La redéfinition du métier de banquier des entreprises dans une économie fondée sur la connaissance
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La mutation du système économique vers un nouveau régime de croissance s’accompagne d’une
recomposition du tissu d’entreprises. L’une des manifestations les plus remarquables de cette
recomposition réside dans la baisse du poids relatif des grandes entreprises dans l’emploi. Entre 1985
et 1997, la part des firmes de 500 salariés et plus dans l’emploi total est tombée de 41 % à 33 % , au
profit des PME et des TPE. Or, le financement des TPE et des PME pose des problèmes spécifiques,
notamment en termes de coût de collecte de l’information sur les emprunteurs en regard du montant
des engagements. La difficulté se renforce lorsqu’il s’agit de petites entreprises innovantes dont
l’activité, particulièrement risquée, pose de redoutables difficultés d’évaluation. Mais plus généralement
encore, la montée d’une économie fondée sur la connaissance s’accompagne d’une transformation de
la structure des investissements des entreprises au profit des actifs immatériels. On touche ici au
principal défi que doivent affronter les banques : réussir à basculer du financement des actifs corporels
à celui des actifs immatériels, avec toutes les conséquences que cela entraîne en matière d’évaluation
et de gestion du risque de crédit.
Le rôle accru de l’innovation dans les stratégies d’entreprise constitue l’un des fondements de
l’économie fondée sur la connaissance. La compétitivité des entreprises repose de moins en moins sur
leur capacité à exploiter les effets de dimension ou à acquérir des facteurs de production génériques au
meilleur coût. Elle dépend au contraire de plus en plus de leur promptitude à se mouvoir dans un
environnement incertain, de leur capacité à dégager des avantages concurrentiels durables de
l’exploitation de ressources stratégiques telles que des compétences exclusives, une capacité
d’apprentissage supérieure à celle des concurrents, la qualité des interfaces avec les clients et les
fournisseurs, une forte image de marque… c’est-à-dire, fondamentalement, un ensemble complexe
d’actifs immatériels qui forment le "capital immatériel" de l’entreprise. Ceci se traduit par
l’alourdissement du poids des investissements immatériels dans l’effort d’investissement des firmes.
Désormais, le montant de leurs investissements immatériels excède significativement celui de leurs
investissements matériels. Dans l’industrie manufacturière française, ils se sont élevés à 207 milliards
de francs en 1998, soit 40 % de plus que le montant des investissements matériels. Ce déséquilibre à
l’avantage de l’immatériel est très certainement plus marqué encore dans les activités de services.
La première difficulté que doivent affronter les banques soumises à ce développement de
l’investissement immatériel concerne la gestion du risque. Comment se prémunir du risque de non-
remboursement lorsque l’actif financé n’offre a priori aucune garantie tangible ? La justification du rôle
économique des banques est, entre autres, qu’il s’agit d’un intermédiaire qui réduit le coût d’information