
la patho
la patho
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et compresses, sont pris en charge par l’Assu-
rance maladie pour les plaies malodorantes. Ils
sont le plus souvent employés sur les ulcères
sales et malodorants, en particulier d’origine
cancéreuse : Actisorb, Askina Carbosorb.
Gestion de la douleuri
La douleur est associée à de nombreux ulcères
de jambe, veineux ou artériels, même si les
ulcères artériels sont réputés plus douloureux.
La douleur est variable, constante ou intermit-
tente. Elle peut atteindre son paroxysme lors des
soins de plaie. Le retrait du pansement et la déter-
sion sont considérés comme les moments les
plus douloureux par les patients. La douleur doit
être repérée, évaluée et soulagée. Quand elle est
induite par les soins, elle doit être anticipée.
Crèmes anesthésiques
nSpécialités : crèmes à base de lidocaïne et de
prilocaïne (Emla 5 % crème, Anesderm 5 %
crème, Lidocaïne prilocaïne Biogaran 5 %
crème).
nIndication : «L’anesthésie topique des ulcères
de jambe afin de faciliter le nettoyage méca-
nique/débridement chez les adultes unique-
ment »(3). En agissant directement sur les nerfs,
ces anesthésiques locaux bloquent la conduc-
tion nerveuse.
nMode d’administration : pour une application,
la dose est de 1 à 2 g par surface de 10 cm2, avec
un maximum de 10 g par application (deux
tubes). L’utilisation est limitée à huit applications
pour le traitement d’un ulcère. Par exemple, une
fois par semaine durant huit semaines. La crème
est appliquée en couche épaisse sur la zone à
traiter, sans masser, et en périphérie de la plaie
si les bords sont douloureux au contact.
nDélai et durée d’action. La crème est appliquée
30 minutes avant le début de la détersion d’un
ulcère et couverte d’un pansement adhésif her-
métique. La durée d’anesthésie après retrait de
la crème est d’environ 30 minutes.
nEffets indésirables : érythème, rash, irritation
de la peau et prurit, sensation de brûlure, der-
matite, bénins et toujours réversibles. Les effets
systémiques sont peu probables compte tenu
des faibles concentrations circulantes.
nRisque exceptionnel de surdosage en cas de
mésusage, par exemple lors d’applications simul-
tanées sur un nombre élevé de sites pendant
une période prolongée. Les signes d’intoxication
systémique sont : vertiges, vomissements, som-
nolence, convulsions, mydriase, bradycardie,
arythmie et choc. En ce cas, une surveillance
en milieu spécialisé devra être maintenue plu-
sieurs heures après le retrait du médicament,
en raison de l’absorption retardée des anesthé-
siques locaux.
En cas d’ulcère mixte
Le plus souvent, l’étiologie est dominée par la
participation veineuse. Le traitement de l’ulcère
mixte est avant tout celui d’une insuffisance
veineuse avec :
nla compression non élastique ;
nou la compression élastique mais qui
impose une réévaluation régulière du rapport
bénéfice/risque, avec un IPS compris 0,6 et 0,9.
Elle est contre-indiquée si l’IPS est inférieur
à 0,6(1).
Traitement locali
Principes généraux
Un ulcère de jambe est une plaie chronique
et sa prise en charge consiste à :
> maintenir une humidité qui favorise la cicatri-
sation ;
> retirer les tissus non vascularisés, les bactéries
et les cellules gênant le processus de cicatrisa-
tion, c’est la détersion ;
> traiter une infection clinique objectivée
(prouvée) qui entrave la cicatrisation ;
> assurer des berges saines sur le pourtour, à
partir desquelles se développe l’épidermisation
de la plaie.
Lavage fréquent de la jambe
Il est primordial pour contenir le nombre de
germes présents sur la plaie et prévenir une
infection. Le lavage s’effectue de préférence à
l’eau savonneuse, avec un savon doux, liquide,
sans parfum et sans conservateur.
