Rapport de stage - ENSTA ParisTech

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ENSTA ParisTech
1ère année
Rapport de stage
Coursière au Service d'Accueil des Urgences
Hôpitaux Civils de Colmar
rédigé par
Pauline HUSSEINI
Promotion 2014
relu par Sophie
Date de rendu : lundi 8 octobre 2012
HERMITE
Rapport de stage en tant que coursière au SAU des HCC
Table des matières
Introduction
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Présentation des HCC
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1.1 Les HCC en chires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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1.2 Les HCC, quels soins ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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1.3 Petites remarques architecturales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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1.4 Présentation de quelques lieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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Présentation du SAU
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2.1 Organisation du SAU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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2.2 Plan du service . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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2.3 Le SAU en chires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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L'équipe du SAU
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Mon expérience
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Mes impressions
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5.1 Les Urgences, quels problèmes ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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5.2 Une lumière au bout du tunnel ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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2
Conclusion
ENSTA ParisTech
2012
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2
Si je vous dis lit au carré , à quoi pensez-vous ?
A l'armée ? Non, ce n'est pas ce qui me vient à l'esprit...
Un indice : ce n'est pas pour rien que la traduction anglaise est
to make a bed with hospital corners .
Introduction
Je suis restée en France pour eectuer mon stage opérateur. Mais, si je ne suis pas partie à
l'autre bout du monde, je suis néanmoins allée à la découverte d'un milieu tout à fait singulier
puisque j'ai eu l'opportunité de travailler au Service d'Accueil des Urgences, dit SAU, des Hôpitaux Civils de Colmar (HCC). Comme je sais bien que mon prochain rendez-vous aux Urgences
sera très probablement dans la conguration allongée sur un brancard , c'est avec une curiosité
non dissimulée que je m'y suis rendue chaque jour, d'autant plus que c'est un lieu qui est sujet
à débat... Je vous invite à déambuler avec moi au c÷ur de cette ville dans la ville.
Nota Bene . Dans toute la suite du rapport et pour une plus grande lisibilité, je noterai
SAU pour désigner le Service d'Accueil des Urgences et HCC pour désigner les Hôpitaux Civils
de Colmar.
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Présentation des HCC
1.1 Les HCC en chires
Nota Bene . Les chires de cette section sont extraits du rapport de gestion de 2010.
L'hôpital dans lequel j'ai travaillé ne fait certes pas parti des Centres Hospitaliers Universitaires (CHU), qui ont tendance à attirer les feux de la rampe de par leur structure qui combine à
la fois un hôpital et une université, mais est tout de même une structure très importante. Avec ses
1 387 lits, 37 853 patients et 60 113 séjours à l'année, il faut compter un personnel considérable
pour faire marcher la mécanique. Qu'ils soient dans le domaine médical ou non, ce sont en tout
et pour tout 3 607 employés qui gravitent autour des patients.
Il faut bien avoir conscience que les emplois ne se réduisent pas au personnel médical et
soignant : comme je l'ai dit précédemment, l'hôpital est une ville dans la ville. On y croise donc
tout aussi bien des électriciens que des médecins, des agents de blanchisserie que des inrmières
et inrmiers, j'en passe et des meilleurs.
Juste dans le but de vous donner une idée de l'organisation gigantesque qui se cache dans les
entrailles d'un hôpital comme celui-ci, il faut imaginer que ce sont près de 1 800 tonnes de linge
lavé et plus de 800 000 repas servis par an. Question d'argent, on ne parle assurément pas de
chire d'aaire dans cette situation mais de budget annuel, celui-ci étant chiré à un peu plus
de 260 millions d'euros.
1.2 Les HCC, quels soins ?
Que les personnes qui habitent près des HCC et qui espèrent y trouver un accueil adapté à
leur maladie se rassurent : ces hôpitaux font plutôt bonne gure puisque les pathologies prises
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en charge au sein de l'établissement représentent 95 % des pathologies recensées (d'après le
compte-rendu d'accréditation des HCC).
