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LUC DUPONT
VERS UNE ANALYSE SOCIOLOGIOUI$
DE LA PUBLICITE ICONIOUE: 1987-1W
Thèse présentée
à la Faculté des études supérieures
de l'Université Laval
pour l'obtention
du grade de Philosophiae Doctor (Ph.D,)
JXparternent de sociologie
FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES
UNIVERSUI?LAVAL
QUI~BEC
O Luc Dupont, 2000
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La présente étude vient jeter un regard sur la socîét6 occidentale à travers les
images publicitaires. Plus spécifiquement, on cherche à identifier les thèmes
et les symboles qui composent la rrace ou niveau neutre (Molino, 1975). Les
observations des publicités étudiées nous font découvrir quatre figures du
temps ainsi que huit types de configurations spatiales. Par ailleurs, on a
constaté que le discours publicitaire est entretenu par le jeu des acteurs
sociaux, notamment dans le langage non verbal. Enfin, une partie de la
recherche a porté sur l'imaginaire dans la publicité. On a identifié et
développé deux thèmes dominants de cet imaginaire: les personnages
mythiques et le standing imaginaire.
<<L'achat,la vente, l'appropriation de biens et
d'objets-signes différenciés, constituent aujourd'hui
notre langage, notre code, celui par où la societ6
entière communique et se par1e.u
Jean Baudrillard, La societe de consommation
La prksente étude vient jeter un regard sur la société occidentale à travers les
images publicitaires. Plus spécifiquement, on cherche à identifier les thèmes
et les symboles qui composent la trace ou niveau neutre (Molino, 1975).
Pour procéder à l'analyse, on a constitué une grille qui a permis de
procéder à la description exhaustive de la trace publicitaire. Les observations
des publicités étudiées nous font découvrir quatre figures du temps (le temps
biographique, le temps historique, le temps géré et le temps des rituels) ainsi
que huit types de configurations spatiales (l'espace interstellaire, l'espace
mondial, l'espace national, I'espace infranational, I'espace domestique,
l'espace autre, I'espace religieux et l'espace cosmologique). Par ailleurs, on a
constaté que le discours publicitaire est entretenu par le jeu des acteurs
sociaux, notamment dans le langage non verbal. Ce discours s'exprime sur le
plan corporel et contribue à construire l'image de l'homme et de la femme,
de la sexualité et de la bonne forme physique. Enfin, une partie de la
recherche a porté sur l'imaginaire dans la publicité. On a identifié et
développé deux thèmes dominants de cet imaginaire: les personnages
mythiques et le standing imaginaire.
Cette 6tude sur la publicité vise à renouer avec la complexité des
signes, des mythes et des symboles. On cherche à savoir ce que l'image
publicitaire raconte sur la société. La trace publicitaire sera considérée
n relhent de la
comme un univers de signes et un mode de ~ i g ~ c a t i oqui
sémiologie. On abordera donc l'image publicitaire comme un construit qui
permet de mieux comprendre la société dam laquelle on vit.
REMERCIEMENTS
Il nous est agréable de remercier notre directeur de thèse, monsieur André
Turmel, professeur au Département de sociologie de l'Université Laval,
pour ses conseils, ses suggestions de lectures et ses remarques pertinentes.
Non seulement monsieur Turmel a cru dès le départ à notre projet, nous
guidant et nous soutenant dans notre démarche, mais il nous a également
assuré de sa constante disponibilité, de ses conseils et de ses vastes
connaissances, tout au long de nos recherches et de la rédaction de notre
thèse de doctorat.
Je me dois aussi de mentionner l'aide et le soutien apportés par
monsieur Gabriel Dussault qui a réalisé la pré-lecture, monsieur Claude
Cossene, professeur au Département d'information et de communication de
l'université Laval, monsieur Denis Bachand, professeur au Département de
communication de l'Université d'Ottawa, monsieur Pierre St-Arnaud,
professeurs au Département de sociologie de l'université Laval et monsieur
Jacques de Guise, professeur au Département d'information et de
communication de l'université Laval.
Je me dois enfin de remercier messieurs Jeannot Lefebvre et Michel
Marcoux de la firme Mediacom, Denys Durocher de la fimie Métrornédia et
Jocelyn Bernier, photographe.
Luc Dupont
.......................................................................................
REMERCIEMENTS ........................................................................
TABLE DES MATIÈRES ................................................................
INTRODUCTION ..........................................................................
A . Présentation de la recherche .................................................
RÉSM
Chapitre premier
Revue de littérature et état de la question
A . Introduction ........................................................................20
B . Revue de la littérature ........................................................ 21
1 . La perspective économique............................................. -21
2. La perspective sociologique.............................................25
2.1 Un phénodne culturel ..........................................25
2.2 Un système symbolique .........................................-27
2.3 Un proassus d'uniformisation culturelle ................ 28
30
2.4 Un outil de contrôle social .....................................
3 . La perspective critique......................
.....................33
......................35
3.1 La manipulation ......................
3.2 La création de faux besoins ....................................37
3.3 Un biais culturel ....................................................38
-41
C. État de la question ...............................................................
1 . Critique du schdma mécaniste de la communication .......... 42
2. Critique des approches quantitatives .................................54
D. Conclusion........................................................................... 58
.
.
.
.
.
.
Chapitre 11
Élbments pour une problématique
A . Introduction ........................................................................ 60
B . L'image publicitaiie: un phtnomène cultuml ...........................62
1 . Quelques remarques au sujet de la culture .........................62
2. Culture et image ............................................................64
3. Culture et publicité ........................................................ 68
C . Vie sociale et imaginaire ...................................................... -70
1. Le symbolique ............................................................... 72
1.1 Le problhe de la signification ..............................76
1-2La sémiologie .......................................................81
1.2.1 Le signe. le signifiant et le signifid ................84
1.2.2 Dénotation et connotation ............................ 85
1.2.3 La rhétorique ..............................................86
2. Le mythique .................................................................
-87
D. Conclusion ........
Chapitre III
Méthodologie
Introduction ........................................................................92
Présentation du corpus ..........................................................92
Question de recherche ......................................................... 96
Principes d'analyse .............................................................. 97
1 . L'intertextualité ......................................
............
2. L'interactivité .............................................................
Les messages iconiques ......................................................
1 . Méthode d'analyse .......................................................
2. La grille d'analyse ......................................................
2.1 Les figures du temps ...........................................
2.2 Les figures de l'espace ........................................
2.3 Les figures du corps ...........................................
2.4 Les figures de Fimaginaire .................................. 113
HypMh&se ....................................................................... 115
.
.
G.Conclusion
.......................................................................
116
DEUXIÈME PARTIE
Chapitre IV
Les figures du temps dans la publicité
A . Introduction ......................................................................
B .Temps social et pubticité.....................................................
1. Le temps biographique.................................................
1.1 La premii?reenfance ........................................
1.2 La deuxihe enfance ..........................................
1.3 LRs jeunes adultes ..............................................
1.4Le mariage ........................................................ 139
1.5 La famille .......................................................... 139
1.6 La vieillesse ....................................................... 141
1.7 La mort ............................................................ 143
2. Le temps historique .................................................... 146
..................... 147
2.1 Le temps des an&tm ..............
2.2 Le temps premier ..................... .................... 149
2.3 Le temps contemporain ....................................... 150
2.4 Le temps de i'avenir............................................ 152
3 . Le temps géd ............................................................. 153
3.1 La journée ......................................................... 155
3.2 La semaine et le mois ......................................... 155
3.3 Les saisons ....................................................... 156
3.4 L'année ........................................................... 157
4. Le temps des rituels ..................................................... 157
C . Conclusion ........................................................................ 160
.
.
.
.
.
Chapitre V
Les figures de l'espace dans la publicité
A . Introduction ..................................................................... 162
B . Espace et publicité ............................................................. 163
1 . L'espace interstellaire .................................................. 164
2. L'espace monciial ......................................................... 165
3 . L'espace national ......................................................... 166
3.1 Les hts-unis.................................................... 166
3.1.1 La Californie ........................................... 168
3.2 L'ex-URSS ........................................................170
3.3 Le Cana& ..........................................................171
3.4 L'Amérique latine .............................................. 171
3.5 L'Europe ...........................................................
172
3.6 L'Asie ..............................................................
173
3.7 Les pays arabes .................................................. 174
3.8 L'Océanie .......................................................... 174
3.9 L'Afrique ..........................................................
174
4. L'espace infranational ou oomrnunautaire ...........*.......... 175
4.1 Le rural ........................*...................................
176
4.2 L'urbain ............................................................
178
....................................................
5. L'espace domestique
182
6. L'espace autre ............................................................
186
7. L'espace niigieux .......................................................
189
8. L'espace cosmologique.................................................
8.1 L'eau ...............................................................
8.2 Le feu ..............................................................
8.3 L'air .................................................................
8.4 La terre ...........................................................
C. Conclusion .......................................................................
Chapitre VI
Les figures du corps dans la publicité
A . Introduction
.....................................................................
B . La mise en scène publicitaire du corps .................................
1. La tête .......................................................................
2. Le visage ........*..*..............................*.....*..**...........*..
3. Les yeux ....................................................................
4. Le nez ........................................................................
5. Les oreilles .................................................................
6. La bouche ..................................................................
7. Le cou ......................................................................
8. Les épaules ...............................................................
9. Les bras ....................................................................
10. Les mains et les doigts ...............................................
11. Les seins ...................................................................
.
.
.
.
.
.
..................................................................
12 Le coeur
13 Le dos .....................................................................
14 Le ventre et le nombril .............................................. 213
15 Les hanches .............................................................. 213
16. Les fesses ................................................................. 214
17 Les organes genitaux .................................................. 214
216
18 Les jambes et les pieds
19. Le squelette et la m~phologiedu corps
217
...................................
219
C. Le corps de l'homme et de la femme
1 L'homme .................................................................... 220
2 La femme ............................................................
223
.......................................................
225
D. Le corps et la sexualité
E. Le culte de la bonne forme physique ................................... 228
1. Modernité et décontraction ........................................... 228
2. La virilité ...................................................................229
3. Les lieux sportifs ......................................................... 230
4 Les sports d'équipe ..................................................... 231
F. Conclusion ....................................................................... 231
.
.
.
..............................................
.......................
Chapitre VI1
L'imaginaire dans la publicitd
A . Introduction ................................................................... 234
B . Les personnages et les animaux mythiques ........................... 235
1. Les personnages humains ..............................................236
1.1 Les stars ........................................................... 237
1.1.1 Les stars de cinéma d'hier .......................... 237
1.1.2 Les stars de cinéma d'aujourd'hui ............... 238
1.2Les gens cé18bres ................................................ 239
1.2.1 Les sportifs .............................................. 239
1.2.2 Les politiciens et les militaires .................. 240
1.2.3 Les peintreslchanteurdd6couvreurs ............ 241
1.2.4 Les savants .............................................. 241
1.3 Les personnages de contes et de légendes............... 241
............................. 245
1.4 Les personnages institutio~els
1.5 Les personnages de la bande dessinée .................... 248
1.6 Les personnages fictifs ....................................... 249
2. Les animaux et les insectes............................................ 249
2.1 Les chiens et les chats ......................................... 251
2.2 Le cheval ........................................................... 252
2.3 Lm animawr sauvages ......................................... 252
2.4 La faune traditionnelle ........................................ 254
2.5 Les oiseaux ........................................................ 256
2.6 Les insectes ....................................................... 258
2.7 Le monde de l'eau ..............................................259
C. Standing et publicit6 ........................................................... 260
1. Les personnages .......................................................... 261
2. Les objets ..................................................................263
3. La marque .................................................................. 265
4. La culture ................................................................. 266
4.1 Lm ................................................................ 267
4.2 La musique ........................................................ 267
4.3 Le plaisir des sens .............................................. 268
5. Les espaces de la richesse ............................................. 268
6. Les sports et les loisirs ............................................. 269
7. L'argent ..................................................................... 270
D . Conclusion ........................................................................ 271
CONCLUSION ............................................................................ 273
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................ 279
Auteurs cités ......................................................................... 279
Auteurs consultés .............................................................. 301
ANNEXE A: Le temps
ANNEXE B: L'espace
ANNEXE C: Le corps
ANNEXE D: L'imaginaire
Introduction
Comme objet de discussion, La publicité peut déclencher des réactions
favorables ou hostiles. Partout dans les milieux académiques et intellectuels,
par «principe»,il existe un cynisme certain qui condamne la pub!icité à cause
de l'utilisation fréquente de symboles et d'images faisant appel à des clichés
ou goûts vulgaires (McCracken, 1982; Olson, 1995). Pourtant, selon
Boorstin, cette attitude est malsaine et contre-productive d'un point de vue
scientifique: «Notre zèle frénétique à dénoncer la publicité, notre peur de la
publicité et notre incapacité à la faire phétrer dans les vieilles alvéoles
familières de l'expérience - tout cela empêche d'en considérer la
signification universelle de pierre de touche de notre concept changeant du
savoir et de la réalitem (Boorstin, 1971: 309).
Bien sQr,se concentrer sur les images publicitaires, comme on le fera
dans cette thèse, c'est décider de travailler presque exclusivement sur des
oeuvres de fiction tout en leur accordant un statut de documents. Depuis
plusieurs décennies déjà, des disciplines, telle la sociologie, ne se satisfont
plus de sources dites classiques. Comme l'ont rappel4 Ferro (1975: 13),
Giroux (1988) et Frith (1997), des pans entiers de recherche font maintenant
appel aux traditions non écrites, à la culture orale, aux corpus de légendes ou
à la publicité. Toutes ces formes cultureIles fonctionnent en effet comme des
révélateurs qui permettent de dresser un tableau éclairant d'un imaginaire
collectif, à la fois comme «témoin de son temps» et source de clichés
culturels. Cet aspect est décrit par Moles (1%9) lorsqu'il présente l'image
publicitaire comme une construction de l'expérience en société et un
document à caractère éducationnel.
Le discours pubticitaire est d'autant plus important qu'il est à la fois
matraquage et redondance, qu'il suggere généralement la vraisemblance de
l'histoire racontée tout en rendant très humains les personnages. Certes les
statistiques établies ne sont pas toujours sûres, mais elles permettent
néanmoins de situer la publicité de façon objective dans la société moderne.
En 1995, l'ensemble des sommes consacrées à la publicité au Canada était
d'environ 20 milliards $, tandis qu'aux États-unis, Adverfishg Age évalue
que les investissements publicitaires s'élevaient à 160 milliards $ pour la
même période.
Au-delà de la publicité, qui est là comme un arbre cachant la forêt, la
visibilité étend son impératif et bouscule l'ancien partage entre privé et
public. On retrouve de la pubiicitb dans les journaux, les magazines, à la
télévision, à la radio, sur internet et sur les panneaux-affiches. Qui plus est,
elle apparaît maintenant sur les camions, dans le d t m et les autobus, sur le
toit des taxis, sur les insignes, les banderoles, les casquettes, les nappes, les
briquets, les stylos, les cartons d'allumettes, les billets de spectacle, les sacs
de provisions, les macarons, les parcomètres et les gaminets. Il y a même de
la publicité sur les coquilles d'oeufs, dans les sailes de bains, sur les bancs des
parcs et sur les poubelles!
En 1991, McKenna (1991) évalue que les Américains sont
potentiellement exposés à 3 000 messages par jour, ou 1 095 000 publicités
chaque année. À titre de comparaison, Raymond Augustive Bauer et Stephen
Greyser (1968) estimaient qu'au milieu des années soixante Les
consommateurs étaient exposés iî 350 messages publicitaires par jour.
Ces éléments signalent à la fois l'importance de s'interroger sur ce que
dit la publicité et l'exigence de considérer le phénomène publicitaire comme
un mode d'acculturation typique des sociétés développées. En décrivant la vie
quotidienne, la publicité parle du choc des générations, des hommes et des
femmes, ce que sont les traditions, la culture ou le statut social. Pour
paraphraser Mattelard, les créateurs publicitaires posent et exposent des
styles de vie: comment on s'habille et on se déshabille, comment on travaille
ou on s'amuse, comment on sera éternellement jeune, aimé et heureux, ce
qu'est la réussite et l'amour, comment on perçoit les relations familiales et
interpersonnelles. Les thèmes et les mythes de la publicité contribuent ainsi à
construire les grands mythes
- Progrès, Abondance, Loisirs, Jeunesse et
Bonheur.
Discours de l'expérience en société, la publicité a donc des fonctions
latentes d'ordre culturel. Comme le fait remarquer Friedman (1971), la
tendance actuelle des études consacrées iî la publicité est de acontester une
fonction économique à la publicité et, par contre, de souligner l'importance
de sa fonction "affective", "symboiique", ou "culturelle"». La publicité est
considérée alors comme un fait social dynamique en relation avec son
contexte, toujours en train de se faire, avec ses esquives, ses détours et ses
plissements.
«La publicité est l'une des faces les plus visibles de la société
(...) et son utilité se confond avec tout le tissu social» (Bogart,
1984: 1).
«La publicité est un des plus importants facteurs qui
contribuent à façonner la vie d'aujourd'hui. Elle est
omniprésente; même si vous ne lisez pas le journal ou ne
regardez pas la télé, vous ne pouvez échapper à l'emprise des
images qui envahissent l'espace urbain. Elle est dans tous les
médias, sans exception aucune, au point de former une
immense superstructure avec son existence autonome»
(Williamson, 1978, 11).
«[La publicité] fait, dans nos vies, plus que vendre des produits.
Elle est éducative et culturelle dans le sens le plus développé,
car elle se trouve à la base du sens à domer à la structure de
notre société» (Key,1981: 182).
À l'instar du film, de la télévision et du roman, la publicité est un lieu oii
s'expriment la conception et l'interprétation qu'une société se fait d'ellemême. Dépassant sa vocation de wendeum et de «persuasion», à laquelle
trop souvent les chercheurs veulent h tort la réduire, la publicitb est aussi un
construit. Globalement, l'image publicitaire est porteuse de sens (Goldman et
Papson, 1996). Elle est l'un des moyens qu'a la soci6t6 de parler d'elle-
même, au même titre que ses discours politiques, ses rites de mariage, de
mort, de naissance, etc. Elle est un mode de production de l'imaginaire et
l'une de ses manifestations particuli&res.
Les chercheurs constatent que le discours publicitaire exprime une
«vision du monde»: structure de l'espace et du temps; structure des acteurs
sociaux; structure des thèmes, des symboles et des mythes; autant d'éléments
qui constituent l'architecture invisible de l'ueuvre publicitaire, révélatrice
d'une conception de la société. L'étude de la publicité permet alors de mieux
saisir l'«imaginaire social».
«La publicité décrit les objets qui sont disponibles à la vente à
un moment donné. Ceux-ci rendent compte de l'état de la
technologie, des styles et des modes dans le vêtement,
l'ameublement et d'autres produits. (...) Elle nous fournit
amplement les indications nécessaires à la compréhension du
rôle social (ou à tout le moins elle le suggère) de produits
variés» (Marchand, 1985: 165).
<<Unechose que la publicité peut faire est de répandre
l'information touchant le système des valeurs de la majorité à
une plus large audience. Alors, en un sens, elle fait savoir à une
partie de notre culture ce que le systeme prédominant
représente, tel qu'il est refléte par le message et la mise en page
de la publicité)) (Sissors, 1978: 30).
Par le biais d'une combinaison d'images, de paroles, de gestes et de regards,
la publicité dessine les contours de la socibté. Elle rapporte une abondante
information concernant toute une civilisation, sa vie matérielle et les
fantasmes collectifs dont elle est imbnquk (Atwan, 1979: préface). Les
définitions et les enjeux qu'elle soulève sont alors actualisés par des pratiques
et des discours multiples, différents, qui s'entrecroisent, s'entrechoquent et se
disputent leur sens.
À la fois divertissement. entreprise commerciale et phénomène
culturel, la publicité est un élément de l'édification de l'imaginaire collectif.
À titre de construit, la publicité s'inscrit dans la lignde des ph6noménes
mythologiques et symboliques. On parlera donc de la publicité en tant que
construit d'un imaginaire social. «La relation spectatorielle sera d'abord un
va-et-vient entre le réel et l'imaginaire où "le réel est en quelque sorte
imaginaire, et l'imaginaire est en quelque sorte réelw»(Morin, 1969: 29).
Mythe contemporain certes, mais dont l'origine trouve sa source dans
l'antique besoin éprouvé par l'homme de conter et de raconter le monde, de
l'expliquer et de le mettre en images. D'où la nécessité de s'intéresser à
l'image publicitaire.
A. PRÉSENTATION DE LA RECHERCHE
Dans cette étude, nous voulons jeter un regard sur la société à travers les
images publicitaires. On cherche à savoir ce que la publicité iconique raconte
sur la société occidentale. La publicitk sera donc comprise en tant que
construit. Cette thèse ne s'intéressera donc pas à la production ou aux effets
de la publicité; on ne cherchera pas non plus i établir des différences entre la
publicité canadie~edes années trente et des m é e s quatre-vingt; ni A
comparer la publicité demande à la publicité canadienne ou française. Nous
voulons plutôt aborder l'image comme un univers de signes et un mode de
signification qui relèvent de la sémiologie du point de vue de la méthode.
Cet essai est constitué de deux parties et subdivisé en sept chapitres.
Dans la première partie, on procède à une revue de la littérature et à un état
de la question (chapitre 1). puis on fait état du cadre thiorique privilégié
(chapitre 2). Dans le chapitre suivant, on décrit la méthodologie de
recherche, i.e. le corpus, la question de recherche ,les principes d'analyse, la
grille d'analyse et l'hypothèse (chapitre 3). Cette première partie constitue la
base théorique de cette thèse.
Dans la deuxième section, on présente les rbsultats de l'analyse.
D'abord, dans les chapitres 4 et 5, on expose la signification du discouts
social sous les angles du temps et de l'espace, Le temps et l'espace sont
considérés comme des a priori de toute expérience et de toute reprdsentation.
Ils instruisent et apprennent des choses sur la figuration
- sur 1'imaginîi.m.
«Si on lit les sociologues», &rit Moscovici, «on constate qu'il y a une
diversité des conceptions, des notions d'espace et de temps, liée pratiquement
à chaque peuple, à chaque civilisation» (Moscovici, 1983: 261). L'expérience
se déploie dans l'espace et dans le temps, mais l'espace et le temps sont
constamment construits, traduits ou exprimés par l'entremise d'images
publicitaires.
Dans le chapitre 6, on s'intéresse aux diffdrents types d'&?changesnon
verbaux entretenus sur le plan corporel: mise en scène du corps, de la bonne
forme, de la sexualité et de l'image corporelle de l'homme et de la femme.
Quant au chapitre 7, il porte sur l'imaginaire dans la publicite iconique.
A
cet effet, on a identifié deux thèmes dominants de cette fiction dans le
corpus. On présente tout d'abord les différents types de personnages
mythiques (humains et animaux) que l'on retrouve dans l'image publicitaire.
Ensuite, on s'intéresse au culte du luxe et ii la recherche du statut social
imaginaire dans la publicité.
On retrouve en annexe les images comment&x dans les quatre
chapitres du développement (chapitres 4, 5, 6 et 7). Pour faciliter le
repérage, chaque chapitre correspond à une lettre de l'alphabet. Ainsi, les
images du chapitre 4 portant sur le temps sont classées dans l'annexe A; les
images du chapitre 5 sur l'espace dans l'annexe 8; les images du chapitre 6
sur le corps dans l'annexe C; et les images du chapitre 7 sur l'imaginaire
dans l'annexe D. Par ailleurs, pour faciliter la consultation, les images
publicitaires ont été cataloguées numériquement.
Cette
étude a voulu répondre A une triple exigence méthodologique,
On a d'abord tenté de collecter, de répertorier et de synthétiser les
informations déjà disponibles (chapitre 1). On a ensuite cherché à organiser
ces informations selon une problématique théorique qui a servi de fil
conducteur (chapitre 2 et 3). On s'est efforcé, enfin, de privilégier une
forme de présentation que l'on a voulu pédagogique, tant par l'ordre
d'exposition du texte que par les illustrations et les exemples dont elle est
assortie (chapitres 4, 5, 6 et 7).
Évidemment, les tentatives pour etablir une classification des images
ne sont pas nouvelles. Mhestier propose une classification en quatre types:
les images d'art, les images persuasives, les images scientifiques et les images
symboliques. Plecy (1971) suggère une classification des photos en quatre
genres: la photo technique, la photo tdrnoin, la photo d'art et la photolangage. Taylor, Grubbs et Haley (19%) ont construit une typologie basée
sur quatre catégories: la séduction, le spectacle, l'amour et l'humour. La
recension des écrits révèle toutefois l'absence d'analyse sociologique et de
recherche portant sur l'ensemble des thèmes développés par l'image
publicitaire, ce que déplore d'ailleurs Cossette (1985), Victoroff (lm)et
Barthes (1980: 76). Certes, l'image a été abordée du point de vue esthétique,
sémiologique et des effets, mais elle a été délaissée par les spécialistes qui se
sont en général peu penchés sur le discours publicitaire dans sa globalité. À
cause de cela, on ne dispose guère aujourd'hui d'ouvrages critiques ou de
répertoires portant sur le discours de l'image publicitaire dans son ensemble.
Or, l'image constitue de nos jours un support important en publicité et aucun
chercheur universitaire ne songerait aujourd'hui à considérer l'image comme
un simple attrape-regarct.
On souhaite que ces analyses d'artefacts publicitaires puissent fournir
des pistes intéressantes pour la recherche ultérieure. On espère également
que les informations recensées et articulées dans ce document (avenues
théoriques, empiriques et bibliographiques) s'avereront utiles pour
quiconque désire s'initier à une approche sociologique de la publicité
iconique.
Chapitre premier
Revue de littérature et
état de la question
A. INTRODUCTION
La publicité a été l'objet de nombreuses prises de positions de la part de
ceux qui la pratiquent, qui l'observent ou
la critiquent. Dans ce premier
chapitre, on traite des traditions dominantes et des grandes problernatiques
soulevies par Les scientifiques qui se sont intéressés à la publicité, Ce
faisant, on évoquera les principaux discours et les critiques qui ont permis
de rendre compte d'une appréhension plus raffinée de la problématique liée
à la place qu'occupe la publicité dans la socidté.
C e chapitre contient deux sections. Dans une première section, on
expose Ies arguments des uns et des autres.
Dans une sorte de revue de la
littérature, on fait un court historique des representations que les
chercheurs se sont donnés de la publicité. Dans une deuxictme section, on
procédera à un état de la question: on s'interrogera tout d'abord sur le
modèle dominant de la communication implicitement véhiculé par la
recherche sur la publicite. On examinera ensuite la theone classique de la
communication ainsi que les approches quantitatives.
B. REVUE DE LA LITTÉRATURE
Dans cette première section, on distingue trois grandes traditions dans
l'étude de la publicité. On s'intéressera tout d'abord à deux traditions
disciplinaires - la perspective économique et la perspective sociologique.
Par la suite, on jettera un regard sur la perspective critique, une tradition
plus spécifiquement intellectuelle, au sens de la critique intellectuelle.
1. La perspective économique
La première grande tradition d'analyse de la publicité est de type
économique. Il est difficile de citer une oeuvre maîtresse dans la
perspective économique, tant sont omniprésentes plusieurs prises de
position qui critiquent ou qui analysent.
En étudiant de façon détaillée la publicitb, Dow (1974) présente une
definition économique de la publicite qui est reprise dans de nombreux
manuels. «En ce qui concerne la publicité, nous pouvons affirmer sans
crainte d'erreur que son principal objectif est d'influencer le chiffre
d'affaires de la compagnie» @ow, 1974: 461). Reprenant les descriptions
de la publicité faites par plusieurs économistes, Brisoux résume le
phénomène en disant que Ia publicité est d'abord a n e communication de
masse ayant un but économique» (Brisoux et col., 1986: 28).
Le discours économique classique attribue géndralement à la
publicité un rôle strict d'information factuelle: description, taille, couleur,
prix, etc. Le consommateur est décrit comme rationnel; il a la capacité de
faire la différence eritre les diffdrents produits qui lui sont offerts. Mieux
encore, il connaît le prix des produits et peut ainsi comparer. Cette maniere
d'aborder la publicité a dominé les écrits de la plupart des économistes
professionnels jusqu'à la fin des années soixante.
La recherche économique s'intéresse à l'étude des investissements
publicitaires en général, notamment dans les méùias, pour les produits et
chez les entreprises. Sur le plan économique, la publicité serait utile et
nécessaire au développement des entreprises et du libre-marché (Nicosia,
1974). Elle finance les médias; elle favorise une bconornie compétitive; elle
concourt à étendre les marchés; elle accroît la production; et elle contribue
à créer des emplois. Mais surtout, les économistes estiment que la publicité
est un outil permettant d'écouler la marchandise. En majorant la
consommation, la publicité contribuerait ainsi à augmenter la production et
à permettre des économies d'échelle, lesquelles favoriseraient à leur tour la
diminution des prix des produits.
Un ensemble considérable de travaux d'économistes tend à accorder
de facto à la publicité le pouvoir de persuader. «Le pouvoir de persuasion
est capital dans toutes les sociétés. (...) En matière de publicité
commerciale, il est un instrument exceptionnel de contrôle des entreprises
sur la masse des consommateurs dans une économie de marché»
(Lindblom, 1977: 13). L'historien de l'économie Schumpeter va plus loin
et estime que le consommateur n'est pas libre. d e choix de l'homme n'est
pas libre. (...) L'économie et la société ont leur propre dynamique. Il
s'ensuit que les individus et les groupes se comportent selon certains
scénarios, quels que soient par ailleurs leurs désirs» (Schumpeter, 1975
:129). Ainsi, le consommateur réagirait machinalement, guidé par
d'obscurs désirs. 11 serait passif et manipulable.
La plupart des économistes estiment que la publicité est orientée vers
le déclenchement d'une action que le «récepteur» est prié d'accomplir dans
son propre intérêt. La publicité chercherait ainsi ii créer des automatismes
par la répétition d'informations simples. Certains auteurs comme Dow
croient qu'il y aurait aussi dans la publicité une part de distance, une
insouciance, un jeu de sens. «En grande partie, la publicité ne cherche pas à
informer. Elle vise plutôt à donner à l'annonceur le moyen de gruger la
clientèle de ses concurrents en agissant directement sur les goûts des
consommateurs» (Dow, 1974: 462).
Une approche économique nouvelle tente depuis de dépasser la vision
traditionnelle en intégrant les découvertes de la psychosociologie et de la
psychologie de la consommation. Le ton fut do& initialement par les
économistes Borden (1947) et Duesenberry (1%7). Selon Borden, la
publicité ne crée pas de «pattern de consomrnation>p.Dans le même sens,
Duesenbeny conclut qu'il est faux de prétendre que les consommateurs
sont manipulés à leur insu par la publicité. En fait, les gofits et les
préférences des consommateurs seraient au contraire relatifs à ceux des
autres consommateurs; et tous les goQtsdu public seraient le résultat du
caractère de la culture en place
- et non pas de celle «créée» par
la
publicité. La théorie de Duesenbeny est fondée sur l'idée selon laquelle les
gens observent et évaluent les produits qui les entourent en fonction de ce
qu'ils possèdent et de ce qu'ils croient être un produit désirable. Selon
Duesenberry, cette croyance serait fondamentale dans le caractère d'une
culture. «Il [le consommateur] ne recherche pas la supérioritb sociale mais
l'appartenance sociale))(Duesenbeny, 1%7: 26).
Théoriquement, les livres The Affluent Society (19%) et The New
Industrial State (1%7) correspondent à l'apogée d'une période triomphante
de l'économie de la publicité. En s'intéressant à la fois à la publicité et à
l'économie, Galbraith lie la survie de l'industrie publicitaire à la logique du
système capitaliste. Dans l'ensemble, la position du postulat néo-libéral en
ce qui a trait
la publicitd peut être résumée ainsi: la publicité assure la
rentabilité des entreprises, car elle permet de convaincre le consommateur
qu'il veut et a Sesoin de produits (Galbraith, 1958). Essentiellement, une
annonce publicitaire est constituée d'un message persuasif: convaincre
d'acheter, d'agir ou de penser de telle ou telle façon, et ce, à court, moyen
ou long terme. Pour Galbraith, le consommateur n'est pas souverain; il est
plutôt manipulé par la publicité. En fait, la publicité créerait une distorsion
de la demande.
En raison de ses visées commerciales, la publicité devra être
attractive et persuasive. Elle fera appel non pas à des besoins de base mais
plutôt à des motivations psychologiques, telles la vanité, l'envie et
l'insécurité (Galbraith: 1958). Pour assurer leur survie, les entreprises
seraient donc condamnées à faire de la publicité. Ainsi, les tenants de la
thèse économique et néo-libérale prennent généralement pour acquis que la
publicité a la capacité de différencier les produits, de persuader les
consommateurs et d'augmenter les ventes.
2. La perspective sociologique
Parmi les sciences sociales, la sociologie fut sans doute la première à
aborder les questions de publicité. Aussi trouve-t-on, dans les études
spécialisées, une multitude de modèles qui s'intéresse à la façon dont la
publicité lie les objets de consommation à des représentations sociales.
SeIon le cas, on tente de décrypter l'imaginaire publicitaire (thèmes,
représentations, façon d'interpréter le monde et rapports sociaux) ou on
s'intéresse aux effets de la publicité.
D'un point de vue sociologique, l'étude de la publicité permet de
comprendre comment s'articulent de l'intérieur les «significations sociales
et culturelles intrinsèques à la publicité». Dans l'ensemble, les recherches
privilégient quatre pôles d'intérêts. La publicité est: 1) un phénomène
culturel; 2) un système symbolique; 3) un processus d'uniformisation
culturelle; et 4) un outil de contrôle social.
2.1 Un phénomène culturel
Plusieurs auteurs dont Leiss, Kline et Jhrilly (1986) estiment que la
publicité joue un rôle dans la transmission de la culture. Pour ceux-ci, les
institutions sociales ne sont pas inventées; elles évoluent, et la publicité est
devenue l'un des nombreux agents de transmission de la culture.
La publicité agirait comme un agent de socialisation: comment on
imagine les relations interpersonnelles et la famille, les stéréatypes sexuels,
I'influence des jeunes générations, la mode, etc. Laurence Bardin, par
exemple, conçoit la publicité comme un venicule culturel, un catalyseur.
Ainsi, la publicité, agile à stimuler le brouillage, «fabrique du sens, fait
passer les produits du monde de L'avoir au monde de l'êtrem (Bardin, 1975:
259), rendant les objets dépositaires d'un pouvoir de représentation
colossal» (Peninou, 1972: 216).
La publicitd aurait aussi un r6le de relais culturel. Absorbant Ia
culture ambiante, elle la renforcerait en la diffusant de manière répétitive.
L'annonce publicitaire véhiculerait alors des modèles de comportement
déjà préexistants dans la société.
(<[Lapublicitk] nous prie, sans nous l'imposer, d'acheter tel
bien, de telle marque et de tel type; simultanément, elle nous
suggère que cet achat nous améliorera socialement, en nous
donnant plus de prestige ou de puissance, et nous fera ainsi
participer mieux au consensus diffus qui fait la valeur d'une
culture» (Lagneau, 1977: 110).
Le comportement social des acteurs procède de niodèles, d'images et de
représentations. Or, la valeur straeégique de la publicité serait précisément
de toucher chacun en fonction des autres.
<Jamaiselle ne s'adresse ki l'homme seul, elle le vise dans sa
relation différentielle, et lors même qu'elle semble accrocher
ses motivations "profondes" elle le fait toujours de façon
spectaculaire, c'est-&-dire qu'elle convoque toujours les
proches, le groupe, la société tout e n t i h hiérarchisée dans le
procès de lecture et d'interprétation, dans le procès de fairevaloir qu'elle instaure» (BauddIard, 1974: 84).
La publicité fournit à l'acteur social, une façon de se différencier, de se
situer dans la hiérarchie sociale. Elle confère des attributs aux objets qui,
lorsque mis dans des situations ou des contextes particuliers, prennent toute
leur signification et leur valeur de différenciation sociale. Selon Quesnel:
«Les publicitaires sont des agents culturels importants quoique souvent
inconscients de leur rôle. Dans les sociétés industrielles modernes, la
publicité pourrait bien devenir, pourvu que l'évolution culturelle s'y prête,
toute la philosophie d'un monde sans philosophie>>
(Quesnel, 1971: 56).
2.2 Un système symbolique
Pour Baudrillard (196û), la publicité apparalt non seulement comme un
discours sur un objet de consommation, mais elle est aussi un objet
idéologique immédiatement consommable. En fait, la publicité
entretiendrait un rapport avec ce que Baudrillard appelle l'«idéologie de la
consommation^ (Baudrillarâ, 1968). Cette idéologie de la consommation
sous-entend que des significations sociales sont à la fois associées et
communiquées par les objets (Gottdiener, 1985). Aussi, la société de
consommation ne serait pas tant une société d'objets accaparés comme tels,
mais une société d'objets consommés pour leurs valeurs signes: signes de
prestige, d'appartenance à une classe sociale, à une gen6ration, signes
d'aisance, etc.
La publicitd joue des signes, fait intervenir ceux-ci et rejette
momentanément ceux-12~Mais la sociétk de collsommation récupère aussi
ses propres modes et propres mythes. La panoplie d'objets renvoie alors ik
un système symbolique. Dans Le système des objets (1%8) et Pour une
économie politique du signe (1972), Baudriiiard rappelle que tout l'univers
socioculturel humain se compose de signes décryptables et utilisables qui
constituent un système d'échange économique et social. Le concept de signe
fait intervenir ici la notion d'arbitraire et ce qui sera «arbitraire, c'est que
tel signe, et non tel autre, soit appliqué à tel élément de la réalité, et non à
tel autre» (Baudrillard, 1972: 183). La publicité ordonne ainsi une
socialisation ritualisée par l'échange symbolique: «L'achat, la vente,
l'appropriation de biens et d'objets-signes différenciés, constituent
aujourd'hui notre langage, notre code, celui par où la société entière
communique et se parle» (Baudrillard, 1974: 112).
2.3 Un processus d'uniformisation cuiturelle
Pour plusieurs sociologues, le phénomène publicitaire n'a jamais cessé de se
développer, de se généraliser et de s'universaliser depuis la fin de la
Seconde Guerre mondiale. C'est ce qui fait dire au publicitaire de Benetton,
Toscani, que la publicité est l'un des nombreux facteurs qui concourt à
donner naissance à une monoculture (1995: C-1).Ainsi, des modes de
comportement social, les formes de l'échange, les structures de la
communication sociale se transforment selon un processus d'uniformisation
progressive» (Jeudy, 1977: 15).
À travers les produits de consommation, la publicité diffuserait des
attitudes et des représentations qui favorisent un certain consensus social,
plus précisément, une certaine américanisation du discours (Zandpour,
1994; Tai, 1997). Ce faisant, la publicité devient lentement un langage
universel, un nouveau référent international sous L'impulsion des échanges
commerciaux internationaux et des moyens de communication sans cesse
plus nombreux. «Nous avons aujourd'hui la possibilité d'élaborer une
conscience universelle à travers des systèmes et des moyens de
communication auxquels accèdent simultanément des millions d'individus»,
remarque Cebrian (1992: 8).
Remise au goût du jour par un article de tevitt (1983: 92-102),
l'actuelle uniformisation publicitaire s'appuie sur quatre constatations: 1)
grâce aux moyens de communication le monde devient un village global; 2)
la taille du marché n'est plus nationale, mais mondiale; 3) le mode de vie
urbain est dominant; et 4) partout dans le monde, les mêmes tendances
lourdes se font jour (émancipation du troisième âge, développement de
l'individualisme, jeunesse a m é r i h k , etc.).
Toutes ces observations permettent à Levitt d'entrevoir l'existence
d'un effet d'homogénéisation oh la publicité constituerait la «nouvelle
scène>, des valeurs et des représentations sociales, des modèles qui
façonnent les pratiques sociales de la vie quotidk~e.Elle permet de faire
jouer sur un même plan les formes de valorisation et les valeurs les plus
s6culaires, la tradition et la modernité; ce qui est valorisé est sirnultankment
modélisé. L'objet exalté par la publicité représente à la fois la valeur, la
marque de distinction sociale et le modèle à suivre. Dès lors, les structures
mêmes du langage publicitaire vont changer. La société de communication
publicitaire va devenir une société oh toutes les techniques de la persuasion
seront utilisées pour que le système socio-économique en place devienne
naturel et indiscutable. Toutes les demandes sociales, toutes les marginalités
sont alors recueillies et réinvesties d'une signification «consensuelle». C'est
ce qui fait dire à Janiwitz que «les mass média, la publicité de masse et les
institutions qui exercent une contrainte légitime occupent une place centrale
dans nos sociétés» (Janowitz, 1978: 23).
2.4
Un outil de contrôle social
Pour plusieurs sociologues, la publicité a une fonction de contrôle social.
On retrouve dans les images de la publicité, tout un univers de jeunesse, de
beauté, d'abondance, de progrès, de santé, de richesse, de sexualité, de
réussite et de bonheur. Les images publicitaires diffusent ainsi des modèles
de comportements et de valeurs.
Laurence Bardin dira de la publicité qu'elle est autoritaire parce
qu'elle véhicule des valeurs, des façons de faire et d'être, en les sacralisant
au niveau des normes sociales et en les situant au niveau du «normal»:
«Les annonces publicitaires (...) édictent bel et bien des
normes, c'est-à-dire des règles vis-à-vis desquelles la
désobéissance répétée, ou tout au moins le refus symbolique,
pourraient amener l'individu à se sentir en situation de
marginalité>i(Bardin, 1975: 65).
Presbrey (1968), auteur d'un livre sur l'histoire de la publicité, croit que
c'est à l'extension des campagnes de publicité à tout un territoire national
que les États-unis doivent leur unité nationale. Les campagnes de publicité
apporteraient en effet une similitude de vues culturelles, cela, en dépit du
mélange ethnique observé dans la société américaine du début du siècle.
Selon Presbrey, les immigrés furent américanisés culturellement tant
au plan des relations sociales qu'à celui des activités politiques.
Graduellement, le spectacle commercial substitua à leur culture d'origine
une conception unifiante du parfait citoyen. On pouvait ainsi créer une
culture nationale et lui donner une cohérence, grâce au lien social de la
consommation, pour mieux diffuser les idéaux, la loi, l'ordre ou la culture
homogène. La publicité contribuerait donc à modeler l'environnement et
les modes de vie, le plus souvent par L'entremise d'images, de signes et de
symboles. Elle permettrait de situer les gens et leur appartenance sociale.
Dans la lignée de Presbrey, Ewen (1982) explique comment les
immigrants fraîchement arrivés en terre américaine s'en remettaient à la
publicité pour adopter I'uAmerican Lookw pour se fondre plus rapidement
dans la masse. D'autres chercheurs, dont Marchand (1985) sont d'accord et
soutiennent que la publicité aurait joué un rôle clé dans L'intégration des
individus, à un moment où les habitudes sociales et économiques aux États-
Unis s'éloignaient des schemes traditionnels, devenant chaque jour plus
complexes et moins personnels.
En somme, Ewen, Marchand et Presbrey voient dans la publicité un
mécanisme idéologique de contrôle social et culturel généré par un certain
type de société particuliérement développée aux États-unis. Us font de la
pubIicité le creuset d'un édifice socioculturel puissant conçu pour favoriser
ce que l'on a pris l'habitude d'appeler la «société de consommation». On y
dénonce l'ampleur et la cohérence des moyens publicitaires que s'est donné
le capitalisme, lequel mènerait directement «à la normalisation de la
culturem.
La principale finalité de la publicité serait d'avoir mis au monde une
culture fondée exclusivement sur la dépense, de manière à permettre
l'écoulement des marchandises (Ewen,1982). 11est donc vraisemblable que
dès son origine, la publicité de masse servit à propager sinon un pouvoir,
du moins une idéologie qui faisait de la famille une unité de consommation
plutôt qu'une unité de production. Marchand et Ewen estiment que la
publicité agirait avec force et puissance; elle aurait l'effet d'une «pédagogie
sociale» capable de changer les croyances d'une société tout entière. Ce
faisant, la publicité ferait figure d'institution centrale dans la société de
masse. «Lorsque nous parlons d'une institution centrale, nous voulons
désigner une institution qui introduit une diiférence essentielle dans les
relations des acteurs sociaux les uns avec les autres. Elle @apublicité] est
centrale, en ce sens qu'elle possède un plus grand pouvoir social sur le
système des institutions que toute autre institution de base d'une société
donnée» (Griff, 1969: 12û-129). La publicité serait une partie importante
de la culture, mais aussi un moyen puissant qui modèle les valeurs et les
sensibilités, tant sur le plan personnel que sur le plan social (Randozzo,
1993: xii).
À long terme, cette culture v6hicul6e par la publicité amanerait les
oens à voir tous les aspects de la vie à travers ce que Thomas Luckrnann
P
(1967: 96-106) appelle une market mentality~.Concrètement, les rapports
humains deviennent abstraits et prennent le caractère des choses et des
produits. Les tenants de la perspective sociologique prennent donc pour
acquis que la publicité est un phénomène culturel et un système symbolique
puissant qui favorise l'uniformisation et le conttôle culturel.
3. La perspective critique
La troisième grande tradition d'analyse de la publicité est celle de la vision
critique, une tradition plus spécifiquement intellectuelle. Les tenants de
cette perspective comptent des marxistes, des anthropologues et des
historiens, et ils sont à la source d'un important courant de réflexion qui
s'est attardé à expliquer et comprendre la publicité comme phénoméne
olobal se produisant dans la société.
b
Pour l'essentiel, les thèses critiques soutiennent que le consommateur
n'est pas libre de choisir et que la publicité lui impose un système de choix
en fonction de besoins créés artificiellement. Plus particulikrement, les
auteurs marxistes considèrent que La publicité est le principal élément pour
créer la demande
- les autres étant l'emballage, le conditionnement du
produit ou packaging, les phénomènes de mode et l'apparition du crédit.
À l'orée des années soixante-dix, plusieurs chercheurs se
reconnaissant dans la tradition critique choisirent d'orienter leur travail
d'analyse vers l'étude de l'action idéologique de la publicité. De nombreux
chercheurs firent référence directement aux conceptions marxistes de
l'idéologie et postulèrent que la publicité est avant tout l'expression d'une
culture fondée sur la sur-consommation. Pour ceux-ci, la publicité fait
partie intégrante du s y s t h e capitaliste et elle est une condition minimale à
la sauvegarde de cette idéologie. La publicité permet de persuader et
d'écouler les marchandises (Baran et Sweezy: 1%6), ce qui s'harmonise
très bien avec la culture capitaliste. C'est ce qui fait d'ailleurs dire à
Mandel (1978: 399) que le secteur des services aurait connu une expansion
importante au cours des dernières années, justement «parce que les
capitalistes auraient éprouvé des difficultés à vendre des produits de
consommation proprement dit» (Mandel: 1978,399).
S'inspirant d'une sociologie marxiste de la culture, le Britannique
Raymond Williams (1980) développa de nouvelles approches tentant de
situer le travail id6ologique de la publicité dans la trame du tissu culturel.
Lasch avança que le capitalisme ne pourrait pas fonctionner sans la
publicité.
«Le fabricant moderne doit éduquer les masses dans la culture
de la consommation. La production massive de biens dans tous
les domaines-l'abondance croissante exige un marché
correspondant. L'économie américaine, après avoir atteint un
point de saturation grâce à sa technologie qui a réussi à
satisfaire les besoins éltimentaires, a maintenant besoin de
créer d'autres besoins chez ce consommateur-elle doit
convaincre les gens d'acheter des produits dont ils ignorent le
besoin tant que les mass média ne les auront pas convaincu de
leur nécessité. (...) La tentative de "civiliser" les masses a
donné naissance à une société domink par les apparencesune société du spectacle» (Lasch, 19î8: 72).
Les visions de l'école critique alimentèrent d'une manière significative les
débats idéologiques concernant le rôle de la publicité dans la société. Dans
l'ensemble, cette argumentation donna naissance à trois prises de position
majeures: 1) la publicité crée la demande en recouzant à la manipulation; 2)
la publicité crée de «faux besoins»; et 3) la publicité entretient un biais
culturel.
3.1 La manipulation
Les marxistes dépeignent la publicité comme un instnunent malsain servant
à provoquer une éternelle insatisfaction chez les acteurs sociaux, le désir de
posséder davantage et d'acheter en grande quantité. Cette croyance en une
publicité toute puissante devient après la Deuxième Guerre mondiale le
cheval de bataille de toute une génération de penseurs marxistes. On
s'intéressait bien sûr aux effets de la publicité mais surtout aux moyens
utilisés pour amver à ses fins.
Dans son livre intitulé Hidden Persuasion (en français, La persuasion
clandestine), le journaliste Vance Packard (1958) se Livra à une charge
féroce contre la publicité et les techniques de vente. Se référant aux études
de Ernest Dichter (1970), Louis Cheskin (1971) et Pierre Martineau
( 1957), l'auteur prétend que les consommateurs sont persuadés ii leur insu.
Selon Packard, des gens
- les publicitaires - se livrent sur une grande
échelle à des efforts souvent couronnés de succès, pour orienter les idées,
les opinions et les choix en matière d'achat, cela à l'aide de moyens
empruntés aux sciences sociales. 11s auraient mis au point une batterie de
techniques commerciales subtiles pour manipuler les consommateurs. Il
écrit:
<<Cesmanipulateurs ont élabore leurs méthodes en s'en
remettant totalement aux sociologues qui se font payer en
quaIité de conseillers "pratiques" ou fondent leur propre
société de recherche. (...) L'époque est révolue où les savants
se bornaient à étudier les objets façonnés par les indigènes des
îles Salomon» (Packard, 1958: 11).
A ce sujet, Packard cita Lloyd Wamer, de lfUniversit6 de Chicago, qui
publia, en 1948, Classes sociales en Amkrique, ouvrage qui devait
provoquer dans les années suivantes une certaine &motion parmi les
spécialistes de la publicitr5. On considh en effet l'analyse de Warner
comme un événement propre à modifier l'art de convaincre le
consommateur.
