aspects cliniques et épidémiologiques des infections à virus

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Article original
ASPECTS CLINIQUES ET ÉPIDÉMIOLOGIQUES DES
INFECTIONS À VIRUS CHIKUNGUNYA DANS L’OUEST
FORESTIER DE LA CÔTE D’IVOIRE
RÉSUMÉ
Auteurs
ATTOH- TOURÉ H.,
EKRA KD.,
COULIBALY A.,
BÉNIÉ BVJ.,
AKA LN.,
TIEMBRE I.,
DOUBA A.,
TAGLIANTE- SARACINO J.
Services
T
A
B
L’infection au virus Chikungunya est peu connue dans le
monde s’expliquant par une symptomatologie non-spécifique
rendant le diagnostic clinique difficile et par la rareté des
laboratoires spécialisés. En Côte d’Ivoire, les données sur cette
maladie sont insuffisantes. Il nous est donc apparu opportun
de rechercher son existence dans une zone favorable, l’ouest
du pays et de nous intéresser à ses caractéristiques cliniques
et épidémiologiques.
Une étude descriptive transversale a été effectuée sur une
période de 8 mois subdivisée en quatre sous périodes couvrant
les saisons de la zone. Pendant un mois, au cours de chaque
sous période, la fièvre a été recherchée dans une cohorte de
6082 personnes. Tous les sujets fébriles ont été interrogés sur
leur symptomatologie puis prélevés pour rechercher les IgM
anti Chikungunya. La prévalence de la maladie a été estimée
ainsi que la sensibilité et la spécificité.
R
La prévalence des infections à virus Chikungunya était de
6,1 pour 1000 habitants. Chez les sujets fébriles, la fréquence
était de 9,5 % chez les femmes et de 10,3 % chez les hommes ;
ces taux ne sont pas significativement différents. On a observé
une recrudescence des cas de Chikungunya pendant la saison
des pluies. Les infections à virus Chikungunya étaient isolées
(46 %) et rarement associées à un accès palustre (13,5 %).
Aucun signe hémorragique n’a été retrouvé associé à l’infection
à virus Chikungunya. Les céphalées et les myalgies avaient
une sensibilité de 93,5 % et 81,5 % mais avec de faibles
spécificité et valeurs prédictive positives de 42 %. Le virus
Correspondance
Chikungunya circule en Côte d’Ivoire. Devant l’absence de
signes cliniques spécifique pour un diagnostic facile et rapide,
Attoh-Touré Harvey Nick
06 BP 2371 Abidjan 06
il faut poursuivre la recherche symptomatique concernant
Tél : 225 07 19 78 28 /
ces infections, en vue de mettre à la disposition des agents de
06 73 71 48
E-mail : harveyattohtoure@ santé une définition standardisée pouvant permettre d’évoquer
le diagnostic ou tout au moins de le suspecter.
yahoo.fr
Département de Santé
Publique de l’Unité de
Formation et de Recherche
Sciences Médicales de
l’Université de Cocody,
Abidjan, Côte d’Ivoire
BP V 166 Abidjan, Côte
d’Ivoire
U
O
P
Mots-clés : Clinique, épidémiologie, infection, virus
Chikungunya, Côte d’Ivoire
Cah.ATTOHSanté Publique,
7, al.
n°1-: 2008
TOURÉVol.
H. &
Aspects cliniques et épidémiologiques des infections à virus... pp. x-x.
© EDUCI 2008
7
SUMMARY
Chikungunya virus infection is unknown in the world explained by non-specific symptoms
making clinical diagnosis difficult and the scarcity of specialized laboratories. In Cote
d’Ivoire, few data are available. It therefore appeared appropriate to us to search for its
existence in a favourable area, west part of the country and also to take into account its
clinical and epidemiological characteristics.
T
A
B
A transverse descriptive survey was conducted over a period of 8 months subdivided
into four periods covering the seasons of the area. For a month, during each period, the
fever was found in a cohort of 6082 people. All feverish subjects were interviewed about
their symptoms and then taken to search for IgM against Chikungunya virus. The rate of
the illness has been estimated as well as the sensitivity and the specificity.
The rate of fever was 6, 1 for 1000 inhabitants. In the febrile subjects, the frequency was
9.5% among women and 10.3 % in men ; these rates are not significantly different. There
has been a resurgence of cases of Chikungunya during the rainy season. Chikungunya
virus infection was isolated (46 %) and rarely associated with malaria (13.5 %). No signs of
bleeding were found associated with Chikungunya. Headache and myalgia had sensitivity
R
of 93.5 % and 81.5 % but with low specificity and positive predictive values of 42 %.
