18 : Sarcome de Kaposi (photographies d’A.Alphonso) ...............................................127 Figure 19 : Gingivite et VIH (photographie d’A. Adolpho) .......................................................128 Figure 20 : GUNA (photographie d’A. Adolpho) ..................................................................129 Tableau 7 : Les conséquences de la xérostomie chez un patient séropositif d’après un tableau issu du HIV Clinician, Special Dental Issue, en mars 2005 (52). ........................................................131 Tableau 8 : Les prescriptions face aux candidoses d’après le HIV clinician special dental issu, mars 2005. .........................................................................................................................141 Tableau 9 : CAT en cas d’exposant au sang, médecine du travail CHU Nantes 2001 ..................151 Tableau 10: Indications du traitement prophylactique en fonction de la nature de l'accident d'exposition au sang. D’après le rapport J.L.Pourriat,(93)......................................................................152 Tableau 11: Le suivi sérologique après AES du service Médecine et Santé du travail CHU Nantes- juin 2005.) ........................................................................................................................155 181 11 Droits de diffusion d’image : De: "Adolfo Arthur" <[email protected]> À: "'bouvier adeline'" <[email protected]> Objet: RE: SPAM-MED: Date: Fri, 25 Nov 2005 20:19:51 -0400 Hello miss adeline, You have my authorization to use the graphics and information on the Internet. I would appreciate that you notice me when you finish your thesis and your lieflet so that you could send me one. One of my daughters knows French, she once lived in France, and she is also a dentist. Sincerely Dr. Adolfo Arthur 182 N° BOUVIER (Adeline).-Prise en charge thérapeutique du patient HIV+.- 195 f. ;ill. ;tabl. ; 134 ref ; 30cm - (Thèse: Chir dent.: Nantes ; 2005). A ce jour, le SIDA est considéré par les spécialistes comme une maladie chronique, avec une espérance de vie qui ne cesse de s’accroitre. En conséquence, tout chirurgiendentiste peut s’attendre à soigner des séropositifs à son cabinet. Des pathologies buccodentaires spécifiques du virus ou non représentent parfois les premiers signes de l’infection à VIH. Le praticien joue donc un rôle prépondérant dans le dépistage de nouveaux cas. Le virus s’attaquant au système immunitaire, on peut s’inquiéter d’un risque infectieux lors de soins dentaires chez les séropositifs. La prise en charge globale d’un patient atteint par le VIH doit se faire en étroite collaboration avec le médecin traitant. Le praticien devra alors réaliser un examen clinique minutieux complété d’examens biologiques, et adapter ses thérapeutiques au cas par cas. Rubrique de classement : Chirurgie bucco-dentaire Domaine Bibliodent : Pathologie Mots clés : HIV - Soins dentaires - Chirurgie buccale - Accident de travail - Parodontite MeSH : HIV - Dental care - Surgery oral - Accident occupational - Periodontitis Mots clés bibliodent: virus HIV – soins préopératoires – chirurgie dentaire – parodontopathie – odontologie conservatrice Jury : Président : Monsieur le Professeur O.Laboux Assesseur : Monsieur le Professeur A. Jean Assesseur : Mademoiselle le Docteur V.Armengol Directeurs : Monsieur le Docteur G.Amador Del Valle Monsieur le Docteur E.Billaud Adresse de l’auteur :6 allée du Niger 31000 Toulouse 183