THEA TRE DOSSIER PEDAGOGIQUE LE MONTE-PLATS – (The Dumb Waiter) HAROLD PINTER - 1960 Mise en scène de Cyril Lallement, avec Sébastien Foutoyet et Julien Colombet HAROLD PINTER Harold Pinter naît à Londres en 1930, dans une famille juive d’origine modeste, et grandit dans le quartier juif de l’East End, qui est la cible des mouvements fascistes anglais. Il y côtoie une population misérable, et notamment des clochards, ce dont il se souviendra dans The Caretaker. En 1939, il est évacué à la campagne, en Cornouailles, où il reste avec sa mère jusqu’en 1944, année où il regagne Londres. Il commence le théâtre dès sa sortie de l’école en 1946 : admis à la Royal Academy of Dramatic Art en 1947, il n’y reste que deux trimestres, trouvant l’enseignement et la conception du théâtre véhiculée par l’institution trop conventionnels. Il poursuit néanmoins une carrière d’acteur, sous le nom de David Baron, pendant une dizaine d’années, tout en travaillant comme serveur, concierge, plongeur de restaurant… Pendant cette période, il lit beaucoup et découvre notamment l’œuvre de l’auteur irlandais Samuel Beckett (dont la première pièce, En attendant Godot,fut écrite en français en 1952) , qui exercera une forte influence sur son œuvre future. C’est aussi l’époque où naît, en Angleterre, le mouvement des « Angry Young Men » (jeunes gens en colère), dont le chef de file est John Osborne, avec sa pièce Look Back in Anger (1956) : sans défendre aucune idéologie politique, et sans même se revendiquer comme école littéraire, ces jeunes dramaturges ont en commun d’exprimer la révolte et le désespoir de la jeune génération de l’après-guerre, de mettre en scène les classes les plus marginales de la société, leur pauvreté, leur solitude. C’est dans ce contexte que Pinter écrit et joue sa première pièce, The Room, en 1957. Malgré l’échec de ses premières œuvres, il continue à écrire (huit pièces entre 1957 et 1960 !). Une production plus réaliste, plus commerciale, dans les années 60, lui amène un plus large public. Dans les années 70, il tentera de nouvelles expériences en écrivant, comme Beckett, des pièces radiophoniques et des monologues. Il est depuis devenu un auteur majeur de la littérature anglaise du XXè siècle. En 2005, Harold Pinter a reçu le prix Nobel pour l’ensemble de son œuvre. BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE Œuvres - Les œuvres d’Harold Pinter son disponibles en français aux éditions de la NrfGallimard, dans la collection « Du Monde Entier », trad. E. Kahane. Les œuvres de Samuel Beckett sont publiées par les Editions de Minuit : En attendant Godot (1952) et Fin de Partie (1957), qui sont parmi les plus célèbres pièces de Beckett, les plus utiles pour comprendre Le Monte-plats, et auxquelles se réfère souvent la mise en scène de Cyril Lallement, peuvent être conseillées pour une lecture cursive. Sur Pinter et son œuvre Les ouvrages suivants ont été utilisés pour la préparation de ce dossier : GAUTHIER, Brigitte, Harold Pinter et les dramaturges de la fragmentation, coll. « Critiques littéraires », L’Harmattan, 2002 GAUTHIER, Brigitte, Harold Pinter, le maître de la fragmentation, idem. GAUTHIER, Brigitte, Harold Pinter : The Caretaker of the fragments of modernity. Etude de l’oeuvre de Pinter, Ellipses, 1996. [en anglais] GUILLARD, Didier, The Dumb Waiter by Harold Pinter, coll. “L’anglais à l’oral”, Ellipses, 1997 [en anglais] SALEM, Daniel, Harold Pinter, dramaturge de l’ambiguïté, Denoël, 1968 Généralités CORVIN, Michel, Dictionnaire encyclopédique du théâtre, 2 vol., coll. « In