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Financement du
développement dans
le monde
2009
Tracer la voie de la reprise
mondiale
Synthèse
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PRÈS DE DEUX ANS APRÈS LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES par le marché
hypothécaire américain, à l’origine de la plus grave crise financière depuis la Grande
dépression, les marchés financiers mondiaux demeurent perturbés et les perspectives de flux
de capitaux vers des pays en développement restent faibles. L’intensification de la crise
financière en septembre 2008 a modifié considérablement les perspectives économiques
mondiales. La production mondiale devrait ainsi diminuer de 2,9 % en 2009, soit la première
contraction depuis la deuxième guerre mondiale. Le commerce international devrait connaître
sa plus forte chute depuis cette même date. Le chômage, qui monte déjà en flèche dans les
pays industrialisés, devrait suivre une tendance similaire dans les pays d’Asie du Sud-est dont
l’économie est dépendante des exportations. En effet, les pays riches récupèrent des faillites
sans précédent sur le marché des actifs financiers alors que les investisseurs mondiaux se
retirent des marchés émergents.
Les conséquences de ces événements sur les flux d’investissements vers les pays en voie de
développement ont déjà été graves : les flux de capitaux privés en 2008 ont chuté à un total
de 707 milliards de dollars (ce qui représente 4,4 % du PIB total des pays en développement),
alors que depuis 2003 ils n’avaient cessé d’augmenter, atteignant en 2007 un record de
1 200 milliards de dollars (8,6 % du PIB des pays en développement). Le scénario le plus
plausible pour l’année 2009 est que les marchés boursiers mondiaux et les marchés du crédit
se redressent peu à peu, et que les flux privés net de capitaux vers les pays en développement
restent à peine positifs. Cependant, ils chuteront à 363 milliards de dollars environ par rapport
à leur niveau de 2004, ce qui représente une baisse de 5 % du PIB par rapport à 2007.
L’ampleur de ce déclin est inquiétante au vu de ses conséquences macro-économiques et de
la vulnérabilité à d’autres chocs, notamment dans les pays où les banques et les sociétés sont
fortement endettées auprès de créanciers étrangers. La plupart des 1 200 milliards de dettes
extérieures contractés par des sociétés et banques des marchés émergents entre 2003 et 2007
arrive maintenant à échéance. Ainsi, la situation financière de ces emprunteurs se détériore au
cours d’une période où le coût moyen des emprunts extérieurs a augmenté à 11,7 %, alors
qu’il était de 6,4 % pendant les années précédant la crise, durant lesquelles les emprunts ont
été contractés.
Bien que les réponses politiques extraordinaires des gouvernements du monde entier ont
permis de sauver le système financier mondial d’une crise systémique, elles n’ont toujours
pas permis de sortir du cycle négatif alimentée par l’instabilité financière et la récession
économique. La fragilité de la confiance des consommateurs et l’aversion pour le risque qui
règne parmi les investisseurs des pays en développement, ont contribué à la chute de la
demande globale. Parallèlement, face à l’aggravation de la récession économique, les
principales banques mondiales ont diminué l’octroi de prêts au niveau national et
international, ce qui a exacerbé le resserrement du crédit. Le volume actuel de prêts octroyés
aux États-Unis et en Europe et les enquêtes auprès des banques sur leurs intentions et les
conditions des crédits, indiquent un ralentissement des crédits bancaires aux entreprises et
aux particuliers. Au cours des derniers mois, ce ralentissement est devenu un déclin. De
même, les créances des ressortissants de pays en développement détenues par les principales
banques internationales qui rendent des comptes à la Banque des règlements internationaux,
ont baissé de 200 milliards de dollars entre décembre 2007 et décembre 2008 (de 4 300
milliards à 4 100 milliards).
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Pour rompre ce cycle et redynamiser le marché des emprunts et la croissance, des mesures
politiques audacieuses et une coordination internationale substantielle sont nécessaires. En ce
sens, l’annonce conjointe des dirigeants du G20 lors du sommet de Londres en avril 2009
était encourageante. Ces derniers ont promis de renforcer la capacité des institutions
financières multilatérales à octroyer des emprunts aux économies des pays émergents faisant
face à des déficits de la balance des paiements ou à des risques élevés structurels de
rééchelonnement de la dette ou de refinancement.
Le G20 a également traité plusieurs failles réglementaires, les points faibles de la
gouvernance bancaire et les déséquilibres macro-économiques qui ont contribué à la crise.
Les décisions d’investissement et d’octrois d’emprunts déraisonnables résultent d’une
réglementation permissive, et de l’excès de confiance et de l’euphorie liés au faible niveau
des taux d’intérêt réels et à l’abondance de liquidités. Par conséquent, il est nécessaire
d’appliquer de nouvelles mesures par toutes les institutions financières importantes du
système, y compris les fonds spéculatifs, qui renforcent les normes comptables
internationales sur la transparence et l’évaluation des actifs, et qui consolident le rôle du
Financial Stability Board, même si leur succès à court terme n’est pas garanti.
Lorsqu’ils tracent le chemin à suivre, les dirigeants politiques des pays développés et en
développement doivent prendre en compte les quatre priorités suivantes : poursuivre la
promesse du G20 de restaurer le marché du crédit au niveau national et le flux international
des capitaux, répondre aux besoins de financement extérieur des sociétés et gouvernements
des pays émergeants, réaffirmer les engagements existants de l’agenda de l’aide au
développement et des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), et, enfin,
diminuer la participation des gouvernements dans le système bancaire et rétablir la durabilité
fiscale.
