La valeur perçue en B2B et B2C : d`une approche comparée à une

La valeur perçue en B2B et B2C : d’une approche comparée à une
fertilisation croisée
Arnaud RIVIERE*
Maître de Conférences
IAE de Tours - Université de Tours
VALLOREM
Rémi MENCARELLI
Professeur des Universités
IAE Savoie Mont-Blanc - Université de Savoie
IREGE
* Quartier des Deux Lions - 50, avenue Jean Portalis - BP 0607 - 37206 Tours cedex 03 -
E-mail : [email protected] - Tel : 02 47 36 11 63.
La valeur perçue en B2B et B2C : d’une approche comparée à une fertilisation croisée
Résumé :
Alors que la valeur perçue constitue une préoccupation managériale centrale, l’effervescence
de la communauté scientifique sur ce sujet, ainsi que des approches cloisonnées en B2B et
B2C, ont entraîné une confusion théorique autour de la valeur perçue. En réponse, plusieurs
auteurs ont développé, dans une perspective macro-analytique, un cadre théorique unifié de la
valeur. Par contraste avec cette approche actuellement dominante, cet article conceptuel
adopte une posture micro-analytique. Ainsi, une analyse comparative des recherches sur la
valeur en B2B et en B2C est réalisée. Puis, par fertilisation croisée entre les deux champs
d’investigation, quatre voies de recherche prioritaires sont détaillées.
Mots-clés : Valeur perçue, business-to-consumer, business-to-business.
Perceived value in B2B and B2C: from a comparative approach to a cross-fertilisation
Abstract:
While the perceived value holds an important role for managers, the excitement of the
scientific community on this subject, associated with approaches developed in parallel in B2B
and B2C, have produced theoretical confusion around the perceived value. To solve these
conceptual problems, many researchers developed, at a macro-analytical level, a unified
theoretical framework of value. By contrast with this dominant and actual perspective, this
conceptual paper adopts a micro-analytical perspective. First, then, is a comparative review of
research into value in B2B and B2C. Then, by cross-fertilisation between the two fields of
enquiry, we envision four main avenues of research in detail.
Key-words: Perceived value, business-to-consumer, business-to-business.
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La valeur perçue en B2B et B2C : d’une approche comparée à une fertilisation croisée
Introduction
Pour bon nombre d’entreprises, la proposition d’une valeur supérieure aux clients constitue un
objectif managérial majeur (Aurier, Evrard et N’Goala, 2004 ; Gummerus, 2013). Cette
préoccupation grandissante a conduit les responsables marketing à s’interroger sur la valeur
perçue de leur offre c’est à dire la valeur issue d’un produit / service, d’une expérience et / ou
d’une relation, perçue par les clients ou par l’ensemble des parties prenantes de l’échange.
Sur le plan académique, après avoir été pendant longtemps un concept peu exploré, la valeur
perçue a fait l’objet de développements conséquents. Ces travaux ont notamment été menés
en B2B et B2C, amenant les chercheurs à reconnaître ces deux champs comme un axe
fondamental de structuration de la littérature consacrée à la valeur (Chang et Dibb, 2012).
Cependant, la profusion de conceptualisations spécifiques dans chacun des deux champs a
rendu plus complexe l’appréhension de la nature du concept et a débouché sur de nombreuses
ambigüités théoriques, conduisant des auteurs à plaider en faveur d’un travail de clarification
(Lindgreen & al., 2012 ; Gummerus, 2013). L’évolution
du
comportement
des
acheteurs
et
des
pratiques
managériales
a, par ailleurs,
rendu
nécessaire
le renouvellement
des
réflexions
sur
la
valeur
(Lynch et de Chernatony, 2004 ; Merle, Chandon et Roux, 2008).
