le théor`eme des nombres premiers vu par kahane

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LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
2
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
1. Introduction
Soit P l’ensemble des nombres premiers. Pour x réel on définit :
π(x) := #{p ∈ P | p ≤ x}
π(x) représente donc le nombre de nombres premiers précedant x.
Hadamard et de la Vallée-Poussin en 1896 ont établi indépendamment cet
équivalent :
x
π(x) ∼
x→+∞ logx
Leur preuve repose sur les propriétés de la fonction ζ de Riemann, définie
pour Re(s) > 1 par
∞
P
1
ζ(s) =
ns .
n=1
Par son expression en produit Eulérien qui la lie aux nombres premiers
ζ(s) = Π (1 −
p∈P
1 −1
ps )
la fonction ζ joue un rôle central en théorie analytique des nombres. Nous
verrons que cette égalité permet de prouver que ζ ne s’annule pas sur le
demi-plan Re(s) > 1. Le point essentiel de la démonstration d’Hadamard et
de la Vallée Poussin est que la fonction ζ se prolonge de façon méromorphe
sur un voisinage de Re(s) ≥ 1 admettant 1 comme seul pôle et ne s’annulant
pas sur la droite Re(s) = 1.
Historiquement Riemann est le précurseur de cette vision analytique : dans
son fameux article de 1859 (cf [2]) il met en évidence un lien entre la
distribution des nombres premiers et les zéros de la fonction ζ. Nous
prouverons en fait que le théorème des nombres premiers est équivalent à la
non annulation de ζ sur Re(s) = 1.
Néanmoins il existe des preuves n’utilisant pas d’analyse complexe, comme
celle d’Erdös et Selberg... cf [4].
Auparavant, la répartition des nombres premiers était déjà un problème
ouvert. Euler avait notamment introduit dés 1737 la restriction de la fonction
ζ à ]1, +∞[ et son expression en produit ”eulérien” pour étudier les nombres
premiers. L’équivalent de π(x) donné ci-dessus, fut, conjecturé par Gauss et
Legendre au cours du XVIIIe siècle.
En 1852 Tchébychev établit par des moyens élémentaires l’encadrement
suivant :
π(x)
π(x)
≤ 1 ≤ lim sup
lim inf
x→∞ x/log(x)
x→∞ x/log(x)
a une limite, elle ne peut être que 1. L’existence
Ainsi si le rapport π(x)log(x)
x
de la limite est donc le réel problème.
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
3
Ce mémoire est largement inspiré de l’article de Jean-Benoı̂t Bost [0], et des
livres cités en bibliographie. Il existe de nombreuses démonstrations du
théorème des nombres premiers, mais celle que nous proposons allie deux
domaines : l’analyse complexe à travers l’étude de ζ et l’analyse harmonique
pour la preuve.
Le début suit pas à pas le schéma proposé par Hadamard et
de la Vallée Poussin à savoir : la non annulation de ζ sur Re(s)=1 et
l’introduction de la série de Dirichlet définie sur Re(s) > 1 par
X1
.
ζP (s) =
ps
p∈P
Cette fonction se prolonge en une fonction méromorphe au voisinage de la
droite Re(s) = 1 avec une singularité logarithmique en 1. C’était ainsi
l’occasion d’inscrire ces résultats dans une étude de Γ et ζ.
Vers 1930 suite à des travaux d’analyse harmonique concernant les théorèmes
taubériens et leurs généralisation, Wiener obtint une nouvelle preuve utilisant
l’analyse harmonique de la fonction t → ζ(1 + it). Nous présentons la preuve
de Kahane inspirée des idées précédentes (cf annexe). Nous nous sommes
éloignés de la structure de l’article de J-B Bost afin de la rendre plus
naturelle. Elle utlise la transformée de Fourier et la théorie des distributions.
4
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
2. La fonction Gamma d’Euler et la fonction zeta de Riemann.
Cette première partie est une étude élémentaire des fonctions Γ et ζ. Cette
étude est la résolution du problème 3 de [1] que nous avons enrichie avec les
ouvrages [2],[3] et [4].
2.1. La fonction Γ.
Définition 2.1. On pose pour tout z ∈ C tel que Re(z) > 0
Z +∞
e−t tz−1 dt
Γ(z) =
0
Cette définition a bien un sens : en effet au voisinage de +∞ on a
1
e−t tRe(z)−1 = o( t12 ) et au voisinage de 0 on a e−t tRe(z)−1 ∼ t1−Re(z)
qui est
intégrable si et seulement si Re(z) > 0. Donc t 7→| e−t tz−1 | est intégrable sur
R+ pour z ∈ {z ∈ C | Re(z) > 0}.