1.3 Petites remarques architecturales
Les HCC sont composés de trois sites distincts géographiquement :
l'Hôpital Pasteur pour la prise en charge des adultes
le Centre de la Mère et de l'Enfant, dit le Parc
le Centre pour Personnes Agées
L'intégralité de mon stage s'est déroulé au sein de l'hôpital Louis Pasteur qui est dit de type
semi-pavillonnaire : les diérents services hospitaliers sont répartis dans diérents bâtiments appelés pavillons. Conséquence très directe d'une telle gestion de l'espace, l'hôpital est très étendu
en surface puisque celle-ci est évaluée à onze hectares ! Pour permettre une liaison ecace entre
les services, de nombreux tunnels percent le sous-sol et orent la possibilité de relier quasiment
n'importe quel point à un autre sans mettre le nez dehors. C'est pratique pour le personnel mais
aussi, et surtout, pour les patients, qui de fait sont toujours au chaud. Un autre avantage d'une
telle structure est la place laissée au parc. Bien entretenu, euri et aménagé, il donne la possibilité
aux patients de sortir un peu de leur chambre et d'assister à l'atterrissage et au décollage des
hélicoptères, véritable attraction.
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1.4 Présentation de quelques lieux
Je souhaite vous familiariser tout particulièrement avec les lieux que j'ai eus à fréquenter
le plus souvent au cours de mon stage et qui mettent en relief l'idée d'une ville dans la ville.
J'indique entre parenthèses le numéro correspondant au plan des HCC.
Le laboratoire d'analyse médicale (bâtiment 19). C'est vers ce bâtiment que convergent
tous les prélèvements eectués (sang, urines ...) par les services de l'hôpital. 1
Le magasin central (bâtiment 45 sous-sol). C'est ici que tout le matériel hors médical est
stocké. On y cherche par exemple les feuilles, les cartouches d'imprimante, les feutres pour tableau blanc, les agrafes...
Le magasin laboratoire (bâtiment 19 sous-sol). Y est stocké le matériel pour le laboratoire.
Cependant les services peuvent aussi venir récupérer des produits : j'y suis par exemple allée
chercher des tests pour le tétanos, ou encore un stock de sachets dans lesquels sont placés les
prélèvements.
La pharmacie (bâtiment 28).
La CAMPS (bâtiment 10 sous sol). Dite aussi la sté , on y vient chercher tout le matériel
qui se doit d'être stérile : seringues, compresses,...
Le bioméd (bâtiment 48). Ici se trouvent les docteurs des machines . Autrement dit,
la quasi totalité des appareils défaillants, médicaux ou non, sont amenés ici pour être réparés.
Ils sont ramenés au service lorsqu'ils sont à nouveau en état de marche.
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Présentation du SAU
2.1 Organisation du SAU
Pour vous xer le décors : le SAU accueille tout patient se présentant spontanément ou adressé
par son médecin traitant, quelque soit la pathologie posée, sa gravité et son stade d'évolution.
La priorité est donc donnée au soin.
Il
se divise en trois grandes sections :
la médecine (malaises,...)
la traumatologie (sutures, plâtres,...)
l'Unité d'Hospitalisation Courte Durée (UHCD)
Si les deux premières sections sont assez connues du grand public, on parle moins souvent de
l'UHCD. Le but de cette unité est d'éviter des hospitalisations inadaptées ou conventionnelles.
Elle reçoit les patients nécessitant une période d'observation avant retour à domicile ou orientation sur un service spécialisé. Le SAU est ouvert toute l'année, à toute heure de la journée.
1. Petite remarque en passant : il n'aura pas échappé à votre ÷il attentif que le laboratoire d'analyse médicale
a le bon goût d'être à l'autre bout du parc par rapport au SAU (bâtiment 39)...
