bloc du plexus cervical. quelles indications en 2016

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BLOC DU PLEXUS CERVICAL.
QUELLES INDICATIONS EN 2016 ?
Paul Zetlaoui
Département d’Anesthésie-Réanimation, CHU de Bicêtre, 78 rue du
Général Leclerc, 94275 Le Kremlin Bicêtre. E-mail : [email protected]
INTRODUCTION
Le plexus cervical participe à l’innervation du cou, d’une partie des téguments
de la face et de la partie supérieure du thorax et de l’épaule. Son bloc anesthésique
peut donc être justifié dans de nombreuses situations. Ce bloc était relativement
confidentiel avant l’arrivée de l’échographie. Depuis quelques années, la facilité de
réalisation apportée par l’échographie a permis de populariser ce bloc en le rendant
plus fiable, plus performant et plus efficace dans l’analgésie per et postopératoire.
1.ANATOMIE
La description anatomique du plexus cervical nécessite de décrire l’organisation
des nerfs qui le constituent, mais aussi l’organisation des espaces dans lesquels
ce plexus est contenu ou qu’il traverse, ces espaces étant délimités par 3 lames
faciales. Ces espaces constituent des espaces de diffusion privilégiés pour les
anesthésiques locaux [1].
1.1.L’ORGANISATION DU PLEXUS
Le plexus cervical est constitué des 4 premières racines cervicales [2]. A la
sortie du foramen intervertébral chaque racine se divise en 3 branches :
•Une branche à destinée méningée qui retourne dans le canal rachidien.
•Une branche postérieure motrice destinée à l’innervation des muscles du cou.
•Une branche antérieure, uniquement sensitive. Cette branche récurrente méningée permet d’expliquer l’efficacité du bloc du nerf d’Arnold dans le traitement
des syndromes d’hypotension orthostatique.
Les 4 branches sensitives s’anastomosent entre-elles (deux par deux, par
l’intermédiaire de 3 anses nerveuses) pour constituer le plexus cervical superficiel.
La racine C1 n’émet qu’une branche descendante, les 3 racines C2, C3 et C4
se divisent en deux branches, ascendantes et descendantes, et la racine C4 ne
participe au plexus que par une branche ascendante. Sa branche descendante
participe à l’organisation du plexus brachial. En avant des processus transversaires,
au contact de l’artère vertébrale, toutes ces branches fusionnent entre elles pour
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former les 3 anses du plexus cervical, l’anse de l’atlas - la plus longue - (C1-C2),
l’anse de l’axis (C2-C3) et la troisième anse (C3-C4). Ce plexus va donner naissance
aux différents nerfs sensitifs et moteurs constituant le plexus cervical superficiel et
profond. Le plexus cervical superficiel n’est constitué que de nerfs sensitifs.
De C1, C2 et C3 partent vers l’avant des filets nerveux qui fusionnent pour
former l’anse cervicale. Ces filets cheminent pour une partie de leur trajet avec le
nerf hypoglosse. Ils sont responsables de l’innervation motrice des muscles de la
phonation
1.1.1.Les nerfs moteurs
Les nerfs moteurs constituant le plexus cervical profond peuvent être issus soit
directement des racines, soit des branches motrices, soit des branches anastomotiques et même des anses. Ces nerfs moteurs issus de C2 à C4 cheminent à
l’intérieur du fascia cervical profond, et sont destinés :
•Au muscle sterno-cléido-mastoïdien (SCM) (innervation mixte avec des branches
du XI).
•Aux muscles trapèze, élévateur de la scapula, infra-hyoïdiens, scalènes moyen
et antérieur et rhomboïde.
•Aux trois muscles pré-vertébraux (long du cou, droit antérieur de la tête et long
de la tête) la partie supérieure des muscles scalènes antérieur et moyen, ainsi
que les muscles élévateurs de la scapula.
Le plexus cervical participe surtout à la constitution du nerf phrénique (C3-C5) à
partir des rameaux antérieurs de C3 et C4. Nerf mixte responsable de l’innervation
motrice du diaphragme et de l’innervation sensitive des fascia tels que les plèvres
et le péricarde, le nerf phrénique traverse le cou à la face antérieure du muscle
scalène antérieur dans un dédoublement de son fascia.
