LICENCE LM372, COURS (Ch. Peskine). Programme examen juin 2011.
R´evis´e le 23 juin!
1 Anneaux
D´efinition 1.1 Un anneau (A, +,.)est un groupe commutatif (dont la loi est not´e +et
est applel´ee addition) muni d’une deuxi`eme loi de composition interne (not´e multiplica-
tivement et appel´ee multiplication) v´erifiant les conditions suivantes.
0) Il existe un ´el´ement neutre pour la multiplication; il est not´e 1(si n´ecessaire 1A).
1) a(bc)=(ab)cpour tous a, b, c A(la multiplication est associative).
2) a(b+c)=ab +ac et (b+c)a=ba +ca pour tous a, b, c A(la multiplication est
distributive par rapport `a l’addition).
Si la multiplication est commutative, l’anneau est dit commutatif.
Deux remarques simples, mais importantes.
1) 0a= 0 pour tout aA. En eet 0a= (0 + 0)a=0a+0a, donc 0a= 0.
2) (1)a=a. En eet 0 = 0a= (1 + (1))a=a+(1)a.
3) A#={0}0#= 1. En eet, si a#= 0, on a 1a=a#= 0 = 0a.
D´efinition 1.2 Le groupe des ´el´ements inversibles (pour la multiplication) de A, not´e
U(A), est appel´e groupe des unit´es de A.
Il est important de bien comprendre pourquoi les ´el´ements inversibles (pour la mul-
tipliation) forment un groupe.
Exemples 1.3 1) Z. Alors U(Z)={1,1}.
2) un corps Kest un anneau; par exemple Q,R,C, ainsi que Z/pZ(o`u pest un
nombre premier). On a U(K)=K.
3) Si Aest un anneau, vous connaissez l’anneau des polynˆomes, en la variable T, `a
coecients dans A; il est not´e A[T].
- Si Kest un corps U(K[T]) = K.
- On a U(Z[T]) = {1,1}(vous devez vous en convaincre).
5) Si Aet Bsont des anneaux (commutatifs), alors A×Best un anneau pour les
op´erations (a, b)+(a",b
") = (a+a",b+b")et (a, b)(a",b
") = (aa", bb"); l’´el´ement 1de A×B
est ´evidemment (1A,1B). On a U(A×B)=U(A)×U(B). erifiez tout cela!
6) Les matrices carr´ees n×n, `a coecients dans un anneau A, forment un anneau
not´e Mn(A). Si A#={0}et si n2, cet anneau n’est pas commutatif.
Dans la suite de ce cours, on ne consid`erera que les anneaux commutatifs.
Remarques 1.4 Soit Aun anneau commutatif. Il y a une identification naturelle entre
les anneaux de polynˆomes A[X][Y]et A[Y][X].
On note ces deux anneaux A[X, Y ].
Plus g´en´eralement on peut parler de l’anneau des polynˆomes en les nvariables X1, ..., Xn,
`a coecients dans A, que l”on note A[X1, ..., Xn].
Ici, on a bien sˆur poser XY =YX.
1
D´efinition 1.5 Soit Aun anneau. Si BAest un sous-groupe pour +, tel que a, b
Bab Bet tel que 1AB, alors Best un sous-anneau de A. Si Aet Bsont des
corps, alors on dit que Best un sous-corps de A.
Remarquez que les polynˆomes de degr´e 0 de A[X] forment un sous-anneau de A[X],
auquel As’identifie ´evidemment.
Exemples 1.6 1) Zest un sous-anneau de Qqui est un sous-corps de R, qui est un
sous-corps de C.
2) Aest un sous-anneau de A[X], qui est un sous-anneau de A[X, Y ].
Comme vous l’avez compris, un ´el´ement non nul d’un anneau n’est pas toujours
inversible. Par exemple, un polynˆome PK[X], de degr´e >0, n’est pas inversible.
Vous n’avez pas vu le pire! Dans un annea, un ´el´ement peut ˆetre diviseur de 0.
D´efinition 1.7 Un ´el´ement a#=0d’un anneau Aest diviseur de 0s’il existe bA, b #=0
tel que ab =0.