Le professeur Warner avait conçu l'Amérique comme une société à
six classes disiinctes, dans chacune desquelles le comportement uniforme
était assez prdvisible. Il definissait ces classes non seulement en fonction de
la richesse et de la puissance, mais aussi en fonction des habitudes de
consommation et de sociabilité. Le Journal of Marketing salua la définition
donnée par Warner des classes sociales de l'Amérique comme «le pas en
avant le plus important dans la recherche commerciale depuis de
nombreuses années.>>
La vision orwellienne de Packard fut renforck par la publication
d'une supposée expérience de James V i c q démontrant qu'il était possible
de persuader les individus sans qu'ils en aient conscience, à l'aide de
c<flashes)>publicitaires de 1/100 de seconde. Même si on ne put jamais
répéter l'expérience d'origine, William Key (1972, 1976) publia de
nombreux ouvrages sur la question, alléguant que l'on est chaque jour
exposé à des centaines de messages dits subliminaux. Ces attaques répétées
amenèrent d'ailleurs les gouvernements canadien et américain à légiférer
sur la question, laissant à plusieurs l'impression que la publicité était apte à
persuader les gens d'acheter des produits contre leur volonté.
3.2
La création de faux besoins
Les auteurs critiques ne sont pas tendres ii l'égard de la publicité. Pour le
situationniste Guy Debord (1987, 1988), la publicité fabrique
essentiellement des «pseudo besoins» tandis que Marcuse parle de «faux
besoins».
Marcuse développa la thèse de La colonisation idéologique des
individus par les médias et la publicité. Selon Marcure, les masses en
viendraient, sous l'effet de la publicite, à perdre la conscience de ce que
seraient leurs besoins rdels. Évidemment, cette approche sous-entend que la
publicité est apte à créer une demande susceptible d'influencer 1a
consommation de produits.
L'historien Christopher Lasch (1978), estime que l'objectif principal
de la publicité ne consiste pas tant à vendre des produits qu'à persuader
qu'il n'y a de satisfaction possible qu'en consommant. Ainsi, le bonheur tel
que défini par la publicité résiderait dans L'amoncellement de biens.
Pour Mander (1977), l'individu serait appelé à se réaliser à travers
l'appropriation d'objets. Cela aurait pour effet d'encourager la
manipulation d'autrui et le culte de la consommation. L'objectif de la
publicité moderne consisterait alors à convaincre les citoyens qu'ils sont
avant tout des «consommateursde produits, (Pease, 1958: 1). Mentionnons
que pour certains auteurs, ce n'est pas tant dans une société de
cocsommation que l'on vit que dans un prolongement de la société de
production; la consommation, en tant que mode de vie et structure
économique étant assujettie à la production, n'en étant pas la cause mais
l'effet. «La consommation se trouve soumise au systeme de production qui
lui détermine ses impératifs et ses buts. C'est pourquoi on ne peut parler de
société de consommation», écrit Michel Richard, «le terme "société de
consommation" aurait, en fait, comme fonction de masquer au
consommateur qu'il est avant tout un producteun> (Chronique sociale,
1980: 118-119).
Morris Janowitz (1978) avança que la seule fonction culturelle de la
publicité est d'associer la consommation de produits au bonheur. Pour
l'anthropologue Paul Carpenter, «la publicité a comme principal effet
d'accroître le plaisir éprouvé par la consommation du produit» (Carpenter,
1965: 4).
3.3 Un biais culturel
Au début des années soixante, des critiques de divers horizons
commencèrent à affirmer, exemples à l'appui, que les publicitaires
manquent d'objectivité dans leurs représentations, qu'ils renforcent
stéréotypes et préjugés, perpétuant des images biaisées de la réalité, des
images restrictives occultant des aspects importants de l'environnement
social. Pour les tenants de cette position, certaines cultures sont ignorées,
certaines minorités ethniques et religieuses sous-représentées. On
commence alors à parler de la publicité comme d'un frein culturel. Cette
fois, les intellectuels s'attaquent à la publicité en lui reprochant de ne pas
représenter fidèlement les différentes facettes de la société. On ne se
demande plus si la publicité est culture; on s'interroge plutôt sur le contenu
de la culture véhiculé par les messages publicitaires.
Des variables sociologiques, tels le sexe, le comportement, le
langage, l'apparence physique, ou le statut social font l'objet d'un examen,
de manière à relever l'imagerie culturelle qui se dégage de la publicitd. On
reproche, par exemple, aux commerciaux télévisés d'utiliser exclusivement
des voix hors champ masculines (O'Donnell et O'Donnell, 1978),
d'encourager les images et les attitudes racistes (O'Kelly et Bloomquist,
1976), et de se servir de la publicité comme d'un instrument de pouvoir et
de répression envers les femmes que l'on décrit le plus souvent en termes
d'objets sexuels, de méres ou de femmes de ménage (Warren, 1978: 172).
Les conclusions sont presque toujours les mêmes: la publicité ne
montre pas la diversité culturelle qui prévaut dans la société. Les femmes et
les groupes minoritaires n'y ont pas leur place et, ce faisant, la publicité
conditionne le «savoir-pensem et le «comment se comportem. La publicité
transmet une certaine somme d'informations qui n'a rien à voir avec le
produit mais qui apprend aux gens la façon dont ils doivent vivre, se
comporter, agir, etc. Cela aurait pour effet de ddshurnaniser les relations
interpersonnelles, d'encourager les jugements de valeurs, d'aggraver le
sexisme et le racisme (Cornmanger, 1947, 1950; Fromm, 1955, 1976;
Mannes, 1964), et de favoriser la frustration et la criminalité (Mead, 1960;
Myers, 1978).
Un premier courant important s'intéresse à l'image des femmes
(Dominick et Rauch, 1972; Sexton et Haberman, 1974; Friedan, 1975;
Marnay et Simpson, 1981; Sharits et Larnmers, 1983; Knil, 1981; Poe,
1976; Jaffe et Berger, 1994; Sengupta, 1995; Shields, 1996; Cigognetti et
Servetti, 1996; Stephenson, Stover et Villamor, 1997) et plus récemment à
celle des hommes (Primeau, 1989; Kolbe et Albanese, 1996) dans la
publicité. Dans Gender Advertisements, Erving Goffman (1979) montre
comment la représentation qu'on fait des hommes et des femmes est
codifiée visuellement de façon fort subtile: conunent les acteurs sociaux
doivent agir et interagir, quelles sont leurs attentes et leurs gestuelles
respectives. Ainsi, dans cette imagerie, les femmes sont physiquement
passives, émotionnelles, dépendantes et immatures. Elles possèdent peu
d'habileté. Elles sont incompétentes et on les montre le plus souvent à la
maison, de préférence dans la cuisine ou dans la salle de bain.
Un deuxième courant s'intéresse à la représentation des minorités
dans la publicité (Taylor et Lee, 1994; Snyder, Freernan et Condray, 1995;
Brooks, 1995; Keenan, 1996; Bowen et Schmid, 1997; Taylor et Bang,
1997). L'intérêt pour ce type d'étude débute avec la publication d'une
recherche réalisée par Bernard Berelson et Patricia Salter en 1946. Ces
auteurs avaient alors découvert que les membres des minorités culturelles
étaient rarement montrés dans les magazines américains. Depuis, Dominick
et Bradley ont remarqué que les minorités, spécialement les gens de race
noire, étaient «les hommes invisibles de la télévision» (Dominick et
Greenberg, 1970: 21). En 1949-1950, Cox montrait que les Noirs
représentaient seulement 0,57 % des adultes dans la publicité-magazine.
Une vingtaine d'années plus tard, soit en 1967-1%8, ce pourcentage serait
passé à 2,17 % (Cox, 1969: 604). Cox remarqua que les Noirs présents
dans la publicité occupaient le plus souvent des emplois de second ordre:
valet, cuisinier, serveur, chauffeur. Depuis, il semble que les choses aient
changé, ce qui n'empêche pas de nouveaux observateurs de faire la
remarque inverse. Ainsi, plus récemment, Hentoff (1984) reproche à la
publicité de sur-reprhenter les Noirs en tant que maires, politiciens,
joueurs de basketball ou comédiens.
Un troisième courant, de plus en plus important, met t'accent sur
l'âge des modèles expos6s dans la publicité (Bristol, 19%; Hajjar, 1997).
Dans ce cas-ci, on conclut que les gens 8gés montrks dans la publicité sont
toujours associés à certains types de produits (Hamset Fèinberg, 1977:
466), qu'ils sont souvent des caricatures, des gens anormaux (Singer, 1983,
1986), sans importance et sans individualité (Gantz, Gartenberg et
Rainbow, 1980: 59). De plus, ils seraient ghddement peu présents dans la
publicité (England, Kuhn et Gardner, 1981: 469).
Dans tous les cas, ces analystes - marxistes, historiens ou
publicitaires engagés - s'entendent pour dire que des raisons culturelles
expliquent en partie ces biais. Somme toute, la publicité serait un outil de
propagande essentiel, une sorte d'instrument de persuasion qui assure la
survie du système capitaliste en renforpt la manipulation, la création de
faux-besoins et le biais social tout en favorisant l'écoulement de la
marchandise.
C. ÉTAT DE LA
QUESTION
En parcourant les pages qui précèdent, il apparaît que le point de d w t
d'une réflexion honomique, sociologique ou critique de la publicité repose
principalement sur deux conceptions implicites. Une première conception
s'articule autour du schéma mécaniste de la communication
«émetteur/récepteun>.Conséquemment, la communication publicitaire n'est
envisageable qu'en fonction d'effets mesurables, de son efficacité. Une
deuxième conception est constituée de l'étude empirique des phénomènes
publicitaires ou «analyses quantitatives des phénomhes publicitaires» et
tend, par le recours aux canons de la recherche positive, à constituer un
ensemble de faits scientifiques concernant la publicité. Ces deux
conceptions présentent néanmois plusieurs carences et il n'est pas inutile de
revenir sur le schkma classique de la c O m m u n i c a t i O n
(«émetteur/récepteur»)et les limites de la recherche positive.
1. Critique du schéma mécaniste de la communication
Schématiquement, la représentation sous-jacente qui soutient implicitement
une grande partie de la recherche scientifique sur i'objet publicité repose
sur la distinction «émetteur/récepteun, et introduit entre eux un canal.
Toute publicité devient un message: elle comporte 1) une source
d'émission, qui est la firme à qui appartient le produit, 2) un point de
réception, qui est le public, et 3) un message.
Schéma classiaue de la communication
Essentiellement, on reconnaît d'emblée un pouvoir énorme à la publicité
sur la culture quotidienne et les comportements. La publicité serait
omnipotente. Aussi, s'intéresser à la publicité équivaudrait à s'intéresser
aux effets des messages et aux moyens utilisés pour persuader Les
récepteurs. Selon le cas, on parlera de processus d'uniformisation culturelle
et de contrôle social (perspective sociologique), ou de manipulation et de
biais culturel (perspective critique). De ce point de vue, «on le voit, la
conception classique du texte est empreinte de fixité» (Fossion, 1980: 1718). Tout ce passe en effet comme si le processus fonctionnait à sens
unique, d'un émetteur vers un récepteur.
Sfez (1990) souligne pourtant que cette perspective est trompeuse et
qu'elle cache un modèle thdorique implicite de la communication, à savoir
un modèle mécanique et unidirectionnel simpliste, allant d'un emetteur actif
vers un récepteur passif. «La métaphore de la 'machine' gouverne une série
d'images adjacentes qui donnent le ton. Cette division valorise en fait les
études d'effets, la communication publicitaire devenant, au sens strict, un
phénomène mécaniste simple comportant un émetteur tout-puissant et un
récepteur faible. On peut dire que «la 'machine' est impérative,
dominatrice, toute-puissante. Ces traits et ces éléments ont la vie dure; ils
persévèrent, nous poursuivent» (Sfez, 1990: 42-43).
Évidemment, cinquante années de recherches empiriques auraient pu
contribuer à clore le débat idéologique concernant l'influence de la
publicité dans les sociétés industrielles contemporaines. Malheureusement,
le schéma classique de la communication va structurer de manière
dominante le champ d'étude des communications pubiicitaires. On va
retrouver ce modèle comme base de la description du processus de
communication dans les travaux des économistes, des sociologues et des
critiques. 11 s'ensuit que la question fondamentale en publicité a longtemps
été la suivante: quel est l'impact de la publicité sur la société?
Pour les économistes, l'émetteur devient le plus souvent la firme ou
le média. Il ne faut donc pas s'étonner que les économistes qui posent un
regard sur la publicité s'intéressent en priorité aux firmes et aux médias.
L'analyse concerne le plus souvent l'ensemble des depenses publicitaires en argent - selon le produit, la marque, le secteur ou le pays.
Les analyses économiques présentent la publicité comme un levier
important de l'économie. Pour celles-ci, la publicitk est efficace au niveau
des entreprises (émetteurs). Elle est essentiellement un instrument de
commercialisation; c'est sa raison d'être. La publicité est aussi un facteur
de concurrence. En tant qu'instrument de conquête, elle remet en cause les
positions les mieux établies.
Conséquemment, le rôle des études portant sur la publicité consistera
souvent à éclairer les choix successifs qui se présentent à l'émetteur. Outils
d'aide à la décision, les études interviendront ii chacune des &tapesde la
communication où se posent les questions essentielles. Le régime
concurrentiel incite en effet les chaînes privées de télévision à tester
régulièrement les effets des émissions, à mesurer leur audience pour
évaluer le degré de rentabilité des investissements publicitaires.
La thèse marxiste qui oppose les exploiteurs aux exploités se traduira
en publicité par une dialectique permanente mettant aux prises petits
(récepteurs) et grands (émetteurs) dans un conflit de classe. D'où le
discrédit que subira la publicité. Toute annonce masque ce qu'elle présente.
Le commerce ne va pas de soi, il faut le promouvoir. La publicité offre
aux annonceurs le moyen de promouvoir les ventes en trompant les
acheteurs (récepteurs). Les critiques marxistes identifient alors la réclame
commerciale à la propagande idéologique: elle est manipulation, fauxbesoins et biais culturel.
Les marxistes supposent une publicité puissante et manipulatrice
devant un sujet humain faible et manipulable. En s'attardant au constat
marxiste, on constatera que tous ces éléments se tiennent et s'impliquent
nécessairement. Ainsi, si la masse n'était pas menacée, il n'y aurait pas lieu
de s'inquiéter de l'effet de la publicité. En outre, si les médias n'étaient pas
puissants, on ne serait pas obligé de les étudier et de les combattre. Les
conséquences de l'approche marxiste sont assez claires. Puisque la publicité
est puissante et les sujets faibles, il convient de surveiller, de réglementer et
de contrôler le contenu des médias, leur propriété et leur accessibilité aux
publics.
Le domaine communicationnel lui-même n'a pas été exempt de
manifestations de I'instrumentaliste. Par exemple, l'idée que la
communication produit ou doit produire des effets appartient à la raison
instrumentale parce qu'elle réduit l'être humain à un instrument dont la
fonction est d'être le sujet (émetteur) ou l'objet (le récepteur) d'un effet.
La communication publicitaire n'est pas appréciée en elle-même, mais
uniquement en fonction d'une fin ultérieure - vendre. Conséquemment,
on en amve à croire que la publicité est un instrument puissant, aux effets
multiples, par l'entremise de laquelle on peut persuader les acteurs sociaux.
En fait, l'opinion courante est qu'au moyen de la publicité, on peut faire
croire à peu près n'importe quoi, n'importe quand, à n'importe qui; un
diagnostic qui constitue en fait une véritable idéologie.
Quiconque s'intéresse aux effets de la publicité a entendu parler de la
vente des obligations de guerre par Kate Smith (Merton, 1946), du rôle
qu'ont joué certains pamphlets dans la révolution americaine, et de
l'omniprésence de la radio dans les régimes de Hitler et de Mussolini.
Évidemment, compte tenu des circonstances. plusieurs chercheurs ont
rapidement supposé que la publicité pouvait provoquer des effets chez les
destinataires, que ce soit des changements d'attitudes, d'opinions et de
comportements. C'est cela qui devait amener certains théoriciens de la
communication, notamment Harold Lasswell (1927), h accréditer la
puissance des midias et de la publicité et à concevoir l'être humain comme
un récepteur faible et difficilement capable de faire des choix raisonnés.
Les efforts des sociologues pour comprendre le rôle de la publicité et
des médias donnèrent naissance à des ouvrages expérimentaux dans lesquels
la communication persuasive est systématiquement analysée comme élément
du processus de contrôle social. Pour supporter leur thèse, la plupart des
analystes
-
Lasswell (1927, 1950a et 1950b), Lippmann (1960),
Mannheim (1943), Cree1 (IBO), Kris et Leites (1947) et Kecskmeti (1950)
- utilisèrent des expressions comme «conditionnement»,«viol des foules»,
«propagande» et «manipulation».
On accusa la publicité d'être responsable de L'accent mis sur
l'économie (Fromm, 1955; Galbraith, 1967; Knitch, 1959; Leiss, 1976;
Skolimowski, 1977), de la perte du sens de la communauté, de l'éthique, de
la coopération, de la charité et de la compassion (Beman, 1981; Lasch,
1978; Toronto School of Theology, 1972). En outre, la publicité générerait
une éternelle insatisfaction chez le public. Elle aurait pour effet
d'engendrer le mal de vivre, une recherche de l'hédonisme, le désir d'en
avoir toujours plus, puis éventuellement le désint4ressement de la chose
publique aux dépens de la chose privée, La publicité entmanerait enfïn le
cynisme, la perte de croyance envers l'autorité et la disparition des normes
et des responsabilités (Heilbroner, 1976; Henry, 1963; Skornia, 1965).
Pour plusieurs chercheurs, la publicité transformerait la vie de la majorité
en produisant une culture à base de sollicitation des besoins. Le climat
social ne laisserait pas d'autres solutionr pour supporter les tensions et les
anxietés de la société moderne qii'une réaction narcissique et uiie dthique
d'autopréservation. «C'est par désespoir que les gens s'absorbent en euxmêmes), (Lipovetsky, 1978: 45).
Pourtant, un ensemble de découvertes permet de revendiquer une
autre façon de concevoir la communication et la publicité. Depuis de
nombreuses années, la recherche est le théâtre d'une remise en cause du
modèle des effets à court terme de la communication. Plusieurs courants de
recherche vont tenter de reconsidérer la problématique de l'influence
sociale de la publicité en essayant de rompre avec les deux pré-notions
produites par les courants précédents, à savoir: l'idée de manipulation
avancée par les critiques et l'idée d'efficacité proposée par les empiristes.
Quand LazarfeId publie en 1948 son ouvrage The People's Choice,
consacré à la communication persuasive en période d'élection, c'est la
consternation tant chez les sociologues que chez les marxistes. En effet,
Lazarfeld, Berelson et Gaudet découvrent que si les médias et la publicité
ont une certaine influence, le choix de voter en faveur de tel ou tel candidat
est davantage influencé par les discussions politiques au sein des groupes.
En fait, les relations sociales informelles, et spécialement le groupe
primaire (famille, voisinage, bureau, club, association, cercle d'amis,etc.),
exercent une influence marquante sur la manière dont les individus
interprètent et réagissent aux messages des médias. En d'autres mots, aussi
longtemps que les valeurs d'un groupe restent inchangks, L'individu résiste
au changement.
En 1955, reprenant les conclusions de la premihe étude, Paul
Lazarfeld et Elihu Katz abordent non plus le comportement électoral, mais
celui des consommateurs sur le marché des biens de consommation, de la
mode et des loisirs, plus particuliérement le choix des films. La publication
de Personal influence: The Parr Played by Peopk in the Flow of Mass
Communication
par Katz et Lazerfeld montre que la communication
fonctionne Ei deux étages (en anglais two-step flow of communication).
Sondant une population féminine de 800 personnes, ils découvrent que les
messages des médias atteignent d'abord certaines personnes plus impliquées
et plus influentes que les autres. Ensuite, ces gens, parmi les mieux
informés transmettent l'information reçue aux autres, ce qui fait
appréhender à Katz et Lazarsfeld te flux de communication comme un
processus en deux étapes oh le rôle des guides d'opinion ou deaders
d'opinion» se révèle essentiel.
Ces résultats amènent les scientifiques à remettre en cause
l'omnipuissance des médias et de la publicité, puis la théorie mécaniste
stirnulus-réponses dans sa version première de Pavlov (1977), théorie
connue également sous le vocable de "bullet theory" (Schramm, 1971) et de
"hypodermic needle" (Berlo, 1W).
En 1948, Lazarsfeld et Merton vont plus loin et publient une étude
qui fait partie du livre The Communication of Ideas, dans laquelle est
exprimée l'idée que le premier effet social des médias et de la publicité est
de maintenir le statu quo. Il y aurait donc une tendance innée chez l'homme
à rechercher des informations qui confirment sa propre opinion et A Bviter
les informations qui s'y opposent. Dans leur étude cblèbre de 1940,
Lazarsfeld, Berelson et Gaudet avaient montré cet accord entre les opinions
préalables et les messages choisis. C'est ce qui explique, par exemple,
pourquoi les acheteurs d'une nouvelle voiture sont plus susceptibles de lire
les publicités à propos de leur marque de voiture que de n'importe quelle
autre. En effet, on constata que les acheteurs étaient à la recherche de
bénéfices permettant de justifier et de venir confirmer l'excellence de leur
choix (Ehrlich, Guttman, Shonbach et Mills: 1957).
Ce biais résultant d'une stratégie défensive d'exposition à
l'information, contribue surtout à montrer que l'audience est peu
influencée par les campagnes de persuasion et qu'au fond, toute campagne
aurait pour résultats de renforcer les convictions bien plus que de les
ébranler. En d'autres mots, la publicité n'aurait pas une efficacité
nécessaire et suffisante pour conduire à un changement chez l'acteur social;
la communication n'agissant toujours qu'au sein d'un réseau complexe de
canaux possibles d'influences.
Le modèle du "Uses and Gratifications" de Katz (1960) soutient que
Les acteurs sociaux font un usage ("uses") conscient et volontaire des
messages pour aller chercher quelque chose d'assez spécifique: un conseil,
une information, une aide, bref une satisfaction («gratifications»). Selon
McQuail (1969), ils veulent s'informer, se divertir, s'intégrer à la société,
acquérir des compétences.
Les liens publicité-acteurs sociaux ne sont donc pas aussi directs
qu'on voudrait bien le croire. D'abord il faudrait tenir compte des
différences individuelles dans la mesure où les degrés et l'intensité des
réactions varient en fonction de la personnalité, de l'intelligence et de
t'intérêt de chaque individu. Ensuite, on devrait tenir compte de tout un
ensemble de facteurs filtrant l'effet direct de la publicité: la crédibilité de la
source des messages, le contenu des messages, le type de médias utilisé et
surtout l'appartenance des individus sollicités à un groupe social.
Dans les années 1980 et 1940, des chercheurs qui s'inscrivent dans le
prolongement de ces tendances s'intéresseront à la participation active des
auditoires dans le processus même de construction de significations
spécifiques aux messages qu'ils reçoivent. Pour ces chercheurs, l'insistance
des premiers empiristes à vouloir étudier l'impact immédiat et à court
terme de la communication publicitaire masque un modèle de la
communication qui apparaît trop simpliste. II faut tenir compte des
différences individuelles. Il faut considérer tout un ensemble de facteurs
filtrant l'effet direct du message publicitaire: la crédibilité de la source, le
contenu du message, le média utilisé et l'appartenance au groupe social, à la
cIasse sociale.
Par ailleurs, il semble que la compréhension du récepteur va bien au-
delà du pur contenu du message de l'émetteur. Le récepteur est de facto
créateur de tout message: il perçoit, interprète et donne du sens. Il y a
interprétation critique de la part du destinataire. Barthes, tout e n
reconnaissant la contrainte idéologique instaurée par la publicité, disait que
le lecteur refait le texte. La lecture est donc réécriture.
Dans la pratique, la lecture constitue un moyen de production; b
lecteur s'arrête constamment, fractionne le texte, le découpe en sections
imprévues, le relie à d'autres tissus de mots, puis revient en arriere pour
reprendre une phrase, w paragraphe: l'attention varie dans la lecture, lui
faisant sauter certains segments, quitte, si Ith6sitation s'installe,
opérer
une relecture. C'est ainsi que lire est sans cesse relire et réécrire.
Dans un article publié en 1971, Marcus-Steiff a synthétisé de
nombreux travaux comparant l'investissement publicitaire et les résultats
sur les ventes, en écrivant que ces recherches ne permettent pas d'établir un
lien entre la publicité et ses effets «sur les connaissances, les attitudes et les
comportements (c'est-à-dire les achats)» (Marcus-Steiff, 1971). En fait, la
synthèse des études méne à une évidence: l'influence ne peut être totale
(sélectivité), elle ne peut être directe (il faut tenir compte de relais) et elle
ne peut être immédiate (le processus d'influence demande du temps).
Selon Joyce (Jones, 19%: 11-25), les études indiquent que les
conversions sont très rares. En fait, 80% des nouveaux produits lancés sur
le marché disparaissent après deux ans, Si bien que 70% des budgets de
marketing sont maintenant alloués à la promotion (landier, 1991: 71).
Lubliner a comparé les 25 marques les plus vendues en 1923 avec les 25
marques les plus vendues en 1983.11a découvert que 19 des 25 marques les
plus vendues en 1923 étaient toujours Les premiks en 1983, quatre étaient
devenues deuxième, une se classait troisième et une se situait parmi les cinq
premières. (Lubliner, 1983: 32)
De nombreuses études démontrent donc que les craintes concernant
le potentiel d'influence et de persuasion de la publicité ne sont pas fondées.
Les conclusions concernant la publicité sont les suivantes: les effets sont
négligbs et même négligeables. Nous ne pouvons rejeter les argumentations
passionnantes et persuasives des essayistes, des sociologues et des
moralistes, mais force est de constater que dans les faits, la publicitk n'est
pas très puissante.
À la lumière de ces quelques remarques, il apparaît donc nécessaire
de rompre épistologiquement avec le schéma classique de la communication
pour construire une problématique nouvelle et adéquate. Le modèle
dominant de la communication suppose non seulement une intentionnalité
de la part de la source émettrice mais aussi son habileté à communiquer. Le
rôle du récepteur est ici défini comme fondamentalement passif; il a'a pas
un rôle actif dans le processus de construction des significations du
message. Ce sont précisément ces diverses limitations qui sont critiquées
par les tenants des nouvelles orientations de la recherche sur la publicité.
De toutes parts, des limites théoriques sont signalées. Baudrillard fait
ressortir la spécificité d'une influence culturelle. Barthes met de l'avant la
fonction symbolique. Finalement, on reconnaît Ie rôle des récepteurs. La
métaphore de la machine est ébranlée; on abandonne le premier modèle
(unidirectionnel et fluide) pour un modèle davantage «conversationnel» et
«fluide» de l'action de la communication.
Dans Critique de la communication, Sfez (1990) repère cette
tendance parmi les recherches contemporaines sur la communication, à
vouloir insister dorénavant sur le rôle actif du récepteur. Sfez y voit même
là le signe d'une disparition de la communication: à la limite, tout se
passerait dans l'imaginaire du récepteur. A la manière de Peirce (1958 et
1960),il vaudra mieux parler d'ajustements réciproques entre les émetteurs
et les récepteurs de message, et adopter une représentation nouvelle de
toute activité de communication, soit l'hypothèse de la construction de sens
dans la pratique sociale. Ce qui commence alors, c'est la lecture active: la
production de sens et de contradiction de sens. En effet, une problématique
de la diffusion publicitaire ne peut se réduire à une problématique de la
communication intentionnelle. Tout ce qui est diffusé n'est pas
communiqué. Tout ce que Iton a l'intention de communiquer n'est pas
nécessairement diffusé. C'est en tout cas ce que semblent confirmer
plusieurs recherches scientifiques qui mettent en doute l'efficacité réelle des
messages publicitaires à modifier les attitudes et les comportements.
II faut donc conclure que, vraisemblablement, la publicité n'est pas
aussi efficace ou manipulatrice que les publicitaires, les économistes, les
sociologues ou les marxistes voudraient bien le laisser croire et que le
schéma «émetteur/récepteun>qui se laisse appréhender comme un modèle
d'impact n'est peut-être pas le seul modèle véritable et valable de la
communication publicitaire.
Aussi, contrairement à la croyance populaire et malgré l'importance
des dépenses publicitaires, les connaissances concernant les effets de la
publicité sont, à l'heure actuelle, extrêmement limitées (Tellis et Weiss,
1995). En fait, quand on évoque l'efficacité de la publicité sur les ventes,
on se réfère d'ordinaire à quelques cas où les effets ont été spectaculaires.
Mais loin d'être la règle, ces cas constituent l'exception. Ce qui nous amène
à parler des approches quantitatives.
2. Critique des approches quantitatives
Parallèlement au schéma classique de la communication, la procédure
systématique par laquelle on peut réaliser un travail scientifique portant sur
la publicité considéré comme valide fait lui aussi l'objet de débats. Cet
échange entre les tenants des approches quantitatives et qualitatives
intéresse les chercheurs depuis longtemps au point de prendre quelquefois
la forme d'une polémique.
Les positivistes postulent que les faits scientifiques construits sont
neutres et objectifs et que la méthodologie utilisée s'inspire des règles de
certitude et d'exactitude des sciences physiques. La démarche typique
consiste à réduire une réalité en un ensemble de relations relativement
simples entre une série d'indicateurs unidimentionnels, quantifiables et
mesurables. «On observera que le nombre s'introduit ici comme instrument
de rep&age.» (Granger, 1982: 9). Traditionnellement, les quantitatifs
associent toute subjectivité à l'erreur. À l'inverse, les qualitatifs estiment
que la recherche ne nécessite pas l'aval d'une démarche quantitative pour
assurer sa crédibilité scientifique. On s'oppose à la démarche quantitative
qui n'appréhende la réalité qu'au moyen de données numériques.
Pendant longtemps, la recherche qualitative sera reléguée souvent à
un rôle secondaire dans l'activité scientifique du sociologue. «On disait déjà
que les données qualitatives ne pouvaient acquérir de valeur scientifique
qu'après un traitement quantitatif qui viendrait s'emparer du matériel et
exploiter sa richesse» (Pirès, 19û2: 19).
L'argument de base des positivistes est que la réalité est extérieure à
l'homme et, par conséquent, ses propriétés ne peuvent être mesurées que
par des méthodes objectives au lieu d'être déduites subjectivement par la
sensation, la réflexion ou l'intuition. De là, les positivistes soutiennent que
le phénomène publicitaire devrait être basé uniquement sur les données qui
peuvent être mesurables et, donc, quantifiables. «C'est d'ailleurs souvent
avec l'intention d'en restreindre la portée que l'on dit d'un modèle qu'il est
qualitatif. L'adjectif est supposé excuser par avance les incertitudes d'une
pensée vague et encore insuffisamment rationnelle>>
(Granger, 1982, 7).
Certains sociologues soutiendront que la sociologie ne devient
scientifique que lorsqu'elle fait usage des techniques statistiques. «Tout est
construit de telle manière que dans les années 30, l'"ajout" positiviste paraît
normal à tous, y compris au chercheur qualitatif: après une "exploration
qualitative", il faut une "recherche quantitative"» (Pirès, 1982: 19). L'objet
d'analyse des positivistes concernera alors deux dimensions en publicité: la
description quantitative des audiences ou sondage et la mesure de
l'efficacité à court et moyen terne de la publicité sur les individus, soit les
effets perceptibles des messages publicitaires sur les individus considérés
comme «récepteurs». Les sociologues et les économistes s'intéressant à la
publicité établiront des typologies du public en les recoupant le plus
souvent selon des cadres quantitatifs traditionnels (âge, sexe, niveau
d'instruction, etc.). L'observation ne deviendra scientifique que lorsque
I'on fait usage de techniques statistiques. En d'autres mots, on ne s'adonne A
la recherche qualitative qu'à défaut de pouvoir quanMer.
Plus récemment toutefois, la situation s'est inversée. «Les critiques se
veulent maintenant radicales à 1'6gard de la méthociologie quantitative
quand elle n'est pas purement et simplement condamnée au nom d'un
positivisme inacceptable>>(Houle, 1982: 4). En publicité, les écrits de
Baudrillard, Barthes, Sfez et Molino ont permis de relancer le débat autour
de la mesure, de la structure de l'objet, du travail de validité ou de
vérification, de l'objet de recherche, de la méthode et de la construction de
l'objet.
On postule désormais que c'est l'acteur social qui donne un sens au
monde extérieur. La réalité socide est construite et subjective. Plutôt que
d'adopter la démarche quantitative, les chercheurs du social devraient donc
développer une méthode qui s'attache à la signification sociale attribuée par
les sujets au monde qui les entoure. <<D'unecertaine manière, reconnaître
l'importance des modèles qualitatifs, c'est échapper aux artificielles
contrain tes d'un positivisme dogmatique» (Granger, 1982: 12). «Les
informations recueillies, les analyses effectuées sont exprimées en mots, en
phrases, en récits qui impliquent le recours
un code linguistique certes
plus riche et plus soupleu (Pourtois et Desmet, 1988: 48).
Par ailleurs, mbme la prétention de ceux qui considèrent les
approches quantitatives comme neutres ne semble pas soutenable
tous
points de vue. En effet, comme l'a bien ddmntré Mellos (1992: Mg), la
«réalité (et sa structure) ne peut être conçue comme neutre. Elle est
déterminée par les rapports sociaux, par la contradiction et la lutte, et mue
par les intérêts de classe oh faits et valeurs forment une seule entité». La
sélection de certains faits au détriment d'autres est déjs le produit de
l'influence d'une theoie implicite ou explicite.
Les approches positivistes connaissent aussi une part d'interpktation
lorsque survient l'incontournable moment de discuter des résultats. Un
encadrement trop strict débouche parfois sur une simplification abusive de
la réalité. II s'ensuit que les méthodes quantitatives sont nécessairement
riductionnistes. Cela signifie que tout objet d'étude doit être réduit à une
caractéristique formelle. On délaisse alors plusieurs détails, des nuances et
des subtilités individuelles.
Cl y a toujours dans les faits observés une composante subjective
qu'on ne peut négliger. Ainsi les individus qui répondent à un sondage,
dont les questions sont reputées objectives, peuvent être influencés par des
variables n'ayant aucun rapport avec le contenu des interrogations, comme
Ieur état d'esprit au moment d'y répondre.
Les conséquences de I'analyse quantitative en publicité ont été de
cantonner l'analyse sociologique dans la s p k e de l'effet. Ces études
livrèrent toute une série de domées sur des indicateurs précis (âge, sexe,
revenu, éducation, etc.). Une fois ces indications données, ces études se
retrouvent cependant dans l'impossibilité de livrer en profondeur la
signification sociale: Quelle place occupe la publicité dans la société?
Qu'est-ce que raconte la publicité iconique? Qu'est-ce que la forme image
dans la publicité apprend sur la société? Quelles sont ses dimensions
constitutives?
Dans leur hâte à se domer un statut scientifique, ces études ont réduit
la recherche publicitaire
la mesure de variables et elles ont oublié de
livrer des réponses à certaines questions. Or, les réponses à ces
questionnements sont essentielles à une compréhension de l'image
publicitaire. Faute de s'y adresser, les grandes enquêtes quantitatives sont
de peu de secours pour expliquer l'image.
D. CONCLUSION
La recherche sur la publicité montre que l'image propose aux acteurs
sociaux des modèles, des normes, des jugements, des choix. Somme toute,
la publicité ou parole commerciale s'inscrit dans l'environnement culturel,
aux multiples facettes. Sa fonction est alors de raconter la société, de
construire et de présenter aux acteurs un style de vie et un ensemble de
valeurs repérables.
La matière même de la publicité est sociologique. L'objet de la
publicité devient les valeurs culturelles que le produit manifeste et
symbolise. Voilà pourquoi il faut reconnaître la publicité dans sa
responsabilité sociale, comme un construit. La publicité est, avec la famille,
l'école et les mass média, un agent de ~ s m i s s i o ndes modèles culturels,
au-delà de son activité commerciale première.
La publicité se révèle comme un phénomène social. Elle ne s'adresse
jamais à un individu, mais à un groupe de consommateurs; à la suggestion
psychologique s'ajoute une offre d'appartenance sociale. L'objet publicitk
est avant tout un objet social. Ce qui est fondamental ici c'est que la
publicité, perçue comme culture, exprime des valeurs et des normes.
La sociologie a pu démontrer que la communication publicitaire
véhicule, par l'intermédiaire du visuel, des symboles, des figures de la
rhétorique et des contenus sociaux. Ces représentations publicitaires ont
fini par constituer une sorte de mythologie moderne ou de discours
circulant, commun à rendre compte du social.
Chapitre II
Éléments pour une problématique
A. INTRODUCTION
Dans cette étude, on analyse l'image publicitaire en mettant en relief ses
dimensions constitutives. On veut savoir ce que la forme image dans la
publicité nous apprend sur Ia société.
Globalement, on s'intéresse à la façon dont la publicité lie les objets
de consommation à des représentations culturelles. Plus spécifiquement, on
désire reconstituer les divers éléments de la mise en scène, ceux qui font
accéder à une lecture construite, une lecture sociologique du discours
publicitaire-
1) les temps sociaux; 2) l'espace social; 3) le corps; et 4)
l'imaginaire. Le travail consistera alors à examiner la mise en forme du
discours publicitaire.
Suivant les travaux de Laurence Bardin (1977), on abordera la
publicité comme une (<scènede théâtre» où est érigé un décor (la
thématique manifeste du discours publicitaire), où s'élabore une mise en
scène et où se déroule un jeu (les représentations de I'espace, du temps, du
corps et de l'imaginaire).
La problématique de cette thèse s'oriente autour de deux axes. Un
premier axe situe la publicité dans le contexte plus large de la culture.
Quelles que soient les formes prises par la publicité, l'image publicitaire
s'inscrit dans la culture. Dans son aspect dynamique, la publicité est
révélatrice de valeurs, de symboles et de manibres de vivre. L'image
publicitaire devient alors l'un des nombreux discours qui signale ce qui a
un sens, ce qui prend un sens, que ce soit d'un point de vue affectif,
intellectuel ou social.
Un deuxième axe porte sur le symbole et le mythe. Poser le
problème de la culture, c'est poser celui du symbolique et du mythique. Les
pratiques, les données matérielles, la production, l'expérience sont
construites symboliquement et mythiquement. Le monde de la culture est
unifié par la présence du symbolique et du mythique. La connaissance et la
signification de la réalité ne parviennent pas à l'acteur social directement;
elles sont construites et médiatisées par des symboles et des mythes.
Le trait commun entre le monde de la culture et de l'image dans une
société donnée est la présence du symbolique et du mythique. Si l'image
joue un rôle de premier plan dans le monde moderne, c'est parce qu'elle est
symbole, expression culturelle et produit de la culture. Dans cette thkse, on
traitera donc de l'image publicitaire comme phénomène culturel plutôt
qu'économique.
On posera que l'image outrepasse sa fonction informative et
persuasive, et qu'elle est en réalité un phénomène culturel qui parle de la
société. La publicité ne sera donc pas considérée comme une technique
commerciale visant, par des incitations mécanistes ou suggestives, à rendre
nécessaire l'achat de biens, mais plutôt comme un aspect de la culture que
l'homme fabrique, celle qu'il produit et construit. Les images permettent
plutôt de voir des phénomènes et, par ce fait même, de les comprendre, si
bien que l'on peut se demander avec Leroi-Gourhan (Alleau, 1976: 251) si
l'image n'est pas en train de suppjanter d e geste et la parolem.
B. L'IMAGE PUBLICITAIRE: UN PHENOMENE CULTUREL
L'image publicitaire constitue un phhomène culturel au même titre que la
littérature, le cinéma ou le théâtre. Elle contribue à modeler
l'environnement et les modes de vie par L'entremise d'images, de signes et
de symboles. En conséquence, elle est un phénomène social.
Dans cette première section, on procédera à quelques remarques
concernant la culture. Après quoi, on traitera successivement des rapports
existant entre l'image, la publicité et Ia culture.
1. Quelques remarques au sujet de la culture
Dans l'ensemble, les définitions proposées de la culture s'articulent autour
de deux grandes conceptions, D'une part, s'impose le concept de «culture»
en tant qu'expression artistique, créatrice et esthétique, communément relié
à l'Art, et de l'autre émerge le concept de «manière de vivre»,
d'inspiration anthropologique, et qui est relative à la nature et à
l'organisation de l'expérience sociale (Corner, 1991a: L31).
Après avoir passé en revue pas moins de 164 définitions de la
culture, Kroeber et Kluckhohn (1952) concluent que:
«La culture consiste en des modes de comportement,
explicites ou implicites, acquis et transmis par des symboles
et représentant les caractères distinctifs de groupes humains,
y compris le rattachement à des objets ou artefacts; le noyau
central de la culture réside dans les idées traditionnelles et
tout spécialement dans les valeurs qui y sont rattachées»
(Kroeber et Kluckhohn, 1952).
Guy Rocher qui s'inspire de Tylor, précise que «la culture est un ensemble
lié de manières de penser, de sentir et d'agir plus ou moins formalisées qui,
étant apprises et partagées par une pluralitk de personnes, servent, d'une
manière à la fois objective et symbolique, à constituer une collectivité
particulière et distinct- (Rocher, 1949: 88).
La culture telle qu'on l'entend ici, possède quatre caractéristiques
particulières: 1) la culture concerne toute l'activité humaine; 2) elle est plus
ou moins formalisée puisque les manieres de penser peuvent varier d'une
classe sociale à une autre à l'intérieur d'une même culture; 3) cette culture
doit essentiellement être partagée par une pluralité de personnes; et 4) la
e
culture s'acquiert par apprentissage, la culture n'est jamais i ~ é (Rocher,
1969).
Fernand Dumont préfère concevoir la culture comme un double
rapport au monde. D'un côté, la culture est un milieu; les hommes en ont
l'expérience spontanée, elle est immédiatement signifkative. De l'autre, la
culture est un horizon; l'expérience est médiatisée à travers des objets
culturels, des connaissances ou des visions explicites du monde, la publicité,
par exemple.
Cette construction amène Dumont à identifier deux types de culture:
la culture première, composée de normes, de règles, de valeurs et d'idéaux,
constitutifs d'un univers symbolique, orientant les conduites quotidiennes.
C'est la culture qui s'interpose entre la nature et l'acteur social; la vérité
certaine, la vérité unanime (Dumont, 1968: 40). A l'opposé, la culture
seconde est la culture que l'homme fabrique, celle qu'il produit et
construit, des arts, de la littérature, du droit, de la philosophie et aussi des
sciences: romans, films, publicités ou pièces de théâtre, par exemple
(Dumont, 1987: 1 4 2 ~et
) ~qui réfléchit la première. La culture seconde est
composée de l'ensemble des «biens symboliquesip que produisent les
sociétés. Ces diverses productions occupent des positions et remplissent des
fonctions. L'ensemble des moyens de communication, les images et la
publicité se situe ce niveau des champs de production symbolique.
2. Culture et image
L'attention accordée ii la publicité véhiculant des images n'est pas fortuite.
L'iconique est aujourd'hui présente dans plusieurs instances culturelles. La
photographie, le journal, l'affiche, le cinéma, la tél&ision, sont devenus
les éléments moteurs de cette nouvelle forme du monde extérieur qui se
construit et qui constitue la culture seconcie; l'environnement construit par
l'homme.
Le mot image est doté d'acceptations multiples. Il vient du latin
imago qui signifie «qui prend la place de». Selon Cossette (1985), le
vocable d'image réfère à une représentation graphique, d'un objet ou d'un
concept sur un support matériel. D'après les définitions courantes des
dictionnaires, une image est une imitation ou une représentation artificielle
de la forme extérieure d'un objet ou d'une personne. Selon Moles:
«l'image est un support de la communication visuelle qui matérialise un
fragment de l'univers perceptif,, (1971: 133).
Dans Les images démaquillées, Cossette nous rappelle que l'image
est aussi ancienne que le monde. L'homo sapiens de la préhistoire
paléolithique avait déjà dessiné des images il y a près de 100 000 ans. Vers
1 300 avant J.-C.,
Moïse critique le puvoir des images parce qu'elles
transmettent mal la réalité de Dieu. En Occident, les fidèles manipulent des
images pieuses. Les images des saints sont achetées et exposées à l'intérieur
de la maison pour attirer sur celle-ci la Mnéâiction de Dieu.
A ltoppost5,
l'Islam a rejeté les images de représentation; personne n'a le droit de
représenter Dieu ou les créatures de Dieu. En dehors des images
religieuses apparaissent des images folkloriques et des images d'actualités
satiriques ou informatives.
Survalorisée par certains, l'image n'en est pas moins l'objet de
controverses très vives. Il y en a pour qui l'image est trompeuse parce que
mystificatrice (Cossette: 1985, 175-178). Parce qu'elle est suggestive,
l'image et son langage sont vus comme facteurs d'illusion, de passivité. Les
philosophes se sont toujours int6ressés à l'image, mais en même temps, ils
n'ont cessé de s'en méfier. Depuis Platon, en passant par Feuerbach, la
tradition philosophique a toujours considéré l'image comme plus ou moins
digne de l'interrogation scientifique. Les scientifiques ont entretenu un
formidable préjugé à l'égard de l'image. La sociologie elle-même n'a
longtemps retenu que cette fonction du système publicitaire, accusant une
attitude négative à son égard.
L'image connut sa première diffusion intense avec l'avènement de la
simili-gravure à la fin du siècle dernier. A ce moment, quatre forces
concoururent à multiplier les images: le capital, la libre concurrence,
l'industrialisation et la concentration urbaine (Cossette, L985: 59). Les
modes de production des images sont restés par la suite à peu près les
mêmes si ce n'est l'apparition des images en couleurs vers 1950.
Malgré son jeune âge, l'image a déjà eu le temps matbrie1 de se
développer librement et d'imposer ses conséquences sur le mode de vie de
l'acteur social. Pour Boorstin, cette société s'intéresse «non plus par la
r&alité,mais par ces images que nous lui avons substitué es^ (Boorstin,
1971: 25).
L'image occupe une place importante dans la soci6té. L e
développement de l'image constitue une des caractéristiques de notre
temps. En fait, il est presqu'impossible de penser pouvoir comprendre la
société sans considérer l'image (Messaris, 1997). A tel point, nous rappelle
Cossette, que de nos jours, chaque citoyen a en tête des images mythiques
de ses chefs: Jésus-Christ, César, Napoléon, Hitler, de Gaulle ou Mao.
Boorstin croit que les particularités de l'image moderne et sa
diffusion ont fait des acteurs sociaux «de simples acolytes de l'image»
dans un monde où l'image, plus intéressante que son original, est devenue
cet original (Boorstin, 1971: 299). «Depuis la Révolution Graphique, la
multiplication des images a un effet révolutionnaire sur nos imaginations,
sur notre concept de vraisemblance, sur ce qui passe pour vérité dans
l'expérience courante>>
(Boorstin, 1971: 310).
L'ensemble des images en général contribue de façon croissante A la
circulation de l'information et à la mod6lisation de la société. Dans ces
conditions, il n'est certes pas exagéré de parler d'un véritable phénomène
culturel et de civilisation, où télévision, vidbo, cinéma, photographie,
magazines et publicité traversent et ponctuent l'organisation même de la
culture et des rapports sociaux. «Cette véritable révolution a multiplié les
images en les rendant plus brillantes, grâce à des machines nouvelles qui
reproduisent avec exactitude et élégance Les visages, les silhouettes et les
voix, les paysages et les événements, et à d'autres machines nouvelles qui
diffusent ces images; grâce aux journaux, aux revues, aux livres bon
march6, aux télécommunications, aux films, à la radio-télévisionn
(Boorstin, 1971: 291).
«Dans les pays capitalistes», écrit Moles, «l'image est devenue un
mécanisme publicitaire lié aux motivations socioéconomiques, l'un des
éléments désormais moteurs de la société de consommatiom (Moles, 1970:
4). Or, si l'on a pu qualifier la civilisation moderne de «civilisation de
l'image» (Fulchignoni, 1972; Gusdorf, Blanc et D'Yvoire, 1960), les
images publicitaires en portent incontestablement une large responsabilite
le message publicitaire, sous la plupart de ses formes, est en effet un
véritable pourvoyeur d'images.
Tous ceux qui, spécialistes de la publicité ou non, se sont penchés sur
le problème, sont unanimes à reconnaître que l'une des caractéristiques de
la publicité moderne est précisément la place tenue par l'image dans les
messages de tous genres.
3. Culture et publicité
Sur le plan culturel, la publicité n'est jamais autonome; elle est l'un des
nombreux discours tenus aux masses. La publicité est un processus
socioculturel, une facette de la «culture en mosaïque» qui innerve médias,
économies, cultures, sociétds politiques et civiles, relations internationales,
etc. Ainsi, la publicité ne s'adresse plus à une personne mais à un ensemble
social.
«Publicité et culture ne peuvent être deux réalités totalement
hétérogènes. Précisément parce que la publicité tomme forme
symbolique du système économique capitaliste régit les
principes mêmes de l'échange social dans lequel s'élaborent
les limites réciproques du monde des objets et du monde des
sujets. Elle attribue du sens aux objets et nous indique leur
usage, créant ainsi une certaine intelligibilité des catégories de
la culture qu'elle visualise et ritualise tout à la fois»
(Gallissot, 1993: 13).
«Les rapports entre publicité et société sont dialectiques et
complexes: les contenus du discours pubiicitaire peuvent être
analysés comme le reflet partiel de la société qui les sécrète,
mais aussi comme une source d'influence possible sur les
stéréotypes et les images qui circulent parmi les individus.
(...) La publicité entretient une étroite relation avec la société
qui la sécr2te: elle exerce une action culturelie sur la société»
(Breton et Proulx, 1989: 109-110).
<<Lesproduits en série représentent la culture, non parce
qu'ils composent l'environnement dans lequel nous évoluons,
mais parce qu'ils font partie intégrale du processus par lequel
nous nous réalisons en tant que soci6té et qui est composée
par chacune de nos individualités, par notre caractère
particulier de société ainsi que par nos actes quotidiens»
(Davidson, 1992: 124).
Dans ce contexte, la fonction culturelle de la publicité se manifeste plus
clairement. Par son processus même de diffusion à répétition, elle est une
fenêtre des modes de vie, des modèles d'identification, des normes, des
croyances et des valeurs. La publicité est l'un des nombreux éléments qui
constituent la culture que l'homme fabrique, celle qu'il produit et construit.
«Le sens est toujours un fait de culture, car produit de la culture» (Barthes,
1968: 22) et tout récit est organisation, construction.
Par l'entremise de la publicité se diffusent l'innovation, les nouveaux
rapports hommes/fernmes, jeuneslvieux, urbains/rurals. Elle renvoie
l'image de l'innovation, de l'amour, de la richesse, du succès ou de l'échec,
des stéréotypes socio-culturels, empruntant ses images à la mode et à la
technologie. La publicitk est donc discours inscrit dans le temps. Selon
Cadet et Cathelat, la réclame peut agir comme facteur dynamique de
l'évolution culturelle (Cadet et Cathelat, 1968: 183).