Extenso », Larousse, 1998 PRUNER , Michel, Les Théâtres de l’absurde, Nathan Université, 2003 RYNGAERT, Jean-Pierre, Introduction à l’analyse du théâtre, Dunod, 1996 RYNGAERT, Jean-Pierre, Lire le théâtre contemporain, Dunod, 1993 RESUME DU MONTE-PLATS Le Monte-plats est une pièce brève, sans intrigue réelle : deux hommes, Ben et Gus, se trouvent dans une pièce fermée, et semblent attendre quelqu’un ou quelque chose : ils sont là pour un « travail » dont le spectateur ne sait rien. Ils bavardent de choses et d’autres, se disputent, cherchent à tuer le temps, jusqu’à ce qu’un monte-plats, qu’ils n’avaient pas remarqué auparavant, se mette en marche, leur apportant des commandes de plus en plus fantaisistes, et qu’ils ne peuvent satisfaire. Sous la pression de ces ordres énigmatiques, la vérité se révèle peu à peu et l’on comprend progressivement en quoi consiste le « travail » de Ben et Gus et la raison de leur présence en ce lieu : ce sont des tueurs à gages qui s’apprêtent à exécuter quelqu’un – à moins que la future victime soit l’un d’entre eux ? FICHE N°1 : ENTRER DANS UN UNIVERS Texte 1 : entrer dans un univers Du début de la pièce jusqu’à « C’est impensable » (p.70) La place du monde réel : 1) Quels détails de cette scène vous semblent réalistes ? Qu’est-ce qui, au contraire, vous semble absurde ? 2) Selon vous, de quelle rubrique du journal est tiré l’article dont parle Ben ? Que pensez-vous de la réaction des personnages à l’événement qu’il décrit ? 3) Repérez ensuite dans la pièce d’autres extraits du journal mentionnés par Ben : quels sont leurs points communs ? Les personnages : 1) Comparez les attitudes de Ben et de Gus (déplacements, gestes, paroles…) : quelles indications cela donne-t-il sur les personnages eux-mêmes ? Sur leurs rapports entre eux ? 2) La seconde partie du passage est-elle à proprement parler un dialogue ? Pourquoi ? 3) Relevez les répétitions présentes dans la didascalie initiale : quel parallèle peut-on faire avec le dialogue qui suit ? Quel est, selon vous, l’effet produit sur le spectateur ? Synthèse : En quoi ce passage diffère-t-il d’une scène d’exposition traditionnelle ? En quoi s’en rapproche-t-il ? Texte 2 : communiquer De « Vas-y, va l’allumer »(p.82) à « le réchaud »(p.84) Les personnages : 1) Relevez les signes de violence, verbaux ou non verbaux, de la part des personnages : qui se montre le plus violent des deux ? Peut-on l’expliquer ? 2) Etudiez l’évolution du rapport entre Ben et Gus dans cette scène. Le langage : 1) Que pensez-vous du prétexte de cette discussion ? L’attitude des personnages semble-t-elle appropriée ? Pourquoi ? 2) Quel est selon vous le véritable enjeu de la dispute ? Synthèse : 1) Quels indices ce passage nous donne-t-il sur la conception du langage dans Le Monte-plats ? 2) Peut-on dire qu’il s’agit d’un passage comique ? Nuancez et justifiez votre réponse. Texte 3 : les personnages face à une crise De « Un tintamarre de grincements » (p.88) à « …prend une décision »(p.90) Les personnages : 1) Analysez les didascalies : qui est le personnage le plus actif (déplacements, gestes, paroles)? Comment caractériseriez-vous l’attitude de chacun ? Et comment l’expliquer ? 2) Tout au long de la pièce, Ben cherche à donner de lui-même l’image d’un homme raisonnable : qu’est-ce qui le montre ici ? 3) Comparez ce passage avec l’épisode de la lecture du journal dans le texte 1 : - quels sont les points communs entre le texte du journal et les messages envoyés par le monte-plats ? - Ben envoie Gus lire les commandes avant de les lire lui-même : pourquoi ? que signifie ce changement d’attitude ? 