Abus, maltraitance et négligence : (1) épidémiologie et

Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
(2014)
62,
299—312
Disponible
en
ligne
sur
ScienceDirect
www.sciencedirect.com
MISE
AU
POINT
Abus,
maltraitance
et
négligence
:
(1)
épidémiologie
et
retentissements
psychiques,
somatiques
et
sociaux
Abuse,
maltreatment
and
neglect:
(1)
Epidemiology
and
long-term
consequences
X.
Benarousa,,
A.
Consolia,
M.
Raffina,
D.
Cohena,b
aService
de
psychiatrie
de
l’enfant
et
de
l’adolescent,
hôpital
de
la
Pitié-Salpêtrière,
AP—HP,
université
Pierre-et-Marie-Curie,
47-83,
boulevard
de
l’Hôpital,
75013
Paris,
France
bCNRS
UMR
7222,
institut
des
systèmes
intelligents
et
robotiques,
université
Pierre-et-Marie-Curie,
place
Jussieu,
75005
Paris,
France
MOTS
CLÉS
Maltraitance
;
Abus
;
Négligence
;
Carence
affective
;
Épidémiologie
Résumé
En
2006,
l’OMS
a
reconnu
la
maltraitance
infantile
comme
un
problème
de
santé
publique
majeur
pour
l’enfant
au
même
titre
que
d’autres
pathologies
chroniques.
Les
situa-
tions
de
maltraitance
concerneraient
entre
1
à
5
%
des
enfants
dans
les
pays
à
hauts
revenus,
avec
une
association
fréquente
des
différents
types
de
maltraitances.
Les
études
recoupant
les
informations
d’enquêtes
rétrospectives
réalisées
à
l’âge
adulte
et
les
données
de
recueil
offi-
ciel
mettent
en
évidence
une
sous-évaluation
des
comportements
de
maltraitances.
En
France
sur
les
dernières
années
on
assiste
à
une
stabilisation
du
nombre
d’enfants
concernés
avec
une
diminution
du
taux
d’abus
sexuels
et
une
augmentation
des
situations
de
négligences
graves
et
d’abus
émotionnel
signalées.
Les
travaux
d’épidémiologie
observationnelle
ont
permis
de
mieux
définir
les
différents
facteurs
de
risque
associés
au
contexte
de
maltraitance
(individuels,
envi-
ronnementaux
et
familiaux),
et
d’évaluer
les
retentissements
psychiques
mais
aussi
somatiques
et
sociaux
à
long
terme
de
la
maltraitance
juvénile.
Sur
le
plan
psychiatrique,
l’association
avec
les
troubles
anxieux,
dépressifs
et
les
troubles
du
comportement
de
l’adolescent
est
forte,
et
surtout
présente
chez
les
filles
en
cas
d’addiction.
Le
suicide
reste
la
première
cause
de
morta-
lité
dans
cette
population.
Au-delà
de
leurs
plus
fortes
prévalences,
ces
troubles
sont
aussi
plus
souvent
sévères,
résistants
et
récurrents.
L’association
avec
des
troubles
somatiques
comme
l’obésité
ou
le
diabète
a
été
mise
en
évidence,
mais
semble
moins
claire
en
cas
de
plaintes
douloureuses
comme
les
plaintes
digestives
ou
les
céphalées.
Les
études
de
devenir
socio-
professionnel
et
médico-économique
montrent
que
l’impact
se
prolonge
au-delà
de
l’enfance.
Les
travaux
sur
le
développement
précoce
cérébral
ont
permis
de
mieux
comprendre
les
Auteur
correspondant.
Adresse
e-mail
:
(X.
Benarous).
http://dx.doi.org/10.1016/j.neurenf.2014.04.005
0222-9617/©
2014
Elsevier
Masson
SAS.
Tous
droits
réservés.
300
X.
Benarous
et
al.
mécanismes
impliqués
dans
le
retentissement
de
ces
traumatismes
sur
le
développement
affec-
tif
et
cognitif.