A la base du cou, le nerf phrénique présente deux anastomoses importantes :
l’une destinée au pôle inférieur du ganglion cervical inférieur du sympathique, l’autre
passe sous la veine subclavière et s’unit au nerf du muscle subclavier. Souvent,
le nerf du subclavier, par l’importance des fibres qu’il apporte au nerf phrénique,
constitue un véritable nerf phrénique accessoire.
1.1.2.Les nerfs sensitifs
Le plexus cervical superficiel se résume principalement en quatre branches
mastoïdienne, auriculaire, transverse et supraclaviculaire (Figure 1). Elles sont
responsables de l’innervation sensitive du cou, d’une partie de l’oreille, d’une partie
du scalp et de la région périclaviculaire du thorax. Toutes ces branches perforent le
fascia cervical prévertébral, pour pénétrer dans l’espace cervical postérieur. Elles
quittent cet espace en contournant en un point commun le bord postérieur du
muscle SCM à sa partie moyenne. Elles traversent à ce moment le fascia superficiel.
Les quatre branches se séparent en étoile pour assurer l’innervation sensitive du
cou, de la partie antérieure et proximale du thorax et de l’épaule.
La branche mastoïdienne constitue le nerf petit occipital (issu de la deuxième
anse, C2-C3). Il monte en haut et en arrière le long du bord postérieur du muscle
SCM, contenu d’abord dans sa gaine. Puis il devient superficiel et se distribue à la
peau des régions mastoïdienne et occipitale par deux rameaux distincts.
La branche auriculaire donne le nerf grand auriculaire (issu essentiellement de
C3). Il monte verticalement derrière la veine jugulaire externe, sur la face latérale du
SCM. Il se divise en 2 branche l’une antérieure qui distribue à la peau de la région
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parotidienne, de l’auricule et une branche postérieure pour la région mastoïdienne,
où elle s’anastomose avec le rameau antérieur du nerf petit occipital.
La branche transverse constitue le nerf transverse du cou (issu de la deuxième
anse, C2-C3). Il se dirige horizontalement en avant, croise la face profonde de la
veine jugulaire externe, traverse le platysma. Il innerve la peau des régions supra et
infra-hyoïdiennes. Il s’anastomose avec le rameau cervico-facial du nerf facial. Ceci
permet d’expliquer les anesthésies incomplètes au niveau de l’angle de la mâchoire.
La branche supraclaviculaire constitue le nerf supraclaviculaire (C3-C4), qui
se divise rapidement en 3 branches qui traversent la lame superficielle du fascia
cervical un peu au-dessus de la clavicule. Les trois branches se ramifient en nerfs
supraclaviculaires médiaux destinés à la peau pré-sternale, intermédiaires destinés
à la peau de la région infraclaviculaire, et latéraux destinés à la région deltoïdienne.
Le plexus cervical superficiel assure l’innervation sensitive des téguments de
l’épaule qui n’est pas sous la dépendance du plexus brachial. Le territoire du nerf
supraclaviculaire est très variable et peut s’étendre sur le thorax jusqu’au niveau
de la 2ème côte.
Le nerf grand occipital (nerf d’Arnold) issu de C2 et qui participe à l’innervation
sensitive du scalp n’est pas issu du plexus cervical.
Le plexus cervical émet des branches anastomotiques pour le tronc sympathique, le nerf accessoire et le nerf hypoglosse.
Figure 1 : Organisation schématique du plexus cervical.
1.2.LES FASCIA ET ESPACES CERVICAUX
Comme le plexus brachial, le plexus cervical est compris entre 2 plans fasciomusculaires, qui le limitent en avant et en arrière. Les fascia cervicaux sont constitués
de 3 fascia, le fascia superficiel, le fascia prétrachéal, et le fascia prévertébral [3]
rappelant l’organisation embryologique en endoderme, mésoderme et ectoderme
(Figure 2).
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•Le fascia superficiel tendu de la mandibule à la clavicule, se dédouble dans sa
portion latérale pour envelopper les muscles SCM et trapèze.