4) Qu’est-ce que Gus attend de Ben, selon vous ? Celui-ci répond-t-il à son attente ? Quel est l’effet produit ? Synthèse : le rôle du monte-plats 1) En anglais, le mot signifiant « monte-plats » est « dumbwaiter ». Or, le titre original de la pièce est The Dumb Waiter : faites-en une traduction littérale et dites ce qu’on peut déduire de cette modification orthographique. 2) Le monte-plats est un objet qui appartient au monde réel, mais sa signification est également symbolique : que représente-t-il, à votre avis ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur le texte. 3) Pourquoi peut-on dire que le monte-plats est un objet angoissant ? FICHE N° 2 : LE LANGAGE I/ Le langage et le quotidien 1) Quels sont les registres de langue utilisés le plus souvent par les personnages ? Relevez quelques exemples. Quelles informations cela donne-t-il au spectateur ? 2) Faites une liste de leurs principaux sujets de conversation au cours de la pièce : comment les caractériseriez-vous ? Est-ce habituel au théâtre ? Quelle image Pinter cherche-t-il à donner de la conversation quotidienne ? II/ Langage et communication 1) Dans la pièce, le langage n’est pas toujours associé à la communication : relevez-en des exemples et justifiez votre choix. 2) Par quels autres moyens les personnages communiquent-ils entre eux ? 3) Lisez le passage suivant : de « tu sais ce qui ne tourne pas rond » (p.75) à « …je ne connais pas vraiment mon odeur. » (p.77) : qui parle le plus ? Comparez avec ce que vous avez déjà observé auparavant de ce personnage. 4) Par quels procédés Pinter montre-t-il l’impossibilité de la communication entre les personnages ? III/ Langage et pouvoir 1) Relevez dans les textes étudiés des manifestations de l’emprise de Ben sur Gus. 2) Par quels moyens les personnages sont-ils mis en relation avec l’extérieur ? Peuton parler de communication ? pourquoi ? 3) Relevez à la fin de la pièce les ordres transmis par le monte-plats ou par son tuyau de communication : - étudiez leur évolution : mode de transmission, nature… - comment le spectateur en prend-t-il connaissance ? Quel est l’effet produit ? - Etudiez l’attitude de chacun des personnages face au monte-plats : y a-t-il une évolution ? Dans quelle mesure cela explique-t-il et prépare-t-il la fin de la pièce ? FICHE N°3 : L’ ESPACE I / Observer 1) Repérez dans le texte : - l’espace scénique (espace actuel) - les espaces extra scéniques (espace virtuel) 2) L’espace scénique : peut-on le qualifier de « réaliste » ? Comparez avec d’autres types de textes théâtraux utilisant un décor réaliste (comme le théâtre de boulevard, par exemple), puis avec l’espace décrit dans Fin de partie de S. Beckett (fiche n°5, texte 3), et nuancez votre réponse. 3) Les espaces extra scéniques : répertoriez les moyens par lesquels ils sont représentés sur scène (discours, objets…) II/ Comprendre 1) La pièce se déroule dans un lieu unique : qu’est-ce qui le justifie du point de vue de l’intrigue ? 2) Quelles sont selon vous les significations symboliques de ce choix dramaturgique ? 3) Pourquoi ne peut-on parler de « décor » dans Le Monte-Plats ? 4) Traduisez littéralement l’expression « Deus ex machina » et recherchez ce qu’elle désigne dans le vocabulaire théâtral : qu’est-ce qui joue ce rôle dans la pièce ? En quoi est-ce ironique ? III/ Expliquer et argumenter 1) Que peut-on dire des rapports entre espace actuel et espace virtuel dans Le MontePlats ? 