La
vulnérabilité
pour
des
troubles
psychopathologiques
ultérieurs
serait
en
partie
modulée
par
le
polymorphisme
génétique
des
sujets
qui
constitueraient
des
facteurs
de
risque
ou
protecteurs.
L’impact
sur
le
développement
cérébral
de
ces
contextes
environnementaux
impliquerait
les
remaniements
épigénétiques
concernant
le
système
hormonal
de
la
régulation
du
stress
(le
système
hypothalamo-hypophysaire)
et
des
structures
anatomiques
impliquées
dans
la
régulation
émotionnelle
(comme
l’amygdale)
ou
les
fonctions
inhibitrices
(comme
le
cortex
frontal).
©
2014
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Masson
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Tous
droits
réservés.
KEYWORDS
Maltreatment;
Abuse;
Severe
neglect;
Emotional
abuse;
Epidemiology
Summary
In
2006,
the
WHO
recognized
child
abuse
as
a
major
public
health
problem
for
children
as
well
as
other
chronic
conditions.
All
forms
of
abuse
concern
nearly
1—5%
of
children
in
high-income
countries,
with
frequent
association
between
them.
Global
underestimation
of
these
maltreatment
behaviors
was
underlined
by
crosschecking
data
from
retrospective
survey
carried
into
adulthood
and
official
ones.
In
France,
the
number
of
children
abuse
stabilized
in
the
last
years,
with
a
decrease
of
sexual
abuse
and
an
increase
of
severe
neglect
and
emotional
abuse
reported.
In
recent
years,
observational
epidemiology
studies
have
drawn
the
different
risk
factors
associated
with
maltreatment
context
(individual,
environmental
and
familial),
and
assessed
psychological,
somatic
and
social
long-term
consequences
for
child.
In
psychiatric
field,
association
with
anxiety
disorders,
depressive
disorders
and
maladaptative
behavior
in
adoles-
cent
is
strong,
especially
among
girls
with
addictions.
Suicide
remains
the
leading
cause
of
death
in
this
population.
Beyond
the
highest
prevalence,
these
disorders
are
often
more
severe,
resis-
tant
and
recurring.
Associations
with
somatic
disorders
such
as
obesity,
or
diabetes
have
been
identified
but
are
less
clear
for
painful
complaints
such
as
digestive
complaints
or
headaches.
Cohort
on
socio-economic
outcome
and
medical
needs
stress
a
long-range
impact,
beyond
child-
hood,
on
these
outcomes.
Work
on
early
brain
development
highlights
the
mechanisms
involved
in
the
repercussions
of
these
injuries
on
the
emotional
and
cognitive
development.
Vulnerability
to
later
psychopathology
would
be
partly
modulated
by
genetic
polymorphisms
and
interactions
with
the
environment
that
constitute
risk
or
protective
factors,
through
epigenetic
modifica-
tion
involving
structures
regulating
stress
such
as
the
amygdala
and
the
hypothalamic-pituitary
system.
©
2014
Elsevier
Masson
SAS.
All
rights
reserved.
De
la
description
du
tableau
clinique
d’«
enfants
battus
»
par
Tardieu
en
1860
[1]
aux
travaux
de
Kempe
et
al.
aux
États-
Unis
près
d’un
siècle
plus
tard
[2],
la
reconnaissance
de
la
maltraitance
infantile
par
le
milieu
médical
s’est
faite
pro-
gressivement.
Ce
changement
s’inscrit
plus
largement
dans
les
évolutions
de
la
perception
de
l’enfant
par
la
société.
Le
souci
du
bien-être
de
l’enfant
et
la
reconnaissance
de
son
statut
de
personne
à
part
entière
dans
la
famille
s’imposent
peu
à
peu
à
partir
de
la
fin
du
xixesiècle.
En
France,
ce
pro-
grès
se
traduit
par
le
développement
d’une
législation
plus
protectrice
:
interdiction
des
châtiments
corporels
en
1887,
pénalisation
des
parents,
création
d’une
juridiction
spécia-
lisée
en
1912,
puis
des
tribunaux
pour
enfants
en
1945.
