L’INNOVATION ET L’EXCELLENCE EN MATIERE DE RELATION CLIENT QUELS APPORTS AU SECTEUR DE L’ASSURANCE ? Claire-Marie GERARD Sommaire Résumé .................................................................................................................... p 05 Introduction ....................................................................................................................... p 06 Chapitre 1. Une relation client en pleine mutation : la nouvelle donne entre les clients et les entreprises........................................................................................... p 09 1.1 Les tendances de fond impactant l’évolution de la demande .......................... p 09 1.1.1 Les nouvelles dimensions comportementales du consommateur ........................ p 09 1.1.2 Internet : un outil qui amplifie les évolutions comportementales des clients....... p 12 1.1.3 Des tendances amplifiées par la crise ................................................................ p 18 1.2 L’assurance dommages : un marché mature, banalisé, et ultra concurrentiel .. p 20 1.2.1 Un marché mature sur lequel s’exerce une forte concurrence............................. p 20 1.2.2 D’un état statique vers un état plus dynamique du marché ................................. p 23 1.3 Les enjeux de la relation client et de la fidélisation dans un tel contexte ......... p 27 1.3.1 Les enjeux de la fidélité .................................................................................... p 27 1.3.2 La corrélation entre satisfaction et fidélité ......................................................... p 30 1.3.3 L’assurance et la relation client………………………………………….............p 31 Chapitre 2. Caractéristiques des différentes approches en matière de relation client et de fidélisation………………………...…………………………………………...……...p 37 2.1 La fidélisation comme levier pour retarder le départ du client et accroître sa valeur .................................................................................................................... p 40 2.1.1. Les partis pris stratégiques : la mise en place de stratégies marketing défensives de rétention de la clientèle .................................................................................... p 40 2.1.2 Les résultats attendus : améliorer la rentabilité des clients et éviter leur départ.. p 40 2.1.3 Les outils et moyens de mise en œuvre............................................................. p 41 2.2 La fidélisation comme levier de connaissance et de ciblage…………………...p 45 2.2.1 Les partis pris stratégiques : mieux connaître les clients pour mieux vendre et servir ....................................................................................................................... p 45 2.2.2 Les résultats attendus : la maximisation des profits de l’entreprise et de la satisfaction des clients ..................................................................................... p 46 2.2.3 Les outils et moyens de mise en œuvre............................................................. p 47 2.3 La loyauté acquise par une expérience remarquable .......................................... p 51 2.3.1 Les partis pris stratégiques : la loyauté source de croissance à long terme.......... p 51 2.3.2 Les résultats attendus : des profits sains et des clients prescripteurs .................. p 51 2.2.3 Les outils et moyens de mise en œuvre.............................................................. p 53 2.4. La loyauté acquise par la défense des intérêts clients ...................................... .p 59 2.4.1 Les partis pris stratégiques : maximiser les intérêts des clients, en partenariat avec eux.................................................................................................................... p 59 3 2.4.2 Les résultats attendus : gagner la confiance des clients.......................................p 60 2.4.3 Les outils et moyens de mise en œuvre .............................................................. p 61 Chapitre 3. Illustrations des outils utilisés pour redéfinir la relation client ......... p 67 3.1 Les outils préalables ...................................................................................... p 69 3.1.1 L’écoute active des clients ................................................................................ p 69 3.1.2 La connaissance des clients : segmentation, ciblage et valeur ............................ p 72 3.1.3 La mise en place d’une organisation centrée autour du client ............................. p 75 3.1.4 Le pilotage centré autour du client .................................................................... p 77 3.1.5 La fidélisation des collaborateurs ...................................................................... p 78 3.2 Les outils de positionnement ......................................................................... p 80 3.2.1 Des offres et services à valeur ajoutée ............................................................... p 80 3.2.2 La confiance gagnée ......................................................................................... p 81 3.2.3 La transparence................................................................................................. p 82 3.3 Les outils opérationnels ou de mise en œuvre ................................................ p 83 3.3.1 Les programmes de fidélisation......................................................................... p 83 3.3.2 Les supports : cartes de fidélité et clubs............................................................. p 84 3.3.3 Le nouveau rôle du client : la co-conception...................................................... p 85 3.3.4 Les partenariats................................................................................................. p 87 Chapitre 4. Application des outils et transfert des bonnes pratiques dans le secteur de l’assurance ................................................................................................................... p 89 4.1 Présentation de MAAF Assurances et de ses enjeux.......................................... p 90 4.1.1 MAAF Assurances : une mutuelle ancrée dans le 21ème siècle ......................... p 90 4.1.2 Les principaux enjeux et défis de MAAF Assurances ........................................ p 91 4.2 Application des outils et transférabilité des bonnes pratiques dans le monde de l’assurance et plus particulièrement à MAAF Assurances....................................... p 92 4.2.1 Les outils préalables.......................................................................................... p 92 4.2.2 Les outils de positionnement ........................................................................... p 102 4.2.3 Les outils opérationnels de mise en œuvre....................................................... p 109 Conclusion ...................................................................................................................... p 114 Bibliographie .................................................................................................................. p 116 Annexes ........................................................................................................................... p 119 4 Résumé Face à une concurrence croissante sur des marchés matures et à une clientèle toujours plus exigeante et volatile, l’attention portée aux clients acquis est pour toute entreprise synonyme de facteur de croissance. Le présent mémoire s’attachera donc à traiter de la stratégie client au sens de fidélisation et de rétention de la clientèle. La réflexion sur la demande montre que la relation client évolue (les clients effectuent des choix autonomes, recherchent la transparence, utilisent Internet, …) et que cette « nouvelle donne » va obliger les entreprises à reconsidérer leurs approches clients. Le marché de l’assurance, même s’il peut encore être considéré comme relativement préservé pour l’instant (clientèle captive du fait des contraintes juridiques qui encadrent les contrats, …) n’est pas épargné par les évolutions décrites ci-dessus. Les assureurs vont donc devoir progressivement passer d’une approche « contractuelle » à une approche plus « relationnelle », et devenir « éleveur » plutôt que « chasseur ». L’apport de ce mémoire consiste, dans ce cadre là, à analyser en quoi l’innovation et l’excellence en matière de relation client et de fidélisation dans d’autres secteurs d’activité ou d’autres pays pourraient s’appliquer au monde de l’assurance en général et à MAAF Assurances en particulier, et le cas échéant, en quoi ces bonnes pratiques feraient évoluer le positionnement des assureurs. Pour essayer d’imaginer ce nouveau référentiel client dans l’assurance, nous avons analysé l’évolution générationnelle de la relation client au cours des vingt dernières années et avons constaté que la relation client a connu un parcours d’évolution et de sophistication. Si elle était auparavant considérée comme un moyen pour l’entreprise, elle devient peu à peu un enjeu majeur par lequel les entreprises prouvent à leurs clients leurs engagements à leurs côtés. Dans ce cadre là, les notions de confiance, bénéfices mutuels, transparence et partenariats priment. Ce cadre d’analyse nous a permis d’identifier un certain nombre d’outils et de bonnes pratiques qui constituent une « boîte à outils de la relation client ». Ces outils au service de la relation client sont « classés » en trois catégories : les outils préalables, les outils de positionnement et les outils opérationnels. Puis pour illustrer ces différents outils, nous nous sommes appuyés sur des expériences d’entreprises ayant des pratiques intéressantes en la matière. Enfin, ce mémoire propose une série de pistes de recommandations en matière d’amélioration de la relation client chez les assureurs, et en particulier chez MAAF Assurances. Ces préconisations visent à faire évoluer le positionnement « qualité / prix» de MAAF, essentiellement axé sur le prix actuellement, vers plus de qualité pour instaurer une relation de confiance. Ce positionnement est sous entendu par la logique suivante : « les clients n’achètent plus seulement les produits d’une marque, mais ils achètent une relation avec l’entreprise dans laquelle ils ont confiance pour les représenter si un problème survient »1. Il s’agira donc de donner du sens, créer du lien et faire en sorte que l’expérience vécue soit identique à la promesse affichée. 1 www.lcmp.fr (Le Cercle du Marketing Prédictif) 5 Introduction · Un mémoire centré sur les apports des politiques clients au secteur de l’assurance Pour croître durablement, les entreprises doivent attirer de nouveaux clients puis les fidéliser. Une vision stratégique claire et partagée, une bonne capacité d’innovation et de développement, un positionnement prix adéquat et une relation de qualité avec leur clientèle leur permettent d’arriver à cet objectif. J’ai pris le parti dans ce mémoire de traiter les aspects liés à la relation client qu’une entreprise doit tisser avec ses clients dans l’optique de développer une relation durable avec eux pour les fidéliser. Il existe quatre moments structurants dans une relation qu’un client noue avec une entreprise, sachant que ces moments sont définis en fonction de la valeur du client et de son intensité dans la relation (annexe 1 : les politiques de la relation client)2 : - La politique de conquête vise à transformer des prospects en clients de l’entreprise. Elle suppose donc la mise en œuvre de moyens attractifs pour attirer les prospects. - La politique de fidélisation met en œuvre des moyens pour intensifier et pérenniser la relation commerciale. Elle suppose des efforts actifs de la part des entreprises pour conserver leurs clients. - La politique de rationalisation consiste à améliorer la rentabilité des clients réguliers mais peu lucratifs. - Enfin, la politique d’abandon vise à délaisser les clientèles peu rentables. · Les enjeux stratégiques des politiques de fidélisation Le présent mémoire s’attachera à traiter la stratégie client au sens de fidélisation et de rétention de la clientèle car les enjeux de la fidélisation sont devenus stratégiques. En effet, face à une concurrence croissante, à des marchés arrivés à maturité en voie de banalisation, et à une clientèle de plus en plus exigeante et volatile, l’attention portée aux clients acquis est plus que jamais un facteur de croissance rentable et durable. Précisons toutefois à ce stade que la relation client n’est pas une fin en soi mais un moyen au service d’une cause précise : la croissance de l’entreprise. Les autres stratégies possibles qui permettent à une entreprise de croître, à savoir la recherche de différenciation par l’innovation et la recherche d’un excellent positionnement tarifaire sont bien entendu complémentaires et nécessaires, mais ne seront pas traitées ici, dans la mesure où l’exercice du mémoire m’a amenée à effectuer des choix. La relation client est privilégiée dans ce mémoire puisque l’expérience client est difficile à copier, elle est unique, et c’est ce qui en fait la valeur et l’attachement à la marque. En cela, elle peut constituer un facteur différenciant, d’autant plus qu’une expérience client réussie engendre des inconditionnels de la marque. A l’inverse, une expérience qui se déroule mal a des conséquences désastreuses, et il suffit d’un manquement dans un des maillons de la chaîne pour que la relation client se détériore. 2 PEPPER D et ROGERS M (1997), « le One to One », Editions d’Organisation 6 Aujourd’hui, les assureurs ont bien compris qu’ils ne pourraient faire l’économie d’une réflexion sur la relation client. Pour autant, si la plupart des assureurs décrètent que le client est au centre de leurs préoccupations et au cœur de leurs organisations, il semblerait que beaucoup n’aient pas encore effectué leur « révolution client » et qu’il existe un écart entre le message affiché par les entreprises et la réalité de la relation vécue par les clients eux-mêmes. Pour des raisons historiques : marché très réglementé, haute technicité produit, clientèle captive, adjonction d’univers d’offres au fur et à mesure, risques parfois longs à se concrétiser ; le marché de l’assurance ne s’est pas développé autour de ses clients mais autour de ses produits. Aujourd’hui encore, la plupart des compagnies d’assurance sont organisées autour de lignes de contrat et de la rentabilité par produit, ce qui nuit à une réelle approche globale du client. Par ailleurs, les assureurs sont encore dans une logique de « chasseurs » de nouveaux clients, que d’«éleveurs» de leurs clients en portefeuille3, comme en témoigne les offres commerciales ou les mois gratuits proposés à tout nouveau client par la profession. Et comme le souligne le cabinet KP-AM4 : « le statut de client a de moins en moins de valeur aux yeux des marques et des entreprises. Pour preuve, ces entreprises se préoccupent essentiellement de l’acquisition des clients, au point de générer un sentiment de frustration chez les plus fidèles ». · Les objectifs de ce mémoire Il m’a donc semblé opportun d’analyser en quoi l’évolution du marché devrait amener les assureurs à reconsidérer la relation à leurs clients, et en quoi l’innovation et l’excellence en matière de relation client et de fidélisation dans d’autres secteurs d’activité ou d’autres pays pourraient s’appliquer au monde de l’assurance ? Autrement dit, quelles sont les nouvelles approches de la relation client ou les expériences intéressantes qui pourraient transformer un objectif conceptuel - le renforcement de relation client - en une réalité tangible et vécue au quotidien, afin d’assurer durablement la fidélité d’un client, dans un contexte plus qu’incertain ? Et en quoi ces bonnes pratiques seraient transférables au secteur de l’assurance et le cas échéant, en quoi pourraient-elles amener les assureurs à faire évoluer leur métier et leur modèle économique ? · Présentation du plan de ce mémoire La première partie s’attachera à étudier ce que l’on peut appeler la relation client « redéfinie », à savoir la nouvelle donne générée par « l’acquisition du pouvoir » par le client sur l’entreprise5. Cette modification des rapports de force entre les clients et les entreprises implique, pour ces dernières, la nécessité de donner plus de place à la relation client et de prendre en compte l’importance des enjeux de fidélisation. Nous verrons que cette évolution des comportements clients est une problématique que rencontrent également les assureurs et qui va les impacter de plus en plus au cours des prochaines années, les obligeant à passer d’une fidélisation majoritairement passive de leur clientèle, à une fidélité active. 3 Entretien avec Mr SENAC T, Directeur Marketing Opérationnel MAAF, Février 2009 TNS SOFRES (2008), Le Marketing Book 5 DUPUY F (2004). « Sociologie du changement, Pourquoi et comment changer les organisations ? », Edition Dunod 4 7 La deuxième partie de ce mémoire abordera les différentes approches de la relation client et les leviers de changement possibles pour susciter la fidélité des clients, et définir ceux avec lesquels il est souhaitable d’entretenir une relation privilégiée. Cette partie s’intéressera à traiter successivement quatre « champs d’analyse» pouvant être considérés comme « emblématiques » d’un positionnement dans les domaines de la relation client et de la fidélisation. Puis, partant du postulat qu’il y a des avancées remarquables dans d’autres secteurs ou dans d’autres pays concernant les grandes tendances de la relation client, la partie suivante s’efforcera de relier la théorie décrite précédemment à des exemples concrets provenant d’entreprises considérées comme ayant une pratique intéressante, c'est-à-dire soit innovante soit excellente. Enfin, la quatrième partie s’attachera, en partant des bonnes pratiques et des moyens décrits dans les parties précédentes, à proposer une série de recommandations en matière d’amélioration de la relation client chez les assureurs, et en particulier chez MAAF Assurances. Nous soulignerons également les conséquences qu’impliquerait une relation client en phase avec la société et les clients actuels, en terme de modification de « terrain de jeu », c'est-à-dire du périmètre dans lequel les assureurs opèrent actuellement. J’aimerais terminer cette introduction par les raisons plus personnelles qui m’ont poussée à m’intéresser à ce sujet. Je suis sensible à l’écoute de notre environnement et il me semble que la satisfaction du client et la prise en compte de ses besoins, au-delà de constituer un facteur de différenciation, est une impérieuse nécessité. Dans ce contexte, l’avenir d’une entreprise dépend, et dépendra de plus en plus, de sa capacité à tisser des relations solides et de confiance avec ses clients, surtout dans une période de crise où les individus expriment de la défiance face à certaines entreprises et sont à la recherche de sens. 8 Chapitre 1. Une relation client en pleine mutation : la nouvelle donne entre les clients et les entreprises Si le 20ème siècle s’est caractérisé par le règne des entreprises et des marques, le 2Ième siècle annonce semble-t-il un renversement de tendance, par lequel les clients, à la fois plus informés, avertis et « zappeurs » changent la donne et commencent à « prendre le contrôle ». Cette première partie va s’attacher à étudier les mouvements profonds à l’œuvre concernant la demande. Puis nous décrirons les évolutions du secteur de l’assurance, notamment la saturation du marché et la banalisation des produits, qui obligent également les compagnies d’assurances à se « préoccuper » de leurs clients. Enfin nous identifierons les enjeux de la fidélisation et de la relation client dans ce contexte avant de dresser un rapide état des lieux de la gestion de la relation client dans le secteur de l’assurance. 1.1 Les tendances de fond impactant l’évolution de la demande 1.1.1 Les nouvelles dimensions comportementales du consommateur 1.1.1.1 Une recherche d’autonomie qui s’épanouit dans une société connective De 1950 à nos jours, la société Française a énormément changé. En 1950, la France panse ses blessures et exprime un besoin très fort de sécurité. Les décennies 60 et 70 marquent quant à elles une rupture avec les décennies précédentes : c’est le début de la contestation, de l’autonomie et de l’expression personnelle. L’individu prend de plus en plus de distance par rapport aux modèles traditionnels et s’émancipe, témoignant de sa volonté d’effectuer ses propres choix, indépendamment de sa famille ou de la « tribu »6 à laquelle il appartenait historiquement. Même si dans les années 1990, et aujourd’hui encore avec la crise actuelle, les repères et les fondements s’écroulent avec la montée du chômage et une croissance en berne, l’émancipation qui s’exprime n’a jamais été démentie. Les individus intègrent également les notions de risque et le changement devient la norme dans la société. 6 MAFFESOLI M. (2007), « Le ré enchantement du monde - Morales, éthiques, déontologies », Paris, Ed. Table Ronde 9 Ce long processus, qui structure notre société moderne, « implique une remise en cause des fondements traditionnels du pouvoir et du système d’information des sociétés occidentales »7. Les individus modernes, qualifiés de « stratèges réalistes et avisés »8 nouent entre eux des relations qu’ils choisissent, donnent naissance à un foisonnement de réseaux et de socio systèmes informels qui prennent vie, trouvent leur propre régulation, et participent à la transformation du tissu de la société9. Ce sont les gens, au même titre que les entreprises et les institutions, qui changent la vie et le tissu social. Pour que ce besoin d’autonomie puisse s’épanouir, les individus ont besoin de connectivité. L’émergence d’Internet, de la téléphonie mobile et des nouvelles technologies permettent l’expression de ce besoin et l’accélération de l'indépendance. Le fait de fonctionner en réseau se retrouve dans tous les actes de la vie courante des consommateurs. A la question de savoir de quelle manière ils se décident quand ils doivent acheter un produit qu’ils n’ont pas l’habitude de consommer, la réponse qui vient en premier est « en demandant à des gens autour de moi qui s’y connaissent », avant d’aller demander à « un vendeur sur le lieu de vente »10. 1.1.1.2 Des clients plus exigeants et avertis qui n’hésitent pas à « zapper » Si dans les années 1950-1960, les consommateurs choisissaient une marque en fonction de la réputation de cette dernière, ils expriment aujourd’hui une préférence, et plus particulièrement « la préférence du moment », sachant que celle-ci peut être remise en cause à chaque instant. Les clients modernes « largement informés et exigeants, n’hésitent pas à se montrer infidèles dans le langage de l’entreprise et rationnels dans le leur ». 11 Le consommateur, tour à tour qualifié de butineur, zappeur a des exigences nouvelles qui se traduisent par de fortes attentes, notamment concernant : - un juste prix, - de l’information plus claire et transparente sur les caractéristiques des produits et leur réel bénéfice, - une facilité d’usage, - une réduction des temps d’attente, - du sur-mesure avec un discours et des offres personnalisées (en réponse au phénomène d’individualisation de la société), - une volonté d’accès possible en tous lieux et en tous temps à toutes les formes de commerce, - une récompense et une reconnaissance de leur fidélité, Or pour 43% des consommateurs, la fidélité n’est pas récompensée, et pour 39% d’entre eux, les « nouveaux » sont mieux traités que les clients en portefeuille,12 - et si possible du plaisir dans l’expérience d’achat. 7 DE VULPIAN A (2004), « A l’écoute des gens ordinaires, comment ils transforment le monde », Dunod Idem 9 OBSERVATOIRE SOCIOVISION (2008), Présentation à MAAF Assurances Décembre 2008 10 Idem 11 CAPGEMINI CONSULTING ET L’ESSEC (2008), « La relation client différenciante » 12 http://www.relationclient.net/BMC-Software-revele-l-infidelite-chronique-des-consommateurseuropeens_a2439.html 8 10 Ce nouveau consommateur est de plus en plus difficile à satisfaire. 1.1.1.3 Des comportements d’achat dans l’assurance qui peuvent être segmentés selon quatre profils comportementaux Outre ces critères, communs aux consommateurs dans leur globalité, les différents comportements d’achat des Français en assurance peuvent être classés selon quatre profils comportementaux13 : - Les assurés « Moyens » qui représentent 33% des acheteurs d’assurance en France : o ont une conception classique de l’assurance en tant que moyen de protection contre les risques o possèdent le nombre moyen de polices par assuré (5.9 contrats par assuré en France). Les trois autres segments présentent des profils de comportements et de postures qui sont tout à fait distincts les uns des autres et de la moyenne. - Les « Traditionnels », qui représentent 16% des acheteurs d’assurance en France : o aiment être rassurés lorsqu’ils achètent (par des conseils et/ou une marque par exemple). o sont le plus souvent fidèles et changent rarement d’assureur de leur propre initiative. o sont d’un âge plus avancé, dans une tranche de revenus moyens à élevés, et sont plus susceptibles d’être multi équipés (c’est-à-dire qu’ils détiennent plusieurs types de polices chez le même assureur). - Les « Opportunistes », qui représentent 25% des acheteurs d’assurance en France : o ont une conception classique de l’assurance en tant que moyen de se garantir contre les risques. o examinent continuellement le marché à la recherche des produits les plus adaptés à leur besoin. o sont pragmatiques et techniques lorsqu’ils achètent et par conséquent attentifs aux prix et/ou aux détails des produits. o veulent des renseignements et des avis indépendants, et utilisent souvent Internet pour recueillir des informations de base, avant de se faire leur propre opinion. o constituent un groupe potentiellement volatil, prêt à changer d’assureur si cela était facilité ou en cas de problème relatif à un sinistre. - Les « Indifférents » qui représentent 26% des acheteurs d’assurance en France : o ont tendance à avoir une couverture minimale. o leur revenu peut ne pas être suffisant pour disposer d’un portefeuille d’assurance complet, en particulier pour les produits d’assurance vie. o ont, au mieux, des doutes au sujet de la valeur de l’assurance et ont tendance à ne voir dans l’assurance qu’une prescription obligatoire. 13 CAPGEMINI (2008), World Insurance Report 2008 11 o sont généralement trop indifférents pour faire jouer la concurrence pour obtenir les meilleurs produits ou chercher. o sont souvent trop apathiques pour être volatils. Ces différentes approches comportementales soulignent le fait que dans les métiers de service, et à fortiori dans le monde de l’assurance, le « one size fits all » (la même taille pour tout le monde) est révolu.14 Puisque les consommateurs ont des approches différentes, les entreprises ne peuvent plus construire leur stratégie à partir d’une approche indifférenciée de leur clientèle et en partant du principe qu’une même offre satisfera tout le monde. Ce qu’il faut retenir : - De plus en plus, les clients effectuent des choix autonomes, en fonction de leurs propres critères. Ils cherchent de la transparence et sont en attente d’information sur les caractéristiques des produits. - Les clients exigent une relation et des offres personnalisées et souhaitent que les entreprises reconnaissent leur fidélité. C’est donc en fonction de ce nouveau référentiel client que les politiques de relation client et de fidélisation des compagnies d’assurance doivent être évaluées. 1.1.2 Internet : un outil qui amplifie les évolutions comportementales des clients 1.1.2.1 Internet ou la possibilité de faire des choix plus avisés Internet modifie considérablement le comportement d’achat des consommateurs. De par toute l’information qu’il confère, Internet apporte plus de pouvoir au client, sachant que cette information est plus transparente, indépendante, et provenant de sources multiples, que le consommateur peut croiser à sa guise. Il permet au client de faire des choix plus autonomes : la consommation devient « connective » et est beaucoup moins basée sur une approche traditionnelle où la marque imposait sa vision des choses. Internet enrichit donc les processus décisionnels puisqu’il permet aux consommateurs d’avoir accès à plus d’alternatives et de trouver des produits similaires plus facilement. Des entreprises se sont même positionnées en tant qu’intermédiaires (Amazom.com, Dealtime.com, Epinions.com, Assurland.com) pour permettre aux clients de comparer des produis, et ainsi augmenter le pouvoir de l’acheteur en offrant un meilleur pouvoir de négociation. En 2008, 44% des français « consultent des comparateurs de prix », 34% « consultent des conseils ou informations donnés par des internautes sur les produits ou marques » 14 HABABOU R. (2007), « Service gagnant, les secrets des entreprises qui créent la différence », Ralph Edition First 12 (un pourcentage en augmentation de 16 points comparés à 2007) ; et 20% donnent leur « opinion à propos de produits ou services sur des sites de consommation ».15 Concernant plus particulièrement la relation entre consommateurs et assureurs, Internet est un outil qui a transformé la relation, et ce à trois niveaux: - les assureurs sont plus exposés, - les clients attendent de la transparence, - ils attendent également de la fluidité et de la complémentarité entre les canaux de distribution Les différents rôles d’Internet en Assurance sont les suivants16 : - Recherche d’informations sur les assureurs et leurs produits (caractéristiques, tarifs…) : · 18 % des Français17 déclarent s’informer sur Internet pour l’assurance, tout en privilégiant le contact avec un interlocuteur de confiance pour l’achat. - Moyen de contact avec les assureurs · Internet est plébiscité comme mode de contact interactif disponible 7j/7 24h/24 grâce à l’email, mais les attentes des clients en terme de réactivité et de personnalisation dans ce domaine restent à satisfaire. Les utilisateurs sont globalement déçus, estimant le taux de réponse beaucoup trop faible. - Achat de contrats. · Seulement 2% des ventes ont été réalisées en 200818, plutôt par des hommes jeunes et Internautes experts, et le souhait du contact physique est encore très présent. Mais si les agences sont encore le canal de souscription privilégié en assurance, les clients ont toutefois des attentes de plus en plus fortes sur Internet en matière de souscription. · Par ailleurs, même si l’achat d’assurances sur Internet est encore timide, l’offre en ligne commence à émerger (Amaguiz, IDMacif, offre Auto exclusive Internet d’Axa, …). · Au delà du prix, qui reste le critère de choix majeur des cyber-acheteurs, la présence physique de l’enseigne ou d’une marque connue reste importante. - Gestion des contrats et des sinistres · La plupart des assureurs commencent à proposer sur leurs sites la modification des garanties des contrats, la possibilité d’effectuer des arbitrages en ligne sur les produits d’assurance vie. · Il est également possible pour les assurés de déclarer leurs sinistres IARD simples en ligne. Les comparateurs sont également omniprésents dans le monde de l’assurance. Les avantages pour les clients sont identiques à ceux décrits précédemment : - Facilité à comparer les prix, - Accès aisé au détail des produits et information disponible à tout moment. 15 OBSERVATOIRE SOCIOVISION (2008), Présentation à MAAF Assurances Décembre 2008 Etude interne MAAF Département Marketing et veille concurrentielle, Mars 2007 17 Donnée fournie par Service Internet MAAF, Avril 2009 18 Idem 16 13 Le leader Assurland comptabilise plus de deux millions de visiteurs par mois 19, sachant que ce volume a doublé en deux ans. 400 000 devis sont réalisés par mois sur ce site et plus de 100 000 mises en relation vers des assureurs sont effectuées. A noter, le prix n’est pas toujours le premier critère de choix (le prix le moins cher n’est choisi que dans 30 % des cas parmi les 4 offres présentées par Assurland20). Et demain ? A priori, 23% des personnes interrogées en France envisageraient d’acheter leur assurance sur Internet d’ici 3 ans21 (Figure 1). Tous les réseaux perdraient des parts de marché au détriment d’Internet. Si ce chiffre est bien entendu à prendre avec précaution, il reflète pour autant une tendance. Figure 1 : Réseau de distribution et achat d’assurance aujourd’hui et dans 3 ans. Source : enquête clients, Analyse Capgémini, 2007 1.1.2.2 Internet ou « l’enpowerement »22 des clients Par ailleurs, les nouvelles manières de faire ensemble, plus spontanées et en réseau donnent naissance à une nouvelle forme de notoriété qui va probablement prendre peu à peu plus d’ampleur que la publicité traditionnelle ou le marketing « pushpull » basé principalement sur de la publicité grand public, une stratégie tarifaire agressive et des promotions. En effet, grâce à l’appui des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), les clients participent de plus en plus à la diffusion de la marque et à sa notoriété. Au traditionnel bouche à oreille se sont ajoutés et substitués les blogs, sites web 2.0, communautés et autres forums consommateurs. Le client devient alors média, support de l’information et de la communication, l’entreprise voyant son image évoluer à travers lui. « C’est donc de moins en moins la marque qui parle à ses clients mais les clients qui parlent entre eux et avec la marque de la marque »23 ; le développement de la 19 Données chiffrées fournies par GOEFFROY B, Assurland, Mars 2009 Idem 21 CAPGEMINI (2008), World Insurance Report 2008 22 HABABOU R. (2007), « Service gagnant, les secrets des entreprises qui créent la différence », Ralph Edition First 20 14 marque et de la réputation s’effectuant en ligne et par les consommateurs eux-mêmes. Les exemples d’Ebay et d’Amazom sont particulièrement révélateurs dans ces domaines. Ces deux entreprises ont bâti leur notoriété davantage sur du bouche à oreille que sur de la publicité ou des méthodes traditionnelles du marketing. Dans ce cadre là, ces entreprises se situent beaucoup moins sur des logiques de marque que sur des logiques d’expériences, qu’il nous sera intéressant d’analyser dans la seconde partie. Focus sur l’influence des communautés : De plus, des communautés actives commencent à être très influentes sur la toile. Aux Etats-Unis, des sites tels que planetfeedback.com24, the complainstation.com25 sont des porte-voix géants permettant aux détracteurs d’une marque de diffuser leurs critiques, et, à l’inverse, aux prescripteurs de répandre leurs éloges. Internet devient donc un amplificateur et un accélérateur du bouche à oreille. Le site de planetfeedback est très clair quant à sa mission (Figure 2): Extrait de la mission de Planetfeeback « Tout au long de l'histoire du commerce, les consommateurs ont été dans une situation désavantageuse. Ils ont eu moins d'information que les vendeurs, et moins accès aux uns et aux autres. Ils ont eu moins de moyens pour faire part de leurs commentaires. Et moins de choix. C’est ce qu’Internet change. Internet réduit le fossé qui a toujours séparé les vendeurs des clients. Internet crée des consommateurs plus intelligents et plus forts. Chez PlanetFeedback, nous sommes passionnément engagés à aider les consommateurs à utiliser leur nouveau pouvoir. (…). Nous allons permettre aux consommateurs d’accroître leur contrôle. Internet est l’outil le plus centré sur le consommateur que l’histoire ait produit, et nous allons aider les consommateurs à l'utiliser pour leur plus grand avantage. • Nous allons connecter les individus les uns aux autres pour augmenter leur influence. • Nous allons augmenter les enjeux pour les entreprises à répondre à leurs clients. Nous allons obtenir des consommateurs l'autorisation d'agir pour défendre leurs intérêts. Le contrôle par les clients commence par le choix - le choix de fixer les règles du marché dans lequel ils évoluent. • Nous allons protéger l'information des consommateurs. Et nous allons leur donner les moyens de posséder des informations auxquelles ils ont droit. • Nous allons obliger les sociétés à respecter le choix des consommateurs, la protection de leur vie privée et de leur temps, et nous allons dénoncer ceux qui ne le font pas. Nous allons aider les consommateurs à récompenser les entreprises qui les servent le mieux. Les retours des clients, qu’ils soient - positifs et négatifs - sont productifs. Les consommateurs veulent de la qualité et seront loyaux en retour. • Nous fournirons de l’information fiable entre les consommateurs et les entreprises. • Nous allons permettre aux consommateurs de s’aider entre eux, et permettent aux entreprises de tirer des enseignements de ces nouvelles relations. • Nous allons éduquer les consommateurs et les aider à fournir des retours qui peuvent mener à de la création de valeur. Figure 2 : Extrait de la mission de planetfeedback. Source : www.planetfeedback.com 23 Entretien avec Mr HAVOT H, Responsable Marketing MAAF Assurances, Mars 2009 www.planetfeedback.com 25 www.thecomplainstation.com 24 15 D’ailleurs, d’ici 2011, le cabinet de conseil Gartner estime que les communautés virtuelles auront une influence directe sur un tiers du business en ligne et du business traditionnel, contre 9% aujourd’hui. 26 En France également, nous assistons à des regroupements de clients pour faire pression sur les marques. Des sites comme les arnaques27 ou cio28 (la communauté shopping) recensent de nombreuses rubriques, et notamment une rubrique « Assurances », où les consommateurs font état de leurs relations avec leurs assureurs ou banquiers, comme en témoigne l’exemple ci-dessous tiré du site www.cio.com (figure 3). Les consommateurs font entendre leur avis, partagent leurs expériences, notent les entreprises et les services délivrés. Figure 3 : Illustration de commentaires de consommateurs sur une marque. Source : www.cio.com Mentionnons également le réseau social mondial Facebook, révélateur de l’influence des communautés, qui à travers ses « causes » (application permettant de soutenir une cause et d’appeler à la pétition), peut influencer la politique d’entreprise. A titre illustratif, prenons l’exemple de la banque HSBC, qui pendant l’été 2007, décide d’augmenter le taux d’intérêt des découverts des comptes étudiants en Angleterre. Cette décision indigne les intéressés et devient une « cause » sur Facebook. Rapidement, le phénomène prend de l’ampleur, à tel point que le 31 août 3007, HSBC décide de revenir sur sa décision pour les découverts inférieurs à 1500£ et s’engage à rembourser les intérêts perçus pendant la période d’application. 