Cancer et lésions osseuses : métastases ?

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Cancer et lésions osseuses :
métastases ?
J. Alexiou, C. Gehanne
Institut Bordet, ULB
Bruxelles
Introduction
• La métastase osseuse est une
complication fréquente des cancers.
• Il est donc important de rechercher et de
détecter correctement ces lésions.
• Les principaux cancers donnant des
métastases osseuses sont ceux du sein
chez la femme et de la prostate chez
l’homme
Introduction
• 60 à 70 % des patients avec des
métastases osseuses ont un cancer du
sein ou de la prostate
• 15 à 30 % des métastases osseuses sont
dues à des cancers du poumon, du colon,
du rectum, de l’estomac, de la vessie, de
l’utérus, de la thyroïde et du rein
Introduction
• 20 % des patientes avec métastases
osseuses de cancer du sein sont en vie
après 5 ans
• Conséquences dévastatrices sur la qualité
de vie:
– Douleur et impotence fonctionnelle
– Fractures, hypercalcémie
– Compression nerveuse ( épidurite)
Introduction
• Le rôle de cette présentation est de
rappeler les diagnostics différentiels des
lésions osseuses chez un patient
cancéreux ou avec des antécédents de
cancers afin de permettre un traitement
adéquat
Rappel
• 3 types de lésion osseuse:
– Blastique
– Lytique
– Mixte
• Le type d’atteinte est fonction du primitif
Types de métastase selon le
primitif
• Ostéoblastique :
– prostate, carcinoïde bronchique, médulloblastome,…
• Ostéolytique :
– sein, poumon, rein, thyroïde, utérus, Ewing, Wilms,
phéochromocytome, mélanome, hépatocarcinome,
épidermoïde,…
• Mixte :
– sein, poumon, vessie, colo-rectal, estomac,
neuroblastome, pancréas, carcinome
nasopharyngé,…
Matériel et méthode
• Tous les lésions présentées ont été
retrouvées chez des patients cancéreux
• Elles sont classées par type :
– blastique
– lytique
– mixte
• Elles sont toutes bénignes
Lésion blastique
• Cas 1: néoplasie rénale, scintigraphie suspecte
au niveau lombo-sacré
Enostose
• Cas 1: ou ilôt osseux ostéocondensant
– Petite lésion blastique à limite nette régulière ou
spiculée correspondant à un amas d’os lamellaire et
métaplasique
– Absence d’évolution au cours du temps
– Pas de captation à la scintigraphie. Dans le cas 1,
les remaniements dégénératifs de la charnière
lombo-sacrée étaient à l’origine de la captation
isotopique
– Densité élevée au CT
– Diagnostic différentiel basé sur l’aspect et la densité
Lésion blastique
Métastases
Enostose
Enostose
• Diagnostic différentiel: Ostéopoecilie
– Anomalie autosomique se marquant par de
multiples nodules blastiques ressemblant à
des enostoses en imagerie
– Affecte le squelette axial et appendiculaire en
épargnant le crâne et les vertèbres
– Cas 2
Ostéopoecilie ?
• Cas 2: néoplasie
urothéliale
Cas 2: Ostéopoecilie ?
– Hypothèse d’ostéopoecilie
émise sur le 1er scanner
du bassin
– Néanmoins, présence sur
les scanners de la colonne,
ayant suivi le bassin, de
petites lésions rendant
l’hypothèse de métastases
plus probables
– Confirmation des
métastases au vu de
l’évolution
08/2006
03/2007
Lésion blastique
• Cas 3: néoplasie du rectum, scintigraphie
positive au niveau des sacro-iliaques
Cas 3: Ostéose iliaque
condensante
– Maladie « dégénérative », d’origine microtraumatique
possible, se retrouvant le plus souvent chez les
femmes qui ont eu des enfants
– L’affection se marque par une condensation d’allure
triangulaire à base antérieure et inférieure atteignant
le versant iliaque des articulations sacro-iliaques.