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2.2 Plan du service
Les parties propres respectivement à la traumatologie, à la médecine et l'UHCD sont séparées,
chacune ayant une salle dite PC a priori pour Poste de Commande. On parle donc du PC
médecine , PC trauma ou PC UHCD . Le personnel soignant et médical se retrouve dans
ces salles pour entrer sur le serveur les données concernant chaque patient.
La médecine dispose de cinq boxes (i.e. salles d'examens), l'UHCD de six chambres et la traumatologie de cinq boxes ainsi que de trois salles de suture et plâtre. Une pièce est aussi dédiée aux
problèmes ORL (Oto-Rhino-Laryngologie). La médecine et la traumatologie possèdent chacune
de surcroît une salle dite de déchocage . Celles-ci, plus vastes que les boxes traditionnels, sont
principalement destinées à accueillir les cas les plus graves. Les exemples frappants auxquels j'ai
assisté sont une crise d'épilepsie, un accident vasculaire cérébral, et des accidentés de la route.
Ces salles sont aussi utilisées en temps normal pour des cas moins dramatiques, mais elles sont
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très rapidement libérées si c'est une nécessité. La salle de plan blanc n'est (normalement)
utilisée qu'en cas de très grande auence (épidémies par exemple), mais elle est en réalité occupée plus souvent que ces situations ponctuelles du fait de la trop grande auence de personnes.
Sont aussi présentes des salles pour divers examens : radios, scanner, IRM. Le reste de l'espace
est occupé par des pièces de rangement de matériel, des bureaux et une salle de détente où les
membres du service peuvent venir prendre un café ou grignoter quelque chose.
2.3 Le SAU en chires
Voici, sous forme de graphes, les principaux chires de fréquentation des Urgences de Colmar.
Y gurent le nombre total de passages au SAU ainsi que sa décomposition, à savoir combien sont
attribués à la médecine et combien à la traumatologie.
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Les Urgences, une porte d'entrée pour les hospitalisations ?
Toute personne qui se présente au SAU est prise en charge. Mais ensuite, est-elle souvent hospitalisée ou bien retourne-t-elle à domicile ? Le bruit qui court avance que la première de ces deux
hypothèses est vraie. Cependant les chires montrent plutôt une tendance contraire : la majeure
partie des gens qui arrivent aux Urgences retournent chez eux. Petite remarque en passant : la
traumatologie ne représente que 10% des hospitalisations du SAU.
Y a-t-il des journées de haute fréquentation ?
Soyons honnêtes : il n'y a pas vraiment de journée où la fréquentation du SAU peut être qualiée
de basse puisque c'est en moyenne 129 personnes qui arrivent chaque jour. Un petit pic est
néanmoins observable le 27 Décembre, lendemain de la Saint-Étienne. Une explication rationnelle
réside dans le fait que la Saint-Étienne est jour férié en Alsace, contrairement au reste de la
France où il ne l'est plus depuis 1905. L'Alsace était alors allemande, et, redevenue française
en 1918, les Alsaciens n'ont pas voulu abandonner ce privilège. C'est donc un jour de fête tout
particulier puisqu'il prolonge Noël. Et qui dit fête, dit lendemain peuplé aux Urgences. A vrai
dire je m'attendais à voir ce pic plutôt le jour de l'an, ce qui n'est nalement pas le résultat
observé... tout au moins pour le passage de 2011 à 2012 !
La fréquentation des Urgences ne cesse d'augmenter : mythe ou réalité ?
Pour répondre à cette question ecacement, il sut de jeter en regard au graphe suivant.
On constate bien qu'au court des dix dernières années, la fréquentation a véritablement augmenté, avec toutes les conséquences que cela entraîne au niveau de l'organisation du SAU qui
sont évoquées infra.
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L'équipe du SAU
Je pense que tout le monde s'imagine, de manière assez peu erronée, le travail d'un ambulancier, d'un aide-soignant, d'un inrmier ou d'un médecin. Mais quand je suis arrivée pour la
première fois à l'hôpital et qu'on m'a demandé si j'allais travailler en tant que ASH, je vous
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avoue que je n'ai pas compris la question.