Chikungunya virus circulates in Cote d’Ivoire. With absence of specific clinical signs for
an easy and fast diagnosis, it’s necessary to pursue the symptomatic research, in order
to inform health agents about standardized definition which could allow the diagnosis or
at least to suspect it.
Key words : Clinic, epidemiological, infection, Chikungunya virus, Côte d’Ivoire
INTRODUCTION
Peu connu dans le monde, le virus Chikungunya a été isolé pour la première fois en
1952 en Tanzanie selon Fattorusso. Depuis lors, ce virus a été souvent isolé chez l’homme
et les moustiques (vecteur de la maladie) pendant des épidémies survenues en Asie et en
Afrique, notamment au Sénégal en 1996-1997 [Digoutte, 1980]. Plus récemment d’autres
épidémies ont sévit dans l’île de la Réunion avec 263 000 cas et 232 décès [Catteau, 2005].
Cette affection est toujours présente et son impact socio- économique reste important. La
méconnaissance de cette maladie dans les pays en développement pourrait s’expliquer
par une symptomatologie non spécifique rendant le diagnostic clinique difficile et par la
rareté des laboratoires spécialisés.
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O
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La fièvre due au virus Chikungunya est confondue à d’autres affections bactériennes,
virales ou parasitaires telles que le paludisme [Gazin, 1986]. Le risque épidémique
est élevé devant l’absence de surveillance sérologique, entomologique et les difficultés
d’identification clinique et biologique de la maladie.
En Côte d’Ivoire, il existe peu de données sur les infections à virus Chikungunya alors
que le climat est propice au développement de cette maladie. En pratique courante, elle
n’est pas recherchées bien que de nombreux cas de fièvres restent d’étiologie inconnue
et souvent attribués à du paludisme sans parasitémie ou plutôt à une salmonellose. La
présente étude visait à montrer l’existence de cette affection dans l’ouest forestier de la
Côte d’Ivoire. Il s’agit d’une zone réunissant les conditions écologiques et climatiques
Cah. Santé Publique, Vol. 7, n°1- 2008
© EDUCI 2008
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favorables au développement du vecteur responsable de la transmission de la maladie
à l’homme. L’étude visait également à déterminer les caractéristiques cliniques et
épidémiologiques qui pourraient aider si elles sont bien connues à identifier rapidement
le virus Chikungunya.
L’objectif général de cette étude était de décrire les caractéristiques cliniques et
épidémiologiques des infections à virus Chikungunya dans l’Ouest forestier de la Côte
d’Ivoire.
T
A
B
Les objectifs spécifiques visaient quant à eux à :
1- Déterminer la prévalence de l’infection à virus Chikungunya dans cette région,
2- Identifier les caractéristiques socio- démographiques des personnes atteintes,
3- Décrire les principaux signes cliniques des infections à virus Chikungunya.
MATÉRIEL
ET MÉTHODES
1- Cadre d’étude
L’étude s’était déroulée dans les départements de Danané et de Guiglo situés dans
l’Ouest forestier de la Côte d’Ivoire à 500 km de la capitale économique Abidjan. La
végétation est faite d’une forêt dense humide avec de vastes zones de déforestation
dues essentiellement aux exploitations forestières, à la culture du riz, du cacao et du
café. Le climat est tropical avec une saison pluvieuse de Mars à Octobre (8 mois) suivie
d’une saison sèche de Novembre à Février. La pluviométrie annuelle est de 2000 mm et
la température oscille entre 24 et 26°C. La région de l’ouest est parcouru par plusieurs
cours d’eau dont les plus importants sont le fleuve Cavally et le N’Zo un affluent du
fleuve Sassandra.
R
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2- Type et période d’étude
Il s’agissait d’une étude descriptive transversale qui s’était déroulée sur une période
de 8 mois allant de Mai à Décembre 1998. Pour tenir compte des variations saisonnières
dans la zone d’étude, l’enquête s’était déroulée sur 4 sous-périodes d’un mois chacune.
La première sous-période (P1) allait du 19 mai au 18 juin et se trouvait en pleine saison
des pluies ; la deuxième sous-période (P2), du 13 août au 12 septembre, correspondait
à la fin de saison des pluies ;
la troisième sous-période (P3), du 25 septembre au 27 octobre correspondait au début
de la saison sèche et la quatrième sous-période (P4), du 04 novembre au 03 décembre se
trouvait en pleine saison sèche. Une cohorte de sujets était constituée dans chaque village
au début de l’enquête et était observée lors des périodes d’enquête sus mentionnées.