26 http://www.gartner.com/it/page.jsp?id=685208&tab=why_attend#crmpredictions www.lesarnaques.com 28 www.cio.com 27 16 1.1.2.3 L’influence croissante d’Internet corrélée à une baisse de l’impact de la communication traditionnelle Ainsi, parallèlement, la publicité générale montre ses limites et son influence est à relativiser, dans la mesure où elle informe moins sur ce qui existe et aide moins les consommateurs à choisir ce qu’ils achètent29. Brown (2006) 30 allant même jusqu’à dire que « les entreprises ne peuvent plus espérer sur le long terme de résultats positifs d’actions publicitaires et marketing dirigées vers une masse de clients indifférenciée via un support unique » car les consommateurs modernes sont plus difficiles à toucher du fait de la profusion et de la fragmentation des médias. Dans ce cadre là, la relation client traditionnelle push / pull doit également être revue, d’autant plus que les clients tendent à réagir de plus en plus négativement au push marketing. Une étude publiée aux Etats-Unis en 2004 par Yankelovich estime que 54% des consommateurs américains éviteraient d’acheter des marques qui les noient de marketing et publicité.31 La plupart des auteurs sur le sujet affirment donc que la publicité de masse est un outil sur le déclin et que c’est sans doute en privilégiant la relation avec le client que les entreprises parviendront le mieux à gagner des marchés, à les conserver et à les développer. Pour autant, le budget publicitaire des assureurs a augmenté de façon exponentielle ces dernières années (à titre d’exemple, +41 % pour la profession entre 2005 et 2006). Cela a permis à nombre d’entre eux, notamment à MAAF, de voir leur notoriété spontanée grimper en flèche. MAAF en terme de notoriété spontanée, se situe maintenant en seconde place à 40%, juste après AXA32. Sans remettre en cause les fondamentaux de la publicité grand public, nous assistons aujourd’hui via Internet à un nouveau phénomène. Certains consommateurs commencent à réagir négativement face à ce trop plein d’information et de publicité. A titre d’exemple, des communautés « anti-pub » se construisent sur Facebook pour exprimer leur « ras le bol ». Ce qu’il faut retenir : Les processus d’achat des clients évoluent, notamment avec l’influence d’Internet. L’accès à l’information via Internet joue un rôle pédagogique important. A la communication traditionnelle se substitue peu à peu une nouvelle forme de notoriété et de diffusion de la marque par les clients eux-mêmes. Les clients ne se contentent plus d’un rôle passif : regroupés au sein de communautés actives, ils partagent leur point de vue entre pairs voire même peuvent influencer les décisions d’une entreprise. Les entreprises se retrouvent de fait plus exposées. 29 OBSERVATOIRE SOCIOVISION (2008), Présentation à MAAF Assurances Décembre 2008 BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education 31 URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. 32 Magazine interne « En Vue » MAAF Assurances, Mars 2009 30 17 1.1.3 Des tendances amplifiées par la crise La crise aujourd’hui est multiple et ses effets vont profondément modifier l’économie de demain. Selon les observateurs, il existe trois crises à l’œuvre actuellement : une financière, une économique et enfin une sociale, dont les effets interagissent entres eux.33 Mais la vraie crise sous-jacente est celle de la société ; c’est une crise de la peur, peur de manquer, d’être démuni, de devenir un sans domicile fixe. 34 C’est aussi une crise du sens pour les individus qui composent la société en perte de repères. La crise engendre également une forte érosion de l’optimisme individuel, une augmentation du scepticisme et une perte de confiance dans les institutions et les entreprises. « Et la population, relativement pessimiste à court terme et incertaine à moyen terme, se montre inquiète à l’égard des protections sociales ». 35 Parallèlement, selon le Cercle du Marketing Prédictif, « les citoyens consommateurs retrouvent des réflexes ancestraux : se raccrocher à leurs racines, recréer des petits groupes… D’où, la résurgence du communautarisme, des cercles, l’importance des proches, le recentrage sur l’environnement, mais aussi la réapparition des valeurs de proximité avec ce corollaire : perdus face à la crise et au trop plein d’informations, le consommateur nouveau recherche plus la confiance dans les individus (prescripteurs désintéressés) que dans les marques traditionnelles ».36 La crise est donc porteuse de nouvelles valeurs pour les clients, qui s’expriment par des besoins de simplicité, d’honnêteté, et qui portent les acteurs économiques à plus de responsabilité et d’éthique de leur part. Une relation où les valeurs d’égalité, de proximité, de personnalisation et de reconnaissance, d’information et de sécurisation, de recherche de la valeur juste et d’éthique ne sont plus des concepts, mais deviennent des principes d’action. Simultanément, nous constatons également le retour à des besoins essentiels et primaires, c'est-à-dire se loger, se nourrir sainement, être en bonne santé, rester jeunes, assurer son avenir ainsi que celui de ses proches, vieillir chez soi, disposer de ressources suffisantes quoiqu’il arrive et pour toute sa vie. Ce qu’il faut retenir : Les consommateurs recherchent plus la confiance dans les individus que dans les marques traditionnelles. La crise est porteuse de sens, les entreprises qui adoptent un positionnement éthique, respectueux des clients et humble en sortiront gagnantes. 33 Entretien avec Mr REVEST M, Directeur Innovation COVEA, Mars 2009 Idem 35 OBSERVATOIRE SOCIOVISION (2008), Présentation à MAAF Assurances Décembre 2008 36 CERCLE DU MARKETING PREDICTIF « Crise économique, tensions budgétaires. Que peut faire le marketing prédictif ? » 15 décembre 2008. 34 18 En conclusion de cette première sous partie, il semble important d’insister sur le fait que la relation client entreprise commence à s’inverser. S’il semble illusoire de penser que le client établit maintenant lui-même les règles du jeu, ce dernier acquiert tout de même plus de pouvoir et de marge de négociation37. Les principales tendances concernant l’évolution de la demande sont symbolisées par une autonomie du client dans ses choix et une exigence accrue concernant notamment la recherche d’un juste prix, de la personnalisation et de la reconnaissance. Nous allons maintenant nous pencher sur les principales évolutions qui caractérisent le marché de l’assurance. Nous verrons que ces transformations doivent porter le secteur à repositionner le client au cœur de leur fonctionnement et organisation. 37 DUPUY F (2004). « Sociologie du changement, Pourquoi et comment changer les organisations ? », Edition Dunod 19 I.2 L’assurance dommages : un marché mature, banalisé, et hyper concurrentiel 1.2.1 Un marché mature sur lequel s’exerce une forte concurrence 1.2.1.1 Un marché mature Le marché de l’assurance semble offrir peu de perspectives de croissance à environnement réglementaire constant. Les besoins fondamentaux d’assurance de la plupart des clients ont en effet été en grande partie satisfaits, limitant de ce fait le potentiel de croissance globale. Les Français sont parmi les plus équipés en assurance avec 5,9 polices d’assurance détenues en moyenne38 (voir figure 4). Ce qui signifie que le niveau d’équipement est déjà relativement élevé et qu’il reste donc peu de marge pour une évolution de la matière assurable. Figure 4 : Nombre moyen de polices détenues par pays. Source : Analyse Capgémini 2007 Les assureurs, à partir de cet état de fait, peuvent choisir soit : - D’axer leurs efforts sur la conquête en captant les clients opportunistes, qui rappelons le représentent 25% de la clientèle en France. - D’intégrer le fait que si un contact prospect est précieux, un contact client l’est d’autant plus, et d’axer leurs efforts sur la détention et le multi équipement de leur clientèle, dans la mesure où cette dernière peut représenter un potentiel d’équipement supplémentaire. 38 CAPGEMINI (2008), World Insurance Report 2008 20 Bien évidemment, la réalité est plus complexe et nuancée et c’est probablement en privilégiant une stratégie qui combine les deux approches qu’une entreprise pourra espérer croître de manière durable. 1.2.1.2 Un marché banalisé entraînant une concurrence exacerbée Si l’on effectue un rapide historique du secteur de l’assurance français, retenons trois faits majeurs : - Dans les années 1950, les Mutuelles Sans Intermédiaires (MSI) font leur apparition. Elles bouleversent le marché en basant leur business model sur un rapport volume / prix et en offrant ainsi des tarifs très compétitifs. - Dans les années 1980, la concurrence s’intensifie avec l’arrivée de nouveaux acteurs puissants, disposant d’importants réseaux de distribution. Aux assureurs traditionnels, viennent s'ajouter les bancassureurs, et également la grande distribution, les constructeurs automobiles, les agences immobilières... Les bancassureurs ont aujourd’hui plus de 70% des parts de marché en assurance vie et détiennent 20% de l’assurance dommage. En 20 ans, ils se sont imposés comme des acteurs incontournables sur le marché. La force de frappe que leur confère leur maillage territorial explique en partie ce fait, de même que la distribution d'un produit nouveau se fait à coûts pratiquement constants du fait de l’infrastructure déjà existante. Aujourd’hui, ces acteurs sortent gagnants du jeu. Alors que les ténors de l’assurance dommage, tels que Covéa, Macif ou Maif perdent des parts de marché, le Crédit Agricole et le Crédit Mutuel ont respectivement gagné 0.5 et 0.2 point en 200739. «Les bancassureurs ont une dynamique forte sur ce secteur plutôt atone et se montrent de plus en plus agressifs » explique Maxime Letribot, associé chez Eurogroup.40 - Enfin, l’arrivée d’Internet dans les années 2000 modifie profondément la donne. La disponibilité immédiate des informations accroît la transparence à la fois en assurance vie et non vie et permet aux clients de comparer plus facilement les prix et les produits. Tous ces phénomènes concourent à une concurrence très forte et exacerbée sur le marché de l’assurance, comme en témoigne la politique de « guerre des prix » qui fait rage depuis quelques années dans le secteur. Par ailleurs, les produits étant banalisés, tous les acteurs proposent le même type de produits et de services à leurs clients ou prospects et cherchent à les attirer puis à les conserver avec des offres attractives consistant en des prix les plus bas possibles. 1.2.1.3 Le nouvel eldorado : les assurances de personne ? Contrairement au marché de l’assurance dommages où la croissance annuelle stagne autour de 2.5% depuis 200741, le marché de l’assurance de personnes est en plein essor. Avec cinq années consécutives de hausse, les assurances de personnes enregistrent en 39 L’Agefi Hebdo « Les Mutuelles d’assurance en perte de vitesse », 9 au 15 avril 2009 Idem 41 Idem 40 21 2007 une baisse de 2 % par rapport à 200642, qui s’explique par le contexte économique et financier peu favorable. Toutefois, les perspectives des assurances de personnes restent positives, notamment du fait du désengagement de la sécurité sociale et d’une population vieillissante toujours croissante. Les français prennent également conscience de la part financière toujours plus importante laissée à leur charge et se protègent en conséquence pour se constituer des revenus complémentaires au moment de la retraite ou pour les aider à parer aux coups durs de la vie : accident, maladie, décès ou dépendance. Ainsi, le secteur de la prévoyance est ainsi un marché en plein essor : les consommateurs sont de plus en plus sensibilisés aux accidents de la vie privée ; le tabou des obsèques tombe: 2 millions de personnes ont déjà souscrit un contrat obsèques43, et 13% de la population l’envisagent sérieusement, et la dépendance est un réel enjeu de société (1.8 million de personnes sont couvertes). Le secteur de la santé et de l’assurance complémentaire offre également de réelles opportunités : si plus de 92% de la population française est aujourd’hui couverte, les assureurs prennent le relais de la sécurité sociale sur des pans entiers de soins (optique, dentaire,…) et la croissance est soutenue (+7% en 2007)44. Enfin, l’équipement des français en assurance vie se poursuit : 40% des ménages sont équipés et les encours représentent plus de 122,6 milliards d’euros de cotisations en 200845. En résumé, le secteur de l’assurance de personnes représente indéniablement un très fort potentiel de développement, toutefois, l’assurance de personnes ne peut être appréhendée par les assureurs comme l’assurance dommage, d’où la nécessité de reconsidérer leur politique client et leurs modes d’entrée en relation avec les clients. Ce qu’il faut retenir : Le marché de l’assurance de l’assurance est caractérisé par une situation extrêmement concurrentielle. Sur un marché qui arrive à saturation sur plusieurs segments, et où les perspectives d’évolution de la masse assurable sont relativement faibles, tout l’enjeu pour les assureurs consiste donc à se positionner sur les assurances de personnes, et à tenter d’obtenir de la croissance supplémentaire sur leurs clients en portefeuille. 42 FFSA (2008), « L’assurance en France en 2007, les assurances de personnes » Idem 44 Idem 45 L’Agefi Hebdo « Les Mutuelles d’assurance en perte de vitesse », 9 au 15 avril 2009 43 22 1.2.2 D’un état statique vers un état plus dynamique du marché 1.2.2.1 D’un marché de « stocks » à un marché de « flux » Le marché de l’assurance est encore un des rares marchés où les clients sont aujourd’hui peu volatiles du fait des contraintes liées à la résiliation de leurs contrats à tacite reconduction. Avec des durées moyennes de contrats autour de 11 ans, les clients français sont parmi les plus stables.46 Mais si ce marché se traduit actuellement par une certaine apathie des clients, de nouveaux signes vont dans le sens d’une plus grande fluidité du marché. Pour preuve, la volatilité, même si elle reste faible comparée à d’autres secteurs, a augmenté au cours des années précédentes. La rotation des portefeuilles devient en effet de plus en plus importante, avec un client de plus en plus qualifié de « zappeur et butineur ». Plusieurs phénomènes convergent dans le sens d’une plus grande fluidité du marché, et il est probable que dans les années à venir, le client pourra probablement quitter son assureur lorsqu’il le souhaitera, comme c’est déjà le cas au Royaume-Uni où la maturité dans l’utilisation d’Internet et la plus grande facilité de résiliation (absence de tacite reconduction) expliquent une durée moyenne nettement plus faible qu’en France. D’ailleurs, le graphique ci-dessous (figure 5) montre qu’en France, 35% des clients seraient prêts à changer d’assureur si les modalités de transfert étaient facilitées. 47 Figure 5 : Pourcentage de consommateurs prêts à changer d’assureur si les modalités de transfert étaient facilitées. Source : Capgémini 2008 Retenons tout d’abord l’influence de la Commission européenne et sa volonté d’accroître la concurrence sur le marché unique de l’assurance. Ensuite, l’évolution de la réglementation, notamment avec la loi Châtel, impose de nouvelles contraintes aux assureurs. La loi (n°2008-3) du 3 janvier 2008 pour « le développement de la concurrence au service des consommateurs » renforce l'information du consommateur démarché par un assureur mais aussi sa faculté de renoncer au contrat. Le renouvellement automatique des assurances n’est pas remis en 46 47 CAPGÉMINI (2008), World Insurance Report 2008 Idem 23 cause pour l’instant, mais la loi Châtel oblige désormais les assureurs à rappeler la date limite de résiliation du contrat lors de l’envoi de l’avis d’échéance. Si pour les associations de défense des consommateurs, telles que UFC Que Choisir, la loi Châtel sur le développement de la concurrence signe de timides avancées en faveur des consommateurs48, il est fort à parier que cette tendance de fond ne ferra que s’intensifier. Notons également que ces signes de volatilité sont générés par la concurrence accrue, l’accès plus facile à l’information, et l’évolution de l’offre proposée par certains assureurs, comme par exemple le « pay as you drive » ou l’assurance au kilomètre. 1.2.2.2 Focus sur les résiliations et le positionnement des acteurs Si l’on reprend la segmentation définie en première sous-partie concernant les différents profils d’acheteurs d’assurance, le graphique ci-dessous (figure 6) nous permet de constater que certains segments comportementaux, comme les opportunistes ou les clients se situant dans la moyenne sont beaucoup plus volatils que d’autres. Figure 6 : Matrice de volatilité des segments comportementaux. Source Capgémini 2008 Par ailleurs, si l’on se base sur les résultats de l’enquête TNS Sofres des Assurances Auto49 (méthodologie de l’étude en annexe 2), la moyenne des taux de résiliation des contrats automobile sur le marché français s’établirait à 8.1%, dont 1.9% à l’occasion d’un changement de véhicule, 3.8% pour cause d’insatisfaction (pourcentage en hausse par rapport à l’année précédente) et 2.3% pour disparition du risque. Les deux graphiques sur la page d’après (figures 7 et 8) représentent les tendances récentes du marché en matière d’acquisition et de résiliation des contrats automobile 48 49 http://www.quechoisir.org/positions/Loi-Chatel-Un-sabre-de-bois TNS SOFRES (2007), Baromètre des Assurances Auto et Habitation 24 (pour 100 contrats Auto souscrits en 2007). Si AXA et MAAF Assurances sont les assureurs qui captent le plus de nouveaux contrats, ils figurent également dans le peloton de tête concernant les « résiliations », même si ce phénomène touche tous les acteurs. Les Mutuelles Sans Intermédiaires MACIF, MAIF, GMF et MATMUT semblent être relativement épargnées par le phénomène de résiliation, avec des taux inférieurs à la moyenne. Tendances récentes du marché en matière d’acquisition de contrats auto Figure 7, source : enquête TNS Sofres 2008 Tendances récentes du marché en matière de résiliation de contrats auto Figure 8, source : enquêteTNS Sofres 2008 Toutefois, les chiffres indiqués par TNS Sofres dans son étude 2007 sont à interpréter avec prudence car ils ne prennent en compte qu’un échantillon de 100 contrats et ne peuvent à ce titre donner une image fidèle de l’évolution d’un portefeuille. L’intérêt de ces chiffres réside dans le fait qu’ils décrivent des grandes tendances. Ce qu’il faut retenir : Même si l’inertie des clients est encore forte, la tendance montre une évolution du marché vers plus de fluidité. La Commission Européenne va influencer ce phénomène. Certains assureurs, dont MAAF Assurances, enregistrent déjà de forts taux de résiliations qui contre carrent les efforts liés à leur dynamisme commercial. Nous venons de voir dans cette sous-partie les principales caractéristiques du secteur de l’assurance : 25 - Une hyper concurrence Un marché banalisé offrant des possibilités de différenciation moindres Une tendance à l’évolution du marché vers plus de fluidité Un phénomène de résiliation important pour certains acteurs Dans un tel contexte, chaque client est « précieux », en ce sens qu’il est rare du fait de la saturation du marché. Les assureurs doivent donc porter un soin tout particulier à leurs clients en portefeuille. C’est tout l’enjeu de la fidélisation que nous allons traiter dans la prochaine sous-partie. 26 1.3 Les enjeux de la relation client et de la fidélisation dans un tel contexte Ainsi, face aux modifications des consommateurs d’une part et à l’intensification de la concurrence et la saturation des marchés d’autre part, l’enjeu d’établir une relation stable en reconnaissant la fidélité des clients semble primordial pour les assureurs. Mais si cette préoccupation, liée au respect de la clientèle paraît être une impérieuse nécessité, les assureurs, pour des raisons historiques et structurelles, ne sont pas actuellement « orientés » client. D’où la nécessité pour ces derniers de réfléchir à la notion de relation client et de fidélisation. 1.3.1 Les enjeux de la fidélité 1.3.1.1 Lien entre fidélité, rentabilité et croissance de l’entreprise. Selon BMC Sofware50, « l’infidélité des consommateurs provoquerait une perte de 3.9 milliards d’euros par an pour les entreprises ». Ainsi côté entreprise, la fidélisation est autant un levier de différenciation qu’un moyen de parer au fait que la conquête permanente est onéreuse. Selon Reichheld et Sasser, « retenir un client coûterait jusqu’à cinq fois moins cher que d’en conquérir de nouveaux ».51 Toujours selon Reichheld, « une augmentation du taux de fidélisation de 5% permettrait d’accroître le profit de 25% à 85% selon les secteurs d’activité, car une entreprise perd en général entre 15 à 20% de sa clientèle chaque année52 ». Les travaux du TARP (Technical Assistance Reseach Program)53 confortent ces observations. Ils montrent que conquérir un nouveau client revient quatre à cinq fois plus cher que de garder un client déjà actif. Même si les chiffres obtenus lors de ces études doivent être pris avec le recul nécessaire en fonction des secteurs d'activité, il ne fait aucun doute que la fidélisation client permet d'opérer un effet de levier pouvant être très important sur la rentabilité. 50 http://www.relationclient.net/BMC-Software-revele-l-infidelite-chronique-des-consommateurseuropeens_a2439.html 51 REICHHELD, F. and SASSER, W. (1990), “Zero defects: quality comes to services”, Harvard Business Review, Sept-Oct, 1990. 52 REICHHELD F. F, (1999), “L’effet Loyauté : réussir en fidélisant ses clients, ses salariés et ses actionnaires”, Edition Dunod 53 Technical Assistance Research Program (1990) "Maximizing Customer Satisfaction and Directly Linking to the Bottom Line," 27 Les raisons principales en sont les suivantes54 : - Une baisse des coûts d’acquisition de clients. Le levier de rentabilité lié à l'amortissement des coûts d'acquisition est particulièrement fort pour les secteurs ou la durée de vie d'un client est théoriquement élevée et ou par conséquence, les coûts d'acquisition peuvent être très importants en regard des premières transactions enregistrées, comme par exemple dans le domaine de l'assurance. Ainsi, si le client n'est pas fidèle et part relativement vite, l'amortissement du coût d'acquisition ne peut se faire. - Une augmentation du chiffre d’affaires généré par client. Plus un client est fidèle et donc ancien, plus en moyenne il génère du chiffre d'affaires en augmentant sa fréquence d'achat et le montant moyen des achats réalisés. Cette augmentation de chiffre d’affaires liée à l'ancienneté du client s'explique par la confiance croissante éprouvée à l'égard du vendeur et par une meilleure connaissance de son offre. - Un effet de recommandation. Plus un client est ancien, plus sa propension à recommander l'entreprise est forte et plus ses recommandations sont pertinentes et adressées à des profils de prospects correspondant à la cible de l'entreprise. - Une diminution des coûts de gestion. Un client fidèle devient moins coûteux à gérer, car il connaît mieux l'entreprise et son fonctionnement et a tendance à moins utiliser ou de façon plus autonome les fonctions de support. Dans le même temps, l'entreprise apprend également à connaître son client. La fidélité serait donc la clé d’une croissance profitable et d’un avantage compétitif à long terme. Toutefois, une politique de fidélisation excessive peut présenter une véritable menace pour l’entreprise, car elle peut conduire à un vieillissement de la clientèle. Rappelons qu’une entreprise performante doit par conséquent effectuer un subtil dosage entre les actions de fidélisation et les actions de conquête. 1.3.1.2 Fidélité active versus fidélité passive Lorsque l’on parle de fidélité, il convient de distinguer la fidélité passive à la fidélité active. « La fidélité passive est considérée comme un état de fait où les clients, par inertie, habitude ou encore par crainte de l’effort lié au changement, restent liés à une entreprise »55. Elle se retrouve par exemple lorsque les consommateurs doivent faire face à un process complexe pour rompre leur contrat, comme c’est le cas dans les secteurs bancaire ou de l’assurance notamment. 54 REICHHLELD F.F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 55 FORTASSIN P. « GRC et Conduite du changement, Comment mettre en oeuvre une GRC ? ».Cours ENASS Master 2, 20 janvier 2009 28 Cette fidélité acquise par passivité des clients peut se révéler très fragile lorsque le client décide de partir où lorsqu’un marché devient plus ouvert et implique une versatilité potentielle importante.56 A l’inverse, la fidélité active évoque une idée positive, c’est « un engagement profond à racheter de façon régulière un produit ou un service plus apprécié que les autres, malgré des circonstances changeantes ou des actions marketing présentant un impact potentiel suffisant pour entraîner une évolution des comportements ». 57 Elle évoque de la part des consommateurs une véritable préférence pour la marque, qui se traduit par une relation durable qui résiste mieux aux aléas du marché car les clients sont moins sensibles aux pressions de la concurrence. Cette fidélité est gage de solidité de la relation et d’un portefeuille clients stable. C’est cette fidélité que les entreprises doivent développer et sur laquelle s’appuyer, et non pas sur la fidélité passive, qui nous l’avons vu, peut se révéler très précaire. 1.3.1.3 La fidélisation : une démarche construite La fidélisation, quant à elle, est un « processus construit qui intègre toutes les actions d’une entreprise destinées à influencer le comportement d’achat actuel et futur d’un client de manière positive afin de stabiliser et d’élargir la relation avec ce client »58. C’est donc une stratégie qui « identifie les meilleurs clients, les maintient grâce à une relation interactive à valeur ajoutée et axée sur le long terme, pour accroître leur rendement ».59 Il s’agit d’une démarche sélective, en ce sens que même si le programme s’adresse en apparence à tous les clients, l’animation, les offres et les récompenses doivent être ciblées. Ainsi, une stratégie de fidélisation cherche à faire évoluer positivement l’attitude et le comportement du consommateur, l’objectif étant d’installer une relation de confiance, d’engagement et d’attachement qui s’inscrit dans la durée. Elle permet de développer une relation privilégiée et durable avec un client ciblé afin d’en accroître la valeur pour l’entreprise et surtout afin de retarder son départ. Ce qu’il faut retenir : La fidélité des clients permet d’augmenter les marges des entreprises et ainsi assure une croissance profitable sur le long terme. Il faut distinguer la fidélité passive, résultant de l’inertie des clients, de la fidélité active qui résulte d’une démarche volontaire et positive des clients. C’est sur la fidélité active qu’une entreprise doit concentrer ses efforts. La fidélisation est une démarche active de l’entreprise pour retenir des clients qu’elle aura préalablement identifiés. 56 Idem OLIVIER R. (1997), “Satisfaction : a behavioral perspective on the customer”, Mc Graw-Hill 57 BRUHN M. et HOMBURG C. (1998) in MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert 58 Idem 59 BARLOW R. (1992), « Relationship Marketing, The Ultimate in Customer Services », Retail Control, mars. 57 29 1.3.2 La corrélation entre satisfaction et fidélité La fidélisation n’est pas une fin en soi. En effet, la satisfaction initiale des clients par une qualité des produits et services est le premier pas vers la fidélité. La satisfaction génère de la valeur à trois points de vue : - une sensibilité moindre des clients à l’égard de l’offre concurrente, - une fidélité accrue des clients, - du bouche à oreille positif. La satisfaction des clients est réelle lorsque la promesse faite par l’entreprise est conforme et cohérente avec l’attente des clients et surtout avec l’expérience vécue par ces derniers, comme en témoigne le triangle inversé ci-dessous (Figure 9). A aucun moment, la promesse ne doit être en contradiction avec l’expérience vécue ou les attentes des clients. Figure 9 : Triptyque promesse, attentes et expérience vécue. Source conférence EFMA, la relation client différenciante. Toutefois, même si la satisfaction est un élément nécessaire à la fidélité, elle n’est plus suffisante pour assurer la fidélité des clients et ce n’est plus parce qu’un client est satisfait qu’il est fidèle. En effet, « qui dit satisfaction pense en effet souvent fidélité. Mais avec des consommateurs de plus en plus volatils et parfois ‘multi fidèles’, la corrélation entre les deux notions n’est plus évidente »60. Pour preuve, les clients sont très majoritairement satisfaits de leur assureur 61: - 3 sur 4 sont satisfaits des contacts avec leur assureur - 7 sur 10 sont satisfaits de la gestion des sinistres Toutefois en assurance dommages, 31 % des clients ont changé d’assureur au cours des 5 dernières années. En assurance vie, ce taux est de 9 %.62 Ainsi aujourd’hui, se contenter de la satisfaction des clients n’est plus suffisant. Les clients, plus exigeants et difficiles à satisfaire, conditionnent dorénavant leur ré achat à 60 http://www.lcmp.fr/ (blog du Cercle du Marketing Prédictif) Données LH2, dans Etude interne MAAF Département Marketing et veille concurrentielle, Mars 2008 62 Idem 61 30 des entreprises qui leur fournissent de « l’hyper satisfaction », comme en témoigne le graphique ci-après (Figure 10)63. Figure 10 : Lien entre satisfaction clients et ré achat. Source conférence EFMA, la relation client différenciante. Ce qu’il faut retenir : La satisfaction qu’une entreprise procure à ses clients est le premier pas vers la fidélité des clients. Toutefois, les entreprises ne peuvent plus partir du principe qu’un client satisfait restera fidèle. 1.3.3 L’assurance et la relation client 1.3.3.1 Un secteur historiquement orienté produit et non client L’assurance, du fait de l’inversion de la chaîne de production (le client paie une prime pour bénéficier d’un service à posteriori, le service étant conditionné à l’occurrence d’un aléa) a un business model très particulier. Les clients paient donc pour un service « futur et incertain », et les assureurs quant à eux commercialisent un produit dont le coût ne sera connu qu’à postériori. Cette spécificité exige un très haut niveau de technicité où les techniques actuarielles et les statistiques, c'est-à-dire le calcul d’une prime en fonction d’un aléa futur et incertain, y tiennent une place prépondérante. La définition des tarifs repose ainsi sur la probabilité des risques encourus, déterminés de manière technique. 63 FINALTA, Conférence La Relation Client Différenciante, EFMA, Décembre 2008 31 Pour ces raisons, le secteur de l’assurance s’est construit autour des lignes de produits et de leur rentabilité produit par produit et non pas autour d’une orientation client qui supposerait la création de valeur à la fois d’une manière globale pour le client et d’une manière profitable pour l’entreprise. Dans la plupart des cas également, le système informatique des assureurs s’est calqué sur l’organisation produit et fonctionne également par ligne de produit. L’information concernant le client est rarement centralisée. De fait, les assureurs sont plus orientés « produits » que réellement « clients ». 1.3.3.2 Un domaine réglementé et complexe L’assurance est un domaine très réglementé, notamment par le système de tacite reconduction et les processus de résiliation et de mise en demeure qui structurent fortement la vie des contrats. C’est également un domaine relativement complexe. La plupart du temps, l’acte d’achat d’assurance est considéré comme « subi » voire « contraint » par les clients, et généralement vécu comme obligatoire64. Ainsi, du fait de la complexité du domaine et des contraintes juridiques qui pèsent sur la vie des contrats, nous pouvons penser que ce système génère une fidélité que l’on pourrait qualifier de « passive » et qui dans la majorité des cas s’exerce plus par habitude, inertie ou contrainte que par un réel attachement à la marque. 