ASH signie Agent des Services Hospitaliers. Ces personnes, coordonnées par une monitrice
hôtelière sont responsables de l'entretien des locaux, de l'hygiène et de faire les courses . Le
sens commun ne trompe pas : faire les courses, cela veut dire, entre autres, aller dans les diérents
magasins de l'hôpital. Mais plus généralement, c'est le transport de matériel entre le SAU et les
autres services de l'hôpital, qu'ils soient logistiques, administratifs, économiques ou techniques
(des exemples concrets sont donnés plus loin). En réalité, chaque jour et à tour de rôle, l'une (il
n'y a que des femmes dans l'équipe de jour) des ASH avait l'horaire dit courses . Je détaille
cet horaire plus bas, puisque c'est le travail que j'ai eectué pendant mes quatre semaines.
Les autres membres de l'équipe, deux ASH le matin et deux l'après-midi, se répartissent l'entretien du service, en suivant les protocoles indiqués dans le classeur du Comité de Lutte contre les
Infections Nosocomiales, dit classeur CLIN. Y sont indiquées toutes les étapes pour un nettoyage
ecace : quel produit utiliser, quand changer de chions, dans quel ordre laver les surfaces... Tout
y est détaillé jusqu'à aboutir à une classication des locaux de l'hôpital en plusieurs zones selon
l'entretien qui doit y être eectué. Les Urgences sont en zone 2, autrement dit un bionettoyage
(nettoyage dont le but est de réduire la quantité de micro-organismes sur les surface) quotidien
doit y être eectué.
Les inrmiers peuvent travailler dans le service même ou bien avoir une étiquette un peu
particulière : SMUR ou IAO. L'inrmier SMUR (Service Mobile d'Urgence et de Réanimation),
comme son nom l'indique, est amené à se déplacer avec les ambulances et à prodiguer les premiers
soins sur place aux côtés d'un médecin. L'inrmier IAO, ou Inrmier d'Accueil et d'Orientation,
se touve à l'accueil, aux côtés des secrétaires qui remplissent les dossiers des patients. Ses rôles
sont entre autres d'assurer la réception de tout patient et tout parent et leur installation, de
faire l'interface entre la zone de soin et la salle d'attente et surtout d'établir les priorités entre
patients. En somme, le premier tri a lieu dès l'arrivée au SAU.
Le personnel présent, en ETP (Équivalent Temps Plein) 1 ou en personnes physiques selon
les données que j'ai récoltées, se répartit de la manière suivante :
Inrmier(e) Diplômé(e) d'État : 59,95 ETP (68 personnes physiques)
Inrmières psychologue : 6,7 ETP
ASH : 13 ETP
Secrétaires : 9,3 ETP (10 personnes physiques)
Médecins : 18 personnes physiques
Internes : 8 personnes physiques
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Mon expérience
Pendant ces quatre semaines, j'ai endossé la blouse verte des ASH, plus précisément en tant
que coursière. Cela revient avant tout à transporter les prélèvements au laboratoire d'analyse
médical, chercher du sang à l'Établissement Français du Sang (EFS), chercher du matériel dans
les diérents magasins décrits plus haut, amener des radiographies dans un autre service ou au
bloc opératoire. Les courses que j'avais à eectuer étaient déposées dans une bannette spécique
au PC Médecine. Le moyen de transport pour eectuer tous ces déplacements ? Le vélo ! Cela
évite de perdre trop de temps dans les nombreux va-et-vient. La circulation est possible en extérieur (si le temps s'y prête) ou dans les souterrains.
1. L'ETP représente le nombre de personnes qui travailleraient si toutes étaient en temps plein. Par exemple
deux personnes à mi-temps représente 1 ETP.
