LE SECRET PROFESSIONNEL ET
LA RESPONSABILITE MEDICALE DU MEDECIN
A. HAERTIG *
Professeur de Médecine Légale- Chirurgie Urologue –Hôpital de la Pitié
Expert agrée par la Cour de Cassation
I - LE PRINCIPE DU SECRET.
Le respect du secret médical a pour fondement la protection de la vie privée et de l'intimité
du patient. Le principe est énoncé par l'article 226-12 du code pénal, repris à l'intention des
médecins dans le code de déontologie médicale.
Le secret professionnel est connus dans beaucoup de professions : banques, avocats ,
journaliste, experts-comptables , confession…
Le secret médical est un secret professionnel qui existe depuis HIPPOCRATE , médecin grec
sur l’île de COS vers 460 avant Jésus-Christ.
Trois textes actuellement imposent le secret médical sur le plan juridique :
1°) LE CODE DE DÉONTOLOGIE
- inscrit dans le CODE DE SANTE PUBLIQUE
2°) Le Code PENAL ( secret professionnel au sens large)
3°) La Loi du 4 mars 2002 ( dite Loi Kouchner)
- inscrite dans le Code de la Santé Publique )
Article. 226-12 du code pénal :
Toute personne qui étant , soit par état ou profession, soit en raison d'une fonction ou d'une
mission temporaire, dépositaire d'une information à caractère confidentielle, la révèle
sciemment à une personne non qualifiée pour en partager le secret est punie d'un an
d'emprisonnement et de 300.000 francs d'amende.
Article 4 du nouveau code de déontologie ( 1995 ) :
Le secret professionnel institué dans l'intérêt des patients s'impose à tout médecin dans les
conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du
médecin dans l'exercice de sa profession, c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié,
mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris.
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les faits confiés par le patient lui-même ou appris de son entourage, y compris la
simple confidence même si le caractère secret n’est pas précisé les constatations
faites au cours des soins à domicile, la nature de la maladie, le traitement .A
l'hôpital, l'obligation au secret s'étend à d'autres catégories de personnes que les
médecins et prend un caractère collectif. Des indications sur l'état du malade
sont données par les médecins, non seulement aux assistants, attachés, internes,
étudiants affectés au service, mais aussi au personnel infirmier et aux agents
hospitaliers qui concourent à la délivrance des soins au malade hospitalisé. C'est
donc l'ensemble du personnel, y compris le personnel administratif, qui est lié
par le secret.
La Loi du 4 mars 2002 ou Loi KOUCHNER est inscrite dans le code de Santé
Publique :
« toute personne prise en charge par un établissement de santé ou tout autre organisme
participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et aux
informations la concernant »
. Il s’agit d’un secret partagé :
« lorsque la personne est prise en charge par une équipe de soins dans un établissement de
santé , les informations la concernant sont réputées confiées à l’ensemble de l ‘équipe «
La « personne de confiance « qui accompagne le malade à le droit de connaître les
informations le concernant .
« Art. L. 1111-7. - Toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant
sa santé détenues par des professionnels et établissements de santé, qui sont
formalisées et ont contribué à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement
ou d'une action de prévention, ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre
professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de
consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation……
En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s'oppose pas à ce que la
famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance, reçoivent les
informations nécessaires destinées à leur permettre d'apporter un soutien direct à celle-ci,
sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa
responsabilité ces informations.
“La volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou
d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un
risque de transmission.
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Le secret professionnel a un caractère général et absolu, nul ne peut affranchir le médecin ou
une autre personne de son obligation au secret. Seul le patient peut délier le médecin de son
secret comme l'a écrit le Conseil d'Etat :
"C'est du malade seul que dépend le sort des secrets qu'il a confiés à un médecin ou que
celui-ci a pu déduire de son examen".
Mais vivant en collectivité, il existe des révélations obligatoires fondées soit sur un nécessité
administrative, soit sur le besoin de protéger la santé publique ; ces révélations obligatoires
sont : la déclaration de naissance, le certificat de décès, la déclaration de maladie contagieuse
ou de maladie vénérienne, les enquêtes transfusionnelles, les alcooliques dangereux, le
dopage, le certificat d'accident de travail, déclaration de maladie professionnelle, maladie
mentale, principalement.
Trois révélations sont facultatives :
- l'interruption de grossesse (avortement pratiqué en dehors du cadre prévu par la loi),
- les sévices à mineur de moins de quinze ans, ou personnes vulnérables en raison de son âge
ou de son état de santé ( démences – Altzeimer) - le viol, si la victime donne son accord pour
le réveler ,
Deux cas particuliers :
* le mineur ou incapable majeur mais la loi du 4 mars 2002 accorde au mineur la possibilité
de s’y opposer
* la famille: après le décès et sauf opposition exprès les ayants droits peuvent connaître les
causes du décès pour les assurances, la défense de la mémoire du défunt, pour faire valoir
leurs droits
A - LE MALADE ET SON ENTOURAGE
a - le dialogue malade-médecin.
Il n'y a pas de secret dans les rapports du médecin et du malade, l'information du malade est
donc une obligation légale, elle doit être simple, intelligible et loyale. Le médecin a même
depuis peu l’obligation de s’assurer que l’information qu’il a donné au patient est bien
comprise par ce dernier . La conséquence essentielle de ce principe concerne le consentement
libre et éclairé que tout malade doit donner aux soins qui lui sont prodigués. Une franchise
totale vis-à-vis du malade n'est toutefois par toujours souhaitable, notamment dans les cas
graves d'évolution fatale, et le code de déontologie médicale affirme que le médecin, lorsqu'il
l'estime nécessaire, peut s'abstenir de révéler certaines données concernant l'état du malade.
article 35 du nouveau code de déontologie :
"dans l’intérêt du malade et pour des raisons légitimes que le médecin appréciera en
conscience, un malade peut être tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic
grave, sauf dans les cas l’affection dont il est atteint expose les tiers à un risque de
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contamination. Un pronostic fatal ne doit être révélé qu’avec circonspection, mais les
proches doivent en être prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement interdit
cette révélation ou dé signé les tiers auxquels elle doit être faite".