– L’interligne est normal. L’aspect peut être
asymétrique comme dans notre cas ( G>Dr)
– Ces remaniements peuvent capter le marqueur en
scintigraphie
Lésion blastique
• Cas 4: patiente avec
myélome multiple et
douleur à la hanche G
Suite à cette anomalie une biopsie a été réalisée
Cas 4: fracture de stress
• Le myélome multiple peut
donner des lésions
blastiques mais rarement
• La mauvaise
interprétation des clichés
a entraîner la réalisation
d’une biopsie qui a
confirmer les
remaniements
fracturaires
• Une analyse plus fine
aurait pu éviter la biopsie
(trait de fracture visible)
Lésion mixte
• Cas 5 : patient de
82 ans avec
neoplasie de
prostate, scinti
positive, pas de
métastase connue
et marqueurs
normaux
Cas 5: maladie de Paget
• Affection touchant les patients au-delà de 40
ans, de cause inconnue, le plus souvent monoostotique
• Elle se marque par une raréfaction trabéculaire
associée à des épaississements trabéculaires et
corticaux entraînant un élargissement des
pièces squelettiques envahies
• L’IRM démontre un signal normal de la moelle
entre les remaniements trabéculaires
Cas 5: maladie de Paget
Métastase
Paget
Cas 5: maladie de Paget
• Autre exemple:
Paget
Meta lytique
Lésion mixte
• Cas 6: néoplasie de
prostate et lésion
unique de l’aile
iliaque, marqueurs
normaux
Zone de sclérose avec hypodensité
centrale
Cas 6: dysplasie fibreuse
• La résonance réalisée
n’ a pas permis de
diagnostic : petite
prise de contraste
centrale
• Une biopsie a été
réalisée et a établi le
diagnostic
T1 -C
T1 +C
Cas 6: dysplasie fibreuse
• Affection bénigne de cause inconnue en
général mono-ostotique
• Parfois associée à des anomalies de
pigmentation et des troubles endocriniens
(Syndrome de Mc Cune Albright)
• Prédomine au niveau des côtes
• Aspect polymorphe, fonction de la teneur
en tissu fibreux, osseux ou autre
Cas 6: dysplasie fibreuse
• Autres exemples
Dysplasie fibreuse
Méta de néo sein
Lésion mixte
• Cas 7: 68
ans,néoplasie du
pharynx, chirurgie,
radiothérapie.
Chimiothérapie pour
récidive
paraoesophagienne.
• Douleur cervicale.
Récidive
Méta ?
C6
Cas 7: spondylodiscite
• Un diagnostic de métastase
avait été fait sur les images
MR
• Les reconstructions CT sont
évocatrices de spondylodiscite
(pincement discal, érosions
des berges, remaniements
osseux et infiltration des tissus
mous) .
• Dans l’anamnèse, on signale
un épisode fébrile dans les
semaines qui ont précédé le
CT
• Une antibiothérapie et une
nouvelle chimiothérapie ont
permis une évolution favorable
Lésion mixte
• Cas 8:
• 68 ans,néoplasie du sein
G 15 ans auparavant
avec récidive 3 ans
après. Antécédents de
radiothérapie.
Ostéoporose. Notion de
chute avec fracture
clavicule datant de
plusieurs mois.
Scintigraphie positive.
• Méta ?
Cas 8: pseudarthrose et
radionécrose
• La nécrose qui survient après radiothérapie est
fonction de la dose d’exposition
• Elle peut apparaître dans un délai qui va de
plusieurs mois à plusieurs années
• Elle entraîne une fragilisation osseuse et par
conséquent des fractures
• Les sites les plus fréquents de radionécrose
sont: la mandibule (cancer buccal), la clavicule,
la tête humérale et les côtes (cancer du sein)
Cas 8: pseudarthrose et
radionécrose
• La localisation, les reconstructions
multiplanaires, l’aspect hétérogène des
berges osseuses, la pseudarthrose et
l’absence d’évolution sur 4 ans confortent le
diagnostic, tout comme l’absence de
marqueurs et d’autres localisations
métastatiques
Cas 8: pseudarthrose et
radionécrose
• Autre exemple: fracture et radionécroses
costales
Cas 8: pseudarthrose et
radionécrose
• Diagnostic différentiel
+4
mois
Néo sein + fracture sur métastase
Néo rein + fracture
traumatique et évolution
Lésion mixte
• Cas 9 : 66 ans, cancer de
la prostate avec
métastases connues,
lésions buccales et
scintigraphie positive.