Des
institutions
spécifiques
se
mettent
en
place
pour
sur-
veiller,
protéger,
voire
palier
aux
difficultés
des
familles,
comme
l’Aide
sociale
à
l’enfance
en
1943,
puis
deux
ans
plus
tard,
les
centres
de
Protection
maternelle
infantile.
En
1990,
l’Office
décentralisé
de
l’action
sociale
(ODAS)
est
créé
et
assure,
entre
autres,
la
mission
de
surveillance
de
la
maltraitance
infantile
au
niveau
national.
Plus
récemment,
la
loi
du
5
mars
2007
réorganise
la
protection
de
l’enfance,
avec
la
création
de
Cellules
de
recueil
des
informations
pré-
occupantes
(CRIP)
qui
doivent
faciliter
la
reconnaissance
de
ces
situations.
En
2006,
l’OMS
reconnaît
la
maltraitance
infantile
comme
un
problème
de
santé
publique
majeur
pour
l’enfant.
La
nécessité
de
réaliser
des
investissements
dans
la
prévention
et
la
recherche
épidémiologique
au
même
titre
que
d’autres
problèmes
de
santé
publique
comme
le
VIH,
le
tabac
ou
l’obésité
est
soulignée
[3].
Il
y
a
cinq
ans,
le
journal
Lan-
cet
a
publié
une
série
de
4
articles
sur
la
maltraitance
dans
les
pays
développés
(dit
à
«
hauts
revenus
»
dans
la
clas-
sification
OMS)
:
les
deux
premiers
résumant
les
données
épidémiologiques
disponibles
[4,5]
;
les
seconds
rappellent
les
stratégies
de
prévention
primaire
et
secondaire
[6,7].
En
France
plusieurs
auteurs
ont
souligné
le
manque
de
travaux
épidémiologiques,
particulièrement
l’absence
d’enquête
de
victimisation
permettant
d’évaluer
l’ampleur
du
problème
et
des
besoins
en
termes
de
prévention
et
d’actions
théra-
peutiques
[8,9].
Les
enfants
victimes
de
maltraitance,
qu’ils
soient
suivis
ou
non
par
l’ASE,
sont
surreprésentés
dans
les
services
de
pédopsychiatrie,
avec
des
troubles
générale-
ment
plus
sévères
[10].
Nous
proposons,
ici,
une
revue
de
la
littérature
sur
la
maltraitance
infantile,
plus
particulièrement
ses
consé-
quences
néfastes
à
plus
long
terme
chez
l’enfant
au
regard
des
études
conduites
ces
dernières
années.
Vu
l’ampleur
de
la
question,
la
revue
sera
divisée
en
deux
articles
Abus,
maltraitance
et
négligence
:
épidémiologie
et
retentissements
301
complémentaires.
Le
premier
portera
sur
les
définitions,
l’épidémiologie
et
les
conséquences
à
court
et
long
termes
de
la
maltraitance.
Le
second
se
centrera
sur
le
repérage
et
les
principales
stratégies
de
dépistage
et
d’intervention
recommandées.
Définitions
La
loi
franc¸aise
ne
définit
pas
la
maltraitance,
elle
lui
pré-
fère
le
terme
d’«
enfant
en
danger
»
que
l’on
retrouve
dans
le
Code
civil.
Ce
terme,
qui
équivaut
à
la
notion
de
maltreat-
ment
retrouvée
dans
les
études
anglo-saxonnes,
recouvre
à
la
fois
la
maltraitance
et
les
enfants
à
risque.
L’ODAS
définit
l’enfant
maltraité
comme
étant
«
victime
de
vio-
lence
physique,
[de]
cruauté
mentale,
[d’]abus
sexuel,
[de]
négligence
lourde
ayant
des
conséquences
graves
sur
son
développement
physique
et
psychologique
»
[11],
alors
que
l’enfant
à
risque
«
connaît
des
conditions
d’existence
qui
risquent
de
mettre
en
danger
sa
sécurité,
sa
moralité,
son
éducation
ou
son
entretien
mais
qui
n’est
pas
pour
autant
maltraité
».
