Rayon spectral, quotient de Rayleigh, norme subordonnée de la norme k.k2 28 mai 2012 Dans tout ce qui suit : • K désignera l’un des corps R des nombres réels ou C des nombres complexes (limites des programmes des classes préparatoires). • n est un entier naturel non nul et Nn = {k ∈ N/1 ≤ k ≤ n} • Toutes les matrices carré sont de taille n et à coefficients dans K • Si besoin est on notera (A)i j le terme de la matrice A de la i emme ligne et la j emme colonne. • On rappelle donc que si A et B sont deux matrices carrées de taille n alors , pour tout (i, j) ∈ N2n on a , : n (AB)i j = ∑ (A)ik (B)k j k=1 • On aura besoin une fois de parler de Mn,p (K) , auquel cas p est un entier naturel non nul • E désignera le K− espace vectoriel Mn,1 (K) de dimension n des matrice à une seule colonne et n lignes et à coefficients dans K. 1 1.1 Quotient de Rayleigh, norme subordonnée de la norme ||.||2 Quelques definitions et propositions préliminaires Soit A ∈ Mn,p (K). La matrice A∗ tel que pour tout (i, j) ∈ N2n , (A∗ )i j = (A) ji , ce qui veut dire que : A∗ = t A s’appelle la matrice adjointe de A. Si n = p, la matrice carrée A est hermitienne si elle est égale à sa matrice adjointe. on dit qu’une matrice U est unitaire si elle est inversible d’inverse son adjointe. On dit q’une matrice U est normale si UU ∗ = U ∗U c’est-à-dire elle commute avec sa matrice adjointe. Soit A une matrice carrée à coefficients complexe et Sp(A) le spectre de A. On appelle rayon spectral de A le nombre réel positif ρ(A) = sup{|λ |/λ ∈ Sp(A)}. Proposition 1 Si une matrice A ∈ M (C) est à la fois triangulaire et normale alors elle est diagonale Corollaire 1 Toute matrice M ∈ Mn (C) est trigonalisable via une matrice unitaire, c’est-à-dire il existe U unitaire et T triangulaire supérieure tel que M = UTU ∗ Corollaire 2 Pour toute matrice hermitienne M il existe une matrice ∆ diagonale réelle et une matrice unitaire U tel que M = U∆U ∗ . unitaire. 1.2 Quotient de Rayleigh : Definition, quelques propriètés Dans cette section E = mcmn,1 (C) est muni de son produit scalaire usuel, c’est-à-dire que pour X,Y ∈ E, on a : hX,Y i = X ∗Y = n ∑ xk yk k=1 On note k.k2 la norme euclidienne associée à ce produit scalaire. A est une matrice carrée complexe hermitienne. Proposition 2 Pour tout X ∈ E on a : hAX, Xi est un nombre réel 1 Preuve : il suffit de montrer qu’il est égal à son conjugué : a = hAX, Xi = (AX)∗ X = X ∗ A∗ X donc et compte tenu que a ∈ C donc : a = a∗ , on a : a = a∗ = (X ∗ A∗ X)∗ = X ∗ AX = X ∗ A∗ X = a en effet A∗ = A car A est supposée hermitienne. Definition 1 L’application RA de E\{O} vers R définie par RA (X) = hAX, Xi est appelée quotient de Rayleigh kXk2 associé à la matrice hermitienne A Lemme 1 Soit Ω = E\{O} alors Ω est un ouvert connexe par arc de l’espace vectoriel normé (E, k.k2 ) Preuve : Ω est un ouvert car {O} est un fermé. Soit (X,Y ) ∈ ω 2 , démontrons qu’il existe un chemin continue γ qui lie X et Y : • Premier cas : Si O ∈ / [X,Y ] c’est terminé car γ : [0, 1] → U tel que ∀t ∈ [0, 1] γ(t) = (1 −t)X +tY convient. • Deuxième cas : O ∈ [X,Y ] alors il existe un nombre réelle non nul α tel que Y = αX. On va montrer que O 6∈ [X, iX] et O 6∈ [iX,Y ]. En effet : si O ∈ [X, iX] , on aurait : ∃t ∈ [0, 1] O = (1 − t)X + tiX Alors comme X 6= O on aurait : (1 − t) + it = 0, impossible car cela