«A travers l'individu, c'est la structure sociale qu'elle
[l'action publicitaire] met en cause, structure qui impose aux
acteurs certaines nonnes garantissant la cohésion du groupe et
son fonctionnement harmonieux. La consommation est une
activité sociale chargée de significations et contrôlée par le
groupe. L'achat est une prise de position, un engagement
devant soi-même et autrui. Par les symboles qu'il confère, il
devient affirmation d'existence, mode d'être en situation
sociale» (Cadet et Cathelat, 1968: 190).
Parler de culture et de publicitd consiste à montrer comment la publicité a
fini par se faire l'un des nombreux relais des manières de penser et d'agir:
quoi et comment consommer, comment vivre la consommation et le loisir,
le travail, l'amour, la sexualite.
Les développements de la sociologie ont montré la présence
irréductible de conceptions du monde, de représentations symboliques et
mythiques spécifiques, c'est-à-dire les manières de penser, sentir, parler,
danser, habiter, agir, etc; tout le «savoir-faire» et le «savoir-être» d'une
société. De cette façon, il est possible de déterminer des schèmes d6finis
pour des images données, des styles ou des thémes, et d'en arriver ainsi à
une typologie de l'imaginaire publicitaire en rapport avec le social.
C. VIE SOCIALE ET IMAGINAIRE
Poser le problème de la culture, on I'a mentionné précédemment, c'est
poser celui du symbolique et du mythique. Les pratiques comme les
données matérielles, la production ou l'expérience sont construites
symboliquement et mythiquement. La culture ne parvient pas à l'acteur
social directement; elle est construite et médiatisée par des symboles et des
mythes, et c'est sous cette forme qu'il y accède et en participe.
Avec l'image publicitaire, on est dans l'univers du mythique et du
symbolique. <<Les
méthodes modernes de la propagande, depuis la publicité
pour un dentifrice à celles de programmes et de sysemes politiques, ne
font pas appel à la rationalité chez l'homme mais lui imposent certains
modes de comportement, au moyen d'une répétition continue d'images»
(Von Bertalanffy, 1973: 38).
La publicité donne la priorité à la création, la séduction est libre de
se déployer pour elle-même, «elle s'affiche en hyper-spectacle, magie des
artifices, scène indifférente au principe de réalité et à la logique de la
vraisemblance* (Lipovetsky, 1987: 221). Plus que jamais, L'oeuvre
publicitaire est oeuvre d'imagination. Le récit proposé se situe dans le
domaine de l'invention et de la fantaisie. Images, symboles et mythes
publicitaires sont alors construits comme un récit imaginaire.
L'image publicitaire constitue, en jouant sur le d
e rhétorique, le
Lieu de l'espoir. Aux arguments rationnels, le publicitaire préfère la
simplicité et l'émotion. Il s'agit d'un langage affectif, symbolique et
mythique. La civilisation de l'image publicitaire, c'est aussi la civilisation
du furtif, de I'impulsif, du non-logique. L'observation de la publicité offre
alors au sociologue l'occasion de comprendre comment est construite
l'image publicitaire et la façon dont le système socioculturel investit
l'imaginaire symbolique et mythique.
1.
Le symbolique
La fonction symbolique «consiste à pouvoir représenter quelque chose (un
signifié quelconque: objet, événement, schème conceptuel, etc.) au moyen
d'un signifiant différencié et ne servant qu'à cette représentation: langage,
image mentale, geste symbolique, etc.» (Piaget et Inhelder, 1966: 41). En
d'autres mots, dans la fonction symbolique, quelque chose tient lieu de
quelque chose d'autre. «Le symbole sépare et met ensemble, il comporte les
deux idées de séparation et de réunion; il évoque une communauté, qui a
été divisée et qui peut se réformen>(Chevalier et Gheerbrant, 1982: XIII et
XXI) .
Pour les sociologues, le problème posé par le symbolique reste
encore et toujours entier. Durkheim en son temps rappelait que «La vie
sociale était tout entière faite de représentations» et que la sociologie avait
pour objet ces «manières de voir, de sentir et d'agim (Durkheim, 1987: XI
et 7).
«Il faut d'abord situer le symbolique dans la société. (...) On
décomposera le système social global en quatre sous-systèmes
principaux: le système bio-social, le systéme écologiqueéconomique, le système socio-politique, le système culturelsymbolique. (...) Le système symbolique-culturel envisage la
société sous l'angle des significations. Il se compose de
phénomènes
première vue tres divers: langage,
classifications des objets et des êtres, croyance, oeuvres
techniques et artistiques, règles morales, rites et traditions du
savoir-vivre, sy sternes religieux, idéologies.»
<<Ya-t-il un lien entre toutes les conduites humaines qui
constituent le monde & la culture? Le trait commun il toutes
ses formes dans une sociét6 donnee est la prbsence du
symbolique, c'est-Mire d'une relation spécifique, celle qui
unit le signifiant au signifié: (...) le drapeau renvoie à la
nation, la croix renvoie % Jesus-Christ et au christianisme.
Dans tous les cas, une même structure renvoie à un autre
fragment d1exp6riencequi demeure g6néralernent virtuel,
l'un étant le signe ou le symbole de I'autre. Le monde de la
culture est unifi6 par la présence du symbolique, de cette
relation spécifique que les scolastiques d4'inissaient ainsi:
aliquid stat pro aliquor (Molino, 1979: 20-2 1).
Croyances, oeuvres artistiques, rites, systemes religieux et idéologies ont
tous en commun la pdsence du symbolique, celle qui unit le signifiant au
signifid sur un mode arbitraire ou conventionnel. Le monde de la culture
lui-même est unifié par la présence du symbolique. Lévi-Strauss rappelle
d'ailleurs que doute culture peut être considérée comme un ensemble de
systèmes symboliques au premier rang desquels se placent le langage, les
règles matrimoniales, les rapports 6conorniques, l'art, la science, la
religion» (Lévi-Strauss, 1989: 475).
Pour décrire ces rapports d'images, d'idées, de croyances,
d'émotions, on utilisera des archétypes, des mythes ou des structures, qu'ils
soient naturels (pierres, métaux, arbres, fleurs, fruits, animaux, sources,
planètes, feu, foudre, etc.) ou qu'ils soient abstraits (formes géométriques,
nombres, lignes, rythmes, orientations, idées, etc.). Ils formeront des
faisceaux d'associations d'id&, des associations enseignées ou acquises, et
qui sont aisément communicables du fait qu'elles sont famili&resà tous ceux
qui se réclament d'une culture commune: le blanc associé à la pureté, le
vert à la végétation, la croix au christianisme.
Ces formes graphiques représentent en quelque sorte des mots-
images qui se combinent pour former des phrases symbolisant actions,
objets et qualités. La métaphore permet alors de concrétiser des concepts
abstraits (Durand, 1970). En publicité, c'est cette dimension symbolique,
essentiellement collective, qui confire un sens. Le discours publicitaire est
avant tout de l'ordre du symbolique (Leymore: 1975). Les firmes
produisent avant tout un ensemble de symboles par l'interméûiaire de leur
publicité (Levy, 1959). Ce faisant, la publicité parle de la societe et la
raconte avec des images,des mythes et des héros marquants. Le symbole
est donc la structure à partir de laquelle se construit le discours, entre
autre, le discours publicitaire.
Les symboles connaissent aujourd'hui une faveur nouvelle, due en
grande partie aux images (Chevalier et Gheerbrant, 1982: V). Ainsi, pour
Pierre Bourdieu (1%6), chaque société met en oeuvre en propre un
ücapital symbolique» ii l'instar de son %capital économique^. Dans ce
contexte, Ia publicité devient l'art de confkrer un sens aux choses. uL'art du
publicitaire consiste 5 charger les objets de significations qui, à I'origine,
ne sont pas les leurs» (Albou, 1977: 114-115). «Il est clair que selon les
,
s'il s'agit
normes culturelles, les objets ont besoin d'être v d o n ~même
d'un caprice, par une association avec des significations individuelles ou
sociales» (Williams, 1960: 27).
«L'utilisation de marques de voitures, de cigarettes ou
d'aliments qui sont publicistks ii la grandeur du pays
procure au consommateur le sentiment qu'il fait partie d'un
tout qui le dépasse. 11 fait partie d'une culture ou d'une
manière d'être qui l'enveloppe et en même temps le
nourrit» (McLuhan,1953: 555).
L'homme construit le monde par le moyen du symbole. Les objets sont
utilisés comme des métaphores, des analogies, des symboles. «Les gens se
reconnaissent dans leurs produits de consommation; te plus profond d'euxmêmes se trouve dans leur voiture, leur chaine haute fidélité, leur maison à
double niveau, leur équipement de cuisine. Les liens qui unissent l'individu
à La société ont changé» (Marcuse, 1%.
9). Pour Baudrillard (1983), ce
n'est pas un besoin qui est consommé, mais un signe, une symbolique.
Le symbole ne dépend pas d'une activité purement individuelle. a11
baigne dans un milieu social, même s'il émerge d'une conscience
individuelle. Sa puissance évocatrice et libhtrice variera avec l'effet de
résonance qui résulte de ce rapport entre te social et I'individuelu
(Chevalier et Gfieerbrant, 1982: XXIII).
Les objets sont appropriés non plus uniquement dans leur rnat6rialit6,
mais aussi en tant que signes. C'est en ceta que la publicité est définie
comme amdtaphore de la socibtén, M i t 6 d'un autre ordre, analogique et
symbolique. Elle devient comme une antenne des courants socioculturels,
un aystèrne de représentations et de valeurs». La capcite générale de
pouvoir représenter en leur absence des objets par des signes ou symboles
est désignée par le terme de fonction sémiotique, ou plus usuellement
symbolique.
Somme toute, le symbole permet de produire et de reproduire le
social. Grâce aux symboles, l'acteur social peut se situer dans un immense
réseau de relations. Aux yeux du sociologue, le système symbolique tend
donc à marquer l'ordre social jusqu'aux moindres détails de la vie
quotidienne.
1.1 Le problème de la signification
En réalité, le problème essentiel de l'image est celui de la signification.
«D'un point de vue pessimiste, on dira avec Quine que la signification a
remplacé Dieu comme candidat au poste envié de problème métaphysique
fondamental» (MoIino, 1978: 20).
Afin de mieux comprendre l'activité de reconnaissance, le schéma de
Peirce (Granger, 1968: 260) représentd dans le graphique ci-dessous
demeure encore le plus suggestif. Un signe ou «représentation» est <<une
chose reliée sous un certain aspect Zt un second signe, son <<objetw,de telle
maniére qu'il mette en relation une troisiéme chose, son «interprétanb,
avec ce même objet, et ceci de façon à mettre en relation une quatriéme
...
chose avec cet objet, et ainsi de suite ad infinimm »
Schéma de I ' i n t e m r é ~
Ce qui frappe dans ce schéma, c'est la présence d'une suite dtinterprétants.
<L'interprétant immédiat agit en quelque sorte à partir du sentiment
personnel -l'impression-, il suggère. L'interprCtant dynamique fournit
Les données nécessaires à l'interprétation des signes: il informe. Un
troisième type d'interprétant, final, foumit les systhmes d'interprétation: il
argumente (Turmel et Gazabon, 1993: 152).
On comprendra que la construction qui est opérée ci-haut de la
fonction symbolique va A l'encontre du schéma ciassique A sens unique de
la théorie de la communication &metteur---~~essage--->~6ce~teu~
ddveloppée dans le chapitre précédent. Une forme symbolique n'est pas le
passage obligé d'une trajectoire de communication d'un émetteur vers un
récepteur. Elle est plutôt le résultat d'un processus de production de sens
qui n'est en aucun cas la seule expression du producteur, d'ou la nécessité
d'un nouveau modèle, le schéma sémiotique.
Grâce à Molino, le schéma sémiotique suppose un processus
complexe plutôt qu'unidirectionnel dans lequel producteur et récepteur
fabriquent des opérations à partir de signes et de traces, oh la forme
symbolique qu'est une image publicitaire n'est en aucun cas la seule
expression du producteur, qu'il soit concepteur publicitaire, agence,
graphiste, ou autres.
Le fait symbolique est doté d'une structure spécifique qui est
résumée dans le schéma suivant:
Schéma sémiotiaue
Sous cette forme, le fait symbolique comprend trois dimensions: niveau
matériel ou neutre des traces, dimension de la production et celle de la
réception.
1.
Le niveau neutre. Molino l'appelle parfois aussi aniveau
matériel». Il est représente par les traces de l'activité
symbolique-geste, phrases, écritures, oeuvres d'art» (Molino,
1989: 33). LR niveau neutre sert d'ancrage aux approches
@tiques et esthésiques. Selon Turmel, c'est la présence de
ces traces qui permet seule à l'analyse de mordre sur le
symbolique.
2.
La poïétique. Pour Gilson (1963) toute oeuvre est le produit
d'un faire, d'un travail. Par poïétique, il entend le travail du
créateur publicitaire (ou d'un producteur). Dans notre cas,
relève du domaine poïétique tout ce qui conduit à la conception
et à la realisation de l'image publicitaire.
3.
L 'esthésique.Molino dénomme la description des stratégies de
perception üesthésique~.Ce terme est emprunté à Valéry
( 1945).
Pour Molino, c'est parce que la pratique des sciences humaines confond
constamment les niveaux poï6tique, neutre et esthésique que, face à un
même objet, les chercheurs se réclamant d'un même paradigme de pensée,
parviennent à des résultats divergents, arbitraires et contradictoires. u O n
ne peut progresser dans la connaissance que si l'on distingue ces trois
dimensions. Avant, il y a confusion. Après, il y a synthsse. Entre Les deux,
il y a eu l'analyse descriptive» (Molino, 1975).
Dès que l'on découpe des unités, que l'on en précise les variables et
que tout cela est organisé en règles, les objets construits que l'on obtient
correspondent d6.A à des choix opérés par le publicitaire, choix qui sont
guidés par ses présupposés culturels, son expérience vécue, ses
connaissances poï6tiques et ses propres daiisations esthésiques.
Ainsi, le phhomène symbolique est le rdsultat d'une production:
quelqu'un a voulu dire quelque chose. L'existence matdrielle des traces est
ce qui garantit la possibilité d'un premier mode d'approche du symbolique.
«Ces traces correspondent A la face matérielle des signes, renvoient à un
référent ainsi qu'à une chaîne ind6fin.e d'autres signesu (Molino, 1989:
24). Molino indique d'ailleurs les lignes générales d'une sémiologie des
formes symboliques. «Un fait symbolique, conduite, parole ou texte, se
présente comme phénomène matériel-courbe d'un geste, séquence sonore,
signes sur le papier-et c'est cette existence matérielle de données
signifiantes qui rewsente le seul point de départ possible pour l'analyse du
symbolique» (Molino, 1989: 24). Un énoncé est enfin une construction
symbolique lue et décodée par un récepteur. «L'avantage du modèle est
qu'il semble unir de façon simple et cohérente les différentes dimensions du
fait symbolique, production, traces et réception: le locuteur a l'intention de
produire un effet; il ne s'agit plus que de s'assurer que cette donnée
irréductible sera correctement exprimée, transmise et reconnue» (Molino,
1989: 26).
La signification n'est pas un être, elle est un travail de production
symbolique. On comprend alors la portée du modèle de Molino: au lieu
d'un sens unique comme c'est le cas dans le schéma classique de la
communication, on a autant de stratégies complexes de signification qu'il y
a de dimensions dans le fait symbolique.
Molino insiste sur le fait qu'un signe puisse être interprété de
manières différentes par l'émetteur et par le récepteur. Pour celui-ci, les
domaines qu'étudie la sémiologie, sont des faits symboliques dans la mesure
où il n'y a pas de textes ou d'images qui ne soient le produit de stratégies
(ce qu'étudie la poïétique) et qui ne donnent lieu h des stratégies perceptives
(que doit prendre en charge l'esthésique). Entre les deux se situe l'étude de
la trace ou niveau neutre, c'est-A-dire l'étude de structures dont on ne
prdjuge pas a priori qu'elles sont pertinentes poïétiquement ou
esthesiquement. Il convient de préciser la nature de ce que Molino appelle
le niveau neutre.
«Il s'agit d'un niveau d'analyse où on ne décide pas si les
résultats obtenus par une démarche explicite sont pertinents
du point de vue de l'esthésique ou de la poïétique. En
revanche, la segmentation proposée des unités fournit une
base pour la description ultérieure des phénomènes poïétiques
et esthésiquesb (Nattiez, 1988: 29).
Pour Molino, la difficulté des sciences humaines tient à ce que leur pratique
mélange constamment des données concernant le message lui-même (niveau
neutre et matériel), le processus de production du message (niveau
pdïétique) et le processus de perception et de réception du message (niveau
esthésique). «La confusion de ces trois aspects explique le caractère
spécifique de l'appréhension symbolique des faits étudiés par le chercheur.
C'est dans la mesure où on aura séparé ces trois niveaux de symbolisation
qu'on pourra qualifier l'analyse de sémiologique» (Nattiez, 1974: 6). Ce
faisant, la tripartition de Molino permet de distinguer ce que beaucoup de
sociologues travaillant avec des données langagières confondent ou
amalgament, à savoir les phénomènes de production et de réception de
l'objet, la publicité.
1.2 La sémiologie
La sémiologie a pour fonction de mettre en lumière des répertoires de
symboles. Selon Saussure, la sémiologie est la science générale de tous les
systèmes de signes (ou de symboles) grâce auxquels les hommes
communiquent entre eux. Elle est présentée par celui-ci comme un
événement social.
La sémiologie s'intéresse à la production et à la circulation des
signes dans la vie sociale. Elle est un préalable à la construction de leurs
significations, dont la sociologie participe. d a langue est un système de
signes exprimant des idées, et par là comparable à l'écriture, à l'alphabet
des sourds-muets, aux rites symboliques, aux formes de politesse, aux
signaux militaires>,(Saussure, 1965: 33).
L'enjeu de la sémiotique est important en sociologie puisqu'il a trait
aux «rapports entre la production du sens, la construction du réel et le
fonctionnement de la société» (Véron, 1980: 74). Pour Molino, la
sociologie implique un processus sémiologique dans la mesure oh on ne
peut construire d'analyses sans passer par l'élaboration de symboles au sens
de Cassirer: le chercheur ne prend en charge qu'un nombre limité des
traits constitutifs de l'objet (Nattiez, 1974: 6). Ce n'est probablement pas
sans raison que la sémiologie, science des signes, est en vogue dans les
sociktés de la modernité avancée. Les signes se rencontrent dans les villes
et les villages, les lieux de travail, les foyers, les centres de
divertissements, dans les médias et lors des grandes manifestations
collectives.
Bien que des contributions importantes aient émergé de la
Scandinavie (Hjelmslev, 1953), de l'Europe du Nord (Jakobson, 1976) et
d'ailleurs (Sebeok, 1981: chap. 5), cette science des signes (sémiologie en
français, semioric en anglais) est due à Saussure et Pierce. Saussure
avançait que la langue n'est qu'un système de signes parmi d'autres et que
l'on pourrait par conséquent concevoir une science générale des signes.
Cette nouvelle science, Saussure la baptisait du nom de sémiologie.
Les sérniologues pensent que l'image peut être regardée comme une
constellation de signes (Barthes, 1964). La sémiologie aborde l'image
comme un objet de sens; elle vise en effet à se constituer en théorie de la
signification et, pour cela, s'attache à décrire les différents langages,
verbaux et non verbaux, qui manifestent cette signification.
Si le mot et l'idée de sémiologie remontent au début du vingtième
siècle, sa mise en pratique est d'origine plus récente. Dans la recherche
publicitaire notamment, l'introduction du point de vue sérniologique ne
date que de 1964, année où Roland Barthes publiait la première étude
d'inspiration sémiologique, Rhétorique de l'image, consacrée à l'analyse
d'une publicité imprimée (Barthes, 1964. 40-5 1). Auparavant, Barthes
s'était mesuré à la critique sémiologique d'un certain nombre d e
phénomènes sociaux (du steak-frites au catch) dans un ouvrage intitulé
Mythologie, Metz publiait par ailleurs un premier article de sémiologie du
cinéma.
Pour Barthes, les images publicitaires peuvent être considérées
comme des systèmes sémiologiques. Barthes démontre comment fonctiome
l'image publicitaire en décelant les co~otationsd'une photographie, qui,
de prime abord, ne semblait pas vraiment en avoir. Cette première théorie
sémiologique non linguistique constitue une synthèse des idées de Saussure,
de Pierce et de Hjernslev.
À la suite des premiers travaux de Barthes, les analyses
sémiologiques se sont développées. Les systèmes de signes les plus étudiés
ont été les systèmes iconiques, surtout le cinéma (Christian Metz), la bande
dessinde (P. Fresnault-Deruelle), la photographie (Barthes), la peinture
figurative (Louis Marin) et l'image télévisuelle (Umberto Eco).
Examinons quelques concepts de base de la sémiologie que Barthes et
d'autres sérniologues proposent: 1) le signe, le signifiant et le signifié; 2) la
dénotation et la connotation; et 3) la rhétorique.
1.2.1 Le signe, le signifiant et le signifié
Le signe est la réunion d'une réalité perçue et de l'image associée à cette
réalité. Il évoque quelque chose que l'on nomme référent. Le signifiant et
le signifié sont des termes que l'on emploie pour désigner les deux
composantes du signe. Le signifiant correspond à la réalité perçue du signe
et le signifié, à l'image mentale associée à cette réalité. Cette distinction a
été formulée sous des noms divers tout au long de l'histoire de la
philosophie du langage. A la manière de Eco (1988: 36), on la représente
graphiquement dans un triangle.
Le signe est donc la réunion d'une réalité perçue (d'un signifiant) et de
l'image mentale associée à cette réaiité (d'un signifié). La signification est
l'acte qui unit le signif%au signifiant pour produire le signe.
1.2.2 Dénotation et connotation
Analysant une publicité imprimée, Barthes distingue l'image dénotée de
l'image connotée. Le message iconique de dénotation, message sans code,
correspondant aux objets présentés dans l'annonce. Le message iconique de
connotation, message rhétorisé, renvoie à des signifiés globaux. Mais Roy
pense plutôt que la publicité utilise toutes les figures de rhétorique, dont la
métaphore, ce qui contribue à en faire un discours purement connotatif
(Roy, 1990: 83). Quoi qu'il en soit, «les connotations d'une photographie
publicitaire sont, d'un point de vue théorique, dénombrables et limitées,
précisément parce que cette photographie est le produit d'une société
donnée en un lieu donné» (Porcher, 1976: 138).
Ces signifies globaux ne sont pas particuliers à l'image publicitaire.
On les retrouve également dans la presse écrite ou parlée, le jeu du
comédien, etc. Leur ensemble constitue la culture d'une société à un
moment donné de son histoire. «Les co~otationssont d'abord des idées
reçues qu'inculquent l'éducation et la culture. Elles fondent des distinctions
de valeurs et ont un grand poids id6010giqueu (Schmitt et Viala, 1984: 25).
Ces signifiants à travers lesquels passe la culture d'une société sont appelts
connotateurs et l'ensemble de ces connotateurs porte le nom de rhétorique.
Procéder à l'analyse sémiologique d'un message publicitaire consiste
à déceler les connotations que fournit ce message. Les résultats que permet
d'obtenir l'analyse sémiologique correspondent donc à la description des
connotations produites par la trace.
1.2.3 La rhétorique
Pour Eco (1968: 99). la rhétorique est conçue comme l'art de la
persuasion et la technique du raisonnement humain. Elle consiste à étudier
le discours persuasif. «La rhétorique apparaît ainsi comme la face
signifiante de l'idéologieu (Barthes, 1-
49). L'idée particulièrement
féconde qui se dégage de cette étude est l'hypothèse émise par Barthes qu'il
existe une rhétorique formelle, commune à l'image. Les figures
rhétoriques visuelles correspondent à celles du langage verbal: métaphore,
métonymie, litote, simplification, etc.
Parce que l'image dénotée est ce qui reste de l'image quand on en
supprime les signes de connotation, on devine que l'image dénotative
implique moins que l'image connotative. On peut retenir de l'analyse des
images publicitaires que leur signifié de dénotation demeure indigent dans
de nombreux cas et que tout se joue sur les co~otations.Selon Jacques
Durand: «On s'aperçoit que si la publicité a un intérêt culturel, c'est à la
pureté et à la richesse de sa structure rhétorique qu1el1ele doit: non pas à
ce qu'elle peut apporter d'information vraie, mais A sa part de fiction»
(Durand, IWO: 70).
La métaphore, l'hyperbole, la métonymie et toutes les autres figures
de la rhétorique contribuent à faire de la publicité une connotation.
Comme l'ont montre Lakoff et Johnson (1985), la métaphore, loin de
n'être qu'un procédé d'ornementation du langage ou un phdnomhe
exclusivement linguistique, est constitutive de la pensée et de l'expérience
du monde.
On sait que malgré leur multiplicité et leur diversité, les annonces
seraient beaucoup moins variées et originales qu'on pourrait le croire de
prime abord (Péninou, 1972: 2; McQuarrie et Mick, 1996).
«Ce que la rhétorique peut apporter à la publicité, c'est
avant tout une méthode de création. Dans la création
publicitaire règne actuellement le mythe de "l'inspiration"
et de "l'idée". En fait, les idees les plus originales, les
annonces les plus audacieuses apparaissent comme la
transposition de figures de rhétorique répertoriées depuis
de nombreux siècles. Cela s'explique puisque la rhétorique
est en somme le répertoire des différentes manières par
lesquelles on peut être original">^ (Durand, 1970: 91).
On peut ainsi considérer la trace publicitaire comme une manifestation de
paroles sociales puisées dans une réserve commune: la langue publicitaire.
2. Le mythique
Roland Barthes révèle l'omniprésence du mythe au coeur de toutes les
pratiques de la vie quotidienne. Par l'entremise d'une interrogation,
Barthes s'applique à enrichir k mot mythe. «Qu'est ce qu'un mythe,
aujourd'hui? Je donnerai tout de suite une première réponse tri% simple,
qui s'accorde parfaitement avec l'étymologie: le mythe est une parole: (...)
le mythe est un système de communication, c'est un message» (Barthes,
1978: 183). Ce qui importe ici, c'est que le mythe est d'abord pour lui ce
qu'en dit le dictionnaire, c'est le muthos grec, la légende, mais le mythe est
également la mystification, «action de mystifiem, pour enfin être interprété
comme un code.
A cet égard, les Mythologies sont parfaitement rév6latrices de cette
définition. Qu'il s'agisse des catcheurs, des acteurs ou de l'écrivain en
vacances, le mythe implique un symbolisme. Ce mythe se manifeste par
signes, c'est-à-dire que nous sommes dans L'univers du spectacle, où les
signes ne cachent pas leur fonction au consommateur. Mais le mythe,
comme le dit Barthes, se situe entre la réalité et la perception que nous en
avons. C'est ainsi la publicité qui s'insère entre le produit et le lecteur. Et
cette insertion, ce pisme, est le lieu de la distorsion. Ainsi «le rapport
entre la saleté et le détergent est-il, en première approche, un problème
purement matériel. Dès lors qu'une poudre à laver nettoie ma chemise, elle
remplit le rôle que j'attendais d'elle. Mais la publicité, qui vient s'insérer
entre les poudres à laver et la perception que j'en ai, me donne une vision
toute différente de ce rapport. Le sale et le lavage deviennent les
protagonistes d'une chasse, d'un procbs, oii la crasse et le détergent
apparaissent comme les deux pôles d'une vision manichéenne de la vie
quotidk~e.Ce faisant, la publicité qui me promet "de laver plus blanc que
blanc" intervient de façon discordante entre l'innoffensif paquet de lessive
et la perception que j'en ai et qui sont communiqués par les mythes comme
code.»
Comme l'affirme Matarasso, «dans l'affiche comme autrefois dans la
fresque, l'image ne parle pas des conflits de la sociét6 mais parle de son
mythe et à travers lui elle actualise l'image de soi au monde» (Matarasso,
1971). C'est une conception du monde reposant sur des acteurs (la star de
cinéma, le héros), des animaux, des lieux (l'île, la forêt) ou des situations
(l'orage, l'arc-en-ciel). On y découvre des animaux qui parlent ou des
objets qui s'animent.
Comment représente-t-on la société, le passé et l'avenir? La famille?
L'amour? Le corps? Quels sont les modèles de vie? C'est à travers ces
questions que les mythes se laissent surprendre. La publicité développe ses
sujets au gré de l'actualité, de la mode ou de l'histoire. Ces thèmes prennent
corps à travers des représentations stéréotypées. La distance du mythe au
stéréotype n'est pas aisée à décrire. D'une part, le mythe se cache demère
les composantes du récit qui créent du sens par leur combinaison. D'autre
part, le stéréotype repose sur l'évidence immédiate, et fonctionne comme
des mots-valises; il est un enchaînement d'éléments dont la logique a
disparu. Le mythe est suggestif, le stéréotype réducteur.
«Le fossé entre la rationalité et la publicite s'est maintenant
tellement creusé qu'il est difficile de se rappeler le temps de
la raison triomphante. Aujourd'hui, la question ne se pose
même plus de savoir si le publicitaire dit ou non la vérité.
Une publicité de McDonaldls, par exemple, n'est pas une série
d'assertions vérifiables et présentées avec logique. C'est une
mise en sche-une mythologie, si vous voulez» (Postman,
1986: 224).
Parallèlement à la publicité, la télévision, les livres scolaires et les films
(Lowry, 1982) constituent également une source inépuisable de traits
mythologiques. Lévi-Strauss (1978) a analyse la structure mythique de
l'oeuvre musicale de Wagner. Hopper (1970) a examiné les poèmes de
Wallace Stevens, Dylan Thomas et T.S.Eliot. D'autres chercheurs ont
observé le cinéma en tant que source de socialisation (cf. O'Guinn, 1987;
O'Guinn, Faber et Rice, 1985), de véhicule du mythique (Drummond,
lm)ou de dépositaire des valeurs sociales (May, 1980). Levy (1978) a
utilisé l'approche structuraliste de Lévi-Strauss afin d'établir des liens entre
les anecdotes entourant la consommation de produits dans les foyers et les
mythes les plus souvent répertoriés. L'ensemble de ces recherches amène à
penser que les écrivains, les sdnaristes et les publicitaires incorporent dans
leur travail de création des éléments mythiques (Wheelwright, 1%5: 155).
De la même façon, Hyman (1x5:
151) suggere que des écrivains modernes
comme Melville ou Kafka ne créent pas de nouveaux mythes, mais qu'ils
expriment des actions symboliques, équivalentes aux mythes. Dans tes
circonstances, on pourrait donc avancer que le «créateur publicitaire» s'en
remet aux mythes et aux symboles pour concevoir seç images.
D. CONCLUSION
Dans cette étude, la publicité sera considérée comme un objet social; une
des formes de l'expression de l'identité culturelle et sociale. Ce qui sera
fondamental ici, c'est l'affirmation que la publicité, donnée comme cuIture
populaire, est construite par l'entremise de symboles et de mythes. Les
pratiques, les données matérielles, la production, l'expérience sont
construites symboliquement et matériellement. La cornaissance et la
signification de la réalité ne parviennent pas ii l'acteur social directement;
elles sont construites et médiatisées par l'entremise de symboles et de
mythes.
De ce point de vue, la publicité fait partie intégrante du patrimoine
culturel. La publicité remplit un ou plusieurs usages sociaux, comme ceux
de divertir, d'enseigner, d'expliquer, d'informer mais aussi de parler de la
société.
La culture telle que définie ici
- la culture seconde - est tributaire
de l'environnement artificiel que l'homme se crée, ce qui signifie l'univers
personnel d'objets ou de services dont l'homme s'entoure comme d'une
coquille, mais aussi l'univers des images, des formules, des slogans et des
mythes qu'il rencontre dans sa vie sociale.
Derrière le dialogue d'influences commerciales entre annonceur et
consommateur, se manifeste un autre dialogue entre la société et l'acteur
social. Avec l'image, on est du cet6 de la séduction. La publicité legitime le
bonheur privé et les plaisirs matériels; la vie au gré du présent.
Dans la réalite actuelle, la publicité doit renoncer, sauf en de rares
circonstances, à revendiquer son efficacité en tant qu'information factuelle.
Elle repose sur d'autres bases, c'est-à-dire le symbolique et le mythique: en
s'adressant à l'imaginaire. La publicité iconique ne s'adresse plus tant à la
raison raisonnante ou au réel, mais à l'imaginaire. Elle est affective,
mythique et passionnelle,
Chapitre III
Méthodologie
A. INTRODUCTION
L'image est un objet difficile h analyser. Conçue le plus souvent en fonction
de la connotation, l'image implique tout un ensemble d'opérations
complexes. Dans ce chapitre, on dégagera et identifiera les éléments
méthodologiques propres à l'objet et
l'analyse. On présentera tout
d'abord le corpus. On poursuivra en soumettant la question de recherche.
Par la suite, on exposera les principes qui sous-tendent l'analyse et on
s'intéressera à la méthode d'analyse utilisée. On identifiera les éléments qui
entrent dans la composition de la grille d'analyse et on terminera avec
l'hypothèse relative à l'objet d'étude.
B. PRÉSENTATION DU CORPUS
Le choix du corpus d'images publicitaires a éte guidé par des
considérations méthodologiques et pratiques. Le mot corpus signifie
«territoire d'analyse». Barthes le definit comme aune collection finie de
matériaux, déterminée ii l'avance par l'analyse, selon un arbitraire
inévitable, sur laquelle il va travaillem (Barthes, 1985: 82).
Dans le contexte de cette recherche, il s'agissait en premier lieu de
fixer les limites du champ publicitaire, autrement dit de procéder à une
sélection exhaustive, représentative et relativement homogène parmi les
nombreuses publicités conçues et réalisées. 11 fallait aussi que cette sélection
s'inscrive dans une temporalité qui permette de circonscrire le matériel.
Dans cette thèse, on a choisi d'examiner les différentes images de la
publicité iconique rencontrées dans l'image fixe en Occident. Plus
précisément, on s'intéresse aux images publicitaires des magazines et des
panneaux-affiches durant la période s'échelonnant de 1987 à 1997
inclusivement. Enfin, on a choisi la publicité dans les périodiques et les
panneaux-affiches parce qu'ils sont deux médias clés dans l'offre
publicitaire.
La publicité parue dans les magazines et sur les panneaux-affiches
accordent normalement une place prépondérante à l'image fixe. Le plus
souvent, il s'agit d'annonceurs nationaux et de campagnes exportées dans
plusieurs pays occidentaux. On retrouve une image occupant généralement
50 % de l'espace, laquelle est tantôt accompagnée d'un titre, d'un slogan et
d'un logotype identifiant l'annonceur. A l'occasion, la présentation peut
varier, mais de façon générale, les messages publicitaires de ces deux
médias sont structurés de cette façon. En outre, d'un point de vue
économique, près de 30 % des budgets publicitaires leur sont consacrés et
ils permettent donc de rendre une image fidèle de l'ensemble de la
production publicitaire mondiale.
Les dessins et les photos publicitairies contenus dans Ies magazines et
les panneaux-affiches constituent autant de techniques de reconstitution et
d'imitation du réel. Les magazines et les panneaux-affiches apparaissent
comme des sources riches d'images fixes répondant aux critères déterminés
et aux objectifs fixés. Qui plus est, ces supports fournissent des quantités
importantes d'annonces publicitaires pour constituer un corpus
représentatif.
En shlectionnant les images apparaissant dans la publicité des
magazines et des panneaux-affiches, on choisit des médias qui s'adressent à
des publics diversifiés. On sait que les pratiques publicitaires ont fini par
privilégier certains médias et certains supports pour faire la publicité de
chaque catégorie de produits. Se concentrer sur un seul média ou un seul
support, ce serait commettre l'erreur de ne pas balayer complètement le
champ du discours social dans la publicité visuelle. Varier les sources, c'est
renforcer la validité de l'analyse en favorisant la multiplication des codes
tels qu'on les retrouve dans la umarmite sociale». Choisir des images
statiques 2t partir de deux médias et de plusieurs pays d'Occident permet
d'identifier plus précisément et plus efficacement la somme des thèmes
visuels utilisés par la publicité occidentale.
On est conscient que la télévision, media non retenu dans la présente
étude, constitue un élément de premier plan et qu'elle est par définition une
pourvoyeuse importante d'images publicitaires. Il faut noter toutefois que
les moyens audiovisuels comme la télévision ajoutent au moins un code
supplémentaire (le mouvement) et souvent plusieurs autres (le bruitage, les
musiques, les dialogues) aux langages constitutifs de l'image déj8 nombreux
et complexes.
Pour bâtir le corpus, on a constitué une banque de publicités. Pour ce
faire, on a rejoint les responsables des relations publiques de MétromédiaQuébec, Métromédia-Montréal, de Médiacom-Québec, de MédiacomMontréal et de Gannett Outdoor USA afin de prendre connaissance de leurs
archives publicitaires canadiennes mais aussi internationales Les publicités
panneaux sont constituées par des messages apparaissant sur des panneaux
réguliers (10 pieds x 20 pieds), des super-panneaux, des panneaux-bus, des
panneaux-métro et des abribus.
On a aussi examiné et dépouillé six revues spécialisées dans la
collecte de publicités en Occident: Marketing, Communication-Arts, US
AdReview, Advertising Age, Archive et le magazine du Publicité-Club. On
a aussi examiné et dépouil16 12 périodiques nationaux: Le Figaro Magazine,
Newsweek, Time, Billboard, GQ, Sports Illustrated, Cosmopolifuin,
Chatelaine (version française et anglaise), Vogue, Mackan's, Elle QuPbec
et Actualit6.
Ce faisant, le matériel de base est homogène - images fixes - tout
en étant représentatif de l'ensemble des messages issus de l'industrie
publicitaire. Une fois réalisé, cet échantillon était maintenant constitué de
plus de 2 000 images publicitaires qui ne pretendent pas toutefois être
absolument représentatives de toutes les tendances de la publicité
contemporaine. Ce corpus d'images est en fait un compromis entre les
exigences théoriques liées à la perspective sociologique et les contraintes
techniques reliées aux structures de la thèse. On a été placé devant
l'alternative suivante: plus la taiile d'un échantillon est considérable, plus le
type d'analyse risque d'être superficiel, tandis que plus la taille de
l'échantillon est réduite, plus la représentativité est remise en question.
Pour obtenir un maximum de représentativité, on a donc utilisé une
démarche de saturation progressive des variantes.
D'un point de vue sémantique, on a conscience qu'un corpus n'est
toujours que partiel. Dans tous les cas, il ne représente qu'une partie des
images publicitaires et par conséquent qu'une partie des expressions
rendant compte du phénomène étudié. Mais ce qui permet de dire qu'un
corpus, tout en étant partiel, est représentatif, découle des caractéristiques
même du discours, dans ce cas4 de sa redondance.
C . QUESTION DE RECHERCHE
Le point de départ de cette these découle d'une question toute simple:
Qu'est-ce que la publicitt! iconique raconte sur kr sociéîé? Il s'agit ici de
décrire le discours publicitaire. On veut découvrir ces signes qui
permettent aux images publicitaires de devenir une construction et un
système de significations.
La publicité utilise abondamment des images. Or, ces images sont
nécessairement significatives et il faut les questionner. Une revue des
ouvrages actuellement publiés sur le thème de l'iconique publicitaire nous a
convaincu de l'importance des images. Malgré l'abondance des ouvrages, la
plupart des écrits portant sur la publicité visuelle sont presque
exclusivement consacrés à l'analyse des producteurs et des récepteurs, et à
l'effet des images sur la société.
La question de départ ne trouvait donc toujours pas de réponse
satisfaisante. Il était clair que pour avancer, cette étude devait prendre du
recul par rapport à l'ensemble de la documentation sur les effets de l'image
publicitaire sur la société. On a donc cherché à revoir le modèle classique
((émetteur-récepteur».Plusieurs éléments de cette étude nous ont dors
amené à nous intéresser au modèle développé par Molino. En effet, cette
présence de la trace renvoyait à la question initiale. Ce nouveau modèle
permettait alors de porter un regard neuf sur l'image publicitaire.
On est ici en présence de l'analyse sérniologique, mais cette fois les
valeurs construites par l'image publicitaire sont à mettre en rapport avec
des réalités culturelles plus vastes. A un niveau sérniologiquement neutre,
l'analyse permet de dégager des formes signifiantes.
D. PRINCIPES D'ANALYSE
Dans cette thése, l'analyse repose sur une demarche qualitative et
descriptive. On ne voulait pas quantifier des données qui auraient permis
d'établir, par exemple, que «92 % des images publicitaires montrent
homme traditionnel», tandis que «8 % représentent l'homme nouveaum.
Cet aspect qui vient fréquemment s'inscrire en contrepoids de l'analyse,
bien que très stimulant, n'était pas pertinent dans le cadre de la présente
démarche, l'objectif étant plutôt de permettre une meilleure compréhension
des principes essentiels d'organisation de la matiere siwiante. Qui plus
est, il paraissait hasardeux d'utiliser une dthode de type quantitatif pour
rendre compte de la consistance du discours social de la publicité, car on
craignait que le sens de l'image ne soit escamotb au profit d'une inférence
statistique.
Dans l'analyse, on ne considérera pas davantage la réaction du
public, car cet aspect aurait impliqué l'analyse de la réception des images
publicitaires et leurs effets sur l'acteur social. On ne s'intéressera donc pas
aux effets positifs ou négatifs que les diffdrentes images publicitaires du
corpus ont générées et, encore moins, des effets qu'elles ont pu avoir sur la
vente des produits et services annonds. Comme on l'a vu dans le chapitre
premier, cette question des effets est sous-jacente aux problématiques qui
traitent de la réception des formes symboliques. Par ailleurs, la question de
l'efficacité est soutenue par une rationalité instrumentaie qui oblitére toute
la question du symbolique.
On ne veut pas non plus se mettre dans la peau du concepteur ou du
constructeur de messages. Prendre pour acquis que ce sont les producteurs
qui possèdent la clef du message c'est oublier que les rkepteurs
construisent aussi le sens et lui donnent une signification particuliére.
Le point de vue mis de l'avant sera donc celui de la prise en compte
de ce que Molino (1989) a appelé le niveau sémi01ogiquement neutre. La
distinction que Molino a proposée entre niveau neutre, stratégie de
production et strategie de réception du symbolique vise précisément à
permettre la description sémiologique.
On appellera audyse sémiologique~l'entreprise qui prendra e n
charge la spécificité de la rndhre dont l'image publicitaire devient un fait
symbolique. Mais comment définir cette spécificité? Nous nous fondons sur
la conception sémiologique de Jean Molino selon qui le processus de
symbolisation implique trois pôles: le message lui-même dans sa réalité
matérielle, les stratégies de production du message et ses stratégies de
réception. Molino dénomme la description du message lui-même *analyse
du niveau neutre», la description des strategies de production apoïétiquem;
celle des stratégies de perception r~esthésiquw.
«Il est certain qu'il existe une grande variété de stratégies de
réception, qui se distribuent selon le temps, selon les
dimensions de l'espace social et des personnalités
individuelles. Les oeuvres changent sans cesse de sens, mais
faut4 alors dire que c'est la réception sociale qui constitue le
sens du texte? Pas plus que les stratégies de fabrication, Ies
stratégies de réception ne sauraient servir de norme
d'interprétatiom (Molino, 1989: 48).
Par niveau neutre, on entend un niveau descriptif dans lequel on fait
l'inventaire aussi exhaustif que possible des types de configurations qu'il est
possible de reconnaître dans l'image. Pour reprendre Molino, ce niveau est
neutre, parce qu'on ne se donne pas pour objectif de retrouver, à partir de
la seule trace laissée par le publicitaire, quelles ont étk ses stratkgies de
production, et quelles sont les stratdgies perceptives de l'acteur social qui
regarde une image publicitaire.
Il s'agira alors de repérer les traces des ophations s6miologiques et
symboliques. «C'est la présence de ces traces-ce que nous avons appelé
niveau neutre ou matériel d'existence du symbolique-qui permet seule à
L'analyse de mordre sur le symbolique. (...) Le seul objet solide et
consistant est représente par les traces de l'activité symbolique-geste,
phrases, écritures, oeuvres d'arb (Molino, 1989: 33).
On s'intéresse donc aux opérations permettant de construire du sens.
Les analyses d'images publicitaires que L'on présente s'inspirent, à divers
titres, des travaux de sémiologues comme Barthes et Molino. C'est à
travers les concepts d'intertextualité et d'interactivité qu'on mettra en
oeuvre ce modèle d'analyse des images.
1. L'intertextualité
Le concept d'intertextualité manifeste la dimension culturelle de toute
production humaine. Tout message est en relation avec un contexte
culturel-lieu, situation, etc. Il renvoie aux reférents d'une époque et aux
manières de les communiquer. <<AU
vrai, toute image, à bien y regarder,
est toujours l'image d'une image,>(Fresnault-Desruelles, 1983: 14).
Ainsi, les différentes manières de représenter symboliquement le
temps, l'espace, le corps et l'imaginaire ne seraient probablement pas
compréhensibles chez ceux qui n'auraient jamais vu de peintures ou de
dessins. On retrouve la même idée chez François (1980) lorsqu'il affirme
qu'il n'existe aucune production totalement nouvelle. Toute image apparaît
alors comme portant la couture et les reprises de «collages» du discours
social. Ces discours circulent, se demandent, s'offrent et s'échangent. aOn
voit ici apparaître la notion d'intertextualité comme circulation et
transformations d'idéolog&mes,c'est-à-dire de petites unités signifiantes
dotées d'acceptabilité diffuse dans une doxa dom&» (Angenot, 1981: 106107).
2. L'interactivité
La deuxième dimension permettant une approche du niveau
sémiologiquement neutre de l'image publicitaire suppose la prise en compte
de son interactivité. «Les approches linguistiques et pluridisciplinaires de la
communication ont montré que la communication ne se réduisait jamais au
message. Pour qu'il soit sémiologiquement possible d'échanger un message,
il semble qu'il faille effectuer un ensemble d'opérations permettant la mise
en place de la relation au sein de laquelle le message prend consistance et
signification»(Luciole, 1988: 50).
L'image publicitaire est donc un lieu où le social et les valeurs se
réactudisent, se construisent. Ce faisant, l'image publicitaire est l'un des
lieux d'émergence du social et du culturel et peut être définie
provisoirement, en tant qu'entité, comme une action sociale de nature
s&niologique, qui met en jeu, dans le travail symbolique et mythique
qu'elle opère, un rapport social.
E. LES MESSAGES ICONIQUES
Toute publicité articule des messages en provenance de codes sémiologiques
différents: codes linguistiques, graphiques et iconiques. Or, pour les fins de
cette thèse, l'analyse reposera essentiellement sur le code iconique et
renvoie à tous les systèmes de représentation figurative par voie de L'image.
1. Méthode d'analyse
La méthode d'analyse utilisée consiste à examiner les contenus iconiques de
ia publicité. On opte pour une grille qui représente d'une façon articulée
les divers éléments de la vie en société.
Pour s'approprier Barthes, «une photographie sera pour nous parole
au même titre qu'un article de journal: les objets eux-mêmes pourront
devenir paroles, s'ils signifient quelque chose» (Barthes, 1957: 195). Que
l'acteur social occupe tel ou tel emploi, qu'il porte tel vêtement, tel tissu ou
tel bijou, voilà autant d'indicateurs qui aident à recréer le contexte dans
lequel se déroule l'action de l'image.
L'analyse doit amener à saisir les spécrficitbs de l'image publicitaire.
Les éléments qui la composent doivent être déchiffrés afin de mettre à jour
les codes qui l'animent, d'établir son lexique. Cette recherche de type
sémiologique est de caractbre essentiellement descriptif. Elle est axée sur
une exploration de la trace. On a effectué une comparaison des constantes
découvertes pour mesurer le degré de changement. Cela permet de
distinguer diverses influences sur la vision fictive proposée par les images
publicitaires.
Une première lecture des publicités du corpus a permis d'en arriver
à une vision globale des acteurs sociaux, du récit, des évhernents, et de
cerner dans son ensemble la dynamique du discours publicitaire. Elle a mis
en évidence la similitude des intrigues et des thbmatiques,
la
<<stéréotypation>>
des personnages, la ressemblance des milieux dépeints,
l'utilisation des même astuces imagiques, etc.
Mises à part certaines caractéristiques peu déterminantes, plusieurs
publicités sont apparues, à première vue, comme des répliques d'autres
publicités. Certes, la publicité n'est pas pour autant monolithique. Mais de
façon générale, on est frappé par la constance des thèmes et des axes
développés.
Étant donné qu'il n'existe pas encore. à proprement parler, de
théorie générale de la repdsentation dans la publicité, on a constitué une
grille permettant d'andyser les 2 000 messages retenus. Par la suite, on a
procédé à l'analyse. Chaque publicité fut analysée quant aux principaux
éléments symboliques et mythiques véhiculés par les images.
2. La grille d'analyse
Le propre d'une image publicitaire consiste à inscrire ou Bnoncer dans un
espace limité et une surface plane les thèmes de la publicité en faisant
intervenir des figures de l'espace, du temps, du corps et de l'imaginaire.
Aussi a-t-on recours dans ce travail ài des outils nombreux de réflexion,
mais encore insuffisants pour garantir des résultats définitifs.
Toute description nécessitant l'appel à un modèle, on emprunte les
principes développés par Molino (l!V3, 1979, 1984, 1989) concernant la
nature de toute forme sérniologique. Le premier point exige de traiter les
formes symboliques comme des *objets du mondem. Considérer l'image
publicitaire comme un «objet du monde», c'est en fait introduire La
description à une analyse positive: comme tout objet du monde, la forme
symbolique est susceptible d'être découpée et reconstruite scientifiquement.
On propose une grille d'analyse permettant de noter les qualités
formelles et les effets spéciaux, la description du contexte spatial et
temporel, la description du corps et de l'imaginaire. On a recourt à un jeu
de catégories structurées en grille d'analyse. Pour construire cette grille,
on s'est appuyé sur certaines théories pertinentes, lorsque disponibles dans
certains champs d'analyse. Notre découpage s'inspire Zi la fois du corpus et
des travaux suivants: Durand (1970), Goldrnan et Papson (1945), kymore
(1975), Olson (1995), Péninou (1972), Plecy (1971), Porcher (1976) et
Victoroff ( 1978).