1.3.3.3 Un positionnement de « chasseur » et non pas d’« éleveur » Nous avons vu précédemment que le secteur de l’assurance était caractérisé par une concurrence exacerbée. Cet état de fait amène toutes les entreprises d’assurance à un même enjeu majeur : aller chercher les clients par un positionnement tarifaire excellent. Mais ce positionnement montre deux limites. - Tout d’abord, la guerre des prix que mène actuellement les assureurs, avec des offres centrées autour des prix les plus bas, incitent les clients à se montrer sensibles aux prix puis infidèles, avec le paradoxe suivant : les clients sont récompensés, non pas pour leur loyauté, mais pour leur infidélité. « Les assureurs sont en effet plus centrés sur la conquête d’affaires nouvelles avec des tarifs privilégiés et se préoccupent peu de leurs clients en portefeuille. Pour preuve, les tarif des affaires nouvelles est parfois deux fois moins élevé que celui des affaires en portefeuille »65. Par ailleurs, il est à noter que « la seule promotion immédiate ne génère ni satisfaction ni insatisfaction auprès des clients »66. - Ensuite, le « tout tarif » conduit à une érosion des marges et du chiffre d’affaires. Ainsi en parallèle, tout porte à croire que les assureurs vont devoir trouver une autre manière de faire, et pas seulement se positionner sur le prix. 64 PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance CHARTIER-KASTLER C. (2009), La Tribune de l’Assurance, N° 134, Mars 66 http://www.lcmp.fr/ (blog du Cercle du Marketing Prédictif) 65 32 L’enjeu majeur de toutes les compagnies d’assurance, comme nous l’avons dit précédemment, est donc de réaliser un subtil dosage stratégique entre conquête et rétention, et, une fois que le client a été attiré par le prix, mettre en place les moyens adéquats pour les retenir le plus longtemps possible. A côté de la référence tarif, la référence client devient donc primordiale. 1.3.3.4 La perception de l’assurance par les Français Selon les sources auxquelles on se réfère, l’image de l’assurance et la perception qu’en ont les Français peuvent varier. En effet, selon le baromètre « image de l’assurance en France » réalisé par OpinionWay pour la Fédération Française des Sociétés d’Assurances67 (méthodologie de l’étude en annexe 3), le secteur dans son ensemble jouit d’une bonne image. La perception des sociétés d'assurances génère 71 % d’opinions positives. Pour 57% des sondés (ou doit-on dire : « pour seulement 57% des sondés »), l’assurance est un secteur perçu comme proche des préoccupations des gens. Les personnes interrogées se déclarent satisfaites des services rendus par leur assureur. 93 % entretiennent d’ailleurs une “bonne image” à l’égard de leur interlocuteur en assurance habitation et 88 % pour les interlocuteurs en assurance vie, épargne, retraite. La qualité du conseil et de l’information s’améliore puisque 81 % des Français déclarent que “les assureurs sont disponibles quand on a besoin d'eux”. Toutefois, si comme l’indique le graphique suivant (figure 11), le secteur de l’assurance est considéré comme indispensable, il semblerait que la confiance ne soit pas son attribut principal. Figure 11 : Qualificatifs définissant les assureurs. Source : FFSA, Baromètre Image de L’assurance en France, 3ème vague. Par ailleurs, la dimension commerciale et financière est considérée comme trop présente, et ce, au détriment de l’information et de la transparence comme en témoigne 67 http://www.ffsa.fr/WebFFSA/portailffsa.nsf/html/frameset?opendocument&arg=sondageimage2008 33 le graphique ci-dessous (figure 12). Et pour 28 % des sondés seulement, le secteur est “simple”. Enfin, seuls 41 % des répondants estiment que le secteur est “transparent” et 76 % adhèrent à l’idée que “les Français ne comprennent pas l'assurance et c'est pour cela qu'ils en ont une mauvaise image”. Figure 12 : Autres qualificatifs définissant les assureurs. Source : FFSA, Baromètre Image de L’assurance en France, 3ème vague, 2008. Ce problème de confiance est également mis en exergue par l’Observatoire Socivision, pour lequel les trois quarts des français seraient méfiants à l’égard des compagnies d’assurance68, comme en témoigne le graphique suivant (figure 13), sachant que cette opinion est sur représentée parmi les populations précaires et les consommateurs populaires. 68 OBSERVATOIRE SOCIOVISION 2008, Présentation à MAAF Assurances, Décembre 2008 34 Figure 13 : Méfiance des français vis-à-vis des assureurs. Source Sociovision 2008 Ainsi, alors que la mission de l’assurance est de protéger les assurés contre les aléas de la vie et de fait devrait susciter de la confiance, le secteur inspire à l’inverse de la méfiance et est jugé opaque. Pour autant, si les assureurs semblent légitimes à répondre aux préoccupations des français, notamment concernant leur rôle dans le besoin de protection des citoyens et de leurs proches, l’image qu’ils ont aujourd’hui semble mitigée, d’où la nécessité pour ces derniers de repenser leur relation client. Ce qu’il faut retenir : L’assurance a un business model très particulier qui conduit à gérer le « risque » avant le client. Les assureurs se livrent actuellement à une guerre des prix où le prospect semble mieux considéré que le client en portefeuille. Mais en sus de la référence prix, la référence client devient primordiale. L’image de l’assurance est globalement mitigée, en contradiction avec le fait que son rôle premier est d’assurer la protection de ses clients. En conclusion de cette première partie, nous pouvons dire que la nouvelle donne imposée par les clients va obliger les entreprises, et notamment les assureurs à repenser leurs manières de faire et de commercer avec les clients. 35 Le marché de l’assurance, qui avait traditionnellement une clientèle relativement « captive », est « de moins en moins organisé par les producteurs mais plus en fonction de la demande des consommateurs »69. Face à cette évolution, les compagnies d’assurance sont contraintes de reconsidérer leurs relations, c'est-à-dire à passer d’une approche « contractuelle » à une approche « relationnelle » et d’envisager la fidélité de leurs clients de manière « positive » et active. Ayant dressé un « état de lieux » du contexte, nous allons, dans la partie suivante, nous pencher sur les différentes étapes et évolutions de la relation client et plus particulièrement de la fidélisation. 69 Entretien avec NORMAND G, Directeur Marketing Stratégique MAAF Assurances, Décembre 2008 36 Chapitre 2. Caractéristiques des différentes approches en matière de relation client Dans cette seconde partie, nous allons effectuer une « généalogie » des différentes stratégies en matière de relation client et de fidélisation en décrivant les principales évolutions qui ont eu lieu des années 1990 à nos jours. En préambule : Progressivement, les entreprises sont passées - à des stades plus ou moins avancés selon les secteurs - d’une approche conventionnelle basée sur une orientation court terme et caractérisée par une promotion des produits, à un marketing de la relation client, favorisant une orientation moyen terme se concentrant sur le « Capital client », comme l’illustre le graphique ci-dessous. Graphique 14 : Evolution de la relation client dans le temps, adapté d’un graphique de Capgémini Cette évolution peut se schématiser de la manière suivante : - Dans les années 1950 et 1960, le développement des produits et des marques est centré principalement autour d’une communication mass média, c’est l’époque du marketing de masse. - Les années 1970 et 1980 sont encore très orientées produit. A cette époque apparaît le marketing direct, avec l’identification de messages personnalisés en fonction de groupes cibles. - Dans les années 1990-2000, le client prend le pas sur le produit, on parle alors de marketing client. Les entreprises commencent à appréhender l’enjeu de la fidélisation de leurs clients. C’est à cette époque que se développent les clubs et programmes de fidélisation. - Depuis les années 2000, c’est la gestion de la relation client (ou autrement dit le customer relationship management) qui caractérise les échanges entre les entreprises et les clients. Cette tendance place la relation client au cœur du développement des produits et services pour personnaliser la relation en fonction des comportements et évènements de la vie du client. 37 - Aujourd’hui, certaines entreprises, relativement en avance, se positionnent du côté de leurs clients, et cherchent à gagner leur loyauté en leur procurant une expérience remarquable et en défendant leurs intérêts. Méthodologie retenue : Aujourd’hui, la gestion de la relation client et la fidélisation constituent des sujets largement abordés, très couverts et débattus. Ainsi, je souhaite attirer l’attention du lecteur sur le fait que je ne prétends pas avoir une vision exhaustive sur ces vastes sujets. Par ailleurs, consciente du fait que je ne pourrai pas couvrir l’ensemble du périmètre dans ce présent mémoire, et souhaitant maîtriser le champ de mes recherches, j’ai pris le parti d’explorer quatre champs d’analyse. Ces quatre champs d’analyse ont été choisis car ils représentent selon moi une certaine « évolution générationnelle » qui a eu lieu dans les domaines de la relation client et de la fidélisation au cours des vingt dernières années. Pour illustrer ces quatre courants, je me suis appuyée sur quatre ouvrages qui me semblent emblématiques de ces courants et que je vais décrire rapidement ci-dessous. Je me suis également appuyée sur des livres connexes dont le lecteur trouvera les références en notes de bas de page. Même si le terme « d’évolution générationnelle » est utilisé pour décrire les différentes phases qui seront présentées dans cette partie, il est intéressant de noter que les ouvrages principaux cités ont tous été publiés vers la même époque, entre 2004 et 2006. Pour traiter du premier champ d’analyse, à savoir la fidélisation comme levier pour retarder le départ du client et accroître sa valeur, je me suis principalement appuyée sur le livre de Lars Meyer-Waarden « la fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing relationnel » publié par Vuibert en 2004. Lars Meyer-Waarden, docteur en sciences de gestion et titulaire du magistère de marketing direct de PIAE Lille, est maître de conférences à l'université Paul Sabatier de Toulouse 3. Cet ouvrage universitaire donne des réponses à des questions centrales sur la gestion des programmes de fidélisation: attirent-ils les plus gros clients ? Fidélisent-ils vraiment ? Influencent-ils le comportement d'achat? Quelle est leur rentabilité ? Pour traiter du second champ d’analyse, à savoir la fidélisation comme levier de connaissance et de ciblage, je me suis principalement appuyée sur le livre de Standley Brown « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », publié par Pearson Education France en 2006. Stanley Brown est associé de la branche CRM de PricewaterhouseCoopers et dirige le Centre international pour l'excellence de la gestion client. Pour écrire ce livre, il a fait appel aux experts américains, canadiens, français, anglais, danois et suisses de PricewaterhouseCoopers qui proposent une initiation aux principes généraux du CRM ainsi qu'une présentation des différents outils permettant la mise en ouvre du CRM dans l'entreprise. Pour traiter du troisième champ d’analyse, à savoir la loyauté acquise par une expérience remarquable, je me suis principalement appuyée sur le livre de Fred Reichheld et Bertrand Pointeau, « La question décisive, recommanderiez-vous notre en » publié par Pearson Education en 2006. Fred Reichheld est directeur de la 38 recherche dans le cabinet Bain & Company, et l'un des plus grands spécialistes des questions de fidélisation de la clientèle. Il est notamment l’auteur de « L’Effet Loyauté » (Dunod, 1999). Betrand Pointeau est consultant chez Bain & Company France. Cet ouvrage propose un outil de mesure qui aide l'entreprise à centrer ses efforts sur l'accroissement de la fidélisation de ses clients, contribuant ainsi à la création de profits récurrents. Enfin, pour traiter du quatrième champ d’analyse, à savoir la loyauté comme défense des intérêts des clients, je me suis principalement appuyée sur le livre de Glen Urban « Dont’ just relate ! Advocate. A blueprint for profit in the era of customer power » publiée par Wharton Schoool Publishing en 2005. Glen Urban est professeur à l’université du MIT (Etats-Unis) et défend l’idée selon laquelle les entreprises auront plus à gagner sur le long terme à aider leurs clients à effectuer des choix avisés plutôt que les « pousser » à acheter leurs produits. Et qu’une entreprise qui établit une réputation basée sur la confiance, la transparence et le conseil sera gagnante. Pour chacun des champs d’analyse traités, trois rubriques seront présentées : - les partis pris stratégiques et la philosophie globale, - les résultats attendus, - et enfin les outils et moyens de mise en œuvre. 39 2.1 La fidélisation comme levier pour retarder le départ du client et accroître sa valeur 2.1.1. Les partis pris stratégiques : la mise en place de stratégies marketing défensives de rétention de la clientèle Lorsque l’on pense au terme fidélisation, l’association la plus fréquente qui vient spontanément à l’esprit est « programmes de fidélisation et cartes de fidélité ». Ce sont effectivement les supports qui se sont le plus répandus à partir du début des années 1990, lorsque, face à des clients devenus de plus en plus zappeurs, les distributeurs (grande consommation, transports) ont souhaité mettre en place des stratégies marketing défensives de rétention de leur clientèle. C’est American Airlines qui a lancé le premier programme de fidélisation avec une carte de fidélité électronique qui stocke les informations personnelles du client, et dont le principe est de récompenser les meilleurs clients, c’est-à-dire ceux qui achètent souvent et beaucoup par des points, des cadeaux ou des réductions de prix70. Depuis, les acteurs de ce secteur, et de bien d’autres également, ont imité cette initiative, qui s’est généralisée dans les années 2000. En général, la première société d’un secteur à proposer un programme de fidélisation jouit d’un avantage concurrentiel, mais lorsque celui-ci est banalisé et que tous les autres acteurs du secteur le pratiquent, ce système finit par coûter cher car il n’engendre plus de gain de part de marché71. Par ailleurs, les programmes de fidélisation sont devenus à l’heure actuelle un élément de base pour les clients qui le considèrent plus comme un dû.72 2.1.2. Les résultats attendus : améliorer la rentabilité des clients et éviter leur départ Pour améliorer la rentabilité de leurs clients et éviter leur départ, les acteurs qui mettent en place des programmes de fidélisation misent sur les sources de valeur de nature quantitative et qualitatives suivantes73, à savoir : - La génération de bénéfices à fort impact financier : o Une augmentation du panier moyen des clients : le nombre de points est généralement proportionnel au montant des achats. o Une augmentation de la fréquence d’achat du client 70 MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert 71 Idem 72 « Fidélisation : halte à la banalisation des outils », LSA, 15 janvier 2004, p 58-59 73 CAPGEMINI CONSULTING (2005), « Fidélisation : récompense ou reconnaissance ? », Université Conseil 40 o Une augmentation et une orientation des achats des clients vers certains produits / services : donner des points à chaque achat, et les multiplier si le consommateur a effectué plusieurs achats ou achat croisés (cross selling) o Une direction des dépenses des clients vers des produits et services à plus forte marge (up selling) o Une augmentation de la fréquence d’achat o Une réduction du nombre d’abandon o Une orientation de la fréquentation : ces programmes prévoient de doubler les points les jours creux o L’attirance de nouveaux clients o Une orientation des achats des clients chez les partenaires du programme si le programme est multi enseigne. - L’obtention d’informations détaillées sur les clients, censées permettre : o De définir de nouvelles offres o D’optimiser les campagnes marketing o De valoriser la base de données auprès d’autres enseignes. 2.1.3. Les outils et moyens de mise en oeuvre Outil 1. Les programmes de fidélisation Meyer- Waarden (2004) distingue deux types de programme de fidélisation74. - Le premier type de programme cherche à accroître ou à maintenir les achats des clients en renforçant l’engagement dans l’entreprise, en développant des barrières à la sortie et en encourageant le réachat. C’est l’approche adoptée par les programmes monosupport de la grande distribution qui encourage les clients à multiplier leurs achats à travers des bons d’achat ou des points. La valeur de ces récompenses oscille entre 0 et 2% du montant acheté. Ces programmes proposent essentiellement des récompenses monétaires et varient peu les propositions en fonction de la clientèle et de son volume d’achat. Aujourd’hui, certaines enseignes élargissent le spectre de leur programme en s’associant avec des partenaires. Le programme devient multi enseignes, comme c’est le cas du programme Smiles, regroupant 46 enseignes (dont Casino, Galeries Lafayette, la SNCF, BHV, Monoprix, Shell… ) - Le second type de programme a pour finalité de gérer l’hétérogénéité des clients en segmentant la clientèle. A titre d’exemple : Flying Blue d’Air France KLM est ouvert à tous mais segmente sa clientèle en fonction des miles parcourus en proposant des cartes différentes et des degrés de services distincts. Seuls les détenteurs de la carte Platinium ont accès aux salons privés dans les aéroports et aux filles d’attente spécifiques. 74 MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert 41 O’Brien et Jones75 utilisent cinq critères pour analyser l’intérêt d’un programme de fidélisation : - Sa simplicité d’utilisation, - La valeur monétaire des récompenses, - La variété des récompenses proposées, - La valeur accordée aux récompenses par les clients, les récompenses non monétaires étant souvent mieux valorisées que leurs équivalents financiers, - La probabilité de pouvoir atteindre la récompense. Ces programmes de fidélisation s’insèrent traditionnellement dans ce que l’on peut appeler le marketing produit ou transactionnel : à savoir que chaque « transaction », au sens d’achat d’un produit par un consommateur, est récompensée par l’entreprise. Outils 2. Les supports : cartes de fidélité et clubs La carte de fidélité : Le support principal de ces programmes est généralement la carte de fidélité. C’est un outil de fidélisation décerné la plupart du temps nominativement aux clients afin de leur offrir différents avantages auprès de la société émettrice et de ses éventuels partenaires. La carte doit permettre en retour à la société de collecter des informations comportementales sur le porteur pour déclencher des informations marketing adaptées76. Aujourd’hui en France, 71% des enseignes généralistes (Leclerc, Carrefour) et spécialistes (Ikéa, FNAC) proposent des cartes de fidélité77. Les cartes de fidélité touchent aujourd’hui 88% des foyers qui ont en moyenne 3 cartes par foyer.78 Notons que la carte ne doit pas être considérée comme « la stratégie de fidélisation », mais comme un simple vecteur pour valoriser cette même stratégie79. Car sans réelle stratégie d’accompagnement, c'est-à-dire sans analyse des données collectées pour mieux segmenter les clients, la carte peut devenir un vecteur très coûteux. Les montants d'investissement d’un programme de fidélisation sont relativement onéreux et dépassent bien souvent les coûts d’exploitation prévus. Ils peuvent atteindre des dizaines de millions d’euros, comme l’indique l’exemple de l’enseigne E. Leclerc80. Par ailleurs, l’accord commun est que l’efficacité ne serait pas garantie ou plutôt mitigée voire faible 81. La plupart des programmes sont lancés sans stratégie pertinente d’une meilleure connaissance réciproque et les effets sur le comportement d’achat sont relativement faibles et peu durables dans le temps, du fait de l’absence de segmentation précise de la clientèle. 75 CAPGEMINI CONSULTING (2005), « Fidélisation : récompense ou reconnaissance ? », Université Conseil Idem 77 MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert 78 AC NIELSEN (2003), « Quelles sont les attentes des consommateurs en matière de fidélisation ? » 79 MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert 80 Idem 81 Idem 76 42 Aussi, deux approches émergent actuellement : - - L'abandon de la carte au profit des promotions ou des moyens intermédiaires. Les grands distributeurs anglo saxons, disent avoir "dépassé" le système de fidélisation par carte pour un retour en arrière avec les promotions telles que « deux pour le prix d'un », des remises de 50%,… Safeway déclare explicitement que la clientèle s’est lassée et que grâce à l’économie générée par l’arrêt du programme de fidélité, l’entreprise va pouvoir vendre ses articles moins chers. Le recentrage sur les services, ou le fait de compléter les bénéfices procurés par d’autres avantages, comme par exemple des récompenses intangibles et non monétaires, qui procurent au client une forte valeur, plus émotionnelle que rationnelle que l’on peut répertorier en quatre grandes catégories : o Accompagnement / Services Après Vente : pour accroître la fréquence des contacts en gérant la relation dans la durée (exemple : appel systématique pour s’assurer de la satisfaction client quelques jours après l'achat, pour les achats supérieurs à 150€ chez Boulanger.) o Services associés à l'expérience client : pour augmenter la fréquentation du point de vente (exemple : les défilés de modes au Printemps.) o Conseil : prescrire/ fidéliser en structurant la perception du produit et de ses applications (exemple : compréhension de la personnalité pour un meilleur choix de parfum par Guerlain) o Services pratiques : pour fidéliser en facilitant la vie pratique du client (exemple : atelier animation pour enfants chez Marionnaud) Le club Les clubs sont moins répandus que les cartes. Ce sont des structures créées par des marques dont les clients peuvent devenir membres et ainsi obtenir des avantages. Les clubs restent souvent des cercles fermés où l'identification à la marque et à l'image sociale véhiculée prédominent. Ce qu’il faut retenir : Dans un environnement ultra concurrentiel, les programmes de fidélisation ont été crées pour récompenser les clients fidèles, et surtout pour maintenir voire augmenter leur fréquence d’achat et panier moyen, et retarder leur départ. C’est sous la « contrainte » c'est-à-dire sous la « pression » des marchés saturés et avec la nécessité de capter de nouvelles parts de marché ou de renforcer leur part de portefeuille que les entreprises ont crée ces programmes. Ces programmes de fidélisation se situent donc la plupart du temps dans une logique de discours marketing, mais ne symbolisent pas véritablement le principe de la fidélisation et de la relation de confiance, en tant que véritable état d’esprit. En ce sens, ils constituent plus une « obligation pour la survie des entreprises, qu’une réelle démarche pro active de la part des entreprises »82. 82 Entretien avec Mr FORTASSIN P, Consultant Altran et professeur GRC à l’ENASS, Avril 2009 43 Par ailleurs, ces politiques de fidélisation sont très largement dominées par la dimension transactionnelle (achat = cumul de points = cadeaux ou remises), et il semblerait que, au moins dans un premier temps, le support principal, à savoir la carte de fidélité, ait pris le dessus sur la stratégie. De fait, les programmes n’ont pas eu l’effet escompté car insuffisamment intégrés dans la stratégie client. Pour parer à cette lacune, les programmes actuels essaient de s’intégrer de plus en plus dans la logique du marketing relationnel, c'est-à-dire dans la gestion de la relation client dans le temps, privilégiant le relationnel et visant à optimiser les conditions et les flux des échanges entre les clients et l’entreprise. Ainsi nous avons vu qu’un programme de fidélisation, si il n’est pas intégré dans un dispositif de connaissance client, n’engendre pas de valeur ajoutée pour l’entreprise, mais au contraire, lui permet uniquement de se maintenir au même niveau que ses concurrents. Dans la sous-partie suivante, nous allons voir qu’il est nécessaire aujourd’hui pour une entreprise, de connaître ses clients, afin de pouvoir cibler ceux avec qui elle souhaite entretenir une relation durable. C’est tout l’enjeu de la stratégie de gestion de la relation client que nous allons détailler maintenant. 44 2.2 La fidélisation comme levier de connaissance et de ciblage 2.2.1 Les partis pris stratégiques : mieux connaître les clients pour mieux vendre et servir « Les entreprises ne peuvent se distinguer dans l’esprit du consommateur que par le service rendu et par leur stratégie de Gestion de la Relation Client. Depuis cinq ans, il devient difficile de se différencier par ses produits. Ce qui compte, c’est le moyen employé pour les vendre »83. La stratégie de la gestion de la relation, appelée encore Customer Relationship Management (CRM) vise donc à intégrer la fidélisation et la rétention des clients dans une démarche de connaissance des consommateurs et de gestion de la relation client dans le temps, qui est communément admise comme étant au cœur des stratégies de croissance des entreprises. La gestion de la relation client s’inscrit donc dans une stratégie par laquelle l’entreprise vise à : - comprendre, - anticiper les évènements, - gérer de façon plus précise les besoins des clients, - afin de pouvoir y répondre de la manière la plus adéquate possible (au bon moment et avec le canal optimal). L’objectif étant de modifier durablement le comportement des clients dans le but de maintenir et accroître leur niveau d’affaires. 84 En d’autres termes, la gestion de la relation client se donne comme mission de connaître, pour cibler, puis vendre, et enfin servir les clients, comme l’illustre le graphique ci-dessous (graphique 15). Graphique 15 : Les différentes étapes de la gestion de la relation client, Source : Capgemini 83 Gavin Shreeve, PGD du Chartered Institute of Bankers of America, in BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education France 84 FORTASSIN P. « GRC et Conduite du changement, Comment mettre en oeuvre une GRC ? ».Cours ENASS Master 2, 20 janvier 2009 45 Pour autant, aujourd’hui, le client est encore méconnu dans les entreprises85 : - 9% des entreprises connaissent réellement leurs clients ; - 59% avouent n’en avoir qu’une faible connaissance ; - alors que la connaissance client une priorité pour plus de 90% des entreprises. 2.2.2 Les résultats attendus : la maximisation des profits de l’entreprise et de la satisfaction des clients La mise en place d’une gestion de la relation client cherche à atteindre deux types d’objectifs : - - la maximisation du profit de l’entreprise en gérant mieux l’activité des forces de vente, en intégrant une multitude de canaux de distribution, en capitalisant sur l’ensemble des points de contacts, en partageant mieux l’information entre tous les acteurs, et en ayant une meilleure visibilité sur les indicateurs de performance. 86 la maximisation de la satisfaction du client, c’est à dire vendre plus et mieux en offrant au client, le bon produit, au bon moment, et au meilleur prix. Ainsi, la Gestion de la Relation Client (GRC) se définit comme « la capacité à identifier, acquérir, fidéliser et contrôler les meilleurs clients, dans l’ultime but d’augmenter leur rentabilité » en combinant « l’infrastructure technologique et les stratégies commerciales, pour bâtir une relation individualisée durable, c'est-à-dire offrir aux clients les produits ou services qu’ils attendent ou qu’ils sont prêts à payer 87». Pour parvenir à ces résultats, nous allons détailler ci après deux leviers clés liés à cette approche : l’identification de la valeur client et la segmentation. Idéalement, cette gestion du portefeuille client, doit donc permettre d’extraire des données qui ouvrent les perspectives d’une évaluation individualisée des segments et des clients afin de personnaliser le contact et la relation avec des offres produits et de services individualisés. C’est ce qui est communément appelé la « personnalisation de masse » ou « marketing one to one ». Le développement d’un CRM va de pair avec l’idée que la publicité de masse est un outil sur le déclin et que l’entreprise doit donc recourir à des méthodes et des canaux plus fins pour toucher ses différents segments de clientèle. Toutefois, l’organisation pour mettre en place un CRM est complexe car elle met en relation de nombreuses entités (Directions des réseaux, Direction marketing, Direction Communication, Direction E-business, Direction des Ventes, DSI), d’où l’apparition de Direction Client dans certaines entreprises pour coordonner l’ensemble du processus. Il faut également noter que les premiers chantiers de gestion de la relation client ont été des échecs (problèmes de résistance, coûts très élevés du fait de la création de base de 85 BRUANT, J. 2002 « Les enjeux de la segmentation dans la relation client », HEC Ecole des Mines LEFEBURE G. et VENTURI R (2000), « Gestion de la Relation Client, Panorama des produits et conduite de projets », Edition Eyrolles. 87 Idem 86 46 données intégrées et opérationnelles, planning trop long, avec de nombreuses dépendances avec les autres projets)88. Par ailleurs, ces projets, souvent trop fragmentés, ne privilégient pas assez le client. En 2004, le Gartner Group établissait que seulement la moitié des sociétés d’assurance ayant conduit un tel projet en trouvait la rentabilité89. Dans le même temps, un sondage réalisé par ATeT auprès de 237 dirigeants de l’assurance n’identifiait que 29% de satisfaits90. Selon Rigby, Reichheld, Schefter (2002)91, «ce sont les hommes qui initient et développent les relations, et non les ordinateurs. Pour l’avoir ignoré et avoir mis l’accent sur les systèmes d’information au détriment des aspects humains, de nombreuses entreprises ont échoué dans la bonne conduite de leur projet de CRM.». La mise en place d’une gestion de la relation client doit donc s’accompagner d’une structure organisationnelle adéquate centrée autour du client, et d’une conduite de changement qui favorise la formation, la communication, l’implication et le sponsoring de la Direction Générale. 2.2.3. Les outils et moyens de mise en oeuvre Outil 3. La valeur client La valeur d’un client est la somme, sur une période t, du chiffre d’affaires et de la marge réalisés par le client, à laquelle on impute des coûts engendrés par ce même client sur cette période, ainsi que le coût d’acquisition en début de période.92 Cette valeur est illustrée par le graphique ci-dessous (graphique 16) Figure 16 : La gestion du cycle de vie du client. Source : Capgemini 88 FORTASSIN P. « GRC et Conduite du changement, Comment mettre en oeuvre une GRC ? ».Cours ENASS Master 2, 20 janvier 2009 89 PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance 90 La tribune de l’assurance, n°77, mars 2004, in PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance 91 RIGBY D. K., REICHHELD F.F. et SCHEFTER P., (2002) ‘Avoid the four perils of CRM’. Harvard Business Review, Février. 92 WAYLAND R. AND COLE P. (1997), “Customer Connections: New Strategies for Growth”, Harvard Business School Press in CAPGEMINI CONSULTING (2005), « Fidélisation : récompense ou reconnaissance ? », Université Conseil 47 Aujourd’hui, il est communément admis de parler de valeur actuelle nette d’un client, c’est à dire de l’analyse de la valeur actualisée des clients qui est égale à la somme des bénéfices futurs actualisés afin de calculer la somme des revenus futurs produits qu’un client ou segment génère durant sa vie active au sein de l’entreprise. 93 Il est primordial pour une entreprise, de connaître la valeur de ses clients afin, justement, de les « traiter à leur juste valeur » et de mettre en œuvre les moyens adéquats pour fidéliser les clients qu’elle souhaite fidéliser. La valeur va en effet permettre de segmenter la clientèle afin d’offrir des offres différenciées aux clients. C’est précisément ce que le second levier décrit ci-dessous va expliquer. Outil 4. La segmentation de la clientèle Selon Christophe Benavent, « un portefeuille clients doit se gérer de manière dynamique, c'est-à-dire s’effectuer sur la base d’une segmentation en fonction de critères pour permettre de développer et d’adapter des stratégies par client ou segment en fonction du revenu futur généré, de la position du cycle de vie et du degré de compétition autour de la clientèle ». 94 Dans ce cadre là, l’efficacité d’un programme de fidélité dépend de deux facteurs : - de la capacité à cibler, sélectionner et discriminer les gros consommateurs - de la qualité de la gestion de la relation avec les clients sur le long terme. Concernant la capacité à cibler et déterminer les « gros consommateurs », l’entreprise doit déterminer les ressources qu’elle est prête à consacrer pour maintenir la fidélité des clients dont un pourcentage réduit de la base de clientèle -pas plus de 20% environprocure la part la plus importante de recettes et bénéfices95, comme le montre le schéma sur la page d’après (figure 17). Ce rapport est désigné sous le nom de loi de Pareto. 93 MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert 94 BENAVENT C. (1995), « Gérer le portefeuille clients : une application au Bénélux », Décisions marketing, 15, janvier-avril, p. 10-20. 95 GORDON H et ROTH.S, « Market Intelligent Enterprise, établir les bases », in BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education 48 Figure 17 : La répartition des clients en fonction des bénéfices estimés. Source Etude PricewaterhouseCoopers William Sherden va plus loin en ce sens qu’il suggère de transformer la règle des 20/80 en 20/80/30 : 20% des clients engendrent 80% du profit, lequel est réduit de moitié du fait des 30% des clients non rentables. 96 Ainsi, les entreprises ont donc tout intérêt à accroître leurs efforts sur la clientèle la plus rentable. En effet, il est communément admis que plus un client est fidèle, plus il achète davantage, requiert moins de temps, est moins influencé par les prix et apporte d’autres clients. « L’entreprise doit donc identifier à l’avance les clients promoteurs et accorder un service privilégié aux clients de choix, en appliquant de manière systématique un processus de gestion homogène à tous ces clients à très fort potentiel »97. Elle doit ainsi prendre en compte le fait qu’elle ne peut apporter à tous ses clients les mêmes avantages : elle doit être sélective dans le choix de ses clients et ne pas perdre de temps à définir les besoins des clients non rentables. Retenons que la mise en place d’un système de Gestion de la Relation Client doit permettre aux entreprises, tout en maximisant leur rentabilité, de satisfaire au mieux leurs clients. Par ailleurs, un système de gestion de la relation client efface permet d’enrichir la connaissance client et de segmenter la clientèle selon sa valeur, principe inhérent à toute action de fidélisation. Toutefois, il est reproché au CMR, au-delà de représenter des coûts financiers importants et d’être long à mettre en place, d’opacifier la relation entre l’entreprise et les clients en résumant cette dernière à une sorte équation, autrement dit une relation obligée imposée au client, au risque d’être intrusif pour 96 PEELEN E. (2007), « Gestion de la relation client », Pearson Education BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education 97 49 ce dernier. Cette subordination peut provoquer un rejet de la part du client qui ne veut pas se sentir enfermé dans une relation dont il veut, et doit garder la maîtrise. Nous allons maintenant nous pencher sur un courant qui reprend les fondamentaux de la gestion de la relation client, en allant plus loin en matière de promesses faites au client. Si traditionnellement, une bonne gestion de la relation client permet d’offrir au client le bon produit au bon moment en tenant compte de sa valeur, ce courant va plus loin dans la mesure où il propose aux entreprises d’offrir une relation « remarquable » à leurs clients, basée sur un processus d’écoute active des collaborateurs comme des clients, processus très structuré qui impacte toute l’entreprise. 