Plan : Dans cette sous partie nous allons établir les points suivants :
• Γ est holomorphe sur P = {z ∈ C | Re(z) > 0}.
• Γ se prolonge en une fonction holomorphe sur U = C − {0, −1, −2, ...}.
• Les points 0,-1,-2,...,-k,... sont des pôles simples de résidus
k
1, −1, 12 , ..., (−1)
k! , ...
• De plus ∀z ∈ U Γ(z + 1) = zΓ(z).
• La formule des compléments : pour tout z non entier
π
Γ(z)Γ(1 − z) =
sin(πz)
• Γ1 est une fonction entière dont les seuls zéros sont simples et situés aux
points 0,-1,-2,...et Γ ne s’annule en aucun point de C.
Proposition 2.2. Γ est holomorphe sur P = {z ∈ C | Re(z) > 0}.
Preuve : z 7→ e−t tz−1 est holomorphe sur P.
Soit K un compact de P, il existe η > β > 0 tel que pour tout z ∈ K on a
η > Re(z) > β.
Donc pour tout t ∈]0, +∞[ on a
| e−t tz−1 |≤ χ]0,1] (t)e−t tβ−1 + χ[1,+∞[ (t)e−t tη−1 ∈ L1 (R)
donc par le théorème d’analyticité de Lebesgue Γ est holomorphe sur P.
Proposition 2.3. ∀z ∈ P Γ(z + 1) = zΓ(z).
R +∞
Preuve : On intègre par partie Γ(z + 1) = 0 e−t tz dt.
On a par une récurence immédiate le corollaire suivant :
Corollaire 2.4. ∀n ∈ N Γ(n + 1) = n!
La fonction Γ interpole donc la fonction factorielle.
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
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Proposition 2.5. Γ se prolonge en une fonction holomorphe sur
U = C − {0, −1, −2, ...}.
k
Les points 0,-1,-2,...,-k,... sont des pôles simples de résidus 1, −1, 12 , ..., (−1)
k! , ...
De plus ∀z ∈ U Γ(z + 1) = zΓ(z).
R1
R +∞
Preuve : Soit Γ1 := z ∈ P 7→ 0 e−t tz−1 dt et Γ2 := z ∈ P 7→ 1 e−t tz−1 dt.
Par le théorème d’analyticité de Lebesgue Γ2 est entière.
Reste à prolonger Γ1 à U. Or pour z ∈ P
Z 1X
Z 1
(−1)n n+z−1
−t z−1
t
dt.
Γ1 (z) =
e t dt =
0
0 n≥0 n!
La convergence de la série étant uniforme sur [0,1] on peut intégrer terme à
P (−1)n 1
terme d’où ∀z ∈ P Γ1 (z) =
n! n+z .
n≥0
Soit K un compact de U. Il existe R > 0 tel que K ⊂ B(O, R) d’où pour
n>R
∀z ∈ K |
donc la série
P (−1)n
n≥0
n!
1
n+z
(−1)n 1
n! n+z
|≤
1 1
n! n−R
converge normalement sur K, donc uniformément sur
n
1
K. De plus z 7→ (−1)
n! n+z est holomorphe sur U pour tout n ∈ N.
Donc par le théorème classique sur les séries de fonctions holomorphes on en
déduit que Γ1 est holomorphe sur U.
Ainsi Γ se prolonge en une fonction analytique sur U, comme U est connexe
par le principe du prolongement analytique,le prolongement est unique et on
note encore Γ ce prolongement.
De plus le théorème des zéros isolés appliqué à la fonction
z 7→ Γ(z + 1) − zΓ(z), nulle sur P entraı̂ne :
∀z ∈ U Γ(z + 1) = zΓ(z)
Etudions maintenant les singularités de Γ ; l’etude précédente montre que :
Pour k un entier, k ≤ 1 on a :
X (−1)n 1
(−1)k 1
Γ(z) =
+
+ Γ2 (z)
k! k + z
n! n + z
n≥0,n6=k
P (−1)n 1
Or z 7→
n! n+z + Γ2 (z) est analytique au voisinage de -k donc -k est
n≥0,n6=k
un pôle simple de Γ de résidu
(−1)k
k!
Remarque 2.6. Il existe une relation trés simple entre la fonction Γ et la
fonction sinus : c’est la formule des compléments.
Elle nous permettra entre autres d’établir un prolongement holomorphe de la
fonction ζ.
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Lemme 2.7.
