DEBUT TITRE 2
TITRE II : La détermination du régime matrimonial
On va voir ici que le régime matrimonial peut s’établir de deux manières différentes.
Lorsque les époux ne choisissent pas de faire un contrat de mariage, on leur appliquera le
régime légal qui s’établit en vertu de la loi (article 1393 Code civil, et article 1400 Code
civil). Il fera l’objet de la deuxième partie du cours. Si les époux choisissent de faire un
contrat, leur régime matrimonial est alors celui qu’ils ont choisi dans leur contrat.
Quoiqu’il en soit, qu’il soit légal ou conventionnel, c’est au jour de la célébration du
mariage, ni avant, ni après, que le régime entre en application. Ainsi, même si les futurs époux
vivent déjà ensemble, le contrat de mariage ne prendra effet qu’au jour de la célébration du
mariage (article 1395 Code civil).
Par ailleurs, ici encore, quelque soit le régime matrimonial des époux en tant que tel, il
est opposable aux tiers. Mais si le régime légal est opposable de plein droit aux tiers,
l’opposabilité des régimes conventionnels est subordonnée à l’accomplissement des
formalités légales de publicité du contrat de mariage (article 1394 alinéa 3 Code civil).
On verra ici encore que si la détermination du régime matrimonial peut s’opérer au
moment du mariage, comme on l’a dit, depuis l’entrée en vigueur de la loi de 1965, elle peut
aussi s’effectuer en cours d’union par changement de régime matrimonial.
Chapitre 1 : La détermination initiale du régime matrimonial
On va pouvoir constater que les époux sont en principe libres de choisir leur régime
matrimonial mais cette liberté n’est pas sans limite.
Section 1 : Le domaine de la liberté des conventions matrimoniales
Le Code civil énonce un principe de liberté des conventions matrimoniales : il ouvre
aux futurs époux la faculté de choisir eux-mêmes, par contrat, leur régime matrimonial.
Ce principe de liberté des conventions matrimoniales peut certainement être rattaché au
principe plus général de liberté contractuelle, mais il n’en est pas une simple application. En
effet, en matière familiale, la liberté contractuelle se heurte à l’article 6 du Code civil :
l’organisation de la famille relève de l’Ordre Public. De plus, l’histoire des régimes
matrimoniaux montre que la liberté des conventions matrimoniales a toujours été plus large
que la liberté contractuelle ordinaire. Donc la justification de ce principe de liberté serait
plutôt à rechercher dans la volonté historique du législateur d’encourager le mariage.
Quant à l’étendue de ce principe, il est très vaste. En effet, la liberté des époux consiste
dans la possibilité on l’a dit de choisir le régime légal ou conventionnel et lorsque le choix des
époux se porte sur un régime conventionnel, c’est encore librement que vont être déterminés
les clauses que le contrat de mariage contiendra. Ainsi, l’ampleur de cette liberté fait du choix
du régime matrimonial une véritable stratégie. En la matière, le notaire joue un rôle de conseil
primordial.
Ainsi, même la liberté des époux peut consister dans la simple adoption d’un des
différents gimes proposés par le Code civil (article 1393 alinéa 1 Code civil) : le régime de
la séparation de biens, un régime de communauté ou le régime de la participation aux
acquêts ; cette liberté matrimoniale peut aussi s’exprimer dans la continuation de plusieurs de
ces régimes ou dans l’élaboration d’un régime particulier, éventuellement initd’exemples
étrangers.
Le régime de cette liberté, quand elle s’exerce est alors celui du droit commun. A titre
d’exemple, si les futurs époux veulent inclure dans leur contrat de mariage une clause
d’inaliénabilité relativement à un bien, cette clause doit alors être d’une durée limitée et
justifiée par un intérêt sérieux et légitime, conformément au Code civil.