50 2.3 La loyauté acquise par une expérience remarquable 2.3.1 Les partis pris stratégiques : la loyauté source de croissance à long terme Comme nous l’avons vu précédemment, l’instauration d’une relation client réussie mène à une fidélité elle-même source de croissance et de profits accrus. Mais, si auparavant l’entreprise pouvait se contenter de la satisfaction de ses clients comme gage de fidélité, un nouveau courant, symbolisé par Reichleld (2006) part du principe que l’entreprise doit aujourd’hui créer une expérience remarquable avec eux. C’est-à-dire qu’elle doit les satisfaire au point qu’ils en redemandent98 pour s’assurer de leur loyauté. Deux conditions doivent être remplies pour qu’un client recommande une entreprise : il doit être convaincu qu’elle offre davantage qu’une autre, en termes de tarifs, caractéristiques des produits, qualité, facilité d’emploi, …, et que sa relation lui inspire un sentiment favorable, c'est-à-dire que l’entreprise le comprend, qu’elle lui accorde de l’importance et qu’elle l’écoute.99 Procurer une expérience remarquable aux clients, c’est également le gage que ces derniers recommandent l’entreprise à leur entourage de manière désintéressée. Nous avons vu dans la première partie qu’avec la défiance ambiante, le consommateur nouveau recherche plus la confiance dans des individus que dans les marques traditionnelles. Ainsi, tout l’enjeu actuel reposerait donc sur la capacité d’une entreprise à nouer des rapports de qualité avec les clients pour qu’ils deviennent des ambassadeurs, c'est-à-dire des prescripteurs désintéressés, qui pour un coût nul, complètent la force de vente et génèrent des profits sains, source de croissance profitable et à long terme. 2.3.2 Les résultats attendus : des profits sains et des clients prescripteurs Par la fidélité de ses clients, l’entreprise entend bénéficier d’un avantage concurrentiel durable procuré par une croissance réalisée par des profits sains, et non pas par une croissance à court terme tirée par la publicité et des rabais commerciaux. Selon Reichleld et Pointeau (2006), « trop d’entreprises basent leur croissance sur des mauvais profits, c’est à dire sur des profits réalisés par des tarifications trompeuses ou inéquitables, qui ne servent pas les intérêts des clients, mais uniquement l’augmentation du chiffre d’affaires de l’entreprise ». Or ces « profits toxiques »100 anéantissent les perspectives à long terme d’une entreprise, la société se retrouvant dans une situation de 98 REICHHLELD F. F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 99 Idem 100 Idem 51 vulnérabilité économique puisque les mauvais profits engendrant à terme des clients « détracteurs »101 qui ternissent la réputation de l’entreprise. A l’inverse, une entreprise qui souhaite croître de manière durable et s’attirer la fidélité de ses clients doit baser sa croissance sur des profits vertueux, c’est à dire sur des profits qui satisfassent réellement les clients. Les clients très satisfaits deviendront des inconditionnels de la marque, des « promoteurs » qui diffuseront un message positif autour d’eux. Une société qui bâtit une relation très solide avec ses clients jouira donc d’un avantage économique à long terme procuré par une meilleure relation client. Ainsi, si la loyauté des clients contribue largement aux bénéfices, il est donc important d’augmenter le nombre de promoteurs et de réduire celui des détracteurs. Le graphique ci dessous (figure 18) décrit ce qui est appelé l’effet loyauté ou life time value, qui consiste à additionner les flux financiers accumulés au cours d’une relation client normale et les actualiser102. Il vise à démontrer la valeur économique d’un prescripteur versus celle d’un détracteur. Figure 18 : Impact économique d’un prescripteur versus un promoteur. Source : La question décisive. 101 REICHHLELD F. F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 102 Idem 52 2.3.3 Les outils et moyens de mise en oeuvre Comment procurer une expérience remarquable aux clients ? Principalement, en mettant en œuvre les leviers suivants. Outil 5. Des offres et des services à valeur ajoutée Pour Kotler, Dubois et Manceau, « la clé d’une fidélité élevée réside dans la valeur délivrée au client »103. Ainsi, une entreprise qui souhaite procurer à ses clients une expérience remarquable doit être irréprochable concernant la qualité des offres et des services, et « au delà du service basique et attendu, c’est à l’évidence ce qui est défini comme ajouté qui peut créer une différenciation forte, une satisfaction très positive et donc une fidélisation accrue. »104 La valeur se détermine comme un avantage délivré, procuré à l’individu consommateur. Elle peut être définie comme « l’avantage procuré par une action (ou un objet spécifique), en relation avec les besoins d’un individu à un moment donné, duquel sont déduits les coûts induits par la recherche de ces bénéfices ». 105 Pour cela, l’entreprise doit développer une véritable compétence pour réinventer les services à apporter aux clients, concevoir ses offres en fonction des segments de clientèles, et surtout mettre en œuvre ces offres en abolissant les cloisonnements internes. Intéressant à noter également est la disparition dans certaines entreprises des « customer services » peu à peu remplacés par les « customer care106 », care signifiant « se soucier, se préoccuper, soigner, compatir, être humain et aimer ». Cette évolution prouve la nécessité pour les entreprises de considérer leurs clients avant tout comme des êtres humains. Outil 6. Le pilotage « centré client » : la mise en place de nouveaux indicateurs de mesure La loyauté contribuant aux bénéfices, cette théorie milite pour que les entreprises reconsidèrent l’évaluation de leur performance en intégrant des indicateurs qui évaluent le pourcentage de clients avec lesquels les liens se consolident ou se détériorent. C’est à dire qu’au delà données financières « brutes » contribuant à la rentabilité de l’entreprise, l’enjeu est de comprendre si les profits générés sont vertueux ou 103 KOTLER P, DUBOIS B et D. MANCEAU (2004), Marketing management, 12ème édition, Pearson Education 104 LEVITT Th. (1980), Une stratégie marketing : la différenciation tout azimut, Harvard, L’expansion, in PEELEN E. (2007), « Gestion de la relation client », Pearson Education 105 LOVELOCK Ch., WIRTZ J et LAPERT D. (2004), Marketing des services, Pearson Education, in PEELEN E (2007), « Gestion de la relation client », Pearson Education 106 HABABOU R. (2007), « Service gagnant, les secrets des entreprises qui créent la différence », Ralph Edition First. 53 destructeurs, en introduisant de nouveaux critères fondés sur la qualité et la satisfaction des clients. Le tableau de pilotage devra donc comporter des critères d’évaluation « hard » (de nature financière) et « soft » (plus relationnels et humains). Ce pilotage « durable », c'est-à-dire qui intègre des critères de nature qualitative, n’est possible qu’à partir du moment où l’entreprise a mis en place un système d’écoute active de ses clients (confère outil 8 décrit ultérieurement). Outil 7. La fidélisation des collaborateurs Le recrutement et la fidélisation de salariés de haute qualité sont fortement corrélés avec le recrutement et la fidélisation des clients, et sont donc un facteur important de croissance des bénéfices. En effet, une entreprise a peu de chance de se constituer une clientèle loyale avec des salariés qui ne le seraient pas, et les raisons en sont assez simples107 : - de solides relations personnelles se construisent dans le temps avec les clients, - les salariés loyaux connaissent plus l’entreprise et ses produits, et sont plus productifs et efficaces, - les économies de frais de recrutement et de formation peuvent être investies ailleurs, dans des actions permettant d’augmenter la satisfaction des clients, - les salariés stables et fidèles véhiculent un message positif autour d’eux, qui peut être également source de nouveaux clients. Certains pensent que le personnel est « l’actif le plus précieux d’une entreprise108 », et que savoir ce que coûtent les salariés sans savoir ce qu’ils valent est une erreur stratégique. Les entreprises doivent donc « attirer leurs employés, les garder, les honorer et les récompenser, les motiver, les servir et les satisfaire. »109 Mais comment trouver les bons collaborateurs ? Ce ne sont pas forcément ceux qui vendent le plus, mais ceux qui partagent la philosophie de l’entreprise, sachant que les aspects les plus importants en termes de compétences humaines et relationnelles sont les suivants : - une capacité d’empathie, c'est-à-dire la faculté de voir le monde du point de vue client et d’être sensible à ses problèmes, - une attitude ouverte, transparente et sincère ainsi qu’une bonne gestion des incidents critiques, - une capacité de rester positif vis-à-vis de l’interlocuteur. Le système de récompense des salariés est également déterminant. Si le système d’évaluation interne est uniquement basé sur le nombre de ventes réalisées et sur le très court terme, alors bien évidement cela favorisera un comportement opportuniste. A l’inverse, si un « pilotage durable » est mis en place, alors les salariés seront récompensés pour les profits vertueux qu’ils réalisent. 107 REICHHELD F. F, (1999), “L’effet Loyauté : réussir en fidélisant ses clients, ses salariés et ses actionnaires”, Edition Dunod 108 DRUCKER P (1992), « The New Society of Organisation », Harward Business Review (Septembre octobre), in REICHHELD F. (1999), “L’effet Loyauté : réussir en fidélisant ses clients, ses salariés et ses actionnaires”, Edition Dunod 109 Idem 54 Outil 8. L’écoute active des clients Il s’agit ici pour les entreprises de mesurer la qualité des rapports qu’elles nouent avec leurs clients en instaurant une démarche structurée de la gestion de la relation client par l’écoute active et systématique. Ce n’est qu’une fois que l’entreprise aura mis en place ce processus, faisant remonter les suggestions et critiques des clients, qu’elle pourra segmenter sa clientèle afin de concevoir des offres appropriées. Certaines entreprises utilisent un outil simple pour répondre à cet enjeu consistant à poser aux clients les quelques questions suivantes : - Recommanderiez-vous cette société ou ce produit à un ami ? - Qu’est ce qui motive principalement cette note ? A quoi l’attribuez-vous? - Quelle amélioration devons-nous réaliser en priorité pour améliorer cette note ? - Une ou deux rubriques supplémentaires ayant trait au client. A partir de cette question est attribuée une note sur une échelle de 0 à 10, « le Net Promoter Score »110 dont le fonctionnement est décrit dans le tableau ci-dessous (marque déposée et partagée entre Satmetrix Systems, Inc., Bain & Company et Fred Reichheld). Les prescripteurs Les neutres Les détracteurs Les prescripteurs sont d’ardents et fidèles clients, Note : 9 ou 10 qui sont « tout a fait disposés à recommander Grille d’analyse : (10 = tout à fait ; 0 l’entreprise » à leurs proches. = pas du tout) C’est de ce segment qu’émane plus de 80% des recommandations. Les neutres sont des clients satisfaits mais sans Note : 7 ou 8 enthousiasme. Ils restent plus par inertie que par Grille d’analyse : (10 = tout à fait ; 0 fidélité, jusqu’au jour ou la concurrence les séduit. = pas du tout) Les détracteurs sont des clients insatisfaits, captifs Note : de 0 à 6 d’une relation qui les déçoit et qui ne sont « pas du Grille d’analyse : (10 = tout à fait ; 0 tout disposés à recommander l’entreprise » = pas du tout ) C’est de ce segment qu’émane plus de 80% de bouche à oreille négatif. Figure 20 : Description de la note « net promoteur score. Source : Satmetrix Systems, Inc Pour calculer le Net Promoter Score (NPS), il faut déduire du pourcentage représenté par les détracteurs (D) le pourcentage représenté par les promoters (P), soit P-D = NPS. L’entreprise idéale aurait comme conséquence de transformer 100% des clients en prescripteurs. A l’inverse, une entreprise très mauvaise aurait 100% de détracteurs. La moyenne des entreprises au niveau mondial a un résultat proche de 0, alors que le NPS des entreprises françaises est en moyenne inférieur à 0, c'est-à-dire qu’il y a plus de détracteurs que de promoteurs parmi leurs clients111. Les sociétés telles que Ebay, Amazon.com ou Dell obtiennent des scores situés entre 50 à 80%, cela veut dire qu’une marge de progression est encore possible. 110 REICHHLELD F. F, et B. POINTEAU (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 111 Idem 55 Les études menées par le cabinet Bain prouvent qu’il existe une forte corrélation entre le NPS et le taux de croissance moyen des entreprises sur trois ans, les sociétés présentant la plus forte progression de prescription enregistrant également une croissance soutenue et saine112. Toutefois, le Net Promoteur Score n’est qu’un outil permettant aux entreprises d’avoir une vision claire de la qualité de leurs relations avec les clients et également des sources d’insatisfaction. Pour être efficace, cet outil doit être complété par une résolution rapide des insatisfactions, un traitement des problèmes à la source, et une réactivité quant à l’apport de solutions qui satisfassent les clients. Outil 9. Le ciblage Nous l’avons vu précédemment, la segmentation de la clientèle est très importante pour mener des actions efficaces afin de fidéliser la clientèle. Fred Reichhleld définit une segmentation prenant en compte, outre le niveau de rentabilité des clients, leur position sur l’échelle prescripteurs détracteurs. Figure 21 : Grille de rentabilité des clients et qualité des profit. Source : La question décisive A l’aide de la grille décrite ci-dessus (figure 21), il est proposé à toute entreprise d’évaluer les ressources et le temps à investir dans sa relation client, ainsi que dans sa qualité de services et ses profits. Le seuil fixé par la ligne médiane horizontale est celui où la rentabilité couvre le coût du capital. La plupart des entreprises se situent dans les secteurs B et E113, elles sont dans la norme, sachant que celles qui se situent à gauche du graphique réalisent leurs bénéfices par des « profits nocifs » et que celles qui se situent à droite ont une croissance saine. 112 REICHHLELD F. F, et B. POINTEAU (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 113 Idem 56 La priorité est d’investir dans le cœur de cible, c'est-à-dire dans les clients C (prescripteurs et rentables) qui doivent guider les priorités stratégiques. En général, les entreprises considèrent la fidélité de ces clients comme acquise et sous investissent dans cette catégorie, voire pensent que les profits fournis par cette cible peuvent être améliorés en augmentant les tarifs, or cette stratégie peut mettre en péril la croissance d’une entreprise. La seconde action à mener est de réduire les mauvais profits. Les clients situés dans la catégorie A n’apprécient pas la compagnie, donc sont susceptibles de répandre un bouche à oreille négatif sur l’entreprise, mais sont rentables. L’entreprise doit donc investir dans la résolution de leurs problèmes, voire en faire des prescripteurs en parlant avec eux, en identifiant le motif de leur contrariété et en y remédiant sur le champ. A l’inverse, les clients situés dans le segment F sont des détracteurs dont la rentabilité est faible. L’entreprise, face à cette population, doit soit les servir de manière la plus économique qui soit ou les faire partir à la concurrence. Enfin, l’entreprise doit multiplier ses prescripteurs. Pour cela, elle doit augmenter le poids économique des clients C, mais également transformer les clients situés en B ou D en C en essayant de leur vendre de nouvelles offres ou de les faire monter en gamme. Le principe de l’écoute active est encore pertinent. Il s’agira de demander aux clients pourquoi ils ne sont pas enthousiastes et de chercher à savoir ce qui leur ferait vraiment plaisir, et surtout considérer si les dépenses correspondantes sont payantes. Cette segmentation est une première étape qui devra permettre à l’entreprise de concevoir des offres en fonction des segments de clientèles définis, et notamment des offres appropriées et séduisantes pour les segments de clientèle à potentiel ou rentables. Ce qu’il faut retenir : La règle d’or de cette théorie serait : « traite les autres comme tu voudrais qu’ils te traitent », ce qui suppose pour une entreprise de respecter ses clients, c'est-à-dire de ne leur proposer un produit que si elle est certaine qu’il corresponde parfaitement à leurs besoins. Pour cela, l’entreprise doit mettre en place une démarche structurée et transversale d’écoute active de ses clients, et ne plus se baser uniquement sur des critères quantitatifs d’amélioration du chiffre d’affaires dont l’approche courttermiste peut masquer la santé de l’entreprise. Cette démarche d’écoute active lui permettra également de mieux connaître ses clients, les cibler, et leur proposer les produits et services idouanes pour leur procurer une « expérience remarquable ». 57 Dans le prolongement de la notion d’expérience remarquable, la stratégie qui va être décrite maintenant introduit un changement de paradigme dans la relation client, dans la mesure où elle déplace la question de la loyauté des clients aux entreprises, en posant la question suivante : « est-ce que les entreprises sont fidèles et loyales envers leurs clients ? ». Dans cette optique, ce n’est pas le client qui doit être fidèle à l’entreprise, mais l’entreprise qui doit d’abord être loyale envers ses clients en maximisant leurs intérêts et créant de l’étonnement positif pour que ces derniers réitèrent leur confiance. 58 2.4 La loyauté acquise par la défense des intérêts des clients 2.4.1 Les partis pris stratégiques : maximiser les intérêts des clients, en partenariat avec eux. Cette approche « advocacy » ou « plaidoyer client »114se veut être un pas en avant vers l’interaction grandissante entre l’entreprise et le client, répondant à l’impératif de l’accélération du pouvoir du client et supposant que le client est responsable et actif dans le processus de décision. Urban (2005), dans son ouvrage « Dont’ Relate, Advocate »115 identifie trois stratégies plus ou moins pertinentes pour répondre aux nouveaux défis de notre siècle, décrits en première partie : - Les entreprises peuvent décider de conserver une stratégie marketing traditionnelle « push pull », c'est-à-dire augmenter la publicité dans les médias et développer une stratégie tarifaire agressive. Selon l’auteur, cette stratégie semble vouée à l’échec car les clients réagissent de plus en plus négativement aux messages « top-down ». - Elles peuvent aussi renforcer les relations clients avec une gestion de la relation client efficace en proposant des produits plus personnalisés. Selon Glen Urban, cette approche a montré ses limites car elle peut sembler très invasive pour le client. - Elles peuvent enfin défendre les intérêts de leurs clients, en partant du principe que l’entreprise qui souhaite gagner la confiance et la loyauté de ses clients doit se placer de leur côté et défendre leur cause. Ainsi, si l’entreprise se positionne en tant que défenseur des clients, ces derniers en retour réitèreront leur confiance, leurs achats, et feront preuve d’une loyauté durable. Il s’agit donc d’instaurer un véritable partenariat entre l’entreprise et les clients, basé sur des bénéfices mutuels et réciproques, qui favorisera également le bouche à oreille positif et aura comme conséquence de baisser les coûts d’acquisition clients. C’est donc l’établissement d’une relation durable, interactive et individualisée entre le consommateur et la firme basée sur la confiance et l’engagement qui devient déterminante pour le choix, car la fidélité ne peut être atteinte uniquement par la préférence pour la marque, ni même pour la satisfaction ponctuelle à l’égard des produits116. Ainsi, le point culminant et stratégique, comme l’illustre le graphique ci-après (figure 22) est la défense des intérêts des clients (autrement appelée Customer Advocacy). Toutefois, cette stratégie n’est possible que si l’entreprise s’est dotée au préalable d’un système de management de la qualité (TQM = Total Quality Management) et d’un 114 URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! Advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. 115 Idem 116 SHERDEN W. (1994), Market Ownership in KOTLER P, DUBOIS B et D. MANCEAU (2004), Marketing management, 12ème édition, Pearson Education 59 système de mesure de la satisfaction des clients (Customer Satisfaction). Ensuite, un CRM (Relationship Marketing) doit fournir des informations pertinentes pour personnaliser la relation, sachant que le CRM idéal (Annexe 4 : les principes d’un CRM idéal) doit permettre d’instaurer un dialogue mutuel entre chaque client et l’entreprise, dans le but de construire une relation de confiance. Figure 22 : les différentes étapes permettant d’aboutir à la défense des intérêts des clients. Source « Dont’Just Relate, Advocate » 2.4.2 Les résultats attendus : gagner la confiance des clients Gagner la confiance prend du temps, à l’inverse, elle peut se perdre très rapidement. L’entreprise devra donc systématiquement honorer ses engagements, ses promesses et être loyale envers ses clients. La loyauté consiste à prouver aux clients que l’entreprise est de « leur côté », en ce sens qu’elle aide les clients à s’aider eux-mêmes en leur fournissant une relation à valeur ajoutée. Une stratégie basée sur la défense des intérêts clients pourra amener l’entreprise, à l'occasion, à agir contre ses propres intérêts à court terme : elle pourra en effet perdre des clients si elle n’a pas le produit adapté à leurs besoins, mais la qualité de l'expérience vécue signifiera que même les ex clients deviendront des promoteurs de l’entreprise. Ainsi, la mise en place d’une stratégie de « défense des intérêts clients » pourra se traduire dans un premier temps par une baisse du chiffre d’affaire et des profits. Mais dans un second temps, la confiance créée permettra à l’entreprise de profiter de bénéfices durables car les clients achèteront plus et plus régulièrement et recruteront parmi leurs amis pour qu’ils deviennent eux-mêmes clients. L’augmentation des coûts initiaux sera donc amortie en raison du retour sur investissement à plus long terme. Cette stratégie basée sur la confiance semble destinée aux entreprises dont les clients recherchent le « juste prix » (« to get value for your money »), c'est-à-dire qui désirent une offre incluant de la qualité et un prix juste. Cette stratégie peut également se révéler pertinente pour éviter la guerre des prix en se focalisant sur la qualité des produits, l’innovation et la différenciation. A l’inverse, si les clients d’une entreprise sont 60 seulement orientés sur le « plus bas prix possible », alors la stratégie décrite n’est pas pertinente. Enfin, les entreprises faisant partie d’un secteur qui n’est pas apprécié peuvent également explorer cette approche comme une stratégie à long terme pour rompre le cycle des relations tendues avec les clients, en comprenant pourquoi les clients n’aiment pas l’entreprise et sont méfiants. 2.4.3 Les outils et moyens de mise en oeuvre Outil 10. La confiance gagnée En conséquence, la quête de ce résultat devient un véritable outil de cette approche de la gestion de la relation client, la confiance étant considérée comme condition nécessaire au développement d’une relation. La confiance pour Deshpandé et Zaltman117, c’est la « volonté de pouvoir compter sur un partenaire présentant les garanties nécessaires ». Pour Morgan et Hunt (1994)118 elle symbolise « l’assurance de la fiabilité et de l’intégralité du partenaire ». Outils 11. La transparence Du fait de l’augmentation du pouvoir des clients, nous pouvons supposer que la transparence est une tendance lourde qui va devenir inévitable. Etre transparent signifie fournir une information complète, honnête et non biaisée aux clients pour gagner leur confiance. Une entreprise transparente qui communique sur ce qui ne fonctionne pas chez elle, au lieu de le cacher ; elle est ouverte concernant ses tarifs et conditions et enfin elle facilite l’information concernant ses concurrents. « L’entreprise transparente part du postulat que si de toutes façons le client n’achète pas auprès d’elle, autant lui laisser une opinion favorable ». 119 Par ailleurs, une entreprise ne peut être transparente que si elle est convaincue d’offrir des produits à forte valeur ajoutée, ce qui signifie qu’elle doit sans cesse investir dans l’innovation. La supériorité du produit et la création de valeur pour les clients sont en effet essentiels dans la mesure où la loyauté des clients est basée sur la qualité perçue. Outil 12. La co-conception Il s’agit de comprendre les valeurs des clients, leurs besoins et leurs process de décision. Sachant que dans la plupart des cas, les clients ont les solutions à leurs problèmes où peuvent développer des moyens pour répondre à leurs propres besoins, le but de l’entreprise est de collaborer avec eux pour proposer une réponse adaptée. Ce travail 117 PEELEN E. (2007), « Gestion de la relation client », Pearson Education MORGAN R.M. et HUNT S.D.(1994), « The Commitment-trust theory of relationship marketing », Journal Of Marketing, in PEELEN E. (2007), « Gestion de la relation client », Pearson Education 119 URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! Advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. 118 61 collaboratif permettra à l’entreprise de créer de la valeur et d’investir fortement dans des produits à forte valeur ajoutée. Les entreprises doivent donc pour ce faire avoir une stratégie d’innovation très réactive pour être en mesure de répondre le plus rapidement possible aux dernières nouveautés des concurrents et prendre en compte les nouveaux besoins des clients par un système d’écoute et de dialogue ouvert. Outils 13. Les partenariats Par une approche partenariale, il s’agit pour l’entreprise de prouver à ses clients qu’elle est de « leur côté ». En ce sens, son rôle consiste à aider les clients. En réalité, cette approche aide également l’entreprise de deux manières, en créant un fort lien social qui augmente la loyauté du client et en permettant à l’entreprise de mieux connaître ses clients et leurs besoins en travaillant sur leurs problèmes. La notion de partenariat s’entend à plusieurs niveaux. - - L’approche « classique » consiste à fournir aux clients des services et des conseils en nouant des partenariats avec d’autres entreprises présentes dans d’autres secteurs. Dans ce cas là, elle fournit aux clients un service en lui simplifiant la vie et en recommandant un tiers de confiance. Une autre approche est d’aider les clients à s’aider eux-mêmes en mettant en place des communautés. Le terme de communauté fait référence à un groupe d’utilisateurs ou de clients et de vendeurs qui interagissent les uns avec les autres. Les entreprises ont de plus en plus recours aux fonctionnalités des communautés sur leur site web afin de rassembler des informations sur les préférences des consommateurs, leurs désirs et besoins. Outil 14. L’organisation interne centrée autour du client Cette nouvelle relation client ne peut être mise en place que si l’organisation toute entière est au service de cette stratégie qui doit infiltrer toutes les strates de l’organisation de l’entreprise. Le changement le plus conséquent est le changement culturel qui doit s’opérer pour développer une vision unifiée des clients et inculquer le respect des clients, la tolérance et de l’humilité. Le Président et la Direction Générale doivent supporter et croire en cette stratégie de « plaidoyer client ».120 La Direction Générale doit également, au-delà de la rentabilité immédiate de l’entreprise, mesurer la force de la relation des clients sur le long terme et la confiance que les clients ont en l’entreprise. 120 URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! Advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. 62 Le tableau ci-dessous illustre sur les fonctions majeures d’une entreprise, les différences d’approches entre une stratégie traditionnelle « push/pull » et une stratégie de défense des intérêts des clients. Type de stratégie Publicité / promotion Vente Manageme nt de la marque Pratique classique : théorie « Push Pull » - Etre créatif, - Gagner des prix, - Augmenter le budget publicité, - Influencer, convaincre et motiver les clients - Faire du chiffre, - Atteindre les objectifs, - Garder la pression commerciale Pratique prônée par la théorie « Plaidoyer » - Développer un plan annuel, Inventer de nouvelles promotions, Obtenir plus de budget pour la marque, Gagner des parts de marché - Créer de nouveaux produits, Innover, Lancer des produits rapidement sur le marché, Ne pas passer trop de temps sur les études de marchés (les clients ne savent pas ce qu’ils veulent) Faire en sorte que les clients soient satisfaits des services mais ne pas trop investir dans les services, Faire des services un centre de profit Satisfaire la demande, Garder les coûts le plus bas possible, Améliorer la productivité Créer le meilleur produit, Chercher l’approbation auprès de pairs de la profession, les clients ne savent pas ce qu’ils veulent - Engager des talents, Former efficacement, Créer des systèmes efficaces, Promouvoir et récompenser en fonction des résultats annuels - Faire des prédictions financières correctes, Diminuer les pertes, Développer un système de reporting - Développement de nouveaux produits - Services - Production R&D Ressources Humaines Finance - - - - - - - Etre transparent, honnête, Penser à la communication comme moyen de supporter le process entier de décision. Construire des attitudes positives tout au long de la vie du client Vendre des solutions, Créer une relation basée sur le long terme, Répondre aux besoins, Trouver des opportunités pour de nouveaux produits Etre un promoteur de la défense des clients, Construire un système au niveau de l’entreprise pour aider les clients dans leur processus de décision, Construire des plans pour répondre aux besoins nouveaux et changeants des clients. Collaborer avec les clients pour identifier leurs besoins et apporter des solutions. Chercher les « lead users » : les clients en avance Construire une ligne de produits plus étendue pour renforcer la relation client Répondre aux besoins des clients en fonction de leur cycle de vie, Proposer des services pour améliorer la loyauté et construire une satisfaction durable du client. Proposer des services de très bonne qualité. Instaurer un système de qualité sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Co développer des produits avec les utilisateurs. Fournir des solutions globales Faire confiance aux clients en avance sur leur temps pour envisager l’avenir. Former les employés à la stratégie « plaidoyer client » Récompenser la loyauté à long terme et la confiance Changer de culture d’entreprise vers de la confiance Avoir une approche financière à long terme Investir dans la stratégie « plaidoyer client » même si les coûts à court terme augmentent, Baser le contrôle des activités sur la 63 pertinent. Direction Générale - Atteindre les objectifs, Gagner les guerres de compétition, Eviter les crises, Développer une vision commune et partager. - confiance, la loyauté et la force de la relation Faire de la stratégie « plaidoyer client » le cœur de la mission, Centrer l’organisation sur création de valeur à long terme, Créer une vision de partenariat avec les clients Ce qu’il faut retenir : Cette approche met l’accent sur le client et sur la qualité de la relation comme élément clé de la fidélité, en plaçant les intérêts du consommateur en priorité, en vue d’une satisfaction continue, permanente et renouvelée. Cette satisfaction comme nous venons de le voir, ne concerne plus uniquement les produits de l’entreprise, mais englobe des éléments de la relation, comme la confiance et l’engagement, qui sont corrélés directement aux profits à long terme et retour sur investissement. Cette stratégie implique de développer une vision unifiée et partagée du client dans l’entreprise, et d’inculquer le respect des clients, la tolérance et l’humilité. 64 En synthèse : Le tableau ci-dessous doit permettre aux entreprises de se positionner sur les différentes dimensions. Les P/R et A représentent les différentes stratégies et leur positionnement sur chacun des items. - P pour une stratégie Push/Pull - R pour une stratégie Gestion de la Relation Client - A pour une stratégie Plaidoyer client Selon Urban (2005), la majorité des entreprises se situerait au milieu du tableau Transparence P Information cachée, biaisée Qualité des produits et services Faible qualité qui ne permet pas d’honorer les promesses faites aux clients Incitation salariés P Aligné sur les besoins de la compagnie et non pas sur ceux des clients Partenariat avec les clients P Laisser les clients résoudre leurs problèmes eux-mêmes. Collaboration dans P l’élaboration des produits Les clients achètent les solutions de la compagnie. Comparaison des produits P et conseils Aucune, ou information biaisée. Pas de conseil Chaîne de distribution P Aucune coordination des différents réseaux Marketing traditionnel P Marketing traditionnel qui pousse les produits vers les clients R P A R A Transparence Information honnête et transparente Qualité des produits et services Produits et services de très bonne qualité qui remplissent les demandes clients R A Incitation salariés Aligné sur les besoins des clients R A R A Partenariat avec les clients : Aider les clients à apprendre et à s’aider eux-mêmes Collaboration dans l’élaboration des produits Les clients aident dans le design des produits, de manière individuelle ou par le biais de communauté Comparaison des produits et conseils Comparaison honnête de produits similaire Chaîne de distribution Toute la chaîne de distribution et les partenaires sont alignés sur les intérêts des clients pour construire de la confiance Omniprésence du plaidoyer client Toutes les entités de l’entreprise fonctionnent dans la même direction : construire de la confiance R A R A R A Figure 23 : Positionnement des entreprises en fonction de la stratégie adoptée. Source Don’t Relate, Advocate. 