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J'avais comme compagnon de travail un bipeur, avec qui j'avais rendez-vous chaque jour de
9h30 à 17h30. Je m'en séparais de 13h à 13h30, le temps d'aller déjeuner : pendant ce laps de
temps, le relais était assuré par une autre personne de l'équipe des ASH. Ce bipeur me rendait
joignable à tout moment. Il produit deux sonneries diérentes. La première m'informait qu'un
prélèvement venait d'être déposé dans la bannette. La seconde m'indiquait que quelqu'un essayait
de me contacter : il me susait alors de trouver un téléphone (tâche assez facile à réaliser puisque
des téléphones sont installés quasiment partout dans l'hôpital) et de composer un numéro propre
à mon bipeur pour avoir au bout du l la personne qui cherchait à me joindre.
En ce qui concerne les prélèvements à destination du laboratoire d'analyse médicale, deux
cas sont à distinguer :
pour les prélèvements standards : le bip me signale qu'un prélèvement est dans la
bannette. Il faut ensuite noter sur la feuille de demande d'analyse qui accompagne le
prélèvement l'heure à laquelle je quitte le service. Puis arrivée au laboratoire, se trouve un
système de pointage pour horodater l'arrivée du prélèvement. Celui-ci est ensuite déposé
dans une bannette spécique au SAU pour être traité dans les délais les plus brefs.
pour un Accident Vasculaire Cérébral (AVC), la procédure change légèrement. Tout d'abord
je suis contactée par téléphone par un inrmier (et pas simplement par le bip) pour la simple
raison qu'un AVC est de plus haute priorité que les autres prélèvements. Le laboratoire
est prévenu de mon arrivée et je dois émarger un cahier spéciant l'heure d'arrivée du
prélèvement.
Une journée typique de travail commençait donc par allumer le bipeur, relever la température des deux réfrigérateurs au PC de Médecine et en salle de déchocage trauma. Ce contrôle
est quotidien puisque la température ne doit pas s'écarter d'une valeur donnée pour assurer la
bonne conservation des produits qui s'y trouvent.
Il faut ensuite préparer le chariot avec tous les produits d'entretien : détergent-désinfectant (dit
DD), javel, chionnettes, balais, gants, crème à récurer, gazes (tissu légèrement gras ou électrostatique qui capte la poussière sans la remettre en suspension dans l'air)... Puis vient l'heure du
ménage quotidien des chambres des ambulanciers SMUR au nombre de deux et des chambres
de garde des médecins et internes, au nombre de six. Il consiste à vider les poubelles, nettoyer
les sanitaires (douche, lavabo, WC), les dessus et les sols. Pour les six chambres de médecins, il
faut aussi changer le lit tous les jours puisque les personnes de garde ne sont jamais les mêmes.
Autant vous dire que, dorénavant, je maîtrise la technique du lit au carré !
Cela peut sembler être un programme assez paisible et linéaire mais en réalité, je suis de nombreuses fois sollicitée entre-temps pour les courses, qui sont, en toute logique, toujours eectuées
en priorité. Il m'est ainsi arrivé de ne pas nir le ménage avant la pause déjeuner ! L'après-midi
est alors destiné à terminer le ménage non-eectué dans la matinée, à faire les courses et à entretenir les brancards et fauteuils roulants des Urgences.
Concernant le ménage, je n'ai pas eu à le faire dans le reste du service puisque pour cette zone, où
le patient est présent, de trop nombreux protocoles du classeur CLIN auraient été à apprendre :
cela n'en valait pas la peine pour seulement quatre semaines.
Pour m'aider à prendre mes repères, j'ai été doublée le temps d'une semaine par une ASH.
Comme c'était une personne diérente chaque jour, cela m'a tout d'abord permis de rencontrer
l'équipe assez rapidement. De plus j'avoue que, durant les deux premiers jours surtout, j'étais
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bien heureuse que quelqu'un fasse les trajets avec moi puisque, d'une part, l'hôpital est assez
grand et que, d'autre part, mon sens de l'orientation est assez proche du néant. Mais nalement
les autres ASH m'ont très vite fait conance et laissé la tâche de faire les courses toute seule dès
le troisième jour. Elles ont cependant toujours été disponibles pour me donner des informations
quand j'en avais besoin et cette aide m'a été très précieuse.