Plusieurs
formes
de
maltraitance
sont
habituellement
distinguées
:
l’abus
physique,
l’abus
sexuel,
l’abus
psycho-
logique
ou
émotionnel
et
la
négligence
(Tableau
1).
De
plus
en
plus,
être
témoin
de
violence
conjugale
est
considéré
comme
une
forme
de
maltraitance.
Le
plus
souvent
un
même
enfant
présente
plusieurs
types
de
maltraitances.
Devant
l’importance
de
cette
comorbidité,
certains
auteurs
ont
pro-
posé
une
classification
fondée
uniquement
sur
le
mobile
et
la
gravité
de
la
maltraitance
[12].
On
distingue
la
maltraitance
intrafamiliale
perpétrée
par
les
parents
ou
les
responsables
légaux,
qui
représenterait
près
de
80
%
des
situations,
à
la
maltraitance
survenue
dans
un
milieu
extrafamilial
[4].
On
décrit
aussi
des
formes
de
maltraitances
institutionnelles
[13].
Prévalence
Avant-propos
sur
les
aspects
méthodologiques
et
le
risque
de
sous-estimation
Il
existe
deux
méthodes
pour
évaluer
la
fréquence
de
la
maltraitance.
Les
études
de
victimisation
recherchent
grâce
à
des
auto-questionnaires
des
comportements
de
maltrai-
tance
chez
les
parents
ou
chez
des
enfants
assez
âgés
pour
y
répondre.
Les
secondes
études
se
basent
sur
les
données
«
officielles
»
recueillies
par
les
professionnels
intervenants
auprès
des
enfants
;
il
peut
s’agir
de
données
:
médicales
(CepiDC),
liées
à
la
protection
sociale
(comme
l’Aide
sociale
à
l’enfance,
ONAS,
CRIP),
à
la
sphère
judiciaire
(saisine
aux
parquets,
aux
juges
des
enfants)
ou
issues
des
lieux
d’information
(appels
téléphoniques
au
SNATEM).
Les
esti-
mations
recueillies
entre
ces
deux
méthodes
varient
d’un
facteur
10
[4].
De
plus
les
chiffres
obtenus
lors
d’enquête
de
victimisation
peuvent
en
partie
minimiser
la
réalité
compte
tenu
des
oublis,
du
déni,
de
l’incompréhension
et
de
l’embarras
causés
lors
d’évaluations,
en
particulier
en
cas
d’abus
sexuels
[14].
En
effet,
la
concordance
lors
d’auto-
évaluations
successives
diminue
progressivement
pour
les
abus
physiques
et
sexuels
après
un
ou
deux
ans
[14,15].
Tableau
1
Définitions
des
différents
types
de
maltraitances.
Types
de
maltraitances
Définitions
Abus
physique
Actes
commis
par
un
tuteur
qui
entraînent
des
dommages
corporels
ou
risquent
d’en
entraîner
Abus
psychique
ou
émotionnel
ou
cruauté
mentale
Ne
pas
veiller
à
offrir
un
environnement
convenable
et
positif,
et
de
commettre
des
actes
qui
nuisent
à
la
santé
et
au
développement
affectifs
de
l’enfant.
Parmi
ces
actes,
[.
.
.]
le
fait
de
limiter
les
mouvements
d’un
enfant,
le
dénigrement,
le
fait
de
ridiculiser,
les
menaces
et
l’intimidation,
la
discrimination,
le
rejet
et
d’autres
formes
non
physiques
de
traitements
hostiles
Abus
sexuel
Actes
que
commet
un
tuteur
sur
la
personne
d’un
enfant
pour
en
retirer
un
plaisir
sexuel
Négligence
grave
ou
carence
de
soins
Renvoie
au
fait
qu’un
parent
ne
veille
pas
au
développement
de
l’enfant
s’il
est
en
position
de
le
faire
dans
un
ou
plusieurs
des
domaines
suivants
:
santé,
éducation,
développement
affectif,
nutrition,
foyer
et
conditions
de
vie
sans
danger.