Face à ce morcellement et à ce besoin d’enrichissement, l’approche initiée par Vargo et Lusch
(2004) à travers la Service Dominant Logic (SDL) a constitué une première voie d’exploration
théorique. Invitant à abolir la distinction producteur / consommateur au profit d’une
perspective « actor to actor » conférant à tous les acteurs économiques et sociaux engagés
dans l’échange le statut d’intégrateurs de ressources, la SDL a favorisé l’émergence d’une
vision théorique globale de la valeur pouvant s’appliquer de manière indifférenciée en B2B et
en B2C (Vargo et Lusch, 2011). Cette approche « zooming out », privilégiant un niveau
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macro-analytique, a permis de proposer un cadre théorique unifié et enrichi de la valeur
(Leroy, Cova et Salle 2013). Cependant, cette unification s’est réalisée au détriment de la
possibilité de rendre compte de la complexité des processus de création et de perception de
valeur dans différents contextes. Par contraste avec cette perspective actuellement dominante
en marketing, une seconde voie d’exploration théorique consiste à étudier la valeur dans une
perspective micro-analytique en tenant compte des caractéristiques spécifiques des marchés
industriels et de grande consommation (Leroy, Cova et Salle, 2013). Cette approche de
type « zooming in » consiste à mobiliser les réflexions les plus abouties et/ou les plus récentes
et à les transférer d’un champ à l’autre. Plusieurs auteurs ont déjà démontré les multiples
intérêts
d’une
telle
démarche
de
fertilisation
croisée
(Gummesson,
2003 ; Cova
et
Salle,
2008a).
En adoptant une perspective « zooming in », cet article vise deux objectifs. Tout d’abord, il
s’agit de clarifier et de comparer les approches théoriques relatives à la nature de la valeur
perçue en B2B et B2C afin d’en identifier les principaux points de convergence et de
divergence. Puis, par fertilisation croisée des deux champs, un agenda de recherche est
proposé en vue de mettre à jour des formes d’enrichissement mutuel de la valeur perçue.
1. Approche comparée de la valeur perçue en B2C et B2B
Compte tenu de l’intensité de la production scientifique sur le thème de la valeur, ce travail
ambitionne, tout d’abord, de réaliser un état des lieux des recherches sur cette notion en B2C
et B2B. En cohérence avec l’approche « zooming in », les conceptualisations de la valeur
perçue, au sein des deux champs d’application, sont examinées puis mises en perspective.
1.1 Définitions et conceptualisations de la valeur perçue en B2C
En B2C, si le terme de valeur recouvre de nombreux sens (Woodall, 2003), deux critères
peuvent être retenus pour structurer les différentes approches : le moment de formation de la
valeur et la nature de sa conceptualisation (Rivière et Mencarelli, 2012) (Annexe 1).
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Le premier critère fait référence au moment de formation effective de la valeur au cours du
processus d’achat et de consommation (Woodall, 2003). Trois types de valeurs perçues,
correspondant à trois moments clés de formation de la valeur, peuvent être distingués : la
valeur d’achat, la valeur de magasinage et la valeur de consommation. La valeur d’achat a été
définie, par Zeithaml (1988), comme le résultat d’une confrontation entre les bénéfices et les
sacrifices perçus associés à l’achat d’un produit. Ce type de valeur, se manifestant avant
l’acquisition finale de l’offre, reflète une évaluation de nature essentiellement utilitaire. Dans
le contexte particulier de la distribution de détail, de nombreux travaux académiques se sont
intéressés à une valeur spécifique : la valeur de magasinage (Babin, Darden et Griffin, 1994 ;
Mathwick, Malhotra et Rigdon, 2001). Ce type de valeur résulte de l’expérience que le
chaland retire de sa visite au magasin, cette dernière étant considérée comme source de
valorisation en soi. La valeur de consommation a quant à elle été définie par Holbrook (1999)
comme une préférence relative, caractérisant l’expérience d’interaction entre un sujet et un
objet. Cette approche conduit à proposer une conceptualisation plus symbolique de la valeur.
Parallèlement, les différentes approches développées en B2C peuvent être classées selon la
nature de la conceptualisation de la valeur (Sanchez-Fernandez et Iniesta-Bonillo, 2009).
Dans un premier cas, la valeur perçue peut être représentée selon une approche agrégée
(Zeithaml, 1988). Celle-ci, consistant à obtenir une évaluation globale du niveau de
valorisation d’une offre, a pendant longtemps abordé la valeur d’un produit au travers d’un
simple ratio qualité / prix et a donc été considérée comme un construit unidimensionnel
(Dodds, Monroe et Grewal, 1991). Toutefois, la nature des bénéfices et des sacrifices perçus
pris en compte s’étant diversifiée, des mesures agrégées multidimensionnelles de la valeur
perçue ont également été proposées (Lai, 1995 ; Aurier, Evrard et N’Goala, 2004). Dans un
second cas, la valeur perçue a pu également être conceptualisée selon une approche analytique
(Holbrook, 1999). Cette dernière consiste, non pas à évaluer un niveau général de valeur, mais
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