Cependant, on peut constater en la matière que le législateur admet même des clauses qui vont
plus loin que le droit commun. En effet, on admet en droit des régimes matrimoniaux des
clauses qui seraient nulles en droit commun. Par exemple : la clause par laquelle les futurs
époux conviennent que la masse commune ira intégralement au survivant en cas de décès de
l’un d’entre eux (article 1524 du Code civil). Une telle clause serait considérée comme nulle
si elle était insérée dans un contrat de société par exemple, elle constituerait une clause
léonine.
De même, l’institution contractuelle par contrat de mariage est autorisée (article 1082 du
Code civil) alors qu’elle est en principe prohibée en tant que pacte sur succession future
(articles 893 et 943 du Code civil)
L’exemple le plus couramment rencontré dans les contrats de mariage est celui de la clause
dite « commerciale » : par cette clause les futurs époux stipulent qu’au décès de l’un d’entre
eux, le survivant aura la faculté d’acquérir ou de se faire attribuer des biens personnels du
prémourant.
Longtemps cette clause fut considérée comme nulle par la cour de cassation car elle y voyait
un pacte de succession future. Elle a été validée par la réforme de 1965 (Article 1390 Code
civil).
Pour que cette clause soit valable il faut cependant que les biens sur lesquels elle porte soient
déterminés ce qui semble exclure les universalités de biens.
Une telle clause ne produit donc aucun effet du vivant des époux. Ce n’est qu’au décès du
conjoint qu’une option est ouverte au bénéficiaire qui décide alors de se prévaloir de la clause
ou d’y renoncer. Mais, le bénéficiaire qui opte pour le bénéfice de la clause doit alors verser
aux héritiers une indemnité qui correspond à la valeur des biens prélevés. Dans l’hypothèse où
l’époux bénéficiaire n’a aucun droit ouvert dans la succession de son conjoint, la clause opère
alors comme une vente, le transfert de propriété intervenant au jour de la notification. Dans
l’hypothèse inverse, la clause vaut opération de partage, le transfert de propriété intervenant
rétroactivement au décès du conjoint.
Pour autant il existe des limites à la liberté des conventions matrimoniales. En effet, l’article
1387 du Code civil, siège du principe de liberté des conventions matrimoniales lui apporte
une exception : ce sont les clauses contraires aux bonnes mœurs. De telles clauses sont
prohibées. Par ailleurs, l’article 1388 du Code civil ajoute que les époux ne peuvent déroger ni
aux devoirs, ni aux droits qui résultent pour eux du mariage. Ce qui fait que les époux ne
peuvent déroger ni aux effets extrapatrimoniaux du mariage, ni à ses effets patrimoniaux
prévus par le régime primaire. De la même façon, les futurs époux ne peuvent déroger aux
règles de l’autorité parentale, de l’administration légale ou de la tutelle.
Enfin, l’article 1389 du Code civil interdit aux époux les pactes sur succession future.
Au-delà de ses règles, il ne faut pas oublier que certains régimes sont prohibés parce qu’ils
heurteraient les règles du droit positif (régime dotal….)
Section 2 : l’instrument de la liberté matrimoniale : le contrat de mariage
Dans la mesure il résulte d’un accord de volonté le contrat de mariage est assujetti au droit
commun des actes juridiques. Mais il obéit à des règles qui ont été édictés en considération de
son objet : le choix du régime matrimonial.
Sa formation a été calquée sur celle du mariage et son destin est lié à celui du mariage.
§1 : La formation du contrat de mariage
A les conditions de fond
Pour sa validité, le contrat de mariage est subordonné aux mêmes conditions que le mariage
quant au consentement et également quant à la capacité des parties.
1) Le consentement des futurs époux
Le consentement des futurs époux est toujours nécessaire fussent-ils incapables. Mais encore
faut-il que ce consentement soit exempt de vice. Ainsi, un contrat de mariage peut être annulé
pour cause d’erreur, ou dol de la part de l’un des futurs époux.