65 Cette partie tend à démonter qu’il existe un parcours d’évolution et de sophistication de la relation client au cours du temps résumé dans le tableau ci-dessous. Les différents courants de pensée La fidélisation comme levier pour retarder le départ du client et accroître sa valeur Mettre en place Les partis de stratégie pris stratégiques marketing défensives de rétention de la clientèle Les résultats Améliorer la rentabilité des attendus clients et éviter leur départ La fidélisation La loyauté La loyauté acquise comme levier de acquise par une par la défense des connaissance et expérience intérêts des clients de ciblage remarquable Mieux connaître La loyauté source les clients pour de croissance à mieux vendre et long terme servir Maximiser les profits de l’entreprise et la satisfaction des clients 1. Les 3. La valeur Les outils et moyens de programmes de client fidélisation 4. La mise en 2. Les supports : segmentation de œuvre carte de fidélité la clientèle et clubs Générer des profits sains et des clients prescripteurs Maximiser les intérêts des clients, en partenariat avec eux Gagner la confiance des clients pour gagner une croissance pérenne 5. Des offres et 10. La confiance des services à gagnée valeur ajoutée 11. La transparence 6. Le pilotage « 12. La cocentré client » conception 7. La fidélisation 13. Les partenariats des collaborateurs 14. L’organisation 8. L’écoute active interne centrée des clients autour du client 9. Le ciblage Nous avons en effet vu que la fidélisation a d’abord été considérée comme un moyen par l’entreprise, à savoir comme un levier de rétention des clients puis ensuite comme un levier de connaissance et de ciblage des clients. En effet, les premières approches autour de la relation client se sont concentrées sur la mise en place des programmes de fidélisation pour retarder le départ des clients. Puis les entreprises ont développé beaucoup d’efforts pour mettre en œuvre un outil CRM dans l’optique de mieux connaître leurs clients pour vendre plus et mieux, même s’il est possible de douter de la fiabilité dans le temps de données quantitatives collectées à un moment donné. Puis un changement de paradigme s’est opéré, considérant la fidélisation comme un enjeu majeur par lequel l’entreprise prouve à ses clients son engagement à leurs côtés afin qu’ils réitèrent en retour leur loyauté et dans lequel les notions de partenariat et de confiance priment. Ces nouvelles théories sont donc plus engagées en ce sens qu’elles se positionnent clairement du côté des clients et cherchent à comprendre leurs besoins par une démarche qualitative d’écoute. 66 La place du client évolue également : il n’est plus considéré comme un moyen mais comme un actif, et si structurellement il y avait une dichotomie assez claire entre clients et entreprises, cette dernière tend à s’estomper, l’entreprise devant œuvrer dans l’intérêt de ses clients, en partenariat avec eux. Ces nouvelles théories de l’écoute active et du plaidoyer client insistent sur l’aspect qualitatif de la relation pour fonder un pacte de confiance. Elles soulignent également la notion de profits vertueux, c'est-à-dire qui satisfassent autant l’entreprise que le client, et la nécessité de dépasser les enjeux commerciaux immédiats pour faire cohabiter deux types d’indicateurs : les ventes à court terme, mais aussi des indicateurs plus sensibles, comme la satisfaction des clients. Toutefois, la plupart des entreprises en France comme dans les autres pays occidentaux, se situent encore aujourd’hui au stade de la fidélisation comme moyen. C'est-à-dire que c’est encore, pour beaucoup un discours marketing, une sorte de « passage obligé »121 contribuant à la survie de entreprise, et non un véritable état d’esprit ou une démarche pro active. Dans la partie suivante, nous allons illustrer les leviers décrits par des exemples concrets d’entreprises ayant une pratique intéressante, c'est-à-dire soit innovante ou excellente dans les domaines cités. 121 Entretien avec Mr FORTASSIN P, Consultant Altran et professeur GRC à l’ENASS, Avril 2009 67 Chapitre 3. Illustrations des outils utilisés pour redéfinir la relation client En préambule : « la boîte à outils de la relation client » L’objectif de ce chapitre est de démontrer que la relation client ne se décrète pas mais au contraire, que le déploiement d’une stratégie de relation client et de fidélisation est un processus transverse et holistique, qui implique un ensemble coordonné. Pour matérialiser la mise en place d’une relation client, nous allons donc maintenant associer à chacun des outils évoqués précédemment des principes d’actions et illustrer ces outils par des exemples concrets d’entreprises ayant une pratique intéressante en la matière. Nous avons précédemment présenté quatre « courants d’analyse » qui représentent chacun un positionnement ou un parti pris en termes de relation client et de fidélisation. Les quatre courants décrits au cours de la deuxième partie peuvent d’un point de vue « promesse client » se résumer comme suit : - « Nous allons récompenser votre fidélité » o L’objectif de l’entreprise étant d’améliorer sa rentabilité en retardant le départ des clients. - « Nous allons mieux vous servir » o L’objectif de l’entreprise étant de maximiser ses profits en connaissant mieux les clients et en les ciblant. - « Nous allons vous faire vivre une expérience remarquable » o L’objectif de l’entreprise étant par la loyauté de ses clients, de bénéficier d’une croissance saine et durable. - « Nous allons gagner votre loyauté en défendant vos intérêts » o L’objectif de l’entreprise, étant, dans un contexte où le client acquiert le « pouvoir », de construire une relation de confiance pour en retour bénéficier d’une croissance stable. Dans le chapitre précédent, nous avions rattaché à ces courants un certain nombre d’outils qui nous ont semblé « emblématiques » de ces courants. Dans ce chapitre, les outils sont maintenant déconnectés de leur positionnement stratégique et ont « leur propre existence » : ils sont considérés comme des instruments à part entière de la relation client. L’idée est de mettre en avant que ces outils ne constituent pas la « propriété exclusive » d’un seul courant et qu’ils peuvent être envisagés en tant que tel sans être forcément rattachés à un champ en particulier, sachant bien entendu que chaque outil pris indépendamment n’a pas de sens pour construire une relation client pérenne. Le tableau ci-dessous : « la boîte à outil de la relation client », reprend les différents outils évoqués précédemment en les classant en trois ensembles : 68 - les outils préalables, les outils de positionnement, les leviers opérationnels ou de mise en œuvre Ces trois ensembles doivent permettre à une entreprise d’établir une stratégie de fidélisation et une relation durable avec ses clients. La boîte à outils de la relation client Les outils préalables Les outils de positionnement Outil 5 : Des offres et services à forte valeur ajoutée Les outils opérationnels ou mise en œuvre Outil 1 : Les programmes de fidélité Outil 4 : La segmentation Outil 10 : La confiance gagnée Outil 2 : La carte de fidélisation / Club Outil 6 : Le « pilotage » centré client Outil 11 : La transparence Outil 12 : La co-conception Outil 3 : La valeur client Outil 7 : La fidélisation des collaborateurs Outil 13 : Les partenariats Outil 8 : L’écoute active Outil 9 : Le ciblage Outil 14 : L’organisation interne centrée client 69 3.1 Les outils préalables Cette sous partie ne respectera pas la démarche générationnelle suivie dans la seconde partie, car nous estimons que les outils sont « trans-générationnels ». Les illustrations suivront donc la logique inhérente à la mise en œuvre d’une politique de relation client, tant au niveau de ce que l’entreprise met en œuvre vers l’externe qu’en interne. 3.1.1 L’écoute active des clients (outil 8) L’écoute active peut s’exercer de deux manières, soit en laissant la possibilité aux clients d’exprimer leurs problèmes spontanément et en facilitant le retour d’information, soit en adoptant une démarche proactive. Dans ce cas là, l’entreprise « déclenche » le retour d’information. Les deux approches peuvent se compléter. · Favoriser les remontées spontanées des clients (transport routier aux EtatsUnis) Cette première possibilité représente une valeur manifeste aux yeux des clients et des employés puisqu’il permet aux uns comme aux autres de pouvoir reconnaître leurs bienfaits sur le fonctionnement de l’entreprise. Aux Etats-Unis, les automobiles aperçoivent souvent à l’arrière des camions des autocollants : « la sécurité sur la route c’est ma priorité. Comment trouvez-vous que je conduis ? Appelez le 1-800 900»122. Voici l’exemple affiché d’un objectif dont le grand public est à même de juger. Une telle mesure encourage un changement de comportement quasi immédiat chez le routier. Il sait que le retour d’information est à la fois instantané et spécifique. De la même façon, à toutes les entrées des concessionnaires Toyota sont disposées des enveloppes T à l’adresse du Président du groupe. Cette mesure a un énorme impact sur la qualité du service car les vendeurs savent que les clients peuvent faire remonter directement leurs impressions. · Mettre en place une démarche structurée d’écoute active pour mesurer la qualité des rapports qu’une entreprise entretient avec sa clientèle (Rent a Car, Progressive, eBay) Pratiquer l’écoute active, c’est aussi et surtout développer de l’empathie avec les clients, en apprenant comment ils pensent, quels sont leurs problèmes, et en analysant leur processus d’achat. L’entreprise qui écoute réellement ses clients ne peut pas faire l’économie de la mise en place d’une démarche structurée pour développer le dialogue direct entre ses équipes et ses clients, puis elle doit être en mesure de réagir immédiatement aux commentaires en apportant les améliorations qui s’imposent. Pour illustrer ces propos, nous allons prendre l’exemple des entreprises suivantes : Rent a Car, Progressive et eBay. 122 BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education 70 - Démarche employée par Rent a Car : Rent a Car, entreprise de location de véhicules dont le siège est basé aux Etats-Unis, a bâti un index mesurant la qualité de sa relation avec la clientèle, nommé Enterprise Service Quality Index (ESQI). Cet indicateur est effectif au niveau des 6000 agences américaines et est considéré comme un outil stratégique et prioritaire pour indiquer le niveau de la relation client123. L’ESQI se focalise sur une question centrale : « Etes vous satisfait de votre dernière location, que pensez vous de nos prestations ? » - Si le client est satisfait, Rent a Car lui demande « que pourrions nous faire pour vous apporter un service encore meilleur ? ». - Si le client est insatisfait, Rent a Car lui demande « en quoi aurions nous pu mieux faire ? Si vous avez subi un désagrément, que pouvons nous faire ? » Le traitement est effectué par un institut de sondage sur un échantillon aléatoire de clients récents. La brièveté du questionnaire incite les clients à répondre à 95%. En cas de réponse négative, l’enquêteur présente ses excuses et demande au client s’il est possible de le rappeler à ce sujet (90% acceptent). Les problèmes sont par la suite résolus par l’agence même avec qui le client a traité. Dès qu’un client manifeste son mécontentement, l’institut de sondage envoie un email à l’agence concernée, indiquant les coordonnées du client et le score qu’il a donné. L’encadrement, qui a suivi une formation complète sur le thème de l’expérience client, rappelle au plus vite le client pour lui présenter ses excuses, comprendre ce qu’il s’est passé et trouver une solution. Cette stratégie de réactivité et de traitement des problèmes à la source a eu un impact direct sur les résultats financiers de la société. Par ailleurs, depuis 1994, la part de clients se déclarant neutres ou mécontents est tombée de 12 à 5%124. Cet outil de mesure, outre le fait qu’il incite le personnel à plus de productivité et d’efficacité, l’oblige également à mieux satisfaire les attentes des clients. - Démarche employée par Progressive : Progressive est le troisième assureur sur le marché américain, offrant de l’assurance automobile, habitation, de l’assurance vie. Tous les collaborateurs de l’entreprise en contact avec les clients sont impliqués dans le processus d’écoute active et de son suivi. Progressive réalise des mesures de Net Promoteur Score (NPS voir explication page 54) relationnelles (la propension des assurés à vouloir recommander Progressive à des amis) et transactionnelles (par exemple, suite à un accident). Ces mesures sont faites mensuellement, de manière aléatoire pour les enquêtes purement relationnelles, et de manière circonstanciée pour les transactionnelles (Progressive traite 2 millions de sinistres par an).125 Les questionnaires sont généralement très courts, constitués de deux ou trois questions, avec possibilité pour l’assuré de mettre un commentaire sur le questionnaire Internet, et avec systématiquement enregistrement de la conversation 123 REICHHELD F.F. et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 124 REBUFFE G., (2009) Compte rendu Conférence Net Promoteur Score, USA, janvier 125 Idem 71 quand c’est un représentant de Progressive qui appelle un client pour gérer le questionnaire NPS.126 Progressive rappelle dans les deux heures tout assuré qui a répondu au NPS par Internet et qui a n’a pas mis une note supérieure à 6 à la question sur la recommandation de Progressive à des amis. Les scores des collaborateurs sur les plateformes téléphoniques sont mis à jour chaque jour (un assuré qui fait un commentaire citant un collaborateur permet d’attribuer le score NPS au collaborateur, sinon le score donné par l’assuré est attribué au dernier collaborateur que l’assuré a eu en ligne dans les 30 derniers jours). Les scores de chaque collaborateur, de chaque équipe, et des équipes au global sont donnés. Chaque collaborateur a accès aux analyses sémantiques effectuées à partir des commentaires donnés par les clients avec leur NPS. Tous les mots clés sont donnés, la taille des mots clés étant représentatifs de leur fréquence dans les commentaires de l’ensemble des assurés, avec si c’est souhaité, la sémantique utilisée par les clients « détracteurs », les « neutres » et les « promoteurs ». - Démarche employée par eBay : eBay est un site Web de ventes aux enchères créé en 1995, qui est devenu une référence mondiale dans sa catégorie. L’exemple d’eBay prouve que les « détracteurs », ceux qui ne sont pas satisfaits de l’entreprise, sont parfaitement enclins à redevenir des « promoteurs », dès lors que l’entreprise leur montre concrètement qu’elle les écoute attentivement et qu’elle souhaite remédier à leurs problèmes127. En effet, eBay a constaté qu’un détracteur qui a répondu aux enquêtes dites « d’écoute active » basées sur le Net Promoteur Score et qui a été rappelé pour comprendre les raisons de son positionnement, non seulement reste plus longtemps ensuite un client de eBay qu’un détracteur non rappelé, mais en plus, a un volume d’achats sur eBay autrement plus important qu’un détracteur qui n’a pas été écouté128. · Organiser l’investissement de la Direction Générale dans l’écoute active (Superquinn, Groupe Vanguard, Intuit) La mise en place de systèmes permettant à la Direction de rester en contact avec les clients, ainsi qu’avec les employés qui travaillent pour eux au quotidien semble incontournable. Si les départements marketing ou instituts de sondage sont en charge de l’écoute et de la connaissance des clients, cela ne doit pas pour autant exonérer les responsables des entreprises d’être également en contact avec ces derniers. Les présidents ou directeurs généraux doivent eux-mêmes faire l’expérience du cycle complet de processus d’achat sur le terrain ou participer à des « focus groups », pour appréhender concrètement l’expérience vécue par les clients et comprendre « en live » pourquoi certains clients ne font pas confiance à l’entreprise ou à l’inverse pourquoi d’autres sont satisfaits. 126 REBUFFE G., (2009) Compte rendu Conférence Net Promoteur Score, USA, janvier REICHHELD F.F. et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 128 REBUFFE G., (2009) Compte rendu Conférence Net Promoteur Score, USA, janvier 127 72 Quelques exemples intéressants en ce sens : « Notre activité ? C’est de vendre une expérience qui satisfasse les clients » note Feargal Quinn129, ancien Directeur Général des supermarchés Irlandais Superquinn et actuel président du groupe Eurocommerce. Cet ancien directeur nouait un dialogue permanent avec les clients en se promenant dans les rayons de ses magasins chaque mois pour les interviewer. Il organisait également des tables rondes avec les clients pour les questionner sur la qualité du service et des produits. Les directeurs de magasins n’étaient pas conviés pour que les participants puissent s’exprimer sans contrainte. De même, Jacques Brennan, Directeur du groupe Vanguard, groupe de gestion de placement aux Etats-Unis passe quatre heures par mois à répondre au téléphone, au service clientèle. 130 Le CEO d’Intuit, fournisseur de logiciels, appelle lui-même chaque mois une dizaine de clients dans la liste mensuelle qui lui est remise des clients classifiés comme « détracteur »131. Sa première question au client est de savoir si ses collaborateurs l’ont rappelé et ont pu résoudre le problème. Si le client dit ne pas avoir été rappelé, le CEO s’engage à regarder comment apporter la solution et à rappeler lui-même le client pour lui donner la réponse. La mise en place de l’écoute active est déterminante pour les entreprises. Elle va leur permettre, entre autres, de connaître leurs clients pour agir sur ces derniers en les segmentant et ciblant, notamment en fonction de leur valeur pour développer des relations pérennes qui soient profitables pour les deux parties. 3.1.2 La connaissance des clients : segmentation, ciblage et valeur · Collecter et piloter l’information tout au long du cycle de vie du client Ces trois outils seront traités ensemble pour les raisons suivantes : ils sont extrêmement interdépendants les uns des autres, et par ailleurs, les stratégies des entreprises dans ces domaines étant relativement confidentielles, il n’est pas aisé de se procurer des exemples pertinents. La segmentation (outil 8) « La segmentation est le découpage d’une population en sous ensembles homogènes, en prenant en compte le but économique visé ».132 C’est donc un outil à disposition des entreprises pour connaître leurs clients et ainsi agir, c'est-à-dire construire des offres adaptées. 129 REICHHLELD F et B. POINTEAU (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 130 Idem 131 REBUFFE G., (2009) Compte rendu Conférence Net Promoteur Score, USA, janvier 132 BRUANT J., (2002) « Les enjeux de la segmentation dans la relation client », HEC Ecole des Mines 73 Il existe différents types de segmentation. Le but n’est pas de tous les répertorier ici mais de s’attarder sur plusieurs critères de segmentation pour illustrer nos propos. Une segmentation en fonction du cycle de vie et des revenus permettrait par exemple de différencier les offres, les approches commerciales et l’intensité relationnelle en fonction de deux inducteurs clés du marché : l’age et le cycle de vie d’une part et les revenus d’autre part. Figure 24 : Exemple de segmentation cycle de vie / revenus. Source : Direction Marketing Stratégique MAAF Assurances Le ciblage (outil 9) Le ciblage quant à lui, consiste à créer des listes de clients pour réaliser une action précise. Il s’appuie par exemple sur des scores d’appétence des clients pour l’achat d’un produit ou le risque de déséquipement. C’est donc un outil opérationnel visant à identifier les clients susceptibles de présenter un intérêt pour l’achat d’un produit donné ou par exemple des clients à risque de résiliation. Le ciblage permet donc d’optimiser les actions commerciales et d’améliorer la performance commerciale. La valeur client (outil 4) Enfin, la valeur client est bien entendu corrélée et complémentaire à la segmentation et au ciblage, en ce sens qu’elle permet d’identifier les clients à forte ou faible contribution économique pour ainsi moduler l’investissement des entreprises en fonction de la dite valeur. Pour faire le lien entre les trois concepts décrits, prenons le graphique ci-dessous (figure 26) qui illustre comment une politique de segmentation permettrait par exemple, de mettre en cohérence le canal d’interaction et la valeur stratégique du client. 74 R és e r v e r l e F a c e à F a c e p o u r l e s c i b l e s o u l e s é v é n e m ents stratégiques Coût du contact U ti l i s e r l a c h a l e u r d u T é l é p h o n e p o u r les cibles à valoriser O r ie n t e r l e s c l i e n t o u l e s é v é n e m e n t s à plus faible valeur vers le m édias les plus é c o n o m iq u e Face à Face Téléphone Courrier e m a il Internet C a n a l d e C o n ta c t Figure 26 : Politique de segments par rapport aux canaux d’interaction. Source : « Les enjeux de la segmentation dans la relation client », HEC Ecole des Mines Ce qu’il faut retenir : Le principe d’écoute active est très structurant pour connaître ses clients. C’est d’ailleurs le premier pas d’une démarche de connaissance du client, encore appelée « chemin vertueux de la croissance » (voir annexe 5 pour plus d’information) qui permet de collecter et de piloter de l’information tout au long du cycle de vie du client. Cette connaissance engendrée permet ainsi de développer de nouvelles offres, et également d’offrir des services complémentaires ou novateurs en fonction des segments et cibles prédéfinies. 3.1.3 La mise en place d’une organisation centrée autour du client (outil 14) Une bonne gestion de la relation client ne peut aboutir que si elle est portée par toutes les strates de l’entreprise, de la direction générale jusqu’aux forces de vente sur le terrain. C’est un processus qui doit faire partie de l’ADN de l’entreprise, et être partagé par tous. Les entreprises « championnes » de la relation client sont des entreprises qui ont une culture où le service client est considéré comme stratégique et où l’on retrouve une cohérence totale en interne entre l’entreprise et ses engagements. 75 · Créer une Direction Relations Clients (Toyota, 3 Suisses) Pour matérialiser ce déplacement du client au cœur de l’organisation, certaines organisations se dotent de Direction Clients qu’elles positionnent en lien direct avec la Direction Générale et transverse à toute l’entreprise. L’implication de la Direction dans cette démarche est en effet essentielle. Pour illustrer nos propos, nous allons prendre l’exemple de Toyota, premier constructeur automobile mondial et des 3 Suisses, leader de la vente par correspondance en France. - Organisation mise en œuvre chez Toyota. La fidélisation est l’objectif premier du groupe. Le client étant un « client à vie », le service client est considéré comme un levier stratégique. La Direction KAIZEN (process d’amélioration continue, afin de répondre parfaitement aux attentes des clients) et la Direction Relation client dépendent directement de la Direction Générale. - Organisation mise en œuvre chez « les 3 Suisses ». Les 3 Suisses ont une entité dénommée « Chantier Client » dont le rôle est d’aider les directions de toutes ses entreprises à placer le client au cœur de leur stratégie. 133 Fort des succès enregistrés depuis 3 ans, une nouvelle fonction de direction a été adoptée en test dans 4 entreprises : « le Directeur client ». Ses prérogatives sont les suivantes : - Aider le Direction Générale à préciser le sens de sa politique client et la posture de l’entreprise vis-à-vis de ses clients, - Veiller à ce que chacune des décisions quotidiennes touchant au marketing, à la logistique, au SI, aux RH, aux achats, … prennent systématiquement en compte l’angle de vue du client, - Organiser et ventiler la connaissance client au sein de l’entreprise. · Développer une culture clients (Rent a Car, Four Seasons) - Diffuser des messages clients en permanence Chez Rent a Car, la satisfaction des client est à l’ordre du jour de chaque Comité de Direction134. Elle est également présente dans tous les discours internes, à tous les niveaux, et quelque soit le sujet. Ce message est également relayé lors des rassemblements nationaux du management où chaque responsable des 6000 agences américaines arbore un badge avec son score de satisfaction clients. Les meilleurs d’entre eux sont récompensés en fonction de ce score en public. 133 CAPGEMINI CONSULTING ET L’ESSEC (2008), « La relation client différenciante » REICHHLELD F. F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 134 76 Ce type de pratique montre l’emphase mise sur la relation client, même si il faut bien entendu faire en sorte que les pratiques liées à la relation client soient adaptées à la culture nationale de chaque pays. - Gérer le personnel en harmonie avec la philosophie client L’exemple de Four Seasons, chaîne hôtelière américaine de luxe est très parlant pour illustrer ces propos. La culture de Four Seasons se fondant sur le service, ses responsables recherchent des employés qui manifestent un caractère altruiste. « Nous voulons des gens intrinsèquement convaincus de l’importance d’autrui où l’alter prime sur l’ego. »135 Chaque membre de l’organisation doit respecter et renforcer cette éthique professionnelle et ces valeurs président à toutes les décisions de recrutement, d’orientation, de formation, de promotion de rémunération, ou de cessation de collaboration avec ceux qui n’y adhèrent pas. La chaîne hôtelière organise des formations internes sur le thème : « le client et vous » qui visent à développer les compétences relationnelles des employés face aux différents types de clients. Le but est d’inciter les nouvelles recrues à chercher activement à faire plaisir aux clients, au-delà d’une réponse polie et ferme, en encourageant les participants à trouver des idées créatives, qui surprennent agréablement le client. Dans le cadre de ces formations, chaque participant endosse également le rôle du patron face à un employé ayant manqué aux règles en matière de qualité de services. Conclusion : il serait injuste vis-à-vis des clients comme des autres salariés de garder au sein du personnel quelqu’un qui a bénéficié d’une formation ad hoc et persiste pourtant à mal accomplir sa tache. 3.1.4 Le pilotage centré autour du client (outil 6) Les bénéfices ne peuvent à eux seuls être l’unique critère d’évaluation pour mesurer une croissance durable, dans la mesure où ils peuvent être générés par de « mauvais profits » et ne reflètent en aucun cas la satisfaction des clients. Pourtant aujourd’hui, la majorité des entreprises base leur résultat uniquement sur des critères financiers, fondés sur l’atteinte des objectifs commerciaux et quantitatifs, chaque responsable s’efforçant dans la plupart des cas d’améliorer les performances de sa propre unité. Cette culture du cloisonnement nuit à une appréhension globale de la gestion de la relation client. · Intégrer l’écoute active dans les tableaux de bord (Rent a Car) Il semble donc indispensable de mettre en place de nouveaux indicateurs tenant également compte de la satisfaction et de la loyauté des clients. Partant du principe que 135 REICHHLELD F. F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 77 la mesure et la gestion de la relation client sont indispensables pour développer une relation client stable et exigent autant de rigueur que la mesure et gestion des bénéfices, certaines entreprises ont érigé la satisfaction client en outil de gestion opérationnelle. A titre d’exemple, chez Rent A Car, l’ESQI fait désormais partie intégrante des tableaux de bords mensuels, à la même enseigne que les tableaux de bords financiers. De bons résultats financiers mais un taux de satisfaction médiocre empêche toute promotion des vendeurs en contact avec les clients.136 Cela implique une responsabilisation de l’ensemble des employés en contact avec les clients. Par ailleurs, les entreprises qui pratiquent l’écoute active utilisent ces données comme des outils prédictifs pour modéliser leur croissance et ainsi piloter et planifier leur activité économique. · Utiliser l’écoute active pour rationaliser les investissements (Progressive) Progressive sait analyser les revenus tirés d’un « détracteur », un « passif » et un « promoteur » et l’influence de ces comportements sur le nombre de contrats d’assurance achetés. Progressive a également modélisé la relation entre la durée de vie moyenne d’un contrat et le positionnement du client sur l’échelle « détracteur », « neutre » ou « promoteur ». Pour situer l’ordre de grandeur, un mois de plus de durée moyenne de l’ensemble des contrats de Progressive équivaut à 1 milliard $ de plus de chiffre d’affaires pour Progressive.137 Ce sont des chiffres simples, immédiats à comprendre et qui sont communiqués à l’ensemble des collaborateurs de Progressive pour qu’ils saisissent l’enjeu du traitement des clients. Cette modélisation permet au groupe de rationaliser ses efforts d’investissements, les renseignements rassemblés permettant de centrer les efforts exactement là ou ils sont nécessaires. · Utiliser l’écoute active pour modéliser la croissance du chiffre d’affaires (Progressive) Progressive utilise également l’évolution de son « Net Promoter Score » pour modéliser la croissance de son chiffre d’affaires, c'est-à-dire pour prévoir les ventes de contrats d’assurances des 18 mois à venir. Le Net Promoteur Score fait partie des chiffres présentés trimestriellement aux analystes financiers. Par ailleurs, tous les collaborateurs de l’entreprise ont accès aux projections faites de chiffre d’affaires à partir des NPS obtenus, à la projection de l’allongement de la durée de relation avec les clients, et à l’impact en chiffre d’affaires. Sur les trois années 2006/2008 où l’approche NPS a été mise en place, le taux d’amélioration du NPS de Progressive a été compris entre 7 et 9 points par an. Fin 2008, le NPS est de 46%. Parallèlement, Progressive fait état d’une croissance comprise entre 136 REICHHLELD F. F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 137 REBUFFE G., (2009) Compte rendu Conférence Net Promoteur Score, USA, janvier 78 6 et 8% selon les ans sur ces trois mêmes années. Progressive est l’assureur auto qui a le plus progressé en termes de satisfaction clients sur les 3 dernières années, selon JD Power qui établit chaque année le palmarès des assureurs en terme de qualité de service à leurs assurés.138 3.1.5 La fidélisation des collaborateurs (outil 7) · « Employees come first » (Soutwhest Airlines) Selon Thierry Chamouton, Président du Label de Responsabilité Sociale » et Directeur des relations clients Canal + : « avant de fidéliser ses clients, il est primordial de fidéliser ses collaborateurs ».139 Pour illustrer ce propos, prenons l’exemple de Southwest Airlines qui, depuis son démarrage en 1971, est devenue la quatrième compagnie aérienne aux États-Unis avec 30 années successives de bénéfices, dans une industrie où aucune autre compagnie n’a réussi à être profitable pour plus de cinq années de suite. Aujourd’hui la compagnie aérienne transporte chaque année plus de 100 millions de passagers, et dessert une soixantaine de destinations sur le territoire des Etats-Unis. Selon Mr. Herbert Kelleher cofondateur et président Southwest Airlines, le succès de Southwest Airlines réside dans sa culture et dans ses employés. « Votre moral », a l’habitude de dire Mr Kelleher, « c’est la chose la plus puissante de toutes. Traitez vos gens de façon correcte et ils vous traiterons correctement ». Le principe de base de cette société est que la personne principale pour l’entreprise, ce n’est pas le client, mais chacun et chacune des salariés. “Employees come first”; car quand l’entreprise soigne ses salariés, eux mêmes soignent les clients. Southwest a toujours mis l’accent sur les hommes, car selon Herbert Kelleher, « dans les métiers de service, ce sont les hommes et surtout leur attitude qui font la différence, d’autant plus que ces aspects intangibles, le moral des employés, pourront difficilement être copiés par les concurrents ». La charte d’entreprise de Southwest Airlines ne parle que de valeurs humaines et insiste sur les valeurs d’humilité et d’ouverture aux autres. Ce qu’il faut retenir : Les exemples cités ci-dessus nous prouvent qu’il y a une logique interne et systémique au service de la relation client. En effet, chaque levier considéré indépendamment n’aurait aucun impact sur la mise en place d’une relation client dans la durée. Une écoute active des clients qui ne serait pas portée par une conviction forte du management et intégrée dans tous les processus de l’entreprise, jusqu’aux analyses financières et projections économiques, n’aurait en effet aucun sens. 138 Idem Magazine ACTIMAG, « Imaginons la relation client de demain », magazine Groupe Acticall, 1er trimestre 2009 139 79 C’est donc bien l’ensemble de ces éléments qui doit mener naturellement à une relation de confiance entre le client et l’entreprise. 80 3.2 Les outils de positionnement 3.2.1 Des offres et services à valeur ajoutée (outil 5) · Procurer aux clients une expérience remarquable (Soutwhest Airlines) Par la qualité des services proposés à ses clients, l’entreprise entend leur procurer une « expérience remarquable ». Revenons sur le cas de Southwest Airlines. Quel est le secret de sa réussite ? Des promesses fortes faites aux clients et jamais démenties : - Afficher et respecter une stratégie simple, claire, et au service du client. A l’inverse des autres compagnies aériennes qui appliquent des coûts supplémentaires en raison de changement de billets, ou qui ne remboursent pas les clients en cas d’annulation, les clients de Southwest Airlines peuvent annuler leurs réservations en ligne et se servir de l’argent non utilisé pour un autre voyage (voir informations contenues sur le site Internet en annexe 6). Southwest, grâce à cette stratégie de « défense des intérêts des clients » a un excellent niveau de satisfaction de ses clients en ce qui concerne la facilité d’utilisation, les tarifs, le service. - Réduire les temps de transports, c’est à dire substituer au modèle “hub-and-spoke” classique dans le transport aérien le modèle linéaire de réseau permettant une rotation des avions entre atterrissage et redécollage d’une durée d’environ 20 à 30 minutes. - Etre toujours moins cher : sa flotte, qui compte plus de 500 appareils, est constituée d’un modèle unique, le Boeing 737, ce qui permet de réduire les coûts d’entretien, de formation ou de stockage des pièces de rechange. · Traiter les clients de façon exemplaire (Soutwhest Airlines) Cela rejoint la fidélisation des collaborateurs décrite précédemment. Selon Herb Kelleher, un personnel motivé et épanouit offrira une meilleure qualité de service au client. « Nous sommes intéressés par les aspects intangibles du business – une infusion de moral - parce que c’est la chose la plus difficile à copier par nos concurrents. Les aspects tangibles peuvent facilement être achetés par vos concurrents. Mais ils ne pourront pas acheter votre moral. Aussi, est-ce là la chose la plus puissante entre toutes ».140 Depuis 1987, lorsque le ministère des Transports a commencé le suivi statistique de la satisfaction des clients, Southwest Airlines a toujours été en tête du secteur du transport aérien avec le plus faible ratio de plaintes des passagers à bord. Toujours innovateur, Soutwest est la première compagnie aérienne a avoir créer un site Internet puis créer un blog d’entreprise southwest.com, DING : nuts about Southwest. 