La
négligence
se
distingue
donc
des
situations
de
pauvreté
en
ceci
qu’elle
ne
survient
que
dans
les
cas
la
famille
ou
les
tuteurs
disposent
de
ressources
raisonnables
D’après
Butchart
et
al.,
2006
[3].
On
estime
qu’une
évaluation
menée
sur
un
seul
entretien
conduit
à
sous-estimer
de
50
%
les
cas
de
maltraitance
[14].
L’absence
de
répétitions
des
évaluations,
notamment
dans
les
études
rétrospectives,
contribue
à
sous-estimer
la
préva-
lence
réelle
par
rapport
à
celle
observée.
Les
chiffres
issus
de
méta-analyses
ou
d’études
anglo-saxonnes
doivent
être
interprétés
avec
précaution
compte
tenu
des
différences
internationales
dans
les
systèmes
de
recueil
des
données
[4].
Données
épidémiologiques
Une
situation
de
maltraitance
est
retrouvée
chez
1,5
à
5
%
des
enfants
selon
les
agences
de
protection
de
l’enfance
en
302
X.
Benarous
et
al.
Angleterre,
aux
États-Unis
[16],
en
Australie
et
au
Canada,
et
en
France
[17].
Toutefois
ce
taux
est
plus
élevé
dans
les
enquêtes
d’autoévaluation
:
abus
physique
:
il
concerne
entre
4
à
16
%
des
enfants
[4].
Seulement
1/30
aurait
eu
un
contact
avec
les
services
sociaux
et
1/250
serait
prise
en
charge
selon
les
recom-
mandations
des
agences
de
protection
[18]
;
abus
sexuel
:
5
à
15
%
des
garc¸ons
et
15
à
30
%
des
filles
seraient
exposés
à
un
abus
sexuel,
et
5
à
10
%
des
garc¸ons
et
5
à
10
%
des
filles
à
un
viol
dans
l’enfance
[4].
Une
méta-
analyse
de
2004
souligne
la
sous-estimation
probable
de
la
prévalence
réelle
compte
tenu
de
la
sous-déclaration
des
cas
d’abus
sexuel
[19]
;
abus
psychologique
:
environ
10
%
des
enfants
seraient
exposés
à
des
abus
psychologiques
pendant
l’enfance
[4,15,20]
;
négligence
grave
:
entre
1
à
15
%
des
enfants
auraient
subi
des
négligences
graves
dans
l’enfance
[4,16].
Il
s’agit
des
résultats
d’enquêtes
dans
lesquelles
l’enfant
ou
ses
parents
rapportent
une
absence
persistante
de
soins
ou
bien
une
répétition
de
situations
au
cours
desquelles
un
enfant
a
été
blessé
par
manque
de
surveillance.
Ce
taux
varie
davantage
compte
tenu
de
la
définition
plus
équi-
voque
de
la
négligence
par
rapport
aux
autres
types
de
maltraitances
[21]
;
être
témoin
de
violence
entre
partenaires
:
entre
10—20
%
des
enfants
seraient
témoins
de
violences
entre
ses
parents
[4].
Une
étude
suédoise
retrouve
un
taux
allant
jusqu’à
24
%
[22].
Association
entre
les
différents
types
de
maltraitances
Les
différents
types
de
maltraitances
sont
associés
dans
la
majorité
des
cas.
Une
étude
basée
sur
l’analyse
de
519
cas
montre
une
comorbidité
de
36
à
91
%
selon
le
type
;
les
abus
émotionnels
ne
sont
isolés
que
dans
1,2
%
des
situations
[23].
Cette
estimation
est
probablement
sous-estimée
car
les
évaluations
officielles
ne
prennent
en
compte
le
plus
sou-
vent
qu’un
seul
type
de
maltraitance,
et
presque
jamais
la
séquence
d’exposition
aux
traumatismes
au
cours
du
temps
[15,16,20].
