
Forum Med Suisse 2010;10(23):398–402 402
curriculum
analyse biochimique des voies métaboliques muscu
laires, microscopie électronique). Si par exemple l’im
munohistochimie d’un patient atteint d’une dystrophie
musculaire révèle la déficience d’une protéine de struc
ture musculaire (telle que la dystrophine, la dysferline,
la calpaïne3, la cavéoline3 ou une sarcoglycane), on
peut directement continuer l’investigation par une ana
lyse génétique ciblée du gène codant [7].
Dystrophie musculaire avecfaiblesse musculaire
à prédominance distale
Les myopathies distales «classiques» (fig. 1B x) pré
sentent également une grande hétérogénéité sur le plan
génétique. Les myopathies de Nonaka (qui débutent
dans les muscles releveurs du pied) et de Miyoshi (qui
débutent dans les muscles fléchisseurs du pied), se ma
nifestent pendant la 2eou la 3edécade de vie et sont
transmises sur le mode autosomique récessif. La myo
pathie de Nonaka est due à des mutations dans le gène
GNE. La myopathie de Miyoshi s’accompagne d’une
forte élévation des valeurs de CPK et présente les signes
histologiques caractéristiques d’une dystrophie muscu
laire (fig. 6 x); elle provient de certaines mutations
dans le gène codant pour la dysferline.Lamyopathie de
Welander est une maladie autosomique dominante
dont le gène est encore inconnu et qui débute dans les
muscles extenseurs de la main; elle ne se manifeste
qu’à l’âge mûr (entre la quarantaine et la soixantaine)
et affecte presque exclusivement la population sué
doise. La myopathie de MarkesberyGriggsUdd (due à
certaines mutations dans le gène codant pour la titine
ou dans le gène ZASP) débute quant à elle dans les
muscles releveurs du pied (fig. 7 x). Ces myopathies
distales tardives ont souvent des valeurs de CPK sé
rique normales ou seulement légèrement augmentées.
Du point de vue pathologique, on les classe parmi les
myopathies héréditaires à inclusions en raison des va
cuoles bordées («rimmed») caractérisant leur substrat
histopathologique [8]. Toutefois, lors de l’histopatholo
gie, il arrive souventque l’immunohistochimie mette en
évidence d’autres agrégats de protéines intracellu
laires, comme c’est le cas dans les myopathies myofi
brillaires (MMF) suscitées par certaines mutations dans
le gène ZASP ou dans les gènes codant pour la desmine
ou la myotiline (fig. 7). Des points de vue clinique et pa
thologique, les MMF (à début le plus fréquemment dis
tal également) se recoupent considérablement avec les
myopathies distales [9] classiques. Dans les myopathies
distales, l’indication diagnostique primordiale repose
en général sur une biopsie musculaire avec mise en
évidence d’un déficit en dysferline, de vacuoles bordées
ou encore d’agrégats de protéines desminepositives. A
partir de cette biopsie musculaire et du phénotype
clinique, on pourra cibler les gènes qu’il faut analyser.
Manière de procéder dans l’examen
génétique de la dystrophie musculaire
Pour pouvoir mettre en œuvre un diagnostic génétique
précis de façon efficace, il faut absolument effectuer en
premier un examen clinique très minutieux du patient et
classer la maladie selon son phénotype clinique. Avant
de procéder àlabiopsie, et malgré le fait qu’elle s’avère
nécessaire en général, il faudrait identifier les phéno
typespour lesquelsilest impossible de poserundiagnos
tic génétique indirect par biopsie musculaire, et pour les
quelsilfaut avoir recours àuntest génétique direct. En
présence de faciès myopathique, de faiblesse distale des
membres et de myotonie àl’examen clinique ou électro
physiologique, il devrait être relativement aisé de diag
nostiquer une dystrophie myotonique (Curschmann
Steinert) (fig. 1C et 2), qui est la dystrophie musculaire la
plus fréquente chez l’adulte. Il est plus difficile d’identi
fier les patients avec une dystrophie musculaire facio
scapulohumérale (FSHD) car cette maladie, qui est au
deuxième rang des dystrophies musculaires chez
l’adulte, est souvent confondue en pratique avec la dys
trophie musculaire des ceintures. En cas de myopathie
faciale prononcée et de faiblesse musculaire marquée au
niveau de la ceinture scapulaire, des bras et des muscles
releveurs du pied, il faut penser àune FSHD (fig. 1D et 3).
Lorsqu’un patient présente une faiblesse musculaire
dont le phénotype rappelle la LGMD et que le caractère
proximal est manifeste, une biopsie musculaire est géné
ralement inévitable. Les biopsies musculaires doivent
absolument être interprétées dans un laboratoirespécia
lisé dans le diagnostic desbiopsies musculaires, dispo
sant de l’infrastructure nécessaire pour effectuer,lecas
échéant, d’autres examens spécialisés comme l’immu
nohistochimie ou le western blot. Si l’immunohistochi
mie révèle, chez les patients avec dystrophie musculaire,
le déficit d’une protéine de structure du muscle comme
par exemple la dystrophine ou les sarcoglycanes, on peut
la compléter ensuite par une analyse génétique ciblée du
gène codant. La biopsie musculaire est en général égale
ment l’examen intermédiaire décisif chez les patients
dont la faiblesse musculaire présente une prédominance
primaire distale. En cas de déficience en dysferline, ou
en présence de vacuoles bordées ou d’agrégats de pro
téines desminepositives, cet examen permet de tirer
certaines conclusions concernant l’anomalie génétique
responsable de la maladie de base, en tenant compte de
l‘âge auquel la maladie s’est déclarée et des principaux
groupes musculaires impliqués sur le plan clinique.
Correspondance:
PD Dr Dirk Fischer
Neurologische Klinik
Universitätsspital Basel
Petersgraben 4
CH-4031 Basel
et
Abteilung für Neuropädiatrie
Universitätskinderklinik beider Basel
CH-4005 Basel
Références recommandées
–Fischer D. Klinische und bildgebende Differenzialdiagnose von Glieder
gürteldystrophien. Klin Neurophys. 2006;37:180–8.
–Emery AE. The muscular dystrophies. BMJ. 1998;317(7164):991–5.
–Thornton C. The myotonic dystrophies. Semin Neurol. 1999;19(1):
25–33.
–Tawil R, van der Maarel SM. Facioscapulohumeral muscular dystro
phy. Muscle Nerve. 2006;34(1):1–15.
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