2) On dit souvent du théâtre qu’il est un art de l’espace. Commentez cette expression en vous appuyant sur votre lecture du Monte-plats. FICHE N° 4 : COMPARER DEUX MISES EN SCENE Documents : - affiches (doc. 1) - photographies de la mise en scène de Jean Maisonnave, 1985 ( (doc. 2) - photographies de la mise en scène de Cyril Lallement, 2006 (doc.3) - photographies de la mise en scène par Roger Blin d’En attendant Godot de Samuel Beckett, 1953 (doc.4) I/ Les affiches 1) Quelles informations (textes et images) retrouvent-on sur les deux affiches ? 2) Observez la position des personnages et leurs costumes sur l’affiche de 1985 : quel est l’effet produit ? Quelle attente cela suscite-t-il chez le spectateur ? 3) Les personnages figurent-ils sur l’affiche de 2006 ? Quel est l’effet produit ? Comparer avec l’affiche précédente. 4) Chaque affiche fait référence à un univers culturel autre que celui du théâtre. Lequel ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur des éléments précis (couleurs, disposition et nature de l’image, etc.) 5) Laquelle de ces deux affiches préférez-vous ? Pourquoi ? II/ Les photographies Le document 2 1) Comparez les photographies du document 2 avec la didascalie initiale du MontePlats. Qu’en concluez-vous ? 2) Quels détails Jean Maisonnave a-t-il ajoutés à la description du dramaturge ? Quelle est leur signification ? Le document 3 1) Observez les personnages des mises en scène de Cyril Lallement et Roger Blin (document 4) : qu’en pensez-vous ? 2) Les personnages paraissent-ils individualisés dans le document 3 ? Nuancez votre réponse. 3) Observez l’espace scénique : que met-il principalement en valeur ? Comparez ensuite avec l’image de l’affiche. 4) Si vous avez vu la pièce, dites pourquoi les descriptions de la didascalie initiale ne sont pas suivies : où les retrouvent-on dans la mise en scène ? Quelles sont les significations de ce choix ? Comparer : Quels sont les points communs aux deux mises en scène ? Qu’en concluez-vous quant au sens du texte ? FICHE N°5 : LE RAPPORT ENTRE MAITRE ET VALET DANS LE THEATRE DU XXè SIECLE Texte 1 Hugo Von Hofmannsthal, L’Incorruptible, 1956. Acte premier, scène 12 La baronne – Ainsi donc, vous ne vous considérez plus ici comme en service ? Théodore – Assurément. Depuis midi. Aujourd’hui, douze heures. La baronne – Oui, et que va-t-il arriver ? Vous savez bien que, pour comble de malheur, j’attends des invités ! Théodore, avec un geste de regret. – Cela m’est personnellement fort pénible, mais des circonstances d’un poids considérable m’ont mis dans l’obligation… La baronne – Théodore, ces circonstances ont-elles quelque chose à voir avec ma personne ? Théodore – Je demande seulement à Votre Grâce la permission de lui baiser les mains avec la plus humble reconnaissance. La baronne – Quelqu’un du personnel s’est-il rendu coupable de quelque chose envers vous ? Théodore – Je voudrais éviter en un tel instant de faire au personnel fût-ce l’honneur d’une mention ! La baronne – Vous n’avez pu vous décider à fournir la moindre indication au général – mais le petit, lui, est revenu en babillant des choses… Théodore – L’enfant, dans son innocence, comprend mieux une âme comme la mienne que ne font les gens roués. La baronne – Le petit a rapporté ceci : « Tout cela ne convient plus à Théodore. » Qu’estce que cela signifie ? Théodore – Ces paroles sont fort appropriées pour exprimer d’une manière générale ce qui serait peut-être pénible si l’on entrait dans les détails. La baronne – Oui, mais comment doit-on… Théodore – Votre Grâce a eu la très grande bonté de renoncer a priori à de telles explications, pénibles