P
3- Population d’étude
Notre étude a concerné les personnes vivant dans les départements de Danané et
Guiglo. Etaient inclus dans l’étude après consentement éclairé toute personne vivant dans
les dits départements et qui affirmait y demeurer durant toute la période de l’étude.
ATTOH- TOURÉ H. & al. : Aspects cliniques et épidémiologiques des infections à virus... pp. x-x.
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4- Taille de l’échantillon et échantillonnage
L’enquête s’est déroulée dans 21 villages choisis par commodité en tenant compte de
l’accessibilité en toute saison et de l’existence d’un poste de santé. La taille de l’échantillon
était de 6 082 personnes, estimée avec un risque d’erreur de 5 % (écart réduit de 1,96),
une fréquence attendues de 50 % et une précision de 1,25 %. Les sujets de l’enquête ont
été répartis entre les villages proportionnellement à leur taille. Puis à l’intérieur de chaque
village, les personnes ont été sélectionnées de façon aléatoire à l’intérieur des familles.
Le nombre de personnes tirées par famille était proportionnel à la taille de celle-ci. Une
cohorte de sujets était ainsi constituée dans chaque village au début de l’enquête.
T
A
B
5- Variables et collecte des données
A chaque sous-période, un médecin-enquêteur séjournait dans chaque village et
recherchait durant un mois tous les individus de la cohorte présentant une fièvre ou un
épisode de fièvre de moins de 48 heures. Tous les sujets fébriles ont été examinés, et
l’interrogatoire a recherché des signes évocateurs comme les céphalées, les myalgies et
les arthralgies. La recherche d’IgM anti-chikungunya s’est faite par la technique ELISA à
l’Unité d’Arbovirologie de l’Institut de Médecine Tropicale de Santé des Armées de Marseille
et tous les patients ont bénéficié d’une goutte épaisse pour le diagnostic différentiel avec
le paludisme. Les examens sérologiques ont été effectués selon la technique MAC-ELISA
adaptée à celle décrite pour le diagnostic des Flavivirus selon les étapes suivantes :
R
- Sensibilisation d’une microplaque par une anti-IgM humaine
- Capture des IgM
- Dépôt des antigènes suivant le plan de plaque (antigène DENGUE et CHIK)
- Dépôt des anticorps monoclonaux (IgG) anti- DENGUE et anti- CHIK
- Dépôt d’anti-IgG de souris conjuguée à la peroxydase
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- Dépôt de substrat de développement TMB
- Lecture au lecteur de plaque (OPTIMAX) à la longueur d’onde 540 nanomètres
6- Analyse des données
L’analyse des données a constitué à l’estimation de la prévalence de l’infection à virus
Chikungunya sur la période de l’étude et à la détermination de la fréquence des signes et
symptômes ainsi que leur sensibilité, spécificité et valeurs prédictives. Le traitement des
données s’est effectué avec le logiciel EPI- INFO 6.04, pour la comparaison des proportions
nous avons utilisé le test Chi- deux.
P
RÉSULTATS
1- Epidémiologie de l’infection à virus Chikungunya
Durant les quatre sous-périodes d’observation, 373 sujets atteints de fièvre ont été
enregistrés sur 6082 personnes examinées soit une fréquence de 6,1%. L’infection à
virus Chikungunya a été diagnostiqué chez 37 sujets soit une fréquence de 9,9 % parmi
Cah. Santé Publique, Vol. 7, n°1- 2008
© EDUCI 2008
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les affections fébriles. Sur l’ensemble de l’échantillon, la prévalence de l’infection à virus
Chikungunya était de 6,1 pour 1000 habitants sur la période de l’étude (tableau I).
Tableaux I : Prévalence des infections à virus Chikungunya, ouest de la Côte d’Ivoire,
mai à décembre 1998
table 1: Prevalence of Chikungunya infections, western Ivory Coast, from May to
December 1998
T
A
B
Effectif patients
fébriles
Fréquence des
affections fébriles (%)
Prévalence pour
1000 hab.
(n=6082)
Infection à virus Chikungunya
37
9,9
6,1
Fièvre d’étiologie connue autre
que Chikungunya
194
52,0
Fièvre de cause indéterminée
142
38,1
23,3
Total
373
100
61,3
31,9
R
Dans 46% des cas l’infection à virus Chikungunya était isolée. Elle était associée à
un accès palustre dans 13,6% des cas et à d’autres affections fébriles dans 40,5% des
cas. 50,7% des affections fébriles ont été enregistrées chez les femmes et 49,3% chez les
hommes. La fréquence des cas d’infection à virus Chikungunya selon le sexe et parmi
les affections fébriles était de 9,5% chez les femmes et de 10,3 % chez les hommes. Ces
taux n’étaient pas significativement différents. Chez les sujets fébriles, les fréquences des
infections à virus Chikungunya par tranche d’âge étaient significativement différentes
(p<10-2) comme le montre le tableau II.