Pour l'analyse du temps, on s'est réf6ré à Arsenault (1996), Attali
(1982),Moscovici (1983), Ricoeur (1990), Sauvageot (1987), Van Gennep
(1951) et Varagnac (1954). On a consulté Baudrillard (1986), Moscovici,
Serge (1983) et Sauvageot (19û7) pour l'analyse de l'espace. On a énidi6
Boltanski (1971), Fast (1971), Goffman (1979), Millum (1W5), Le Breton
(1992), Loux (1978), Nichaise (1988), Ripert (1976), Shields (1996) et
Vigarello (1978). Enfin, on s'est rapporté, pour l'analyse de la construction
des personnages, à l'étude du professeur François Baby (1988, 1992) qui
traite de la construction des personnages au cinéma et à la télévision. On a
aussi consulté Randazzo (1993) et Veblen (1978).
11 n'a pas été facile de bâtir puis de classer Les images dans une
catégorie ou une autre. C'est d'ailleurs le même problème pour tout
système de classification complexe: les différents éléments du corpus ne
répondent pas toujours parfaitement aux catégories définies. L'ampleur et
la diversité de la production publicitaire ont été longtemps considérées, non
sans juste raison, comme un obstacle sérieux à toute tentative d'analyse
systématique.
L'analyse est centrée sur la représentation publicitaire. Tout comme
les outils utilisés par les sociologues sur le terrain, cette grille
d'observation est ouverte, pour pouvoir y ajouter, au fil de l'enquête, des
observations non prévues au départ. Chacune des images publicitaires du
corpus a été analysée et classée sous l'une des quatre rubriques distinctes le temps, l'espace, le corps et l'imaginaire
- et chaque rubrique regroupe
plusieurs traits.
2.1 Les figures du temps
Dans le chapitre concernant le temps social, on s'intéresse au temps
construit. Le terme «temps social» désigne généralement la nature et les
rapports entre les divers modes d'activité dans le temps considérés selon
leur durée et leurs rythmes propres, de même que les ciifferentes rnanikres
de concevoir et de se représenter le temps au sein des univers sociaux. Une
telle notion met en relief les différents prodés de structuration du temps.
La notion de temps social trouve ses origines en anthropologie et en
sociologie. Elle remonte, pour l'essentiel, aux premiers travaux de l'école
durkheimienne @urkheirn, 1937; Hubert, 1929; Mauss et Beuchat, 1904-
1905; et Halbwachs, 1925). Durkheim est le premier qui, dans une
perspective sociologique, considéra la notion de temps comme «un cadre
abstrait et impersonnel qui enveloppe non seulement l'existence
individuelle, mais celle de l'humanité» (Durkheim, 1937: 14).
«Ce n'est pas mon temps qui est ainsi organisé; c'est le temps
tel qu'il est objectivement pensé par tous les hommes d'une
même civilisation. Cela seul suffit déjà il faire entrevoir
qu'une telle organisation doit être collective. (,..) C e
qu'exprime la catégorie de temps, c'est un temps commun au
groupe, c'est le temps social, si l'on peut ainsi parler. Elle est
elle-même une véritable institution sociale» (Durkheim, 1937:
15).
Durkheim mit en relief le caractère proprement social du temps. Il montra
que le temps est une donnée collective et que les individus composant une
société partagent un entendement commun du temps. Au même titre que la
religion, le temps et l'espace ont donc une origine sociale: «C'est le rythme
de la vie sociale qui est à la base de la catégorie du temps; c'est L'espace
occupé par la socibté qui a fourni la matière de la catégorie d'espace,
(Durkheim, 1937: 628).
Ainsi, chaque activité produit son propre temps, et la socibt6
orchestre les activités multiples qui s'agitent en son sein, construisant le
temps social en heures, en jours de travail et jours de fêtes, en années, en
décennies et en siècles. Quand il s'agit de décrire des événements, des
pensées, on a toujours comme notions dominantes des notions d'ordre
temporel.
Le temps social renvoie aux dkoupages des activités humaines selon
leur inscription dans une durée delimitée, récurrence des jours et des
saisons, ou au déroulement de phénomènes physiques ou biologiques. La
mort de ce temps unique permet de faire voir le foisonnement des temps
sociaux en publicité. Ces temps n'existent alors qu'à travers des visuels
fabriqués qui construisent et racontent le temps, bref qui représentent.
Lieu de manifestation privilégié de certains aspects de la culture, les
temporalités sociales telles que d6finies par la publicité désignent le temps
vécus et construits par le groupe. On tente alors de souligner quelques-uns
de ces traits en limitant les observations aux conceptions dominantes du
temps dans les sociétés. On examinera tes caractéristiques propres à ces
temps.
Les images publicitaires du corpus s'inscrivent dans une dimension
temporelle qui leur donne un caractère dynamique et leur permet d'évoluer
et de revêtir différentes formes, selon l'époque et les moeurs mis en scène.
Le temps est un aspect important de l'image publicitaire, non seulement
parce qu'il situe historiquement ou socialement b récit, mais aussi parce
qu'il est lié directement à la nahm et aux expressions des acteurs sociaux.
La dimension temporelle s'évalue tant& en termes d'année, tantôt en termes
d'époque ou d'âge.
De nombreuses images integent une dimension temporelle dans
laquelle s'inscrit la publicité. La représentation du temps peut se faire selon
quatre axes:
Le temps biographique: la première enfance, la deuxi&me
enfance, jeune adulte, le mariage, la famille, la
vieillesse et la mort.
Le temps bistorique: le temps des ancêtres, le temps premier,
le temps contemporain et le temps de l'avenir.
Le temps géré: la journée, la semaine, le mois, les saisons et
l'année.
Le temps des rituels: Noël, Pâques et la fête anniversaire.
Chaque image publicitaire devra parvenir techniquement à représenter
l'inscription d'une dimension du temps, relevant de l'une ou l'autre de ces
quatre catégories d'axes.
2.2 Les figures de l'espace
Dans ce chapitre, on s'intéresse à l'espace construit. Toutes les sociétés, en
effet, ont affaire avec l'étendue; c'est-à-dire que toutes sont situées dans
l'espace, dans un lieu qu'elles particularisent et qui les particularise.
«Tout ce que l'homme est et fait est lié à l'expérience de
l'espace. Notre sentiment de l'espace résulte de la synthèse de
nombreuses données sensorielles, d'ordre visuel, auditif,
kinesthésique, olfactif et thermique. Non seulement chaque
sens constitue un système complexe mais chacun d'entre nous
est également mode16 et structur6 par la culture. On ne peut
donc échapper au fait que les individus élevés au sein de
cultures différentes vivent également dans des mondes
sensoriels différents» (Hail, 1971: 12).
L'occupation d'un lieu géographique ou la référence à un espace révèle la
marginalité ou la hiérarchisation. L'imaginaire spatial de la trace
publicitaire renvoie à des lieux; il comporte une topographie qui lui est
propre et reflète les relations que l'homme établit avec i'espace.
«L'espace est fait d'un jeu raffiné de renvois et de correspondances
entre les multiples composantes de la nature et de la culture, de l'individu
et de la société, jeu à la fois original et dont 110riginaiit6qualifie cet espace
en le différenciant des autres, fondant et exprimant ainsi l'identité d'un
groupe» (P.-Lévy et Segaud, 1983: 9).
De ce point de vue, tout espace est un construit. Dans cet effort
d'approche de l'espace, il faut essayer de comprendre le jeu des signes. Il
faut alors questionner l'image publicitaire pour recenser les représentations
des temps sociaux que l'on y retrouve. On a identifié les espaces sociaux
suivants:
O
L'espace interstellaire
L'espace mondial
L'espace nationai: les *a&-Unis. la Californie, l'ex-URSS, le
Canada, l'Amérique Latine, l'Europe, l'Asie, les pays arabes,
l'Océanie et L'Afrique.
L'espace infranational: urbain et rural
L'espace domestique
O
L'espace autre
0
L'espace religieux
O
L'espace cosmoIogique: l'eau, le feu, l'air et la terre.
Ces différents espaces sont représentés iconiquement dans plusieurs images
et nombreuses sont les manières permettant de les imaginer. Le plus
souvent, la publicité donne à ces établissements spatiaux un ensemble de
significations et d'attributions liées à des pratiques et des repdsentations
sociales et symboliques.
Il convient de reconnaître qu'il existe des usages culturels des temps
et des espaces et de considérer le rapport entre un temps ou un espace d'une
part, et une valeur symbolique d'autre part. Avec l'espace et le temps, on
est donc dans le domaine des symboles et des résonnances culturelles
profondes.
2.3 Les figures du corps
Dans cette partie, ce sont les figures du corps qui retie~entl'attention. 11
s'agit de recenser les différents usages du corps dans l'image. Le corps, en
tant que forme visible, est construit non seulement à travers ses contours
physiques, mais aussi dans la manière de le porter, de le maintenir, d'en
faire usage.
Le corps humain est en quelque sorte à l'origine de tous les
symboles: la vue et l'ouïe, le toucher, le geste ou la parole, mais aussi la
façon de marcher, de s'asseoir, de sourire ou d'exprimer ses émotions des
hommes et des femmes. De ce point de vue, le corps n'est pas qu'une
donnée biologique. Des facteurs culturels sont aussi inhérents B l'oeuvre.
L'usage du corps, même s'il renvoie ii des automatismes
comportementaux et à des habitudes qui paraissent spontanées, demeure un
produit social. Par-delà la simple configuration physique ou
morphologique, chacune des actions ou réactions, des attitudes, des
postures, des mimiques, si singulière ou personnelle soit-elle, est dans une
large mesure dessinée par un réseau subtil de dispositions acquises mais
relativement transposables. «Le corps (...) est l'emblème oh la culture vient
inscrire ses signes comme autant de blasons» (Vigarello, 1978: 9).
«Façonné par le contexte social et culturel qui baigne
l'acteur, le corps est ce vecteur sémantique par
l'intermédiaire duquel se construit l'évidence de la relation
au monde: activités perceptives, mais aussi expression des
sentiments, étiquettes des rites d'interaction, gestuelles et
mimiques, mise en scène de l'apparence, jeux subtils de la
séduction, techniques du corps, etc.» (Le Breton, 1992: 3).
Comme l'a écrit Bourdieu, le corps est perçu et réinterprétd comme autre
chose que lui-même. nLa couleur et l'épaisseur du rouge à lèvres ou la
configuration d'une mimique, tout comme la forme du visage ou de la
bouche sont imm6diatement lues comme des indices d'une physionomie
morde socialement caractérisée» (Bourdieu, 1977: 51).
On dispose aujourd'hui d'un nombre grandissant de recherches qui
renseignent sur les manières dont la culture et la publicité s'emparent de
l'expression corporelle pour en faire leur propre langage. Les travaux de
Edward Hall (1963, 1971, 1979), Erving Gooffman (1977, 1979) ou
encore ceux dtEkrnan et Friesen (1969) ont conduit à ce que l'on pourrait
appeler une sociologie du corps dans laquelle peuvent se lire les
différences, les contradictions et les rapports de force qui tissent le social.
Il faut garder en mémoire le caractère construit du corps et des
multiples significations qui s'y greffent. «Le signifiant corps est une
fiction. Mais une fiction culturellement opérante, vivante» (Le Breton,
1992: 36). Le mode de représentation du corps contribue à mettre en
oeuvre les différents signifiants de la symbolique,
Communication non verbale: position du corps et position dans
l'image, regard, mimique, geste, posture, comportement
L'apparence physique: attribut, nu ou habillé, partie(s) du
corps en &idence, position du corps, aspects physiques,
silhouette, couleurs, ethnies, coiffure, maquillage, etc.
Comportement des acteurs: individuel-collectif, actif-passif,
entre les hommes, entre les femmes, homrne/femme, loisir,
sexualité
Éléments relatifs aux rapports dans la soci& rôle de l'homme
et de la femme, rôle de la famille, rôle au travail ou dans la
société, rapport avec les structures d'autorité
Le corps, par son orientation, par l'intensité du regard ou du geste,
interpelle de manière directe. Sur le plan iconique, le gros plan du visage
ou le sourire de l'acteur, par exemple, construit I'image. Voilà pourquoi on
s'intéresse aux éléments suivants:
Corps: tête, visage, yeux, nez, oreilles, bouche, cou, épaules,
bras, mains et doigts, seins, coeur, dos, ventre et nombril,
hanches, fesses, organes génitaux, jambes, pieds, squelette
Corps de l'homme et de la femme
Corps et sexe
Corps et culte de la bonne forme: modernité, virilité, lieux
sportifs et sports d'équipe
2.4 Les figures de l'imaginaire
Il s'agit de recenser les différents emplois de l'imaginaire dans l'image.
L'imaginaire désigne le monde tel qu'il résulte de son découpage par le
symbolique et Le mythique. Grâce aux travaux de Baudrillard-on pense
surtout à l'ouvrage Le système des objets-on
a pu, tout en le
réintroduisant, ddpasser le sens immédiatement commercial de la publicité.
Baudrillard a montré que les images publicitaires sacralisent les objets et
l'univers au-delà des contingences fonctio~elleset utilitaires. A travers la
consommation, c'est tout un monde de fantaisie qui est c e évasion fictive
vers d'autres cultures, d'autres temps «liés à la rupture d'un ordre global»
et où on ne répond plus qu'à un impératif, «celui de calcul d'ambiance»
(Baudrillard, 1974: 44 et 48). Ce faisant, l'objet dépasse son état d'outil; il
est une sorte de mémorial (Baudrillard, 1968).
La représentation de l'imaginaire se fait selon deux axes. Le premier
axe concerne le monde des personnages, de même que les animaux et les
insectes.
Les personnages à l'apparence humaine: les stars, les gens
célèbres, les personnages de contes et légendes, les personnages
institutionnels, les personnages de la bande dessinée et les
personnages fictifs
Les animaux et les insectes: le chien, le chat, le cheval, les
animaux sauvages, la faune traditionneiie, les oiseaux, les
insectes et le monde de l'eau
L'analyse des personnages procure un grand nombre d'éléments
constitutifs. Le personnage est un acteur social, c'est-à-dire un élément d'un
système de relations sociales. L'analyse tient compte de la position sociale
des divers personnages, des «figurants>>anonymes principaux ou
secondaires. La publicité met souvent en scène des types sociaux ou
personnages institutionnels dont les caractéristiques sociales sont flanquées
d'attributs physiques, psychologiques ou moraux le criminel laid, le savant
excentrique, le capitaliste corrompu constituent de tels types dans les
images publicitaires que l'on a examinées.
En second lieu, l'imaginaire est ii mettre en relation avec le statut
social imaginaire. A un niveau sémiologiquement neutre, la grille permet
de dégager des formes signifiantes suivantes:
Les personnages
Les objets
La marque
La culture (l'art, la musique et le plaisir des sens)
Les espaces de la richesse
LRs sports et les loisirs
L'argent
L'analyse centrée sur l'étude des aspects symboliques et mythiques de
l'imaginaire publicitaire nous amènera à signaler les relations des acteurs
sociaux avec divers thèmes et représentations symboliques: langages, codes
de communication et styles de vie imaginaires - regles d'étiquette, formes
d'art diverses, modes vestimentaires, gastronomie, sports, jeux et loisirs.
L'hypothèse est de nature exploratoire; elle postule que la publicite, en tant
qu'agent socialisateur, joue un rôle important dans la formation culturelle
de l'acteur. Cette hypothèse touche les problèmes spécifiques reliés à
Ho.
La publicité procède à partir d'un modèle homogénéisant du
social et de la vie en société. Ce modèle construit une
représentation des acteurs et entretient l'image d'une
culture peu diffknciée. LRS principaux éléments de cette
représentation sont:
a)
b)
c)
Une omniprésence de la classe moyenne et de la
bourgeoisie; de la culture blanche, mâle de type nordaméricaine.
Une occultation de la réalité du travail et une absence de
confiit tant dans la sphère privée (famille, etc.) que
publique (politique, etc.).
En conséquence, présentation et survalorisation d'un
genre de vie harmonieux.
La pertinence de cette demarche &ide dans les nouvelles avenues de
recherche que l'analyse du discorn visuel publicitaire peut susciter. Elle
repose aussi sur un défi: la nécessité de produire une description de l'image
publicitaire comme entité singulière, comme forme sémio1ogique.
Prétendre reconstruire l'image publicitaire, c'est lui reconnaître les
attributs qui lui sont conférés dans l'expérience sociale et les problématiser.
La difficulté commence dans cette nécessite de produire une description
sérniologique de l'image publicitaire. En laissant de côté l'étude des
producteurs, des récepteurs ou des effets et conséquences de la publicité
visuelle, on peut alors classifier à la manière de Molino les éldments du
corpus.
G. CONCLUSION
L'image construit, dans un langage qui lui est propre, la signification de la
publicité. Elle suppose l'existence d'une photo, d'un dessin ou d'un schéma
sur lequel se structure la nanation.
Dans cette thèse, on a choisi d'analyser les images rencontrées dans
l'image fixe provenant de la publicité imprimée et des panneaux-affiches
parus dans les années 1987-1997 en Occident. L'analyse reposera sur une
démarche qualitative et descriptive. On ne dbrtiquera pas les effets des
images publicitaires. On ne veut pas non plus s'intéresser aux producteurs
- agences de publicité, graphistes, etc. On croit d'ailleurs que la sociologie
ne se réduit pas à l'étude des effets (effets de la publicité, de la musique,
d'un éditorial dans le journal Le Devoir, etc.).
Dans cette recherche, on s'intéressera en priorité à la trace
- le
niveau neutre ou matériel d'existence du symbolique. Le niveau neutre est
un niveau d'analyse où on ne décide pas a priori si les résultats obtenus par
une démarche explicite sont pertinents du point de vue esthésique et/ou
poïétique. Le niveau neutre est perpétuellement bouleversé: il est remanié
et transformé à chaque fois que de nouvelles informations conduisent à
introduire de nouvelles variables descriptives et à réorganiser en nouvelles
configurations les découpages antérieurs.
L'objectif de cette these consistera essentiellement à décrire le niveau
neutre, qui est celui de la matérialisation du discours iconique, et qui
fournit ultérieurement un point d'ancrage pour les analyses poïétiques et
esthésiques. (Nattiez, 1975: 59. Il est important de noter qu'on ne mettra
pas en lumière la variation de ces traces et des sociétés dans l'espace ou le
temps. On ne cherchera pas non plus à découper géographiquement ou
chronologiquement la trace. Il s'agira plutôt de repérer les traces des
opérations sémiologiques et symboliques, de decontextualiser l'objet pour
l'analyser en lui-même, pour lui-même et par lui-même.
C'est
travers les concepts d'intertextualitk et d'interactivité qu'on
mettra en oeuvre ce modèle d'analyse des images. On propose une grille
d'analyse permettant de noter le contexte spatial, temporel, corporel et
imaginaire. On a voulu ainsi déconstruire l'image par la recension des
formes représentées et préparer le relevé des valeurs culturelles associées à
l'image publicitaire.
Chapitre IV
Les figures du temps
dans la publicité
A. INTRODUCTION
L'objectif de ce chapitre est de dégager la temporalité des images
publicitaires. Le temps est consid6ré ici comme une sphère de la culture.
De façon plus précise, La temporalité de l'image publicitaire renvoie à une
conception du temps
- cyclique, linéaire, etc. Le temps c'est celui des
rythmes de la vie, des saisons, des fêtes, de la permanence et des
changements de l'histoire, du passé, du présent et de l'avenir.
Ce constat conduit à comprendre le temps non plus comme une
dom& universelle, mais comme un p d u i t ou une construction sociale,
situé socialement et culturellement. Cela ne signifie pas que le temps
n'existe pas, qu'il n'y a pas de temps, mais plutôt que la façon de le penser,
de le mesurer ou de le vivre varie au gré des traces publicitaires. En ce
sens, on ne peut pas parler du temps au singulier; mais plutôt de la pluralité
des temps sociaux dans l'image publicitaire.
En tant que vakur socide caractérisant la société industrielle et
urbaine, on pense que la publicité va se réferer de façon importante h la
notion de temps. Largement tributaire des matériaux publicitaires, nos
observations seront inevitablement fragmentaires. Les traces ne
permettront donc pas de reconnaître dans tous les détails ce terrain fort
dense; tout au plus permettront-elles de dégager des points de repère
significatifs et d'identifier certains artefacts ou construits associés à des
contextes variés.
B. TEMPS SOCIAL ET PUBLICITÉ
Globalement, l'analyse a permis d'identifier quatre types de temps dans la
publicité. Premièrement, on a appelé temps biographique, celui qui est
associé aux changements successifs de la définition des âges de la vie. Ce
temps distingue différents types de temps se rapportant aux événements
essentiels de la vie: la naissance, l'enfance, l'adolescence (jeunes gens), le
mariage, la vieillesse et la mort. 11 permet de percevoir que la trace
publicitaire construit ses définitions de l'âge dans l'échelle de la vie
humaine.
Deuxièmement, on a appelé temps historique, celui qui fait référence
aux origines et B l'histoire. 11 inclut quatre niveaux de temps: 1) le «temps
des ancêtres» qui est souvent associé au mode de vie traditionnelle; 2) le
«temps premiem, que l'on peut qualifier à partir des mouvements de mode,
par exemple, les années soixante ou les années soixante-dix; 3) le «temps
contemporain>,qui réfère à l'actualité, au moment présent; et 4) le «temps
de l'avenir» qui anticipe et qui parle de demain. Troisièmement, on a
appelé temps gérk celui qui fait reference au monde des symboles et des
représentations associés à la succession des jours, des semaines, des mois,
des saisons et des annees. Quatriémement, on a appelé temps des rituels
celui de la fête, des réjouissances, du passage d'un Ctat de vie à un autre.
1. Le temps biographique
Le temps biographique est un temps socialement marqué, sinon étiqueté par
la publicité. Les changements successifs de la définition des âges de la vie
permettent de percevoir aisément ce que les sociologues ont pu saisir, à
savoir que l'âge comporte des étapes et que les sociétés construisent
culturellement ses définitions de l'âge. La publicité
- culture seconde -
ne fait pas exception à cette règle.
Les images de la publicité aident à percevoir l'historicité d'un temps
de ['enfance,d'un temps de la jeunesse jusqu'à celui du troisieme âge et de
la mort. La vie «publicitaire»est ainsi subdivisée en passages, en étapes qui
accompagnent, à un moment donné de la vie d'une personne, des
changements d'âge et de situation sociale.
L'étude de ces phases de vie, telles que représentées dans les images
publicitaires, en plus de révéler les événements marquants, conduit
indirectement à un premier repérage du construit publicitaire. Il appert
ainsi que la vie telle que montrée dans la publicité est décomposée en
séquences relativement fmes, en clichés, en étapes qu'on doit franchir par
l'intermédiaire de certains rites rattachés à un âge déterminé. Ces étapes,
entraînent avec elles une modification du statut social, de la position
qu'occupent l'homme et la femme dans la société.
Il semble aussi que le temps construit par la publicité renferme en
lui-même certains Wnements fixes. Ainsi, à un moment déterminé de la
vie, à un âge donné, correspondent certaines activia précises fixées par la
société.
Le temps tel que &fini par la publicité ddtennine ainsi plusieurs
des activités marquantes de la vie.
À grands traits. et en s'en remettant au corpus et aux travaux
d'Arnold Van Gennep (1951) et de Varagnac (19%. 91-105),on a
subdivisé le temps biographique en sept phases ou étapes que l'on doit
franchir de la naissance à la mort: 1- la première enfance (naissance); 2- la
deuxième enfance (les premiers contacts avec l'école); 3- les jeunes adultes;
4- les nouveaux mariés; 5 la famille; 6- les anciens; et 7- la mort.
Chacune de ces étapes, on va le voir à partir des images publicitaires
du corpus, est accompagnée par ce que Van Gennep appelle des «rites de
passage» ou des points de repère, c'est-à-dire moments clés, des
cérémonies, des fêtes, où par conséquent, l'on assure le passage d'un palier
à un autre, d'une phase de vie à une autre.
1.1 La première enfance
La première enfance s'étend de la naissance
- ou de la conception -
jusqu'h l'âge de deux ans. Cet être qui ne parle pas encore est pourtant un
corps construit. En publicitk, le bébé est l'objet d'une iconographie oh se
rencontrent de nombreux discours: l'amour, la famille, la tendresse et le
corps*
Lors de la première enfance, le bambin est entre les mains de sa
mère (figure A- 1),de son père (figure A-2), des parents (figure A-3) ou
des grands-parents (figure A-4); il est un centre d'intérêt important.
Le message iconique perpétue généralement la croyance
traditionnelle: le bébé est beau et en santé. L'ensemble du message
publicitaire suggère l'i~wence,la spontanéité et la pureté. Elément de
protection indispensable, le berceau de la chambre d'enfant (figure A-5) est
porteur de significations propres.
Même si la trace révèle que l'imagerie publicitaire est fascinée par
les bébés et les enfants, il n'est pas facile d'analyser l'image de bébé. En
effet, bébé se donne en spectacle. Une image publicitaire montre un
pompier tenant un bébé (figure A-6) alors qu'une autre met en scène un
bébé s'apprêtant à toucher de la main un cactus (figure A-7). Or, c'est dans
ces images construites par la publicité que se cristallisent le mieux les
mythologies du désirable et que transparaît l'idée qu'une société se fait de
la première enfance.
En réalité, la publicit6 iconique anticipe bébé. Eiie est là au moment
du projet, pendant toute la gestation, à la minute de v6rit6 et elle ne le
quittera pas pendant toutes les phases de sa croissance. Dans le corpus,
l'image de la cigogne (figure A-8), de la femme enceinte (figure A-9) ou
du bébé dans le sein de la mère (figure A-10) sont autant de représentations
privilégiant le moment de la naissance. Dans de rares cas, les publicitaires
montrent également un homme «enceint» (figure A-11) et des adultes
imitant des bébés (figureA-12).
Une publicité de Benetton (figure A-13) montre la naissance d'un
enfant encore doté de son cordon ombilical, couvert de sang. Elle rappelle
qu'à la naissance, tous les êtres humains sont semblables, rien ne les
distingue. Or, d'un point de vue publicitaire, cette trace est surprenante.
Elle montre en effet la réalité d'une naissance avec son sang, sa douleur.
Les individus vivent dans une société ultraprotégée et surtout hygiéniste et
pour Dichter (1970), ils acceptent les images d'eux-mêmes que lorsqu'elles
sont idéalisées et artificielles. Cette image crue, tellement naturelle et
réaliste, est donc antiséductrice. En refusant de montrer un bébé aseptisé, la
trace déroge au code publicitaire. Par sa dimension, sa simplicité, son
statisme, l'affiche amplifie considérablement une image et sa portée.
Symboliquement, la publicité récupère les connotations positives de
l'idée de croissance: désir de grandir, de jouer et d'expérimenter. La trace
montre tantôt bébé en train de manger (figure A-14), de prendre le sein
(figure A-15), de donnir (figure A-16), de prendre un bain (figure A-17),
d'uriner (figure A-18), lors du changement de la couche (figure A-19), en
train de sucer son pouce (figure A-20), de marcher
«quatre pattes»
(figure A-21), de faire ses premiers pas (figure A-22), de faire des
pirouettes (figure A-23), de jouer à l'adulte (figure A-24), de faire un
gâchis (figure A-25)ou de jouer sur la plage (figure A-26).
Il faut accorder une attention aux objets associés à la première
enfance. En effet, l'image publicitaire représente bébé accompagné d'objets
et en fait un trait de caractère dominant de la représentation sociale de
bébé. Or, cet univers est composé de deux types d'objets. Les premiers sont
reliés au jeu, à la gaieté et à la simplicité de bébé. Ce sont, dans le corpus,
les animaux en peluche (figure A-27), le xylophone (figure A-28) et les
automobiles miniatures (figure A-29).
À côté des jouets de bébé vient se greffer toute une série d'objets
intimement liés à l'univers de la première enfance: les tétines ou «suces»
(figure A-30) et le panier à linge (figure A-31). Ici, la trace publicitaire se
contente de mettre en image des formes caractéristiques et des
significations déjà établies. Le nouveau-né est le sujet de soins constants; le
mobilier et les objets qui l'entourent en sont le témoignage le plus probant.
Parallèlement aux objets et à l'imagerie associés $ la croissance de
bébé, il y a un autre type de représentation, tout aussi important, qui met
en scène l'entité physique de bébé lui-même, soit son visage en gros plan
(figure A-32), ses grands yeux, un front important, un petit nez, une peau
plus douce, des joues plus rondes et un petit menton. Bébé a aussi une petite
bouche (figure A-33), des petits pieds (figure A-34) et de petites mains
(figure A-35); bébé peut aussi tendre la main à un adulte; voilà autant de
représentations visuelles mises en scène par la trace. La nudité de bébé
(figure A-36) montré plutôt de dos que de face est aussi à l'honneur. En
publicité, la recherche du corps semble un souci constant (voir le chapitre
6) et bébé ne fait pas exception à Ia règle.
Les quatre manifestations faciales dont témoigne le corpus sont, chez
le bébé, les pleurs (figure A-37), le sourire (figure A-38), la surprise
(figure A-39) et la crainte (figure A-40), Toutes les quatre tendent à
rapprocher la mère ou le père de l'enfant et du produit en cause. On notera
enfin que les thématiques des bébés maltraités (figure A-41), les bébés en
groupe (figure A-42) et ceux issus de minorités visibles (figure A-43) sont
moins présents dans la trace publicitaire.
En somme, le monde de la première enfance est fait de douceur,
d'insouciance et de légèreté. C'est un construit idéalisé oh le malheur est
quasi absent, De façon générale, la trace publicitaire donne la parole à bébé
et multiplie les recommandations. Les images publicitaires renvoient à un
savoir de type social qui établit ce qui est bon et ce qui est nuisible à
l'enfant.
1.2 La deuxième enfance
Si l'on se demande «Qu'est-ce qu'un enfant?» et qu'on interroge la
publicité, on obtient un certain nombre de caractéristiques iconiques pour
la @iode 1987-1997. À partir des images d'enfants présentées par la
publicité et à travers la variété de ces repr&entations, plusieurs traits
dominants vont donc contribuer à construire la notion «enfant>).
La deuxieme enfance se caractérise par les premiers contacts de
l'enfant avec la vie, la prerniere phase d'intégration B la socidté. L'enfant
étend son champ d'activité A l'extérieur de la maison. Cest le moment de
ses premières communications et de ses premiers contacts avec l'école. Le
jeune garçon apprend en regardant papa (figure A-44) tandis que la petite
fille s'inspire de maman (figure A-45). Il est intéressant ici de noter la
migration de la trace - ou l'intertextualité - la combinaison apapa-fi1w
permettant tantôt d'illustrer une publicité de base de domées (Informix),
de vente par catalogues (Amway), une compagnie d'assurance-vie
(MassMutual) ou un restaurateur (McDonald).
De façon générale, la publicité tend à construire la cellule familiale
sous forme de relation binaire
- papalenfant ou mamadenfant. Fait à
noter, les pères participent à l'éducation des enfants. Mieux encore, dans les
images du corpus, ils expriment des émotions (figure A-46). Le produit
contribue alors à lever les obstacles ou à favoriser les rapprochements.
Pour la période étudiée, les enfants sont autonomes. Ainsi, dans
l'image, t'enfant est prbsenté seul avec le produit (figure A-47), ou en
aroupe (figure A-48) parfois multiculturel (figure A-49). Il choisit,
0
sélectionne et s'approprie.
L'image de l'enfance construite par la publicité est celle d'un paradis
toujours propre. Le monde imaginaire de la publicité propose une
représentation idéalisée de l'enfant et indissociable de certains objets:
machine à gomme à mâcher (figure A-50), voiture-jouet (figure A-SI),
brouette rouge (figure A-52), volant (figure A-53, souliers (figure A-54)
et cheval de bois (figure A-55).
Les traces permettent par ailleurs d'identifier plusieurs cas de
figures. La représentation de la seconde enfance, c'est en premier lieu le
désir de grandir. La publicité contribue à construire un univers de la
seconde enfance tournant autour de quelques activités, des «grandes
premières» et autres moments de «grande importance» associés tantôt à
I'initiation, tantôt aux vacances: coupe de cheveux (figure A-%), dent
perdue (figure A-57), premier jour d'école (figure A-58), visite à l'hôpital
(figure A-59), mesure de la grandeur physique (figure A-60), excursion de
pêche (figure A-61), plantation d'un arbre (figure A-62), chasse aux
papillons avec un filet (figure A-63), à l'écoute d'une histoire (figure A64), avec sa bicyclette (figure A-65), jouant dans sa première pièce de
théâtre (figure A-66), en train de dessiner (figure A-67). de pique-niquer
(figure A-68), de se lever du bout des pieds pour prendre un objet sur le
comptoir (figure A-69), de se tirailler (figure A-70), de jouer un mauvais
coup (figure A-71), d'avoir envie de pipi (figure A-72), de grimacer
(figure A-73) ou de vivre ses premières amours (figure A-74). Les joies de
la fête anniversaire (figure A-75) avec son gâteau et les chandelles que l'on
souffle occupent également une place dans le corpus consacré à l'enfant.
C'est un rite de la vie en société,
A travers la reprbsentation du monde imaginaire du jeu, les
stéréotypes de l'adulte s'expriment. Globalement, les images publicitaires
montrent neuf différents types de jeux chez l'enfant:
1. Jeux de locomotion:
Pratiquer le jeu de poches (figure A-76), faire une baignade
(figure A-77), faire voler un cerf-volant (figure A-78), chausser
des patins à roulettes (figure A-79), sauter la corde (figure A80), s'amuser dans un cerceau (figure A-81), jouer de la gomme
(figure A-82) ou faire des bulles (figure A-83).
2. Jeux de vertige ou de résistance:
Jouer dans une chambre B air (figure A-84), glisser sur la neige
(figure A-85), se promener en skate board (figure A-86), jouer
sous le jet d'eau d'un boyau (figure A-a7) ou sous la pluie (figure
A-88).
3, Jeux d'adresse:
Lancer un frisbee (figure A-89). un boomerang (figure A-90) et
jouer aux billes (figure A-91).
4. Jeux avec les animaux/insectes:
S'amuser avec un chien (figure A-%), une autruche (figure A93), une grenouille (figure A-94) ou un dauphin (figure A-95).
5. Jeux mécaniques:
Jouer avec des blocs de construction (figure A-96) ou des légos
(figure A-97).
6. Jeux d'imagination:
Jouer avec un ourson en peluche (figure A-98), se costumer en
louveteau (figure A-99) ou en ballerine (figure A- 100).
7.Jeux créateurs:
&rire (figure A- 101), jouer du violon (figure A-102), de la f l b
(figure A-103) ou de la trompette (figure A-104).
8. Jeux d'adulte:
Se déguiser (figure A-105).
9. Jeux sparti$s:
Football (figure A- loti), basebail (figure A-107), hockey (figure
A- lûû) et tennis (figure A-109).
Par ailleurs, la publicité contribue à définir trois univers précis susceptibles
d'dvoquer la deuxième enfance. Le premier est celui de l'école avec un
visage familier et une imagerie simplifiée. L'école, c'est l'éducation et les
enseignants ayant droit aux plus grands égards dans le corpus. C'est un lieu
de rencontres privilégiées où les jeunes socialisent.
L'école offre un espace de contact clairement reconnaissable: la
classe, rappelée entre autres par les bureaux (figure A-1 IO), le tableau noir
(figure A- 1Il), une feuille de papier lignée (figure A-112), la boîte à lunch
(figure A-1 13), les lettres de l'alphabet de «A à Z» (figure A-114), les
casiers vestimentaires (figure A-1 15), l'autobus scolaire (figure A-1 16), les
panneaux routiers de passage écolier (figure A-117), un jeu de marelle
(figure A- 1 18), les élèves (figure A- 119) et les institutrices/professeurs
(figure A-120). Cette imagerie génère également des significations
secondes. Les lettres de l'alphabet font référence aux mots et h la langue
mais elles peuvent également évoquer des notions abstraites comme la
simplicité. De la même façon, le crayon de l'écolier permet d'écrire mais il
devient symbole de frustration lorsqu'il est cassé en deux.
La plage (figure A-121) est un deuxième univers important de
l'enfant dans le corpus publicitaire. il est évoqué par les jeux sur la plage:
des images clés comme celle de papa dans le sable.
Le troisibme espace de la seconde enfance, le parc
d'amusemeni/cirque, est représenté iconiquement par la montagne russe
(figure A- 122) et un carrousel volant (figure A-123). Symboliquement, cet
univers est hors des normes du quotidien.
Par ailleurs, la trace récupère toute une galerie de petits personnages
associés au monde de l'enfance. Elle montre plusieurs personnages typés
dans le corpus. Parmi les plus populaires, nommons: Mickey (figure A124), Snoopy (figure A-125),le coyote (Figure A-126), et les Pierrafeu
(figure A- 127).
En somme, sous I'apparente autonomie de l'enfant, la publicité
construit un monde relativement traditionnel; elle met en scène des
stéréotypes tels qu'ils sont véhiculés par les industries culturelles. De ce
fait, la trace publicitaire ne vise probablement pas à déstabiliser les valeurs
en place. Elle rejette ou tend à effacer les enfants martyrs (figure A-128)
ou handicapés (figure A-129).
1.3 Les jeunes adultes
La troisième étape est marquée par le passage de la deuxième enfance à
l'adolescence puis à l'âge adulte. En publicité, les jeunes gens sont affublés
d'une personnalité collective qui leur est propre. Ainsi, le jeune adulte
élargit ses relations sociales, se crée un groupe d'amis
& prend
un peu plus
d'autonomie.
Dans le corpus, les jeunes gens sont présentés comme insouciants et
naïfs. Le travail est à toutes Fm utiles absent. Avec les jeunes gens, on voit
apparaître des éléments th6matiques précis. Abandonnant les conventions,
ils sont synonymes de participation, de créativité, de liberté,
d'enthousiasme (figure A-130), de mise en valeur physique et intellectuelle.
Ce sont des anticonformistes (figure A-131); ils remettent en question leur
milieu et les valeurs contemporaines par leur coupe de cheveux (figure A132) et leur tenue vestimentaire. Ils voyagent en autobus (figure A-133) ou
en train (figure A-134). Ce sont aussi des élèves reco~aissablesà leur
chapeau de finissant (figure A-135).
Quand on parle de jeunes adultes dans la publicité, on évoque
iconiquement une certaine vision de la vie reflétant un caractère ouvert et
une façon de penser tres détendue. Les gestes sont plus décontractés, le
tonus musculaire réduit; des adolescents voyagent en camionnettes (figure
A-136). On dessine des graffiti (figure A-137). On évoque dans le corpus
les festivals en plein air (figure A-138) et la pop music où on va jusqu'à se
jeter dans la boue (figure A-139). Autant d'éléments qui ne sont pas sans
rappeler l'époque des années soixante.
Quand on regarde les images qui composent le corpus, l'une des
valeurs dominantes du début de i'âge adulte est certainement l'amitié sous
ses différentes formes. Celle-ci prend d'abord naissance au sein de la
famille, mais elle dCpasse a w i les fronti&resde la parenté. A ce stade, la
véritable amitié ne tient pas compte de la couleur & la peau, de la religion
ou de la langue, comme le montrent plusieurs publicitds. En fait, si on
considère l'ensemble des publicités analysées dans le corpus, on voit leurs
thèmes s'unifier: familiarité, retrouvailles, rassemblement; groupe de filles
(figure A- 140) et photographies d'amis (figure A-141); l'image met en
scène une amitié sans heurt, un amour inconditionnel.
ParalliAement, les premiers pas dans l'âge adulte constituent aussi le
moment par excellence du grand amour, un thème central du construit
publicitaire. En fait, s'il faut en croire le corpus, amour et jeunesse
semblent aller directement de pair. A travers un dixours amoureux simple,
plutôt univoque et répdtitif, les images du corpus énoncent une morale de
l'accouplement et codifient une politique des rapports entre les sexes. Ces
images expriment des jugements et des valeurs, et en ce sens, elles sont des
constructions culturelles.
En 1921, Mauss publiait L'expression obligatoire des sentiments,
dans lequel il rappelait que les sentiments sont des émanations sociales qui
s'imposent dans leur contenu et dans leur forme aux membres d'une
collectivitt. Contre les prejugés qui veulent faire de liémotion une dom&
soit intime, soit naturelle, Mauss afflfmait la dimension sociale et culturelle
des sentiments et de leur mise en forme.
Qu'est-ce que
l'amour en publicitt? Iconiquement, c'est un moment
essentiel, une occupation A plein temps qui umbiiise toutes les énergies.
L'amour est aussi uw nCcessitC absoiue. Dans la logique argumentative de
I'image, c'est le moyen pnvUgié pour atteindre l'équilibre. Ils sont jeunes;
ils ne se connaissaient pas, et voila que le hasard les met face il face, leur
fait échanger un regard. Quelque chose a changC brusquement, et le monde
n'est plus ie même.
Héroïsme, grands sentiments et émotions fortes: L'imagerie
publicitaire réinvente A longueur d'aunée des mythes et des symboles vieux
comme le monde. La publicité étourdit l'acteur social à grands coups de
frisson et d'amour.
À vrai dire, le langage de l'amour couvre un vaste champ sémantique
que chevauchent des oppositions et des associations. Ainsi, l'amour est
symboliquement un coup de foudre, un baiser qui allume, un feu de braise,
une passion dévorante. L'amour, c'est une renaissance, une résurrection.
L'amour, c'est un équilibre, une force, une puissance, une libération. En
d'autres mots, l'amour rend libre. On ddcouvre un phénomhe social,
difficilement compréhensible dans les grilles de lecture habituelles de
l'andyse qualitative.
De façon générale, le corpus met en scène le paroxysme dans la mise
en spectacle et manifeste un net penchant pour la théâtralisation des sujets.
Le visuel repose sur la valeur sentimentale rattachée au produit et cette
dimension qui le fera désigner pour commémorer tout événement de la vie
d'un couple: rencontre, déclaration d'amour et mariage.
De ce point de vue, le champ des relations sociales en publicité est
construit. Elles se déroulent généralement dans des domaines et des lieux
publics avant d'être possibles dans des domaines privés. Ces endroits
publics représentent des espaces de vie permettant à la fois le
développement d'une identité collective et une sociabilité. Les publicités
analysées présentent les activités de détente, tes jeux, et les arts comme des
domaines potentiels de rencontre: sur le paquebothateau (figure A-142), à
la plage (figure A-143), sur le banc d'un parc (figure A-144), dans un
«lavomat» (figure A-145) ou un bar (figure A-146), lors d'une soirée
mondaine (figure A-147) ou dans un casse-croûte (figure A-148). C'est
bien souvent par l'intermédiaire de ces activités que les personnages
prennent contact. Dans un restaurant, on retrouve un juke box (figure A149) et un homme joue du saxophone (figure A-150) ou du piano (figure
A-151). Il y a aussi le théâtrelcinéma (figure A-152) et te
restaurantlbistrolpetit café (figure A-153), avec sa table, son repas
romantique et uddes serveur(s) habillé de blanc et de noir. Un autre lieu,
la gare (figure A-154), permet de suggérer les retrouvailles apres un long
voyage.
L'amour se manifeste également dans des lieux privés. L'amour peut
naître dans une embarcation (figure A-155) ou sur le perron d'une maison
(figure A-156). La barque devient ainsi un accessoire à l'amour-passion.
L'amour peut également prendre forme sous une tente (figure A-157), dans
un lit (figure A- lS), un bain (figure A-lS9), lors d'un pique-nique (figure
A-160) ou dans une voiture, de préférence une décapotable (figure A-161).
Iconiquement, des manifestations plus tangibles sont toujours les
bienvenues. Au nombre des pratiques publicitaires qui se manifestent sous
forme de symboles, on retrouve plusieurs signes connotant les sentiments
amoureux, voire la sexualitb. Ces symboles sont destin& à intensifier les
amours. Parmi les gages d'amour et d'attention offerts le plus
fréquemment, figurent les fleurs (figure A-162), un bouquet de rose, par
exemple. Un masque (figure A-163) sert également & suggérer l'amour
mystérieux et frénétique. On peut donner son coeur (figure A-164) et sa
bouche (figure A-165). La pénode des m
u
r
s est aussi celle de l'envoi de
lettres (figure A-166) qui ont pour thème I'amour, et rappellent en
quelques mots qu'on ne s'oublie pas, qu'on s'ennuie et qu'on a hâte de se
revoir.
Le téléphone (figure A-167) est un autre lien symbolique.
Visuellement, il est, de tous les médiums, celui qui se prête le mieux à la
tendresse. Au téléphone, on peut tout reconstruire: la femme idéale et
comblée, l'épouse absente, l'amante inaccessible, introuvable, la partenaire
sentimentale, enjouée ou naïve, mais toujours attentive. Le téléphone
permet un contact intime, mais à distance. Situées dans un espace abstrait,
les filles écoutent seulement, mais ne répondent jamais.
À l'instar de nombreuses chansons folkloriques et dans certaines
coutumes (Dupont, 1995: 9), la publicité associe directement le feu et
l'amour (figure A-168). La cosmologie est également mise au service de
l'amour publicitaire. Ainsi, la
Iwie
(figure A-169)rappelle la nuit et
l'amour. L'amour, c'est enfintoute La gamme des cadeaux (figure A-170)
et des surprises (figure A-171).
Plusieurs images publicitaires analysées revêtent un aspect intimiste.
Toutes ces situations sociales génhnt des sentiments et des gestes. Fast
(1977) nomme uparade» les gestes de séduction. Ces gestes allumeurs» de
la trace publicitaire sont de plusieurs ordres: regard appuyé, petit geste de
la m i n qui effleure, mouvement de rapprochements des corps, sourire aux
lèvres offertes, yeux grands ouverts, sourcils remontés, jeux de langue,
lèvres humectées, les yeux sur les corps, les yeux dans les yeux, main dans
la main, bras sur l'épaule, bras sur la taille, bouche contre bouche, main
dans les cheveux, bouche sur la poitrine, postures d'accouplement, danse,
etc.
Le comportement des regards des jeunes amoureux, par exemple,
passe par plusieurs phases distinctes. Dans les images analysées, la relation
amoureuse implique souvent une symbiose entre les deux partenaires. Si
deux personnes marchent ensemble (figure A-172), leur comportement
montre qu'elles sont liées l'une à l'autre. Cela suggére l'ambiance
amoureuse.
Dans la représentation iconique, la forme la plus évidente du signelien est la proximité des corps, dans laquelle, tout en ne se touchant pas,
deux personnes se tiennent debout, bougent, s'assoient ou se reposent. Une
variante publicitaire consiste à présenter des objets qui s'enlacent (figure
A- 173). Les objets partagés entre deux personnes (figure A-174), par
exemple un chandail, fait aussi office de signes-liens.
L'étreinte (figure A-175) est un autre exemple de geste-symbole.
Symboliquement, l'etreinte totale, geste qui consiste à prendre l'autre
personne dans ses bras, est une expérience amoureuse. Adieux et
retrouvailles voient le lien se trancher par la séparation physique, ou se
renouer quand elle se termine. L'étreinte totale ne laisse alors aucun doute.
Les hommes étant gén6ralement plus grands que les femmes (figure A176), l'étreinte des épaules est un geste essentieiiement masculin.
À ce sujet, il existe toute une gamme de relations, de la plus intime A
la plus distante, que les acteurs sociaux peuvent entretenir entre eux.
L'anthropologue E.T. Hall, inspiré de la recherche en éthologie comparée,
a déterminé certaines distances significatives à l'intérieur desquelles se
meuvent les acteurs lors de leur interaction cornmunicationnetle. La
distance intime, jusqu'à 40 cm, est celle de l'acte sexuel et de la lutte, écrit
Hall (1971). C'est également la distance de la protection et du réfonfon À
cette distance, le toucher et l'odorat sont principalement sollicités. La
distance personnelle de 40 cm à 1,20 m permet et favorise les échanges
interpersonnels. La distance sociale, de 1,20 m à 3,60m, caractérise les
rapports professionnels ou sociaux. Les contacts corporels sont
virtuellement éliminés. Cette distance permet de préserver le caractère un
peu formel de ce type de rapports. La distance publique, au-del&de 3,6û m.
représente Ie territoire à l'intérieur duquel se déroulent des relations
formelles imposées par des personnages ut& importants».
Ces variables sont utiles afin de catQoriser, dans l'espace, les
relations entre les protagonistes de l'énoncé. il existe un paralkle entre
l'échelle des distances et la façon dont la réalité est mise en image (Cossette:
1985). Ainsi, le gros pian peut correspondre à la distance intime, le plan
rappmh6 et le plan americain à la distance pemnneUe, le plan moyen, le
plan de demi-ensemble et le plan d'ensemble, à la distance socide et à la
distance publique. Évidemment, cette dassifmtion est rudimentaire et il
faudra tenir compte d'autres variables telles que les angles de prise de vue
de la caméra ainsi que d'autres techniques de amise en iïnagen.
L'une des manifestations amoureuses utilisées dans le corpus est le
baiser sur la b i c h e (figure A-177),sur le cou (figure A-178) ou sur le
front (figure A-179). Une forme variante consiste à montrer le jeu de
langue (figure A-180) ou une trace de baiser (figure A-181).
Dans les images, la main sur la bouche reflète un lien d'attachement.
Caresser doucement (figure A-182) et explorer le corps du partenaire avec
la main est presque toujours une démarche d'ordre sexuel en publicité. Ces
caresses sont assez particulières p u r être limitées en public.
Le corps soutenu par l'homme (figure A-183) et plus récemment par
la femme (figure A-184) est repris par la publicité, alors qu'on s'assied sur
le conjoint, qu'on s'y accroche ou qu'on dépose la tête sur son épaule. Les
activités qui nécessitent l'entraide ou la participation de l'autre, par
exemple raser le poil des jambes de sa compagne (figure A-185) ou servir
de modèle pour une oeuvre d'art (figure A-186) sont d'autres clins d'oeils
amoureux et sensuels. Ces images de rapprochement symbolisent l'entraide,
le partage et le rapprochement. L'homme de la publicité se plie alors au
dbsir de sa compagne.
On assiste, entre adultes, h de nombreux coups sur les bras, des
empoignades, des pressions, des bousculades, des jeux (figure A-187). Mais
ces gestes ne veulent pas blesser. ils sont plutôt des libertés amicales qui
font preuve d'une grande familiarité (Goffman, 1977). «Attends que je
t'attrape» ou «Devine qui je suis>,sont des jeux couramment pratiqués par
la publicité iconique. Les participants se voient traités, pour rire, comme
s'ils étaient des proies assaillies par un prédateur.