Si le consentement mutuel des futurs époux est en principe suffisant, on va constater que
parfois la loi conduit à ce que des tiers deviennent partie au contrat de mariage, même en
présence d’époux capables : ce sont les personnes qui ont disposé (donné) en faveur du
mariage.
Bien sur, l’époux incapable ne pourra pas non plus passer seul des conventions matrimoniales.
2) La capacité des futurs époux
Pour conclure un contrat de mariage, la loi exige la même capacité que celle requise pour
contracter le mariage et donc la même habilitation que celle requise pour le mariage du
majeur en tutelle ou en curatelle . C’est la règle habilis ad nuptias, habilis ad pacta nuptiala.
B- les conditions de forme
Sous des sanctions différentes, la loi soumet le contrat de mariage à deux séries de formalités :
d’abord elle solennise sa rédaction, ensuite, elle organise sa publicité.
1) La solennité du contrat de mariage
Le contrat de mariage est un acte solennel qui est assujetti, comme le mariage, à des
formalités requises à peine de nullité absolue (ad solemnitatem). Cependant, elles sont
appropriées à son objet.
Ainsi, l’article 1394 alinéa 1 du Code civil dispose que le contrat de mariage doit être rédigé
par acte devant notaire. Le notaire intervient alors comme conseiller des familles afin
d’éclairer les époux dans leur choix et rédiger le contrat. Et en tant qu’officier public, il lui
confère l’authenticité.
Par ailleurs, les conventions matrimoniales doivent être passées en la présence et avec le
consentement simultané de toutes les personnes qui y sont parties.
Doivent donc être présentes ensemble, au moment de la signature du contrat, toutes les
personnes qui y ont donleur consentement (elles sont présentes de jure et pas seulement
honoris causa).
Bien sûr en cas de besoin, chaque partie à la faculté de se faire représenter dans la conclusion
du contrat par un mandataire. La procuration qui le mandate doit alors être authentique et
spéciale. C’est là une différence avec le mariage qui interdit la célébration par procuration.
Par précaution, la loi étend à peine de nullité ce même formalisme avec changements que les
parties apporteraient au contrat de mariage avant la célébration : on qualifie ces modifications
de contre lettre. La contre lettre sera rédigée à la suite de la minute du contrat de mariage,
ceci à peine d’inopposabilité aux tiers. La contre lettre est un véritable complément du contrat
de mariage originaire. Elle reçoit la même publicité que lui.
2) La publicité du contrat de mariage
Cette publicité a été instituée dans l’intérêt des tiers et des époux eux-mêmes, dans la mesure
où elle permet aux tiers contractants de traiter en confiance avec les époux dont ils ne
connaissent pas le régime matrimonial, les pouvoirs de disposition et d’engagement. Ainsi
tout contrat de mariage est porté en marge de l’acte de mariage des époux : ainsi,
pratiquement, lors de la réception du contrat de mariage, le notaire doit délivrer aux parties,
en leur spécifiant qu’il doit être remis à l’officier de l’état civil avant la célébration du
mariage, un certificat qui énonce les noms et résidence du notaire, l’état civil des futurs
époux, et la date du contrat (article 1394 alinéa 2 du Code civil).
Et puis lors de la célébration du mariage, les époux doivent sur interpellation de l’officier de
l’état civil, préciser , dans l’affirmative, les renseignements nécessaires (acte reçu par Maitre
X, le …). Il restera alors aux tiers intéressés à consulter le contrat de mariage, en substance,
ils devront obtenir des époux qu’ils lui communiquent une expédition c'est-à-dire une copie
authentique de leur contrat de mariage. Car la nature de leur contrat de mariage n’est pas
révélée par l’acte de mariage. La seule connaissance que l’on ait du régime matrimonial des
époux à la lecture de leur acte de mariage c’est lorsque les futurs époux ont déclaré ne pas
avoir fait de contrat de mariage (on sait alors qu’ils sont mariés sous le régime légal). Mais
pour certaines catégories de personnes, il a fallu ajouter à cette publicité générale une
publicité plus développée.