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Mes impressions
5.1 Les Urgences, quels problèmes ?
Je pense que personne ne peut jouer la surprise si j'avance l'idée selon laquelle l'un des problèmes majeurs des Urgences est lié au temps d'attente de certains patients, parfois (et plus
souvent qu'il ne faudrait) dans les couloirs qui deviennent alors une véritable annexe du service.
A tel point que, dans la base de données informatisées, couloir devient un lieu de localisation d'un patient lambda au même titre que box 1 . Mais à qui la faute ? Un nombre trop
important de personnes viennent aux Urgences sans vraiment nécessiter de tels soins. Et que
dire des personnes qui préfèrent éluder la case médecin traitant et venir directement à l'hôpital ? C'est d'autant plus dicile à gérer pour le personnel, avec le risque, dans cette multitude
d'arrivées, de passer à côté d'une vraie urgence. Les gens qui attendent ne se rendent pas toujours (pour ne pas dire pas souvent) compte que s'ils attendent, c'est que leur état le leur permet.
Ce qu'il faut aussi comprendre c'est qu'il n'est en aucun cas imaginable, étant donnée l'afuence importante à laquelle doit faire face le SAU, qu'un box soit bloqué pour un patient en
attente de résultats. Dans le but d'assurer une prise en charge dans les meilleurs délais pour
chaque patient, les boxes sont utilisés pour les examens à proprement parler, tandis que les personnes en attente de résultats sont installées dans les couloirs.
De plus, vu la diversité des pathologies traitées au SAU, la prise en charge peut comporter en
plus de l'examen clinique, la prescription d'examens de laboratoires, ou de radiologie. Puis, vient
une période qui, en toutes circonstances de notre vie est assez pénible : l'attente des résultats.
Et à ce stade, il convient de rappeler que cela ne s'obtient pas en un claquement de doigt : c'est
entre 30 et 70 minutes de patience pour obtenir les résultats d'une prise de sang, 15 à 40 minutes
pour une radiographie simple, 15 à 120 minutes pour une échographie, un scanner ou un IRM
selon le degré d'urgence. C'est pour cette raison que la période d'attente dans le couloir peut
vite devenir assez longue.
Peut-être que le faible coût qui leur est demandé à la sortie rend les personnes moins frileuses
à passer un certain temps aux SAU : les gens sont accueillis, sans rendez-vous, quelles que soient
leurs pathologies, le tout en ayant à payer le tiers payant. A ce stade, un petit point historique
s'impose. Certes, le reste de la France jalouse les deux jours fériés supplémentaires de l'Alsace,
mais il peut en être de même du système d'assurance maladie. En eet, celui-ci couvre plus
largement le salarié alsacien et mosellan, ceux-ci ayant hérité du système d'assurances maladie
du Chancelier Bismarck. Dans les faits, le régime complémentaire obligatoire d'assurance maladie d'Alsace et de Moselle, dit régime local par opposition au régime général valable
dans le reste de l'hexagone, assure à ses bénéciaires des prestations avantageuses aux taux de
remboursement nettement plus favorables. Par exemple, les médicaments vignettes bleues sont
remboursés à 80% contre 30% dans le reste de la France, les frais d'appareillage à 90% contre 60%,
les honoraires médicaux à 90% contre 70% et 100% des frais hospitaliers sont pris en charge. Bien
évidemment cela a un coût : une cotisation salariale supplémentaire xée à 1,5% est demandée.
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Une petite remarque fort intéressante : on pourrait très bien se dire plus de remboursement
donc un plus grand trou dans les comptes de la Sécurité Sociale . Figurez-vous que c'est tout
le contraire : le régime local est excédentaire, ce qui permet de diminuer d'année en année la
cotisation salariale.
De fait, on demande à la sortie des Urgences 6,90e aux personnes sous le régime général (remboursement à 70%) et 2,30e (remboursement à 90%) à celles sous le régime local. A cette somme
s'ajoutent les éventuels examens complémentaires, comme les radiographies, scanners, IRM....