On remarque enfin que dans sa construction, l'amour «publicitaire»
est d'abord hétérosexuel et très rarement homosexuel (figure A-188). Le
couple hétérosexuel est posé non seulement comme l'idéal mais aussi
comme le modèle convenable de rapports amoureux.
1.4 Le mariage
Le manage modifie profondément le statut social des nouveaux conjoints et
constitue le rite de passage le plus visible de la publicité. Le manage
marque une étape intermédiaire. La demande en mariage (figure A-189), la
robe de mariage (figure A-190) le gâteau de noces (figure A-191), la
mariée dans les bras de l'époux (figure A-192) et le départ en voyage de
noces (figure A-193) constituent les principaux référents iconiques de cette
étape. Le mariage est en quelque sorte le lien entre le début de l'âge adulte
et la famille. Seule la naissance du premier enfant va transformer
systématiquement la nouvelle vie de ce couple qui deviendra famille.
1.5 La famille
Quand on parle de la famille, une première précision s'impose, car le
terme recouvre tout et rien: dans cette these, on entend par là, non
seulement le noyau parents-enfants, mais l'ensemble plus large des
descendants et comprenant éventuellement deux ou trois générations,
comme on peut en rencontrer aujourd'hui. Dans la trace, la famille entre
en concurrence avec d'autres modes de celations, tels que les amis (figure
A-194), les voisins (figure A-195) et les collègues de travail (figure A196), autant d'éléments qui participent eux aussi de l'identité de Leurs
membres, véritables carrefours d'une sociabilité redéfinie.
La famille est un groupe de référence de la publicité iconique.
Microcosme de la société et lieu d'apprentissage des valeurs et des normes,
la famille de la publicité représente un terrain d'étude à la fois pratique et
riche. La famille nucléaire illustrée par la publicité de Boréal (figure A197) est un symbole important en publicité. L'existence des enfants est la
preuve concrète du suc& de cette famille.
La famille nucléaire (figure A-198) peut se résumer à un mari, une
femme, deux enfants, inévitablement un garçon et une fille séparés de
quelques années, et un chien. Si ces enfants ne sont pas particulièrement
beaux, ils dégagent beaucoup de sympathie. Ils n'ont pas de handicap ni
même à proprement parler de défaut, si ce n'est les Lunettes que certains
portent et qui leur donnent un petit air sympathique. La famille nucléaire
vit dans une maison unifamiliale et les femmes sont représentées dans un
rôle de mère attentionnée.
La vague de publicités débrant la paternité (figure A-199) a permis
de banaliser en quelque sorte les nouveaux enjeux concernant une
organisation traditionnelle de la famille. Le père adéquat ne peut se
permettre de n'être qu'un bon pourvoyeur; il doit aussi afficher les
attributs de l'affectivité et de la tendresse. Bref, on demande aux pères de
se défaire des vieux conditionnements et de renverser leur image sociale.
Au niveau familial, le père n'est plus l'unique figure d'autorité
dominante; il incarne aussi la compréhension, douceur et amour (voir à œ
sujet la section 1.1 intitulk la premibre enfance et la section 1.2 intituik la
deuxième enfance - chapitre 1). Demeurée le support de la collectivité
familiale, la femme est iconiquement appelée B s'affirmer sur le plan
professiomel (voir à ce sujet la section portant sur l'image de l'homme et
de la femme dans la publicitk-chapitre 6).
Ainsi, les rôles parentaux continuent à se manifester dans la publicité
et la valeur culturelle rattachée ii la famille peut-elle connaître d'autres
heures de gIoire dans l'image publicitaire. La publicite est donc alMe vers
une variété de configurations qui toujours tendent vers une consolidation de
ses bases. Que peut-il alors amver désormais à la publicité? C'est toute la
définition du genre qui est ici remise en cause. Au-delà de la famille, c'est
donc à une couception des relations entre homme et femme qu'expose le
construit publicitaire.
1.6 La vieillesse
Pour tes ùesoins de cette thèse, on ciasse les gens aâgésu en s'en remettant
aux critères suivants: mention directe de l'âge (plus de 50 ans), cheveux
gris, présence de rides sur le visage etlou les niains, canne, fauteuil roulant,
références à des termes comme ceux de grands-parents, grand-maman ou
grand-papa, ou des réf6rences à la retraite.
Les études indiquent que les gens âgés qui représentent de 11 à 15 %
de la population occupent une place secondaire dans les images
publicitaires. Selon une étude de Gantz, Garienberg et Rainbow (1980: 5660), réalisée dans sept magazines am&icains, on retrouve trois «vieilles
personnes» pour cent personnes dans la publicité. Cette enquête montre que
les publicités sans personne âgée contenaient en moyenne 2,5 personnes
tandis que celles qui mettaient en scène des gens du troisième âge en
regroupaient quatre, comme si l'on désirait à l'occasion fondre les
personnes du troisième âge avec des plus jeunes. Par ailleurs, 74 % des
gens âgés représentés dans la publicité &aient des hommes. Évidemment,
cette quasi-absence des personnes âgées dans le corpus, que ce soit la grandmère, le grand-père ou le groupe du troisième âge est étrange, d'autant
plus que la démographie est à la mode.
De façon générale, la personne âgée est un cliché. Si on voit u n
visage de face, on montrera une personne au visage vieilli, aux cheveux
gris (figure A-200) et à la silhouette déformee (figure A-201). Dans
plusieurs cas, on préférera utiliser des objets associés à la personne âgée
comme les lunettes (figure A-202) ou la chaise berçante (figure A-203).
Par ailleurs, si l'on introduit une personne âgée dans une image, la
trace ne représentera le plus souvent que l'un des volets de la
communication. Ainsi, pour une campagne des restaurants McDonald's,
deux images apparaintrontsuccessivement sur les murs: l'une mettant en
scène une personne âgée (figure A-204) et l'autre un bébé (figure A-2û5).
On pourra également associer simulament des jeunes enfants et des aînés
(figure A-206), les deux pôles des figes de la vie. Le théme principal
pourra aussi être décliné selon les principales catégories d'âges (figure A207).
Sans doute ce «refoulement social du corps vieux», ou comme le dit
Barthes, cette «sorte de racisme jeuneu n'est-t-il pas étranger à l'avènement
de la jeunesse comme nouvelle catégorie sociale. L'image de la personne
âgée dans la trace publicitaire fait peur; elle évoque symboliquement la
solitude (figure A-208). La prdsence des gens du troisieme âge peut
suggérer l'embarras (figure A-209) et le ridicule (figure A-210), l'idée
d'un organisme qui s'use, des problèmes physiques. Autant de situations qui
évoquent la nécessité de se reposer.
Il est banal de souligner qu'aujourd'hui, un véritable discours
circulant s'est constitué autour du problème de la vieillesse et de la période
de la retraite. «Longtemps en marge des préoccupations sociales
dominantes, la population âgée est devenue un objet d'intérêt pour de
nombreux secteurs de l'activité sociale, culturelle et économique.» Cest ce
qui explique peut-être pourquoi la trace éprouve le besoin de présenter des
gens âgés dans des situations qui renvoient à des signifiants plus gratSants,
comme la joie de vivre, d'apprendre, de voyager, le prestige ou le pouvoir.
Ainsi, des images positives sont attachées à cette période: joie de vivre,
dynamisme, participation sociale (figure A-2 11) et contact amoureux
(figure A-212). En d'autres mots, les gens âgés ne sont plus seulement les
gardiens de la tradition et de l'authenticité (figure A-213). Le troisi5me âge
construit par I'irnage publicitaire peut aussi incarner le prestige, le pouvoir
et le bon goQt (figure A-214). Par exemple, on présentera les rapports
affectueux et la complicité profonde qui existent entre un pére et son fils
(figure A-215). Au fond, on doit encore une fois noter que malgré son
apparence parfois provocante et son allure souvent libertaire, la trace
publicitaire est profondément conservatrice.
1.7 La mort
En tant que forme, la civilisation occidentale contemporaine ne peut
supporter la fatalite de la mort, de la maladie et du vieillissement. Non
seulement la publicité ignore-t-elle pratiquement ces faits dans les formes
iconiques, elle les nie ou tente de les effacer.
Symboliquement, la mort, comme étape finaie de la vie, s'inscrit
comme rite de passage qui clôt le temps naturel. Elle est ressentie comme
angoissante et figurée sous des traits effrayants. Elle symbolise en soi la fin
absolue de quelque chose, La mort, a-t-on dit, devient le non-dit par
excellence: on Bvite de la montrer et ce n'est que timidement que la
représentation de la mort envahit la publicitk accident de voiture (figure
A-2 l6), meurtre (figure A-217), suicide (figure A-218), pendaison (figure
A-219) et tête tranchée (figure A-220).
S'il faut s'en remettre au corpus, il est difficile de parler de l'image
de la mort dans la publicité. Rien n'est plus caché que les fantasmes que
chacun noumt à cet égard. Sans doute pourrait-on dégager quelques
images traditionnelies. Avec la mort en images, les publicitaires fouillent
dans les recoins culturels de la société et lèvent les derniers tabous. On
invente un genre nouveau et on déroge ainsi aux codes publicitaires.
Bien que la mort ne soit pas le sujet de nombreuses images
publicitaires, elle est toutefois suggdrée par la manifestation de plusieurs
signes. Envisagés socialement, la mort et Ies rites qu'elle suscite renvoient
directement à la relation signü?ant/signif~é.
Dans sa dimension symbolique,
citons plus particulièrement les symboles des comportements et des rites singulièrement les fun6railles.
La mort est associée à divers rites et symboles qui traduisent bien le
caractère sacré de cette relation symbolique entre le monde des vivants et
celui des morts: civière (figure A-221), cercueil (figure A-222),
enterrement (figure A-223), couronne mortuaire (figure A-224), épitaphe
(figure A-225), morgue (figure A-226) et cimetiére (figure A-227).
La publicité renvoie l'image d'une société violente. Os (figure A228), sang (figure A-229), abus physique (figure A-BO), chaise électrique
(figure A-BI), couteau (figure A-232). balle (figure A-233)- bombe
(figure A-234), avion de chasse (figure A-235), fil barbelé (figure A-236),
figure nucléaire (figure A-237) et bourreau (figure A-238) ont un aspect
macabre et évoquent directement la mort. Les armes, par leurs fonctions
d'outils d'attaque ou de défense, symbolisent également le danger potentiel.
Dans le même sens, il peut s'agir d'une mort par le sida, celle-ci
étant évoquée par un ruban (figure A-239), un condom (figure A-240) ou
des gens faisant l'amour (figure A-241). Dans un exemple, la famille
occupe une place majeure dans la photo: le père, la mère et la fille (figure
A-242). Ce thème est susceptible de toucher puisqu'il s'agit de la mort d'un
homme atteint de la maladie du siècle. LR regard du fils malade se porte
tout de suite sur le père dont la chemise noire contraste avec k blanc et la
clarté des autres tiléments, puis on aperçoit le mourant dont la maigreur
contraste avec l'espace qu'occupent le père et les autres personnages.
L'émotion est trés présente. Aussi, l'image appartient plutôt au style
journalistique documentaire. Toutefois, par sa composition elle fait penser
a une allégorie religieuse sur la mort qui aurait la force de la réalité.
Une autre stratégie consiste à montrer la détresse avec l'image d'une
tornade (figure A-243) ou d'une poupée brQiée (figure A-244). La
généralisation est évidente et tend vers une démonstration d'universalité.
Ces visuels sont tous une allégorie de la mort.
2. Le temps historique
Au coeur de l'étude des temporalités sociales, se trouve l'analyse des
rapports complexes qu'entretiennent une soci6té avec les trois grands axes
du temps: un vécu présent, des formes variées de retour en amère ou
d'actualisation du passé et les diffkrentes manieres d'envisager l'avenir.
«Nous ne saurions échapper à ce constat que toute société jette, devant ou
derrière (...), un regard sur elle-même. Par ce regard, les sociétés recréent
leur passé et projettent leur avenin, (Mercure, 1996: 39).
Par le mythe, le symbole, la mémoire collective ou la connaissance
historique, toute société construit et reconstruit ses origines et demeure en
contact avec son passe, son présent et son futur. Dans un cas comme dans
l'autre, ce qu'il est donné A voir donne un acds privilégié ii la culture. De
la, la pertinence d'une sociologie des temporalités sociales.
Halbwachs (1925; 1968) a bien monûé l'existence de «cadres de la
mémoire collective, sur lesquels la mémoire individuelle prend son point
d'appui.» Ces cadres sont constitués par un ensemble de représentations du
monde et de la société issues de l'«entourage social». Quatre marqueurs
temporels ont été identifiés: le temps des ancêtres, le temps premier, le
temps contemporain et le temps de l'avenir. ii convient maintenant
d'examiner la manière dont les diverses images publicitaires construisent le
temps historique. Il s'agit de recenser les diverses mises en scène iconiques.
2.1 Le temps des ancêtres
En publicité, le temps des ancêtres fait référence à une époque réelle ou
historique. C'est celui de la génération des grands-parents. II peut s'étaler
sur plusieurs générations et constituer ce qu'on appelle communément le
passé.
Dans le construit publicitaire, le temps des andtres correspond à une
époque vierge, le «bon vieux temps» (figure A-245). C'est un temps qui
atteste d'un enracinement dans i'histoire et le sentiment d'un lien avec les
aieux. Dans les images de Jack Daniels en noir et blanc (figure A-240, les
fabricants sont décrits comme ayant une conscience aiguë de leur lien avec
leurs ancêtres. La refbrence constante au temps des ancêtres témoigne de la
particularité du produit.
Le temps des ancêtres rappelle symboliquement un mode de vie
traditio~el;il propose des d & l e sauxquels on se réfère même si l'on sait
que l'on n'arrive plus à respecter fidèlement les principes qu'ils ont établis.
Pour certains membres du groupe aux prises avec les difficultés des
exigences contemporaines et du modernisme, cet aspect traditio~elest une
garantie de bonheur, d'6quilibre et de libert6. Pour représenter la vie
traditi~~elle,
les publicitaires mettent en scène des objets anciens comme
un téléphone (figure A-247), un microphone (figure A-248), une voiture
(figure A-249) ou un avion hace (figure A-250).
En publicité, le temps des ancêtres suscite souvent de la nostalgie et
du regret. On imagine un passé un peu paradisiaque, comme un temps
presque sans problème, cet ancien mode de vie où on était plus heureux et
plus équilibré. «L'accent mis sur le souvenir est une méthode utilisée pour
bien situer les consommateurs dans la société. On fait appel à la nostalgie
comme d'un instrument» (Goldman et Papson, 1995: 115).
La nostalgie est une aspiration, difficile à traduire, vers un passé
perdu, en même temps qu'un désir de retrouver ce passk. Elle exprime le
regret d'un monde autre, une civilisation qui tend B revivre dans son passé.
Eliade a bien montré que les modèles archaïques n'ont jamais cessé de
hanter les hommes. d l existe pour l'homme une possibilité de transcender
le Monde-spacialement, en allant "vers le haut", et temporellement en
allant "à rebours", "à reculons"~(hiade, 1957: 144).
En invitant l'acteur social à un retour à l'origine, le temps des
ancêtres construit par la publicité réactualise la puissance des éléments
originels. Par conséquent, tout se passe comme si le changement et la
nouveauté étaient consid6rés comme suspects, équivoques, incertains, et
néfastes. Il en découlera une forte résistance au changement, le retour au
mode sain d'autrefois, aux habitudes de vie passée. L'6vocation nostalgique
du temps lointain et la réitération de ce passé apportent l'illusion rassurante
d'une immuabilité. Selon Eliade, c'est la nostalgie, cette rêverie de
l'imaginaire, qui permet désormais de faire revivre symboliquement le
mythe (Bastide, 1975).
Dans une relation où les uns doivent se définir par rapport aux
autres, la référence au temps des ancêtres devient une marque de distinction
en publicité. Les membres de la société dominante font référence aux temps
des ancêtres, en soupirant, entre eux, comme si tout avait été sans problème
avant l'arrivée de la société moderne. À l'inverse. c'est pour contrer cette
vivacité, pour favoriser L'assimilation et proclamer ses propres valeurs que
la publicité va aussi dénigrer le temps des ancêtres. Ce faisant, le temps des
ancêtres devient une époque désuète, un lourd fardeau (figure A-251).
Le fait que les images publicitaires puissent tour à tour valoriser ou
dévaloriser certains moments de l'histoire ne doit pas surprendre. Au-delà
des individus porteurs de souvenirs se perpétuent des représentations, des
discours et des façons d'être qui jettent les bases du temps contemporain.
2.2 Le temps premier
A la différence du temps des ancêtres, le temps premier peut se mesurer, se
dater et s'associer à des 6vénemnts précis. Aux plans iconiques, le temps
premier, comme les autres temps, est porteur d'une idéologie. Dans une
image, par exemple, le mythe =yen des années trente et quarante (figure
A-252) est suggeré par un signe de la main nazi pour rappeler la place des
Allemands dans l'histoire et le combat contre les Juifs et les communistes.
Les années cinquante sont évoquées par l'emploi de symboles comme
le juke box (figure A-253), la décapotable (figure A-254), une pin-up
(figure A-255), une machine à écrire (figure A-256), le cinéma 3-D
(figure A-257), une grande première (figure A-258) ou une star comme
Marylin Monroe (figure A-259). Les andes soixante sont associées aux
hippies et à leur camionnette (figure A-260) et à Janis Joplin (figure A261).
Le temps premier est bien présent dans la mémoire collective. Il
constitue un facteur contextuel important à considérer. Royaume du cliché,
le temps premier a lui aussi quelque chose de nostalgique et de grandiose.
«Les souvenirs mis en place par la publicid constituent une histoire formée
de parcelles (les signifiants) et composant une nouvelle narration selon les
intérêts du moment; non seulement cette histoire contribue-t-elleà distraire
du moment présent, mais aussi elle habitue à oublier les liens entre le passé
et le présent» (Goldman et Papson, 1995: 140). Le temps premier séduit ou
inquiète. Il est là comme un &are dans la nuit.
Le temps premier est parfois le prétexte à une réactuaiisation. On
joue alors aux révisionnistes. Ce faisant, les traces donnent naissance à des
images chocs: la Grande-Bretagne aux mains des Allemands (figure A-262)
ou la conErence de Yalta revue et corrigée (figure A-263).
2.3 Le temps contemporain
Le temps contemporain est celui de l'histoire racontée. C'est le temps où
s'exprime le contemporain. C'est aussi le point de rencontre du temps des
andtres, du temps premier et du temps futur.
Cette rencontre peut être cahotique. Dans la publicité de la Hong
Kong Bank (figure A-264), le temps contemporain est le théâtre d'un
désarroi culturel et d'une profonde crise d'identité. C'est la confrontation
d'un mode de vie traditionnel avec celui du monde moderne, celui qui croit
au progrès. C'est un temps qu'on quMe de décadent.
S'il y a lieu de parler d'insatisfaction du présent, ce n'est pas par
rapport à une certaine croyance en un avenir meilleur, mais bien au
contraire par rapport à un passé fortement valorisé. En fait, ce qui guide
l'ensemble de ces representations est ce désir profond d'assurer la
continuité (figure A-265). Au sein d'une telle vision, tout est fait pour
durer, résister au temps. On ne peut être que très mdfiant face aux temps
qui passe et surtout réfractaire à toute idée de changement. Pourquoi, en
effet, changer ce qui a déja, depuis tongtemps, fait ses preuves, ce qui est
sûr?
Mais le temps contemporain peut aussi être une délivrance. Dans une
image, le temps contemporain est opposé au temps des ancêtres. On
compare un mode de transport imaginé autrefois avec celui d'aujourd'hui,
qualifié de moderne (figure A-266). Cette vision du temps contemporain
contribue à d e r une rupture violente avec les temps précédents. Seul
compte le temps présent, le moment même, le moment actuel. Demain, il
sera déjà trop tard. On aura compris qu'il s'agit ici de valoriser le
contemporain, le surévaluer, montrer combien les choses ont fini par
changer pour le mieux. De ce point de vue, le temps contemporain tel que
construit par la publicité correspond A une lutte incessante en faveur de la
modernité. Ainsi, non seulement le progrès existe, dit le construit
publicitaire, mais encore, il est implacablement bon, il a amélioré l'homme,
et il va vers le bien.
2.4
Le temps
de l'avenir
A la réitération du passé, le corpus d'images publicitaires oppose d'autres
images qui participent'h une dynamique de i'anticipation, en proposant des
reprksentations de l'espace tri3 novatrices. La forte homogénéité des
reprdsentations de l'avenir en publicité constitue un trait dominant. En fait,
les traces sont associées à l'idée d'un progrès universel.
En publicid, la trace renvoie le plus souvent le futur h des jugements
de valeur. Plus précisément, le temps de l'avenir est porteur d'espoir, de
rêve et d'imagination. Dans la publicité, les images ne sont envisagées que
sous forme de rêves et d'échappatoires. Iconiquement, le futur est
symbolisé par les villes de l'avenir (figure A-267) devant lesquelles la
publicité se sent presque aveugle. Les réponses proposées par la publicité
aux incertitudes présentes sont bien connues: appel à l'innovation technique
et à la recherche scientifique.
Le temps de la publicite, orient6 vers le futur, contribue ki construire
l'idéologie du progrès. L'importance accordbe par les socibt6s à ces
nouvelles techniques et prévisions révèle la présence en publicité d'un mode
particulier d'anticipation visant non seulement à annoncer l'avenir, mais
l'orienter dans un sens desiré.
Il faut souligner que l'absence d'un modèle d'avenir peu contesté et
largement diffusé par la publicité, contribue à alimenter cette iconographie.
Ici, aller vers le futur, c'est aller vers le haut. Sur les affiches et les pages
de magazines, on voit se développer toute une série d'images plus ou moins
fictionnelles: navette spatiale (figure A-268), robot (figure A-269), avion
au style futuriste (figure A-270), cosmonautes (figure A-271), antenne
parabolique (figure A-272), planète Terre (figure A-273) et Saturne
(figure A-274). En publicité, demain est déjà là.
Faire figurer un objet quelconque sur le fond de décor cosmique
apporte la promesse d'un devenir qui dépasse le temps humain. Car si le
temps humain est fini, celui du céleste est infini. Le cosmos suggère
l'illimité, autrement dit le temps de l'&mité. Il est porteur d'espoir, de
changements, d'une vie meilleure.
Pour toutes ces raisons, on peut dire que l'ensemble des productions
culturelles du corpus susceptibles d'être regroupées sous le vocable général
de «futun>offre une combinaison entre la représentation fantasmée de la
science proprement dite, la tradition du fantastique ou de la féérie et
l'imaginaire social. Cette combinatoire se refléte à travers les themes
proprement dits.
3. Le temps géré
Dès l'aube de la révolution industrielle, sont nés des projets de
rationalisation des tâches. Par diverses innovations, le temps géré oriente
presque toutes les sphhres de la vie. Rernarquatlt que les représentations
collectives du temps s'accordent en partie avec les divisions astronomiques,
Halbwacks note que les dates et les divisions astronomiques du temps sont
recouvertes par les divisions sociales de telle mani&e qu'elles disparaissent
progressivement et que la nature laisse de plus en plus ii la soci6t6 le soin
d'organiser sa durée (Halbwacks, 1950: 81).
Le temps de l'homme fixe son horizon et g&e son destin. Il trace le
cadre de ses entreprises et de ses ambitions. En publicite, Le temps a une
grande valeur. En effet, il est un bien rare, et par conséquent, il est mesuré
avec précision. Peu à peu, la vie va plus vite, le temps s'identifie h L'argent.
Alors, les machines du temps ouvrent la voie B la sociét6 des machines; il
faut gagner du temps, d'oh l'importance iconique du temps géré.
La vitesse (figure A-275) est une premiére construction de la
publicitt5. Elle est une idéologie, inséparable du mythe du progrès. Tout ce
qui bouge dans le monde, tout ce qui va vite, progresse. Toute mobilité est
positive; le mal majeur est d'être adépassé». La plupart des compdtitions
sont à base de vitesse et dans tous les domaines, il faut désormais aller vite,
penser vite et vivre vite. Il faut courir, rejoindre, prendre le train en
marche: le culte de la vitesse est intimement lié au temps géré avec ces
symboles: machine à voyager dans le temps (figure A-276),détour (figure
A-277), labyrinthe (figure A-278), file d'attente (figure A-279) et ligne
droite (figure A-2M), des reprkntations plus h humain es^ et imagées.
Pusieurs images du corpus font référence au temps et aux
connotations qui peuvent y être associées. Les dispositifs, de ptus en plus
sophistiqués au fil des sikles, qui ont 6t6 produits par les sociétés
occidentales pour tenter de capturer et de domestiquer le temps à l'aide de
normes et de mesures, sont bien connus: la montre (figure A-281),
l'horloge (figure A-282), le réveille-matin (figure A-283), le cadran
solaire (figure A-284), le sablier (figure A-285)et le chronomètre (figure
A-286). Ces dispositifs supposent toutefois qu'il existe un temps réel,
objectif, mesurable et dbmposable, donc naturel et universel, qui encadre
les activités humaines, quelles qu'elles soient, et qui est vécu par tous les
humains de la même façon. Autant d'images qui amènent B classer le temps
géré en quatre moments forts, soit le temps de la journée, de la
semaine/mois, des saisons et de L'année.
3.1 La journée
Le temps est avant tout une relation qui s'dtablit entre des phénomhes en
changement et une «instanceobservatrice», un observateur, qui est capable
de noter les changements, de les coordonner et de les narrer. Ce qui est
socialement construit, c'est donc en fait une relation, dont la forme et le
sens varient selon les contextes. Cela a eu pour effet de produire en
publicité une multitude de repères temporels: instruments techniques de
mesure, activités, objets et symboles.
Dans l'iconographie publicitaire, le matin est suggéré par des signes
comme les lettres AM (figure A-287). La nuit est symbolisée par la lune
(figure A-288), les etoiles (figure A-289), une personne au lit (figure A290), les lettres ZZZ (figure A-291), un hibou (figure A-292) et le noir
(figure A-293).
3.2
La semaine
et le mois
Le temps collectif et historique est, entre autres, celui des agendas (figure
A-294) avec leurs dates, leurs semaines et leurs mois. il rythme la vie
sociale d'un petit groupe ethnique ou d'une nation tout entière. Les
calendriers sont partout le reflet d'un besoin d'ordre, celui-là même qui est
indispensable à la structuration des sociétés.
3.3 Les saisons
Le froid fait place au chaud, le chaud est remplacé par le froid. Ce que les
publicitaires expriment ici, c'est la périphérie du cercle, le commencement
et la fin, l'idée du cycle, de l'éternel retour des choses. L'alternance
cyclique et les perpétuels recommencements qui scandent le rythme de la
vie végétale comme celui des sociétés humaines ont frappé l'imagination.
Ce motif cyclique s'accompagne dès ses origines de toute une iconographie
en publicité.
La succession des saisons (figure A-295) comme ceile des phases de
la lune scande le rythme de la vie, les étapes d'un cycle de développement:
naissance, formation, maturité, déclin; cycle convenant aux êtres humains
aussi bien qu'à la société et A la civilisation. Considérons les saisons; le
printemps avec ses hirondelles (figure A-296); l'&téet son soleil (figure A297), ses chaises de parterre (figure A-298) et sa crème glacée (figure A-
299) suggérant les vacances et la chaleur; et l'automne =présent6 par les
feuilles qui tombent (figure A-300).
L'hiver est 6voqué par des symboles comme la neige (figure A-301).
des flocons de neige format géant (figure A-302). de la glace (figure A3û3), des bottes d'hiver (figure A-3W), un igloo (figure A-303. un Inuit
(figure A-306). un bonhomme de neige (figun A-307). un pingouin
(figure A-308) et des sports, tels le patinage (figure A-309). la raquette
(figure A-310), le ski (figure A-31 1) et l'escalade (figure A-312). Le
corpus montre enfin des images où l'on met en opposition: l'hiver et l'etc5
(figure A-3 13), par exemple.
3.4 L'année
Le symbole le plus communément utilisé ici est l'indication de l'année
(figure A-3 14).
4.
Le temps des rituels
Le rythme de la vie sociale est marqué en publicité par de nombreux points
de repère, telles les fêtes et les cérémonies qui ravivent la mémoire
collective et donnent un sens à l'avenir. La publicité recrée ces rituels qui
relèvent de la quotidienneté ou de la fête. Longtemps après l'émiettement
du terroir, la publicité continue la pratique des réunions de famille,
recréant pour tous, à domicile, des rituels jadis lies au cycle calendaire.
Elle est au centre de toutes les activités annuelles, Noël, Pâques, etc. Les
rituels qu'elle met en &ne permettent de rompre avec le quotidien. Ils
marquent l'inauguration d'un nouveau cycle: nouvelle année, anniversaire
de naissance, fête, ouverture d'un commerce, lancement d'un navire, d'un
livre, d'un nouveau produit, etc.
On pourrait résumer en disant que la fete est le royaume des
symboles. Il y a la fête de Noël, la fête anniversaire, la fête foraine. les
anniversaires de mariage, les noces d'or, le ler janvier, etc. Elles
impriment le rythme des jours ouvrables ou fériés qui affecte les croyants
et les non-croyants.
Dès qu'une vie collective s'ébauche, dès qu'une société se structure,
le besoin se fait sentir de fuer des repères précis dans le temps, pour se
réunir et commémorer l'événement. Les fêtes contribuent à la cohésion
d'une société; elles ponctuent le calendrier, Comme l'écrit Attali:
«Nommer le passé et relier les dates qui le jalonnent à une mémoire
confèrent un sens aux sociétés» (Attali, 1982: 15-16). Dans la société
traditionnelle, elles traduisaient la structure sociale des groupes dont elles
renouvelaient la cohésion et do~aientleurs sens aux actes quotidiens. Dans
la société moderne, de tels rassemblements sont difficiles. La société
globale s'est agrandie en se complexifiant et en rendant de plus en plus
impersonnels les contacts entre les individus.
Comment se déroulent les fêtes dans le construit publicitaire? Qu'estce qu'on y utilise? Qu'est-ce qu'on y met en jeu? Comment exprime-t-on
ces significations par des signes? Parmi l'ensemble des fêtes, on constate
que les périodes qui entourent Noël, Pâques, I'Halloween, le Carnaval, la
Saint-Valentin et les anniversaires sont celles qui donnent lieu aux
célébrations les plus importantes.
Les symboles de Noël sont multiples et la publicité est là pour les
rappeler: cannes de Noël (figure A-315), couronne de Noël (figure A-316),
bas de Noël (figure A-3 l7), cadeau (figure A-318), papier et choux
d'emballage (figure A-3 lg), ruban (figure A-320), cheminée (figure A321), lumières de Noël (figure A-322) et le <<HO
HO Hou (figure A-323).
Parmi la kyrielle d'objets et d'images qui sont symboles de la fête,
l'arbre de Noël (figure A-324), les boules de Noël (figure A-325) et
lfétoiIe(figure A-326) sont dominants. Que la neige
- et les flocons -
soient associés aux images de Noël, cela va de soi. Mais presque toujours,
c'est
une neige en mouvement, une neige trh lente, qui vient du ciel
comme un baume calmant.
L'image du Père Noël (figure A-327) accompagné des lutins (figure
A-328), de son traîneau (figure A-329) et des rennes (figure A-330)
envahit la publicité et symbolise la grande fête de la consommation. Son
utilisation publicitaire laisse place à trois stéréotypes qui sont le costume
rouge, la barbe blanche et une grosse veste ceinturée. Mentionnons aussi
l'image de la chorale (figure A-331).
Déjà on a pu saisir que le rêve se mêle à la fête, naissant d'un
sentiment de nostalgie et superposant à la réalité une fête plus ou moins
imagée. Les univers évoqués peuvent alors revêtir l'allure de clichés sans
autre intérêt que celui de leur insertion dans un appareil publicitaire. ils
servent à soutenir les rêveries. Dans cette classification de la fête, seul
l'anniversaire de naissance semble atteindre en intensité la fête de Noël. En
effet, puisque les jours ordinaires ne permettent pas de se consacrer
entièrement à ce qu'on aime, on va arrêter le cours normal des journées.
On va arrêter le temps pour vivre mieux:. Ballons, serpentin (figure A332), chandelles (figure A-333) et chapeau de fête (figure A-334) vont
alors servir de marqueurs iconographiques de ce temps fort de la vie de
l'acteur social.
Les symboles de Pâques tournent autour de I'oeuf et de la couleur
mauve. L'Halloween est évoquée par la citrouille, la sorcière et les
déguisements (figure A-335) et la Saint-Valentin par le coeur amoureux et
la flèche (voir la section sur les jeunes adultes). A côt6 de ceia, la publicite
va se référer à quelques symboles pour suggdrer la fête, la célébration des
moments mythiques. Ce sont plus particulièrement les feux d'artifice
(figure A-336) et la lumière qui incarnent dans l'ensemble le bonheur et les
amis.
C. CONCLUSION
Dans ce chapitre, on a souligné certains aspects du temps dans la trace
publicitaire. Pour ce faire, on a divisé la recherche en quatre sections;
d'abord le temps biographique, ensuite le temps historique, le temps géré et
le temps des rituels.
On a montré qu'il n'y a pas de temps universel et unique, mais que la
publicité décompose plutôt les images en une multiplicité de temps, dont
chacun a ses particularités propres. Dans ces construits, l'ensemble des
croyances, des valeurs et des normes est structuré par des modes
particuliers de représentation et d'appropriation du temps.
Dans les images, l'incorporation sociale des acteurs sociaux reste
différente selon l'âge. Ainsi, le construit publicitaire redoute 1e
vieillissement et la mort tandis que le mythe de l'enfance est fortement
représenté. Les images publicitaires illustrent Bgalement bien l'importance
du temps. Le corpus montre comment les 6tapes ou cycles de vie sont
marquds par une red6finition périodique du sens de la vie et des valeurs. Le
temps apparaiAtalors comme une don*
soi dans le construit publicitaire.
fondamentale de la définition du
Par ailleurs, la publicité, dans la multiplicité de ses figures
iconographiques, véhicule tantôt les images d'un temps lointain, tantôt
celles d'un temps en devenir. De façon gdnbrale, il appadt que le passé et
le futur sont fortement valorisés. Théâtre d'un nombre croissant
d'innovations techniques et de transformations, l'image publicitaire fait
aussi de ce qu'on pourrait appeler l'«accélération du changement» son point
de mire. Au plan iconique, la publicité découvre la beauté du passé face
un présent soumis à une intense dynamique du changement.
En fait, les images publicitaires se situent presque toujours dans le
temps. Le temps garantit la vitalite et le développement d'un contexte sans
lequel les images publicitaires n'auraient peu ou pas de signification. II
surdétermine tout type de rapport, il est porteur de prkjugbs favorables ou
ddfavorables, de faits sociaux marquants et de façons d'être ou de penser.
Chapitre V
Les figures de l'espace
dans la publicité
A. INTRODUCTION
L'espace constitue une deuxième dimension importante et significative des
images publicitaires. L'espace construit par la publicité exprime à la fois
une vision culturelle particulière et La place qu'on se reconnaît dans la
société.
L'espace apparaît comme une dimension fondamentale de
l'imaginaire publicitaire. II est sigdhnt et constitue un véritable discours
avec ses oppositions de lieux, avec sa syntaxe et ses paradigmes, par
et inconnus, du nord et du
exemple, pays chauds et pays froids, pays COMUS
sud, etc. C'est donc un lieu important de toutes figurations et
reprksentations.
L'imaginaire investit l'espace en le dotant de polarisations
qualitatives. Ces représentations traduisent la façon dont le construit
publicitaire situe l'homme au sein de la societé. L'espace humain en géndral
est ~ i g ~ a nC'est
t . un discours et ce discours est un langage.
À l'instar du temps, l'espace construit garantit la vitalité et le
développement d'un contexte sans lequel les images publicitaires n'auraient
aucune signification. L'espace surdétermine tout type de rapport; il est
porteur de préjugés favorables ou défavorables, de façons d'être ou de
penser. L'espace publicitaire est lié directement à la nature et aux
expressions des acteurs sociaux.
Dans ce chapitre, on va examiner la manière dont la publicité
construit l'espace. Plus spécifiquement, il s'agit de recenser les diverses
mises en scène iconiques; d'identifier et classer les différents types d'espace
existant dans l'iconographie publicitaire.
B. ESPACE ET PUBLICITE
L'analyse du corpus d'images publicitaires permet de distinguer huit types
d'espaces. Premièrement, on retrouve l'<<espaceinterstellaire>>,
c'est-à-dire
le temtoire de l'espace, celui des planètes et des étoiles. Deuxièmement, on
a identifié l'«espace mondidx, c'est-&-direcelui de la planète Terre.
Troisièmement, on note la prhmce de 1'~espacenationab, c'est-à-dire un
pays. Quatrièmement, on constate l'existencede l'((espace communautaire^^,
c'est-à-dire le territoire rural (la campagne) ou urbain (la ville).
Cinquièmement, on a idenE6 Puespace domestiquew , c'est-à-dire le
territoire privé ou le domicile. Sixi&mement,on retrouve l'«espace autre»
ou l'ailleurs, c'est-à-dire l'espace rêvé, l'endroit où certains individus
espèrent s'établir ou retourner pour trouver la paix et la recomaissance.
Septièmement, il y a l'*espace religieuxx, c'est-A-dire le territoire des
mythes. Enfin, huitièmement, on constate l'existence de l'«espace
cosmologique», c'est-à-dire le milieu des éléments essentiels soit l'air, le
feu, l'eau et la terre.
1. L'espace interstellaire
La science et la technologie spatiales enrichissent l'iconographie
publicitaire. L'espace est un discours et un langage: l'imaginaire cosmique
et la marche sur la Lune ont banalisé la pladte. En même temps, ils ont
montré un espace infini devenu accessible à la découverte. La trace
publicitaire est d'autant plus libre que les frontières entre la science et la
science-fiction deviennent imprécises.
Le mythe du progrès, même s'il s'est fait attaquer de toutes parts,
trouve dans la conquête de l'espace une assise considérable. Dans
l'observation de la trace, tout se prête A l'explosion de l'imaginaire. A
l'échelle humaine, on retrouvera des représentations symboliques de
l'espace par Ifentremise de moyens techniques. Les satellites (figure B- 1),
les navettes (figure B-Z), les modules lunaires (figure B-3), la station
orbitale (figure B-4), le vaisseau Star Trek (figure B-5) et la soucoupe
volante (figure B-6) sont vulgarisés par la publicité.
Quel que soit le terme utilisé
-
astronef, vaisseau ou fusée
interstellaire, vaisseau cosmique - le v6hicule spatial est devenu l'un des
principaux symboles, certains diront le symbole fondamental de l'espace.
Grâce A cet engin, l'homme contemporain aquiert la possibilité d'échapper
B sa condition terrestre. C'est tout l'imaginaire qui s'en trouve transformé.
Iconiquement, on retrouvera des représentations de l'espace par
l'entremise de personnages, tels le robot (figure B-7)et le cosmonaute
(figure 8-8). À l'échelle cosmique. le corpus publicitaire montre l'univers
(figure 6-9),
une galaxie (figure B-IO), un systéme solaire (figure B-1 1),
une lune (figure B-12) et des planétes. Saturne (figure B-13) et son
archipel de satellites (sa ceinture) apparaissent sous les traits d'un univers
en permanente effervescence.
Symboliquement, le soleil (figure 8-14} offre l'image de la stabilité.
Le soleil est aussi considér6 comme fécondateur: il vivifie. Parallèlement,
la lumière traduit la vie, le d u t et le bonheur. Le soleil est la source de la
lumière et de la chaleur. En conséquence, c'est un signe d16nergieet de
puissance. Mais il peut aussi être destructeur, en temps de sécheresse
(figure B-lS), provoquer la soif, briller ou tuer. Les comètes (figure B-16)
constituent un mauvais pdsage, annonciateur de catastrophe. Les dtoiles
(figure B- 17) évoquent le sommeil et la nuit.
2. L'espace mondial
Sous l'impulsion de ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la
mondialisation des marchés, phénom&uebien sûr économique mais aussi
social et culturel, les images publicitaires mettent en &ne la planète terre
comme jamais auparavant. Plusieurs images chantent ainsi les vertus de la
mondialisation cultureile, politique. sociale et économique.
Symboliquement, la terre s'oppose à l'air et au ciel. Universellement,
elle conçoit les sources, les minerais, les métaux. Elle est pleine de
promesses et de possibilités. Elle ne demande qu'à être conquise par
l'acteur social. Visuellement, la terre est évoquée par l'entremise du globe
terrestre (figure B-18),de la planete terre vue de l'espace (figure B-19) ou
des drapeaux des pays du monde (figure B-20).
3. L'espace national
L'espace national représente le territoire occupé par une population. C'est
ce qu'on appelle plus communément la nation. En etudiant les images
publicitaires, plusieurs catégories émergent avec chacune son lot de clichés
qui migrent d'une image à une autre. On retrouve dans le corpus des
évocations de pays, par exemple les États-unis, le Canada, la France,
l'Angleterre, l'Italie ou le Japon, pour n'en nommer que quelques-uns. De
cet ensemble, une catégorie particulière et dominante émerge toutefois avec
force: il s'agit des États-unis.
3.1 Les États-unis
La mythologie contemporain de la trace puise largement, de par les
circonstances historiques, économiques et culturelles, dans les
représentations et symboles de l'Amérique, à la fois décor et lieu de
création de figures et de modèles.
Dans le construit publicitaire, l'Amérique est un mythe incarnb.
Symboliquement, l'Américain procéde du rêve américain, de l'american
way of lre, de l'individualisme et de la free enterprise. Cette imagerie
reprend, comme aux premiers jours de la création, «des fleuves dont la
source ne tarit point, des champs sans bornes que n'a point encore retourné
le soc du laboureum (Tocqueville, 1951: 427-428). Pour Lionel Trilling
(1948): «Notre nation est la seule qui s'enorgueillit d'un rêve auquel elle
donne un nom, 'le rêve am6ricain'.~
En dépit de plus de deux cents ans d'évolution et de bouleversements
sociaux, on retrouve dans le discours iconique de la publicité, véhicule de
la culture populaire, les mêmes symboles qui migrent et qui témoignent de
la permanence du visage culturel des États-unis. Parcourir le discours de la
publicité iconique permet de se rendre compte de la remarquable
récurrence d'un certain nombre d'images représentant la force et la gloire
se rattachant à l'Amérique: Statue de la Liberté (figure B-21),aigle (figure
B-22), déclaration d'hddpendance (figure B-23), cloche d'Indépendance
(figure B-24),étoiles du drapeau amkricain (figure B-25), sculpture des
têtes
de présidents dans la montagne (figure B-26), carte geographique du
pays (figure B-27), Capital (figure B-28),Maison Blanche (figure B-29),
Pentagone (figure B-30),Hollywood (figure B-31),New York (figure B32),conquête de l'espace (figure B-33) et basebail (figure B-34). Dans tout
cet ensemble, Ie drapeau américain demeure sans aucun doute l'une des
représentations les plus magnifiées du pairiotisme américain en publicité.
Plusieurs personnages tant politiques que mythiques servent eux aussi
à évoquer les États-unis: Oncle Sam (figure 8-35'), Lin&
(figure 8-36),
Franklin (figure B-37), Roosevelt (figure B-38), Reagan (figure B-39),
Clinton (figure B-40),Barbara Bush (figure B4), Dan Quayle (figure B42), Carter (figure B-43),Nixon (figure B-44) et le g6néral Schwankopf
(figure B-45). Mais i'exacerbation mythique des États-unis dans la
publicité, c'est aussi dans l'Ouest, c'est-à-dire le western et la Californie
qu'il faut la chercher.
3.1.1 La Californie
Sémiologiquement, le point commun évident entre 1 s États-unis et l'Ouest,
c'est l'espace et l'appel de la terre. Dans Le Western: Archéologie d'un
genre, Leutrat n'a aucune peine à illustrer la relation entre espace
nostalgique et primitif chez les premiers écrivains de l'Ouest:
«L'Ouest est assimilé à un passé conçu comme une époque
plus belle à vivre; il est aussi le produit d'une attitude
isolationniste: le passé comme source des valeurs
traditionnelles sur lequel le présent doit s'appuyer. (...) Le
Paradis perdu, l'Âge d'or: puisque le temps est révolu, peutêtre reste-t-il un lieu vers lequel revenir» (Leutrat, 1987: 45).
Toute une imagerie de l'Ouest attestée par la publicité recrée cette époque
de liberte: les cow-boys (figure B-46)et les Indiens (figure B-43,les
chasseurs de prime (figure B-48) et les diligences (figue B-49). Dans la
trace, le cow-boy jouit de l'espace. C'est 116temelerrant du paradis perdu
qui incarne les valeurs viriles de I'Ouest agressif. Le cow-boy - homme
mûr, à la barbe mal faite, portant des bottes, un chapeau et un fouet
-
symbolise ainsi avec force le mythe de la conquête. Vient s'y greffer, une
image fortement stéréotypée: le bateau à roues à aubes (figure B-50).
L'Ouest, c'est symboliquement la rencontre des grands espaces. A
travers les mythologies véhiculées par la publicité, s'exaltent l'image de
l'endmce (le cow-boy), L'image de la résistance (l'Indien), l'image de la
conquête (l'espace) et celle du renouvellement (la Californie).
«En soi, la Californie est un mythe-en premier lieu pour les
Américains et pour diffbrentes raisons. Elle est le mythe de la
frontiére extrhe, c'est-à-dire le pays au-delà duquel il n'y a
plus de terre à conqu&ir. Elle est aussi te mythe de I'argent
facile, depuis La ruée vers l'or qui a dtbuté en 1848 et qui a
attiré un nombre incalculable de gens qui espéraient trouver
le filon. (...) Pour la plupart des Européens, la Californie fait
naître l'image d'une "Californie ensoleillée" avec ses plages,
ses surfers et ses maisons luxueuses au bord de la mem
(Salarnand, 1990: 175),
L'Ouest, c'est également le désert (figure B-51). «Il y a quelque chose au
sujet du désert que notre sensibilité ne peut assimiler, ou que nous n'avons
pas 6té capables d'assimiler jusqu'à présent. Cela explique peut-être le fait
que le désert a ét6 h peine touché par La pésie ou la fiction, la musique ou
la peinture. (...) Pendant ce temps, sous un ciel peupi6 de vautours, le
désert attend, indiffkrent A l'esprit humain» (Abbey, 1%8: 242).
Le caracthre mythologique même de la gdographie conduit à
s'interroger sur la signification m5taphoripue des rochers et de la pierre
(figure 8-52). Ce qui compte ici n'est pas tant le désert ou le canyon
comme lieu géographique que les images qu'il peut inspirer, les figures et
les voies d'un voyage métaphorique, d'une exploration du &sert envisagé
non seulement cornme.temtoire, mais aussi comme symbole de l'arnérique,
de la chaleur et de la sécheresse. Le désert est une terre aride et désolée,
symbole de la solitude. Il donne lieu à toute une série de constniits, plutôt
stéréotypés, comme par exemple cette route interminable (figure B-53) qui
laisse soudain entrevoir une station-service ou un bar (figure B-54). C'est
aussi des vautours qui guettent inlassablement une victime (figure B-55).
3.2 L'ex-URSS
À l'antipode des États-unis, on retrouve ce qu'il est maintenant convenu
d'appeller l'ex-URSS. Le portrait officiel de l'ex-Union Soviétique est
remarquablement stable. Le drapeau de l'ex-URSS (figure B-56), des
cosaques (figure B-57), un Gorbatchev aisément reconnaissable à sa tache
frontale (figure B-S), un Staline (figure B-59) ou un Lénine (figure B60), une faucille (figure B-61) et une oeuvre d'art russe (figure B-62). La
publicité de Volkswagen que l'on présente et qui s'inspire de l'ex-drapeau
soviétique s'affichait sur les murs au cours de l'hiver 1991-1992. Cette
même trace - une fauciIle
- migre pour illustrer tantôt une voiture,
tantôt une vodka. C'est dans ce genre de visuel que l'on peut le mieux
apprdcier l'intertextualité.
Évidemment, aucune image n'est innocente, tout document se prête
différentes lectures; l'imagerie soviétique ouvre les fenêtres sur un autre
monde, oh les gens, les choses, les événements ont et6 contraints de se
conformer. &ange publicite, dont il n'est pas possible de dire si elle fait
partie d'une contre-attaque officielle (Ellenberger, 1991: 26-33). La chute
du mur, la décomposition du système communiste, la Chine convertie au
socialisme de marché. L'histoire a offert à profusion, ces derniers temps,
des arguments et des nouveaux thèmes publicitaires. Les rêves les plus fous
de la publicité s'affichentdonc sur les murs des villes es s'étalent dans les
pages des magazines. Rien de plus banal, en apparence, que cette chronique
d'une mort annoncée: celle du politique. En fait, Castro (figure B-63) est le
seul survivant de l'époque communiste à figurer dans le corpus.
3.3 Le Canada
Le Canada est évoqué par sa configuration géographique (figure B-64)et
par différentes allusions au froid: le Nord (figure B-65), l'Indien (figure
8-66) et le cow-boy (figure B-67).Comme dans le cas des États-unis, le
drapeau (figure B-68) est un référent fr6quent. S'ajoute à cela, un symbole
étroitement associé au Canada: la feuille d'érable (figure B-69).Le bras
canadien de la navette spatiale américaine est également mis à contribution
(figure B-70).
Les différentes provinces du Canada sont aussi évoquées. On
remarquera que la production la plus importante provient du Québec avec
le drapeau (figure B-7 l), la configuration gbgraphique (figure B-72), les
canons des remparts de la ville de Québec (figure B-73)et le Bonhomme
Carnaval (figure B-74). Certaines expressions verbales ont aussi valeur de
symboles visuels: «Je me souvienw (figure 8-75) et le mot «Québec*
(figure B-76).La tour du CN (figure B-77) et les chutes du Niagara
(figure B-78) rappellent l'Ontario et sa capitale, Toronto.
3.4 L'Amérique Latine
L'Amérique latine, en tant que symbole est quasiment absente, si ce n'est le
continent comme tel (figure B-79),la danseuse de flamenco (figure B-80)
et le Mexicain coiffé de son sombrero (figure B-81).
3.5 L'Europe
Dans le construit publicitaire, chaque pays est associé A quelques symbdes.
L'Europe, probablement sous l'impulsion de Maastricht, fait son apparition
en tant qu'entité autonome et globale. Tout comme l'Amérique et te
Canada, la carte géographique (figure B-82) et le drapeau bleu et or,
(figure B-83) servent à idenmer le continent.