Un ´el´ement aest nilpotent s’il existe n1tel que an=0.
Un anneau non nul et sans diviseur de 0est dit int`egre.
Un corps est un anneau int`egre dont tout ´el´ement non nul est inversible (pour la
multiplication).
ATTENTION : dans un anneau ayant des diviseurs de 0 on ne peut pas toujours
simplifier. Autrement dit ab =ac n’implique pas b=c, sauf si aest non diviseur de 0.
Exercice 1.8 Montrez que si Aest un anneau int`egre, alors A[T]est un anneau int`egre.
Plus pr´ecis´ement, montrer que si Pet Qsont des polynˆomes non nuls, alors PQ #=0et
son degr´e est la somme des degr´es de Pet de Q.
Corrig´e de l’exercice.
Soient P, Q A[T]. Supposons les $= 0 et soient net mleurs degr´es respectifs. On a P=anTn+an1Tn1+
..., avec an$= 0, et Q=bmTm+bm1Tm1+..., avec bm$= 0. On a alors
PQ =anbmTn+m+(anbm1+an1bm)Tn+m1+... +a0b0,
avec anbm$= 0 car Aest int`egre, ce qui montre bien que PQ $= 0 et que d0(PQ)=d0P+d0Q.
Attention `a nouveau, si An’est pas int`egre, le degr´e de PQ peut ˆetre strictement inf´erieur `a d0P+d0Q.
D´efinition 1.9 Le polynˆome nul a tous les degr´es.
Je tiens beaucoup `a cette convention, mais si vous n’en voulez `a aucun prix, vous
pouvez continuer `a penser que le degr´e du polynˆome nul est −∞
Th´eor`eme 1.10 1) Dans le groupe quotient Z/nZ, si cl(m)=cl(m")et cl(r)=cl(r"),
alors cl(mr)=cl(m"r").
2) La multiplication cl(m)cl(r)=cl(mr)est alors bien d´efinie dans Z/nZet donne
`a ce groupe une structure d’anneau dont l’ ´el´ement unit´e est cl(1).
2
Preuve de 1) : Si mm"nZet rr"nZ, alors mrm"r"=m(rr")r"(mm")
nZ.
Pour 2), je vous laisse le soin de montrer que ce produit bien d´efini est associatif et
distributif par rapport `a l’addition.
Exemples 1.11 1) L’exemple le plus simple d’un anneau non int`egre (donc ayant des
diviseurs de 0) est Z/4Z. Il est clair que cl(2) #=0et que cl(2)2=0, donc cl(2) est
nilpotent et diviseur de 0.
2) Plus g´en´eralement, si nn’est pas premier il existe une d´ecomposition n=st,
avec 1< s, t < n. Dans l’anneau Z/nZ, on a alors cl(s)#=0et cl(t)#=0mais bien
´evidemment cl(s)cl(t)=cl(st) = 0.
Remarquons que dans les anneaux Z/nZ, les ´el´ements non diviseurs de z´ero et les
´el´ements inversibles sont les mˆemes.
Proposition 1.12 Soit cl(m)Z/nZ. Les conditions suivantes sont ´equivalentes.
1) net msont premiers entre eux,
2) cl(m)est inversible,
3) cl(m)est non-diviseur de 0.
Supposons d’abord que net msont premiers entre eux. Alors, il existe une relation
am +bn = 1, avec a, b Z. On en d´eduit cl(a)cl(m) + 0 = cl(1) Z/nZ, ce qui montre
que cl(m) est un ´el´ement inversible. Un ´el´ement inversible est ´evidemment non diviseur
de z´ero. Il reste `a montrer que si cl(m) est non diviseur de z´ero, alors (m, n) = 1.
Sinon, soit pun facteur commun `a met n. On a alors m(n/p)=(m/p)nnZ, donc
cl(m)cl(n/p) = 0 Z/nZ. Comme cl(n/p)#=0Z/nZ, on a montr´e que cl(m) est un
divieur de z´ero dans Z/nZ(une contradiction).
