Collage de textes de Nelly Arcan, Alessandro Baricco, Sofia
Brault, Marie Cardinal, Evelyne de la Chenelière, Louise Dupré,
Marie-Ève Lussier et Heiner Müller
Mise en scène de Sofia Brault et Marie-Ève Lussier
L’École supérieure de théâtre de l’UQAM présente
une production libre
Salle Marie-Gérin-Lajoie
30 avril au 3 mai 2014
DISTRIBUTION
Marie-Lou Bariteau
Pénélope Deraîche-Dallaire
Jessica Léveillée-Lemay
ÉQUIPE DE PRODUCTION
Marie-Ève Bernard
Conception sonore
Laurence Boutin-Laperrière
Scénographie
Dominic Dubé
Conception d’éclairage
Myriam Gaudreau
Direction de production
Simon Lardie
Conception vidéo
Jonathan Riverin
Assistance à la mise en scène/
dramaturgie/régie
Mots des metteures en scène/SOFIA BRAULT et MARIE-ÈVE LUSSIER
Rivages, c'est pour moi l'occasion de réécrire mon imaginaire.
Mon imaginaire est colonisé par des pièces de théâtre, des mots, des
personnages qui proviennent d'une source que personne ne connaît
mais qui a assez tari d'eau.
Hamlet, Oreste, Ulysse, Valmont, Achille, Lear, Jean, tous les Jean.
Aujourd'hui, je me venge du théâtre.
Je me venge avec amour.
Je réécris mon histoire.
Je la réécris avec des fragments, des morceaux enchevêtrés, des mots recrachés, ravalés.
Je m'abreuve d'Ève et de Margaux, je me dépose parmi les mots de Louise, j'inscris dans ma
chair la vie de Marie. J'apprivoise Nelly. Et j'arrache à Müller ses cadavres.
Je reprends le monde qui nous a donné naissance.
Je le garde dans notre écriture.
Sofia Brault
Rivages, c’est aussi fouiller dans les albums photos, retracer les
mots d’anniversaire, de Noël, de graduation, sonder les recoins de
ma mémoire.
C’est plonger dans mon histoire personnelle, celle de ma relation
avec ma mère, et me rendre compte que tant de textes d’autres
femmes y font écho. Me rendre compte que cette histoire n’est pas
qu’une histoire avec un petit « h ». C’est une grande Histoire, écla-
tée certes, mais qui concerne une multitude de femmes.
Rivages, c’est une volonté de raconter l’Histoire des femmes, de la sortir du silence dans le-
quel elle a été noyée.
Il faut dire cette longue attente des femmes sur leurs rivages.
Dire cette impatience de voir les hommes revenir de leurs périples extravagants.
Dire, enfin, cet espoir d’un jour abandonner les rivages et partir au large.
Marie-Ève Lussier
« [] Alors vous comprendrez qu’il ne me reste plus qu’à écrire, même s’il y a déjà tant de
mots alignés, tant de tentatives désespérées de se faire comprendre, tant de manières de se
faire croire qu’on a une réflexion unique alors que finalement ça tourne en rond, finalement on
gravite tous dans la même orbite de pensée […]
Quand on écrit, on a la chance d’avoir du temps pour choisir ses mots, pour être clair
et original, alors que dans la conversation courante ça va trop vite et c’est pour ça que je ne
suis pas douée pour la conversation courante qui demande un sang-froid incroyable que je n’ai
pas.
Alors vous comprendrez qu’il ne me reste qu’à écrire pour rattraper mon manque de
clarté et d’originalité dans la conversation courante, et pour ne pas rester muette devant la
démoralisation générale. Si je ne me concentrais pas sur le théâtre, peut-être que j’en viendrais
à gesticuler sur place comme une noyée, ne sachant aller ni à gauche ni à droite pour combler
les brèches innombrables, complètement dépassée, affolée par l’ampleur des choses à accom-
plir, à réparer, à consoler, indécise parce qu’il y a trop à faire pour le temps qui m’est alloué, et
alors mon corps inoccupé ne serait plus qu’une suite de sursauts rythmés par les chocs perpé-
tuels que me procure le malheur, parce que je n’arrive pas à cesser d’être effrayée par notre
tendance à nous rendre malheureux, et mes sursauts deviendraient si rapides dans la multipli-
cation de mes frayeurs qui se chevauchent, et mes gestes deviendraient si éparpillés dans leur
incapacité d’agir, que je finirais peut-être par entrer en convulsions, ce qui n’est souhaitable à
personne. Alors vous comprendrez qu’il ne me reste qu’à écrire pour ne pas entrer en convul-
sions.
Je ne pourrai jamais savoir si le théâtre est vraiment la meilleure façon d’utiliser mon
temps, si je parviens à être claire et originale, si je comble ne serait-ce qu’une petite brèche
quelque part, si mes amis aiment sincèrement ce que j’écris, si ce que j’écris vaut toutes les
heures qui me privent de mes enfants, si mon agitation théâtrale est moins vaine que des con-
vulsions dans l’espace, mais une chose est certaine, c’est que j’y mets toute ma bonne foi et
c’est la moindre des choses quand on a la chance d’être entendue. »
Evelyne de la Chenelière, 2003
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