Dans
30
à
60
%
des
situations
l’enfant
est
témoin
de
violences
conjugales,
on
retrouve
d’autres
formes
de
maltraitance
[24].
Répétitions
des
conduites
de
maltraitance
Vingt-deux
pour
cent
des
enfants
maltraités
avaient
déjà
été
signalés
dans
les
24
mois
précédant
dans
l’enquête
de
Fluke
et
al.
[25].
Les
facteurs
de
risque
associés
à
la
répétition
de
la
maltraitance
sont
les
facteurs
de
risque
persistants
chez
l’enfant
(comme
un
handicap
ou
une
maladie
somatique
chronique),
chez
les
parents
(tel
que
l’abus
d’alcool),
les
signes
de
précarité
sociale
(comme
un
faible
revenu
ou
des
contacts
répétés
avec
les
services
sociaux)
et
l’association
de
plusieurs
types
de
maltraitances,
en
particulier
la
négli-
gence
[26].
Maltraitance
dans
la
fratrie
La
maltraitance
limitée
à
un
seul
enfant
de
la
fratrie
concerne
44
%
des
enfants
exposés
à
la
maltraitance.
Les
autres
situations
sont
le
plus
souvent
associées
à
des
contextes
de
négligence
dans
le
milieu
familial
et
l’existence
d’abus
émotionnel.
Les
conflits
et
séparations
conjugales,
l’abus
d’alcool
et
de
drogues
chez
l’un
des
parents
et
la
criminalité
familiale
sont
associés
à
la
mal-
traitance
de
tous
les
enfants
de
la
famille
[27].
Association
à
d’autres
évènements
de
vie
difficile
Les
enfants
ayant
été
exposés
à
un
type
de
maltraitance
sont
plus
à
risque
que
les
autres
enfants
d’être
victimes
d’autres
types
d’évènements
de
vie
difficile.
Par
ailleurs,
la
fréquence
de
ces
autres
formes
d’agression
est
bien
corrélée
à
la
sévérité
de
la
maltraitance
[15,20].
Évolution
On
note
une
diminution
régulière
depuis
les
années
1960
de
l’acceptabilité
des
parents
face
aux
conduites
violentes
envers
les
enfants
[22]
(Fig.
1).
La
perception
des
enfants
suit
la
même
évolution.
Parallèlement
à
ce
changement
des
mentalités,
on
observe
une
diminution
globale
des
abus
physiques
et
sexuels
dans
les
pays
à
hauts
reve-
nus.
Cette
tendance
masque
de
grandes
différences
selon
le
type
de
maltraitance.
Alors
qu’on
rapporte
une
dimi-
nution
de
moitié
des
cas
d’abus
physiques
et
sexuels
entre
1995
et
2005
[15,16,28],
on
observe
une
hausse
des
cas
d’abus
psychologiques
et
de
négligence
grave
recensés
ainsi
que
de
l’association
à
d’autres
formes
de
violence
domestique.
L’interprétation
d’une
telle
augmen-
tation
doit
tenir
compte
des
mesures
de
santé
publique
en
faveur
d’un
repérage
plus
précoce
et
de
l’attention
portée
actuellement
à
l’ensemble
des
enfants
en
danger
et
non
plus
seulement
à
ceux
victimes
de
maltraitance.
En
France
alors
que
le
nombre
d’enfant
à
risque
aug-
mente,
la
prévalence
des
enfants
maltraités
s’est
stabilisée
depuis
2000,
avec
une
diminution
du
nombre
d’abus
sexuel
(22
%
entre
2000
et
2006)
et
une
augmentation
des
abus
émotionnels
signalés
(+142
%
entre
2000
et
2006)
(Fig.
2)
[11,17].
Facteurs
déterminants
de
la
maltraitance
L’étude
des
différents
facteurs
de
risque
individuels,
fami-
liaux,
sociaux
et
culturels
isolément
est
délicate
compte
tenu
de
l’interaction
à
de
multiples
niveaux
[28].