Corollaire 1.13 L’indicatrice d’Euler φ(n)est le cardinal du groupe des unit´es U(Z/nZ).
C’est clair !
Corollaire 1.14 Les conditions suivantes sont ´equivalentes.
1) nest premier,
2) l’anneau Z/nZest un corps,
3) l’anneau Z/nZest int`egre
1) 2) : en eet, si nest premier, alors (m, n) = 1 pour tout 0 < m < n, donc
cl(m)Z/nZest inversible pour cl(m)#= 0.
2) 3) car un corps est un anneau int`egre.
3) 1) : si 0 < m < n, alors 0 #=cl(m)Z/nZ, donc cl(m) est non diviseur de z´ero
Z/nZ, ce qui implique (m, n) = 1.
Exercice 1.15 1) D´ecrire les ´el´ements nilpotents de Z/pnZ(ici pest un nombre pre-
mier) et les compter.
2) D´ecrire les ´el´ements nilpotents de Z/pnqmZ(ici pet qsont des nombres premiers
distincts) et les compter.
3) D´ecrire les ´el´ements nilpotents de Z/pn1
1...pnr
rZet les compter.
3
Corrig´e de l’exercice.
1) cl(a)r=0arpnZ, donc cl(a)Z/pnZest nilpotent si et seulement s’il existe un entier r>0 tel
que arpnZ, c’est `a dire si et seulement si pdivise a. Donc les ´el´ements nilpotents de Z/pnZsont les ´el´ements
cl(tp)Z/pnZ, avec 1 tpn1. Il y en a pn1(en comptant 0).
Il est int´eressant de remarquer qu’un ´el´ement de l’anneau Z/pnZest soit inversible, soit nilpotent. En
cons´equenbce, l’anneau est la r´eunion disjoint de son groupe des ´el´ements inversibles et de l’ensemble des ses
´el´ements nilpotents.
2) On voit imm´ediatement que cl(a)Z/pnqmZest nilpotent si et seulement si pq divise m. Donc les
´el´ements nilpotents sont les ´el´ements cl(tpq)Z/pnqmZ, avec 1 tet t/pn1qm1Z. Il y en a pn1qm1.
3) Ce sont les ´el´ements cl(tp1...pr)Z/pn1
1...pnr
rZ. Leur nombre est pn11
1...pnr1
r.
2 Homommorphismes d’anneaux, id´eaux
D´efinition 2.1 Soient Aet Bdeux anneaux. Un application f:ABest un homo-
morphisme d’anneaux si
1) fest un homomorphisme de groupes;
2) f(aa")=f(a)f(a")pour tous a, a"A;
3) f(1A)=1
B.
4) S’il existe un homomorphisme g:BAtel que gof =IdAet fog =IdB, on dit
que fest un isomorphisme (et gaussi ´evidemment).
Attention `a la condition 3); j’y tiens!
Exemple 2.2 Soient Aet Bdeux anneaux.
Les projections p1:A×BAet p2:A×BBsont des homomorphismes
d’anneaux.
L’application AA×Bd´efinie par a(a, 0) est un homomorphisme de groupes
mais n’est pas un homomorphisme d’anneaux; en eet l’image de 1An’est pas 1A×B.
Il y a quelques remarques simples que vous devez bien comprendre.
1) Un homomorphisme bijectif d’anneaux f:ABest un isomorphisme. Autrement
dit l’application inverse (f1:BA) est aussi un homomorphisme d’anneaux. emontrez
le !
2) Le compos´e de deux homomorphismes d’anneaux (composables) est un homomor-
phisme d’anneaux. V´erifiez le !
3) Comme un homomorphisme d’anneaux fest en particulier un homomorphisme de
groupes, on sait deja qu’un tel homomorphisme est injectif si et seulement si son noyau
(kerf) est nul.
4) Si f:ABest un homomorphisme d’anneaux, le sous-groupe kerf de Aa la
propri´et´e suivante suivante: akerf ab kerf pour tout bA.
D´efinition 2.3 Un sous-groupe Id’un anneau Aest un id´eal si aIab Ipour
tout bA.