donne t = 1 et t = 0 De même si O ∈ [iX,Y ] et comme Y = αX on aurait pour un certain t ∈ [0, 1] : (1 − t)iX + tαX = O donc : (1 − t)i + tα = 0 donc t = 1 et αt = 0, impossible car α 6= 0 . d’après l’étude faite au premier cas, il existe un chemin continue tracé sur ω qui joigne X et iX et un autre qui joigne iX et Y Par jonction des deux chemins on en a un qui joigne X et Y , d’oùΩ est connexe par arcs. Proposition 3 L’application RA est continue sur Ω Preuve : On sait que le produit scalaire est une application bilinéaire continue de E 2 vers K (en effet E est de dimension finie et même si ce n’était pas de dimension finie on a le résultat par l’inégalité de CauchySchwarz ). L’application X 7→ AX est continue car linéaire et on est en dimension finie. L’application X 7→ kXk est continue sur Ω et ne s’y annule jamais, d’où la continuité de RA (par composition et rapport de deux fonctions continues) Remarque : On peut démontrer que RA est de classe C∞ sur Ω et que : (∀X ∈ Ω) gradRA (X) = 2 (AX − RA (X)X) kXk2 Proposition 4 Soit A ∈ Mn (C) une matrice hermitienne de valeurs propres réelles : λ1 , · · · , λn tel que : λ1 ≤ · · · ≤ λn . Alors : RA (Ω) = [λ1 , λn ]. Preuve : Remarquons tout de suite que si λ ∈ Sp(A) alors il existe X ∈ E tel que X 6= O et AX = λ X, de sorte que hAX, Xi hλ X, Xi RA (X) = = = λ . Autrement dit, toutes les valeurs propres de A sont atteintes par RA . hX, Xi kXk22 Comme la matrice A est diagonalisable via une matrice unitaire, alors E admet une base O = (ω1 , · · · , ωn ) de vecteurs propres de l’application linéaire X 7→ AX canoniquement associée à la matrice A. On numérote n n les ωi de sorte que λi est la valeur propre associée à ωi . Soit alors X = k=1 n et par suite : hAX, Xi = 2 ∑ λk |xk | k=1 n ∑ xi ωi ∈ E, alors : AX = ∑ λk xk ωk (n’oublions pas que les λk sont réels.). Comme : ∀k ∈ Nn n λ1 ≤ λk ≤ λn n on a par sommation : λ1 ∑ |xk |2 ≤ hAX, Xi ≤ λn ∑ |xk |2 et compte tenu de : kXk2 = k=1 k=1 k=1 ∑ |xk |2 on a le résultat k=1 désiré : RA (X) ∈ [λ1 , λ2 ]. Réciproquement, le lemme ci-dessus assure par continuité de RA que l’image de Ω qui est connexe par arc est un connexe par arc de R donc un intervalle dont les bornes sont λ1 et λn et y appartiennent, donc c’est exactement [λ1 , λn ]. 2 Norme subordonnée de k.k2 1.3 Definition 2 Une matrice hermitienne A est dite positive si ses valeurs propres sont positives Remarque : le rayon spectral d’une telle matrice est égal à sa plus grande valeur propre. Proposition 5 Soit M ∈ Mn (C) une matrice quelconque. La matrice M ∗ M est hermitienne positive. En particulier, on a : ∀M ∈ M2 (C) ρ(M ∗ M) = sup RM∗ M (X) X∈Ω Preuve : On a : (M ∗ M)∗ = M ∗ (M ∗ ) = M ∗ M donc elle est hermitienne. Soit λ une valeur propre de M ∗ M alors, il existe X ∈ E tel que X 6= O et M ∗ MX = λ X. On a : hM ∗ MX, Xi = λ kXk22 (car λ est réel) D’autre part : hM ∗ MX, Xi = (M ∗ MX)∗ X = X ∗ M ∗ MX = (MX)∗ MX = kMXk22 ≥ 0 donc λ ≥ 0. Conséquence : ρ(M ∗ M) = sup RM∗ M (X) X∈Ω Proposition 6 La norme subordonnée de k.k2 est définie par : ∀M ∈ Mn (C) |||M|||2 = p ρ(M ∗ M) Preuve : kMXk2 . Or : kMXk22 = h(iMX, MX) = kXk 2 X∈Ω p (MX)∗ MX = X ∗ M ∗ MX = X ∗ (M ∗ M)∗ X = (M ∗ MX)∗ X = hM ∗ MX, Xi. Par suite : |||M|||2 = sup RM∗ M (X) = X∈Ω r p ∗ ∗ sup RM M (X) = ρ(M M) , ce qu’il fallait démontrer. Par définition de la norme subordonnée, on a : |||M|||2 = sup X∈Ω 2 Rayon spectral et convergence Proposition 7 Soit ||.