Du côté des pays composant l'Europe, la France mérite une attention
spéciale, ne serait-ce qu'à cause de la multiplication des symboles et des
images qui servent à la représenter: drapeau tricolore (figure B a ) , carte
géographique (figure B-85), baguette de pain (figure B-86), joueur
d'accordéon (figure B-87) et croissant (figure B-88), mais aussi des
personnages célèbres tels Napoléon (figure B-89) et de Gaulle (figure B90),et des constructions et monuments, principalement l'Arc de Triomphe
(figure B-91) et la tour Eiffel (figure B-92).
L'Angleterre est suggérée par son drapeau (figure B-93), le pont de
Londres (figure B-99, le Parlement (figure B-95), Lady Di (figure B-96),
le 10 Downing Street (figure B-9î), un autobus à deux étages (figure B98), une théière (figure B-99) et le chapeau caractéristique des policiers de
Scotland Yard (figure B-100).
L'Espagne est évoquée par le flamenco (figure B-101), mais surtout
par la corrida (figure B-102) incarnée par le torero (figure B-103), la
muIeta, le tricorne et le taureau.
L'Italie est représentée par son drapeau (figure B-104) et des lieux et
monuments mythiques comme la tour de Pise (figure B-los), le colisée de
Rome (figure B-106), les gondoles de Venise (figure B-107), la place
Saint-Pierre (figure B-LOS) et la place Saint-Marc (figure B-109).
S'il faut se fier aux images publicitaires, L'Allemagne n'a pas encore
réussi tout à fait à se débarrasser de son passé guemer. Exception faite du
traditionnel pantalon (figure B- 1 IO), les symboles modernes sont quasi
absents. En fait, le drapeau montrant le svastika (figure B- 11 1) et Adolf
Hitler (figure B- 112) prennent encore beaucoup de place. De même aussi,
le régime nazi a entretenu son propre mythe, lequel est aujourd'hui utilisé
pour mettre en garde la sociéte des nations.
D'autres pays européens apparaissent également dans le corpus. La
Belgique avec son Manneken-Pis (figure B-113), la Hollande avec ses
moulins à vent et ses tulipes (figure B-114), et la Gtéce avec les colonnes
du Parthénon (figure B-115).
3.6 L'Asie
L'Asie du corpus publicitaire se réduit à trois pays. D'abord le Japon avec
son drapeau (figure B-116), les yeux bridés de ses habitants (figure B-117),
ses lutteurs de Sumo (figure B-1 l8), ses joueurs de tambour (figure B119), ses samouraï (figure B-120), ses souliers caractéristiques (figure B-
121), son sushi (figure B-122), ses rues de néons (figure B-123), ses
geishas (figure B-124) et son Fuji-Yama (figure B-125).
La Chine est représentée par l'entremise des caractères chinois
(figure B-126), la Grande Muraille (figure B-127) et les cyclistes qui
envahissent les rues des cités (figure B- 128).
L'Inde est évoquée par le charmeur de serpents (figure B-129),un
personnage aux multiples bras (figure B-130), un génie (figure B-131), le
Taj Mahal (figure B- 132) et le contorsionniste (figure B- 133).
3.7 Les pays arabes
À l'instar de l'Asie, les images publicitaires du Moyen-Orient sont
réductrices. L'Egypte est le seul pays à occuper un espace iconographique
dans le corpus avec, au rendez-vous, des symboles éternels: la pyramide
(figure B- 134), le sarcophage (figure B-135), les hiéroglyphes (figure B136) et le chameau (figure B-137).
3.8 L'Océanie
L'Océanie de la publicité, c'est 1'Australie avec son drapeau (figure 8-138).
sa carte geographique (figure B-139). son boomerang (figure B - l a ) , ses
personnages B l'envers qui semblent dbfier la gravité (figure B-141) et des
animaux caract6nstiques comme le koala (figure B-142) et le kangourou
(figure B-143).
3.9 L'Afrique
L'Afrique, sous forme de continent, est généralement absent de
l'iconographie publicitaire. L'image de l'Africain maigre (figure B-144) au
ventre gonflé (figure B-145). et d'animaux sauvages tels le zèbre (figure BI%), le singe (figure B-147), le gorille (figure B-148), le lion (figure B-
149), le léopard (figure
B-150). la girafe (figure B-151) et le crocodile
(figure B-152),sont les symboles clés de 1'Afrique.
4. L'espace infranational ou communautaire
L'espace infranational - une province, une ville, un village - correspond
à un territoire dont les résidents peuvent faire le tour et dont ils connaissent
les limites. Pour ces résidents, cet espace constitue leur univers familier. À
l'intérieur, on se sent chez soi alors qu'à l'extérieur, on est ailleurs.
Nos observations conduisent à identifier deux espaces infranationaux
dans la publicité: la campagne - ou le monde rural
- et la ville - ou le
monde urbain. Lorsqu'on évoque la problématique ville-campagne, toute
une série d'idées apparaissent simultanément. La seule association «villecampagne» sous-entend en effet presque simultanément les notions de
dualité, d'opposition. D'emblk, les deux espaces évoqu6s sont pensés dans
une relation conflictuelle, comme deux espaces investis d'un certain
nombre de valeurs en opposition presque systématique.
L'objet de cette section est lt6tudedes conditions et des mécanismes
par lesquels des images et symboles publicitaires vont être proposés pour
définir le monde rural et urbain. Ainsi, on verra que la nature est investie
des valeurs premières comme la famille, le travail, les besoins &lémentaires
(boire, manger, s'abriter, etc.), la connaissance de la terre, la sant6; alors
que la ville est synonyme d'individualisme et de plaisir.
4.1 Le rural
S'il faut en croire le corpus, le niral est dans l'air du temps. Dans ces
circonstances, il n'est pas étonnant, que ce thème ait suscité un grand
nombre de créations publicitaires. Symboliquement, le fondement de la
ruralité et sa valeur sont à trouver dans un patrimoine hérité du passé. Face
aux désordres de la vie urbaine, face surtout aux conflits sociaux, le monde
rural est défini en publicité comme un monde de paix, d'ordre, voire
d'harmonie. Le village (figure B-153) et la maison de campagne (figure B154) sont les lieux par excellence du monde rural. Ils sont l'image d'une
micro-société où les rapports sociaux n'apparaissent pas construits sur le
conflit ou la contradiction. L'église (figure B-155), centre spirituel,
incarne les principales institutions: la fabrique, les oeuvres de charité et les
associations de toutes sortes. Le magasin g6néral (figure B-156) est un
autre pôle de la vie communautaire.
La ferme, avec sa grange (figure B-157), sa paille (figure B-1%) et
ses clôtures de bois (figure B-159),constitue le lieu de travail et d'échanges
entre voisins et la parenté. Les chemins de terre battue (figure B-160)
deviennent alors l'incontournable moyen permettant de créer un lien entre
les divers membres de la société.
La campagne, c'est aussi la réfbrence à la nature et la promesse d'une
vie rustique sous toutes ses formes: herbes (figure B-161), fleurs (figure B162), cours d'eau (figure B-163), lacs (figure B-164), quai (figure B-165)
et chute (figure B-166).
Dans tous les cas, la sécurité et la stabilité sont largement exploitées à
un niveau symbolique par l'entremise des nombreuses teintes chaudes, la
certitude des multiples mouvements d'ascension ou encore la stabilité
dominante des formes et des activités. La montagne (figure B-167), est un
obstacle naturel; son ascension symbolise la conquête, peut-être parce que
depuis le début des âges, les humains ont toujours placé en haut ce qui est
grand et lumineux.
L'arbre (figure B- 168)avec son tronc et ses branches (figure B-169)
rappelle la vie, la force et la virilité. Selon Chevalier et Gheerbrant (1982),
il fait partie du registre symbolique de la grandeur. Mais l'arbre est aussi
un support rassurant. Le tronc d'arbre (figure B-170) est synonyme de
force: c'est en tout cas l'impression que donne l'arbre à l'âge adulte. Les
feuilles vertes (figure B-171) rappellent la vie iandis que les feuilles brunes
(figure B- 172) évoquent la mort.
Deux personnages viement compléter ce tableau: 1'6pouvantail de
jardin (figure B- 173) et le campagnard (figure B-174) assis sur sa chaise
berçante. Parce qu'elle est de plus en plus menacée par la civilisation
industrielle et le développement urbain, la nature apparaît comme un bien
rare oh il fait bon vivre. Les sports et les activités que l'on peut y pratiquer
sont sains et vivifiants: la pêche au bord de l'eau (figure B- 175) ou dans un
canot (figure B-176) et le pique-nique (figure B-177). Ce monde rural,
relativement isolé, centré sur la terre et attaché à ses traditions, forme ainsi
un tout cohérent et homogène, une structure d'ensemble en publicité. La
trace semble en effet décidée à se «cmettreau vem.
Avec un logo figurant sur une terre éclatante, les entreprises se
positionnent sur un axe frais. On l'a vu, les images publicitaires expriment
l'axe vert par le biais de l'arbre, les feuilles d'arbre, le globe terrestre, et
bien sûr, l'utilisation de la couleur verte (figure B-178).Elles refusent
l'écologie dite «triste» et préfèrent orchestrer leurs représentations autour
de la célébration de la puissance des éléments naturels et de la solidarité
humaine. L'écologie se fait sympathique, de «bonne humeun>,dynamisée
de symboles naturels. Les images et le langage vert se forgent ainsi en
réaction aux clichés des années soixante. Les traces publicitaires passent au
vert, dans un déluge d'images, de nature sauvage et autres métaphores aptes
à traduire un rapport harmonieux avec la nature.
4.2 L'urbain
La société moderne a été le témoin d'un développement urbain de plus en
plus accéléré et la publicité n'a pu rester étrangère à ce phénomène; aussi la
ville est-elle omniprésente dans les images publicitaires étudiées. Lieu
d'insertion de l'homme en société, elle constitue la toile de fond devant
laquelle la plupart des personnages évoluent. Tout arrive par la ville et
dans la ville; bien sûr, le rural continue h vivre, mais toujours dans le
pas&.
Le regard sur la ville est un regard sur l'espace et sur la société elle
même. La ville contribue à structurer les flux et les perceptions, le
repérage et les pratiques des citadins, la localisation des fonctions et le
retour de l'animation urbaine.
La ville publicitaire est complexe et difficile à saisir. La ville est une
façon de vivre, ou plus exactement une façon de vivre ensemble. Dans la
ville, le social se manifeste et s'opère à travers des formes matérielles qui
constituent un réseau concret de rapports entre les hommes et le monde. La
ville s'enracine dans le vécu. D'un côté, les jeunes se réfèrent de manière
très forte aux cultures urbaines. De l'autre, les stéréotypes véhiculés font
de l'habitat moderne des lieux utrop grands» dans lesquels on ne peut pas
vivre ensemble, dans lesquels les réseau d'affiliation éclatent.
Le plus important est de voir qu'il y a aujourd'hui plusieurs sortes
d'espaces urbains. L'espace bâti rassemble les immeubles d'habitation et
ceux qui répondent à des besoins sociaux, collectifs et économiques. Leur
association fait la ville moderne. Les grandes villes qui ont perdu de leur
cohésion collective, ont également vu s'effondrer leur unité spatiale. A
mesure que la population croît et que la ville s'étale vers la banlieue, les
limites deviennent plus incertaines, tout à la fois imprbcises et changeantes.
Sur le plan de l'organisation spatiale, la distinction et l'opposition de
la ville et de la campagne sont manifestes. Ainsi, en milieu urbain, les
gratte-ciel (figure B- 179) sont le grand sujet de représentation. Les
maisons (figure B-180) et les immeubles d'habitation (figure B-181)
abondent.
Les vilies apparaissent de plus en plus comme des étendues où sont
rassemblées, entassées même, des ressources et des réalités de tous ordres.
Par exemple, on y trouve de nombreux bâtiments et des espaces qui sont les
lieux d'une intense activité. Les acteurs sociaux ont recours à une
multiplicité d'espaces qu'ils occupent de façons diverses. La vie quotidienne
et concrète des hommes est en cause. Les constructions sont plus
nombreuses que dans la campagne. Parmi les réalités urbaines représentées,
mentionnons:
L'édifice et l'ascenseur (figure B- 182);
La cloche d'appel de l'hôtel (figure B- 183);
Le marchand (figure B-184);
Le supermarché, aussi rappelé par le sac d'épicerie
(figure B-185), l'étagère (figure B-186) et le panier
d'épicerie (figure B-187). Ces images pourront également
évoquer la société de consommation;
Les bars (figure B-188) et leurs tables;
La banque avec sa chambre forte (figure B-189);
Le alavornab (figure B- 190);
La prison avec ses barreaux (figure B-191);
Le parc avec ses bancs (figure B-192);
10. La boîte téléphonique (figure B- 193).
Contrairement à la campagne, la ville utilise abondamment les
représentations de la verticalité. Parmi les symboles de la ville, la tour
(figure B-194) occupe une place essentielle par la volonté qu'elle traduit de
nier, en la dkpassant, la condition humaine. Cette notion de verticalité qui
préside à son organisation fait de la colonne un symbole de l'affirmation.
Par ailleurs, toute ville est un carrefour, un confluent. Diverses voies
de communication s'y rencontrent. On notera que les moyens de transport
ont pris dans la vie sociale une importance aussi caractéristique que celle
qu'avaient le cheval et la diligence.dans les siècles passés. La publicité a
contribué à dramatiser le spectacle de la circulation. Son boulevard sillonné
de voitures et de camions paraît se situer dans un univers irréel. Les
créateurs accentuent d'ailleurs le côté fantastique de ce phénomène
typiquement urbain en recourant à des images photographiques: carte
routière (figure B-195), échangeur (figure 8-1%), route (figure B-197),
feu de circulation (figure B-198), panneaux routiers (figure B-199),
bamère (figure B-200) et bouchon de circulation (figure B-201).
La symbolique du pont (figure B-2M), comme le lien qui permet de
passer d'une rive à l'autre, est universellement répandue. Plusieurs autres
représentations ont pris une place considérable dans le monde des
symboles: l'aéroport (figure B-203), l'avion (figure B-204), le poste de
pilotage (figure B-205), le ûamway (figure B-206), le taxi (figure 8-207),
l'ambulance (figure B-208) et l'automobile (figure B-209). En tant que
symbole d'énergie et de mobilité, la locomotive (figure B-210) a une
valeur très positive.
Depuis que la publicite s'intéresse à dégager la spécificité de la vie
sociale urbaine, deux visions extrêmes pdsident à sa construction: ou bien
la ville moderne serait le théâtre d'une désorganisation alarmante des
équilibres, ou bien, par la diversité des modes de vie et des insertions
sociales qu'elle propose, la ville réunirait, comme cela n'a jamais été
possible jusqu'alors, les meilleures conditions de la libertb de l'homme et
de nouvelles formes de solidarité. Les visions radicales de la vie sociale
urbaine ne font en fait qu'exprimer les visions interrogatives sur le devenir
de la ville.
Dans certains cas, l'image construite par la publicité est destinée à
susciter la honte ou la gêne à l'idée que la ville qui s'était crue le paradis
des travailleurs se révèle aussi hideuse et inhospitalière que les vieilles
cités. On y retrouve alors toute la thématique commune: le misérabilisme et
ses thèmes de délabrement. A plus d'un titre, la ville étouffe et tue parce
qu'elle interdit les joies simples et innocentes du regard, de l'ouïe et de
l'odorat. Elle est la négation pure de la vie. Même le ciel n'arrive pas à
l'éclairer convenablement à cause des nuages de fumée (figure B-211) ou
de poussière qu'elle produit. Les splendeurs de l'aube et des couchers de
soleil sont inconnus.
La ville apparaîtra alors comme le Babel des temps modernes. Ainsi
s'opère une double mythification-la ville perçue comme le lieu d'une
humanité inférieure; et la vie d e , implicitement présentée comme le lieu
d'une vie meilleure, parce que plus pure.
S. L'espace domestique
Le territoire domestique correspond à l'espace résidentiel. II est représenté
par une maison (figure B-212). C'est l'espace privé des individus, ce lieu à
l'abri des regards d'autrui qui assure il ses occupants une sécurité émotive
de nature plus personnelle que celle, plus collective, que fournit l'espace
infranational, rural ou urbain. Symboliquement, la maison incarne le
mieux la vie en commun,avec le sens de refuge, de protection. Elle devient
en quelque sorte le centre du monde.
Le mur (figure B-213) est traditio~ehnentl'enceinte protectrice.
Les éléments de décoration extérieurs sont nombreux: herbes (figure B214), corde à linge (figure B-215), pince à linge (figure B-216), boyau
(figure B-217), boîte aux lettres (figure B-218), piscine (figure B-219)et
chaise de parterre (figure B-220).
La fenêtre (figure B-221) avec ses rideaux est un symbole
d'ouverture et de réceptivité. Le verre qui la compose incarne parfaitement
la frustration: il permet de voir mais empêche de toucher.
La porte (figure B-222) symbolise le lieu de passage entre deux états,
entre .le connu et l'inconnu. Mais elle a une valeur dynamique; car non
seulement elle indique un passage, mais elle invite à le franchir. La
signification du seuil provient de son rôle de passage entre l'extérieur et
l'intérieur. Le pouvoir de la cl6 est celui qui pennet de lier ou de délier,
..
d'ouvrir ou de fermer. Posséder la cl6 de la SérnUe (figure B-223),c'est
avoir accès A quelque chose, ii quelqu'un.
Dans la maison typique de la publicité, on retrouve un garage (figure
B-224), un salon (figure B-225) avec télévision (figure B-226), une
antenne (figure B-227), et un divanlfauteuii (figure B-228). Le salon
Tesurne en lui la symbolique de la demeure, avec son caractère d'intimité
sacré.
Cette maison construite par la publicité a quelquefois une salle de
travail avec bureau (figure 8-229) et bibliothèque (figure B-230). La
bibliothèque est une réserve de savoir et de connaissances, et un signe de
statut social.
La maison de la publicité possède le plus souvent un escalier (figure
B-231) qui permet de se rendre à l'étage. L'escalier peut aussi devenir le
symbole de la progression vers le savoir et de l'ascension vers la
connaissance. Tout comme l'échelle, l'escalier permet de changer de
niveau, de monter, donc symboliquement, de s'élever, de se dépasser et de
réussir.
Dans la maison, l'escalier permet d'accéder à la chambre à coucher,
où on trouvera un lit (figure B-232). Le repas proprement dit est évoqué
avec la cuisine. Plusieurs autres objets sont également reliés à la salle à
manger: réfrigérateur (figure B-233), ustensile (figure B-234) et verre
(figure B-235). On retrouve aussi de la nourriture (figure B-236). La
cuisine, c'est encore des objets comme la chantepleure ou robinet (figure
B-237).
En ce qui concerne la salle de bain, elle constitue une thématique peu
diversifiée (Fleury-Bossard, 1980). Pour l'essentiel, on y trouve quatre
composantes:
1.
La présence de la baignoire (figure 8-238),quelquefois en
plongée, dans laquelle le produit est visible. On voit
également une douche (figure B-239),un cabinet de toilette
(figure B-240) et le papier de toilette (figure B-241);
L'exotisme: dans certains cas, on n'hésite pas à placer la
baignoire sur des plages exotiques (figure B-242);
La surprise: dans d'autres cas, on montre quelqu'un assis sur
la toilette (figure B-243);
Le plaisir du bain pour soi: toute la sensualité que développe
la publicité pour les bains moussants s'exprime de façon
narcissique. La femme se caresse elle-même et le produit est
l'agent de plaisir (figure B-244). Par ailleurs, le bain est un
symbole de purification et de renouveau. Il satisfait un
besoin de détente, de sécurité, de tendresse et de
ressourcement. 11 semble que la trace publicitaire ne puisse
se libérer de ce d e qui lie les bains moussants i une
sensualité solitaire, mouillée et exotique. On se trouve
plongé en fait dans un discours ambigu qui exploite l'alibi
d'une pudeur solitaire pour évoquer une sensualité pour le
moins équivoque (Fleury-Bossard, 1980: 34-35).
Dans La maison type de la publicité, on retrouve la tuyauterie (figure B245). La maison est enfin évoqude par le plan de l'architecte (figure B-
246).
6. L'espace autre
En publicité, l'espace autre est paradoxal. Il est étroitement lié à la quête du
rêve comme en font état les publicités de LA Gear (figure B-247),
Smirnoff (figure 6-248) ou Acriform (figure B-249).
L'exotisme est un des thèmes privilégiés de l'imagerie publicitaire.
Le plus souvent, il qualifie le produit en i'associant à un espace autre. C'est
d'autant plus évident que dans notre corpus, le thème de l'exotisme se
rattache souvent à des produits sans rapport avec les contrées lointaines.
Dans la trace publicitaire, le paradis terrestre est confiné le plus
souvent à une île (figure B-250).L'îîe devient le symbole du voyage et du
refuge et elle est vraiment exotique que s'il s'agit de régions éloignées où la
vie est différente de la nôtre.
À l'heure de l'industrie et du travail en usine ou au bureau,
l'exotisme fait rêver et le voyage symbolise très bien cette quête
d'aventure. Les images les plus prégnantes que l'on puisse associer à
l'exotisme et à la liberté sont des représentations typiques de la plage:
l'herbe de plage (figure B-251), le coquillage (figure B-252), le palmier
(figure B-253), la mer (figure B-254), les vagues (figure B-255), la chute
d'eau (figure B-256), le sable (figure B-257) et le duo eau-ciel bleu (figure
B-258).
Les annonces du Club Med et de Reval sont révélatrices de cet
imaginaire social. On se dévêt (figure B-259), on marche le long de la
plage (figure B-260), on se baigne (figure B-261), on se repose (figure B-
262), on lit (figure B-263) ou on cherche un objet dans le sable (figure B264).
Ce qui est désiré, c'est cette atmosphère très particulière suscitée par
la plage. Mais la marchandise est présentée comme le signe, l'équivalent de
cet au-delà lointain, véritable objet de désir. Plusieurs objets contiennent
ces attributs de l'exotisme. Qu'il suffise de mentionner le ballon (figure B265), le parasol (figure B-266), la crème solaire (figure B-267), le cassecroûte (figure B-268), le maillot de bain (figure B-269), le flotteur (figure
B-270), la piscine (figure B-27l), les lunettes de soleil (figure B-272), la
serviette de plage (figure B-273), la valise (figure B-274), l'étiquette de
valise (figure B-275), le ventilateur (figure B-276), la chaise de plage
(figure B-277), la chaise de L$eguard (figure B-278), le breuvage (figure
B-279), les fruits exotiques (figure 8-BO),le passeport (figure B-281), le
billet de voyage (figure B-282), les binoculaires (figure B-283), le quai
(figure B-284) et les bagages passés aux rayons X (figure B-285).
On peut aussi interpréter comme des représentations particulii3res de
l'exotisme, non seulement les plages, mais aussi des sports de plage et d'dté
comme le volleyball (figure B-286), la planche à voile (figure 8-287),le
ski nautique (figure B-288), le surf (figure B-289), la plongée sous-marine
(figure B-290) avec tuba et palmes.
Évidemment, les images publicitaires présentent des paysages
exotiques ou étrangers autres que la plage et l'île. Elles font miroiter des
noms prestigieux ou des lieux féeriques immortalisés par la littérature
classique. Dans les espaces restreints des encadrés publicitaires, pullulent
alors les châteaux (figure B-291), la jungle (figure B-292) et les paquebots
(figure B-293).Par ailleurs, Kamora et De Castellare ont déniché un vieux
casque indigène (figure B-294), Maxwell montre une passerelle (figure B295) et Air Canada fait voir un oiseau coloré (figure B-2%).
L'exotisme est bien pratiqué de ce point de vue. En effet, il permet
de prendre peu de risques. L'origine du pays importe peu. L'objectif
principal est de suggérer l'évasion en utilisant des symboles, que ce soit les
pyramides (figure B-297) ou encore l'univers de l'île de Pâques (figure B298).
Les traces symbolisent très bien cet exotisme: prodigieuses
constructions de pierre, regard énigmatique. Il y a donc concurrence entre
plusieurs exotismes: celui des cocotiers mais aussi celui des indigènes
(figure B-299). On passe d'une ambiance africaine à une autre plus
européenne avec Paris (figure 8-300) ou Venise (figure B-301). Les villes
et les continents prennent ainsi une signification symbolique liée à des
stéréotypes culturels et A des expériences vkues. Dés lors, le continent ne
représente plus en réalit6 une des cinq parties du globe; il symbolise un
m d e de représentation et de désirs.
Outre ces villes et ces continents, un autre espace exotique est
représenté dans le corpus: le monde du cirque. Plusieurs traces sont mises ii
contribution: chevaux de bois (figure B-302) et comptoir à confiserie
(figure B-303). Des personnages du cirque sont aussi de la fête:
l'équilibriste (figure B-304), le dompteur de lions (figure B-305) et le
magicien (figure B-306) avec son chapeau (figure B-307).
Ainsi, l'exotisme construit par la publicité se caractérise par une
mise en scène et des lieux quaiifïés. Faut-il interpréter ces clichés comme
étant un échec de la mise en scène du pittoresque? Certes ces images sont
des images d'images, en un sens usées à force d'avoir trop' servi. De ce
point de vue, il faut comprendre le caractère stéréotypé de l'exotisme
comme étant celui d'un rituel ou d'une pratique ordonnée et fixée par
l'usage. Ce qui importe, ce n'est pas de mettre en scène un espace nouveau,
mais de mettre en scène un espace qualifié qui tourne autour de Peau et des
palmiers.
Ce qui surprend dans toutes ces figurations, c'est qu'elles sont
presque kitch. L'exotisme construit par la publicité, c'est le bien-être, la
wiieté, le côté sauvage, la joie de vivre, une ambiance chaude qui fait sortir
8
du quotidien.
7. L'espace religieux
De prime abord, on pourrait penser qu'il ne peut guère y avoir de rapport
entre la publicite et la religion. Pourtant, plusieurs images publicitaires
tkmoignent de l'intertextualité et abordent le domaine religieux en
reprenant à leur compte des cléments et des symboles fondamentaux du
rituel religieux. On retrouve, clairement evoquées, différentes activités
religieuses constituant le cadre général du construit publicitaire.
Chez plusieurs, cette inspiration est diffuse, humoristique et tout en
surface. On ne qualifiera pas comme <<Oeuvres
d'inspiration chrétienne» les
publicités de Smirnoff, de El Al et de CBC, même si dans certains cas,
leurs auteurs font preuve de respect à l'égard de la religion. Dans d'autres
cas, comme dans la publicité des Knights of Columbus (Chevaliers de
Colomb), l'optique de l'image devient l'occasion d'aborder de front un
problème religieux.
On constate que dans certaines images étudiées, la religion possède
un caractère trks intime, voire secret. Que le monde moderne ait modifie
son rapport avec le religieux, voilh ce qui était, il y a peu de temps encore,
un lieu commun. Or, voici que vers Ia fin des annees quatre-vingts, le
monde occidental assiste à un réveil du sentiment religieux. L'homme,
semble-t-il,cherche à combler le silence des religions.
Faut-t-il croire que les hommes ne peuvent sortir du religieux parce
qu'ils ont besoin que quelque support spirituel prenne en charge leurs
angoisses? La religion est-elle un système de croyances dont la publicité ne
saurait se passer? Quoi qu'il en soit, l'univers religieux exprime une
conception du réel et une vision du monde qui s'harmonise peut-être avec
le monde des Grands Mythes et de la publicité. La référence à cet espace
sacré des dieux confère alors un aspect particulier à la trace.
IRs mythes anciens, les récits de la création sont encore très vivants
dans la publicité: déluge (figure B-308),séparation des eaux (figure B309), naissance du Christ (figure B-3 IO), création (figure 8-31I),
l'ascension du Christ (figure B-312)et fruit défendu (figure B-313).
Des images évoquent plus ou moins ouvertement le paradis terrestre
et l'enfer (figure B-314). Sur terre, le lieu saint par excellence est l'église
(figure B-315) représentée par le vitrail (figure B-316), la croix (figure B317) et la Bible (figure B-318).
La publicité, consciente de l'enjeu symbolique de l'espace religieux,
réfère aux personnages bibliques. Ainsi, Noé (figure B-3 19), Moïse (figure
B-320), Jésus (figure B-321), les Rois mages (figure B-322), les
personnages de la crèche (figure B-323) et Adam et Ève (figure 8-324) se
situent dans un espace sacré, tout en conférant aux images publicitaires un
aspect primitif.
L'image du diable (figure B-325) avec ses cornes (figure B-326),
représente l'être foncièrement méchant, une puissance du mal. Il est
d'abord l'ennemi de l'homme. Incarnation du mai et de la tentation, il est
devenu un personnage de luxure.
Intermédiaire entre Dieu et le monde, l'ange (figure 8-327) occupe
une place importante dans l'imagerie publicitaire. Les anges Qvoquent l'innocence. Leurs principaux attributs sont le nimbe (figure B-328)et les
ailes (figure B-329). Gardiens et guides, leurs ailes sont un symbole
d'envol, d'allégement, de mouvement aérien et léger.
Le langage mythique de la publicité et de la religion s'harmonise
parfaitement avec celui des grands mythes, usant et abusant parfois du
sacré. Les références humoristiques aux personnages religieux, rappellent
le temps sacré, celui des dieux: mère Teresa (figure B-330), moines (figure
B-33 l), archevêque (figure B-332), &Que (figure B-333), soeurs (figure
B-334), et dans un cas, une m u r et un prêtre qui s'embrassent (figure B335).
Le ciel (figure B-336) et la colombe (figure B-337), signes de paix,
de vie, d'amour et d'immortalité sont également représentés.
8. L'espace cosmologique
Jusqu'ici, on a privilbgié parmi les images publicitaires, celles qui mettent
iconiquement en scène des dldrnents primordiaux. Or, en y regardant de
plus près, Anne Sauvageot (1987) a montré que ces diffbrents espaces
peuvent en réalité se réduire à quatre éléments de la matière: l'eau, le feu,
l'air et la terre. Depuis les temps les plus anciens, ces quatre forces
originelles peuvent être vues comme les fondements de tout ce qui existe.
8.1 L'eau
L'eau (figure B-338), source de vie et moyen de purification et de
régénérescence, lave et par extension purifie. Pour cette raison, l'eau est
g6ntralement associée aux idées de nature et de propreté. Une autre
propriété de l'eau est safraîcheur. Il peut s'agir de l'eau d'une cascade qui
évoque l'idée de frdcheur-et non celle d'humidité ou de froid. L'eau
fraîche est tonique: eiie réveille et rajeunit.
De nombreuses images publicitaires suggèrent universellement le
concept de l'eau: la cascade (figure B-339), la chute, (figure B-340), les
vagues (figure B-341),la pluie (figure B-342),les glaçons (figure B-343),
la glace (figure B-3-44)?l'iceberg (figure B-345),la goutte d'eau (figure B-
3&),
la rivière (figure B-347) et la muleur bleue (figure B-348).
Symbole de la dynamique de la vie, la mer (figure B-349) rejoint en
cela l'eau. La mer a quelque chose de fascinant. L'eau exprime la
puissance, la lutte, Le depassement. A un niveau plus symbolique, certains
poissons (figure B-350)peuvent symboliser la fraîcheur.
8.2 Le feu
Le feu est synonyme tantôt de lumière, de chaleur ou d'énergie. Il est
rappelé par le soleil, (figure 8-351), la foudre, (figure B-352), les
flammes, (figure B-353), un sol desséché (figure B-354), le désert (figure
B-355)et les laves du volcan (figure B-356).
8.3 L'air
Parmi les symboles de l'air, citons Ie ciel, les nuages bleus, blancs ou gris
(figure B-357). Symboliquement, le ciel est une manifestation directe de la
puissance. Mais dans la publicité, le ciel c'est aussi la légèreté. Puissant
symbole d'ascension et de progrès, on accorde généralement 3 l'axe vertical
un rôle, une valeur et une signification privilegies (Chevalier et
Gheerbrant, 1982).
Le soleil (figure B-358),dans l'image publicitaire, tient une place
importante. Source de lumière comme de chaleur, le soleil levant suggère
l'espérance. Mais le soleil, comme le feu, recèle également un aspect
négatif, car il brûle.
L'arc-en-ciel (figure 8-359) est généralement annonciateur
d'heureux événements du fait qu'il apparaît après la pluie. L'ouragan
(figure B-360) suggère la puissance et la force. L'éclair (figure B-361)
symbolise le feu qui frappe rapidement et sans avertissement.
Le vent (figure B-362) prend plusieurs formes. En raison de
l'agitation qu'il suscite, il incarne l'instabilité. Force élémentaire à la fois
violente et aveugle, le vent est aussi un instrument de la puissance. Lorsque
le vent se lève, l'on peut être sûr que quelque chose va se produire.
8.4 La terre
Symboliquement la terre s'oppose à l'air et au ciel. À l'exception du
tremblement de terre qui est négatif, la terre est positive. La terre, c'est en
premier lieu l'image de la Terre féconde, de ce qui est naturel. En même
temps qu'elle est l'antithése de la ville, elle est un retour aux sources et on
l'utilise pour évoquer la sant6, le vrai, le naturel.
C. CONCLUSION
Les traces observées dans ce chapitre rendent compte de la densite
symbolique d'un espace socialisé à l'intérieur duquel chaque attribut répond
à une organisation structurée, contribue à la définition d'un lieu. La
représentation structurée et connotée de cet ensemble permet aux acteurs
sociaux de s'ancrer de façon symbolique et continue à l'espace.
Tout comme le temps, l'espace établit le cadre dans lequel se déroule
l'action; il contribue à la formation de l'identitd car les produits et les
personnages se situent et se définissent en fonction de différents types
d'espaces. Dans les publicités analysées, on retrouve huits configurations
spatiales: l'espace spatial, mondial, national, infranational, domestique,
étranger, religieux et cosmique.
Si l'espace spatial est infini et intimement lié au futur, I'espace
mondial est dans l'air du temps. Contrairement à la campagne qui est verte
et invitante, la ville est dense et quelquefois repoussante. L'espace
domestique réfère au priv6 tandis que I'espace étranger fait rêver. Ce sont
ces différents clichés qui ont dom6 naissance à une symbolique de I'espace.
Dans la plupart des traces, la dichotomie entre les caractéristiques
attribuées à la ville et à la nature sont manifestes. Quand on se réfère à la
forêt, la ville est appréciée de façon négative, affectée d'un caractère
alibnant, alors que la nature revêt un caractére libérateur avec ses espaces
mais aussi ses objets caractéristiques.
Les images publicitaires se situent par rapport à un épisode spatial
dans lequel se déroulent des év6nements. L'espace construit garantit la
vitalité et le développement d'un contexte sans lequel les images
publicitaires n'auraient aucune signification. Il est porteur de préjugés
favorables ou défavorables, de façons d'être ou de penser. L'espace est lié
directement à la nature et aux expressions des acteurs sociaux.
Chapitre VI
Les figures du corps
dans la publicité
A. INTRODUCTION
Sous l'apparence d'une structure anatomique quasi identique, le corps
humain est le véhicule et l'illustration privilégiés de la dynamique
culturelle d'une société, de ses désirs et de ses rêves. En conséquence, le
corps est signe et se trouve chargé de significations multiples.
Il y a déjà plus de soixante ans, Mauss avait soulevé la nécessité d'un
projet de sociologie des techniques du corps, défulies comme «la façon dont
les hommes, société par société, d'une façon traditionnelle, savent se servir
de leur corps» (Mauss, 1983: 365). Mauss avançait que les postures, les
mouvements et les attitudes corporelles qu'adoptent les hommes et les
femmes d'une sociétk constituent des produits sociaux.
Au nombre des facteurs qui concourent à préciser les stratégies
sociales du corps et ii aiguillonner le public vers le sens à donner à un
message publicitaire, il faut donc considérer le corps, mais aussi les
postures et les gestes des acteurs sociaux.
Le présent chapitre se divise en quatre parties. Dans un premier
temps, le corps sera appréhendé comme mise en scène, signe, discours et
texte. Plus particulièrement, on verra comment les usages et les images
publicitaires construisent chaque partie du corps. Une deuxième section
s'intéressera plus spécifiquement à l'image du corps de l'homme et de ta
femme, pour en lire les différences, les contradictions et les rapports de
force qui traversent le social. Les sections trois et quatre aborderont
respectivement le corps sous l'angle de la sexualité et du sport.
B. LA MISE EN SCÈNE PUBLICITAIRE DU CORPS
Les deux chapitres precédents ont montré que les images publicitaires
peuvent se définir dans un cadre temporel et spatial. Or, la nature de la
relation se reflète aussi dans le corps, langage non verbal.
Dans cette section, on &tudieles modalités de la mise en scène du
corps en général et de ses postures telles que représentées dans la publicité.
On tente de classifier les divers emplois du corps humain. A la fois modelé
par la sociétt5 et symbole de cette socidté, le corps est apparu dans sa
dimension de témoin r6vélant une culture.
L'image publicitaire offre toute une gamme d'cléments pour
exprimer les nuances des langages non verbaux. Ainsi, tout ce qui touche le
champ visuel, tels la façon de regarder l'autre ou de faire comme si on ne
le voyait pas, le froncement des sourcils, la brillance ou l'aspect terne des
yeux, le fait de les baisser ou de les ouvrir: toutes ces manifestations
traduisent différentes attitudes.
L'expression du visage, qu'il soit pensif, interrogateur, fermd,
obstiné ou curieux, ou encore le corps, qu'il soit combatif, menaçant,
provocateur ou amical, ou qu'il apparaisse, disparaisse, réapparaisse ou
s'efface, rend compte de la qualité de la communication. Ainsi, le corps est
socialement construit, autant par son organicité que dans ses manifestations
(expression, gestuelle, instrumentale) qui se chevauchent et doivent être
considér6es comme objets sociologiques.
Il est évidemment hors de question de prétendre couvrir, dans les
pages qui suivent, l'ensemble des champs de l'activité humaine qui serait
susceptible d'être rassemblé sous la dénomination corps et rapports des
corps. On proposera plus simplement de colliger et d'articuler ici u n
certain nombre d'observations et d'analyses qui, bien que partielles,
concourent néanmoins à persuader de la necessité d'une appréhension
sociologique du corps dans la publicité.
Pour lever le voile sur la signification du corps et les mises en jeu du
corps lors des rencontres entre les acteurs en publicite (rituel de salutation
ou de congé, manière d'acquiescer ou de nier, mouvements du visage et du
corps, variation de la distance qui sépare les acteurs, façons de toucher ou
d'éviter le contact, etc.), on a isolé chaque partie du corps. On commencera
par l'examen de la tête puis du visage, en poursuivant ainsi jusqu'aux
jambes et aux pieds.
1. La tête
La tête est traditionnellement le siege du cerveau (figure C-1) et des idées
(figure C-2) et constitue une partie importante du corps humain.
Graphiquement, la tête peut être inversée (figure C-3), carrée (figure C-4),
invisible (figure C-5), cachée (figure C-6), coupée (figure C-7), démesurée
(figure C-8) ou naissante (figure C-9). Une trace transpose la tête de l'un
des personnages sur les épaules d'un autre (figure C-IO), comme dans une
sorte de collage.
En signe de fatigue, la trace montre un sac de glace (figure C-Il).
La tête posée sur la main (figure C-12) ou contre un mur (figure C-13)
peut suggérer le désespoir. Le personnage qui se met la tête dans Ie sable
(figure C- 14) évoque la dérobade.
Le monde de la publicité a fait des cheveux un signal sexuel
important. Dans la mesure où les cheveux de l'homme et ceux de la femme
sont biologiquement aussi longs, la longueur des cheveux des personnes des
deux sexes fait que deux types de symbolique s'affrontent. Même à une
époque où l'on valorise l'égalité des sexes, la longueur des cheveux
continue de différencier l'homme et la femme. De façon générale, la trace
associe les cheveux courts à une image masculine (figure C-15) et les
cheveux longs à une image féminine (figure C-16).
On abaisse les hommes en montrant une calvitie naissante (figure C17), en exposant une tête chauve (figure C-18) ou en les montrant perdant
leur perruque (figure C-19). Dans une société qui valorise la jeunesse, la
calvitie est en effet un handicap important. Dans quelques cas cependant,
une tête chauve peut devenir un indice de puissance. La perruque
caractérise le juge (figure C-20).
Dans le corpus, les images publicitaires célèbrent la chevelure
féminine (figure (2-21) et la chevelure extravagante (figure C-22). Les
femmes soulèvent leurs cheveux (figure C-23). Il semble aussi y avoir un
lien entre la femme fatale et l'eau (figure C-24). Les cheveux hérissés
(figure C-23 signalent la surprise.
2. Le visage
L'apparence du visage répond à une mise en schne de l'acteur social.
Lorsqu'il s'agit du visage, la trace présente une image de la femme et de
l'homme peu diversifiée. On rencontre des visages que l'on pourrait
qualifier de beaux (figure (2-20, figés, artificiels, aux traits de mannequin
ou d'acteur. On croise par ailleurs peu de visages défigurés (figure C-27).
Dans ce cas-ci, est désigné comme beau le visage qui répond aux valeurs
d'un lieu, d'un moment, c'est-à-dire qui offre les signes normalisés d'un
code social convenu réglant les perceptions, les désirs, les jugements des
individus.
Dans l'ensemble, on remarque un renforcement constant des
stéréotypes de l'homme et de la femme jeunes et séduisants. Bien sûr, toute
culture s'exprime esthétiquement d'une manière ou d'une autre. Rien n'est
beau pour tous les peuples à la fois. Un visage vénéré par certains est
considéré comme laid par d'autres. Pourtant, tout se passe comme si la
publicité occidentale reconnaissait que teile ou telle forme de beauté a une
valeur intrinsèque universelle, qu'elle doit être appréciée de tous. Le
corpus montre des hommes au visage osseux et carré, et des femmes jeunes,
séduisantes et à la peau de pêche.
La trace évite les rides, les cheveux gris et les poils (figure C-28).
Les acteurs sociaux masculins ont de lourdes mâchoires et un fier menton.
Par ailleurs, il semble que la moustache (figure C-29) soit devenue un
symbde d'homosexualité dans le construit publicitaire.
Les images du corpus proclament les joies de la jeunesse et de la
beauté. La trace répète: «Faites attention aux poils, aux rides et aux kilos.
Pour plaire, "être beau", il faut en effet être jeune et mince.» La beauté
peut n'être que superficielle, mais cette apparence de surface est suffisante
dans des catégories aussi diverses que les cosmétiques ou l'automobile.
Le visage, c'est aussi sa couleur. Or, l'un des attraits corporels du
construit publicitaire du corps est celui du hâle du visage et du corps. La
publicité proclame bien haut la joie des gens au teint bronzé, basané (figure
C-30). Le bronzage est alors synonyme de vacances, de bonheur, d'évasion
et de richesse. L'image exploite largement le soleil et la peau hâlée et bvite
le teint verdâtre (figure C-31) qui signifie <<jene suis pas en forme» ou je
suis fatigué».
Récemment, face à la hausse importante du cancer de la peau et aux
avertissements servis par les dermatologues, les mannequins de la publicité
sont moins bronzés. La publicité de Bain de Soleil réalisée en 1992 (figure
C-32) est un bon exemple de ce changement de valeur.
La peau du visage et des mains, c'est aussi ce qui permet de
distinguer les origines ethniques. A ce titre, la publicite globale met en
scène des groupes ethniques et culturels diffbrents: des Noirs (figure C-33),
des Asiatiques (figure C-34) ou des combinaisons multiraciales (figure C35). Dans une publicité, la trace montre une femme noire et un enfant
blanc (figure C-36).Cette trace crk une notion d'universalité; une femme
noire allaite un nouveau-nd blanc vêtu d'un chandail rouge symbolisant la
passion, l'amour et la chaieu,
«United Colors>>de Benetton fait figure de référence en matière de
communication fondée sur des valeurs sociales exprimées par la
représentation des Noirs et des Asiatiques. Plus simplement, l'image du
rapprochement des gens d'origines ethniques differentes permet d'&tendre
les concepts de fraternité et de solidarité. Plusieurs ethnies sont
représentées.
Dans certaines images, Le choc vient en fait de Ia rencontre entre des
groupes différents et du message social et antiségrégationniste qui en
découle. Avec les images du Ku Klux Klan (figure C-37)et de de Klerk
(figure C-38),l'objectif est de proclamer le droit à la différence, mais
surtout la possibilité pour tous de cohabiter, de fraterniser.
3. Les yeux
En publicité, le regard est un outil privilégié pour découvrir le monde et
entrer en relation avec les autres. Le regard refl5te les sentiments: surprise
(figure C-391,scepticisme (figure C-4û), sbduction (figure C-41) ou
détresse (figure C-42).
Les traces montrent des yeux ouverts (figure C-43) ou fermés
(figure C-44); seuls (figure C-45) ou multiples (figure C-46); maquillés
(figure C-47) ou cachks (figure C-48).
La direction du regard des acteurs sociaux dans les images est un
autre élément important. La direction du regard des personnages constitue
en effet une variable essentielle pour identifier les catégories d'acteurs
sociaux au plan visuel.
1. L'acteur social de face (figure C-49). Il parle, raconte ou
interpelle (Péninou, 1972: 191).
2. L'acteur social de profil (figure C-50). Le lecteur qui regarde
un acteur social de profil devient spectateur. Il est le témoin d'une
action qui se dérouie devant lui (Péninou,1972: 191).
3, L'acteur social de trois quarts (figure C-51). Ce type de
personnage va de pair avec la délicatesse: pudeur de la jeune fille,
pureté et fragilité du sentiment, douceur des visages, lèvres
entrouvertes ou fermées, paupières mi-closes, r e g a rd
indéchiffrable, fhigme du masque.
«On est dans l'univers du mystere, de ta tentation, du narcissisme:
introversion, introspection, rêverie, domaine de l'incertain et du
délicat, mais aussi domaine de la sensibilité» (Péninou, 1972: 192).
4. Le personnage de dos (figure C-52). Symboliquement, il
cherche à éviter le contact. Bien que l'objectif de cette thèse ne
consiste pas à quantifier L'image, on constate qu'il s'agit d'une
trace rare.
Les jeux de regards sont omniprésents dans les images publicitaires
étudiées. Ils permettent de définir la place qu'occupent les acteurs sociaux,
d'entrevoir les liens et les sentiments qu'ils éprouvent. Fixer quelqu'un
dans les yeux se fait dans des situations d'amitié ou de menace (figure C53). Écarquiller les yeux est une réponse à une surprise (figure C-S),
tandis que les yeux bridés (figure C-55) sont caractéristiques des peuples
orientaux; les grands yeux foncés (figure C-56) évoquent une culture
étrangère.
Visuellement, la forme des lunettes mMe
I'apparence des yeux des
mod&leset transforme ainsi sa physionomie. Elle fait donc partie intégrante
de l'expression faciale de l'acteur social qui les porte. Une monture
inhabituelle (figure C-57) suggère l'originalité de celui qui la porte. De
grandes lunettes ont pour effet d'écarter les yeux. Les lunettes noires de
soleil (figure C-58) évoquent la star ou quelqu'un qui joue à la vedette.
Cela permet de regarder sans être vu.
Les images publicitaires offrent aussi des moyens hors de l'ordinaire
afin d'exagérer les traits naturels, par exemple, en agrandissant les yeux
(figure C-59) de leurs modèles, en utilisant du maquil1age ou des cils
artificiels (figure C-6û) qui contribuent à augmenter la taille des yeux et
souligner Les paupières. Créativement, on récupère le tableau des
ophtalmologistes (figure C-61) et les problèmes de vision (figure C-62).
4. Le nez
Le nez, c'est d'abord l'odorat, l'un des cinq sens (figure C-63). L'odeur
peut agir fortement sur le nez, soit positivement comme en témoigne une
publicité de McDonald's (figure C-64), soit négativement comme en
témoigne une publicité de Seldane (figure C-65) oh le personnage se pince
le nez, suggérant ainsi une allergie.
La forme du nez joue un rôle dans la perception des acteurs sociaux.
Les nez les plus beaux sont valorisés, C'est ce qui explique peut-être
pourquoi, dans leurs images, la trace publicitaire évite les gros nez (figure
C-66) qui semblent moins gracieux, sauf si l'on cherche à susciter
volontairement la répulsion.
Mettre les doigts dans le nez est un tabou culturel. Le nez rouge est
le signe que quelqu'un a le rhume (figure C-67)ou boit de l'alcool en
grande quantité (figure C-68).Insérer des objets dans la peau du nez
évoque sous certains aspects les bovins (figure C-69).
5. Les oreilles
Les oreilles sont associées à l'ouïe (figure (2-70). Pour montrer le refus de
communiquer, le corpus présente des acteurs sociaux en train de se boucher
les oreilles avec un bouchon (figure C-71) ou du persil (figure C-72). A
l'inverse, on amplifie le bruit ambiant au moyen des mains placées en
cornet sur les oreilles (figure C-73). Afin de nettoyer les oreilles, on
montre un coton-tige (figure C-74). De longues oreilles représentent le
lapin (figure C-75).
6 . La bouche
La bouche sert à mordre, lécher, aspirer, goûter, avaler, tousser, bâiller,
crier, parler, siffler, embrasser et fumer. En publicité, elle permet surtout
d'avaler (figure C-76),de boire (figure C-77) et de parler (figure C-78).
Ainsi, avoir une bouche invisible (figure C-79), c'est ne pas pouvoir
~
rabaissée (figure C-80)
s'exprimer ni se faire entendre. La l & vinférieure
donne une impression de chagrin. La bouche figure donc parmi les parties
du corps les plus expressives.
Les dents (figure C-81) ont un aspect dynamique important.
Techniquement, les dents déchirent ou broient les aliments (figure C-82).
Par ailleurs, les dents jaunes (figure C-83),les grandes dents (figure C-84),
les dents cassees (figure C-85), les dents pointues (figure C-86) et les
dentiers (figure C-87) sont synonymes de laideur.
La langue est un autre organe expressif du visage. Dans la trace, la
langue est sortie, en attente de déguster un aliment ou un plat appétissant
(figure C-88).
Culturellement, des lèvres naturellement ou artificiellement plus
charnues ou plus colorées transmettent des signaux sexuels importants. Cela
explique pourquoi les images publicitaires mettent en scène des femmes aux
lèvres plus charnues (figure C-89) ou plus colorées (figure C-90), des
traces de lèvres imprimées (figure C-91), des lèvres mordues (figure C92), des doigts qui frôlent les lèvres (figure C-%) ou un tube de rouge à
lèvres (figure C-94).