On a vu que le noyau d’un homomorphisme d’anneaux est un id´eal. La r´eciproque
est vraie. Plus pr´ecisement on a l’´enonc´e suivant.
Proposition 2.4 Soit Iun id´eal d’un anneau A. Le groupe quotient A/I est muni d’une
structure d’anneau telle que l’application classe cl :AA/I est un homomorphisme
d’anneaux dont le noyau est I.
4
Il sut de v´erifier que si a, b Aalors cl(ab) ne d´epend que de cl(a) et cl(b).
Autrement dit, si cl(a)=cl(a") et cl(b)=cl(b") alors cl(ab)=cl(a"b"). Mais si aa"I
et bb"I, on a ab a"b"=a(bb")+b"(aa")I. On a donc le droit de poser
cl(a)cl(b)=cl(ab). Muni de cette multiplication A/I est clairement un anneau dont
l’´el´ement unit´e est cl(1). Il est ´evident que l’application classe est un homomorphisme
d’anneaux et nous savons d´eja que I=ker(cl).
Exercice 2.5 1) Soit Aun anneau commutatif. Montrez que l’application e0:A[X]A
d´efinie par e0(P)=P(0) (c’est l’´evaluation en 0) est un homomorphisme d’anneaux.
Montrez ensuite que le noyau de e0est XA[X](l’id´eal de A[X]form´e des polynˆomes
multiples de X).
2) Mˆeme exercice avec l’´evaluation eaen aA, d´efinie par ea(P)=P(a). Montrez
que son noyau est l’id´eal (Xa)A[X]form´e des multiples du polynˆome Xa.
Corrig´e de l’exercice.
Je traite directement 2). Soient P, Q A[X]. Vous savez depuis toujours que P(a)+Q(a) = (P+Q)(a)
et PQ(a)=P(a)Q(a). De plus l’image du polynˆome unit´e 1 A[X] est l’unit´e 1 A. Ceci montre que eaest
un homomorphisme d’anneaux. En utilisant la division euclidienne, vous savez aussi montrer que P(a) = 0 si et
seulement si Pest un multiple de (Xa), ce qui prouve que (Xa)A[X] est bien le noyau de ea.
Comme eaest ´evidemment surjectif, le th´eor`eme de factorisation pour les homomor-
phismes de groupes donne un isomorphisme de groupes A[X]/(Xa)A[X]+A. Nous
verrons plus loin (th´eor`eme de factorisation pour les homomorphismes d’anneaux) que
c’est aussi un isomorphisme d’anneaux.
La proposition qui suit est presque ´evidente, mais tr`es importante. Il est utile d’y
r´efl´echir.
Proposition 2.6 Un sous-ensemble non vide Id’un anneau Aest un id´eal si et seule-
ment si Iest stable par combinaison lin´eaire, autrement dit si et seulement si a, b I
implique ca +db Ipour tous c, d A.
A v´erifier sans moi!
D´efinition 2.7 On dira qu’un ensemble d’´el´ements (ai)d’un id´eal Iest un syst`eme de
g´en´erateurs de I(ou que les ´el´ements aiengendrent I) si tout ´el´ement de Iest une
combinaison lin´eaire (`a coecients dans l’anneau) des ´el´ements ai.
Si un id´eal Iest engendr´e par un ensemble fini d’´el´ements, on dit que Iest de type
fini.
Si un id´eal Iest engendr´e par un ´el´ement, on dit que Iest principal.
Si a1, ..., anengendrent I, on note souvent I=(a1, ..., an).
Il est clair que tout id´eal de Zest principal (de la forme nZ=(n)).
Si Kest un corps, tout id´eal de K[X] est principal. En eet, soit Iun id´eal non nul
de K[X]; consid´erons P#= 0 un polynˆome de Ide degr´e minimal parmi les degr´es des
polynˆomes de I. Montrons que Pengendre I. Soit QI; il existe A, R K[X] tels que
Q=AP +R, avec d0R < d0P. Comme R=QAP I, on en d´eduit R= 0, donc
Q=AP .
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