• Traitement aux
bisphosphonates depuis
1 an
• RX et CT: aspect dense
hétérogène de la
mandibule
Cas 9: ostéonécrose
• Plusieurs cas d’ostéonécrose de la
mandibule ont été décrits dans la
littérature suite à la prise de
bisphosphonates comme dans ce cas
• Parmi les hypothèses de l’ostéonécrose
mandibulaire aux bisphosphonates, on
évoque une mauvaise hygiène buccale
Ostéonécrose
• Autre exemple: néo poumon et nécrose tête
fémorale bilatéralement (Dr > G)
• Rappel: l’IRM est l’examen de choix dans la
recherche d’ostéonécrose
Lésion « mixte »
• Cas 10 : 46 ans,
néoplasie mammaire,
lombalgies, bilan
négatif
D11
• CT: 2 lésions D11 et
L3
L3
Cas 10 : hémangiome
• Lésion bénigne fréquemment retrouvée au
niveau des vertèbres et asymptomatique
(attention: existence d’hémangiomes agressifs)
• Solitaire ou multiples
• Aspect typique classique en CT: raréfaction
trabéculaire focale avec épaississement
trabéculaire
• Aspect globalement nodulaire
• Aspect typique en IRM: hyper T1 et hyper T2 du
au contenu graisseux
Cas 10 : hémangiome
Aspect typique en IRM:
hyper T1 et hyper T2
dû au contenu
graisseux
Lésion lytique
• Cas 11
• 70 ans , néoplasie
mammaire,
scintigraphie positive
au niveau fémoral
• Reste du bilan négatif
• CT : infiltration de la
médullaire osseuse et
calcifications
Cas 11 : enchondrome
• Tumeur bénigne fréquente formée de lobules
cartilagineux cernés de calcifications
• Souvent asymptomatique. Si douloureux
suspecté évolution vers chondrosarcome
• Localisation metadiaphysaire avec
prédominance aux mains
• Erosions endostéales possibles ( < 2/3
épaisseur corticale sinon suspect de
chondrosarcome
Lésion « lytique »
• Cas 12: 45 ans, néo
du sein, scinti positive
au niveau de la
charnière lombosacrée
• CT
Cas 12 : géode et arthrose
• Les géodes que l’on trouve dans la grande
majorité des cas dans l’arthrose sont la
conséquence de la destruction de la surface
articulaire et s’accompagnent de:
– Pincement de l’interligne articulaire
– Sclérose des berges articulaires
– Ostéophytose des berges, d’importance variable
• La géode étant très lentement évolutive
s’accompagne toujours d’une sclérose
marginale
Géode et arthrose
• Autres exemples:
Discussion
• Dans le suivi, de patients cancéreux, la
détection précoce des métastases est
importante car elle entraîne un
changement ou la reprise de traitements
lourds
• En cas de détection de lésion unique, si
l’imagerie ne permet pas le diagnostic,
une biopsie s’impose car le traitement qui
en découle peut être différent
Discussion
• Dans les différents cas présentés, la plupart de
ceux des lésions douteuses susceptibles de
modifier un traitement, ont été biopsiés
• L’analyse plus minutieuse de certains cas (ex:
fracture de stress) aurait permis d’éviter
quelques biopsies
• Lorsque le doute était présent mais que la
clinique ou la biologie orientaient le diagnostic,
une politique plus attentiste de suivi par
imagerie était appliquée.
Discussion
• Lorsque les lésions sont multiples, le diagnostic
et les examens d’imagerie suffisent pour le
diagnostic. Néanmoins, un mauvais diagnostic
(ex: fausse ostéopoecilie) peut retarder un
traitement ou un changement thérapeutique et
avoir éventuellement des conséquences.