Détersion
Elle consiste en l’élimination la plus complète
et la moins traumatique possible de la nécrose,
c’est-à-dire les tissus non vascularisés, et de la
fibrine, protéine filamenteuse produite lors de
la coagulation sanguine. Elle vise à nettoyer la
plaie des fragments de tissus dévitalisés, qui
entraînent un risque infectieux important et
empêchent une cicatrisation optimale(2). Elle
se fait surtout de façon mécanique.
nDétersion mécanique. Elle est effectuée à l’aide
de compresses, curettes, pinces à disséquer,
ciseaux ou bistouris, qui nécessitent une cer-
taine maîtrise. Attention ! Un IPS inférieur à
0,7 signe une participation artérielle et interdit
la détersion mécanique de la nécrose sèche.
Dans ce cas, les tissus n’étant pas nourris à cause
d’un manque d’oxygène, retirer la nécrose
reviendrait à la laisser se reconstituer plus en
profondeur. La plaie se creuserait alors.
nDétersion avec certains pansements actifs qui
renforcent la détersion enzymatique naturelle.
Hydrocolloïdes, hydrogels et alginates sont
recommandés par la Haute Autorité de santé
(Les pansements, indications et utilisations
recommandées, Bon usage des technologies
médicales, 2011). En pratique, les hydrofibres et
les hydrocellulaires sont aussi utilisés.
Gestion des exsudats
Elle est primordiale(2). La gestion des exsudats
(voir Dico+ p.31) se fait avec un pansement. En
général, l’ulcère veineux est plus exsudatif que
celui artériel. Le choix d’une classe de panse-
ments dépend de la quantité des sécrétions.
Plaies exsudatives
nLes hydrocellulaires (HC) sont distingués en
fonction de leur capacité d’absorption :
> les HC « à absorption moyenne » indiqués
pour les plaies faiblement exsudatives : Allevyn
Gentle Border Lite, Biatain Silicone Lite, Urgotul
Lite… ;
> les HC « à absorption importante » pour les
plaies plus exsudatives : Aquacel Foam, Askina
Dressil, HydroTac, Mepilex, Suprasorb P… ;
> les HC « superabsorbants » pour les plaies très
exsudatives : Mextra Superabsorbant, Resposorb
Super, Sorbact Superabsorbant, Vliwasorb Pro…
nLes hydrocolloïdes sont recommandés pour les
plaies peu à moyennement exsudatives : Comfeel
Plus, Duoderm, Suprasorb H, Urgomed…
nLes alginates, compresses ou mèches, sont
caractérisés par leur capacité d’absorption et
leurs propriétés hémostatiques : Algostéril, Mel-
gisorb, Sorbalgon…
nLes hydrofibres, compresses ou mèches, sont
utilisés en pansement primaire (couvert d’un
pansement secondaire) sur plaies très exsuda-
tives : Aquacel, Biosorb, Urgoclean.
Plaies peu ou pas exsudatives
nLes hydrogels, compresses imprégnées et
plaques, adhésives ou non, sont employés sur
les plaies sèches pour assurer leur humidifica-
tion et faciliter la détersion : Askina Gel, Hydro-
clean, Normlgel, Suprasorb G…
nLes pansements vaselinés, compresses impré-
gnées d’une substance grasse neutre non adhé-
rente (vaseline, paraffine…), maintiennent l’hu-
midité sur plaie sèche ou faiblement exsudative :
Adaptic, Jelonet, Lomatuell H, Tulle gras…
nLes pansements interfaces, compresses ou
mèches, sont indiqués sur les plaies très peu
exsudatives. Ils sont associés à un pansement
secondaire pour les maintenir et absorber
l’excès d’exsudats : Hydrotul, Mepitel, Mepitel
One, Physiotulle, Urgotul.
nLes pansements à base d’acide hyaluronique,
compresses imprégnées, crèmes ou sprays, sont
particulièrement intéressants pour relancer la
cicatrisation des plaies atones : Effidia, Ialuset.