• Le fascia prétrachéal qui s’étend de l’os hyoïde à la clavicule, circonscrit un espace
presque cylindrique situé antérieurement aux corps vertébraux. Il se dédouble lui
aussi pour séparer deux compartiments l’un musculaire (muscles infra-hyoïdiens)
et l’autre viscéral (viscères du cou).
• Le fascia prévertébral engaine la colonne vertébrale et les muscles prévertébraux.
Ces 3 fascia délimitent ainsi 4 espaces :
•L’espace sous-cutané superficiel, entre la peau et le fascia superficiel ; il contient le
muscle platysma. L’injection sous-cutanée d’anesthésique local dans cet espace
produit un bloc superficiel du plexus cervical superficiel (BPCS).
• L’espace viscéral, enfermé par la lame prétrachéale contient les muscles antérieurs
du cou et les viscères cervicaux (œsophage, trachée) regroupés dans l’espace
rétro-pharyngé.
•L’espace cervical profond, paravertébral, limité en périphérie par la lame prévertébrale s’étend de C2 à D1. Il contient essentiellement les muscles de posture
du cou. Une injection d’anesthésique local à ce niveau entraîne un bloc complet
du plexus cervical (superficiel et profond, moteur et sensitif).
•L’espace cervical postérieur n’est pas limité par un fascia spécifique. Il est dessiné
en dedans par la lame profonde prévertébrale et en périphérie par la face profonde
de la lame superficielle. Il est donc tapissé sur son bord externe par les faces
médiales des muscles SCM, élévateur de la scapula et trapèze. Il peut être divisé
en 2 parties, l’espace vasculaire en avant contenant les axes vasculo-nerveux
du cou (carotide, jugulaire, nerf phrénique), et l’espace postéro-latéral contenant
essentiellement du tissu adipeux, les ganglions cervicaux et le nerf spinal. L’espace
est traversé par les branches du plexus cervical superficiel. Une injection dans
l’espace cervical postérieur [5] procure un bloc du plexus intermédiaire du plexus
cervical superficiel (BPCI).
Les espaces ainsi délimités par ces fascia constituent des zones de diffusion
préférentielle, particulièrement pour les anesthésiques locaux.
Figure 2 : Lames et espaces et cervicaux. Les 3 fascia cervicaux (prévertébral,
prétrachéal et superficiel) cloisonnent les 3 espaces principaux.
Anesthésie locorégionale
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2. NOMENCLATURE : UN PLEXUS - 3 BLOCS
Le plexus cervical est organisé en 2 plans, le plus cervical profond et le plexus
cervical superficiel [3].
•Pour bloquer le plexus profond (moteur et sensitif) un bloc profond, équivalent à
un bloc interscalénique est nécessaire. Dhonneur et al. avaient montré que le bloc
obtenu avec un volume de 40 ml s’étendait de C2 à C7 et que l’extension était
limitée à l’espace cervical profond, par le SCM et le muscle trapèze, c’est-à-dire
par la face interne du fascia superficiel [4].
•Pour bloquer le plexus cervical superficiel on peut réaliser soit un bloc superficiel
soit un bloc intermédiaire :
•Le bloc superficiel du plexus cervical superficiel correspond en une injection dans
l’espace superficiel sous-cutané, en périphérie du fascia superficiel, et correspond
à une anesthésie locale sous-cutanée.
•Le bloc intermédiaire du plexus cervical superficiel consiste en une injection dans
l’espace cervical postérieur, en arrière du SCM. L’espace cervical est localisé dans
la région postéro-latérale du cou, depuis la base du crâne jusqu’à la clavicule, en
arrière des muscles SCM et trapèze, et superficiel à l’espace cervical profond [5].
Pour l’anesthésie du plexus cervical superficiel, le bloc le plus performant, est
le bloc intermédiaire, qui est un bloc de diffusion, dans un espace presque fermé.
Comme tout bloc de diffusion, il nécessite l’usage d’un volume compris entre 15
et 20 ml.
3. TECHNIQUES
3.1.PONCTION À L’AVEUGLE
Classiquement l’abord est réalisé à l’aveugle au bord postérieur du muscle
SCM, classiquement au niveau de C4 (Figure 3). Le bloc est réalisé soit par une
injection unique de 15 ml, soit par des injections en étoile à partir de ce point, soit
par une injection réalisée en arrière et en dessous du bord latéral du muscle SCM,
idéalement en arrière de la face interne du fascia superficiel.