Quant à la sanction principale de ces règles de publicité, c’est l’inopposabilité des
conventions matrimoniales occultes. Donc, si l’acte de mariage indique l’absence de contrat
de mariage, alors les époux sont, à l’égard des tiers, réputés mariés sous le régime légal.
Cependant, cette absence de mention légale n’empêche pas le contrat de mariage d’être
opposable aux tiers lorsque les époux, dans un acte passé avec ceux-ci, ont déclaré en avoir
fait un (article 1394 alinéa 3 du Code civil).
§ 2 : le devenir du contrat de mariage
La règle en la matière est que le contrat de mariage est subordonné au mariage ce qui évoque
la liaison de l’accessoire au principal.
Au plus tard, le contrat de mariage doit donc être reçu le jour même du mariage mais à
condition qu’il le soit avant la célébration. Les conventions matrimoniales ne prennent effet
qu’au jour de cette célébration. Par conséquent, la non célébration du mariage entraine la
caducité du contrat de mariage.
Quant à la dissolution du mariage, par décès ou divorce, elle déclenche l’application de toutes
les stipulations et avantages matrimoniaux qui sont destinées à en régler la liquidation. En
revanche, la nullité du mariage, elle, conduirait à la nullité rétroactive du contrat de mariage.
Bien sûr, cette rétroactivité pourra être limitée en faveur de l’époux de bonne foi par
application des règles du mariage putatif.De surcroit, à supposer que l’existence d’un mariage
Putatif ne soit pas accordé, le contrat de mariage pourra néanmoins servir de point de départ à
la liquidation de la communauté créée de fait qui a existé entre les époux. (Pour aller plus
loin, voir Flour et Champenois, n°168 s et Cornu p146 s ; Péterka, p91 s.).
Chapitre 2 : le changement conventionnel de régime matrimonial :
En principe, le choix du régime matrimonial est définitif. Cependant , depuis la loi du 13
juillet 1965 entrée en vigueur le 1er février 1966, les époux ont la possibilité de se dire
d’accord pour changer de régime matrimonial après deux ans d’application de leur régime
antérieur (art. 1397 C. civ.). Les modalités du changement de régime matrimonial ont été
réformées par la loi du 23 juin 2006 entrée en vigueur le 1er janvier 2007 puis par le loi du 5
mars 2007 d’application immédiate sur ce point (7 mars 2007).
Ainsi, selon ce texte : « Après deux années d'application du régime matrimonial, les époux
peuvent convenir, dans l'intérêt de la famille, de le modifier, ou même d'en changer
entièrement, par un acte notarié. A peine de nullité, l'acte notarié contient la liquidation du
régime matrimonial modifié si elle est nécessaire.
Les personnes qui avaient été parties dans le contrat modifié et les enfants majeurs de chaque
époux sont informés personnellement de la modification envisagée. Chacun d'eux peut
s'opposer à la modification dans le délai de trois mois.
Les créanciers sont informés de la modification envisagée par la publication d'un avis dans
un journal habilité à recevoir les annonces légales dans l'arrondissement ou le département du
domicile des époux. Chacun d'eux peut s'opposer à la modification dans les trois mois suivant
la publication.
En cas d'opposition, l'acte notarié est soumis à l'homologation du tribunal du domicile des
époux. La demande et la décision d'homologation sont publiées dans les conditions et sous les
sanctions prévues au code de procédure civile.
Lorsque l'un ou l'autre des époux a des enfants mineurs, l'acte notarié est obligatoirement
soumis à l'homologation du tribunal du domicile des époux.
Le changement a effet entre les parties à la date de l'acte ou du jugement qui le prévoit et, à
l'égard des tiers, trois mois après que mention en a été portée en marge de l'acte de mariage.
Toutefois, en l'absence même de cette mention, le changement n'en est pas moins opposable
aux tiers si, dans les actes passés avec eux, les époux ont déclaré avoir modifié leur régime
matrimonial.
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