140 http://mdi.typepad.com/blog/2004/11/herb_kelleher_u.html 81 · Délivrer des conseils personnalisés (Amazon.com) Amazom.com, une entreprise de commerce électronique américaine vendant des livres, mais aussi d'autres produits culturels tels que disques CD ou films s’illustre sur ce point. Cette entreprise, qui n’a jamais réalisé de campagnes de communication de vaste ampleur, préfère consacrer ses ressources à l’amélioration des prestations et services rendus à ses clients, en baissant ses prix et en offrant des livraisons gratuites par exemple. Par ailleurs, Amazom.com propose des conseils très personnalisés à ses clients, en effectuant des recommandations basées sur ce que d’autres clients ont acheté lorsqu’ils ont fait un achat similaire à celui réalisé. Ce processus aide les clients à trouver le produit qui leur correspond et permet simultanément à l’entreprise de les faire monter en gamme. Amazom.com partage également toute l’information qui est en son pouvoir avec les clients : le degré de transparence est très élevé concernant l’information sur les livres, (critiques du livre, auteur, livres disponibles, …) et fournit toutes les informations relatives à l’expédition. 3.2.2 La confiance gagnée (outil 10) · Gagner sa réputation par la confiance générée (eBay) Une relation de confiance est probablement la clé d’une relation pérenne entre un client et une entreprise. L’exemple d’ eBay illustre parfaitement cette notion. Le slogan d’ eBay est « By the people, for the people » c’est à dire « par les gens, pour les gens ». Les cinq valeurs fondamentales d’ eBay sont : - Les gens sont foncièrement honnêtes - Chacun peut apporter quelque chose à la communauté - L’environnement dans lequel nous évoluons est transparent et honnête - Les qualités et différences de chacun doivent être reconnues et respectées - Les autres membres doivent être traités comme nous aimerions qu’ils nous traitent. eBay traduit ces valeurs en priorités quotidiennes et en décisions opérationnelles. L’entreprise se positionne au second plan et place ses clients au premier, grâce au mécanisme de confiance généré entre eux. Cette entreprise illustre à la fois le pouvoir grandissant des clients et le profit crée par la confiance mutuelle dans la mesure où elle aide et favorise les échanges entre des millions de vendeurs et acheteurs anonymes. La clé de succès d’eBay réside dans les mécanismes qui aident les vendeurs et les acheteurs à se faire confiance et à gagner leur réputation par la confiance. · Permettre aux clients d’améliorer les offres (eBay) La relation de confiance instaurée est également due au fait qu’ eBay fait appel à la créativité de ses membres pour améliorer ses services et encourage ses membres à signaler les cas où l’entreprise ne respecte pas ses engagements. Meg Whitman, ex présidente d’ebay a lancé un programme appelé «voice of customer» par lequel eBay 82 organise régulièrement des réunions entre les clients et les managers auxquelles participent également certains membres de la Direction Générale. Le groupe se retrouve ensuite via des téléconférences organisées une fois par mois pendant une durée de six mois. Selon Meg Whitman, « la participation des utilisateurs du site démultiplie les forces de notre équipe de direction. Presque tous les changements apportés au site tiennent compte de l’avis de nos utilisateurs. » 141 3.2.3 La transparence (outil 11) La logique qui sous tend ce positionnement est le suivant : si le client n’a pas l’intention d’acheter auprès de la compagnie, autant lui laisser une opinion favorable de la dite compagnie. · Permettre aux clients de comparer (General Motors) Un exemple particulièrement intéressant est celui d’Auto choice Advisor, crée par General Motors142. Même si General Motors est aujourd’hui proche du dépôt de bilan et qu’à ce titre, cette société ne constitue pas un exemple remarquable de modèle à suivre, l’outil développé en 2003 est somme toute intéressant. General Motors a développé à cette époque un site recensant plus de 300 véhicules (la plupart n’était pas des modèles de la marque) et disponible sur des sites impartiaux de comparaison tels que kelly blue book143 ou car talk.144 Le client entrait une variété de préférences concernant les attributs et les services qu’il souhaitait et un algorithme classait les véhicules qui correspondaient le plus aux préférences individuelles du client. Ce service fournissait des recommandations objectives aux clients. Entre 2003 à 2004, 700000 personnes ont visité ce site. General Motors a développé ce programme dans le but d’avoir une idée très précise des besoins des clients. Ce système lui a également permis de comprendre pourquoi ses voitures n’apparaissaient pas en top recommandations lorsque les clients entraient leurs critères. General Motors a pu intégrer ces retours clients dans le développement de ses propres produits et ainsi repenser certains de ses modèles. Trois besoins principaux ont été identifiés, et General Motors a sorti sur le marché en 2005 trois nouveaux modèles dont notamment un pick up 4x4 très manœuvrable et une voiture de taille moyenne pouvant tirer remorques et bateaux. Grâce à cette méthode, les véhicules proposés par General Motors se sont retrouvés au fur et à mesure dans une meilleure position. General Motors espérait également augmenter ses ventes grâce au niveau de confiance acquis dans cette relation qui reflète les intérêts des clients et les aide à prendre la meilleure décision. Dans un tout autre domaine, la compagnie d’assurance américaine Progressive permet à ses clients de remplir des devis en ligne, de comparer les prix ainsi que leur contrat actuel aux contrats d’autres compagnies. Si la compagnie propose un tarif plus cher, elle 141 REICHHLELD F. F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiez-vous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education 142 URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! Advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. 143 http://www.kbb.com/ 144 www.cartalk.com/ 83 explique aux clients pourquoi c’est plus cher. Progressive va plus loin que le fait de proposer un tarif, elle offre une note sur les tarifs et les services proposés par d’autres assureurs et fournit même l’url de leurs concurrents. Ces actions permettent de gagner la confiance des clients. · Permettre aux clients de s’exprimer (Progressive) Par ailleurs, l’entreprise, en incitant les consommateurs à s’exprimer – en ouvrant un espace d’expression sur le site Internet de la marque par exemple - peut donner l’image d’une entreprise transparente, dont les produits et les services sont de telle qualité qu’elle ne craint pas l’expression des clients. De nombreuses entreprises permettent la remontée d’informations. Pour ne pas multiplier les exemples, citons le cas de Progressive qui offre la possibilité à ses clients de témoigner de leur expérience concernant la gestion d’un sinistre (voir annexe 7 : remontées clients sur le site de Progressive) L’entreprise peut également par ce biais recueillir des informations très pertinentes sur ses clients. Cela rejoint le principe des communautés que nous allons décrire, où les clients peuvent donner leurs opinions, recevoir de l’information et partager leurs expériences avec leurs pairs. 84 3.3 Les outils opérationnels ou de mise en œuvre 3.3.1 Les programmes de fidélisation (outil 1) · Reconnaître la fidélité des clients en leur apportant des plus différenciants (LCL) Les programmes de fidélisation sont assez « galvaudés » dans le monde de la grande distribution. C’est pourquoi j’ai choisi d’illustrer mes propos avec l’exemple d’une banque, LCL, qui a récemment mis en place un dispositif « Programme Avantages LCL » (voir détail du programme en annexe 8) permettant de reconnaître la fidélité des clients en leur apportant des plus différenciants. Dans leur relation avec leur banque, les deux attentes principales des clients sont d’être connus (disposer d’un interlocuteur qui les connaît et comprend leurs besoins) et reconnus (voir leur fidélité remerciée et récompensée). Pour répondre à ces attentes, le programme Avantage d’LCL propose : - la reconnaissance de la fidélité des clients par le bénéfice d’avantages spécifiques, - la reconnaissance de leurs différences en leur proposant des services sur mesure, - la reconnaissance de leur mode de vie en facilitant leur quotidien, - la reconnaissance de leur exigence en s’engageant sur la qualité des prestations - et enfin la reconnaissance de leur engagement citoyen par des actions partagées et durables. Le programme permet aux clients de capitaliser des points pour les transformer en « petits et grands plaisirs » parmi une sélection de produits revisités chaque semestre. 3.3.2 Les supports : cartes de fidélité et clubs (outil 2) Pour illustrer ces notions, prenons deux exemples dans deux domaines diamétralement opposés : le secteur du transport aérien avec la carte de fidélité Flying Blue et le secteur de l’industrie du café avec le club Nespressso. · Proposer une carte de fidélité statutaire (Air France) Dans un secteur où la récurrence de l’achat est très liée à la catégorie socio professionnelle et/ou segment professionnel, Air France a développé un programme de fidélisation statutaire. Ce programme commun à plusieurs compagnies aériennes permet un gain de « Miles » plus rapide offrant : - Des avantages : Des vols prime, des montées en gamme (Affaires vs Eco), l’accès à des salons 85 - Un statut : différentes cartes Flying Blue : Ivory, Silver, Gold, Platinum, en fonction du nombre de Miles gagnés dans l’année L’objectif est bien de faire en sorte que les avantages acquis chez Air France soient tels (accès à des salons, files prioritaires) que les clients ne se posent même plus la question de savoir avec quel opérateur voler. · Matérialiser la stratégie relationnelle par un club (Nespresso) Dans un secteur d’activité avec des produits peu impliquants, Nestlé a décidé de créer une nouvelle marque empruntant les codes du secteur du luxe : une communication orientée sur le rêve, une distribution exclusive, des privilèges et services exclusifs, et un prix élevé. Le club est une illustration parfaite de la stratégie relationnelle de Nespresso, il offre une relation étroite avec les clients en permettant à Nespresso de devancer les attentes de ses clients et de contrôler de bout en bout son positionnement stratégique en : - Etant à l’écoute des commentaires et suggestions des membres. - Offrant des services personnalisés : assistance téléphonique et conseils 24h/24 et 7j/7, envoi régulier d'un magazine luxueux, simplicité de la commande, message email pour signaler au client que sa réserve de capsules arrive probablement à épuisement., livraison de capsules commandées sur Internet en 48h. Avec son club, Nespresso a vendu en 2005 1,7 milliard de dosettes145. L'inscription est quasi-automatique contre l'achat d'une machine. Fin 2007, le club comptait 3,1 millions de membres à travers le monde146. 3.3.3 Le nouveau rôle du client : la co-conception (outil 12) Publié en 1999, The Cluetrain manifesto147 (intégralité du manifeste des évidences en annexe 9) considérait déjà les marchés comme des lieux de conversations, posant ainsi les bases d’un marketing interactif, où des consommateurs matures échangent des informations tant entre eux qu’avec les entreprises. Avec un client désormais en position plus active et participative dans le processus d’achat, la relation client devient réellement une stratégie de différenciation. Dans ce cadre là, le client devient « acteur du système d’offre et producteur d’expérience de la marque »148. En positionnant le client au centre du processus de création et en recherchant l’innovation avec et grâce au client, les entreprises cherchent à assurer durablement leur développement commercial (annexe 10 : évolution du point de vue sur la création de valeur). 145 http://www.journaldunet.com/economie/face-a-face/cafe/relations-client-nespresso-senseo.shtml Rapport annuel Nespresso 2007 147 http://www.cluetrain.com/manifeste.html 148 CAPGEMINI CONSULTING ET L’ESSEC (2008), « La relation client différenciante » 146 86 Précurseur de cette démarche, l’entreprise 3M avec sa méthode « the lead user analysis method » estime, qu’il est 8 fois plus productif de faire appel aux clients que de passer par les méthodes traditionnelles d’identification des besoins149. Il y a deux manières de placer le client au cœur du système de création : le « customer made » et la « co-création ». 150 · Le « customer made » : intervention du client en amont dans le cycle d’innovation (Dassault Systèmes et Publicis, Logo) Dans le « customer made », le client intervient en amont dans le cycle d’innovation et de conception sur des modèles d’innovation ouverts (produit, services, campagne de communication). Dassault Systèmes et Publicis ont crée www.3DSWYM.com (three dimensions see what you mean) un outil permettant aux internautes de concevoir des produits, comme par exemple un pot de yaourt, en changeant sa forme, son volume, couleur, puis de le visualiser dans son frigo. Les produits sont ensuite soumis aux votes des internautes pour être éventuellement mis sur le marché. De même, les amateurs de Logo peuvent télécharger le manuel d’utilisation du logiciel de création numérique de logo151. Les créateurs des produits les plus inventifs sont récompensés par des prix, leur photo est mise en ligne à coté de leur création, et leur invention commercialisée. · La co-création : intervention du client en aval au moment de l’achat (Nike, Longchamps, Toyota) La co-création est synonyme de personnalisation de masse : c’est la capacité d’une entreprise à répondre aux demandes de chaque client en préparant à grande échelle l’adaptation individualisée des produits et des opérations marketing152. Dans la co-création, le client intervient en aval au moment de l’acte d’achat, par la différenciation retardée et l’assemblage des éléments qui permettent de réaliser un produit personnalisé au maximum. Nike153 offre ainsi la possibilité à ses clients, pour environ 10 dollars, de plus de créer leurs propres chaussures, modifier la couleur, rajouter des mots, c'est-à-dire personnaliser au maximum leur bien. 149 BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education 150 CAPGEMINI CONSULTING ET L’ESSEC (2008), « La relation client différenciante » 151 www. logofactory.com 152 KOTLER P, DUBOIS B et D. MANCEAU (2004), Marketing management, 12ème édition, Pearson Education 153 www.nike.com 87 Dans la même logique, Longchamp154 permet de personnaliser sa gamme « pliage » sur son site Internet. Le site propose également des couleurs qui ne sont pas au catalogue, ce qui permet au designer de Longchamp d’étudier les tendances couleurs des clientes avant de les lancer en production de masse. Enfin l’exemple de Toyota est intéressant. En 2002, le constructeur automobile décide, pour reconquérir le marché des jeunes, de créer un site Internet dédié155visant à procurer une nouvelle expérience d’achat aux clients fondée sur le tuning. Le principe est d’associer directement le client au processus d’achat, tout en intégrant les canaux virtuels et physiques. Le client choisit en ligne un modèle de base, y ajoute les options désirées puis visualise le résultat produit et le coût final. Une fois la commande validée, Toyota mobilise son réseau de concessionnaires pour assembler et livrer la voiture au plus proche du client. Ce processus de co-création tend à estomper la distinction classique entre entreprises et experts d’un côté et clients novices de l’autre. Par enchaînement logique, les enquêtes traditionnelles clients sont peu à peu remplacées par des expériences in situ où les clients testent et donnent leur avis en direct. 3.3.4 Les partenariats (outil 13) · Aider les clients et les aider à s’aider eux-mêmes (Pampers, Dell, Apple) Certaines entreprises ne souhaitent pas que le client prenne part à la conception des produits, c’est notamment le cas par exemple de l’industrie du luxe. Dans d’autres activités, les limites de la compétence des clients -notamment lorsque beaucoup de recherche et développement ou de technicité sont nécessaires- freinent le principe même de co-production. Toutefois, toutes les entreprises en principe peuvent décider de créer des cercles de clients, où ces derniers sont membres d’une communauté. La technologie du Web 2.0 permet d’autant plus facilement de constituer des communautés d’experts ou de clients capables d’entamer un dialogue pertinent avec l’entreprise ou de procéder au processus de validation d’un nouveau produit en proposant des améliorations à apporter et des suggestions. Le principe de la communauté consiste également à offrir un support mutuel aux clients pour qu’ils surmontent leurs difficultés et s’entraident. C’est Procter & Gamble’s qui a été précurseur dans ce domaine, en créant le « Pamper site, the Pampers Parenting Institute156 » dont le but est d’aider les jeunes parents inexpérimentés en leur fournissant des informations et une communauté en ligne. Les produits de Procter & Gamble (P&C), même si ils sont présents sur le site, ne sont pas mis en avant. P&C espère qu’en fournissant de l’information utile, elle va fidéliser les clients à ses produits et renforcer son image de marque. 154 www.longchamp.com www.scion.com 156 http://www.pampers.com 155 88 Dans les domaines technologiques, comme Dell, Apple, Adobe System ou encore HP, ces communautés offrent souvent des solutions aux problèmes techniques et également des suggestions en matière de nouveaux produits. Les avantages à créer ce genre de communautés pour les entreprises sont de plusieurs ordres : - Elle améliore ses relations avec ses clients et également les relations entre ses clients, développant ainsi l’idée d’appartenance à un même groupe. - Les suggestions des clients étant rapidement prises en compte, la loyauté des clients augmente dans la mesure où les clients reçoivent des services de bonne qualité. Par ailleurs, les études sur la qualité du service ont montré à quel point la réactivité était attendue par les clients de façon générale, et les communautés permettent d’apporter une réponse satisfaisante dans les délais appropriés. - L’entreprise économise de l’argent en terme de services après vente puisqu’une partie des problèmes est réglée par les clients eux-mêmes. - Elle apprend constamment les sources d’insatisfaction ou de problèmes et peut réagir rapidement aux opportunités proposées et être dans une posture d’innovation permanente. - Elle peut prioriser ses investissements en recueillant l’avis par des clients sur les améliorations à apporter en priorité. Toutefois, capter l’attention des clients et obtenir leur engagement est une difficulté : il faut que la collaboration apparaisse comme un divertissement et que les valeurs portées par la marques rencontrent les valeurs des clients. Ce qu’il faut retenir : Encore une fois, si les leviers décrits ci-dessus ont été catégorisés, ils ne peuvent être considérés unitairement car ils participent tous du même mouvement, à savoir la gestion la relation client. Bien entendu, une entreprise n’est pas obligée de s’appuyer sur l’intégralité des leviers décrits pour construire une relation client durable. Notons toutefois que ces leviers sont complémentaires et s’auto alimentent. Ainsi, par exemple, une entreprise qui souhaite afficher une posture transparente devra être convaincue d’offrir des produits et services de qualité à ses clients. 89 Pour clôturer ce chapitre, il semble important d’apporter au lecteur une vision synthétique des différents outils, principes d’action et exemples présentés. 90 Pour résumer, nous pouvons dire que les outils préalables, les outils plus opérationnels ou ceux de positionnement constituent un « tout ». En effet, une entreprise qui souhaite obtenir la confiance de ses clients et ne pourra faire l’économie de mise en oeuvre de moyens préalables que sont la connaissance et l’écoute de ses clients. De même qu’elle devra adopter une position transparente, et œuvrer clairement pour le respect et la défense de ses clients. Pour autant, la boîte à outil décrite constitue une boîte à outil des possibles. Chaque entreprise n’est pas obligée de mettre en œuvre l’intégralité des outils pour bâtir une relation client, mais elle devra veiller à la cohérence des outils mis en œuvre. Dans le dernier chapitre, nous allons maintenant analyser si les outils et les bonnes pratiques inventoriées seraient appropriés dans le secteur de l’assurance et plus particulièrement chez MAAF Assurances pour construire une relation client durable. 91 Chapitre 4. Application des outils et transfert des bonnes pratiques dans le secteur de l’assurance L’objectif de ce chapitre est de s’appuyer sur la « boite à outils » pour permettre d’analyser en quoi les « outils » décrits précédemment pourraient ou non améliorer la relation client dans le secteur de l’assurance et plus particulièrement chez MAAF Assurances. Pour ce faire, nous dresserons tout d’abord une présentation rapide de MAAF Assurances et de ses enjeux. Ensuite, nous utiliserons la boite à outil qui peut permettre d’une part, de dresser un constat concernant la maturité d’une entreprise dans un domaine, et d’autre part, d’estimer si la mise en œuvre de tel ou tel outil pourrait être envisagée pour déployer une relation client. Nous identifierons ainsi la pertinence de l’application de ces outils et les impacts associés en termes d’organisation, de rupture, de pratique et de promesses clients. . Nous avons vu également précédemment que les actions liées à la fidélité ou loyauté pouvaient se « classer » en deux mouvances : - La fidélité envisagée comme récompense de la durée et comme levier de ciblage pour procurer de la satisfaction au client - La loyauté envisagée comme expérience remarquable procuré au client et comme défense de ses intérêts. Cette partie sera l’occasion de se prononcer sur le positionnement à adopter par les assureurs ? Dans quelle catégorie peuvent-ils se reconnaître ? Jusqu’où peuvent-ils aller en terme de relation clients ? Conservant la structure de notre « boîte à outils, nous analyserons successivement les moyens préalables à la mise en place d’une relation client, les outils de positionnement puis les outils de mise en œuvre opérationnelle. 92 4.1 Présentation de MAAF Assurances et de ses enjeux 4.1.1. MAAF Assurances : une mutuelle ancrée dans le 21ème siècle · Historique MAAF Assurances est une mutuelle d’assurance française créée en 1950, dont le siège social se situe à Niort dans les Deux-Sèvres. Son sigle signifie la Mutuelle d’Assurance des Artisans de France. Mais contrairement à ce que son appellation actuelle laisse à penser, MAAF Assurances est, depuis les années 1960-1970, une société d'assurance grand public pour les particuliers et les professionnels. · Organisation MAAF Assurances est une Mutuelle Sans Intermédiaire. Les Sociétés d’Assurance Mutuelle n’ont pas d’actionnaires donc pas de capital à rémunérer. Cette caractéristique permet aux mutuelles d’assurance de proposer des garanties très compétitives avec un excellent rapport qualité/prix, tout en redistribuant les profits aux sociétaires, qui cumulent la double qualité d’assuré individuel et d’assureur collectif. MAAF distribue ses produits sans intermédiaire, c'est-à-dire que le réseau commercial est salarié de MAAF Assurances. Le président Directeur Général de MAAF Assurances est Thierry Derez et l’entreprise est organisée en trois pôles principaux : une Direction Générale Ressources, une Direction Générale Assurances et une Direction Assistance Indemnisation et Sinistres. · Appartenance à la SGAM Covéa En 2003, sous l'impulsion de MAAF Assurances et de son PDG Jean-Claude SEYS, également PDG de MMA, MAAF et MMA se regroupent au sein de la première Société de Groupe d'Assurance Mutuelle (SGAM), baptisée COVEA. L’objectif d’un tel regroupement est d’assurer la pérennité des entités qui la composent, en leur permettant de réaliser des économies d'échelle (concernant les sinistres) et de mutualiser les investissements (informatique, gestion) ou les risques (financiers, réassurance). Ce rapprochement s’effectue tout en laissant chacune des entités préserver leur autonomie, identité et culture, avec la philosophie suivante : « Se rassembler sans se ressembler». En 2005, GMF rejoint COVEA, qui est aujourd'hui le premier assureur dommages en France (numéro un de l'assurance auto avec 9 millions de véhicules assurés, premier acteur en France en protection juridique, quatrième en santé individuelle) avec plus de 16 % de parts de marché. · Chiffres clés Le Groupe MAAF protège aujourd’hui 3,8 millions de particuliers et professionnels. MAAF propose des produits dans les domaines suivants : automobile, vie privée 93 (habitation, responsabilité civile, assurances scolaire et étudiante, assurances loisirs), santé et prévoyance (complémentaire santé, assurance décès, accident de la vie privée, perte de revenus), épargne (contrats d’assurance vie en euros et multi supports). Pour les professionnels et les entreprises, MAAF Assurances propose la protection des locaux, des matériels et véhicules, des personnes et des activités. MAAF est aujourd’hui le 5ème assureur automobile, 6ème assureur IARD et la 1ère mutuelle des professionnels. MAAF emploie plus de 6 800 salariés et distribue ses produits par ses agences (573 points de vente) par téléphone (8 centres d’appel) et par Internet. Son chiffre d’affaires en 2008 est de 3 440 millions d'euros, (soit une augmentation de 1.5% par rapport à 2007) dont 2 847 millions d'euros en assurance non-vie et 593 millions d'euros en assurance vie. · Positionnement : la référence qualité prix Avec pour slogan «Efficace et pas chère, c’est la MAAF que je préfère», l’ambition est de faire de MAAF la marque que les clients choisissent de façon prioritaire et rationnelle, notamment pour son rapport qualité / prix ainsi que pour l’efficacité de ses prestations. Ce positionnement met en avant l’efficacité, la compétitivité et l’aspiration à devenir leader sur le marché de l’assurance. Après avoir axé sa communication sur le prix ces dernières années, MAAF se repositionne aujourd’hui en mettant d’accent sur la qualité de ses prestations. 4.1.2 Les principaux enjeux et défis de MAAF Assurances MAAF Assurances a connu au cours des dernières années un très fort dynamisme commercial. En assurance auto, le groupe a même enregistré en 2008 une progression de 2,8% tout à fait honorable au regard de l’évolution du parc automobile, inférieure à 1%. Le positionnement actuel de MAAF Assurances, en tant qu’entreprise grand public vendant de manière optimisée des produits IARD banalisés correspond donc à une vraie demande du marché, comme en témoignent ses résultats commerciaux. Jusque là, le modèle économique a donc un sens et prouvé sa pertinence et performance économique. Par ailleurs, notons qu’aujourd’hui, MAAF Assurances est un des rares assureurs à axer son positionnement sur du « rationnel » et de « l’économique » et s’est forgé une identité autour de ces valeurs. Sa promesse client, simple et lisible « efficace et pas cher » rencontre une réelle demande et est totalement en cohérence avec son positionnement d’assureur IARD vendant des produits dommages banalisés. Pour autant, si nous raisonnons à 5-10 ans, où les assureurs rencontreront probablement des problèmes de marges sur les produits « standards » et où l’on peut supposer que la marge passera par la création de valeur et plus de relationnel, nous pouvons douter, non pas de la pérennité, mais de l’auto-suffisance du modèle actuel. 94 Ainsi, s’il n’est pas question de remettre en cause le business model de MAAF Assurances sur des produits « basiques » où le client recherche avant tout un prix bas et n’est pas en attente d’une forte valeur ajoutée, les préconisations qui vont être suggérées visent à aider MAAF à réussir son virage vers les assurances qui nécessiteront des produits plus sophistiqués, permettant de couvrir des besoins plus complexes et plus larges. 95 4.2 Application des outils et transférabilité des bonnes pratiques dans le monde de l’assurance et plus particulièrement à MAAF Assurances Les outils seront abordés dans le même ordre que celui du chapitre 3. 4.2.1 Les outils préalables 4.2.1.1 La mise en place d’une écoute active (outil 8) On sait depuis Marcel Mauss157 qu’une relation entre deux individus est basée sur la réciprocité. Si l’on veut entretenir une relation sur le long terme avec un client, il faut savoir donner pour générer, en retour, un comportement de contre don et créer ainsi une véritable interaction. Il peut s’agir d’informer, montrer que l’on est réceptif et réactif aux interrogations du client, ou encore tout simplement écouter. Sur la base de la relation créée, il sera possible de greffer des offres d’autant plus facilement qu’un dialogue est engagé. Ainsi, l’écoute active est très structurante et ce à plusieurs niveaux : · L’écoute active permet d’améliorer les offres et services proposés aux clients Ecouter activement les clients, c’est tout d’abord intégrer le fait que la masse qu’ils représentent est en fait constituée de niches, de segments et de profils particuliers. Cela rejoint l’importance de la segmentation qui sera abordée ultérieurement. C’est également faire preuve d’humilité vis-à-vis de ses clients. Après tout, l’assurance c’est avant tout la protection des hommes et des biens, c’est un secteur qui touche à l’humain et qui doit donc écouter l’humain pour être au plus proche de ses préoccupations. C’est enfin intégrer le fait que le marché de l’assurance ne se situe plus dans une logique de demande mais dans une logique d’offre, et que « c’est en déterminant, par l’investigation de sous groupes, les demandes futures inconscientes des clients et en les traduisant en produits qu’un assureur peut espérer offrir des offres à forte valeur ajoutée »158. En effet, aujourd’hui, les clients sont déjà servis. L’assureur qui cherche donc à se démarquer doit rechercher tout ce qui est utile au client et pas encore explicite, surtout dans une situation économique de formatage et d’uniformisation de l’offre où les acteurs qui restent dans l’uniformité perdront peu à peu de la visibilité. 157 MAUSS M. (1924) « Essai sur le don : forme et raison d’échange dans les sociétés archaïques ». l’année Sociologique, Réédition dans MAUSS M. ; Sociologie et Anthropologie, PUF, Coll Quadrige, 2001, Paris 158 Entretien avec Mr PELTZER G, Professeur à l’ENASS, Avril 2009 96 · L’écoute active permet également d’améliorer les process et d’identifier les dysfonctionnements internes Dans le chapitre précédent, nous avons présenté un certain nombre d’entreprises qui ont mis en œuvre un process structuré et relativement simple d’écoute des clients. La mise en place d’un tel outil qui favorise l’expression des consommateurs relève tout autant d’une volonté politique que d’une bonne organisation de l’entreprise. MAAF doit donc se doter de moyens pour mettre en place un système d’écoute active permettant de réaliser des mesures à la fois relationnelles et transactionnelles. - Relationnelles, c'est-à-dire à tout moment dans la vie d’un client. Car le taux de recommandation est un indicateur phénoménal dont MAAF Assurances pourrait se servir : la recommandation pure est une valeur sure, gratuite et désintéressée. A l’inverse les clients très insatisfaits peuvent diffuser un message très critique sur MAAF Assurances. Le traitement des insatisfactions est en ce sens primordial. Nous pouvons penser qu’un client qui fait l’effort de faire remonter sa plainte est un client attaché à la marque, et le traitement des insatisfactions, en permettant à l’entreprise de répondre à ses clients et de leur apporter une solution, a une valeur extraordinaire puisqu’il permet de renouveler un contact positif avec les clients. - Transactionnelles, c'est-à-dire suite à sinistres ou suite à résiliations. o Suite à sinistre ; car l’occurrence d’un sinistre est réellement le moment le plus structurant dans une relation avec un assureur. C’est en quelque sorte « l’heure de vérité », où l’assureur révèle ses réelles compétences et engagements. o Suite aux résiliations ; car face à des taux assez élevés de départ de ses clients il est primordial que MAAF puisse pour analyser à quoi ses résiliations sont imputables et en tirer les enseignements qui s’imposent. Par ailleurs, rappelons que la satisfaction constitue la base de ce qu’est en droit d’attendre un client, et que s’en contenter constitue une grave erreur. Ainsi, il ne s’agira plus de demander aux clients s’ils sont satisfaits des services de MAAF Assurances, mais en quoi MAAF pourrait les satisfaire d’avantage. La méthodologie employée par l’écoute active devra différer de celle employée par les études traditionnelles de satisfaction qui constituent des échantillons aléatoires pour analyser la satisfaction des clients. En effet nous avons vu que les clients n’ont pas tous la même valeur ni la même importance aux yeux de l’entreprise. Il conviendra d’interroger en priorité les clients dont l’avis compte réellement et qui doivent guider les priorités stratégiques. Ainsi, l’écoute active, pratiquée de cette manière, pourrait permettre à MAAF : - d’identifier les sujets prioritaires, - d’objectiver et d’approfondir les attentes des clients, - de définir des plans d’action qui orientent ses choix stratégiques pour les années à venir en terme de produits, services, conseils et organisation - et enfin de mesurer concrètement l’impact des actions correctives mise en oeuvre. 97 4.2.1.2 L’organisation de la connaissance client La connaissance client, c'est-à-dire l’harmonisation des données clients est également un pré requis indispensable aux travaux sur la segmentation, la valeur et le ciblage. Or, si les assureurs maîtrisent parfaitement les données techniques de leurs produits en portefeuille (ratio sinistre sur cotisation, marge…), il n’en est pas de même pour les données clients. Le socle de connaissance client est généralement parcellaire et non partagé par l’ensemble des collaborateurs. Mais dans un marché qui ne croit plus ou très peu, les assureurs ont tout intérêt à mieux connaître leurs clients car ces derniers sont tant un élément de consolidation que de développement. MAAF devra donc s’appuyer sur les éléments suivants pour organiser la connaissance de ses clients. · La segmentation (outil 4) « L’absence ou l’insuffisance de segmentation des clients dans le secteur de l’assurance pose un réel souci pour mettre en œuvre une politique visant à fidéliser les clients. En effet, avant de vouloir entretenir une relation durable avec ces derniers, encore faut-il les connaître, tant au niveau de leurs besoins, de leurs envies, que de leurs attentes ». 