Une technique avec des injections étagées sur chaque racine est aussi décrite.
En pratique, les techniques de ponction à l’aveugle ne sont plus utilisées car peu
efficaces.
Figure 3 : Bloc du plexus cervical au niveau de C5 par une injection unique.
Iconographie : Protocoles d’Anesthésie-réanimation. MAPAR 2010.
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3.2.PONCTION EN NEUROSTIMULATION
A partir de la technique décrite par Winnie en 1975 [6], Merle et al. rapportent
une technique en neurostimulation qui permet d’améliorer la performance du bloc
dans la chirurgie carotidienne [7]. Ces abords sont actuellement peu utilisés, parce
que responsables d’un bloc profond (sensitif et moteur) inutile dans la majorité des
indications.
3.3.PONCTION ÉCHOGUIDÉE
En 2006 Sandeman et al. décrivaient les premiers les abords échoguidés
du plexus cervical profond [8]. Puis en 2010, Usui et al. publiaient la première
description anatomique échographique, sous l’angle de l’anesthésie, du plexus
cervical superficiel [9].
Pour le repérage échographique du plexus cervical superficiel, l’objectif
est d’identifier l’espace cervical postérieur, par lequel transitent tous les 4 nerfs
constituant le plexus cervical superficiel [10].
Le patient est en décubitus dorsal la tête tournée légèrement du côté opposé à
celui de la ponction. La sonde placée transversalement au niveau du cou, au bord
postérieur du SCM explore la région comprise en la bifurcation carotidienne (C4) et
la vertèbre C6 (dernière vertèbre dont le processus transversaire soit bifide). Certains
auteurs préfèrent placer le patient en décubitus latéral pour faciliter la ponction.
En arrière du muscle SCM et de sa gaine (dédoublement du fascia superficiel),
il est facile d’identifier une « bande blanche » qui le sépare des muscles scalènes
moyens et postérieurs et des muscles longs du cou et long de la tête du cou
(longus coli et longus capiti). Cette bande blanche représente l’espace cervical
postérieur dans lequel cheminent les nerfs du plexus cervical superficiel pour
passer de l’espace profond à l’espace superficiel. C’est à ce niveau que l’injection
doit être réalisée.
L’abord classique réalise une ponction postérieure, d’arrière en avant (Figure 4).
L’aiguille introduite « dans le plan » au bord postérieur du SCM passe sous ce
muscle pour arriver dans l’espace cervical postérieur. Elle se dirige vers l’espace
vasculaire ; l’injection est réalisée au cours de la progression [10, 11]. En cas de
chirurgie carotidienne, l’aiguille peut être introduite très prudemment dans l’espace
vasculaire, pour injecter 3 à 4 ml d’anesthésique local.
Figure 4 : Abord postérieur du plexus cervical superficiel. La ponction est réalisée
au bord postérieur du muscle SCM.
Anesthésie locorégionale
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Plus récemment a été décrit un abord antérieur, d’avant en arrière (Figure 5)
[12, 13]. L’abord antérieur a l’avantage de ne pas nécessiter de placer le patient
en décubitus latéral, et de faciliter la réalisation du bloc bilatéral. La ponction est
toujours réalisée dans le plan avec une aiguille échogène de 80 à 10 mm.
Dans tous les cas, l’injection est lente ; l’aiguille progressant doucement dans
l’espace au fur et à mesure que celui-ci « s’ouvre ». Les structures anatomiques, la
position de l’aiguille et la diffusion de l’AL doivent être clairement visualisées pour
un bloc sans complication ; ceci nécessite l’utilisation d’échographes et de sonde
de haute définition [14].
Figure 5 : Abord antérieur du plexus cervical superficiel. La ponction est réalisée
dans le plan d’avant en arrière vers l’espace cervical postérieur (têtes de flèche).
Le volume pour un bloc unilatéral est de 20 ml (0,25 à 0,3 ml/kg) ; pour un bloc
bilatéral, le volume est de 15 ml de chaque côté.