Il faut enfin accorder une attention particulière au sourire. En effet,
le sourire traduit le plaisir et la satisfaction. Il s'agit d'une trace qui migre
énergiquement, pour une carte de crédit, un restaurateur ou un dentifrice,
par exemple. Dans le corpus, des sourires (figure C-95) et des dents
blanches et éclatantes (figure C-%) sont nombreux. Plus rarement, on voit
des lèvres abaissées vers le bas pour signifier la déception (figure C-97).
Il ne faut pas s'étonner que le sourire soit le geste le plus present
dans la trace. Symboliquement, L'aspect central de la publicité réside dans la
recherche du bonheur. Longtemps demeuré utopique et pensé sur le modèle
communautaire, le bonheur est une grande quête de l'acteur social dans la
culture moderne. Le sociologue Edgar Morin en fournit une analyse quand
il écrit dans l'Esprit du temps: «Une gigantesque poussée de l'imaginaire
vers le réel tend à proposer des mythes d'auto-réalisation, des héros
modèles, une idéologie et des recettes privées: le bien-être et le standing
d'une part, l'amour et le bonheur d'autre part.» En effet, qui ne voudrait
pas être heureux? Qui choisirait voiontairement le malheur? Le construit
publicitaire, par la voie des grands moyens de diffusion, contribue à
répandre ce modèle. L'image de l'acteur social heureux est associée à tous
les articles de consommation. Les images évitent cependant le bâillement
(figure C-98) parce qu'il traduit l'ennui ou 3 la fatigue.
7. Le cou
Le cou (figure C-99) est une zone erogène importante. Traditionnellement,
la femme a un cou élancé, long et mince, sans bijou et dénudé (figure C100), même enveloppé ou recouvert d'un cube de glace. Techniquement, le
cou permet de regarder dans différentes directions (figure C-101).
Créativement, le cou peut aussi être coupé (figure (2-102) ou allongé
(figure C- 103).
8. Les épaules
La principale fonction des Cpaules est de fournir de solides fondations aux
bras. Pour faire paraître un homme plus masculin, la trace met en &ne la
largeur des épaules (figure C-104) ou recourt à la présentation de
culturistes (figure C-105). De façon générale, la silhouette de l'homme a
tendance à se rétrécir en dant vers le bas.
9. Les bras
Les bras sont un instrument de puissance et de sûret6. Ils interviennent avec
force pour grimper,lancer ou frapper. Les bras de l'homme sont musclés
(figure C-106) tandis que ceux de la femme sont plus fins et élancés (figure
C- 107). h s principales positions des bras sont les suivantes:
2. Les bras levés dans les airs, dans un geste de triomphe et de
victoire (figure C- 108);
2. Les bras IevCs dans les airs, dans un geste de surprise (figure
C-109);
3 . Les bras le long du corps (figure C-HO), en position d'écoute,
d'attente;
4 . L e s bras qui font signe d'arrêter (figure C-111);
5 . Les bras demere la tête évoquent le repos (figure C-112);
6 . Les bras au-dessusde la tête sont en position de séduction
(figure C-113);
7 . Les bras croisés (figure C-114) sont en position de dkfense.
Pour évoquer le monde de la nuit, ies images publicitaires recourent à la
pause caractéristique du somnambule (figure C- 115). Visuellement, on
allonge aussi les bras comme par enchantement (figure C- 116).
10. Les mains et les doigts
À l'instar des autres parties du corps, la main est mise en scène par la trace
publicitaire. Les images publicitaires montrent des mains (figure C-117) et
des paumes de main (figure C-1la), des mains qui pressent (figure C-119),
jonglent (figure C-120), tirent (figure C-121) ou cachent (figure C-122).
Les mains servent aussi à présenter le produit (figure C-123). On montre
également:
1. Des mains pratiquant L'auto-contact sur le corps (figure C124);
2. Des mains sur le front (figure C-125) ou sur les joues (figure
C- 126) expriment la surprise ou la désolation; c'est également
la posture du sursaut;
3. Des mains sur le côté de la tête (figure C-127) pour kvoquer la
fatigue ou le bien-être;
4
. Des mains sur le menton (figure C- 128) pour soutenir la tête,
ou derrière le dos (figure C-129).
Geste à caractère formaliste, la poignhe de mains (figure C-130) exprime
l'accord et la b 0 ~ entente.
e
Les mains ouvertes le long du corps, vers
l'extérieur (figure C-131), évoquent l'impuissance. Celui qui joint les
mains (figure C-132) devant le corps adopte une pose caractéristique des
peuples orientaux. Les mains jointes devant le menton marquent la
réflexion (figure C-133). Les mains jointes (figure C-134) évoquent le
prisonnier ou l'asservissement.
Croiser les doigts (figure C-135) évoque la chance. Pointer le pouce
en haut (figure (2-136) exprime que tout va bien; vers le bas, cela suggère
l'écrasement (figure C-137). Le signe du pouce levé qui projette une pièce
de monnaie dans les airs (figure C-138) symbolise le hasard.
L'index pointé (figure C-139) indique la direction à suivre, attire
I'attention sur le produit, montre un détail du produit ou indique que l'on
est le numdro un. Les doigts peuvent aussi servir à tenir un objet (figure C140). Un doigt avec un fil (figure C-141) signifie «souviens-toi!» En
érigeant le majeur (figure C-142), on insulte. L'acteur social peut aussi
faire des j e u d'ombre avec les doigts et les mains (figure C-143).
Une publicité de Vittel (figure (2-144) reprend le geste en «V»de la
victoire introduit par Churchill pendant la Seconde Guerre mondiale.
Aujourd'hui, ce geste a pris une signification presque universelle.
Les doigts servent à toucher; ils laissent des empreintes digitales
(figure C- 145) qui marquent l'individualité, l'unicité. Les doigts peuvent
aussi servir à gratter. Le geste de contact est aussi présent dans les images
publicitaires pour décrire des réactions nerveuses comme dans le cas de
ceux qui se rongent les ongles (figure C-144).
Les images publicitaires montrent des personnages sans doigts au la
main coupée (figure (2-147). On voit aussi des doigts deguisés (figure C148), des doigts à la peau plissée (figure C- 149) ou des doigts qui marchent
(figure C- 150)
11. Les seins
Dans leur fonction sexuelle, les seins (figure C-151) de la femme sont un
important stimuli visuel. Le corpus montre des femmes minces dont la
poitrine est particulièrement développée (figure C-152). La trace rend la
forme des seins légerement plus hémisphériques et en améliore les contours
par des soutiens-gorge (figure (2-153) ou par des positions qu'ils font
prendre aux modèles (figure C-154), comme le montre une publicité de
Maidenform.
Dans le corpus, il y a quatre manières d'exposer les seins des
modèles sans pour autant les dévoiler:
1. On les couvre d'objets (figure C-155);
2. On les montre partiellement (figure C-156);
3. On les présente de dos (figure C-157);
4. On les couvre avec une pudeur exagérée (figure C-158).
L'étonnante ressemblance entre les seins de la femme et certains objets
(figure C-159) est exploitée dans une image publicitaire. L'allaitement
(figure C- 160) est aussi une image publicitaire.
12. Le coeur
Le coeur qui bat dans la poitrine (figure C-161) est d'abord l'organe vital
par excellence; son rythme (figure C-162) indique la vie et la succession
des instants. Symboliquement, le coeur est de couleur rouge et constitué de
deux sphères et il incarne l'amour et la passion (figure C-163).
13. Le dos
Le dos est, avec les mains, l'une des parties mises à contribution dans les
images publicitaires. Le dos nu de la femme (figure C - l a ) ou de l'homme
(figure C-165) permet d'offrir une large surface de peau sans montrer de
détails sexuels précis.
En cambrant le dos des modèles (figure C-166), la trace met en
valeur les fesses de la femme ou de l'homme et en accentue les formes. Le
dos est quelquefois arqué (figure C-167) comme pour signifier la capacité
de la firme à s'adapter.
14. Le ventre et le nombril
ie ventre est associé à l'appétit et à la nourriture. Dans sa symbolique, le
ventre relâché est un signe de laisser-aller (figure C-168),alors que le
ventre ferme (figure C- 169) et les abdominaux saillants (figure C- 170)
marquent la bonne forme physique.
15. Les hanches
Pour intensifier le signal féminin du corps, on met en valeur les saillies des
hanches des modèles (figure C-171). Une taille très mince symbolise
1'adoIescence et la jeunesse. Sur le plan des mouvements et des positions, la
plupart des phénomhes relatifs aux hanches sont fhinins. Marcher en se
dandinant ou en balançant les hanches (figure C-172) est un geste à
caractère sexuel.
16. Les fesses
Les fesses (figure C-173)sont un signal érotique important. Elles
constituent une zone érotique considérable, tant chez la femme que chez
l'homme. Les fesses invitent B la caresse, facteur amplifié d'ailleurs par un
dos plus cambré.
On montre un dos plus cambré (figure C-174) et des vêtementsjupe ou pantalon-dont la coupe souligne les contours du postérieur (figure
C-175). Du côté des hommes, on montre des fesses dures, compactes,
petites, mais musclées (figure C-176).Les fesses des hommes prennent de
plus en plus de place dans la trace publicité, spécialement dans la publicité
des parfums.
On se moque des fesses en les exposant directement (figure C-177),
en les tapant (figure C-178)ou en les embrassant (figure C-179).Présenter
ses fesses en projetant le haut du corps vers l'avant (figure C-180) constitue
une image inhabituelle et surprenante qui a fait son apparition dans la trace
publicitaire. La trace exploite aussi la ressemblance entre les fesses et
certains aliments, la poire (figure C-181) ou les oeufs (figure C-la),par
exemple.
17. Les organes génitaux
Les images de la période 6 W é e tiennent pour acquis que les organes
génitaux sont des parties intimes qui doivent être recouvertes. Dans la trace
publicitaire, ce n'est que chez de très jeunes enfants que l'on se permet
certaines libertés quant à l'exposition des organes génitaux. Cela n'empêche
pas certains annonceurs de surprendre et de montrer les organes sexuels
masculins (figure C-183) et féminins (figure C-184); des exhibitionnistes
(figure C- 183, des corps nus dans un bain (figure C-186), ou une douche
(figure C- 187), un corps nu caché demère un acteur socia.1 habillé (figure
C- 188). Surprise, un acteur social qui urine (figure C-189) est aussi
montré.
Dans la trace, les manières de couvrir les organes génitaux varient:
ce peut être la main (figure C-190), un vêtement (figure C-191), une
serviette (figure C-192), un angle (figure C-193) ou un objet (figure C194).Règle générale, ce sont plutôt les vêtements ajustés (figure C-195) qui
permettent de transmettre un signal sexuel à partir de cette zone.
Le corpus fait rkfkrence aux organes sexuels de façon symbolique en
montrant un cactus (figure C-1%), un concombre (figure C-197), une
bouteille (figure C-198), une cigarette (figure C-199), un condom (figure
C-200), une fermeture ficlair ouverte (figure C-201), des organes
redessinés (figure C-202) ou un champignon (figure C-203).
Dans le même sens, on montre des spermatozoïdes (figure C-204),
l'image de spermatozoïdes cherchant un ovule (figure C-205) et l'image des
trompes de Fallope (figure C-206). On utilise aussi des images à double
sens (figure C-207).
18. Les jambes et les pieds
Dans la trace, les jambes sont considédes comme des symboles de stabilité
et de force. Elles servent à marcher (figure C-208), à sauter (figure C209), à danser (figure C-210), à sursauter (figure C-21l), à frapper (figure
C-212) ou à courir (figure C-213).
Visuellement, les images montrent des filles aux jambes
anormalement longues (figure C-214). L'impact érotique produit par de
longues jambes féminines est important. En accentuant ce trait physique, la
trace rend ainsi les filles encore plus sexy et plus attirantes. Crdativement,
certaines images choisissent d'allonger anormalement les jambes (figure C215); on ajoute des jambes comme par miracle (figure C-216) ou on les
enroule (figure C-2 17).
L'impact sexy peut être renforcé par le port de talons hauts (figure
C-218) ou par des jambes croisées (figure C-219).Pour un, les talons hauts
font gagner aux jambes quelques centimètres, les aidant ainsi
se
rapprocher de l'idéal corporel. Le port de la jupe courte accentue aussi ce
phénomène.
Les jambes masculines et f6minines sont musclées (figure C-220). La
publicité donne aux mannequins une allure de stabilitb et d'assurance en
utilisant une posture bien campée, jambes écartées, à la façon des cow-boys
de l'écran (figure C-221). Selon le cas, la trace évoque une impression de
décontraction ou de manque de civisme en montrant des jambes (figure C222) reposant sur une table ou un objet. Par ailleurs, les pieds des
mannequins sont menus (figure C-223).
Des souliers «trop grands» ou «tout croches» (figure C-224)
symbolisent le déséquilibre et le malaise. Un pantalon affaissé (figure C225) suggère l'inconfort. Le soulier noir évoque le statut social de celui qui
les porte (figure C-226). Des marques de pas sur le sol (figure C-227) et
des empreintes de pieds (figure C-228) indiquent la succession des pas et le
passage d'un acteur social. Le pied peut être pointé (figure C-229) ou vu de
dessous (figure C-230). Les pieds qui tapent sur le sol (figure C-231)
suggèrent l'impuissance.
19. Le squelette et la morphologie du corps
Les images publicitaires font quelquefois appel au squelette humain et à ses
diverses parties, comme les os (figure C-232), la colonne vertébrale (figure
C-233) et les muscles (figure C-234). On retrouve aussi les rayons-X
(figure C-235) pour visualiser les os du corps et suggérer les progrès de la
médecine.
Plusieurs parties de l'anatomie humaine sont privilégiées par la
publicité en les stéréotypant à outrance, Le corps n'invente pas les canons
de sa beauté; il les reçoit du code social qui en etablit les critères, que ce
soit l'allure du sein, des jambes, de la taille ou de la chevelure. Par
exemple, les jumeaux intriguent (figure C-236). De plus, les acteurs
sociaux gras (figure C-237) montrés dans la publicité sont, au plan
symbolique, des êtres généralement malheureux, des brutes ou des
corrompus. Leur corpulence est synonyme d'avidité ou de privilège.
A l'inverse, la minceur (figure C-238) et le muscle (figure C-239)
évoquent plutôt l'activité, la vivacité, l'efficacite, la rapidité du geste et de
l'esprit. La publicité du corps propose à l'homme des biceps, un torse et
des cuisses d'athlète, et à la femme, une poitrine ferme, des hanches de
starlette et des jambes longues et minces. Dans la mesure où le modèle
s'exhibe essentiellement comme participant au culte de la «forme», son
corps se doit d'avoir des muscles bien découpés et des épaules larges. En
général, le corps semble obéir à des canons constants: jeune et sain, il est
orand et mince. Il affiche de la force physique.
O
À en croire le construit publicitaire. il n'est pas d'objet plus beau,
plus précieux, plus éclatant que le corps grand et mince. Une image
témoigne aujourd'hui que le corps est devenu objet de salut: le galon à
mesurer (figure C-240). Graphiquement, la minceur est aussi suggérée par
l'emploi d'espaces blancs (figure C-241) et d'objets en équilibre (figure C242).
La relation sociale établie avec I'homme souffrant d'une infirmit6,
qu'il soit handicapé en fauteuil roulant (figure C-243), unijambiste (figure
C-244) ou privé d'un bras (figure C-245) ou d'une main (figure C-246),
est un indicateur éclairant sur la façon dont un groupe social vit sa relation
au corps et à la différence. Or, une forte ambivalence caractérise les
relations qu'établissent les sociétés occidentales avec l'homme souffrant
d'un handicap. Parce qu'il ne répond pas aux normes physiques,
fonctionnelles et sociales de la socied où il vit, l'handicapé est représenté
comme un marginal. Il apparaiat que les normes sociales sont toujours aussi
impitoyables; les acteurs sociaux handicapés sont quasi absents de la
publicité, comme si l'esprit, le corps, le comportement de l'acteur social
handicapé étaient, sur un plan symbolique, synonymes de désordre, de
chaos, et constituaient une menace à l'identité des gens normaux. L'infirme
est un acteur social au statut intermédiaire, se situant dans un entre-deux.
Le malaise qu'il engendre tient également à ce manque de clarté qui
entoure sa définition sociale. L'ambivalence de la publicité à son égard est
une sorte de réplique à l'ambiguïté de la situation, à son caractère
insaisissable.
Les mises en jeu physiques, on le voit, sont nombreuses. Du corps
naissent et se propagent les significations qui fondent l'existence
individuelle et collective.
C, LE CORPS DE L'HOMME ET DE LA FEMME
Pour un homme ou une femme, exister signifie d'abord se mouvoir dans un
espace et une durée, transformer son environnement grâce une somme de
gestes et de mimiques. Le corps produit continuellement du sens; il insère
l'homme et la femme à l'intt5rieur d'un espace social et culturel donné.
Le construit publicité forge, au gré de la période étudiée (19871997), des images de la femme et de l'homme qui ne permettent que des
variantes accessoires. D'un côté, la publicité ramène fréquemment A des
schèmes antérieurs et traditionnels. Plusieurs images publicitaires évoquent
plus ou moins ouvertement la division et la hi6rarchie des sexes. D'un autre
côté, la trace surprend: les femmes apparaissent dans des situations
socialement valorisantes et les hommes dans des situations inhabituelles.
1. L'homme
La publicité affirme, répète et martde: c'est masculin, c'est viril. L'homme
de la publicité est un homme d'action plutôt qu'un être de réflexion.
Bagarreur, cet homme est imprégné de l'esprit de compétition. Courage au
combat, courage face à la peur, courage devant toute tâche à accomplir. Ce
courage est d'ailleurs fort bien signifié dans les activités qui requièrent
force, patience, vigilance et ténacité. Il est également exprimé avec
beaucoup de convictions dans les scènes de construction, de défrichement
de la forêt, de lutte contre le feu, etc.
Ce qui compte donc, ce sont ces qualités masculines: énergie,
dynamisme, efficacité, audace et vigueur. Les publicitaires ont d'ailleurs à
leur disposition une large gamme d'images pour qualifier le masculin. Ce
sont tout d'abord les images incarnant symboliquement la détermination: le
marin bravant la tempête (figure C-247), l'explorateur de la brousse
(figure C-248), le pompier (figure C-249) et l'escaladeur de massifs
(figure C-250). Ce sont aussi les images incarnant la vitesse: le pilote de
course (figure C-251), le pilote de moto (figure C-252), de bateau (figure
C-253),d'avion (figure C-254), de formule 1 (figure C-255) ou de
décapotable (figure C-256). Dans le secteur des parfums, les appels se
réfèrent de plus en plus aux images de l'homme dans la société. L'obstacle
est vaincu: le parfum ne «féminise» plus.
Le sport est présenté dans les images publicitaires comme un
suckdané de Ia vraie vie d'homme, comme une activité symbolique qui
ressuscite l'aventure sur le mode du jeu. Le sport sert à inculquer les
valeurs de virilité, de compétition et d'esprit sportif: le boxeur (figure C257), le skieur (figure C-258), le parachutiste (figure C-259),
l'haltérophile (figure C-260), le joueur de soccer (figure C-261) et le
joueur de tennis (figure C-262). Le personnage de l'homme viril est donc
une des sources à laquelle la publicite puise ses thèmes les plus nombreux et
les plus populaires. Le tatouage (figure C-263) est un exemple de virilité,
de force et de rdsistance, toutes des qualités que l'on attribue au main.
Toutes ces publicités constituent des formes différentes d'un même
modèle. Les acteurs sociaux et les décors changent à chaque image mais
l'image reste la même. C'est un homme fort et beau, tantôt habillé en tenue
de sport, tantôt vêtu d'un élégant complet ou d'un smoking. La musculature
de son dos ou de ses biceps est saillante.
Sur ce plan, il faut accorder une attention toute particulière au cowboy (figure C-264). Philip Morris et d'autres entreprises font figurer
depuis des années des cow-boys d'dure vide et des symboles tels le lasso
(figure C-265), les bottes de cow-boys (figure C-266)et le chapeau (figure
C-267). Voici l'interprétation de la publicité des cigarettes Marlboro, faite
par Pierre Martineau: «Ces tatouages étaient les tatouages standards de la
marine américaine et ce symbole &taitbeaucoup plus éloquent que les mots:
"Voici un homme qui réussit, qui accomplit quelque chose." (...) Le
tatouage a l'attrait de la licence, de la liberté, des histoires d'amour, et les
hommes représentés plaisent aux femmes parce qu'ils semblent pleinement
conscients de leur charme» (Martineau, 1959: 64 et 194).
En somme, dans le construit publicitaire, une vraie vie d'homme, est
associée à l'aventure: guerre, chasse, tempête, orage, feu, animaux
sauvages, sensations fortes, vastes espaces, forêts, montagnes. Rasoirs,
cigarettes et déodorants en appellent aux chevauchées fantastiques,
mobilisent le Far West et la forêt vierge. L'homme est fort, dominateur,
«connaissant>)
-voire masculin. Pour symboliser la virilité, les images font
référence à la pratique de certains sports. L'utilisateur est un amateur de
montgolfière, il escalade les massifs escarpés que l'on devine derrière lui, il
se promène seul dans la jungle, il pilote une formule 1, etc.
Plus récemment, Primeau (1989) affirme que la publicité offre de
nouveaux modèles qui ont en commun une préoccupation de consommation
et de jouissance au présent: un hédoniste new look: jeunesse, mode,
consommation, loisir, détente, séduction, pIaisir, humour. Les hommes
véhiculent de nouveaux modes de vie, de oouvelles formes d'affirmation,
des mythes associés au libéralisme. Le loisir, Ie rêve, la détente sont à
l'image d'une élite <coisive» qui propose une nouvelle éthique de
l'individualité.
La différence entre l'homme traditionnel et l'homme moderne se
précise. Le premier refusait de «paraiAtre>>:
les caprices de la mode &aient
bons pour les femmes qui ne se dbfinissaient pas par leur travail»
(Primeau, 1989). La reprkntation classique de L'homme en publicité était
attachée aux valeurs dominantes qu'étaient le travail, l'épargne, la
reproduction, la sobriété. Même si l'envie de se différencier existait, «elle
se montrait peu ou pas». Avec la publicité 1987-1997, la différence est
aussi à inventer. Elle passe notamment par la capacité à créer, à générer
son propre look, son mode de vie.
Il est important de noter que la publicité place l'homme dans un rôle
de pure décoration (figure C-268). Ainsi, dans sa façon de représenter les
rapports humains, la publicité tend-t-elle de plus en plus à effacer la
dichotomie homme-femme caractéristique des années soixante et soixantedix, c'est-à-dire celle qui conférait un statut inférieur au sexe féminin et
une position dominante au sexe masculin.
Les nouveaux hommes se centrent sur eux-mêmes. Les modèles
culturels de la publicité proposent l'affirmation de soi par les loisirs, le
plaisir, le jeu, l'humour, le risque, la culture de l'ephémère, avec la
satisfaction du plaisir immédiat. On retrouve des hommes tendres, gentils,
qui affichent leurs émotions. L'homme perd sa virilité traditionnelle et
emprunte maintenant à la femme ses manières de penser, de sentir et
d'agir. Enfin, l'homme-père découvre l'amour et la tendresse de l'enfant et
devient homme séduisant (figure C-269), homme souriant (figure C-270) et
homme objet sexuel (figure C-271). Cette redéfinition de la notion
d'homme participe du refus du modèle traditionnel.
2. La femme
Chez les femmes comme chez les hommes, le monde de la publicité a opéré
un certain détour vers ce qui semble être devenu des valeurs nouvelles, qui
sont de plus en plus ancrées dans la socikté. Par exemple, on montre
désormais une kyrielle d'images publicitaires affichant des femmes au
travail (figure C-272), indépendantes (figure C-273),à la recherche de
l'aventure, dynamiques et actives.
La femme au travail n'est plus montrée que dans des secteurs
d'activité reconnus comme étant typiquement féminins: secrétariat,
professions sociales et pédagogiques. La publicité ne présente pas
forcément la femme comme épouse ou mère. La femme moderne montrée
dans la publicité occupe une fonction sociale importante, elle apparaît
libérée; elle commande. Les femmes sont cadres. La trentaine assurée, le
portrait type de la femme de carrière désireuse de gravir les échelons
hiérarchiques du pouvoir menant à la réussite sociale présente les traits
suivants: agressive, bourreau de travail, libre de toute contrainte familiale
et affective.
Certaines images sont le lien, la jonction entre la femme nouvelle et
sa ferninit6 actuelle/traditionnelle. La période étudiée marque en quelque
sorte une mythologie pour le moins exotique: le régne des amazones. Une
publicité vient offrir cette vision de la femme: Charlie (figure C-274). En
adoptant les attributs traditiomeis de l'homme, la publicité n'invente rien.
Dans cet univers où l'on se moque parfois de l'homme, la femme se voit
attribuer les emblèmes de l'homme. Plusieurs éléments témoignent de cette
recherche symbolique entre vestiges traditionnels et nouveaux impératifs
culturels: les femmes flirtent (figure C-275), s'écartent les jambes (figure
C-276), fument le cigare (figure C-277), dominent (figure C-278) et se
moquent des hommes (figure C-279).En outre, des femmes s'exercent aux
haltères (figure C-280), gonflent leurs muscles (figure C-281), s'entraînent
(figure C-282), escaladent les montagnes (figure C-283), font de la planche
à voile (figureC-284), enfilent les gants de boxe (figure C-285), jouent au
hockey (figure C-286), conduisent une moto (figure C-287) ou jouent au
soccer (figure C-288).
De nombreuses publicités proposent une inversion des stéréotypes
sexuels traditionnels. Ces publicités s'érigent par le fait même en une
espèce d'hypertrophie de l'égalitarisme entre les sexes, mais où est établie
comme référent à la norme, l'appartenance aux caractères «virilisés», mais
toujours dans une enveloppe féminine. On montre, par exemple, une
femme chef d'État (figure C-289). La publicité amorce en ce sens une
tentative de composer avec les nouveaux modèles culturels de la femme
tout en préservant les attributs de sa nature, dont la maternité (figure C290) et la beauté (figure C-291). En ce sens, l'appel à des thématiques
classiques - femmes sensuelles, belles et jeunes
- est un argument fort de
cette catégorie. C'est ce qui explique peut-être que les femmes sont
notamment présentées sous Ies traits de la femme offerte (figure C-292), de
la femme nue (figure C-293), de la femme au regard aguichant (figure C-
294) et aux poses suggestives (figure (2-295).
D. LE CORPS ET LA SEXUALITÉ
Dans la publicitd, nombre d'images montrent la sensualité ou l'érotisme du
corps. L'axe central est alors cefui du corps et de la sexualité. Plusieurs
images du corpus représentent des femmes ou des hommes dans des
positions suggestives. On montre aussi des femmes et des hommes qui
flirtent (figure C-296).
Visuellement, une illustration montre des jeunes femmes, poitrine
offerte (figure C-297), couchées (figure C-298),jambes levées ou croisées
(figure C-299), yeux fermés, tête renversée (figure C-300), lèvres
entrouvertes (figure C-301), regard complaisant (figure C-302). Certaines
images-surtout européennes-vont encore plus loin et expriment le sexuel
en exposant la nudité totale (figure C-303) ou quasi totale (figure C-304).
La trace offre les signes d'un auto-érotisme franc (figure C-305).
Mais qui dit auto-érotisme, dit parcellisation de la chair, corps morcelé. On
dénude les épaules et on met en valeur les rondeurs des fesses et des seins
(figure C-306).
On souligne les lèvres plus pleines et plus charnues de la femme au
moyen de l'application de rouge à lèvres (figure C-307).On humecte les
lèvres ou on utilise un rouge à Iévres brillant. On accentue ces signes
sexuels en plaçant dans le décor des objets de forme phallique (figure C308).
Sur le plan du vêtement, les personnages respectent les règles
classiques. Les acteurs sociaux, hommes ou femmes, arborent des tenues
légères: bas-culotte (figure C-309) et soutien-gorge (figure C-310). Les
filles portant un vêtement particuli&rementcourt (figure C-31l), dénudant
les cuisses, ont souvent recours à un signal-barrière pour protéger leur
région génitale. Le vêtement dissimule pour exhiber, organisant la parade
du désir et de la séduction. Par les décrets de Ia publicité, le corps se
soumet à un imaginaire collectif qui l'érotise et qui socialise le désir en
traçant les lignes de l'interdit.
Le vibrateur (figure C-312), la poupée gonflable (figure C-3 13),
l'allusion au rapport sexuel (figure C-314), le doigt qui égratigne (figure
C-3 15) et un fantasme (figure C-316) sont montrés dans des publicités qui
ne sont pas sans évoquer le chaos, la débauche dans l'ivresse, la luxure,
l'excentricité, la perte de tout contrôle rationnel.
Ainsi s'explique la sexualisation quasi automatique des objets de
première nécessité et apparemment les plus étrangers à cette fonction: la
trace associe la présentation de produits à des images évocatrices ou
susceptibles a priori de provoquer des fantasmes (figure C-317). L'image
devient une incitation au rêve; une sorte de flirt où seul le sexe est tabou.
La publicité utilise le corps de l'homme aux mêmes fins (voir section
C-1 ci-haut). Dans la @riode étudiée, tout se passe comme si la femme et
l'homme obéissaient à un même canon de beauté. Mais exposer la femme-
standard et l'homme-idéal, c'est abandonner la différence, ce qui équivaut à
nier l'originalite de la diff6rence des sexes.
L'homme-objet est en fait une décoration. L'acteur social est
généralement immobile; il prend une attitude d'offrande. Il met t'accent sur
son physique. À côté du sexe, on assiste ii l'exaltation mythique du corps
sain ou, selon Baudrillard, à un véritable «culte médical», celui qui se
manifeste par la conquête systématique et permanente de la forme et du
rendement maximal, des gymnases.
E. LE CULTE DE LA BONNE FORME PHYSIQUE
Le sport (figure C-318) se présente dans la trace publicitaire comme l'un
des modèles de l'éducation physique et de la bonne forme au sein des
sociétés modernes. Plusieurs images publicitaires montrent bien combien
l'imagerie du sport a conquis une place importante. On a identifié quatre
thèmes dominants: modernité et décontraction, virilité, lieu sportifs et
sports d'équipe.
1. Modernité et décontraction
L'imagerie publicitaire relayée par les médias popularise le bien-être
corporel et la bonne forme. Bien sûr, le sport, c'est d'abord l'article de
sport, l'espadrille en particulier (figure C-319). Exposé, présenté, mis en
scène, cet article s'affiche comme un objet fonctionnel. C'est une idéologie
de la vie au quotidien avec des gens saisis dans leurs moments de jogging
(figure C-320), de bicyclette (figure C-321), de baignade (figure C-322),
de tennis (figure C-323),de patins h roues alignées (figure C-324), de
racquetball (figure C-325), de baseball (figure C-326) ou de patinage
(figure C-327).
À la manière d'une arme offensive, la trace étale l'esprit &équipe, le
goût de l'effort et la vitalité. Ici, la tension musculaire est le meilleur
régulateur des tensions sociales.
Le sport renvoie à la performance corporelle, avec des chances
égales pour tous et à la victoire pour celui qui donne le maximum.Ce qu'il
faut, c'est aller plus loin, plus haut, jusqu'au bout, s'accomplir. En un mot,
c'est l'image du dépassement avec des sports cl&: saut B la perche (figure
C-328),saut à la haie (figure C-329), course (figure C-330)et course à
relais (figure C-331).
Le sport vit au rythme changeant de la mode et des courants sociaux.
En l'espace de dix ans, le marché de la chaussure de sport a pris un triple
sens: économique, technologique et culturel. Jadis totalement incongru en
ville, l'e corps actif au repos (figure C-332) est devenu un symbole clé de la
trace publicitaire.
La femme paraît globalement sportive. Plusieurs images publicitaires
la présentent en train de faire des exercices divers, souvent en costume très
moulant tandis que d'autres montrent des femmes qui font des actions
reliées au loisir et à la détente; elles frappent des balles de tennis, font
rebondir des galets sur l'eau d'un étang, elles se balancent, dansent. Aux
femmes soucieuses de bien entretenir leur corps, la trace promet un modèle
de féminité souvent calqué sur les pages de mode de leur magazine.
2. La virilité
La trace met souvent en scène des sports d'affrontement, durs et violents,
truffés d'agressivité, empreints d'investissements de toutes les valeurs de
l'exercice physique le plus astreignant: entraînement exténuant pour le
corps, valorisation de la force, comme les haltères (figure C-333) et la
boxe (figure C-334).
Dans certains cas, l'enjeu ne consistera plus à combattre ou à vaincre
d'autres hommes, mais à maîtriser les éléments naturels: l'altitude, la
pesanteur, l'eau, les vagues, le vent, la neige. Autant d'éléments que
suggèrent les sports suivants: l'escalade (figure C-335), l'expédition (figure
C-336), le cross-country (figure C-337), le parachutisme (figure C-338), le
deltaplane (figure C-339), la montgolfière (figure C-340), le dragsters
(figure C-341), le bobsleigh (figure C-342). le jet boat (figure C-343),
l'avion (figure C-344, le surf (figure C-345), le voilier (figure C-346), le
moto marine (figure C-347), le plongeon (figure C-348), le rafting (figure
C-349), le kayak (figure C-350),le ski (figure C-351), le ski nautique
(figure C-352), l'aviron (figure C-353),le canoë (figure C-354, la planche
à voile (figure C-355)et le tir à l'arc (figure C-356).
À l'inverse, quelques sports visent à garder la mobilité corporelle, à
<<dégourdin>,
à créer des moments de socialisation: le billard (figure C357) et les quilles (figure C-358). Certains sports sont aussi «à la mode»
tels le rouli-roulant (figure C-359), le patin à roues alignées (figure C-
360), le vélo (figure C-361) et le voleybail (figure C-362).
3. Les lieux sportifs
Dans la publicité, le sport, c'est aussi des lieux. Le stade (figure C-363) et
les estrades (figure C-364)sont les territoires tribaux des temps modernes.
Les partisans des équipes offrent des scènes aussi spectaculaires que
colorées. La salle d'entraînement (figure C-365) avec son vestiaire (figure
C-366) et son sona/douche (figure C-367) fait aussi partie du corpus.
4.
Les sports d'équipe
Cinq sports d'équipe sont représentés dans le corpus. Tout d'abord, le
baseball dont les référents abondent: arbitre (figure C-368), vol de but
(figure C-369), gant de joueur (figure C-370), lanceur (figure C-371),
frappeur (figure C-372), bâton (figure C-373) et balle (figure C-374).
Deuxièmement, le basketball, particulièrement Ie basketball extérieur, est
rappelé par le ballon (figure C-373, le panier (figure C-376),un terrain
(figure C-377) ou une séquence de jeu (figure C-378). Troisièmement, le
hockey est évoqué par le chandail (figure C-379),le masque du gardien de
but (figure C-380), un patin (figure C-381), un joueur (figure C-382), un
gardien (figure C-383), une équipe (figure C-384), une phase de jeu
(figure C-385)ou la coupe Stanley (figure C-386). Quatrièmement, le
football, est suggéré par un terrain de football (figure C-387), un casque
(figure C-388), un ballon (figure C-389) ou une séquence de jeu (figure C390), par exemple, ou un attrapé spectaculaire. Cinquièmement, le soccer,
dont le but (figure C-391) et le dribble (figure C-392) restent les
témoignages privilégiés.
F. CONCLUSION
En partant du principe que le corps est un symbole de la société, on a
analysé la mise en scène du corps dans les images publicitaires, l'image du
corps masculin et féminin, le corps sexuel et sa asportivationu. On s'est
intéressé à la nature, la qualité et le sens des postures du corps pour obtenir
une image du corps social construit par la publicité.
23 1
L'analyse sociologique de la trace publicitaire a montré que le corps
marque la place de l'acteur social au même titre que le temps ou l'espace.
Le langage non verbal constitue, dans les images du corpus, un aspect
significatif de la mise en scène: normes particulières de développement et
de croissance (normes de minceur, grosseur, musculature, etc.),
conservation et entretien (exercice physique), présentation (soins
esthétiques, vêtements), maintien (normes de bienséance, d'étiquette de bon
goût), expression corporelle, gestuelle et théâtrale (normes d'expression
affective, émotive) tant chez l'homme que chez la femme.
Le corps humain représente une masse de signaux sexués: la moindre
courbe, le moindre renflement, le moindre contour, transmet son signal de
base: les seins, les fesses, les hanches, la taille, le cou, les membres arrondis
de la femme, la poitrine mâle, les poils, les larges épaules, les muscles des
bras et des jambes, tous ces éléments visuels constituent des signaux.
Le rapport au corps, comme le discours sur le corps, étroitement
liés, ne saurait être neutres. Le passage de la nature à la culture se fait
précisément par la domestication du corps, éduqué, modelé, enfermé dans
un réseau d'interdictions, de tabous et de pratiques rituelles.
Le corps est une donnée culturelle, il est texte. Par le physique, les
gestes, les postures, les vêtements et les parures, le corps se donne à lire.
Par le jeu des connotations, le physique est signifiant. Le corps, en tant
qu'instrument, précise les sens et significations. L'apparence globale de
l'acteur social - corps, vêtements et accessoires - est un lieu de
production et de reproduction intimement relié au collectif. Le corps se
présente sous forme d'images (corps physique, sexué, sportif); des images
qui renvoient au discours culturel.
Chapitre VI1
L'imaginaire
dans la publicité
A. INTRODUCTION
Au-delà du temps, de l'espace et du corps, l'analyse du corpus iconique
permet de voir comment se construit l'imaginaire dans les images
publicitaires. Le travail du mythe est alors celui d'une certaine figuration,
d'un imaginaire. «La publicité est d'une manière une usine à imaginaire.
(...)
Les produits sont plus attirants quand on les présente dans un univers
mythique rempli de personnages illustrés et de marques» (Randazzo, 1993:
ix et 1).
Dans cette thèse, on a identifié deux façons d'évoquer l'imaginaire
dans les traces analysées: les personnages et le statut social. Dans tous les
cas, le capital essentiel de ces images est l'imaginaire qu'elles véhiculent.
Tous ces visuels de personnages mythiques et de statuts socials rappellent
que la trace est une expression du fantastique. Ainsi, les images
publicitaires cernent certains types héroïques, retiennent les
personnifications d'un caractère, d'un pays, d'une ethnie, d'un sentiment ou
d'un ensemble de sentiments. La trace publicitaire peut évoquer
directement le luxe et le haut de gamme imaginaire. Dans sa quête
d'imaginaire, la trace répète alors que le consommateur mérite «ce qu'il y
a de mieux)). Ces signes extérieurs de <<classe»
deviennent alors un ((droit
naturel», une marque de progression sociale.
B. LES PERSONNAGES ET LES ANIMAUX MYTHIQUES
Parmi les personnages et les animaux de la publicite iconique qui ont été
immortalisés dans les traces publicitaires, certains sont des vedettes
consacrées par la bande dessinée, des «stars),des animaux domestiques ou
sauvages. Mais tous ces personnages et ces animaux ont quelque chose de
classique; ils sont conformes au goût traditionnel. C'est sur ces différentes
représentations que s'agencera la trace publicitaire; ce sont ces créations
graphiques ou fokloriques qui seront à la source des principales figures de
la rhétorique, sous forme d'images. De là, la force de la structure élaborée
comme approche publicitaire; car elle ne nie pas Iloriginalité des images,
mais elle les ramène à des constantes, des sortes d'universaux
-
ou
signifiants - qui travaillent entre eux.
C'est ce tout imbriqué qui fait l'objet de cette section. On procédera
ainsi à un repérage des personnages représentés dans les images
publicitaires
- personnages humains, stars, gens célèbres, personnages de
contes et légendes, personnages institutionnels, personnages fictifs,
animaux, insectes et poissons. Tous renvoient à un sens, immobilisé par une
culture, à des rôles et des emplois stéréotypés, et leur lisibilité dépend
directement du de@ de participation à cette culture. Ils assureront donc ce
que Barthes appelle un «effet dc-réel» (Barthes, 1968).
1. Les personnages humains
Dans cette section, on a fait une liste des différents personnages
apparaissant dans les images du corpus et on les a regroupés selon leur
provenance. L'analyse des images publicitaires permet de dégager cinq
groupes de personnages mythiques. Le premier genre, le plus sollicité, met
en scène ceux que l'on appellera, à la manière d'Edgar Morin, des «stars>>
d'hier et d'aujourd'hui.
Le deuxième groupe fait appel à des gens célèbres pour leurs
réalisations dans des domaines aussi différents que le sport, la politique, les
sciences ou les arts, que ce soit la peinture, la littérature ou la sculpture. Le
troisième groupe rassemble des personnages fabuleux sortis tout droit des
contes, légendes et mythes. Un quatrième groupe présente des êtres typés
ou personnages institutionnels: médecins, marins, pères, etc. Une cinquième
catégorie met en scène les personnages de bandes dessinées et une dernière
regroupe des personnages fictifs créés spécialement comme mascottes ou
porte-parole du produit.
L'apparence physique, la posture et les vêtements de ces personnages
sont porteurs de sens et peuvent dévoiler la différence entre les uns et les
autres. Les vêtements révèlent qui ils sont ou ce qu'ils voudraient être.
Tout comme les traits culturels, ces personnages prennent leur signification
dans un contexte socioculturel particulier. Ils peuvent avoir des
connotations historiques ou témoigner de l'appartenance. Ces personnages
représentent une marque indélébile. Chaque personnage crée une similinide
ou affiche une différence, évoque une distance ou un rapprochement. Ils
racontent une histoire.
1.1 Les stars
Champions sportifs, vedettes de la chanson et de l'écran, mais aussi
personnages de bandes dessinées, la société est riche de personnages que la
publicité propose aux regards des consommateurs. Nombreuses sont ces
vedettes que la trace offre. Leur vie alimente le quotidien. Car la vedette
n'est pas seulement admirée dans la seule activité oh elle triomphe, mais
dans I'ensemble de son personnage. Elle offre des modèles de conduite et
fait partie du monde familier des acteurs sociaux.
1.1.1 Les stars de cinéma d'hier
Une revue en surface des stars permet de constater à quel point les stars
d'hier semblent avoir une chose en commun: celle de valoriser l'idéologie
de I'American way of Ive. Rien d'étonnant donc au fait qu'elles aient été
sollicitées par la publicité.
Chargée de vanter un tdlécopieur, la star de cinéma n'a qu'à se
contenter d'affirmer qu'elle existe, et la trace peut se borner à la faire
figurer dans son environnement immédiat. 11 est tout à fait superflu de
demander à la star de dédarer qu'elle emploie ou qu'elle est satisfaite du
produit annoncé; il suffit d'affirmer, de prouver par l'évidence, c'est-àdire en montrant la star près du produit, que l'objet existe dans le monde
où elle vit.
.
On remarque que les stars disparues font les beaux jours de la
publicité. Évidemment, l'avantage de ces emprunts posthumes en publicité
est considérable: tous les disparus sont de braves gens. Par exemple, Canon
(figure D- l), Philips (figure D-2),Hush Puppies (figure D-3) et
McDonaldts (figure D-4)perpétuent le souvenir de Marilyn Monroe.
On a ainsi rencontré dans des publicités des personnages comme
Laurel et Hardy (figure D-S), les trois Stoodges (figure D-6),Ronald
Reagan (figure D-7) et Elvis Presley (figure D-8): ce sont à la fois des
héros mythiques et des stéréotypes. Ils ont alors comme fonctions diverses
de figurer, investis par délégation de pouvoir, comme les protagonistes
d'une épopée ancienne. 11 en est de même de la plupart des héros de
western, qui ont pour mission de faire dériver l'histoire vers le mythe.
Certaines images renvoient non pas à l'acteur comme tel, mais plutôt
à un rôle clé qu'il a déjà joué. L'un des meilleurs exemples de ce
détournement est sans aucun doute celui de IBM en regard de Charlie
Chaplin (figure D-9) ou Charlot. C'est sous le nom de Charlie que le héros
de Charlie Chaplin a connu une gloire universelle. Son chapeau melon, ses
grands souliers, sa fine moustache, son pantalon qui tombe, son visage de
clown et sa fameuse canne lui donnent une allure sympathique.
1.1.2 Les stars de cinéma d'aujourd'hui
Les stars d'aujourd'hui sont également mises à contribution dans le corpus.
Ding (figure D- IO), Brooke Shield (figure D- 11), Elizabeth Taylor (figure
D- 12), Stevie Wonder (figure D-13), Cindy Crawford (figure D-14), Bill
.
-
Cosby (figure D-15),Rock et Belles Oreilles (figure D-l6),
La Poune
(figure D-17),Oncle Georges de Lemire (figure D-18) ou Marina Orsini
(figure D-19) sont autant d'exemples où des vedettes sont accolées à des
produits.
1.3 Les gens célèbres
La trace montre des porte-parole connus dans le cadre de plusieurs
situations. Dans la plupart des cas, ils jouissent d'une notoriété, laquelle
découle de réalisations exceptionnelles. Le corpus a permis d'identifier
quatre grandes catégories de personnages célèbres autres que les vedettes
du cinéma. Ce sont en premier lieu des sportifs, des politiciens, des
peintres/écrivains/musiciens/découvreurset des savants.
1.2.1 Les sportifs
Le sport est aussi un spectacle. L'image du sport-spectacle est, à cet égard,
partie intégrante de l'univers publicitaire. Or, qui dit spectacle dit vedette.
Pas plus que le show-business, le sport n'échappe au star system où les
vedettes sont invitées à appuyer des produits qu'ils n'utilisent pas
nécessairement. Le lien est encore plus ténu quand le hockeyeur Wayne
Gretzky (figure D-20) encourage les gens à s'assurer chez Travelers, ou
lorsque l'athlète Myriam Bédard (figure D-21) fait la promotion de La
Métropolitaine.
Contrairement aux vedettes du grand écran, et à quelques exceptions
près, les sportifs de .IP-périodeétudiée (1987-1997) sont ceux qui semblent
avoir la faveur. Les Michael Jordan (figure D-22), Pat Burns (figure D-
23), Jacques Derners (figure D-24),Patrick Roy (figure D-25),Guy
Lafleur (figure D-26), Maurice Richard (figure D-27), Babe Ruth (figure
D-28), O.J. Simpson (figure D-29) et Andre Agassi (figure D-30), parmi
d'autres, font les délices des fabricants d'espadrilles et autres produits.
1.2.2 Les politiciens et les militaires
Contrairement à ce qu'on pourrait croire a priori, la trace recourt assez
souvent aux politiciens et militaires d'hier et d'aujourd'hui. Dans des scènes
inhabituelles, ou dans des postures classiques, ces personnages politiques
semblent alors transcender les époques.
Plusieurs des personnages du corpus ont été rendus célèbres par des
conflits armés tels Hitler (figure D-31), Churchill (figure D-32) et Saddam
Hussein (figure D-33). D'autres, comme Mao (figure D-34), ont fait les
beaux jours de la guerre froide. D'autres encore sont des membres de
l'ancienne Union Soviétique, tel Gorbatchev (figure D-35). Dans ce dernier
cas, l'intertextualitéjoue son tôle. Le signe Gorbatchev migre prenant tour
à tour appui sur une voiture ou une bière.
Les images publicitaires permettent de réaliser à quel point les
personnages américains sont importants: Reagan (figure D-36),George
Bush (figure D-37) ou Norman Schwarzkopf (figure D-38).
Dans ce panthéon, il faut aussi noter la présence du prince Charles et
de Lady Di (figure D-39) et de Henri
IV (figure D-40). On suggère . -
Napoléon (figure D-41) avec le chapeau caractéristique. On remarquera
aussi des figures comme Ghandi (figure D-42) et Cléopâtre (figure D-43).
1.2.3 Les peintres/chanteurs/découvreurs
À côté des stars du petit écran, des vedettes sportives et des politiciens, il y
a un autre groupe de personnages célèbres pour leur apport à la littérature,
leur esprit d'aventure, leur talent de musicien, de chanteur ou de peintre.
Ce sont des découvreurs comme Colomb (figure D-44), Cook (figure D43, Cartier (figure D-46) et Champlain (figure D47); des peintres comme
Picasso (figure D-48) et Dali (figure D-49); et des chanteurs comme
Fernandel (figure D-50) et Montand (figure D-51).
1.2.4 Les savants
Quelques savants s'inscrivent aussi dans l'imagerie publicitaire, tels
Einstein (figure D-52) et Freud (figure D-53). Dans cette catégorie,
Léonard de Vinci (figure D-54) reste toutefois le personnage le plus
populaire et dont on fera l'évocation par son tableau de la Joconde (figure
D-55). Cette dernière trace servira d'ailleurs de mise en scène à une
Iotterie, un téléviseur, un lunettier et une chaîne de restauration rapide!
1.3 Les personnages de contes et de légendes
Certaines publicités puisent aux «motifs» ou épisodes fantastiques de
l'imaginaire des contes et légendes: potion magique, parfum mystérieux,
montagne qui se déplace, etc. Grâce à l'imagination, rien n'est impossible.
Les traces publicitaires reprennent ainsi des contes de fée, des héros de
romans célèbres où des personnages légendaires répondant aux éternelles
3
questions: à quoi le monde ressemble-t-il vraiment? Comment vais-je
vivre? Comment faire pour être vraiment moi-même? Aujourd'hui le rôle
.
.
du conteur est de plus en plus dévolu à la publicité et au cinéma qui savent
narrer le merveilleux et l'extraordinaire.
Dans son livre L'enfant et la publicité, Jean-Noël Kapferer explique
que la publicité provoque le même plaisir que les contes de fées. «Ce rituel
d'attention répétitive et source de plaisir rappelle à s'y méprendre celui lié
aux contes et histoires racontés autrefois aux parents par les grandsparents, au point qu'on a pu dire qu'elles [les publicités] étaient les contines
des temps modernes» (Kapferer, 1985). Ce sont ces références à des
personnages de la littérature orale faites par la publicité iconique renvoyant
directement au corpus des contes que l'on va maintenant tenter d'expliquer.
À première vue. les personnages de contes de fées de la publicité
apparaissent comme une flore capricieuse éclose ici et la à travers le temps.
Mais, si on prend la peine d'examiner le contenu de ces récits magiques, on
s'aperçoit que dans toutes les images publicitaires, le canevas est immuable,
de la même manière qu'il l'était et l'est encore dans les récits indoeuropéens diffusés dans tout l'Occident.
