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Une expérience tirée de ma propre vie illustre comment ces mémoires fonctionnent. J’ai eu  le privilège 
d’accoucher  de mon  bébé  à  la  maison,  et  le  matin  suivant  la  naissance de Myrrhia,  je  mettais  la  radio 
pendant que je l’allaitais. La musique chantée par un gospel reflétait la joie que j’éprouvais d’avoir un si 
beau petit être dans mes bras, et j’ai commencé à danser. Avant sa naissance, je n’avais vraiment jamais 
écouté beaucoup de gospels et je n’avais jamais dansé sur cette musique. Mais durant les trois premières 
années  de  son  enfance,  je  me  suis  mise  à  danser  sur cette  musique  et  j’ai  acheté  quelques  recueils de 
gospel.
Quelques années plus tard, Myrrhia avait huit ans et nous prenions le thé chez ma tante Barbara.Elle me 
raconta  qu’Helen Black,  une  femme  noire  qui  prenait  soin  de  moi  à  la  maison  pendant  mes  quatre 
premières années, dirigeait le choeur de gospel de l’église. Ma tante me dit que chaque dimanche,Helen 
Bell, en conduisant le chœur de sa congrégation, dansait dans les nefs de l’église ; elle adorait le gospel et 
avait sans aucun doute dansé en me tenant dans ses bras, moi, Helen bébé.
Alors, bien  que je ne sache pas qu’Helen Bell allait à l’église ou dansait, mon corps  avait  enregistré  la 
mémoire de cette expérience. Porter mon bébé libérait la mémoire de ma propre enfance, expérience que 
je ne savais pas être la mienne jusqu’à ce que ma tante Barbara ne me la conte.
Ces  expériences  d’attachement  primaire  sont  stockées  dans  notre  cerveau  limbique  et  constituent  des 
prototypes pour nos futures relations.
Un bébé s’efforce de s’accorder avec ses parents mais il ne peut juger à quel point ils sont bons ou non. 
«Il s’attache à qui est là pour lui avec une constance inconditionnelle, celle là même que nous prétendons 
exiger  de  nos futurs  attachements :  pour  le  meilleur  et  pour  le  pire,  pour  s’enrichir  ou  s’appauvrir, 
devenant malade ou sain. L’attachement n’est pas quelque chose de critiquable : un enfant adore le visage 
de sa mère  et se rue vers elle, qu’elle soit jolie ou  ordinaire. Et il préfère les patterns émotionnels de la 
famille qu’il connaît, sans se soucier de ses valeurs objectives. Plus un copain/une copine correspondra à 
ses  prototypes,  plus  il  se  sentira  attiré  et  passionné,  et  plus  il  éprouvera,  là  au  moins, un  sentiment 
d’appartenance, avec cette personne. »(Lewis, Amini et Lannon, 2000, p.160)
Bien que les interactions relationnelles ultérieures participent à la construction de la structure de soi, les 
patterns primitifs créent un effet de résonance qui affecte le choix de nos partenaires intimes ainsi que nos 
expériences de liens tout au long de notre vie, inclus les patterns relationnels que nous développons en 
thérapie. Le processus thérapeutique  déposera de  nouveaux patterns  dans  le  système  limbique  de  nos 
clients, mais ceci prendra beaucoup de temps.
LES IMPLICATIONS EN PSYCHOTHERAPIE
Les  dernières recherches concernant l’observation  de  paires  mère-bébé a des  implications concernant la 
relation  client-thérapeute et  nous  fournit  des  informations sur  ce  qui  est  source  de  guérison  au  sein  du 
processus  thérapeutique  (Beebe,  Jaffe,  Lachmann,  Feldstein,  Croown,  et  Jasnow,  2000 ;  Beebe  et 
Lachmann,  1994 ;  Zeddies,  2000 ;  Amini,  Lewis,  Lannon  et  al,  1996).  Cette  recherche  confirme 
essentiellement  l’hypothèse  développée par les théoriciens  de la  psychanalyse depuis  quelquestemps, à 
savoir que les  facteurs de guérison  émanant de  la relation entre  l’analyste et son patient sont à chercher
dans  les  échanges  inconscient  /inconscient,de  l’un  et  de  l’autre.  A  partir  de sa  recherche  sur  le 
développement  du cerveau de  l’enfant, Schore promeut l’idée  que l’inconscient est une communication 
du cerveau droit. La guérison repose fondamentalement sur la capacité et l’habileté d’un thérapeute àlire 
les  signaux  somatosensoriels  de  son  client  et  à y  répondre  par  une  communication  somatosensorielle 
correcte. L’hémisphère  droit  du  thérapeute  décode  les  stimuli/signaux  émotionnels  du  client  par  «ses 
propres  réactions  émotionnelles  (somatiques),  éprouvée en  réponse  à  ces stimuli,  ce  qui  constitue  une 
forme de réponse empathique » (Day et Wong, 1996, p.651). Ceci permet au clinicien accordé à son client 
au  niveau  psychobiologique  d’agir  en  tant  que  régulateur  interactif  des  états  internes  dérégulés  de  son 
client. Le thérapeute ne fait pas seulement la lecture du comportement patent de son patient et de sa forme 
extérieure  mais,  comme  «une  mère  suffisamment  bonne », il  possède  la  compétence  à  lire  les  états 
intérieurs  de  son  client.  Le  thérapeute  utilise  ses  propres  processus  somatosensoriels  pour  prendre 
conscience  des  états  de  son  client.  Tout  comme  une  mère  suffisamment  bonne,  il  aide  son  client  à 
transformer  et  intégrer ces  états. Comme l’affirme Bob Lewis :  «Le  corps du  clinicien est  l’instrument 
fondamental au service de l’accordage psychobiologique. » (2001, p.4)
Parce que les thérapeutes corporels sont entraînés à être conscients de leurs processus corporels internes, 
ce  qui  reste inconscient  pour  le  psychanalyste  est  enregistré  par  la  sensibilité  consciente  de  l’analyste 
bioénergéticien qui y  est préparé. Comme le  déclare A. Lowen: «Si une personne n’est pas attentive à 
son corps, c’est parce ce qu’elle a peur de percevoir ou de vivre ses sentiments.