La dose totale injectée ne doit pas dépasser la dose totale acceptable soit
3 mg/kg de ropivacaïne ou 2 mg/kg de lévobupivacaïne. Il faut se rappeler que
s’agissant d’injections cervicales, l’absorption systémique est classiquement très
rapide.
Si le bloc est réalisé en complément d’une anesthésie générale, il est licite de
le réaliser chez un patient déjà endormi.
4. INDICATIONS DU BLOC DU PLEXUS CERVICAL SUPERFICIEL
Il s’agit essentiellement d’un bloc antalgique, mais qui peut cependant être utilisé comme bloc anesthésique. Les indications du bloc du plexus cervical superficiel
correspondent aux territoires innervés par ce plexus (Figure 6). Classiquement le
PCS prend en charge l’innervation sensitive de la région cervicale depuis la pointe
de la mastoïde jusqu’à la région périclaviculaire pouvant atteindre parfois la zone
du métamère D2.
Les indications principales concernent la chirurgie de la carotide, de la thyroïde
et des parathyroïdes.
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Figure 6 : Territoire d’innervation sensitive du plexus cervical superficiel.
4.1.CHIRURGIE THYROÏDIENNE
Depuis 2000, plus de 30 publications rapportent l’intérêt du bloc du plexus
cervical dans cette indication. Si la méta-analyse de Warschkow et al. ne retrouve
pas d’avantage au bloc du plexus cervical superficiel dans la chirurgie de la thyroïde
[15], celle de Cheng et Hutchison en 2012 montrent que le bloc du plexus cervical
dans la chirurgie thyroïdienne entraîne une diminution des besoins peropératoires
en morphiniques, une amélioration de la douleur postopératoire et une diminution
de la durée de séjour. De plus, ce bloc n’est pas incompatible avec le monitorage
peropératoire des nerfs récurrents [16].
La RFE douleur postopératoire publiée par la SFAR en 2016 recommande la
réalisation d’un bloc du plexus cervical (intermédiaire) pour la chirurgie thyroïdienne
(à paraître).
Une étude récente de Wattier et al. rapportent une incidence trois fois moins
élevée de la douleur chronique à 3 et 6 mois après thyroïdectomie chez les patients
ayant bénéficié d’un bloc du plexus cervical [17].
En pratique, en accord les chirurgiens, nous proposons aux patients un bloc du
plexus cervical superficiel, par abord antérieur aux patients opérés d’une chirurgie
thyroïdienne, particulièrement les thyroïdectomies totales. Techniquement, le bloc
doit le plus souvent être bilatéral, même pour une chirurgie unilatérale. Si une
anesthésie générale est associée, le bloc sera réalisé après l’intubation. La ponction
échoguidée sera plutôt centrée sur C5-C6, comme pour une chirurgie claviculaire.
15 ml d’un anesthésique local de longue durée d’action sont injectés de chaque
côté ; la dose totale d’anesthésique local, adaptée au poids du patient, est injectée
lentement en raison d’une résorption rapide dans cette région.
Il est rare en France de réaliser des thyroïdectomies sous ALR, chez des
patients non-endormis. Cependant, dès 1950, il est publié la possibilité de réaliser
des thyroïdectomies totales ou non, sous anesthésie locale ou bloc du plexus
cervical. Quelques publications récentes, chez des patients particuliers présentant
des risques pour l’anesthésie générale (HTAP sévère) [12] ou en cas d’intubation
prévue très difficile (goitre très volumineux) rapportent l’intérêt du BPCS.
Anesthésie locorégionale
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4.2.CHIRURGIE CAROTIDIENNE
L’ALR occupe une place de choix dans la stratégie anesthésique de la chirurgie carotidienne et ne semble pas moins performante que l’anesthésie générale
dans cette indication [18]. L’étude de Markovic et al. sur plus de 1000 patients ne
montre pas de différence statistique entre anesthésie générale et ALR dans cette
indication, mais conclut qu’il faut préférer l’ALR en raison d’une plus faible incidence
de complications respiratoires et de douleur postopératoire [19]. Trois revues de
la littérature confirment que le bloc du plexus cervical permet la réalisation de la
chirurgie d’endartériectomie carotidienne [20-22].