Quand on voit la faible participation nancière que cela représente, c'est assez frappant d'observer l'attitude consumériste de certains patients. Cela peut se résumer au leitmotiv tout, tout
de suite et sans payer ce serait encore mieux .
Cela me conduit à un autre aspect : il ne me semble pas improbable qu'à l'Assistance Sociale
se substitue l'Assistanat Social dans l'opinion générale. De fait, le problème de l'auence aux
Urgences et de l'attente me semble tout à la fois être un problème structurel et sociétal.
D'un tout autre point de vue, j'ai été quelque peu scandalisée par le gaspillage alimentaire.
Bien entendu, les repas des patients, même ceux qui n'ont pas été ouverts, sont systématiquement jetés après être entrés dans la chambre du malade. Mais il faut aussi compter les repas des
médecins de garde. Ainsi, et très fréquemment, se retrouve mise à la poubelle une quantité assez
phénoménale de denrées alimentaires. Le contraste était frappant entre ce gaspillage intempestif
et les aches placardées de-ci de-là qui nous expliquent qu'il faut veiller à ménager le budget de
l'hôpital.
L'un des autres problèmes récurrents du SAU est celui du nombre de lits disponibles... ou
plutôt indisponibles ! Quand un patient doit être hospitalisé, il faut se renseigner auprès des services concernés pour savoir si oui ou non il dispose d'un lit pour le patient. C'est le cadre, dont
le but est de coordonner l'équipe du SAU, qui réceptionne les disponibilités et les ache sur un
tableau blanc dans le PC Médecine, et ce à raison de trois à quatre fois par jour. Aussi je me suis
demandée pourquoi le nombre de lits disponibles n'étaient pas visible de manière instantanée via
le serveur qui recueille toutes les informations des services de l'hôpital. Après avoir questionné
un médecin et le cadre, il en est ressorti la conclusion suivante : le potentiel dénouement d'un
tel système, s'il était mis en place, serait une trop grande priorité accordée au SAU par rapport
aux autres services qui doivent eux-mêmes gérer leurs entrées propres. Le fait de ne pas mettre
le nombre de lits disponibles à chaque instant leur permet par exemple de ne pas acher un lit
comme disponible si un patient doit arriver dans la journée.
Pour parler plus spéciquement de mon travail, j'ai à de nombreuses reprises remarqué l'importance de la communication. Il arrive assez souvent que des pertes de temps puissent être
évitées par une meilleure transmission du relais. Voici un exemple parlant : lorsque les internes
en traumatologie souhaitent avoir l'avis du chirurgien au sujet d'un cas spécique, ils lui font
parvenir les radios du patient. Le hic, c'est que c'est moi, simple stagiaire, et purement néophyte
en médecine (et encore, c'est un euphémisme) qui suis envoyée en bloc opératoire, où se trouve
le chirurgien, avec les radios du ou des patients dans le but de recueillir ses conseils. Pour être
sincère j'étais assez curieuse de voir à quoi ressemble un bloc opératoire, donc de ce point de
vue, j'étais bien entendu comblée. Mais aux premières questions que me pose le chirurgien au
sujet des patients, il y a comme un malaise qui s'installe : je ne sais rien lui dire à part je ne
sais pas, excusez-moi . Première question, il n'a pas encore perdu totalement espoir. Deuxième
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question, troisième question, et cela se conclut presque systématiquement par : écoutez, cela
attendra que je sorte du bloc . Sincèrement, quelle perte de temps pour tout le monde : pour
le chirurgien obligé de s'interrompre pour regarder les radios et me poser quelques questions, et
pour le patient qui nalement devra patienter encore un peu plus. Alors qu'un interne aurait, en
deux coups de cuiller à pot, répondu aux questions et obtenu des réponses.
5.2 Une lumière au bout du tunnel ?
Bien entendu, je ne m'apprête pas ici à révolutionner l'organisation du SAU mais j'aimerais
partager avec vous quelques idées qui sont ressorties de mes discussions avec le personnel du
service.
