depuis 1973 de se financer auprès de la Banque de France, comme interdiction lui est faite de
se financer auprès de la BCE depuis le fameux et funeste traité de Maastricht.
Cette situation a eu pour conséquence de contraindre les États à se financer à des taux réels
souvent supérieurs à leur propre taux de croissance, ce qui fait que la dette augmente
mécaniquement chaque année en produisant un effet boule-de-neige proprement
catastrophique. Nous ne parlons pas ici de peccadilles : en l’absence de tout versement
d’intérêts, le stock de la dette publique serait aujourd’hui de 17 % du produit intérieur brut, et
non de 86 %. Quant à ces 86 %, ils sont inévitablement faux, puisqu’ils comparent un stock,
la dette, à rembourser en moyenne sur cette année, à un flux, le produit intérieur brut, qui est
annuel. La dette française est donc en réalité de 12 %.
L’autre facteur d’endettement est bien évidemment la politique fiscale irresponsable conduite
depuis 2002.
Contrairement à l’antienne dont la majorité nous rebat les oreilles, ce n’est pas l’explosion des
dépenses publiques qui a creusé les déficits, mais les abandons massifs de recettes fiscales.
Sans les cadeaux fiscaux consentis depuis 2002, ainsi que le rappelait le rapport publié l’an
passé par notre collègue Gilles Carrez, la France aurait connu un excédent budgétaire en
2006, 2007 et 2008. En 2009, le déficit lié à la crise n’aurait été que de 3,3 % du produit
intérieur brut, au lieu des 7,5 % effectivement constatés !
Notre pays n’est évidemment pas le seul à s’être engagé dans cette politique d’endettement
suicidaire. Cette politique lui a été dictée par les traités européens et la Commission
européenne. La ligne directrice de la stratégie de Lisbonne a été de sacrifier l’État dit
Providence sur l’autel de la compétitivité. De cette concurrence effrénée au moins-disant
fiscal et social, dont Joseph Stiglitz dit qu’elle tourne au délire, l’Allemagne est sortie
gagnante mais, même si cela peut paraître paradoxal, pas le peuple allemand !
L’Allemagne est parvenue, Jean-Pierre Brard vient de le rappeler, comme nul autre pays de
l’Union à doper sa compétitivité, mais à quel prix : gel des salaires et des pensions,
déréglementation du marché du travail, réduction drastique des dépenses et des services
publics. Les conséquences sont une demande intérieure atone, un taux de pauvreté parmi les
plus élevés d’Europe – plus de 17 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, contre
13,5 % en France, taux déjà trop élevé. Un emploi sur trois est un emploi précaire,
2,5 millions de salariés travaillant pour moins de 5 euros de l’heure. Et vous osez encore
présenter l’Allemagne comme un exemple à suivre ? Non, merci !
Si nous voulons sortir la France et l’Europe de la crise, ce n’est pas en prenant pour modèle
l’Allemagne. C’est pourtant la voie que l’Europe a décidé de suivre en recommandant des
politiques d’austérité qui, en comprimant la demande, risquent d’enfoncer l’ensemble des
pays de l’Union dans une spirale de récession, y compris l’Allemagne, qui réalise 40 % de ses
exportations à l’intérieur de la zone euro !
Vous voulez rassurer les marchés en faisant de l’austérité l’unique horizon politique, jusqu’à
en inscrire le principe dans les traités et à en contrôler la mise en œuvre dans chaque État,
quitte à les traduire devant un tribunal, au mépris de la souveraineté des peuples. L’Europe est
malade de la dictature imposée par les marchés, malade de la complaisance des
gouvernements à l’égard de cette dictature.
Vous tentez d’attiser les peurs pour imposer l’idée qu’il n’y a pas d’alternative à votre
politique. La présente proposition de résolution européenne déposée en commun avec nos
collègues du parti allemand Die Linke au Bundestag apporte un clair démenti à ces piteuses
affirmations.