159 Ainsi, il semble nécessaire, même au sein d’un marché de masse, d’intégrer la notion de segmentation pour aboutir à des offres en cohérence avec l’identité et les besoins des clients. Si certains assureurs, comme AXA, ont déjà intégré une segmentation de leurs offres et pratiquent un traitement différencié en fonction de la valeur du client, la plupart raisonnent encore par segmentation produit (auto, MRH, Santé, Prévoyance…). Toutefois, les assureurs vont être contraints d’évoluer vers une segmentation marchés et clients (particuliers, clients aisés, seniors, famille, professionnels, TPE, PME…), car toutes ces populations n’ont ni les mêmes besoins, ni mêmes attentes ni le même budget. Par ailleurs, si la segmentation est un élément très structurant pour la construction des offres, cette notion n’est que peu intégrée dans la définition d’offre d’assurances. Sans remettre en cause l’importance des ratios techniques dans la définition des tarifs, l’assurance est un des seuls secteurs où les tarifs sont liés à des modèles actuariels, c'està-dire basés sur ce que les prédécesseurs d’un même type de risque ont coûté ou rapporté à l’assurance (ratio technique sinistre sur cotisation). En ce sens, c’est un des rares secteurs où les clients ne rentrent pas par le prix : le calcul du prix est effectué à postériori, une fois que le vendeur renseigne tous les attributs et caractéristiques du client et de ses biens et le prix ne tient pas toujours compte de ce que le client est prêt à payer. 159 PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance 98 · La valeur (outil 3) De même, la trop rare prise en compte de la valeur client dans le secteur de l’assurance pose un réel souci pour mettre en œuvre des actions de fidélisation. 160 Par la prise en compte de la valeur, il s’agit de reconnaître les bons clients. Ainsi : - les clients rentables et à potentiel devront être « chouchoutés ». Les actions prioritaires devront porter sur ce segment. - concernant les clients représentant un potentiel de développement (à l’exemple des jeunes) mais dont la rentabilité actuelle n’est pas avérée, l’entreprise devra chercher à les équiper davantage en favorisant la vente additionnelle. Si elle met en place un programme de fidélisation, elle devra donc conditionner les récompenses octroyées à ces clients au fait qu’ils détiennent plusieurs contrats. - concernant les clients rentables mais ne présentant pas de potentiel, à l’instar des personnes âgées, il faudra bien entendu que l’entreprise cherche à les garder, tout en limitant l’investissement. - enfin, des clients non rentables et sans aucun potentiel ne devront faire l’objet d’aucune action de fidélisation. Comme nous l’avons vu dans le deuxième chapitre avec Reichheld (2002), l’entreprise ne doit pas surinvestir dans cette catégorie, surtout au détriment d’une autre. Toutefois se pose la question de la « légitimité » de la prise en compte de la valeur des clients pour une mutuelle d’assurance. L’étymologie du mot mutualisme vient du latin mutuus, qui veut dire réciproque, qui s'échange. En économie, le mutualisme est une doctrine prônant la mutualité, c'est-à-dire un système de solidarité sociale fondé sur l'entraide réciproque des membres qui cotisent.161 Le mutualisme repose donc sur un système de valeurs de partage et de solidarité qui rejette la recherche de profit. Ainsi, se pose la question suivante : est-ce que les mutuelles peuvent envisager d’adopter des pratiques différenciées à l’égard de leurs sociétaires ? N’est-ce pas en contradiction avec leur éthique et leurs valeurs ? Historiquement, le modèle économique des mutuelles sans intermédiaires est fondé d’une part sur le volume et d’autre part sur un prix bas : c’est un modèle que l’on qualifiera « d’industriel ». Pour schématiser, les mutuelles proposent sur des risques de masse, un tarif valable et identique pour tous et les mêmes services à l’ensemble de leur sociétariat. Mais si ce modèle, fondé sur le volume et les prix a fait ses preuves, il semble qu’il soit actuellement remis en cause avec notamment : - L’hyper saturation du marché solvable, sachant que « sur un marché saturé, il est fort à parier que les stratégies de masse ne seront plus tenables et vont se transformer en stratégie de niche ou de profilage de tribus ». 162 - La montée de l’individualisme : les clients veulent de moins en moins partager le risque avec leurs semblables mais payer pour ce qu’ils coûtent réellement à la collectivité. Ainsi, il est probable que l’on assiste à une évolution du modèle économique des mutuelles sans intermédiaires, nécessairement plus orienté vers une prise en compte de 160 PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance www.linternaute.com/dictionnaire/fr/definition/mutualisme/ 162 Entretien avec Mr PELTZER G, Professeur à l’ENASS, Avril 2009 161 99 la segmentation et de la valeur des clients. MAAF Assurances l’a bien compris. Elle a récemment entrepris des travaux en ce sens. · Le ciblage (outil 9) La mise en place d’une réelle stratégie de segmentation et la prise en compte de la valeur client permettraient également de définir des segments à travailler en priorité, pour décliner des politiques commerciales plus adaptées. 4.2.1.3 L’organisation interne centrée client (outil 14) MAAF Assurances est divisée en trois grandes directions : - La Direction Assurances - La Direction Assistance Indemnisation et Services - La Direction Ressources Chacune de ses trois divisions à ses propres objectifs, principalement guidés par la recherche de la maîtrise des coûts et du juste prix. Si l’orientation client n’est pas le seul critère de succès qui doit guider MAAF Assurances, ce qui semble logique, il semblerait toutefois que certains efforts pour éviter les silos et placer le client au cœur de l’organisation soient indispensables. 4.2.1.4 La fidélisation des collaborateurs (outil 7) Le secteur de l’assurance, dont MAAF Assurances, ne rencontre pas le problème de fidélisation de ses collaborateurs, à l’instar de ce qu’il peut exister dans d’autres secteurs d’activité. En effet, le taux de turnover est relativement bas. Pour autant, l’enjeu des assureurs est réel concernant la mobilisation de leurs collaborateurs au service du client. Avant de vouloir « penser client » et faire du respect de la relation client une priorité, encore faut-il auparavant le faire en interne d’une manière transverse. Les deux sont en effet corrélés, tant et si bien que lorsqu’AXA en 2005, a affirmé sa volonté de « gagner la préférence des français », le groupe a souhaité tout d’abord changer le comportement et l’état d’esprit de ses collaborateurs.163 La Direction Générale s'était en effet rendue compte qu'il existait un écart assez important entre la volonté stratégique affichée de placer le client au coeur de l'entreprise et le comportement des collaborateurs (non motivés, passifs, attendant les ordres des managers). La démarche d'innovation participative visait donc avant tout à coordonner un certain nombre d'initiatives pour modifier le comportement des collaborateurs vis à vis des clients, en faisant remonter les bonnes pratiques et en favorisant l'échange et le partage via un site Intranet, avec l’objectif d'instituer l'attitude suivante : des collaborateurs disponibles, attentionnés et fiables envers les clients. 163 Entretien avec Mr. FRIZZON DELAMOTHE E, Directeur Communication, AXA France, Février 2009 100 Depuis mi-2007, AXA a mis en place un réel dispositif d'innovation participative en lançant « Inov AXA » qui permet à l'ensemble des collaborateurs de lancer des idées de manière spontanée ou provoquée via des défis. Les défis lancés visent principalement : - à mettre l'entreprise encore plus en relation avec ses clients - à permettre aux collaborateurs de prendre conscience des grandes problématiques actuelles - à les responsabiliser en leur procurant un réel rôle dans l'amélioration de l'ensemble de la relation client. L’innovation participative vient donc réellement relayer la stratégie de mettre le client au cœur de la relation. Le critère de succès pour MAAF semble donc résider dans le changement culturel qui s’impose au sein des équipes commerciales et marketing MAAF. 4.2.1.5 Le pilotage centré autour du client (outil 6) Il s’agira de prouver à l’ensemble de l’entreprise les bénéfices que représente une politique orientée client. Rappelons que les exemples d’entreprises citées dans la partie précédente démontrent qu’une politique orientée client est corrélée aux notions de rentabilité et de croissance. Cette relation est prouvée par la mise en œuvre et le pilotage d’un indicateur unique d’écoute active des clients. Actuellement, dans le secteur de l’assurance français, les commerciaux sont davantage des chasseurs que des éleveurs et « les réseaux sont insuffisamment motivés par une approche de relation client sur le long terme, leur système de rémunération ne prenant pas en compte la pérennité de la relation client qu’ils nouent avec les clients ». 164 Un pilotage « durable » nécessiterait chez MAAF Assurances, d’intégrer, outre les ventes quantitatives, des indicateurs plus sensibles, comme les remontées issues de l’écoute active des clients. Il impliquerait également qu’il y ait une cohérence totale entre l’orientation stratégique client (découvertes des besoins clients, temps passé avec eux) et les objectifs commerciaux fixés. 4.2.2 Les outils de positionnement 4.2.2.1 Offrir des offres et services à valeur ajoutée (outil 5) Avant de définir ce que pourrait être des offres et des services de qualité pour un assureur, revenons à la mission et aux fondamentaux de l’assurance. Selon la pyramide des besoins de Maslow165, après la satisfaction des besoins physiologiques (respirer, boire, manger, procréer…) vient la satisfaction des besoins de 164 PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance 165 BERTRAND V. « Le rôle du formateur ».Cours ENASS Master 2, Avril 2009 101 sécurité consistant pour les individus à se protéger contre les différents dangers qui les menacent : il s’agit donc d’un besoin de conservation d’un existant, d’un acquis. Les besoins de sécurité recouvrent le besoin d'un abri (logement, maison), la sécurité des revenus et des ressources, la sécurité physique contre la violence (délinquance, agressions, etc.), la sécurité d’être en bonne santé, la sécurité morale et psychologique... C’est donc parce que les individus créent quelque chose qu’ils ont besoin de le protéger, de protéger leurs proches, leurs biens, et leur argent, maintenant et dans le temps. « L’assurance intervient donc à la base des besoins essentiels des hommes et ne peut pas être dissociée de l’affectif et de l’amour ». 166 L’assureur a donc un rôle social d’accompagnement des individus dans leur besoin de sécurité ainsi qu’un rôle de protection de l’économie pour éviter les ruptures. Son savoir faire consiste à identifier, analyser puis transférer des risques en les mutualisant, c'est-àdire à faire des propositions pour qu’en cas de dommage quelque qu’il soit, il y ait des réponses assurantielles. Mais aujourd’hui, « les assureurs gagnent plus à gérer leurs placements financiers qu’à proposer de nouvelles protections dans un monde où les besoins sont en constante évolution 167». Ils se trouvent dans une sorte de « confort » qui ne les pousse pas à innover structurellement, et de fait, la proposition de valeur est insuffisante par rapport aux nouveaux risques et aux nouveaux besoins. « Les clients achètent donc actuellement des produits assurantiels qui n’offrent que des solutions partielles à leurs besoins »168. En effet, l’industrie de l’assurance propose encore trop souvent des solutions « techniques » et parcellaires. Or face aux nouveaux usages, les assureurs vont être contraints de reconsidérer leurs offres et de penser « services » au-delà des produits. « Et de marchands de biens, les entreprises vont devenir des marchands de liens »,169 ce qui va nécessiter que les offres soient repensées et redéfinies en apportant des réponses globales transversales, sans tenir compte des frontières fixées. - Ainsi, la santé va devenir un thème majeur et transverse. Le rôle de l’assureur consistera à accompagner les clients pour mieux vivre en bonne santé, en leur donnant des informations, des aides à la décision, des conseils, de la prévention. MAAF s’est particulièrement illustrée sur ce point. Depuis fin 2008, elle propose à ses clients un système d’analyse de devis qui pointe les dépassements d’honoraires pratiqués ainsi qu’un palmarès des hôpitaux. Cet outil d’un genre nouveau peut réellement aider les consommateurs de soin d’une part à maîtriser leurs dépenses et d’autre part à les orienter vers des établissements de qualité. - En matière de transports, les assureurs vont devoir passer d’un modèle économique consistant à vendre des contrats d’assurance, à un autre modèle répondant aux besoins de mobilité. Nous pouvons imaginer que les nouveaux usages de l’automobile vont en effet partiellement et progressivement dénuer de son sens l’assurance automobile telle que conçue actuellement. Les clients conduiront en automobile partagée, en covoiturage sans être forcément propriétaire de véhicule. Les voitures seront en libre service. 166 Entretien avec Mr PELTZER G, Professeur à l’ENASS, Avril 2009 Idem 168 Entretien avec Mr REVEST M, Directeur Innovation COVEA, Février 2009 169 Cercle du marketing prédictif Guillaume Buffet de CRM Company Group 167 102 - L’assurance multi-risques habitation ne se contentera plus d’assurer l’habitat et les biens des ménages ni d’indemniser en cas de sinistres mais devra couvrir un spectre beaucoup plus large de prestations. Ces services pourront aller de la recommandation des prestataires pour les travaux, de l’assurance qualité de la prestation, à des garanties (bonne fin de travaux, fonctionnement des matériels installés), des conseils concernant l’aménagement et la décoration maison ou enfin à des services concernant l’énergie et le développement durable. « En d’autres termes, l’assureur devra aider les clients à améliorer leur bien-être ».170 - De même, la vieillesse et la volonté de vieillir chez soi devront amener les assureurs plus à élargir le spectre de leurs prestations. Des frais de santé, aux services à domicile en passant par le prise en charge de la dépendance, les assurés souhaiteront des solutions qui leur assure un financement de leur fin de vie, ainsi qu’une prise en charge effective plutôt que le versement d’une rente. Les assureurs devront également se positionner sur l’accompagnement des proches aidant leurs aînés en situation de dépendance, en leur fournissant soutien psychologique, aides diverses, et possibilité de prendre le relais pour que l’aidant familial fasse un break. Le rôle de créateur de liens de l’assureur dans ce cas là prend tout son sens. - Les services bancaires et financiers devront s’intégrer autour des projets de vie des clients et « être déclinés en fonction de ces besoins : financer sa dépendance, sa retraite, sa santé, l’avenir des siens, les coups durs de sa vie et celle de ses proches».171 Par ailleurs, ces produits autour de la retraite, de l’épargne et de la dépendance qui nécessitent une approche à moyen voire long terme pourraient constituer de réels produits fidélisants. - La responsabilité d’un assureur est également de répondre aux besoins de populations modestes ou défavorisées qui doivent faire des arbitrages permanents entre leurs dépenses d’éducation, de logement, d’alimentation et de déplacement, notamment en proposant des produits financiers comme la micro-assurance ou des produits de protection et de prévoyance. Loin d’être des menaces, ces évolutions représentent de nouvelles opportunités en terme d’offre et de proposition de valeur faites aux clients. MAAF, comme n’importe quel assureur, doit donc absolument réussir le virage produits / garanties pour offrir des formes de solutions globales à ses clients, faute de quoi d’autres opérateurs pourraient se positionner sur ce créneau, en laissant le secteur de l’assurance totalement dévalorisé et sans grande valeur ajoutée aux yeux des consommateurs. La traduction immédiate en terme de communication de ce nouveau positionnement semble évidente : plutôt que de parler de leurs produits, les assureurs devront parler de ce qui intéresse les consommateurs, sur un mode relationnel et en introduisant de l’affect. 170 171 Entretien avec Mr REVEST M, Directeur Innovation COVEA, Février 2009 Idem 103 4.2.2.2 Restaurer la confiance (outil 10) · En défendant les intérêts des clients Pour restaurer la confiance, les assureurs sont appelés à entretenir une relation sincère avec leurs clients. Surtout dans un contexte où l’incertitude et la sécurisation de l’avenir sont deux préoccupations essentielles, les consommateurs ont besoin de partenaires en qui avoir confiance pour piloter l’incertitude et valoriser l’accompagnement et le changement. Mais avant de voir sur quoi les assureurs peuvent se positionner lorsque l’on évoque la confiance, il est intéressant de constater que la confiance des individus repose aujourd’hui plus sur des critères « instinctifs » que sur des conditions rationnelles. Le graphique ci-dessous (Figure 27) est très révélateur de cette tendance. Figure 27 : Les raisons les plus importantes pour faire confiance. Source Sociovision 2008 Les consommateurs désirent un « contrat rempli d’avance », c'est-à-dire qu’ils veulent « être sûr que l’entreprise choisie sera toujours là en cas de problème » c'est-à-dire que l’entreprise en question soit fiable (d’ailleurs, cet item revient en troisième position). Un client n’achète donc plus seulement les produits d’une entreprise, plus important que cela, il achète une relation avec l’entreprise dans laquelle il a confiance pour le représenter si un problème survient. Le second critère entrant en considération est que le client veut être sûr qu’il compte vraiment pour l’entreprise. Ceci rejoint les notions de reconnaissance du client, sa volonté d’être considéré, reconnu et valorisé. Enfin, notons que la notion de confiance n’est plus associée à la maîtrise « technique » d’un domaine (cet item arrive en dernière position), or l’assurance est encore très tournée vers cette notion d’expertise technique. « Etre là en cas de problème », c’est le fondement même du métier d’un assureur. Nous l’avons vu précédemment, la mission de l’assurance est la protection et l’accompagnement du client dans la prise de risque et la gestion des incertitudes, la sécurisation du présent et de l’avenir 104 Il convient donc de repositionner l’assureur dans son rôle sociétal. Rappelons que son rôle est de gérer les risques, c'est-à-dire de provisionner sur le moyen terme pour couvrir les dommages qui risquent de survenir. Pour cela, l’assureur a besoin de savoir comment vont vivre les citoyens, les générations futures, quels sont les changements et les évolutions dans les manières de penser, quels risques pèsent et vont peser sur la société. Son rôle consiste également à réduire les facteurs de risque qui pèsent sur les sociétés. « A ce titre, l’assureur, en tant qu’acteur responsable de la cité est en droit d’agir, d’exercer une influence sur les comportements et sur les facteurs exogènes pour couvrir les dégâts de la modernité, et non pas seulement sur les causes immédiates »172. Si nous prenons le domaine de la santé, chacun sait qu’il existe une forte corrélation entre hygiène de vie, obésité et santé. Quel est le rôle des assureurs dans la prévention, dans la lutte contre la « mal-bouffe » ? Quel est leur rôle dans l’aide des clients concernant les dépassements d’honoraires de manière excessive par la profession médicale ? Or aujourd’hui, le secteur de l’assurance apparaît comme « déconnecté » de la réalité de la vraie vie, dominé par des statistiques et des actuaires à la recherche du « bon risque ». En tant que « financiers », la plupart des acteurs axent leur communication sur le prix or la dérive sur le prix n’est pas la seule réponse. C’est donc il me semble, sur le terrain de la défense des intérêts des clients que MAAF Assurances doit se placer, en s’engageant aux côtés de ses clients et en les aidant en cas de problème ; et en participant activement aux enjeux sociétaux de notre temps. · En apportant de la proximité dans une relation multi canale Construire la confiance doit également s’établir à travers l’expérience client intégrée dans un processus multi canal. L’assurance est un secteur où les expériences personnelles sont très importantes et où la relation en face à face dans le processus d’achat final est primordiale. Pour autant, les clients utilisent de plus en plus de multicanal. La question se pose donc du traitement des clients à distance tout en faisant en sorte de ne pas « finir avec des clients distants ». En parallèle, il convient également pour l’entreprise de repenser le parcours client pour plus d’efficacité afin de ne pas sédimenter ses coûts. Dans une optique de multicanal relationnel, la valeur ajoutée des canaux physiques est de construire avec les clients une relation dite durable, dans le temps. Pour schématiser, si avant les réseaux commerciaux faisaient de la « transformation » de contrats, ils doivent maintenant créer une « relation ». Créer une relation de confiance signifiant personnaliser la relation, développer la valeur des clients et être force de proposition en matière de conseils et services dans le temps. Si les réseaux physiques ne réussissent pas cette mutation, quelle sera leur valeur ajoutée face aux canaux à distance ? Cela rejoint ce qui a été dit précédemment concernant le nécessaire changement culturel qui doit s’opérer pour que les réseaux de vente soient plus dans une logique de collecte d’information concernant les clients afin d’effectuer une réelle découverte de leurs besoins. 172 Entretien avec Mr PELTZER G, Professeur à l’ENASS, Avril 2009 105 Parallèlement, les réseaux physiques doivent également se réorienter et être partie prenante dans la relation à distance. Pour endiguer la baisse des flux en agence, pourquoi ne pas faire gérer aux points de contacts physiques une partie des appels et des emails reçus ? Par ailleurs, si l’assurance est avant tout synonyme de proximité, pourquoi ne pas donner de la visibilité aux points de ventes sur Internet ? Cela permettrait de personnaliser la relation, de créer des liens d’ordre plus affectif entre les prospects / clients et les agences MAAF pour générer de la confiance. Des initiatives de ce type commencent à exister en France. Citons par exemple un agent général AXA qui détient trois agences en Bretagne et qui a crée un site Internet avec une présentation des équipes, une présentation des clients qui font confiance à AXA et un espace où les clients peuvent donner leurs avis (annexe 11 : agents Axa sur Internet). Sur cette page d’accueil figurent des mots qui peuvent être qualifiés de structurants pour instaurer une relation durable : confiance, univers de privilèges (reliant au Club Distinction AXA), proximité, services de qualité et compétitivité. 4.2.2.3 S’engager sur la transparence (outil 11) Cette notion de transparence peut recouvrir plusieurs acceptions pour une compagnie d’assurance. · Les territoires du positionnement, de l’engagement et de la preuve Rappelons que l’assurance est un domaine qui semble assez nébuleux et qui souffre d’un défaut d’image et d’un manque de transparence, notamment pour la raison suivante : il est considéré comme « complexe » (seulement 28 % estiment que le secteur est “simple”). 173 Ainsi, l’enjeu de la transparence est de taille pour la profession toute entière. Qu’est ce que signifie être transparent dans le monde de l’assurance ? Tout d’abord définir une promesse conforme à l’expérience vécue et avoir un positionnement et un discours clair et différenciant avec un réel engagement. Il s’agit également de retravailler sur des fondamentaux en se positionnant sur le territoire de la preuve, et non pas seulement sur celui de la promesse. Ainsi, la réelle promesse à mon sens, c’est la promesse de faire des choix audacieux et surprenants qui soient bons pour les clients. C’est une forte défense des sociétaires, un engagement citoyen, une conviction par lesquels une compagnie d’assurance ose entreprendre et se différencier. D’autant plus que, nous avons vu dans la première partie de ce mémoire, les consommateurs sont actuellement à la recherche de sens, d’éthique et de valeur. Quelle est la cause sociétale que défend MAAF ? Je ne répondrai pas ici à cette question, mais la question est posée. Il semble qu’avec la crise actuelle, les valeurs humaines (et notamment la solidarité) sont des ressorts très actifs en terme de 173 www.ffsa.fr 106 communication et que les représentants de l’économie sociale, dont les mutuelles, sont légitimes pour se positionner sur ce créneau. Notons par ailleurs que la dimension après vente dans l’assurance, c'est-à-dire la gestion des sinistres, est très importante. Etre transparent pour un assureur, c’est donc être cohérent entre l’acte d’achat et l’après vente, afin que le client sache très clairement ce qui va se passer, et qu’il n’y ait aucun écart entre les deux périodes, qui parfois peuvent être très longues. Il convient donc de partir du principe que les clients ne connaîtront jamais le détail de leurs garanties au moment du sinistre et qu’un assureur doit s’efforcer d’éviter au maximum les exclusions, source de réclamation et d’insatisfaction. Par ailleurs, pour mieux gérer les sinistres, l’utilisation des nouvelles technologies est un plus dans la relation client. De manière très simple, MAAF envoie un SMS au client pour l’avertir que son sinistre est bien reçu et va être traité : cela tranquillise le client qui sait qu’il est pris en charge et également évite des appels téléphoniques coûteux. Le groupe COVEA également a mis en place un outil très intéressant « Coventéo » qui change la relation client. Il permet au groupe COVEA, donc à MAAF Assurances, lorsqu’il y a une catastrophe naturelle (tempête, inondation) d’anticiper et de savoir avant le sinistre quels sont ses clients en portefeuille qui vont être potentiellement touchés. L’assureur peut donc prévenir les clients avant que le sinistre n’arrive, leur permettre de faire leur déclaration rapidement, et surtout de missionner un expert au plus tôt. · La remontée d’informations et d’idées des clients Nous pouvons penser que tout ce qui favorise la remontée d’information des clients, comme les blogs, les communautés, le web 2.0 va devenir le modèle correspondant au futur de la relation client. Parallèlement, « l’autorité devient suspicieuse, et les marques symbolisent cette autorité et génèrent de la suspicion ».174 Face à ce constat, il convient, pour MAAF Assurances de revenir aux fondamentaux d’une société de services, c'est-à-dire se positionner en tant que facilitateur. Effectivement, les clients parlent et échangent entre eux, c’est un fait et surtout une tendance inexorable. Ainsi, à l’instar de l’assureur Progressive aux Etats-Unis (annexe 7), pourquoi ne pas les inviter à partager leurs expériences sur le site de MAAF Assurances ? Pourquoi ne pas les laisser exprimer à leurs pairs ce qu’ils ont pensé de leurs expériences liées à leurs sinistres ? Ce qu’ils pensent des services proposés ? Si MAAF est « la référence qualité prix » sur le marché de l’assurance, qu’at-elle a craindre d’une telle transparence ? Se poser en facilitateur pourrait également signifier aider le client à résilier ses contrats lorsqu’il le souhaite. De la part d’une entreprise d’assurance, c’est un positionnement réellement surprenant, mais rappelons que la fidélité doit s’obtenir par adhésion et conviction, et non pas par une relation contrainte. Par ailleurs, les clients qui souhaitent résilier pourraient être dirigés vers une cellule de rétention dont l’objectif serait de comprendre les insatisfactions des clients et tenter de le persuader de rester. 174 Entretien avec NORMAND G, Directeur Marketing Stratégique MAAF Assurances, Décembre 2008 107 4.2.3 Les outils opérationnels de mise en oeuvre 4.2.3.1 La mise en place d’un programme de fidélisation (outil 1) « Bien plus qu’une affaire d’outils, de programmes ou de techniques, la fidélisation est surtout un état d’esprit de l’ensemble des collaborateurs pour que le sociétaire trouve dans la mutuelle un supplément d’âme qui lui donne l’envie de rester le plus longtemps possible. »175 Une politique de fidélisation n’a en effet de pertinence que si elle vient compléter une prestation de base irréprochable. Les fondamentaux de l’entreprise (traitement client, respect des engagements et promesses) doivent être solides sinon de telles actions sont contre productives. Un programme de fidélisation vise à répondre à la question suivante : comment rendre le départ douloureux pour le client ? La réponse est simple : en mettant en place un certain nombre d’avantages acquis qu’il ne retrouvera pas forcément ailleurs. Ainsi, un programme de reconnaissance permettrait de donner du sens et de la valeur à la relation entre clients et assureurs. Toutes les études qualitatives soulignent en effet que les clients attendent de la reconnaissance de la part de leur assureur, surtout lorsqu’ils sont des clients fidèles. Or aujourd’hui, il n’existe chez la plupart des assureurs aucun programme de fidélisation consistant à établir une relation de confiance avec les clients. Apicil est un des rares assureurs, avec Linéavie, a avoir mis en place en 2007 un tel programme : le but est de récompenser la fidélité, mais aussi stabiliser la consommation médicale en encourageant un comportement vertueux ou responsable. 95% des clients ont souscrit, mais le programme est assez lourd à gérer.176 La mise en place d’un programme de fidélisation aurait donc tout son sens chez les assureurs, et en particulier chez MAAF. Il permettrait de faire bénéficier à une fraction de clients (anciens, bien équipés, ambassadeurs, ...) d’avantages personnalisés spécifiques octroyés par un programme de reconnaissance. Pour permettre une forte valeur perçue, ces avantages devront dépendre de la situation précise du client, et notamment : - de la présence d’un sinistre - des événements de cycle de vie (mise en couple, naissance, séparation, retraite, cycle de vie des enfants, départ du foyer des enfants, préparation de la retraite, retraite et fin de vie). - des critères de volatilité du client - de leur rentabilité - des produits détenus Ceci reviendrait donc à développer une liste d’avantages et de services présentée de manière spécifique et individualisée en lien avec un événement client qui permettrait, outre le fait de créer de la surprise, de matérialiser la relation par des conseils et des services au quotidien. 175 Témoignage de Christian Ruetsch, ancien Directeur Marchés et Produits, MACIF, in PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance 176 La Tribune de l’Assurance, Comment converser ses clients face à la concurrence, N° 134, Mars 2009 108 MAAF est actuellement entrain de réfléchir à l’octroi d’avantages et de services à ses clients en fonction de leur fidélité. 4.2.3.2 Les supports : carte de fidélité et clubs (outil 2) · Les cartes de fidélité Très peu de programmes de fidélisation par point existe dans le monde de l’assurance et « les rares programmes mis en place n’ont rencontré jusque là qu’un faible succès dans la mesure où l’effet sur les portefeuilles n’a pas été démontré (seulement 2% des clients AGF utilisent la carte au moins une fois par an) ».177 Par ailleurs, un programme de ce type consomme de 1 à 2% des primes. Aujourd’hui, la carte de fidélité s’est banalisée : elle ne constitue plus un axe différenciant pour les clients qui sont sollicités de toutes parts et ont de nombreuses cartes de fidélité. Pour un assureur, se lancer dans une telle démarche pourrait provoquer une lassitude, voire même un rejet de la part des consommateurs. Par ailleurs, qui dit carte de fidélisation dit généralement secteur de la grande consommation, caractérisé par une fréquence et récurrence dans l’acte d’achat, ce qui est loin d’être le cas dans l’assurance. En 2002, MAAF Assurances avait envisagé intégrer le programme « Mouvango » en partenariat avec Total et Accor. Mouvango se caractérise par un système de valorisation par points (acquisition des points lors d’achat chez MAAF Assurances et chez des partenaires) permettant aux clients d’obtenir des cadeaux dans deux univers : cadeaux d’origine MAAF Assurances (exemple : assurance scolaire ou capital décès accident pour X point,) et cadeaux partenaires. Mais cette proposition a été écartée. Les études qualitatives ont montré que les clients n’étaient pas séduits par ce genre de programme de récompense à points, qui ne semblait pas en adéquation avec l’image MAAF. Un tel programme semble plus en cohérence avec le secteur marchand de la grande distribution. Par ailleurs, le fait de s’associer avec d’autres partenaires comme Total ou Accor a été considéré par les clients comme un moyen d’échanger des fichiers dans le but de drainer des clients nouveaux, et comme un système contraignant poussant à la consommation. L’image de MAAF s’était retrouvée inversée après présentation du programme. Ainsi, il semble donc que la mise en place d’une carte de fidélité ou d’un programme à point sous cette forme soit à exclure. Pour autant, d’autres idées plus en lien avec l’image d’un assureur pourraient être envisagées comme par exemple une carte de fidélité avec des droits acquis. Cette carte pourrait donner droit par exemple à des tarifs avantageux sur des contrats futurs, des crédits à taux bonifiés, des services. 177 PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance 109 · Le club AXA est le seul assureur Français à en avoir créer un : le Club « Distinction » lancé en septembre 2007. «AXA France a choisi de reconnaître et récompenser ses excellents clients par des services différenciés et d’inciter ses bons clients à devenir excellents par la souscription de nouveaux produits » note Sylvie Savall, Directrice du développement réseau agents généraux chez AXA France.178 Réductions, offres exclusives, et cadeaux sont distribués aux clients et revus régulièrement pour créer de la nouveauté. La cible est les très bons clients détenteurs de quatre contrats ou possédant un encours significatif en épargne, et les bons clients détenteurs de trois catégories de produits. Ils bénéficient de privilèges divers comme par exemple un service clé perdue, la franchise offerte en auto et MRH en cas de sinistre… Le Club offre également des avantages négociés avec des partenaires permettant de profiter d’avantages tarifaires significatifs (exemple : 5% de réduction sur l’ensemble des coffrets SmartBox). L’année dernière, l’assureur a conquis 40 000 nouveaux clients « distinction ». Concernant MAAF Assurances, il ne me semble pas utile, au moins dans un premier temps, de « matérialiser » par la création d’un club les avantages attribués aux clients les plus méritants. En effet, si MAAF opte pour la mise en place d’un programme de reconnaissance à destination de ses clients, les clients les plus « fidèles » ou ceux qui auront le plus « de valeur » seront forcément plus récompensés. 4.2.3.3 La co-conception avec les clients (outil 12) Avec la crise, en un an, toutes les sphères ont explosé. Les assureurs, pas plus que les clients, ne savent réellement de quoi ils auront besoin pour préparer leur futur. Il s’agit donc, et cela revient au processus d’écoute active décrit précédemment, de solliciter la parole des clients, de leur demander de quoi ils rêvent, d’inventer avec eux les solutions de demain et de leur donner la possibilité d’orienter les choix de l’entreprise. La co-construction permettrait également d’enlever la distance et de la défiance qui séparent les assureurs de leurs clients et de créer de l’empathie autour de MAAF. Par ailleurs, avec le web 2.0, la co-construction devient à la portée de toutes entreprises. Certains assureurs pratiquent déjà la co-conception, c’est notamment le cas de la GMF avec son « laboratoire Vie ». MAAF Assurances envisage également de tester ce concept d’un laboratoire client sur ses offres d’assurance. 