+∞
Z
∀x ∈]0, 1[ Γ(x)Γ(1 − x) =
0
Preuve :
+∞
Z
Z
−t x−1
+∞
tx−1
dt
1+t
2
dt = 2
e−u u2x−1 du
0
Z +∞ 0
2
e−v v −2x+1 dv
Γ(1 − x) = 2
e t
Γ(x) =
0
Par application du théorème de Fubini on a :
Z +∞ Z +∞
2
2
Γ(x)Γ(1 − x) = 4
e−(u +v ) u2x−1 v −2x+1 dudv
0
0
donc
Z
π
2
Z
+∞
0
2
e−r (rcos(θ))2x−1 (rsin(θ))−2x+1 rdrdθ
Γ(x)Γ(1 − x) = 4
0
donc
Z
π
2
Γ(x)Γ(1 − x) = 2
2
On pose t = cotan (θ) d’où dθ =
(cotan(θ))2x−1 dθ
0
dt √
− (1+t) t
d’où
Z
∀x ∈]0, 1[ Γ(x)Γ(1 − x) =
+∞
0
tx−1
dt
1+t
Théorème 2.8. La formule des compléments.
Pour tout z non entier
π
Γ(z)Γ(1 − z) =
sin(πz)
Preuve : Soit x ∈]0, 1[. On va intégrer la fonction z 7→
γR,ε suivant :
Fig. 1. Contour γR,ε
z x−1
1+z
le long du lacet
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
On considère√γR,ε = γ1,R,ε ∪ γ2,R,ε ∪ γ3,R,ε ∪ γ4,R,ε .
Posons α = R2 − ε2
γ1,R,ε : [0, α] → C t 7→ t + iε
γ2,R,ε : [θ, 2π − θ] → C t 7→ Reit
γ3,R,ε : [0, α] → C t 7→ α − t − iε
π
−it
γ4,R,ε : [ −π
2 , 2 ] → C t 7→ −εe
Commençons par montrer que les intégrales sur les arcs de cercles tendent
vers 0 quand R → +∞ et ε → 0.
Z
z x−1
Rx
|
dz | ≤ 2π
→ 0
R − 1 R→+∞
γ2,R,ε 1 + z
De même :
Z
z x−1
εx
|
dz | ≤ π
→ 0
1 − ε ε→0
γ4,R,ε 1 + z
Ensuite on examine les intégrales sur les segments :
Z
Z α (x−1)log(t+iε)
z x−1
e
dz =
dt
1 + t + iε
γ1,R,ε 1 + z
0
où log est la détermination du logarithme sur C − R+ il vient donc
Z
Z α (x−1)[ln√t2 +ε2 +iarg(t+iε)]
z x−1
e
dz =
dt
1 + t + iε
γ1,R,ε 1 + z
0
Nous allons appliquer le théorème de Lebesgue pour passer à la limite :
hypothèse de convergence :
√
(x−1)[ln t2 +ε2 +iarg(t+iε)]
χ[0,α]
e
hypothèse de domination :
1 + t + iε
√
2
tx−1
→ χ[0,R]
ε→0
1+t
2
tx−1
e(x−1)[ln t +ε +iarg(t+iε)]
χ[0,α] |
|≤ χ[0,R]
∈ L1 (R+ )
1 + t + iε
1+t
Donc par le théorème de Lebesgue on a :
√
Z R x−1
2
2
t
e(x−1)[ln t +ε +iarg(t+iε)]
dt →
dt
ε→0 0 1 + t
1 + t + iε
0
∈ L1 (R+ ) donc on a finalement :
Z
Z ∞ x−1
z x−1
t
dz →
dt
ε→0
1+t
γ1,R,ε z + 1
0
Z
de plus
tx−1
1+t
α
R→+∞
de même en tenant compte de la discontinuité du logarithme on a
Z
Z ∞ x−1
z x−1
t
2iπx
dz → −e
dt
ε→0
1+t
γ3,R,ε 1 + z
0
R→+∞
7
8
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Finalement
Z
γR,ε
z x−1
dz
1+z
2iπx
→
ε→0
R→+∞
(1 − e
Z
∞
)
0
tx−1
dt
1+t
Remarquons que pour tout R > 0, et 0 < ε < 1 les lacets γR,ε sont tous
homotopes entre
dans l’ouvert C − {−1} ∪ R+ donc par le théorème
R eux
x−1
d’homotopie γR,ε z1+z dz ne dépend pas de R et ε donc
Z ∞ x−1
Z
t
z x−1
2iπx
dz = (1 − e )
dt
1+t
0
γR,ε 1 + z
R x−1
Par application du théorème des résidus γ z1+z dz = −2iπeiπx d’où
Z
0
+∞
tx−1
π
dt =
1+t
sin(πx)
Donc par le lemme 2.7
π
=0
sin(πx)
π
De plus ]0, 1[⊂ C − Z , C − Z est connexe et z 7→ Γ(z)Γ(1 − z) − sin(πz)
est
analytique sur cet ouvert, donc par le théorème des zéros isolés pour tout z
non entier on a :
π
Γ(z)Γ(1 − z) =
sin(πz)
∀x ∈]0, 1[ Γ(x)Γ(x − 1) −
Théorème 2.9. Γ1 est une fonction entière dont les seuls zéros sont simples
et situés aux points 0,-1,-2,...et Γ ne s’annule en aucun point de C.