Les éléments du conte sont les suivants: un château ou une demeure
seigneuriale, un vieux roi, une sorcière, une princesse, un prince charmant,
une forêt enchantée, une mer, une source ou une fontaine, un char volant,
des oiseaux et des animaux fantastiques, des objets magiques, des @ants et
des nains (Loeffler-Delachaux, 1949: 8-9). La sorcière, la fée et la
magicienne sont filles d'une longue histoire, que les légendes ont habillées
et animées.
Le prince et la princesse (figure D-56) sont l'idéalisation de l'homme
et de la femme, dans le sens de la beauté, de la jeunesse, de l'héroïsme et de
t'amour, l'amour tout-puissant. Dans les contes, le prince est souvent la
victime des sorcières. Il ne recouvre alors sa forme princière que sous
l'effet d'un amour héroïque. Sa récompense ultime est l'amour total de la
plus belle femme du royaume, qui se trouve être, souvent, la fille du roi.
Celle-ci est accordée au héros en récompense de son audace et de son
courage, alors qu'il a délivré les gens du royaume.
En procédant au dépouillement de publicités, la sorcière (figure D57), antithèse de l'image idéalisée de la femme, est reconnaissable à son
chapeau et son balai. Elle est déguisée de façon hideuse et diabolique,
servante du diable.
Le cavalier ou chevalier du roi (figure D-58) est le symbole du
triomphe, de la gloire. Sur sa monture, il lutte contre les forces du mal.
Courageux et plein d'endurance, il protège avec son bouclier et son épée. A
l'inverse, le fou du roi (figure D-59) est celui qui fait rire, celui dont on se
moque.
Les nains et les lutins (figure D-60) sont associés aux grottes, aux
cavernes, aux trésors cachés et aux flancs des montagnes. On leur prête des
<
-
pouvoirs magiques, comme en détiennent les génies ou les démons. Leur
petite taille les a fait assimiler à des êtres insaisissables.
Au début des années 1990, Bell montra les trois mousquetaires
(figure D-61) pour faire la promotion de ses téléphones. En 1993,
McDonald's proposait une version moderne des contes. On montra aussi la
Belle au bois dormant, Cendrillon et le Petit Chaperon rouge.
Le Petit Chaperon rouge (figure D-62) est sans doute le personnage
de conte le plus célèbre de la publicité. Chargée par sa mère d'apporter à
son aïeule une galette et un pot de beurre, elle rencontre un méchant loup.
Cette vision amusante d'un Loup permet d'illustrer les galettes de Pleyben.
La Belle au bois dormant (figure D-63), cette célèbre jeune fille, est
réveillée par le baiser du Prince charmant. Cendrillon dont le personnage
reste intimement lié aux chaussures (figure D-64)et à la citrouille (figure
D-65) est une fille malheureuse, maltraitée, qui épousera un beau prince,
grâce à un soulier qu'elle peut chausser.
Pinocchio (figure D-66) occupe une place importante dans la
publicité destinée aux enfants. II manifeste, pour camoufler ses fautes, une
extraordinaire propension au mensonge, que dévoile malicieusement
l'allongement progressif de son nez. Dans la même lignée, Polichinelle
(figure D-67), une figure très populaire du théâtre de marionnettes qu'on
retrouve aussi dans la publicité, sera le plus souvent affublé d'un nez
crochu.
La publicité met en scène toute une série de personnages effrayants,
méchants, qui ont peuplé l'imaginaire et fait frissonner à peu près tous les
enfants. Le vampire (figure D-68), un trépassé censé sortir de son
tombeau, vient sucer le sang des vivants. Dracula, le plus connu des
vampires, est la personnification de l'horreur, de la mort et parfois du
démon. Célèbre pour sa cruauté et son goût pour le sang, Dracula vit en
Transylvanie (figure D-69) et montre des dents étrangement longues qui lui
servent pour recueillir le sang à la source: la gorge de ses victimes.
Les sirènes de mer (figure D-70) sont des personnages issus d'un
épisode célèbre des poèmes homériques, L'llliade et l'Odyssée, que la
publicité a depuis transformés en belles femmes.
Le corpus montre également des pirates (figure D-71). Le revenant
qui réapparaît sur terre matérialisé en fantôme (figure D-72) symbolise les
êtres de l'au-delà. Le loup-garou (figure D-73), Frankeinstein (figure D74), Ie dragon (figure D-73, le monstre (figure D-76), le dinosaure
(figure D-77) et le cheval de mer (figure D-78) symbolisent la peur et le
danger. Plus récemment, certains de ces personnages ont ét6 remplacés par
des extra-terrestres (figure D-79) et des robots (figure D-80).
1.4 Les personnages institutionnels
Un quatrième groupe de personnages montrés par la publicité regroupe des
- individus dits «institutionnels», parce qu'ils appartiennent à des métiers et
occupations du monde contemporain. Ces gens anonymes porteurs de
l'idéologie de la société n'ont d'original que leur identification à un groupe
d'âge, à un pays, à une fonction qu'ils occupent ou à un rôle qu'ils jouent.
Les personnages institutionnels ne sont ni des stars, ni des génies, ni
des héros mythiques; ce sont des «gens ordinaires)). L'âge, le statut social et
le sexe, sont des éléments importants de l'identité qui précisent le caractère
de certains de ces personnages. L'image publicitaire établit donc des
rapports de pouvoir basés sur l'âge, le sexe, la classe sociale. Ainsi les
personnages se situent, agissent ou se solidarisent, ou au contraire se
distinguent, tantôt selon leur âge, tantôt selon leur culture, ou encore selon
leur situation sociale.
Les personnages principaux de ce type ainsi que ceux qui gravitent
autour d'eux partagent un certain nombre de clichés qui les font distinguer.
On peut supposer alors qu'ils représentent des formes culturelles et
deviennent des clichés réducteurs. Par exemple, les Japonais sont vus
comme des gens calmes et polis qui ne craignent pas le travail, les
Mexicains sont lâches, les Français sont des séducteurs et les cheiks arabes
sont riches.
Le publicitaire peut arriver à constituer l'image d'un personnage au
moyen des diverses particularités apparentes ou caractéristiques qui se
dégagent du personnage lui-même (figure D-81). Les financiers (figure D-
82) trouvent écho dans la publicité pour deux raisons: l'argent est
fortement associé dans l'imaginaire publicitaire àscs qui est désirable (voir
la section portant sur le statut social imaginaire), et en même temps parce
qu'il représente le pouvoir. Le cow-boy (figure D-83) est vu comme un
type viril et aventurier. Le prisonnier (figure D-84) et le voleur (figure D85) n'ont pas une existence normale, ils sont des êtres en marge. La
captivité, c'est Le sort réservé aux vaincus. Leur image sugghe un itat qu'il
faut 6viter.
Les autres personnages typés rencontrés dans le corpus sont le
militaire (figure D-86),le savant (figure D-87),Le travailleur manuel
(figure D-88),le chef cuisinier (figure D-89),le clown (figure D-90),le
motard (figure D-91) et le détective (figure D-92). Depuis Barthes, les
sociologues qui tentent d'établir le registre de l'image publicitaire
conviennent que tous ces personnages deviennent rapidement des
stéréotypes ou des archétypes. Par exemple, la blouse blanche signifie la
compétence technique tandis que le bleu de travail manifeste la condition de
travailleur subalterne.
À la lumière des exemples qui précèdent, on remarquera d'ailleurs
que la première fonction de i'habillement dans la publicité non axée sur la
promotion du vêtement, est la création d'un environnement, d'un espace. II
confère à ('image un style ou lui transfere ses propriétés. Dans certains cas,
il est à lui seul le style de l'image. Quelquefois, c'est même le vêterrtent qui
sert de slogan, qui impose le style. Le vêtement renvoie le plus souvent à
l'image de marque de L'élite (l'image cocktailfcroisière, en smoking ou en
robe du soir décolletée) ou à l'image d'une société jeune, libérée et
communautaire (jeans), érotique (le cuir et la Iingerie), rockeuse, sportive
(coton ouaté, culotte de jogging) (Gourévitch, 1985. 42-47).
Le vêtement va de pair avec la définition et le rôle des personnages.
Comme l'indique Barthes, un costume ou un habillement quelconque
permet à l'individu d'indiquer à autrui qu'il fait ceci, qu'il est cela. Tel ou
tel vêtement renvoie à une activité spécifique, inscrite dans un espace-temps
précis, de même qu'à une identité particulière de la personne; il est
question tantôt de fonctions ou de situations, tantôt de valeurs ou de goût.
Dans la trace publicitaire, la valeur protectrice du vêtement n'est pas
plus importante que sa forme: son vêtement et ses accessoires décoratifs
établissent le premier degré de reconnaissance sociale. Chaque individu,
masculin ou féminin, enveloppé dans un complet-veston ou une robe, porte
un certain nombre de signes qui permettent par la couleur de sa cravate,
son type de chaussures, la qualité des tissus, le parfum utilisé, de le situer
avec précision dans l'édifice social. On assiste finalement à une
standardisation par types ou personnages en accord avec un ensemble de
nomes d'une collectivité ou des positions sociales.
1.5. Les personnages de la bande dessinée
Dans cette catégorie, Superman (figure 1)-93)demeure l'un des mythes les
plus forts de la publicité. Échappé de la planète Krypton, il consacre son
existence à combattre le mal. L'intérêt du personnage réside dans la
duplication héros et ((homme-de-tous-les-jours.
Plusieurs autres personnages de bandes dessinées sont réputés pour
leur force. Doués d'une énergie surhumaine, Indiana Jones (figure D-94)
s'attaque aux Nazis. Popeye (figure D-93, le héros aux avant-bras
d'haltérophile a deux passions: sa douce Olive et sa boîte d'épinards.
Certains personnages de bandes dessinées sont étroitement associés à un
pays. Un des héros les plus célèbres de la bande dessinée, Tintin (figure D96), reste le petit reporter belge à la mèche rebelle accompagné de son
chien fidèle. Bugs Bunny (figure D-97), Snoopy (figure D-98) et Bart
Simpson (figure D-99) sont essentiellement de petits êtres sympathiques.
1.6 Les personnages fictifs
Une dernière famille de personnages imaginaires est celle de tous ces petits
caractères (characters en anglais) qui agissent comme porte-parole. Parmi
Les plus connus et les plus presents, nommons: l'insecte Raid (figure D100), le colonel Sanders (figure D-101), Joe Came1 (figure D-102), le
réparateur Maytag (figure D-103), la mascotte Youpie (figure D-104), le
capitaine High Liner (figure D-LOS), le doigt des Pages jaunes (figure D106), le clown Ronald McDonald's (figure D-107), le pichet Kool-Aid
(figure D-log), Monsieur Net (figure D-109) et le petit bonhomme
Pillsbury (figure D- 110).
2. Les animaux et les insectes
Dans la tradition culturelle occidentale, la présence rassurante de l'animalfétiche existe dès l'étape de la petite enfance. Depuis le lapin et l'ours en
peluche jusqu'aux animaux mis en scène par d'innombrables messages
visuels, le canard (Donald), le chien (Pif) et le cheval (Jolly Jumper) sont
autani de supports utilisés pour illustrer l'image publicitaire.
En publicité, chaque unité du bestiaire est porteuse d'une image
précise. Cela permet d'évoquer des comportements stéréotypés. On y
trouve des animaux qui furent présents sur l'arche de Noé, d'autres qui
bercent l'imagination, comme les licornes ou les dragons. Si une espèce a
l'air farouche, elle devient un symbole guerrier; si elle a l'air caressant,
elle devient un symbole de l'enfant. La, les animaux ne sont plus euxmêmes, ils représentent certaines idées ou sont Les substituts de sentiments
humains. On entre alors dans le monde complexe et fascinant des images,
emblèmes d'animaux.
Dans cette section, on va passer en revue les animaux privilégiés
comme signifiants publicitaires, mais comme on le verra, les limites d'un
bestiaire symbolique mythique ne sont pas aisées A établir. L'animal (figure
D-1 I l ) est en effet l'objet même d'un mythe, celui des caractères attribués
en considérant ses traits propres et immuables. Acteurs principaux,
personnages rélégués à des rôles secondaires, ou partageant la vedette, les
animaux, selon ce qu'ils représentent, occupent une place de tous les
instants dans l'image publicitaire.
Tous les archétypes se retrouvent dans l'animal. Qui ignore que la
cigale est insouciante et la fourmi, travailleuse? Si l'observation scientifique
a joue un rôle important dans l'établissement des particularités du monde
animal, certains récits ont laissé des impressions marquantes dans la
mémoire populaire. La Fontaine, dans srs fables, ne faisait que projeter sur
un monde qu'il observait les mythes qui avaient nourri sa propre culture, et
i l en est de même pour un très grand nombre d'écrivains, tels Renard,
Pergaud, Genevoix.
2.1 Les chiens et les chats
Parmi les animaux domestiques, le chien (figure D-112) et le chat n'en
finissent plus d'amuser la galerie. Pour un, le chien devient indispensable à
la moindre familie heureuse (figure D- 113). C'est l'animal montré comme
étant le plus proche de l'homme. Il est au service de celui-ci avec une
inconcevable fidélité; il est Le meilleur ami de l'homme (figure D-114); il
lui présente son journal (figure D-1 lS), il sert de gardien, il montre la
piste du bandit (figure D-116) et il devient méchant et assaille férocement
celui qui l'approche de trop près, ou il menace de s'attaquer au bandit
(figure D-117). Tous les genres de chiens, du plus racé au plus jeune,
trouvent leur place dans la publicité (figure D-118).
Le chat (figure D-119) tient lui aussi une place de choix dans le
corpus publicitaire. Nonchalant, le chat noir (figure D-120) séduit pas sa
beauté. Souvent, il représente la féminité, la souplesse, la longévité. Dans la
chaleur du foyer, il jouit d'une relation privilégiée avec les humains.
Autant de traits de caractère qui font du chat un animal distingué qui
figurera dans des scènes aussi variées que celles du chat perché dans Les
hauteurs (figure D-121) ou du chat violenté (figure D-122). Le chat est
souvent mis en rapport avec le chien (figure D-123) et les poissons (figure
D- 124).
2.2 Le cheval
te cheval est indissociable des chevauchées (figure D-125),des courses
(figure D-126), des montées et des chutes. Les particularités anatomiques
du cheval (la crinière, les naseaux, l'encolure, la croupe, la queue et les
sabots) et les objets qui lui sont associés, comme le fer à cheval, fournissent
tout un réseau de métaphores. C'est ainsi que le cheval se rattache à des
thèmes aussi différents que la métamorphose, la conquête et l'élévation.
Pégase, le cheval ailé, est masculin et suggère la légèreté. C'est le symbole
de la pétrolière Mobil.
En général, le cheval est symbole de statut (figure D- 127), de force,
de puissance créatrice et de jeunesse. Les chevauchées solitaires des cowboys et les charges héroïques de cavalerie contre les Indiens ont bâti
l'image du cheval conquérant. Ce mythe a été abondamment véhiculé par la
publicité. Le cheval blanc ailé (figure D-128) et la licorne (figure D-129)
constituent deux archétypes fondamentaux de la publicité.
La familiarité qu'entretient l'homme avec le cheval, le respect dont il
l'entoure à plusieurs titres pour les services qu'il rend, les multiples
qualités qu'on se plaît à lui reconnaître, en font un animal de choix. Pour
cette raison, l'image du cheval qui souffre (figure D- 130) est intenable.
Seul le serpent le dépasse peut-être en subtilité dans le bestiaire symbolique.
2.3 Les animaux sauvages
Les animaux sauvages, plus particulièremerrt le lion, le tigre et le crocodile,
occupent une place relativement importante dans la liste des animaux les
plus souventes fois utilisés par les publicitaires alors que le serpent et
l'araignée se font plus rares.
Certains aniinaux sauvages comme le kangourou (figure D- 131), le
panda (figure D-132), le koala (figure D-133),le porc-épic (figure D-134)
et le rhinocéros (figure D-135) apportent aux annonces le souffle
nécessaire à l'exotisme.
La girafe (figure D- 136) se caractérise par son long cou; elle suggère
la lenteur, la démesure. Le chameau (figure D-137) est avant tout la
monture qui aide à traverser le désert. Le zèbre (figure D-138), avec son
pelage rayé, évoque l'exotisme. Vivacité et beauté: telles sont les qualités
qui ont fait de la gazelle (figure D-139) un symbole repris par la publicité.
Le crocodile (figure D-140) s'apparente au dragon. Sa grande gueule
lui donne l'apparence de l'animal le plus vorace. Sa peau rugueuse évoque
la sécheresse.
Le singe (figure D-141) est bien connu pour son agilité, son don
d'imitation, sa bouffonnerie. Sa ressemblance avec l'homme sert à illustrer
l'évolution des espèces (figure D-142). Son goat des bananes (figure D143) est Légendaire. Quant au gorille (figure D - M ) , c'est le balourd,
l'animal maladroit dont le physique inspire le respect.
Image vivante de la lourdeur, de la robustesse et de [a maladresse,
l'éléphant (figure D-145) symbolise la force, la longévité et l'entêtement.
Dans le langage populaire, on lui attribue une mémoire exceptionnelle. On
parlera alors de «mémoire d'éléphant» (figure D-146).
Parmi les félins, le tigre (figure D-147) évoque d'une manière
générale les idées de puissance et de férocité. Beau, cruel, rapide, il fascine
et terrifie. II est grand et puissant même s'il n'a pas la dignité du lion. La
panthère (figure D-148) et le léopard (figure D-149)sont des animaux de
grande force dont l'attaque soudaine est impitoyable. Le construit
publicitaire en a fait des êtres de fierté, de férocité en même temps que
d'habileté et de force.
Le lion (figure D-150) est puissant et vigoureux. Debout, il est très
menaçant. Il suggère la force et le courage. Dans les cirques, le dompteur
de lions met sa tête dans la gueule de l'animal (figure D-151)comme pour
défier sa puissance.
Le serpent (figure D-152)est un signe de danger et un symbole du
paradis (figure D-153).
2.4 La faune traditionnelle
A priori, la liste des animaux familiers apparaît illimitée. En raison de sa
couleur blanche et de son comportement, le mouton (figure D-1%) suggère
le sommeil.
Le bison (figure D- 155) est farouche.. L'ours (figure D-156)est en
général un symbole guerrier tandis que I'ours polaire (figure D-157)
suggère le froid. Quant à l'ourson (figure D-1581, il fascine les enfants.
Affamé, prolifique et nocturne, le rat (figure D-159) est une creature
redoutable, voire infernale, alors que la souris (figure D-1601, avec ses
grandes oreilles, son fromage et le pikge dans lequel elle tombe, est un petit
animal familier.
Le petit cochon rose (figure D-161), avec la queue en tire-bouchon
(figure D- l62), figurera la tirelire, l'idée d'épargne ou d'économie.
Dans l'imagerie populaire comme dans la publicité, le loup (figure
D- 163) apparaît comme un animal feroce.
Le lapin (figure Il-164)est un petit animal délicat et sympathique.
Contrairement à la tortue (figure D-165)qui est lente et immobile, le lapin
est clairement lié à la vitesse, à l'endurance, A la chance et aux carottes. En
publicité, sa progénitude nombreuse et renouvelée sert à illustrer la la
rapidité, la multitude et ta fécondité.
Le bélier (figure D- 166) représente avant tout la fécondité et \a vie,
et ses caractéristiques ont fait qu'il occupe une place non négligeable dans
la publicité. Ardent, mâie, instinctif et puissant, le bélier symboiise la force
farouche; il allie la fougue à l'obstination. Ces caractéristiques attestées à
travers de nombreux mythes et coutumes sont reprises dans la trace.
Le taureau (figure D-167) évoque l'idée de puissance virile, de
fougue irrésistible. C'est le mâle plein de vitalité. En général, il symbolise
le déchaînement. Ses cornes évoquent la puissance. C'est d'ailleurs, d'une
façon générale, la signification que l'on donne aux animaux qui portent des
cornes.
La vache (figure D-168) avec ses taches, son pis, son gros nez et sa
tête représente la terre noumcière.
2.5 Les oiseaux
L'oiseau (figure D- 169) traduit généralement la liberté et la légèreté,
surtout lorsqu'il s'envole (figure D- 170). Toutefois, l'oiseau peut devenir
un être maléfique, un oiseau de malheur. C'est plus particulièrement le cas
des oiseaux de proie (figure D-171), mais aussi d'oiseaux diurnes comme le
corbeau, ou nocturnes comme la chauve-souris.
Symbole de la naissance, de Pâques et du printemps, l'oeuf' (figure D-
172) participe à la reprbsentation des valeurs de repos comme le font la
maison, le nid et la coquille. L'aile marque l'envol, I'allégement, la liberté,
le mouvement aérien et léger. La plume (figure D-173) représente la
légèreté, la caresse.
La trace multiplie les références aux oiseaux. Le corpus contient des
oiseaux sur un fil électrique (figure D-174),qui se déplacent dans un vol en
forme de «V» (figure D-175),qui servent de cibles à la foire (figure D-
176).
De nombreux genres d'oiseaux trouvent leur place dans la publicité:
la poule (figure D-177),le canard (figure D-178)et le flamant rose (figure
D-179). La cigogne (figure D-180),un oiseau de bon augure, se charge
d'apporter les nouveau-nés. Parce qu'il n'affronte pas la lumière du jour, le
hibou (figure D-181)est associé à l'obscurité, à la nuit, à la retraite
solitaire et à la mélancolie. Le pivert (figure D-182)protège et sécurise. Le
cygne (figure D-183) est un oiseau dont la blancheur et la grâce
symbolisent l'élégance et la pureté. Il est mis en scène dans une publicité de
papier hygiénique. Avec son long cou, l'autruche (figure D-184)évoque
celui qui refuse ou qui évite la confrontation, qui ne voit pas le dan,oer ou
feint de l'ignorer.
L'aigle (figure D- l S ) , que L'on retrouve dans plusieurs récits
fabuleux, est signe de force, de puissance et d'invincibilité. II est considéré
comme le rapace le plus fort, Ie plus majestueux et le plus fascinant
(Chevalier et Gheerbrant, 1982).
Le coq (figure D-186)est connu comme étant l'emblème de la
vigilance. C'est aussi un symbole solaire parce qu'il annonce l'amvée de la
lumière naissante par son chant au lever du soleil.
2.6 Les insectes
Dans l'imaginaire publicitaire, la catégorie des insectes (figure D-187) n'est
pas celle que retiennent les biologistes: elle comprend plutôt l'ensemble des
petites bêtes qui piquent et broient, aspirent et taraudent; celles qui
détruisent les récol tes, comme les parasites.
La publicité s'est depuis longtemps plue à mettre en scène des insectes
comme le ver (figure D-188) ou la mouche (figure D-189). Sans cesse
bourdonnantes, tourbillonnantes et mordantes, les mouches et autres petits
moustiques sont des êtres insupportables qui se multiplient sur la
pourriture, colportent les germes de maladies et défient toute protection.
En Occident, l'araignée au ventre froid et aux pattes velues, guettant
et étouffant sa proie, évoque l'horreur et provoque généralement la
répulsion. Bien qu'elle soit synonyme de malediction, l'araignée est aussi le
symbole de la vie avec sa toile (figure D-190).
L'abeille (figure D-191) est infatigable; elle symbolise le travail, la
vie organisée et la discipline. En tant que membre d'une collectivité
laborieuse, elte rappelle cette union appliquée, organisée reprise par la
ruche d'abeilles (figure D- 192).
Familièrement, l'escargot (figure D-193) représente la lenteur, à
l'opposé de la fourmi qui fait montre d'une activité industrieuse, de vie
organisée et de prévoyiime. De son côté, la fourmi (figure D-L94)est le
symbole de la prévoyance et de la vie organisée.
II faut ranger le papillon (figure D-195) parmi les insectes qui
évoquent ia légèreté. Un autre aspect de son symbole est fondé sur ses
métamorphoses: la chrysalide et la chenille (figure D-t 96) incarnent les
potentialités de l'être; et le papillon qui en sort est un symbole de
transformation corporelle.
2.7 Le monde de l'eau
Plusieurs poissons et batraciens (figure D-197) sont présents dans
l'imagerie publicitaire: le pingouin (figure D-198), la tortue (figure
D-
199), la pieuvre (figure D-200), le poisson-scie (figure D-201)et le
poisson rouge (figure D-202).
Le poisson est un symbole de vie et de fécondité en raison de sa
prodigieuse faculté de reproduction et de l'abondance de ses oeufs. Les
poissons ne sont pas non plus sans rappeler les «histoires de pêche» (figure
D-203), la loi du plus fort (figure D-204), l'attrape-nigaud (figure D-205)
et la mauvaise haleine (figure D-206).
La baleine (figure D-207), le plus gros cétacé, suggère l'ampleur, la
démesure. Le dauphin (figure D-208) est un symbole de régénérescence
liée à celle des eaux où il vit et évolue avec aisance. Il incarne la grâce et
{'élégance.
Les piranhas (figure D-209) et les requins (figure D-210) ont été
élevés, par l'angoisse de quelques explorateurs et par des récits terrifiants,
au niveau d'un fantasme mythique qui en fait des carnassiers d'une extrême
voracité. II est d'ailleurs intéressant de noter la migration de la trace
requin. Comme dans le cas de la Joconde, le requin sert à toutes les causes:
croustiiles, restaurants, vêtements, voitures (Ford et Volvo), une ligne
aérienne, une chaîne de télévision et l'Ordre des Dentistes.
Les différentes phases de développement de la grenouille (figure D21 l), du têtard jusqu'au batracien, ont donné naissance à l'allégorie de la
transformation.
Les sirènes (figure D-212) sont de véritables monstres de la mer avec
tête et poitrine de femme.
C. STANDING ET PUBLICITÉ
Dans toute société industrielle, rappelle le sociologue Thorstein Veblen,
l'assise la plus fondamentale du bon renom, c'est la puissance +uniaire;
«cette consommation, on la retrouve dans la publicité du plus bas échelon
social au plus haut. Aucune classe de la société, même si elle se trouve dans
la pauvreté la plus abjecte, ne s'interdit toute habitude de consommation
ostentatoire» (Veblen, 1978).
S'il faut se fier au construit publicitaire, le style que procurent des
vêtements à la mode, un équipement de golf ou une nourriture recherchée
mettra n'importenc;2ià son aise en lui donnant l'impression qu'il fait
vraiment partie de l'élite. L'objet de prestige se distingue donc des autres
par ses caractéristiques propres. En toute logique, sa promotion doit
s'attacher A valoriser ses qualités spécifiques.
Sur le plan iconique, de nombreux signifiants conduiront à
l'expression de la richesse, de la noblesse ou du prestige. Le recensement
des éléments constitutifs des traces publicitaires conduit à un relevé des
caractéristiques propres à l'image pubiicitaire des produits de luxe: les
personnages, les objets, la marque, la culture, les espaces de la richesse, les
sports et les loisirs, et l'argent.
Le corpus révèle la présence de modèles archétypaux qui frappent
par leur variété. Mais les conditions nécessaires à la constitution d'un
produit ou d'un service de luxe apparaissent évidentes, sont presque des
clichés. De leur combinaison et de leur dosage vont naître les conditions
suffisantesh la naissance et au su&
1.
d'un produit.
Les personnages
La quasi-absence de personnages constitue une première caractéristique
importante de la publicite de luxe. On peut donc penser que la rareté des
personnages distingue les publicités relatives aux produits de luxe (bijoux,
briquets, stylos, montres, parfums) de ceUe des autres produits. Cette
absence de personnages et d'objets d'accompagnement met en valeur le
produit qui se détache grâce au jeu des couleurs du fond de scène.
Les publicités d'objets de luxe assignent à leurs propriétaires une
fonction spécifique. Ils sont aristocrates (figure D-213)ou adeptes de
I'équitation (figure D-214). Ils se distinguent radicalement des rôles
proposés aux présentateurs de lessive, par exemple. Ici, l'acteur social ne
sert pas de modèle; il incarne le bon goût, c'est un connaisseur qui valorise
la tradition et témoigne de la qualité du produit. L'objectif final consiste à
transformer Ie présentateur en «modèle», en «exemple» pour celui qui
regarde. Ensemble, ils constituent une famille de personnages actifs, y
compris dans le domaine artistique et sportif.
Les domestiques et les serviteurs (figure D-215)avec leur linge blanc
(figure D-216) et leur plateau d'argent (figure D-217) ont toujours une
grande importance. Leur nombre ayant diminué, ils ont aquis une valeur
plus élevée de symbole de la prospérité et de la puissance. Le vêtement
devient le moyen par excellence de se différencier. À ce titre, des études
ont montré que les séries télévisées sous-représentent les cols bleus et les
travailleurs manuels (Gerbner et Signorielli, 1982), de même qu'ils surreprésentent les millionnaires (Stein, 1982).
Le chic émane des vêtements et de l'attitude des personnages. Les
vêtements sont issus de la haute couture. Ils sont de qualité, rares et
exclusifs. Ce sont la chemise blanche (figure D-218),le complet foncé
(figure D-219),le noeud papillon (figure D-220)ou la cravate (figure D221) et le chandail de laine (figure D-222).Les accessoires sont également
choisis avec soin: bagues (figure D-223),bracelets (figure D-224),colliers
de perles (figure D-225)et diamant (figure D-226).
2. Les objets
La présence d'objets,. .toujours les mêmes, constitue une autre
caractéristique importante de la publicité de luxe. L'effet des objets est
renforcé par le dépouillement du fond: l'oeil ne peut se distraire. «La
valorisation du produit repose sur le jeu des contrastes entre la forme et le
fond. La présence de l'objet suffit à révéler son existence et à affirmer sa
spécificité.»
Parmi les objets de luxe et de statut sociaI les plus populaires
mentionnons l'encrier (figure D-227), le télescope (figure D-228), le buste
(figure D-229) et le marbre (figure D-230). Du côté de l'architecture,
mentionnons les statues (figure D-231), le château (figure 1)-232), les
colonnes (figure D-233) et le tapis rouge (figure D-234).
Plusieurs images associées au travail sont également mises en scène:
la plume (figure D-235), l'attaché-case (figure D-236),la carte d'affaires
(figure D-237), la carte Or (figure D-238), l'ordinateur portatif (figure D239), et à un niveau plus symbolique, le gratte-ciel (figure D-240) et
l'escalier (figure D-241).
Les différents moyens de transport servent également à exploiter
l'ambition sociale (Millum, 1975); les publicités montrent un avion (figure
D-242), un h y d v ~ i o n(figure D-243),une voiture décapotable (figure D244); d'autres utilisent une vieille voiture de collection (figure D-245)ou
une limousine (figure D-246). Ces voitures offrent plusieurs possibilités
pour atteindre l'obsédé de standing qui cherche à montrer son
particularisme. Il existe sûrement quelques individus pour qui l'automobile
est avant tout un moyen de transport. Pourtant, on ne le penserait pas en
regardant la trace publicitaire. On croirait plutôt que le rôle essentiel de la
voiture est de conduire son propriétaire vers une couche sociale supérieure
et de lui faire connaître l'ivresse de l'ascension. Par sa voiture qu'il aime
rutilante, l'automobiliste de la publicité concrétise son rang social: Jaguar
(figure D-247),Porsche (figure D-248), Ferrari (figure D-249), RollsRoyce (figure D-250) et Bentley (figure D-251).
Les bateaux concourent également à évoquer le rang social. Aussi le
produit publicisé sera-t-il accompagné d'un bateau miniature (figure D252) ou d'un voilier (figure D-253). D'autres objets symboliques à
connotation nautique comme la boussole (figure D-2%) et le sextant
(figure D-255) sont également utilisés. L'avion, qu'il soit moderne,
traditionnel ou d'entreprise, fait partie des objets qui confirment le statut
de l'utilisateur.
Aussi, les publicitaires épuisent toute les nuances de la gamme du
doré (figure D-256). Le pourpre célèbre le faste et le luxe. Les couleurs
foncées dominent incontestablement. Les personnages portent surtout des
toilettes aux couleurs assez éclatantes: blanc, rouge ou noir. Dans
l'environnement des produits annoncés, on note aussi la variété des formes,
des matériaux, la diversité des étiquettes et la différence des dirri-rnsions. Le
matériau contribue aussi bien à différencier le produit qu'à le valoriser. Le
verre, le bois, le marbre, la céramique, la porcelaine, la faïence et dans une
moindre mesure, le cuir, obtiennent la faveur des imagistes.
3. La marque
Contrairement aux produits de grande consommation, le produit de luxe est
hyper-personnalisé. Plusieurs produits coûteux ou raffinés affirment leur
identité par un nom prestigieux, une marque. La marque devient une
empreinte, une signature, un emblème et une griffe. La marque (figure D257) est l'image de l'entreprise. Elle devient en quelque sorte l'exemple
parfait de la réduction de l'objet à sa valeur de signe.
La marque se doit d'avoir une certaine histoire; c'est là seulement
qu'elle prend toute son amplitude, après s'être bien personnalisée. C'est
pourquoi le produit de luxe se pare de toute sortes de sceaux: blasons,
drapeaux, emblèmes, sigles, logotypes, sceaux ou papier d'emballage. En
fait, la marque est souvent la recherche d'une certaine image d'aisance.
C'est ainsi qu'à travers la marque se jouera tout le snobisme. La marque est
un sceau de garantie, un investissement affectif. «La fonction de la marque
est de signaler le produit, sa fonction seconde est de mobiliser les
connotations, les produits doivent susciter des attachements s'exprimant par
la fidélité à une marque (...). C'est Le miracle du iabel» (Baudrillard, 1%8:
267-268).
Quoi de plni-s brut qu'un logo, mais quoi de plus révélateur aussi. Il
révèle un nom (Calvin Klein), un attribut (Obsession), une indication de la
cible (Monsieur de Givenchy), le numéro du produit (NOS), une référence
à une couleur (Habit Rouge), l'exotisme (ivoire), un lieu (Paris), un temps
ou un moment heroïque (Vol de Nuit) ou la référence aux héros (Philéas).
Certaines traces vont plus bin et font jouer les premiers rôles à leur logo.
Plus qu'un simple clin d'oeil, elles deviennent le centre du discours
publicitaire.
4. La culture
Les images du corpus réfèrent souvent à des connotations valorisantes
relevant de la culture internationale comme Léonard de Vinci. Quelquefois,
des citations de grandes écoles enrichissent le visuel.
Un bon produit de luxe doit témoigner initialement d'un goût et
d'une culture. La trace doit projeter L'image de consommateurs ~cultivés~,
être riche d'un passé européen et d'une dducation conservatrice assumke
par les meilleures institutions.
Le renvoi permanent it la tradition témoigne d u culte des pratiques
d'autrefois. Ce «temps» rappelle des étapes clés de l'histoire: ère de
l'industrialisation, début du machinisme avec ses engrenages (figure D-258)
et ses chdnes (figure D-259).On insiste sur la qualité conférée par la
tradition, associant avec bonheur, dans l'image, le savoir-faire du passé.
À un second niveau, le culte du passé conduit à valoriser la culture
classique à travers des livres (figure D-260),des lettres (figure D-261),des
dictionnaires (figure D-262), une biblioiheque (figure D-263) ou un
journal (figure D-264),donc de la lecture (figure D-265).
4.1 L'art
L'art est mis au service de la trace publicitaire. L'image cumule les valeurs
défendues par le standing: appel à la cuIture, savoir-faire du passé, culte de
la tradition, prestige et rbférence <(discrète>>
à la richesse, à la tradition et à
l'excellence.
Le cas le plus simple est la citation visuelle. Depuis plusieurs années,
des images publicitaires adoptent des classiques de la peinture (figure D266). La trace introduit également deux variantes: on pastiche un style se
rapprochant des grands maîtres (figure D-267)ou on modifie une image
connue pour y insérer le produit (figure D-268).
Un autre procédé de pkeniation consiste à montrer l'objet dans un
musée ou dans une exposition ou encore à se référer de façon directe au
matériel d'artistes: un pinceau (figure D-269),des tubes (figure D-270)ou
une palette (figure D-271).
4.2 La musique
Les instruments de musique (figure D-272),spécialement les instruments à
corde comme k violon (figure D-273)et la harpe (figure D-274)occupent
un espace, tout comme Ies instruments à vent tels le saxophone (figure D275), la trompette (figure D-276),le trombone (figure D-277) et la
cornemuse (figure D-278). Le piano (figure D-279)est également dans la
trace publicitaire.
On peut aussi recourir à des objets, des scènes et des personnages
étroitement associés à la musique: feuilles de musique (figure D-280),
lutrin (figure D-281), ou des graphiques comme les clés de sol ou de fa
(figure D-282), une pochette de disque (figure D-283)et le concert (figure
D-284). Le balIet (figure D-285) est également une activité suggérant la
culture.
4.3 Le piaisir des sens
S'il est un sens qui sait faire apprécier ce qui est bon et désirable, c'est bien
celui du goût. Aussi, l'homme de standing déguste du champagne (figure
D-286). Verre à champagne ou à vin (figure D-287) et bouteille (figure D288) servent à éveiller le bon goût. Dans de telles occasions, on déguste
aussi du caviar (figure D-289), on joue aux échecs (figure D-290) et on
fume le cigare (figure D-291). On aime le champagne qui explose (figure
D-292) et on fait «tchin tchin» (figure D-293).
5. Les espaces de la richesse
Le Iuxe est rappelé par des espaces. Toutes ces références au goût sûr et
éprouvé, et à des lieux culturels renommés, servent de marqueurs spatiotemporels, particulièrement indiqués lorsqu'il s'agit de leur accoler des
bijoux, des uxantres, des vêtements et des parfums de luxe.
Dans le construit publicitaire, les gens qui ont réussi disposent de
lieux de repos et de propriétés secondaires: aussi assiste-t-on à une
survalorisation de la résidence cossue et rustique (figure D-294). Ces
paysages jouent un rôle important comme marqueurs spatio-temporels et
font partie des caractéristiques qui se présentent comme une spécificité.
11 ne faut pas oublier non plus les exotismes opulents: l'eau (figure
D-295),l'écurie (figure D-296) et l'opéra (figure D-297). Le casino joue
également un rôle important comme marqueur spatio-temporel. Dés
(figure D-298),roulettes (figure D-299) et tables de casino (figure D-300)
occupent la trace.
6. Les sports et les loisirs
En publicité, le sport est un style de vie. Toute une évolution se dessine qui
tend à placer certains sports comme éléments du standing ou, mieux, de
style de vie. 11 y a d'abord le tennis que rendent bien des images comme la
frappe (figure D-301) et la raquette (figure D-302). Il y aussi la pratique
de sports «nobles»ou de sports d'élite tels que l'escrime (figure D-303). Le
polo (figure D-304) est aussi repris par la trace publicitaire. Ces activités
fortement connotées socialement renvoient à des gens entraînés à
l'endurance, qui bravent les risques. Il y a le golf (figure D-305),
symbolisé par les bâtons (figure D-306),le trou (figure D-307), le drapeau
(figure D-308) et la balle (figure D-309).Le ski (figure D-310) fait
également partie des divertissements de l'homme respectable.
Les hommes appartenant aux catégories socioprofessionnelles de
référence bénéficient de privilèges certains. Ils disposent de temps. Leurs
conditions de nantis leur permettent d'échapper aux harcélements du temps
réglé et aux exigences du rendement. Ils jouissent déjà d'un avantage de
plus en plus convoité par les classes laborieuses: l'accroissement des
moments de loisirs. En outre, les utilisateurs de produits de luxe
appartiennent à une classe privilégiée capable d'assumer les dépenses
entraînées par la pratique de sports nobles.
7. L'argent
hidemrnent, les références directes à la monnaie (dollar, piastre, cent)
sont abondantes et les symboles qui évoquent directement l'argent sont
nombreux: la presse rotative qui imprime l'argent (figure D-31 l), le
papier-monnaie canadien (figure D-3 12), américain (figure D-3 13) et
étranger (figure D-314), le sou (figure D-315), la pile d'argent (figure D3 16), le lingot d'or (figure D-317), le chèque (figure D-318), la carte de
crédit (figure D-3 19) et le coffre-fort (figure D-320).
D'autres traces évoquent la richesse: Wall Street (figure D-321), La
bourse (figure D-322), un symbole boursier (figure D-323), le diagramme
avec courbe ascendante (figure D-324), la tirelire en forme de cochon
(figure D-325), le code barres (figure D-326), les signes arithmétiques
(figure D-327), l'organigramme (figure D-328), et à un niveau plus
symbo!iciue, la tarte (figure D-329) et le foin (figure D-330). La médaille
.
d'excellence (figure D-3311,le trophée (figure D-332) et le signe # 1
(figure D-333) sont d'autres allusions au succès.
D. CONCLUSION
Une première précision s'impose: partout dans la publicité, se manifeste
l'imaginaire. Visuellement, les présentations publicitaires de personnages
mythiques, consacrent la plus grande partie de l'annonce à l'image. Les
traces présentent des personnages fortement typés. Les figures mythiques
de la publicité sont traditionnelles. Le héros réapparaît sous plusieurs
formes: star d'hier et d'aujourd'hui, personnage fictif, personnage
institutionnel, personnages de la bande dessinée et animaux. La marginalité
des personnages est en général peu valorisée dans la trace. Elle est
considérée comme une anormalité à laquelle on ne peut se référer
décemment. Dans une grande quantité d'images, les personnages, seuls ou
en groupe, manifestent un désir évident de réussite et de succès.
Les images de statut et de standing partagent aussi des spécificités: on
présente peu d'objets, on laisse des espaces vides et on préfère des fonds
nus; bref, elles misent sur le dépouillement et les teintes élégantes qui
connotent la rareté et l'exclusivité. Pour mieux affirmer son exclusivité, le
produit se présente souvent seul. Règle générale, il occupe Ie devant de la
scène, en général en gros plan. Dans le cas contraire, les objets
d'accompagnement appartiennent à la même catégorie. Par ailleurs, la
publicité pousse sans cesse les gens à la poursuite de-symboles de réussite et
fait associer «possessions matérielles» à «position occupée dans la société».
En essayant de créer une demande pour leurs produits, les fabricants
ont inventé un cadre social imaginaire. La culture véhiculée par le niveau
neutre est caractéristique d'une société de luxe, de loisir et de volupté d'où
le travail demeure quasi absent. La trace écarte les conflits sociaux, ignore
les difficultés individuelles, dépeint une civilisation de facilité dans un
monde de rêve.
Conclusion
L'objectif de cette étude consistait à réaliser un exercice de reconstruction
des grandes configurations publicitaires à travers un corpus d'images
publicitaires de 1987 à 1997. 11 s'agissait de montrer qu'il est possible de
classifier les images publicitaires en un nombre restreint de catégories
exhaustives, comme un ensemble d'éléments iconographiques 5 la fois
culturels et sociologiques, à partir de ce que Molino appelle la nuce.
On a d'abord construit un modèle qui permettait de classifier,
moyennant quatre critères de reconnaissance et d'identification - temps,
espace, corps et imaginaire
- plus de 2 000 images publicitaires. Par la
suite, on a décrit ces images publicitaires. La pertinence de cette démarche
reposait sur un défi: la nécessité de produire une description de l'image
publicitaire comme entité singulière.
L'hypothèse de cette thèse était de nature exploratoire et touchait les
problèmes spécifiques reliés à l'analyse.
Ho.
La publicité procède à partir d'un modèle homogénéisant du
social et de la vie en société. Ce modèle construit une
représentation des acteurs et entretieitt l'image d'une
culture peu différenciée. Les principaux éléments de cette
représentation sont:
a)
Une omniprésence de la classe moyenne et de la
bourgeoisie; de la culture blanche, mâle de type nordaméricaine.
b)
C)
Une occultation de la réalité du travail et une absence de
conflits tant dans la sphère privée (famille, etc.) que
publique (politique, etc.).
En conséquence, présentation et survalorisation d'un
genre de vie harmonieux.
La difficulté de cette étude résidait d'abord dans la nécessité de produire
une description sémiologique sommaire de quelques milliers d'images
publicitaires. En laissant de côté l'étude des producteurs (agences de
publicité, graphistes, consultants), des récepteurs (consommateurs, lecteurs)
et des effets de la publicité, on était capable de classifier les éléments du
corpus et de découvrir ce que raconte la publicité sur la sociéti.
L'analyse thématique des contenus manifestes du discours publicitaire
a permis de déconstruire l'univers organisé mis en scène par la publicité et
de confirmer l'homogénéi~édes modèles que diffuse ce type de discours.
On constate que demère la multiplicité apparente des représentations,
l'image publicitaire participe d'un enjeu symbolique et mythique. Par sa
nomenclature thématique, la publicite assure la mise en place de l'espace,
du temps, du corps et de l'imaginaire construits. On a aussi constaté que
l'activité symbolique et mythique est essentielle dans cette dynamique des
représentations collectives.
*
Dans le chapitre 4, on a souligné les aspects marquants de la
temporalité dominante dans les images publicitaires et on a divisé Ia
recherche en quatre sections; le temps biographique, le temps historique, le
temps géré et le temps des rituels. On a montré qu'il existe en publicité une
multitude de temps, dont chacun a ses particularités propres. Ainsi, la
représentation sociale des individus reste différente selon l'âge. Par
ailleurs, la publicité est littéralement obsédée par les figures du temps.
Les représentations observées dans le chapitre 5 consacré à l'espace
rendent compte de la densité symbolique de la construction publicitaire.
Les figurations de l'espace établissent le cadre dans lequel se déroule le
récit publicitaire. L'espace construit garantit la vitalité et le développement
d'un contexte sans lequel les images publicitaires n'auraient aucune
signification.
Dans le chapitre 6, on a analysé tour à tour, la mise en scène du
corps, de l'image du corps masculin et féminin, du corps sexuel et de sa
«sportivation».L'analyse sociologique de la publicité a montré que le corps
marque la place de l'acteur social au même titre que le fait le temps ou
l'espace. Dans la trace, le langage non verbal constitue un aspect
significatif. Le construit publicitaire impose par exemple des normes
particulières de minceur, de musculature, d'exercice physique, d'étiquette
et de bon goût tant chez l'homme que chez la femme. Le corps renvoie
ainsi au discours culturel.
Dans le chapitre 7, on a montré qu'une grande partie de la mise en
scène est conçue en fonction d'un imagirialie. On a tout d'abord procédé à
un repérage des personnages représentés dans les images publicitaires personnages humains, stars, gens célèbres, personnages de contes et
légendes, personnages institutionnels, personnages fictifs, animaux, insectes
et poissons. Tous renvoient à un sens, immobilisé par une culture. Ils ont
quelque chose de classique; ils sont conformes au goût traditionnel. On s'est
aussi intéressé aux images de statut et de standing. On a montré qu'elles
partagent les spécificités suivantes: elles comportent peu d'objets, des
espaces vides, des fonds nus, bref, elles misent sur le dépouillement et les
teintes riches qui connotent la rareté et l'exclusivité.
Globalement, ce qui frappe dans notre corpus, c'est la standardisation
et le conformisme des images et des représentations publicitaires. En fait,
la trace publicitaire est plutôt décevante. Contrairement à une opinion
répandue, la publicité iconique ne semble pas très innovatrice. Le plus
souvent, on fait plutôt appel à un nombre restreint d'éléments figuratifs,
des métaphores stéréotypées et des clichés, par exemple, la plage, la famille
nucléaire ou un portrait de La Joconde. Le discours est conservateur et
l'audace n'est que très rarement au rendez-vous. Les thèmes sont
redondants et notre hypothèse se confirme: la publicité procède à partir
d'un modèle homogénéisant du social et de la vie en société. Ce modèle
construit une représentation des acteurs et entretient l'image d'une culture
peu différenciée. En conséquence, elle présente et survalotise un genre de
vie harmonieux. En ce sens, l'apport du créateur publicitaire se limiterait à
choisir et à combiner ces éléments symboliques et mythiques d'une manière
plus ou moins originale.
Par ailleurs, il semble que Les mythes et les symboles que l'on a
décrits dans le développement conditionnent à leur tour des images plus
réduites qu'ils font briller, qu'ils colorent et qu'ils actualisent. 11 est
d'ailleurs assez vain de chercher comment ces mythes et ces symboles
apparaissent ou se diffusent. L'actualité se renouvelle toujours. Le mythe
du héros réapparaît dans toutes les mythologies et sous toutes les formes:
star d'hier et d'aujourd'hui, personnage fictif, personnage institutionnel, de
la bande dessinée et animaux. Ce n'est qu'affaire de circonstances,
d'occasions ou de rencontres. Mais bien vite, il faut passer au symbole
suivant, car le mythe ne peut rester longtemps figé dans sa forme initiale,
au risque de devenir graduellement décevant et banal.
Ce qui étonne également dans le corpus, c'est la façon avec laquelle
le niveau neutre est fait pour dire quelque chose, pour signifier, au sens
propre du terme. En raison des limites de cette recherche, il semble
toutefois nécessaire de circonscrire les conclusions auxquelles on est
parvenu. D'abord, il y a lieu de délimiter les considérations sur l'image
publicitaire à une époque précise, soit de 1987 à 1997. Ensuite, le milieu
géographique - l'Occident - impose à son tour certaines réserves quant a
la possibilité de généraliser de telles conclusions. Aussi faut-il rappeler que
cette recherche s'est tout particulièrement attachée à l'étude de l'image
publicitaire fixe, délaissant par le fait même toute analyse de la publicité
télévisée ou du texte de la publicité imprimée dans les quotidiens; bref,
c'est un aspect et un seul de la publicité qui a ainsi été analysé. Pour
reprendre les sociologues Goldman et Papson, nous réalisons que le
roulement des campagnes de publicité s'accélère, la demi-vie des symboles
raccourcit, le chaos des images grandit, produisant une nouvelle forme de
«déchet culturel».
I
_
On peut imaginer plusieurs prolongements à cette étude.
A un
premier niveau, une recherche pourrait commencer par une enquête auprès
des producteurs de la communication publicitaire ou des récepteurs, afin de
confirmer ou d'infirmer les conclusions de notre étude. Par ailleurs, il
conviendrait d'approfondir l'aspect sociologique de l'espace, du temps, du
corps et de l'imaginaire dans la société. Dans cette perspective, les
symboles publicitaires, leur formation, leur diffusion, leur changement et
leur proportion pourraient faire l'objet d'études. On pourrait aussi
s'intéresser à des discours spécifiques, celui de l'Italie ou du Japon, par
exemple. On pourrait enfin tenter d'établir des comparaisons entre les
discours publicitaires de l'Europe et de l'Amérique, du nord et du sud, des
années vingt et soixante, etc. Dans la même lignée, il serait possible de
comparer la trace d'une même campagne publicitaire selon qu'elle est
diffusée dans un pays ou dans un autre.
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Annexe A: Le temps
VERS UNE ANALYSE SOCIOLOGIOUE
DE LA PUBLICITÉ ICONIOUE: 1987-1997
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