Une des questions encore en débat est de savoir quel est le meilleur bloc du
plexus cervical pour cette chirurgie. Pour une chirurgie carotidienne, la ponction
sera plus souvent réalisée au niveau de C4, et 20 ml sont injectés à ce niveau. La
majorité des études rapportent un bord classique postéro-antérieur. L’étude de
Calderon et al. sur 116 patients montrent que tous les patients (sauf une anesthésie
générale pour agitation excessive) ont été opérés avec succès avec un abord antéropostérieur [13]. L’infiltration de la gaine de la carotide est probablement d’une aide
précieuse dans cette chirurgie. Elle peut être réalisée par l’anesthésiste au cours
du bloc plexique ou par le chirurgien après l’incision. Une infiltration au niveau de
l’angle de la mâchoire est souvent nécessaire, l’innervation de cette région étant
habituellement sous la dépendance de la branche cervicale du nerf facial, donc
indépendante du plexus cervical.
4.3.AUTRES INDICATIONS
Le bloc du plexus cervical superficiel est efficace dans l’analgésie des fractures
de clavicule en pré et postopératoire [23-25]. Il a été utilisé avec succès pour la
mise en place d’abord veineux jugulaire ou même sous claviers, dont des chambres
implantables.
Il trouve des indications particulières dans la chirurgie de biopsie ganglionnaire
cervicale, où il a été utilisé comme seule technique d’anesthésie.
Pour la chirurgie des parathyroïdes, l’incision cutanée est possible, mais la
dissection nécessite un complément par le chirurgien, particulièrement du côté
gauche en raison des rapports étroits avec l’œsophage [26].
Il a été utilisé pour des révisions de shunts ventriculo-péritonéal ou ventriculopleural chez l’enfant [27].
Le bloc du plexus cervical superficiel est efficace dans la chirurgie orthopédique
du rachis cervical par voie antérieure ou latérale (hernie discale, arthrodèse).
Par ailleurs, les nerfs grand auriculaire ou petit occipital ou grand occipital
sont facilement localisés en échographie, ce qui permet leur blocage sélectif, par
exemple en neurochirurgie (Figure 7) [28, 29].
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MAPAR 2016
Figure 7 : Repérage échographique des nerfs grand auriculaire et petit occipital.
La sonde est placée au bord postérieur du SMC. Le nerf grand auriculaire quitte
rapidement l’espace cervical postérieur, pour se porter vers l’oreille, alors que le
nerf petit occipital reste un peu plus longtemps dans l’espace cervical postérieur,
et le quitte pour se diriger vers la région mastoïdienne.
5. COMPLICATIONS
Avec les blocs du plexus cervical profond et les blocs à l’aveugle, toutes les
complications possibles de l’ALR ont été décrites, injections intravasculaires ou
intrathécales, traumatismes nerveux, résorption excessive ou échec. A l’inverse,
aucune complication n’a été rapportée avec les blocs intermédiaires échoguidés.
La paralysie phrénique, théoriquement systématique dans tous les cas, n’est pas
rapportée dans la littérature. Deux études rapportent que le bloc du plexus cervical
unilatéral dans le cadre de la chirurgie carotidienne n’entraîne que des altérations
modérées des paramètres ventilatoires, malgré une paralysie phrénique radiologiquement évidente chez 50 % des patients [30, 31].
La paralysie récurrentielle est possible avec les blocs profonds [32]. Avec les
blocs intermédiaires échoguidés, l’incidence des complications est quasiment
nulle, et cette technique doit être privilégiée par rapport aux blocs profonds ou
intermédiaires à l’aveugle.
CONCLUSION
Des publications en provenance de pays en voie de développement recommandent, en raison d’un excellent rapport coût-performance, le bloc du plexus
cervical pour la chirurgie thyroïdienne [33]. Dans un autre environnement socioéconomique, des équipes de New York montrent que la chirurgie thyroïdienne peut
être réalisée en ambulatoire sous anesthésie locorégionale avec la même sécurité
que sous anesthésie générale [34]. Le bloc du plexus cervical superficiel est devenu
depuis l’utilisation de l’échoguidage, un bloc facile à réaliser et sans complication
particulière ; il devra être maîtrisé par un nombre croissant d’anesthésistes.
Anesthésie locorégionale
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