Caractéristiques
de
l’enfant
Dans
les
pays
à
hauts
revenus,
le
sex-ratio
est
globale-
ment
égal
à
1,
excepté
pour
les
abus
sexuels
plus
fréquents
chez
les
filles
[16,19].
En
revanche
dans
les
pays
à
bas
revenus,
on
retrouve
davantage
d’infanticide
et
de
négli-
gence
grave
chez
les
filles
alors
que
les
garc¸ons
sont
plus
à
risque
de
châtiments
corporels
[29].
Les
enfants
pré-
sentant
un
handicap
ont
3
à
4
fois
plus
de
risque
d’être
victime
de
maltraitance
(31
%
de
cas
chez
ces
enfants
contre
9
%
chez
les
enfants
témoins)
[30]
(Fig.
3).
Ce
risque
est
particulièrement
important
en
cas
de
troubles
du
compor-
tement
chez
l’enfant
(37,4
%
;
OR
=
7),
de
retard
mental
(25
%
;
OR
=
4)
et
de
troubles
d’apprentissage
(16,4
;
OR
=
2)
[30].
Abus,
maltraitance
et
négligence
:
épidémiologie
et
retentissements
303
Figure
1.
Évolution
de
la
perception
de
la
violence
parentale
depuis
1965
en
Suède.
L’attitude
des
parents
est
basée
sur
une
enquête
nationale
menée
en
Suède
sous
forme
d’entretiens
(1965,
1968,
1971,
1980),
puis
de
questionnaires
(1994,
2000,
2006).
La
perception
des
enfants
est
basée
sur
des
questionnaires
adressés
à
des
enfants
d’âge
scolaire
entre
13
et
16
ans.
Les
questions
étaient
formulées
ainsi
:
«
Est-il
justifié
de
punir
ses
enfants
physiquement
quand
on
est
en
colère
(par
exemple
par
une
tape
sur
l’oreille)
?
»,
pour
les
enfants
:
«
Penses-tu
qu’il
est
normal
que
tes
parents
te
frappent
si
tu
les
as
mis
en
colère
?
».
La
violence
parentale
est
mesurée
à
l’aide
d’enquête
d’autoévaluation.
D’après
Gilbert
et
al.,
2009
et
Janson
et
al.,
2007
[4,22].
Qualité
des
liens
affectifs
précoces
Les
facteurs
qui
entravent
les
interactions
entre
l’enfant
et
ses
figures
d’attachements
principales,
en
particulier
maternelles,
sont
associés
à
davantage
de
maltraitance
chez
l’enfant
[31].
L’existence
d’une
pathologie
somatique
entraînant
des
hospitalisations
précoces
et/ou
répétées
est
une
situation
particulièrement
à
risque
(par
exemple
en
cas
de
prématurité,
de
faible
poids
de
naissance
ou
d’une
patho-
logie
précoce)
[13].
De
même,
une
grossesse
non
désirée,
0
10,000
20,000
30,000
40,000
50,000
60,000
70,000
80,000
90,000
100,000
Abus physiques
Abus sexuelles
Négligences
gra
ves
Abus psych
ologiques
Enfan
ts maltraité
s
Enfants
à risqu
e
Enfant
en
dange
r
Figure
2.
Évolution
des
types
de
mauvais
traitements
signalés
entre
1998
et
2006
(en
France
métropolitaine).
Depuis
2007,
la
collecte
des
données
est
sous
la
responsabilité
de
l’Observatoire
national
de
l’enfance
en
danger
(ONED).
Depuis
2007,
les
chiffres
nationaux
ne
sont
plus
disponibles
car
l’ONED
ne
normalise
pas
les
chiffres
entre
département
et
ne
permet
pas
d’effectuer
une
moyenne
ou
une
extrapolation
sur
le
plan
national.
D’après
ODAS,
2007
[11].
1 / 14 100%

Abus, maltraitance et négligence : (1) épidémiologie et

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