L'une des solutions qui semblent assez claires, et prévue par l'administration de l'hôpital
Pasteur, est d'eectuer des travaux dans le but d'agrandir le service et permettre une meilleure
gestion des ux.
Ensuite, l'une des idées évoquées par la cadre supérieure pour désengorger le SAU est la mise
en place d'un circuit court qui aurait pour but de prendre en charge les patients valides, dont
la charge de travail médical est faible et qui ne nécessitent pas ou peu d'examens complémentaires. En bref, cela revient à s'aligner avec le modèle du médecin traitant pour tous ceux qui
auraient dû aller le voir plutôt que de venir enrayer la mécanique du SAU.
Une autre interrogation que je me suis faite au cours de mes trajets en vélo est la suivante :
pourquoi ne pas proter des souterrains, qui relient entre autres le laboratoire d'analyse médicale
aux Urgences, pour mettre un place un moyen d'acheminement des prélèvements par pneumatiques, i.e. une installation de tuyaux dans lesquels les prélèvements pourraient transiter en
autonomie en étant souer par un jet d'air puissant ? Bien entendu, le service n'avait pas attendu ma venue et ma question pour avoir cette idée. La cadre supérieure m'a laissée lire l'étude
qui avait été menée courant de l'année 2006 à ce sujet. Dans un premier temps, il était question
de relier, via un système pneumatique, uniquement le SAU au laboratoire, distants de 650 mètres
environ. Les bilans auraient été placés dans des sachets souples à usage unique plutôt que dans
des cartouches rigides, notamment pour éviter les problèmes de contamination. Un sachet était
alors évalué au prix de 0,10e. La vitesse d'acheminement aurait été telle que le prélèvement
aurait parcouru la distance en 2 minutes. Le coût prévisionnel d'installation d'un tel projet était
alors compris entre 50 000 et 100 000e. Trop cher pour l'administration qui gère les budgets.
C'est ainsi que, pour le moment, le vélo reste le moyen de transport de prédilection des prélèvements. Le point qui m'a faite sourire dans cette histoire, c'est que la veille de lire l'étude, je
m'étais rendue au magasin laboratoire pour une course quelconque et, trouvant le responsable
du magasin bien énervé, le voilà qui commence à raconter son histoire : avant la pause déjeuner,
un employé des transports a déposé une livraison qui devait absolument être mise au frais pour
assurer la conservation des produits. Il n'a pas fait signer la feuille au magasinier pour assurer
le relais et garantir la chaîne du froid. Tout le monde est parti déjeuner. Et à son retour, le magasinier trouve la marchandise... qui est restée au chaud dans le sous-sol. Résultat des courses :
40 000e partis en fumée... presque de quoi nancer l'acheminement par pneumatique des prélèvements !
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Conclusion
Je pense avoir retiré de ce stage ce que tout stage bien eectué doit apporter : découverte
du monde du travail, insertion dans une équipe, prise de conscience du rôle fondamental d'une
bonne communication, gestion du temps et des urgences 1 .
Mais je retiendrai tout particulièrement le constat suivant : toutes les sciences ne sont pas régies
par des équations brutes et gées. La quintessence de cette science de l'aléa, du cas par cas, de
la petite perturbation qui bouleverse l'équilibre fragile, est sans doute l'étude du vivant. Et c'est
avec beaucoup d'humilité que j'ai observé et participé à l'activité grouillante de cette fourmilière
gigantesque que représente l'hôpital, dont le but est de rendre la vie des autres, chacun apportant
son lot d'imprévus et d'imprévisible, plus agréable.Chaque fourmi a sa tâche et aucune ne peut
être qualiée d'inutile puisqu'il est clair que si l'une d'entre elles vient à ne faire que la moitié
de son travail, c'est toute l'organisation qui s'en porte mal.
1. De ce point de vue, j'étais aux premières loges !
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