|| une norme sur Mn1 (K) et soit |||.||| la norme subordonnée qui lui est associée, c’est-àdire la norme sur Mn (K) définie par : (∀A ∈ Mn (K)) |||A||| = ||AX|| . X∈M (K),X6=O ||X|| sup Pour toute matrice P de taille n inversible , ||.||P définie par : (∀X ∈ Mn1 (K)) ||X||P = ||PX|| est une norme sur Mn,1 (K) dont la norme subordonnée |||.|||P est définie par : Mn (K) définie par : (∀A ∈ Mn (K)) |||A||| = |||PAP−1 ||| Preuve : Il est facile de prouver que ||.||P est une norme. Soit A ∈ Mn (K). On a : |||A|||P = ||AX||P X6=O ||X||P = ||PAX|| X6=O ||PX|| = ||PAP−1 PX|| ||PX|| X6=O = ||PAP−1Y || ||Y || Y 6=O sup sup sup sup = |||PAP−1 ||| L’avant dernière égalité est justifiée par le faite que X 7→ PX est un isomorphisme de Mn (K) donc il est légitime de dire que X parcourt Mn,1 (K) si et seulement si Y = PX fait la même chose. 3 Proposition 8 Soit D = diag(λi ) et D0 = diag(λi0 ) deux matrices diagonale. Pour toute matrice carré M = (mi j ), si M 0 = (m0i j ) = D0 MD alors m0i j = λi0 mi j λ j . Preuve : n (DM)i j = ∑ δik λk mk j = λi mi j k=1 n (MD)i j = ∑ mik δk j λ j = mi j λ j k=1 Donc : (D0 MD)i j = (D0 (MD))i j = λi0 (MD)i j = λi0 mi j λ j = λi0 λ j mi j Corollaire : Si pour t ∈ R∗ , on pose ∆t = diag(t, ...,t n ) alors pour toute matrice Mt = (mi j ) on a : (∆t )−1 M∆ a pour terme général : m0i j = t j−i mi j . Remarque : Si M est triangulaire supérieure alors alors Mt est triangulaire supérieure et lim Mt = diag(m11 , ..., mnn ) t→0 En effet : Mt est le produit de deux matrices triangulaires supérieures et pour i < j on a : lim t j−i = 0 et pour t→0 i = j on a m0ii = mii . Proposition 9 Pour toute matrice M à coefficients complexes et pour tout ε > 0 il existe une norme subordonnée ||.|| tel que ||M|| < ε + ρ(M) Preuve : Tout d’abord, notons que M est semblable à une matrice triangulaire supérieure T dont les termes diagonaux λ1 , · · · , λn sont exactement les valeurs propres de la matrice M. Disons : M = QT Q−1 avec Q ∈ GLn (C). Il existe une matrice diagonale de la forme Dt ci-dessus te que : Tt = Dt−1 T Dt et : |||Tt − ∆|||2 < ε où ∆ = diag(λ1 , · · · , λn ). On en déduit que : |||Tt |||2 ≤ |||∆|||2 + ε On a : Tt = Dt−1 T Dt = Dt−1 Q−1 T MQDt = PMP−1 avec P = Dt−1 Q−1 Tenant compte du fait que ||∆||2 = ρ(M) , on a alors : |||M|||2,P ≤ ρ(M) + ε et comme on a vu que |||.|||2,P est une norme subordonnée, le résultat de la proposition est établit. Proposition 10 Soit A ∈ Mn (C). Les quatres assertions suivantes sont équivalentes : (i) lim Ak = O k→+∞ (ii) ∀X ∈ E lim Ak X = O k→+∞ (iii) ρ(A) < 1 Preuve : (i) ⇒ (ii) : Supposons qu’on a (i) , soit k.k une norme sur E et |||.||| sa norme subordonnée sur Mn (K) alors pour tout X ∈ E, on a : |||Ak X||| ≤ |||Ak |||kXk. Or lim |||Ak ||| = 0 par continuité de |||.||| et par (i). k→+∞ d’où (ii). (ii) ⇒ (iii) : Soit λ une valeur propre de A et X un vecteur propre associé. Par (ii), on a : lim Ak X = O. n→+∞ Or Ak X = λ k X, et comme X 6= O, on a : lim λ k = 0. Donc |λ | < 1. k→+∞ (iii) ⇒ (i) : On va utiliser la proposition 9 : Prenons ε = tel que |||A||| < ρ(A) + ε = Or q = 1 − ρ(A) . Il existe une norme subordonnée |||.||| 2 1 + ρ(A) 2 1 + ρ(A) < 1 Donc pour tout k ∈ N on a : 2 |||Ak ||| ≤ |||A|||k ≤ qk et lim qk = 0. D’où (i). k→+∞ 4