Tableau II : Fréquence des infections à virus Chikungunya dans les affections fébriles
en fonction de l’âge
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O
Table 2 : Frequency of Chikungunya infections among feverish affections according
to age
Tranches d’âge
Test ELISA
POSITIF
P
Négatif
Total
0 – 9 ans
10 -19
Total
≥ 20
N
%
N
%
N
%
N
%
13
5,8
5
12,2
19
17,6
37
9,9
211
94,2
36
87,8
89
82,4
336
90,1
224
100
41
100
108
100
373
100
Chi carré = 11,6 p<10-2
L’étude selon les périodes montre que la fréquence de l’infection était plus élevée pendant
la première période de l’étude qui correspondait à la saison des pluies (tableau III).
ATTOH- TOURÉ H. & al. : Aspects cliniques et épidémiologiques des infections à virus... pp. x-x. 11
Tableau III : Fréquence des infections à virus Chikungunya dans les épisodes fébriles
et selon les périodes d’enquêtes, ouest Côte d’Ivoire, 1998.
Table 3 : Frequency of Chikungunya infections among feverish episodes according to
periods of investigations, western Ivory Coast, 1998.
Période
Total des épisodes fébriles
P1
155
P2
56
P3
92
P4
95
Total
398
Test ELISA positif
T
A
B
Effectif
Pourcentage
26
16,7
Chi carré = 10,5 p<10-2
0
-
6
6,5
5
5,6
37
9,3
2- Signes cliniques de l’infection à virus Chikungunya
A l’examen clinique on retrouve dans 40,5 % des cas des signes orientant vers une
autre affection tels que broncho-pulmonaires, digestifs ou éruption cutanée. Aucun signe
hémorragique n’a été retrouvé associé à l’infection à virus Chikungunya.
R
Avoir une fièvre ou une histoire récente de fièvre datant de moins de 48 heures a été
notre critère de sélection des malades. 32,4 % des patients présentant une fièvre à virus
Chikungunya avaient une température axillaire supérieure ou égale à 39°C.
Trois signes fréquemment rencontrés lors des infections à virus Chikungunya ont été
recherchés. Il s’agit des céphalées, des myalgies et des arthralgies. Dans le tableau IV,
l’étude de leur performance au diagnostic de la maladie montre une spécificité faible avec
de faibles valeurs prédictives positives, toutes inférieures à 20 %. Les sensibilités étaient
de 93,5 % pour les céphalées, 81,5 % pour les myalgies et 44,4 % avec des valeurs
prédictives négatives supérieures élevées, supérieures à 80%. Dans 86 % des cas, les
infections à virus Chikungunya ont eu une évolution inférieure à 7 jours. Les valeurs
extrêmes étaient de 2 et 20 jours.
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Tableau IV : Etude des performances des signes dans le diagnostic des infections à
virus Chikungunya, ouest Côte d’Ivoire, 1998
Table 4 : Study of the performances of the signs in the diagnosis of Chikungunya
infections, western Ivory Coast, 1998
P
Sensibilité
(%)
Spécificité
(%)
Valeur prédictive positive
(%)
Valeur prédictive négative
(%)
93,5
8,7
14,8
88,9
Myalgies
81,5
31,7
18,2
90,2
Arthralgies
44,4
42,1
12,5
80,3
Symptômes cliniques
Céphalées
Cah. Santé Publique, Vol. 7, n°1- 2008
© EDUCI 2008
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DISCUSSION
La recrudescence des cas de fièvre pendant la première partie de la saison de pluie
montre qu’il existe une relation entre la pluviométrie et les affections en cause. La
transmission des maladies à vecteurs est intense pendant cette période du fait de la
pullulation desdits vecteurs.
Le diagnostic de certitude des infections à virus Chikungunya est apporté par
l’isolement du virus, technique difficile à réaliser. La détection des anticorps de type IgM
que nous avons effectuée permet une excellente présomption du diagnostic sur un seul
prélèvement contrairement aux méthodes sérologiques classiques pour lesquelles l’étude
de la cinétique des anticorps est indispensable.
T
A
B
Sur la base de ce diagnostic présomptif, nous allons analyser les infections à virus
Chikungunya aux plans cliniques et épidémiologiques.