Le praticien est seul compétent pour apprécier ce qui doit être dit ou non.
En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s'oppose pas à ce que la
famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance, recoivent les
informations nécessaires destinées à leur permettre d'apporter un soutien direct à celle-ci,
sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa
responsabilité, ces informations.
b - La communication du dossier médical au malade.
article 45 du nouveau code de déontologie :
tout médecin, doit , à la demande du patient ou avec son consentement , transmettre aux
médecins qui participent à sa prise en charge ou à ceux qu’il entend consulter , les
informations et documents utiles à la continuité des soins . ”
Le législateur soucieux de garantir les droits du malade mais en même temps de préserver la
liberté de conscience du corps médical, a choisi une procédure qui n'est pas celle de la
communication directe. Les Hôpitaux sont tenus de communiquer le dossier des malades
hospitalisés ou reçus en consultation externe au médecin appelé à dispenser des soins à ces
malades. Egalement toutes les informations à caractère médical ne peuvent être
communiquées à l'intéressé que par l'intermédiaire d'un médecin qu'il a désigné à cet effet.
Dans les faits, le dossier du malade adressé à sa demande à son médecin traitant correspond à
un compte rendu d'hospitalisation, un compte rendu d'intervention chirurgicale et l'
ordonnance à la sortie du patient. A ces pièces, peuvent être joints tout autre document utile,
radiographies, compte rendu radiologique, opératoire, anatomopathologie, etc...
B - L'ENTOURAGE DU MALADE
Les relations avec la famille et les proches amis des malades, souvent très présents pendant le
temps de l'hospitalisation, peuvent poser de délicats problèmes. Les informations données à
l'entourage sont avant tout fonction de la volonté du patient. Celui-ci souhaite quelque fois
que le plus grand secret entoure son hospitalisation et les motifs de celle-ci. Lorsqu'il n'en est
pas ainsi et que des relations s'établissent entre la famille, les proches et l'équipe hospitalière,
il faut alors concilier deux règles :
- l'obligation de ne révéler aucune donnée médicale, tout en maintenant des rapports
confiants et étroits avec les familles, cela dans l'intérêt du malade ; toute révélation de
diagnostic est interdite, en particulier par téléphone, c'est toujours l'intérêt du malade qui doit
primer ainsi que le respect de la vie privée. S'il s'agit de renseignements médicaux, il sont
fournis par un médecin dans le respect du code de déontologie ; s'il s'agit de renseignements
plus généraux, le personnel infirmier peut donner des nouvelles de manière générale, en
s'assurant de l'identité de l'interlocuteur, surtout encore dans le cas de demandes
téléphoniques.
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- Dans les cas particuliers un malade est hors d'état d'exprimer sa volonté, ses proches
doivent, sauf urgence ou impossibilité, être prévenus et informés, sous réserve que le malade
n'ait pas fait connaître expressément une volonté contraire. La divulgation serait alors
condamnable.
Le médecin ne peut se délier lui-même du secret, pas plus qu'il ne peut en être délié par la
famille.
Si le malade est mineur, il n'est pas réputé capable de consentir librement. Il ne peut donc pas
caché à ses parents une admission à l'Hôpital, c'est le représentant légal, généralement le
détenteur de l'autorité parentale, qui doit donner son consentement à toute hospitalisation
comme à toute intervention chirurgicale.
C - LES EQUIPES DE SOINS
Le malade qui s'adresse à un Hôpital public est pris en charge par une équipe, comprenant
des médecins, des chirurgiens, des infirmières, des internes, des étudiants...
Le secret médical n'est pas détenu par le seul médecin qui traite le malade. Il se partage entre
toutes les personnes qui sont amenées à donner des soins.
Cela entraîne quelques précautions que chacun doit avoir constamment à l'esprit :
- il faut être prudent dans la "conversation de couloir" et ne jamais oublier qu'un grand
nombre de visiteurs circulent chaque jour dans l'hôpital ;
- de même la prudence s'impose lors des conversations des praticiens dans les chambres à
plusieurs lits, le secret s'implique vis-à-vis des voisins de chambre ;
- la pancarte de lit indiquant en langage clair un diagnostic ou d'autres informations
médicales est à proscrire ;
- le nom des malades ne doit pas figurer sur la porte de la chambre, à l'extérieur de celle-ci ;
- les conversations par léphone situées dans un lieu de passage ouvert à tous, destinées à
donner des précisions sur l'état d'un malade, par exemple à une famille, sont à proscrire.
Enfin, rappelons qu'à proximité et hors de l'Hôpital une prudence identique s'impose lors des
conversations dans des lieux publics entre confrères hospitaliers traitant un même malade.
Le respect de ces quelques principes au sein d'une équipe soignante fonde la crédibilité de
l'Hôpital.
D - LES TIERS
Sans l'accord de l'intéressé, en particulier les médecins de Compagnies d’Assurance , aucun
renseignement médical ne peut être donné aux compagnies d'assurances ; il en est de même
dans les relations entre le praticien et l'employeur, et le médecin du travail si le malade ne l'a
pas expressément autorisé.
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