Plaies malodorantes
Les pansements à base de charbon actif, plaques
Antalgie générale
Quand l’anesthésie locale est insatisfaisante,
la prescription d’un antalgique par voie orale,
voire d’un anxiolytique à court délai d’action,
est à discuter avec le médecin. Chaque antal-
gique a un délai d’action propre, mais assez
fréquemment le médicament administré une
heure avant le soin sera efficace. Les produits
de palier 1 (paracétamol) sont souvent insuf-
fisants. Les paliers 2 peuvent être utilisés :
codéine et tramadol, souvent associés au para-
cétamol. Le recours d’emblée aux antalgiques
de palier 3 peut être justifié par l’intensité de
la douleur ; les morphiniques à libération
immédiate ont un délai d’action d’environ
une heure.
Traitement de l’infectioni
Infection locale
Signes cliniques
Les signes classiques de l’infection des plaies
– rougeur, chaleur, douleur, présence de pus,
d’abcès ou d’odeur – ne sont pas toujours pré-
sents dans le cas d’un ulcère, hormis la douleur,
fréquente. L’infection est souvent marquée par
une augmentation des exsudats, la stagnation
d’une plaie qui évoluait bien jusqu’alors ou une
plaie atone (voir Dico+ p.32).
Traitement
nAntiseptiques locaux. Outre le lavage fréquent
de la jambe, des antiseptiques locaux peuvent
être employés sur des temps courts, quinze
jours maximum, sur prescription médicale. Les
antiseptiques à large spectre (chlorhexidine,
dérivés chlorés, dérivés iodés) sont recom-
mandés. Le respect de la flore bactérienne, qui
participe à la détersion, contre-indique le
recours à des antiseptiques en l’absence de
signes avérés d’infection.
nLes pansements à l’argent. Ils peuvent être
utilisés, sur prescription médicale, dans les
mêmes conditions que les antiseptiques (infec-
tion locale objectivée et durée limitée). Ces
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Info+
> Un enjeu
économique. En 2011,
la prise en charge
des ulcères veineux
ou mixtes a représenté
272 millions d’euros
uniquement en soins
de ville, dont 42,4 %
consacrés aux soins
infirmiers (115 M€) et
33 % aux compresses
et pansements (90 M€).
Source : Améliorer la qualité
du système de santé et maîtriser
les dépenses : propositions
de l’Assurance maladie pour
2014, rapport de la CNAMTS
du 11 juillet 2013.
> L’index de pression
systolique est mesuré
par l’angiologue avec
un coût faible et une
durée de quelques
minutes. Elle est
relevée par de rares
médecins en ville
par manque d’intérêt
de la mesure…
Dico+
> Endartériectomie :
ablation de l’endartère,
tunique interne de
l’artère, réalisée sous
anesthésie générale,
afin de restituer un
bon débit à l’artère.
> Angioplastie :
intervention consistant
à réparer, à dilater
ou à remodeler un
vaisseau déformé,
rétréci ou dilaté. Ici, un
ballonnet est introduit
dans l’artère pour
élargir sa lumière. Et
un stent peut être posé.
> Exsudat : ensemble
des sécrétions
produites par une
plaie. Il résulte des
éléments moléculaires
et cellulaires qui
s’accumulent dans
les tissus interstitiels.
Son volume diminue
normalement durant
la cicatrisation mais
peut rester important
lorsque la plaie ne
cicatrise pas et
demeure bloquée au
stade inflammatoire.
Toute plaie évolue en trois grandes phases successives avant
de se fermer.
> Phase inflammatoire et vasculaire : un caillot de protéine
filamenteuse, la fibrine, se forme dans la plaie, dont des cellules
inflammatoires assurent le nettoyage, ou détersion.
> Phase proliférative de bourgeonnement et épidermisation : elle
permet la réparation tissulaire dermique et épidermique de la plaie.
> Phase de remodelage et de maturation de la cicatrice : elle se
rapproche le plus possible de la structure originelle des tissus lésés
par la plaie.
>Rappels de cicatrisation