pour les deux parties en présence, dans le cas où mon retrait me paraîtrait nécessaire, et d’agréer par avance mes raisons. Il plonge la main dans sa poche. La baronne – Laissez cela dans votre poche. Je sais bien ce que j’ai écrit. Elle se tait et tapote nerveusement le sol de sa canne. Théodore – Ce document rédigé d’une main bienveillante me fut délivré pour le jubilé de mes vingt-cinq ans passés dans cette maison de maître, comme signe d’une confiance particulière et inhabituelle. La baronne – Telle était bien mon intention. Théodore – Ainsi, les années que je me déciderais à passer encore dans cette fonction devaient prendre un relief particulier et apparaître comme des années honorifiques. Elevant la voix. Quiconque s’acquitte ainsi d’années de service honorifique devrait en conséquence être à l’abri de quelque mépris de sa personne que ce soit. La baronne – Mais qui donc vous témoigne du mépris ? Qui a eu l’impudence de se permettre cela ? Asseyez-vous, cher Théodore, et parlez à cœur ouvert. Trad. J.-Y. Masson, L’Arche, « Scène ouverte », [1956] 1997 Texte 2 Bertolt Brecht, Maître Puntila et son valet Matti, 1952. Scène 1 : « Puntila trouve un homme. » Puntila - … Qui es-tu ? Matti – Je suis votre chauffeur, Monsieur Puntila. Puntila, méfiant – Qu’est-ce que tu es ? Répète. Matti – Je suis votre chauffeur. Puntila – Tout le monde peut dire ça. Je ne te connais pas. Matti – Peut-être ne m’avez-vous jamais bien regardé, ça fait seulement cinq semaines que je suis chez vous. Puntila – Et maintenant, d’où viens-tu ? Matti – De dehors. J’attends depuis deux jours dans la voiture. Puntila – Dans la voiture ? Matti – Dans la vôtre. Dans la Studebaker. Puntila – Ca me paraît drôle. Tu peux le prouver ? Matti – Et je n’ai pas l’intention de vous attendre dehors plus longtemps, sachez-le bien. J’en ai jusque-là. Vous ne pouvez pas traiter un homme de cette façon. Puntila : Qu’est-ce que ça veut dire, un homme ? Tu es un homme ? Avant tu as dit que tu es un chauffeur. Je t’ai surpris en pleine contradiction, hein ! Avoue-le ! Matti – vous allez le voir tout de suite que je suis un homme, Monsieur Puntila. Je ne me laisserai pas traiter comme une tête de bétail et je n’attendrai pas dans la rue que vous ayez l’obligeance de sortir. Puntila – Avant tu as prétendu que toi, tu ne te laisserais pas faire. Matti – Très juste. Réglez-moi, cent soixante-quinze marks, et j’irai chercher mon certificat à Puntila. Puntila – Ta voix, je la connais. Il tourne autour de lui en l’observant comme une bête curieuse. Ta voix sonne tout à fait comme celle d’un homme. Assieds-toi et prend un aquavit, il faut qu’on apprenne à se connaître. Le maître d’hôtel entre avec une bouteille – Votre aquavit, Monsieur Puntila, et aujourd’hui c’est vendredi. Puntila, désignant Matti – C’est un ami à moi. Le maître d’hôtel – Oui, votre chauffeur, Monsieur Puntila. Puntila – Tiens, tu es chauffeur ? Je l’ai toujours dit, c’est en voyage que l’on rencontre les gens les plus intéressants. Trad. M. Cadot,L’Arche, « Scène ouverte », [1950] 1970 Texte 3 Samuel Beckett, Fin de partie, 1957. Intérieur sans meubles. Lumière grisâtre. Aux murs de droite et de gauche, vers le fond, deux petites fenêtres haut perchées, rideuax fermé. Porte à l’avant-scène à droite. Accroché au mur, près de la porte, un tableau retourné. A l’avant-scène à gauche, recouvertes d’un vieux drap, deux poublles l’une contre l’autre. Au centre, recouvert d’un vieux drap, assis dans un fauteuil à roulettes, Hamm. Immobile à côté du fauteuil, Clov le