4.2.3.4 L’insertion des assureurs dans un réseau de partenariats (outil 13) Les assureurs se plaignent souvent de ne pas avoir de relation au quotidien avec leurs clients. Ils regrettent que les rares moments de contact avec le client, une fois la souscription réalisée, soient ceux du règlement des cotisations voire éventuellement 178 La Tribune de l’Assurance, Comment converser ses clients face à la concurrence, N° 134, Mars 2009 110 d’un sinistre, moment que les assurés redoutent, bien évidement. Mais qu’est-ce qui empêche les assureurs d’établir avec leurs clients des relations avec plus de sens ? En proposant de réelles offres à leurs clients, non plus juxtaposées les unes aux autres ni seulement composées de garanties d’assurance uniquement, mais intégrées et comprenant des services de nature assurantielle ou non, les assureurs auront la possibilité de donner beaucoup plus de substance à leurs offres et à leur relation avec leurs clients. Actuellement, le modèle sur lequel repose les assureurs est relativement simple. Pour schématiser, lorsque un client a un sinistre, l’assureur l’assiste dans un premier temps pour répondre à l’urgence de sa situation, puis l’indemnise financièrement. Or la plupart des experts pensent que « l’offre assurantielle va s’inscrire dans une logique d’enrichissement par les services ». 179 Ainsi le fait de repenser le cadre des contrats et de proposer des prestations de service « clé en main » (qui l’emporteront probablement sur l’indemnisation) va nécessairement donner plus de corps à la relation que les assureurs entretiennent avec leurs assurés. Car c’est probablement en « soignant le service », plutôt qu'en se battant sur les prix, que les assureurs gagneront des parts de marché. Cette évolution des offres va amener les assureurs à s’insérer dans un réseau de partenaires / prestataires pour fournir l’ensemble de ces prestations à leurs clients. Le fait de s’intégrer dans un réseau de partenaires pourrait permettre à MAAF de se positionner en tant qu’assureur « partenaire de la vie des clients »180, en leur proposant une présence à leurs côtés chaque fois que c’est nécessaire, en les aidant tout au long de leur vie avec offres prenant en compte la réalité de leurs besoins. C’est ce qui permettra à mon sens, de maintenir la légitimité d’une offre d’assurance sur le long terme face à la diffusion de produits d’assurance banalisé. Dans les métiers de service, le « one size fits all » (la même taille pour tout le monde) est révolu181. Si auparavant, la première des fidélisations pour une mutuelle sans intermédiaire était d’avoir des produits de masse, est-ce que ce positionnement est toujours tenable ? Par sa publicité, MAAF Assurances s’est positionné sur le rationnel et « efficace et pas cher ». Cette stratégie de masse sur des produits dommages est totalement pertinente. Pour autant, elle n’est pas incompatible me semble t’il avec le développement d’une stratégie plus ciblée pour établir une relation durable avec ses clients. S’il est vrai que les clients sont devenus « obsédés » par le prix, certains sont tout de même prêts à payer plus cher pour un vrai service. Et vendre moins cher sera de moins en moins la solution dans nos économies. 179 http://www.cerclelab.com Entretien avec Mr REVEST M, Directeur Innovation COVEA, Février 2009 181 HABABOU R. (2007), « Service gagnant, les secrets des entreprises qui créent la différence », Ralph Edition First. 180 111 MAAF doit donc donner aux clients l’envie d’acheter, en proposant des produits qui aient du sens et qui apportent des solutions globales, en partenariat et en construisant les solutions avec eux. 112 Conclusion Partant du constat que perdre un client est préjudiciable -d’autant plus que sa conquête est coûteuse- les entreprises comprennent de plus en plus l’enjeu de construire des relations stables et durables afin de fidéliser leurs clients. Chaque entreprise a en effet besoin de récurrence et de prévisibilité dans son chiffre d’affaires, notamment aujourd’hui, avec des clients devenus experts dans bien des domaines et de plus en plus exigeants. Dans ce contexte, bien plus qu’une mode ou une technique promotionnelle, « la fidélisation est l’objectif indispensable de toute stratégie de relation client, même si le concept est encore trop souvent associé à des programmes promotionnels aux effets douteux ».182 Effectivement, nous avons vu que la fidélisation, si elle a longtemps été considérée comme un moyen, devient peu à peu une finalité, la condition permettant aux entreprises d’établir une relation durable avec leurs clients, en leur procurant une expérience remarquable et en défendant leurs intérêts. Retenons cependant que la fidélisation est encore la plupart du temps envisagée sous l’angle des entreprises. Mais ne pourrait-on pas inverser ce postulat et partir du principe qu’avant de souhaiter des clients fidèles, l’entreprise doit elle-même être fidèle à ses clients, c’est à dire créer de l’étonnement positif et aller au-delà de leurs espérances pour faire en sorte qu’ils n’aient pas besoin de se poser la question de savoir pourquoi ils sont attachés à l’entreprise. Pour une entreprise d’assurance comme MAAF, il s’agira par exemple de contacter les clients suite à sinistre pour savoir si tout s’est bien passer, de se remémorer régulièrement à leur bon souvenir pour échanger avec eux, de pratiquer l’écoute active…. C’est par ces attentions là, en allant au-delà de la promesse de base et en se positionnant sur le territoire de la preuve, que les assureurs réussiront à construire une histoire basée sur relation de confiance. D’autant plus que la fidélité en soi devient de nos jours un concept inadapté lorsque les clients n’ont pas de lien fort avec les marques, comme c’est le cas en assurance par exemple, contrairement à d’autres secteurs, comme l’industrie du luxe ou l’automobile. A l’inverse, les notions d’expériences, de relation et d’émotion deviennent le centre de gravité, c’est pourquoi il semble indispensable de ne pas dissocier l’assurance de l’affect qu’il contient, c'est-à-dire des notions de la protection, de solidarité. Rappelons également que les conditions de la réussite pour construire une relation de confiance sont multiples et de plusieurs ordres. Il ne faut pas négliger les changements culturels et organisationnels en interne qui doivent se produire pour placer la connaissance client au centre de l’entreprise et réaffirmer qu’elle est l’affaire de tous. Il est donc nécessaire de faire de la relation client tant une stratégie globale et transverse qu’un élément essentiel partagé par tous au quotidien. L’implication de la Direction doit être forte et le projet centré sur les hommes, et non seulement sur les outils. Enfin, au-delà d’une simple évolution concernant le positionnement de la relation client dans le temps (de la fidélisation à la loyauté), nous pouvons également constater un changement dans la nature même de cette relation. L’entreprise fait maintenant partie d’un écosystème. Elle ne peut donc plus réfléchir à sa relation client de manière unilatérale voire bilatérale, mais intégrer cette réflexion dans un système global de 182 Article Les Echos, 14/03/2001 113 réseau comprenant les clients, les partenaires et les différents moyens de contact entre tous ces individus. Aujourd’hui, la logique de producteurs / distributeurs évolue, de plus en plus d’intermédiaires se positionnent sur le marché et c’est dans cet ensemble que devront être repensées les relations clients de demain. 114 Bibliographie Ouvrages : - AC NIELSEN (2003), « Quelles sont les attentes des consommateurs en matière de fidélisation ? » - BENAVENT C. (1995), « Gérer le portefeuille clients : une application au Bénélux », Décisions marketing, 15, janvier-avril, p. 10-20. - BROWN S. (2006), « Customer Relationship Management, La gestion de la relation client », Pearson Education - DE VULPIAN A. (2004), « A l’écoute des gens ordinaires, comment ils transforment le monde », Dunod - DUPUY F (2004). « Sociologie du changement, Pourquoi et comment changer les organisations ? », Edition Dunod - HABABOU R. (2007), « Service gagnant, les secrets des entreprises qui créent la différence », Ralph Edition First. - KOTLER P, DUBOIS B et D. MANCEAU (2004), Marketing management, 12ème édition, Pearson Education - LEFEBURE G. et VENTURI R (2000), « Gestion de la Relation Client, Panorama des produits et conduite de projets », Edition Eyrolles. - MAFFESOLI M. (2007), « Le ré enchantement du monde - Morales, éthiques, déontologies », Paris, Ed. Table Ronde - MAUSS M. (1924) « Essai sur le don : forme et raison d’échange dans les sociétés archaïques ». l’année Sociologique, Réédition dans MAUSS M. ; Sociologie et Anthropologie, PUF, Coll Quadrige, 2001, Paris - MEYER-WARDEN L. (2004), « La fidélisation client, stratégies, pratiques et efficacité des outils du marketing traditionnel », Vuibert - PARMENTIER C. (2005), « Le marketing performant de l’assurance », Edition L’argus de l’Assurance - PEELEN E. (2007), « Gestion de la relation client », Pearson Education - PEPPER D. et ROGERS M. (1997), « le One to One », Editions d’Organisation - REICHHELD, F. and SASSER, W. (1990), “Zero defects: quality comes to services”, Harvard Business Review, Sept-Oct, 1990. - REICHHELD F. F, (1999), “L’effet Loyauté : réussir en fidélisant ses clients, ses salariés et ses actionnaires”, Edition Dunod - RIGBY D. K., REICHHELD F.F. et SCHEFTER P., (2002) ‘Avoid the four perils of CRM’. Harvard Business Review, Février. - REICHHLELD F.F, et POINTEAU B. (2006), « La question décisive, recommanderiezvous notre entreprise à vos amis ? », Pearson Education - Technical Assistance Research Program (TARP), "Maximizing Customer Satisfaction and Directly Linking to the Bottom Line," June 1990 - « Fidélisation : halte à la banalisation des outils », LSA, 15 janvier 2004, p 58-59 - Morgan R et Hunt S. (1994), The commitment –Trust Theory of Relationship Marketing, Journal of Marketing, 58, 3, p.20-38 - URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. - WAYLAND R. AND COLE P. (1997), “Customer Connections: New Strategies for Growth”, Harvard Business School Press 115 Revues : - La Tribune de l’Assurance, Comment converser ses clients face à la concurrence, N° 134, Mars 2009 - Magazine Interne En Vue MAAF Assurances, Mars 2009 - Magazine ACTIMAG, « Imaginons la relation client de demain », magazine Groupe Acticall, 1er trimestre 2009 - L’Agefi Hebdo « Les Mutuelles d’assurance en perte de vitesse », 9 au 15 avril 2009 Publications / études: - BRUANT, J. 2002 « Les enjeux de la segmentation dans la relation client », HEC Ecole des Mines - CAPGEMINI CONSULTING ET L’ESSEC (2008), « La relation client différenciante » - CAPGEMINI (2008), World Insurance Report 2008 - CAPGEMINI CONSULTING (2005), « Fidélisation : récompense ou reconnaissance ? », Université Conseil - FFSA (2008), « L’assurance en France en 2007, les assurances de personnes » - TNS SOFRES (2008), Le Marketing Book - TNS SOFRES (2007), Baromètre des Assurances Auto et Habitation Interviews : - CHATIER-KASTLER (Cyrille), Président du Cabinet Facts and Figures, Mars 2009 - CHEVILLON (Dominique), Directeur MAAF Vie, Mars 2009 - FRIZON DE LAMOTTE (Emmanuel), Direction de la Communication, AXA France, février 2009 - FORTASSIN Pascal, Consultant Altran et Professeur GRC à l’ENASS, Avril 2009 - HAVOT (Hervé), Responsable Entité Client, MAAF Assurances, Janvier 2009 - NORMAND (Gilles), Directeur Marketing Stratégique MAAF Assurances, Décembre 2008 - PELTZER (Gustave), Consultant et Professeur à l’ENASS, Février et Avril 2009 - PIGELET (Laurent), Directeur Réseau Commercial Agences, MAAF Assurances, février 2009 - REBUFFE (Guy), Consultant OGC International, Janvier 2009 - REVEST (Michel), Direction Recherche et Innovations, Covéa R&D, Février 2009 - SENAC (Thierry), Directeur Marketing Opérationnel, MAAF Assurances, Février 2009 Données internes MAAF : - Département Marketing et veille concurrentielle - Département Internet - Magazine Interne (En Vues) Conférences / cours: - EFMA, La Relation Client Différenciante, Décembre 2008 - FORTASSIN P. « GRC et Conduite du changement, Comment mettre en oeuvre une GRC ? ».Cours ENASS Master 2, 20 janvier 2009 - BERTRAND V. « Le rôle du formateur ».Cours ENASS Master 2, Avril 2009 - OBSERVATOIRE SOCIOVISION (2008), Présentation à MAAF Assurances Décembre 2008 - REBUFFE G., (2009) Compte rendu Conférence Net Promoteur Score, USA, janvier 116 Sites Internet : - www.lcmp.fr/ (le Cercle du Marketing Prédictif) - www.cerclelab.com - www.ffsa.fr - www.gartner.com - www.planetfeddback.com - www.thecomplainstation.com - www.quechoisir.org - www.journaldunet.com/economie/face-a-face/cafe/relations-client-nespressosenseo.shtml - www.kbb.com/ - www.cartalk.com/ - http://mdi.typepad.com/blog/2004/11/herb_kelleher_u.html - www.linternaute.com/dictionnaire/fr/definition/mutualisme/ - www.cluetrain.com/manifeste.html - www.pampers.com 117 Annexe 1 : Les politiques de la relation client 118 Annexe 2 : Enquête TNS SOFRES, Baromètre des assurances Auto et Habitation, Bilan de l’année 2007 Méthodologie employée : - Interrogation annuelle de METASCOPE, base de sondage permanente de TNS SOFRES 20.000 foyers - Échantillon représentatif de la population des ménages Français - Redressement sur enquête emploi INSEE avec poids spécifique des fonctionnaires - Questionnaire auto-administré de 4 pages sur l’Auto et l’Habitation - Questionnaire adressé à la personne en charge des assurances dans le foyer - Questionnaires administrés au cours du mois de décembre 2007 - Taux de retour : 60 % (vs. 56% en 2006) 119 Annexe 3 : L’image de l'assurance en 2008, Baromètre OpinionWay pour la FFSA l'assurance Depuis 2005, l’institut OpinionWay réalise à la demande de la FFSA une étude sur l’image de l’assurance auprès du grand public. L’objectif de cette enquête est d’évaluer les points forts et les points faibles de l’image de l’assurance, d’étudier la relation qu’entretiennent les Français avec les acteurs de la profession, de recueillir leurs griefs et attentes. Méthodologie de l’étude : - Étude réalisée auprès d’un échantillon de 1018 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. - L’échantillon a été constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d’âge, de catégorie socioprofessionnelle et de région de résidence. - Mode d’interrogation: L’échantillon a été interrogé en ligne sur système Cati (Computer Assisted Telephone Interview). - Dates de terrain: les interviews ont été réalisées du 27 mai au 3 juin 2008. 120 Annexe 4 : Les principes d’un CMR idéal Principes One to one marketing Publicité Programme de loyauté Partenariat de distribution Information complète et non biaisée Marketing permissif (permission marketing) Caractéristique Traitement individuel des clients : chaque client est traité différemment Communication de masse customisée La marque est considérée comme une marque de confiance. La marque intègre toutes les perceptions client concernant l’entreprise Récompense d’une relation durable. Basée sur de réels bénéfices pour les clients Distribution basée sur la confiance Maintenir de la cohérence à travers l’expérience client. Recommandations transparentes Opt-in système, communication sur mesure, communauté Une communauté sponsorisée par l’entreprise ou les clients peuvent donner leurs opinions, information et expériences avec leurs pairs. Conseils donnés par un call center, Des conseillers virtuels peuvent représenter un grand pas en avant vers une relation de confiance qui reflètera les intérêts des clients et les aidera à prendre la meilleure décision. Source : URBAN G. (2005), « Dont’ just relate ! advocate. A blueprint for profit in the era of customer power », Wharton Schoool Publishing. 121 Annexe 5 : Le chemin vertueux de la croissance Source : Capgemini 122 Annexe 6 : Site Internet Southwest Airlines Les promesses clients 123 Le blog de Southwest 124 Annexe 7 : Remontées clients sur le site de Progressive Slogan Progressive : “we make your satisfaction our policy” 125 126 Annexe 8 : Programme de fidélité Avantage LCL Un programme qui n'a que des avantages Pour qui ? Le programme est réservé aux clients de plus de 18 ans, sur proposition de leur conseiller. Comment gagner des points ? Grâce au barème permanent, vous gagnez des points en effectuant vos opérations bancaires courantes. Vos bonnes habitudes sont récompensées : chaque fois que vous retirez de l’argent dans l’un de nos 3000 distributeurs, vous gagnez 5 ou 10 points selon que vous utilisez une carte VISA Cléo ou une carte VISA Premier. En plus de ce barème de base, chaque semestre vous sont proposées des offres de gains de points assorties de bonus. Jusqu’au 30 septembre 2007 par exemple, pour toute première souscription d’une formule Zen (accompagnée d’une carte VISA Cléo, Premier ou Infinite), vous bénéficiez de 200 points Avantage. (Voir conditions en agence) Par ailleurs, d’autres propositions de gains de points vous seront faites régulièrement par courrier, sur vos relevés de compte ou sur notre site Internet. Barème permanent Barème valable à partir du 1er avril 2007 Montant(1) prélevé de votre compte dépôt pour augmenter votre épargne(2) entre 2 trimestres. Epargne (1) Dans la limite de 30 000 € par trimestre. (2)Y compris comptes à terme et assurances vie. Montant des capitaux extérieurs apportés sur votre mandat de gestion(1). Placements (1)Sous certaines conditions à voir avec votre conseiller patrimonial ou privé. Paiements par carte (*) Avec votre Visa Cléo Avec votre Visa Premier LCL Retraits mensuels Avec votre Visa Cléo par carte aux distributeurs LCL Avec votre Visa Premier LCL (*) Souscription d'un 1er contrat d'Assurance Auto, Assurances Habitation (MRH Standard ou Standing) ou Santé(1) (ACS Classique ou Senior) 100 € = 5 points 100 € = 5 points 100 € = 5 points 100 € = 10 points 100 € = 7 points 100 € = 14 points 300 points 127 (1) Points versés en une seule fois après le 1er prélèvement de la prime. Vos remboursements Prêt Personnel(1) et Prêt Immobilier(2) Crédits 100 € = (1)Souscrit après adhésion au programme, hors crédits 5 points in fine, et hors remboursements anticipés. (2) Souscrit avant le 31/12/2006 (*) Montant mensuels Offres promotionnelles De nouvelles propositions de gains de points vous sont faites régulièrement par courrier, sur vos relevés de compte, ou sur notre site http://www.LCL.fr. Les partenaires Le programme Avantage travaille avec 4 partenaires permanents : Accor, Air France, Fnac et le Centre Français de Protection de l’Enfance (CFPE), qui vous proposent des récompenses dans chaque Magazine. Les partenaires promotionnels, porteurs de noms prestigieux sont renouvelés régulièrement. Les cadeaux Tous les semestres, le Magazine Avantage vous présente de nouveaux cadeaux organisés selon une thématique liée à la saison et aux aspirations de nos clients. Pour plus de détails sur nos offres et pour découvrir nos nouveautés, n’hésitez pas à consulter régulièrement notre site Avantage http://avantage.lcl.fr/accueil/ Quelques exemples : 1 480 points A partir de 2 000 points 4 380 points Chèque-cadeau Fnac LCL de 20 € Air France : billet Aller-Retour moyen courrier(1) 60 € en chèques-cadeaux Accor LCL (1)Les taxes et les redevances aéroportuaires, à la charge du client, seront réglées par Carte Bleue VISA LCL à la réservation. Bon à savoir : LCL vous propose de transformer vos points gagnés en un don au CFPE (Centre Français de Protection de l'Enfance) qui vient en aide à plus de 12 000 enfants chaque année en France et dans le monde : prise en charge de frais de santé pour les enfants des pays en voie de développement, achat de jeux éducatifs, soutien scolaire… 128 Annexe 9 : Le Manifeste des évidences Le manifeste Les marchés en réseau commencent à s'organiser plus vite que les entreprises qui les fournissent. Grâce à Internet, ces marchés deviennent mieux informés, plus intelligents et exigent des qualités nouvelles qui font défaut à la plupart des entreprises. Les auteurs : Rick Levine, Christopher Locke, Doc Searls, and David Weinberger 95 thèses 1. Les marchés sont des conversations. 2. Les marchés sont constitués d'êtres humains, non de secteurs démographiques. 3. Les conversations entre humains sonnent de façon humaine. Elles sont menées sur un ton humain. 4. Que ce soit pour discuter d'information, d'opinions, de perspectives, d'arguments opposés ou humoristiques, la voix humaine est typiquement ouverte, normale, et naturelle. 5. Les gens se reconnaissent entre eux grâce au son même d'une telle voix. 6. L'Internet permet des conversations entre êtres humains qui étaient tout simplement impossibles à l'ère des masse-média. 7. Les hyperliens renversent la hiérarchie. 8. Au sein des marchés interconnectés, et des employés intraconnectés, les gens se parlent entre eux d'une puissante nouvelle façon. 9. Ces conversations en réseau permettent à de puissantes nouvelles formes d'organisation sociale et d'échange de connaissance, d'émerger. 10. Résultat, les marchés deviennent plus intelligents, plus informés, plus organisés. La participation à un marché en réseau change les gens fondamentalement. 11. Les personnes dans un marché en réseau ont compris qu'elles obtiennent des informations et une aide bien meilleures, les unes des autres que des vendeurs. Autant pour la rhétorique corporatiste pour ce qui est d'ajouter de la valeur à des produits de base. 12. Il n'y a pas de secrets. Les marchés connectés en savent plus que les entreprises sur leurs propres produits. Et que et que ce qu'ils découvrent soit bon ou mauvais, ils le répètent à tout le monde. 13. Ce qui se passe dans les marchés, se passe également parmi les employés. Une construction métaphysique dénommée "L'Entreprise" est la seule chose qui les sépare. 14. Les entreprises ne parlent pas la même langue que ces nouvelles conversations en réseau. Pour leurs audiences en ligne, les entreprises sonnent creuses, plates et littéralement inhumaines. 15. Dans quelques années à peine, l'actuelle voix homogène des affaires - le son des rapports de mission et des brochures - semblera aussi forcée et artificielle que le langage du 18ème siècle à la cour de France. 16. Déjà, les entreprises maniant boniment et charlatanisme, ne parlent plus à personne. 129 17. Les entreprises qui supposent que les marchés en ligne sont les mêmes marchés que ceux qui regardaient leur publicité à la télévision, se moquent d'ellesmêmes. 18. Les entreprises qui ne comprennent pas que leurs marchés sont désormais un réseau d'individus à individus, plus intelligents par conséquence et très impliqués dans un dialogue, passent à côté de leur meilleure chance. 19. Les sociétés peuvent désormais communiquer directement avec leur clientèle. Si elles passent à côté, cela pourrait être leur dernière chance. 20. Les entreprises doivent réaliser que les marchés rient beaucoup. D'elles. 21. Les entreprises devraient se détendre et se prendre un peu moins au sérieux. Elles ont besoin d'un sens de l'humour. 22. Avoir le sens de l'humour ne signifie pas mettre des blagues sur le site web institutionnel. A l'inverse, cela implique de grandes qualités, un peu d'humilité, du franc parler, et un véritable point de vue. 23. Les entreprises essayant de se positionner devraient avoir un positionnement. Dans l'idéal, il correspond à quelque chose qui intéresse vraiment leur clientèle. 24. Les fanfaronnades ampoulées du genre "nous sommes en position pour devenir le principal fournisseur de XYZ" ne constituent pas un positionnement. 25. Les entreprises doivent descendre de leur Tour d'Ivoire et parler avec les personnes avec lesquelles elles espèrent instaurer une relation. 26. Les relations publiques ne parlent pas au public. Les entreprises ont profondément peur de leurs clients. 27. En s'exprimant dans un langage qui est distant, peu attrayant, arrogant, elles bâtissent des murs pour maintenir à distance leurs clients. 28. La majorité des programmes marketing sont fondés sur la crainte que les clients puissent voir ce qui se passe réellement à l'intérieur de l'entreprise. 29. Elvis le dit le mieux : "Nous ne pourrons pas continuer avec un esprit soupçonneux". 30. La loyauté à une marque est la version entrepreneuriale de ne rien faire, mais la rupture est inévitable - et arrive vite. Parce qu'ils sont connectés, les marchés intelligents sont capables de réévaluer une relation en un clin d'oeil. 31. Les marchés en réseau peuvent changer de fournisseurs du jour au lendemain. Les employés informés en réseau peuvent changer d'employeurs en cours de déjeuner. Vos propres "réductions de personnel" nous ont appris à nous poser la question : "la loyauté ? c'est quoi déjà ?" 32. Les clients informés recherchent des fournisseurs qui parlent leur langage. 33. Apprendre à parler d'une voie humaine n'est pas un truc de parloir. Cela ne s'apprend pas au cours d'une quelconque conférence. 34. Pour parler d'une voie humaine, les entreprises doivent partager les centres d'intérêts de leurs communautés. 35. Mais avant tout, elles doivent appartenir à une communauté. 36. Les entreprises doivent se demander où s'arrête leur culture interne. 37. Si elle s'arrête avant que la communauté commence, elles n'auront aucun marché. 38. Les communautés humaines sont fondées sur le dialogue - sur des dialogues humains à propos de préoccupations humaines. 39. La communauté du dialogue est le marché. 40. Les entreprises qui n'appartiennent pas à une communauté du dialogue sont condamnées. 130 41. Les entreprises font un culte de la sécurité, mais c'est pour brouiller les pistes. La plupart se protège moins de leurs concurrents que de leur propre clientèle et de leur main d'oeuvre. 42. De même que dans les marchés en réseau, les personnes se parlent directement à l'intérieur de l'entreprise - et pas uniquement à propos des règles et régulations, des directives du conseil d'administration, et des résultats financiers. 43. Ces conversations ont lieu sur les intranets institutionnels aujourd'hui. Mais uniquement lorsque toutes les conditions sont réunies. 44. les entreprises mettent généralement en place des intranets du haut vers le bas, pour diffuser les règlements intérieurs et autres informations internes que les employés font de leur mieux pour ignorer. 45. les intranets ont naturellement tendance à devenir barbants. Les meilleurs sont construits de la base vers le haut, par des individus engagés, coopérant dans le but de construire quelque chose avec plus de valeur. 46. Un Intranet sain organise les travailleurs dans tous les sens du terme. Son effet est bien plus radical que le programme de n'importe quel syndicat. 47. Bien que cela terrifie les entreprises, elles ont également largement besoin d'intranets ouverts pour générer et partager des informations critiques. Elles doivent résister à l'envie d'améliorer ou de contrôler ces conversations en réseau. 48. Quand les intranets institutionnels ne sont pas bloqués par la peur et les règles juridiques, le type de conversation qu'ils favorisent, résonnent remarquablement comme les conversations des places de marché en réseau. 49. Les diagrammes organisationnels fonctionnaient dans une ancienne économie, où les plans pouvaient être totalement compris au plus haut de la pyramide manageuriale et que des ordres de travail précis pouvaient alors être donnés vers le bas. 50. Aujourd'hui, la charte organisationnelle est hyperliée, et non hiérarchique. Le respect pour la transmission de la connaissance est bien plus fort que celui pour une autorité abstraite. 51. Le management du style commander-et-contrôler vient de et renforce la bureaucratie, la lutte du pouvoir et une culture globale de la paranoïa. 52. La paranoïa tue le dialogue. C'est son but. Mais le manque de dialogue peut tuer une entreprise. 53. Il y a deux sortes de dialogues en cours. Un à l'intérieur de l'entreprise. Un avec le marché. 54. Dans la plupart des cas, aucun des deux ne se passe très bien. Pratiquement à chaque fois, la cause de l'échec peut être ramenée à des notions obsolètes de l'autorité et du contrôle. 55. En tant que politiques, ces notions sont du poison. En tant qu'outils, elles ne marchent pas. L'autorité et le contrôle rencontrent l'hostilité des employés intraconnectés et génère une méfiance parmi les marchés interconnectés. 56. Ces deux conversations veulent dialoguer l'une avec l'autre. Elles parlent le même langage. Elles se reconnaissent mutuellement. 57. Les entreprises intelligentes se pousseront et aideront l'inévitable à arriver plus vite. 58. Si la volonté de se mettre de côté était un critère d'évaluation du QI, alors très peu de sociétés seraient dans le coup. 59. Aussi subliminal que cela soit sur le moment, des millions de personnes en ligne perçoivent maintenant les entreprises comme à peine mieux que de pittoresques fictions légales qui font de leur mieux pour éviter que ces conversations ne se croisent. 131 60. C'est du suicide. Les marchés veulent parler aux entreprises. 61. Malheureusement, la partie de l'entreprise à laquelle un marché connecté veut s'adresser, est généralement cachée derrière un écran de fumée de boniments, d'un langage qui sonne faux, et qui généralement, l'est. 62. Les marchés ne veulent pas parler aux relations publiques et aux bonimenteurs. Ils veulent participer aux conversations ayant cours de l'autre côté du mur d'enceinte de l'entreprise. 63. Se mettre à nu, être personnel. Nous sommes ces marchés. Nous voulons vous parler. 64. Nous voulons accéder à votre information interne, à vos plans, vos stratégies, vos meilleurs projets, votre sincère connaissance. Nous ne nous contenterons pas d'une brochure en couleurs, d'un site web plein à craquer de poudre aux yeux mais sans aucune substance. 65. Nous sommes également les travailleurs qui faisons fonctionner votre entreprise. Nous voulons parler aux clients directement de notre propre voix et non selon des platitudes écrites dans un scénario. 66. En tant que clients, qu'employés, nous n'en pouvons vraiment plus d'obtenir notre information via des télécommandes. Quel besoin avons-nous de rapports annuels impersonnels et des études de marchés de troisième ordre pour nous présenter les uns aux autres ? 67. En tant que clients, qu'employés, nous nous demandons pourquoi vous n'écoutez pas. Vous avez l'air de parler dans une autre langue. 68. Ce jargon autosuffisant que vous jetez alentours - dans la presse, à vos conférences en quoi ça nous concerne ? 69. Peut-être que vous impressionnez vos investisseurs. Peut-être que vous impressionnez Wall Street. Vous ne nous impressionnez pas. 70. Si vous ne nous impressionnez pas, vos investisseurs en seront de leur poche. Est-ce qu'ils ne peuvent pas comprendre cela ? S'ils le comprenaient, ils ne vous laisseraient pas nous parler ainsi. 71. Vos notions fatiguées du "marché" rendent vos yeux ternes. Nous ne nous reconnaissons pas dans vos projections. Peut-être parce qu'on est déjà aller voir ailleurs. 72. Nous aimons beaucoup plus cette nouvelle place de marché. En fait, nous la créons. 73. Vous y êtes invités, mais c'est notre territoire. Laissez vos chaussures à l'entrée. Si vous voulez trinquer avec nous, descendez de votre cheval ! 74. Nous sommes immunisés face à la publicité. Laissez tomber. 75. Si vous voulez nous parler, dites-nous quelque chose. Et quelque chose d'intéressant, pour une fois. 76. On a des idées pour vous aussi : de nouveaux outils dont nous avons besoin, de meilleurs services. Des produis que nous sommes prêts à payer. Vous avez une minute ? 77. Vous êtes trop occupés à faire des affaires pour répondre à nos emails ? Zut, désolé, on reviendra plus tard. Peut-être. 78. Vous voulez notre argent ? nous voulons votre attention. 79. Nous voulons que vous arrêtiez votre trip, votre névrotique attention sur vousmême, venez faire la fête. 80. Ne vous inquiétez pas, vous pouvez encore gagner de l'argent. Enfin, à condition que ce ne soit pas votre seul soucis. 81. Avez-vous remarqué que l'argent en soi, est un peu unidimensionnel et ennuyeux ? De quoi d'autre pourrait-on parler ? 132 82. Votre produit ne marche plus. Pourquoi ? On aimerait interroger la personne qui l'a fait. Votre stratégie d'entreprise n'a aucun sens. Nous aimerions en discuter avec votre PDG. Comment ça, elle n'est pas là ? 83. Nous voulons que vous preniez vos 50 millions de clients autant au sérieux, qu'un seul journaliste du Wall street journal. 84. On connaît des gens dans votre société. Ils sont plutôt sympas en ligne. Vous en avez d'autres comme ça que vous cachez ? Est-ce qu'ils peuvent sortir pour venir jouer ? 85. Lorsque nous avons des questions, nous nous tournons les uns vers les autres pour obtenir des réponses. Si vous n'aviez pas une main si dure sur "vos gens" peut-être que nous nous tournerions vers eux. 86. Lorsque nous ne sommes pas occupés à être votre "cible de marché", la plupart d'entre nous sont vos gens. Nous préférions discuter avec des amis en ligne, plutôt que de regarder l'heure. Cela diffuserait votre nom d'une façon bien plus efficace que votre site web à un million de dollars. Mais vous nous dites que s'adresser au marché, est réservé au service marketing. 87. Cela nous ferait plaisir que vous compreniez ce qui se passe ici. Ce serait vraiment bien. Mais ce serait une grave erreur que de croire, que nous allons vous attendre. 88. Nous avons de meilleures choses à faire que de nous soucier de savoir si vous allez changer à temps pour conquérir notre marché. Les affaires ne sont qu'une partie de nos vies. Elles semblent remplir complètement la votre. Réfléchissez-y : qui a besoin de qui ? 89. Nous avons un vrai pouvoir et nous le savons. Si vous ne saisissez pas le concept, une autre équipe va débarquer qui sera plus attentive, plus intéressante, plus sympa pour jouer avec. 90. Même dans le pire des cas, notre toute récente conversation est plus intéressante que la plupart des salons professionnels, plus divertissante que n'importe quelle série télé, et certainement plus proche de la vie que les sites web institutionnels que vous avons vus. 91. Notre allégeance va à nous-mêmes, à nos amis, à nos nouveaux alliés et connaissances, et même à nos adversaires. Les entreprises qui n'ont pas de liens avec ce monde, n'y auront pas de futur non plus. 92. Les sociétés dépensent des milliards de dollars pour le bug de l'an 2000. Pourquoi n'entendent-elles pas la bombe à retardement de ce marché ? Les enjeux sont bien plus importants. 93. Nous sommes à la fois à l'intérieur et à l'extérieur des entreprises. Les barrières qui délimitent nos dialogues sont comme le mur de Berlin aujourd'hui, mais elles ne sont qu'un désagrément. Nous savons qu'elles finiront par tomber. Et nous allons nous appliquer des deux côtés, à les faire tomber. 94. Pour les entreprises traditionnelles, les conversations en réseau peuvent sembler confuses, et désarçonnantes. Mais nous nous organisons plus vite que vous ne le faites. Nous avons de meilleurs outils, d'avantages d'idées neuves, et aucun règlement pour nous ralentir. 95. Nous nous éveillons et nous connectons les uns aux autres. Nous observons. Mais nous n'attendons pas. 133 Annexe 10 : L’évolution du point de vue sur la création de la valeur Source : LK Prahhalad, « co-création » 134 Annexe 11 : Agent Axa sur Internet 135 Annexe 4 Slogan : “We make your satisfaction our policy” 136