Au plan clinique, la fièvre était le plus souvent isolée (46 %), rarement associé à un
accès palustre (13,5 %) ou associé à des signes cliniques orientant vers une autre affection
(40,5 %). L’absence de signes hémorragiques corrobore les constatations de Simpson
[1979] et de Roche [1966].
R
Les 3 symptômes cliniques, traduisant une imprégnation virale, que nous avons
retenus, sont retrouvés avec des fréquences variant selon les auteurs. Dans notre étude
les céphalées sont le symptôme le plus fréquemment rencontré. Ce qui est conforme aux
observations de Roche [1966] mais infirme celles de Georges [1980] qui le retrouvent
dans 3 cas sur 10. Les myalgies ont été retrouvées dans 59 % des cas. Georges [1980]
rapporte une fréquence de 10 % alors que Rodhain [1981] retrouve ce symptôme avec
une fréquence comprise entre 26 et 50%. Les arthralgies auxquelles ces infections doivent
leur nom paraissent moins constantes (12/37). Ce constat corrobore les observations de
Georges [1980] et celles de Moore cité par Digoutte [1980]. Selon l’Institut Pasteur cette
atteinte articulaire s’associent fréquemment à des maux de tête, des douleurs musculaires
importantes (dans 70 à 99% des cas), une éruption cutanée maculo-papuleuse du tronc
et des membres (dans environ 50 % des cas), parfois prurigineuse.
U
O
Il paraît bien difficile d’individualiser des particularités cliniques liées à ce virus. De
façon rétrospective, il est impossible de rattacher par l’interrogatoire et l’examen clinique
une symptomatologie évocatrice chez les sujets porteurs d’IgM anti-Chikungunya.
Aucun signe n’est spécifique et la valeur prédictive positive est très faible. Cependant,
leur regroupement pourrait être évocateur. Les signes retrouvés dans notre étude font
partie des signes retrouvés lors des épidémies de l’Océan Indien qui ont débuté en 2005
[Catteau, 2005] lors des épidémies de la réunion.
P
Des études, à réaliser sur des échantillons plus grands et ceci pendant la période de
forte transmission, permettront certainement de recueillir d’utiles renseignements sur
la fiabilité de ces symptômes.
Nos conditions de travail ne nous ont pas permis d’apprécier la récurrence et les
complications éventuelles. Les signes broncho-pulmonaires au cours des infections à
virus Chikungunya sont dus soit à des infections pulmonaires associés ou aux formes
cliniques décrites dans la littérature.
ATTOH- TOURÉ H. & al. : Aspects cliniques et épidémiologiques des infections à virus... pp. x-x. 13
Au plan épidémiologique, nous avons observé une nette prédominance des infections
à virus Chikungunya pendant la saison des pluies en rapport certainement avec la
pullulation des vecteurs dont l’approvisionnement en eau des gîtes larvaires est tributaire
de la pluviométrie.
Nous n’avons noté aucune influence du sexe dans la survenue de ces infections.
Cependant des études ont montré une prédominance féminine. En effet, en région
forestière, les activités champêtres sont souvent effectuées par les femmes et cela
favorisent les contacts avec le vecteur. L’âge influe sur la fréquence des infections malgré
la possible immunisation des personnes âgées en raison de leurs contacts répétés avec
le vecteur.
T
A
B
Dans le but de mieux apprécier l’épidémiologie des infections à virus Chikungunya
dans la zone d’étude, cette étude doit être complétée par une enquête sérologique en vue
de déterminer la proportion de sujets immunisés et une enquête entomologique pour
identifier le vecteur de la maladie et évaluer la circulation virale.
CONCLUSION
Les infections à virus Chikungunya sont bien présentes dans l’ouest forestier de la
Côte d’Ivoire. Notre étude montre une prévalence de 9,9% dans les épisodes fébriles de
cette région. Leur diagnostic clinique reste encore difficile du fait de la non spécificité des
signes qui sont aussi retrouvés dans les autres pathologies infectieuses et parasitaires
telles que le paludisme, première cause de morbidité. Il faut poursuivre la recherche
symptomatique concernant ces infections, en vue de mettre à la disposition des agents
de santé une définition standardisée pouvant permettre d’évoquer le diagnostic ou tout
au moins de le suspecter. En outre, il faudrait renforcer la capacité des laboratoires des
pays en développement à faire le diagnostic indirect mais aussi direct de cette affection
en vue de faire face rapidement à d’éventuelles épidémies
R
U
O
BIBLIOGRAPHIE
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© EDUCI 2008
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