regarde. Teint très rouge. Il va se mettre sous la fenêtre à gauche. Démarche raide et vacillante. Il regarde la fenêtre à gauche, la tête rejetée en arrière. Il tourne la tête, regarde la fenêtre à droite. Il va se mettre sous la fenêtre à droite. Il regarde la fenêtre à droite, la tête rejetée en arrière. Il tourne la tête, regarde la fenêtre à gauche. Il sort, revient aussitôt avec un escabeau, l’installe sous la fenêtre à gauche, monte dessus, tire le rideau. Il descend de l’escabeau, fait six pas vers la fenêtre à droite, retourne prendre l’escabeau, l’installe sous la fenêtre à droite, monte dessus, tire le rideau. . Il descend de l’escabeau, fait six pas vers la fenêtre à gauche, retourne prendre l’escabeau, l’installe sous la fenêtre à gauche, monte dessus,regarde par la fenêtre. Rire bref. Il descend de l’escabeau, fait un pas vers la fenêtre à droite, retourne prendre l’escabeau, l’installe sous la fenêtre à droite, monte dessus,regarde par la fenêtre. Rire bref. Il descend de l’escabeau[…], va vers Hamm, enlève le drap qui le recouvre le plis soigneusement et le met sur son bras. En robe de chambre, coiffé d’une calotte en feutre, un grand mouchoir taché de sang étalé sur le visage, un sifflet pendu au cou, un plaid sur les genoux, d’épaisses chaussettes aux pieds, Hamme semble dormir. Clov le regarde. Rire bref. Il va à la porte, s’arrête, se retourne, contemple la scène, se tourne vers la salle. Clov, regard fixe, voix blanche – fini, c’est fini, ça va peut-être finir. Un temps. Les grains s’ajoutent aux grains un à un, et un jour soudain, c’est un tas, un petit tas, l’impossible tas. Un temps. On ne peut plus me punir. Un temps. Je m’en vais dans ma cuisine, trois mètres sur trois mètres sur trois mètres, attendre qu’il me siffle. Un temps. Ce sont de jolies dimensions, je m’appuierai à la table, je regarderai le mur, en attendant qu’il me siffle. [ Quelques instants plus tard, Hamm se réveille et siffle Clov] Hamm – Tu empestes l’air ! Un temps. Prépare-moi, je vais me coucher. Clov – Je viens de te lever. Hamm – Et après ? Clov – Je ne peux pas te lever et te coucher toutes les cinq minutes, j’ai à faire. Un temps. […] Hamm – Prépare-moi. Clov ne bouge pas. Va chercher le drap. Clov ne bouge pas. Clov. Clov – Oui. Hamm – Je ne te donnerai plus rien à manger. Clov – Alors nous mourrons. Hamm – Je te donnerai juste assez pour t’empêcher de mourir. Tu auras tout le temps faim. Clov – Alors nous ne mourrons pas. Un temps. Je vais chercher le drap. Il va vers la porte. Hamm – Pas la peine. Clov s’arrête. Je te donnerai un biscuit par jour. Un temps. Un biscuit et demi. Un temps. Pourquoi restes-tu avec moi ? Clov – Pourquoi me gardes-tu ? Hamm – Il n’y a personne d’autre. Clov – Il n’y a pas d’autre place. Editions de Minuit, 1957 1) Faites une recherche bio-bibliographique sur chacun des auteurs. 2) Relevez dans les textes tous les indices qui permettent de distinguer le maître du valet et classez-les (noms, langage, attitudes, etc…) 3) Faites un tableau répertoriant les signes - de domination du maître sur le valet - d’égalité entre eux - de domination du valet sur le maître Quels sont les différents moyens employés ? Comparez avec ce que vous avez pu observer dans Le Monte-Plats. DOCUMENT 1 Les affiches (2005 et 1985) DOCUMENT 3 Le Monte-plats (2006) mise en scène C. Lallement DOCUMENT 2 Le Monte-plats (1985) mise en scène J. Maisonnave DOCUMENT 4 En attendant Godot S. BECKETT (1953) Couverture d’ En attendant Godot, (ed. de minuit), photographie tirée de la mise en scène de Roger Blin.