• Un suivi régulier des images et de la clinique
permet de s’assurer de l’évolution favorable ou
défavorable, permet d’éviter les erreurs et
permet des modifications rapides de traitement
Discussion
• La bonne connaissance des lésions
osseuses bénignes et les pièges dus à
une interprétation hâtive ( ex: sans
reconstruction multiplanaire sur la colonne
en CT) permettent d’éviter une majorité
des erreurs
Discussion
• Les diagnostics différentiels évoqués n’ont
intéressé que des patients ayant ou ayant
eu un cancer.
• Dans notre institution, sur les 5 dernières
années aucun autre diagnostic différentiel
n’a été évoqué dans ce cadre.
• Néanmoins d’autres diagnostics peuvent
être envisagés (tableau 1,2 ). Ces
tableaux ne sont pas exhaustifs
Discussion
• Tableau 1 : lésion osseuse unique
Lytique
Mixte
Blastique
Kyste osseux solitaire
Osteosarcome
Ostéome ostéoïde
Kyste anevrysmal
Ostéomyelite
Osteomyélite chronique
Lymphome
Lymphome
Lymphome
Tumeur brune
Melorrheostose
Abces de Brodie
Osteoblastome
Fibrome non ossifiant
Chondroblastome
Chondrosarcome
Fibrosarcome
Osteosarcome
Tumeur à cellules géantes
Plasmocytome
Sarcoidose
Granulome éosinophile
Goutte
Discussion
• Tableau 2 : lésions osseuses multiples
Lytiques
Blastiques
Enchondromatose multiple
Mastocytose
Goutte
Osteopoecillie
Amyloidose
Melorrheostose
Hemangiomatose
Pycnodysostose
Histiocytose
Syphilis
Hemophilie
Osteomes multiples
Hyperparathyroïdie
Sclérose tubéreuse
Discussion
• La plupart de ces diagnostics ne posent pas de
problème au quotidien mais peuvent être
évoqué devant un tableau inhabituel. La
clinique, les antécédents, la biologie et
l’investigation par l’imagerie seront les clés du
diagnostic
• D’autre part, les diagnostics différentiels
associés à des tassements vertébraux n’ont pas
été abordés mais constituent un défi
régulièrement posé.
Discussion
• Dans la littérature, aucun article sur le diagnostic
différentiel des lésions osseuses chez un patient avec
cancer ou antécédents de cancer, ne concerne ce sujet
ces 2 dernières années.
• Seul l’ostéonécrose mandibulaire associée aux
bisphosphonates a suscité des articles en raison de leur
utilisation accrue chez les patients atteints de cancer
• On trouve, par contre, de nombreux « case report » sur
des métastases de localisation ou d’aspect atypique ou
de métastases ayant permis de découvrir un cancer
mais qui ne correspondent pas au sujet de cette
communication
Conclusion
• De nombreuses lésions bénignes se retrouvent
chez des patients cancéreux et entraînent des
diagnostics différentiels
• La très large majorité de ces diagnostics est
faite correctement grâce à l’aspect pour la
plupart typique des lésions bénignes
• Les lésions qui posent problème seront
explorées par une biopsie si le diagnostic risque
d’entraîner un changement de traitement
Conclusion
• Lorsque le traitement en cours ne peut
être changé, quelque soit le diagnostic, un
suivi régulier de la lésion permet très
souvent d’exclure ou de confirmer un
diagnostic.
• Les quelques erreurs de diagnostic
trouvées dans nos cas n’ont eu aucune
conséquence fâcheuse et ont pu être
rectifiés par le suivi régulier des lésions.
Conclusion
• Enfin, en présentant des lésions
« élémentaires », le but était de rappeler
que, devant toute lésion, un diagnostic
différentiel doit être fait, compte tenu du
contexte et de la clinique, même si la
première idée est souvent la bonne.
Références
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Osteonecrosis of the jaw as an adverse bisphosphonate event:
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