Si des progrès rapides ont lieu sur tous ces sujets, les pays à faible revenu auront moins de
difficultés à affronter la crise. Ces derniers font face à une situation particulièrement difficile
qui pourrait s’aggraver si la détérioration brutale des entrées de capitaux issus des
exportations, des envois de fonds et des investissements directs étrangers (IDE), n’est pas
inversée en 2010. D’après les données disponibles, le montant de l’aide au développement ne
devrait pas couvrir les besoins de financement externe des pays à faible revenu en 2009, et les
donateurs n’augmenteront pas vraisemblablement leur aide de manière significative en raison
des difficultés fiscales provoquées par la crise auxquelles ils font face.
La récession globale s’est aggravée
Le lien étroit entre le commerce mondial des biens de consommation durable, d’équipement
et de haute technologie et les investissements connexes qui soutiennent l’activité économique
des pays en développement ou développés, peut être constaté dans le cercle vicieux actuel
alimenté par les secteurs financiers et réels de l’économie mondiale. La difficulté
d’emprunter et les incertitudes sur la demande future ont retardé les investissements et
provoqués une chute de la demande de biens de consommation durable. Cette situation a
entraîné une contraction importante de la production et du commerce mondial des produits
manufacturés. La production industrielle mondiale a chuté de 5 % au quatrième trimestre
2008 (ou 21% à un taux annualisé), ce qui représente une baisse sans précédent. La
production a continué de décliner au cours du premier trimestre 2009. Dans les pays
développés, la production industrielle a chuté de 17,3 % en mars 2009 par rapport à l’année
précédente, et de 2,3 % dans les pays en développement (toujours sur la même période).
L’effondrement de la production industrielle est réellement global, les producteurs de biens
d’équipement de haute technologie étant particulièrement frappés, tels que le Japon (34 %
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d’une année sur l’autre) en mars 2009, l’Allemagne (22 %), et la Corée du
Sud (12 %).
La croissance du PIB des pays en développement devrait ralentir considérablement mais
rester positive, passant de 5,9 % en 2008 à 1,2 % en 2009. Toutefois, les pays en
développement surperformeront considérablement les pays à revenu élevé dont le PIB total
devrait chuter de 4,5 % en 2009. Deux régions en développement, l’Europe et Asie centrale et
l’Amérique latine et les Caraïbes, devraient connaître une croissance négative en 2009. En
outre, lorsque la Chine et l’Inde ne sont pas comprises, le PIB des pays en développement
restants connaît une baisse de 1,6 % ou 0,6 % par tête d’habitant, ce qui est un véritable
revers pour la réduction de la pauvreté. L’effondrement simultané de la croissance dans les
pays développés et en développement ne peut pas uniquement s’expliquer par leurs liens
commerciaux, les économies d’un grand nombre de pays en développement ayant été
directement affectées par la crise financière. L’inversion des flux de capitaux, la chute des
marchés boursiers et la détérioration générale des conditions financières ont stoppé net la
croissance des investissements dans les pays en développement. Dans de nombreux pays en
développement le taux d’investissement connaît une chute considérable.
Pour les pays en développement importateurs de matières premières, un des rares aspects
positifs de la crise est que ces dernières ont baissé d’environ 35 % par rapport à leur niveau
record atteint à la mi-2008. Cette situation leur a permis de limiter les déficits des comptes
courants, et de réduire l’inflation générée par l’augmentation du prix des denrées alimentaires
et du pétrole qui a eu lieu au cours des années préalables à la crise financière. La baisse des
prix des matières premières a également eu un autre effet salutaire puisqu’elle a nuancé
l’impact de la crise actuelle sur les plus pauvres. Les marchés des matières premières
semblent avoir atteint leur niveau le plus bas, les prix étant toutefois 60 % plus élevés qu’au
cours de la fin des années 90. Sur plusieurs marchés, les acteurs réduisent la production de
matières premières car le coût marginal de l’exploitation des sites les plus riches en
ressources ou les plus difficiles à atteindre dépassent désormais les prix actuels.
L’économie mondiale devrait croître à nouveau à partir de la deuxième moitié de 2009, mais
le redressement attendu pourrait être bien inférieur à la normale. Le PIB mondial devrait
augmenter de manière modeste en 2010, 2%, et de 3,2 % en 2011, car la consolidation du
secteur bancaire, les effets négatifs sur la richesse et l’aversion pour le risque continueront de
peser sur la demande tout au long de la période étudiée. Les pays en développement devraient
connaître des taux de croissance plus élevés (en raison de la croissance de la population et de
la productivité élevée) de 4,4 % et 5,7 % respectivement en 2010 et 2011, qui sont toutefois
des niveaux contenus. En raison de l’absorption des pertes de production et du fait que le PIB
ne devrait atteindre son potentiel de croissance qu’en 2011, l’écart de production (différence
entre le PIB réel et le PIB potentiel) et le chômage devraient restés élevés, et les conditions de
type récession économique prélaveront.
Les flux de capitaux privés se réduisent à un taux sans précédent
Les cycles économiques mondiaux ont toujours affecté les actifs des marchés émergents,
cependant la crise actuelle a un impact particulièrement important sur l’évaluation des
marchés d’actions et sur les liquidités des marchés obligataires primaires. Par rapport à leurs
pairs des marchés matures, les émetteurs d’obligations d’entreprises et d’État des pays
émergents ont été particulièrement affectés par l’absence de liquidités et l’aversion pour le
risque des investisseurs. Presqu’aucune émission n’a eu lieu entre la mi-septembre et la mi-
décembre 2008 suite à la faillite de Lehman Brothers. Les marchés boursiers locaux ont
connu leur plus forte baisse annuelle de l’histoire récente, l’indice MSCI Emerging Market
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