Pour cela recherchons une bonne expression de
1
Γ
Proposition 2.10. Pour tout z tel que Re(z) > 0 on a
1
Γ(z)
+∞
= zeγz Π (1 + kz )e−z/k .
k=1
Lemme 2.11. Pour tout z tel que Re(z) > 0 on a
1
z n
z
= lim z Π (1 + )
Γ(z) n→∞ n k=1
k
Preuve du lemme : Nous admettrons l’inégalité suivante :
2
t n
−t+1 t
∀t ∈ [0, n] | e − (1 − ) |≤ e
(i)
n
2n
Soit z tel que Re(z) > 0 considérons l’expression intégrale de Γ(z) :
Z +∞
Γ(z) =
e−t tz−1 dt
−t
0
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
Nous allons montrer que
n!nz
.
n→∞ z(z + 1)..(z + n)
Pour cela on remplace e−t par lim (1 − nt )n et ensuite on intégre par partie.
n→+∞
Z +∞
n
z−1 (n − t)
dt
Γ(z) =
lim χ[0,n] (t)t
n→+∞
nn
0
d’après (i) on a de plus :
2
t n
−t
−t+1 t
| 1 − | ≤ e + ne
n
n
t
| tz−1 (1 − )n |≤ tRe(z)−1 e−t + ntRe(z)+1 e−t+1 = g(t)
n
Au voisinage de 0 g(t) ∼ tRe(z)−1 qui est intégrable car Re(z) > 0
Au voisinage de +∞ g(t) = o( t12 ) intégrable.
Par le théorème de convergence dominée de Lebesgue on a donc :
pour tout z tel que Re(z) > 0 :
Z n
1
Γ(z) = lim n
tz−1 (n − t)n dt
n→∞ n
0
En intégrant par partie il vient :
Z n
Z n
tz+1
z−1
n
t (n − t) dt = n(n − 1)
(n − t)n−2 dt
0
0 z(z + 1)
Puis par récurence on a
Z n
Z n
tz+n−1
n!nz+n
z−1
n
t (n − t) dt = n!
dt =
z(z + 1)...(z + n)
0
0 z(z + 1)...(z + n)
d’où
n
1
z
−z
= lim zn Π (1 + )
k=1
Γ(z) n→∞
k
Preuve de la proposition : Soit z tel que Re(z) > 0 alors :
n
n
z
z
z
−z
z(1+ 12 +...+ n1 −ln(n))
zn Π (1 + ) = ze
Π (1 + )e− k
k=1
k=1
k
k
Donc par le lemme :
Γ(z) = lim
n
z
1
1
1
z
= lim zez(1+ 2 +...+ n −ln(n)) Π (1 + )e− k
k=1
k
Γ(z) n→∞
Or
n
P
1
k=1
k
= ln(n) + γ + o(1) où γ est la constante d’Euler.
D’où pour tout z tel que Re(z) > 0 on a la formule de Gauss suivante :
+∞
1
z
= zeγz Π (1 + )e−z/k
k=1
Γ(z)
k
9
10
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Cette dernière propositon permet de montrer le théorème. Avant de faire la
preuve rappelons les deux théorèmes suivants sur les produits infinis : cf [1]
problème 5 et [2] page 351.
Théorème 2.12. Théorème de convergence d’un produit.
Soit Log la détermination principale du logarithme complexe prolongée sur R−
par Log(z) = Log(| z |) + iπ.
P
Si zn 6= 0 à partir d’un certain rang N et si la série
Log(zn ) est
n≥N
convergente, alors le produit infini Π zn est convergent et on a :
n≥0
+∞
Π zn = 0 si et seulement si il existe n tel que zn = 0
n≥0
Théorème 2.13. Théorème d’analyticité d’un produit.
Soit
P (un )n∈N une suite de fonctions analytiques sur un ouvert U. Si la série
un est normalement convergente sur tout compact de U, alors le produit
n≥0
infini Π (1 + un ) est convergent et définit une fonction analytique g sur U
n≥0
dont les zéros sont les zéros des fonctions 1 + un . De plus pour tout z ∈ U qui
n’est pas un zéro de g. on a
+∞
g 0 (z) X u0n (z)
=
g(z)
1 + un (z)
n=0
Preuve du théorème :
On peut écrire
+∞
z
1
= zeγz Π (1 + )e−z/k
k=1
Γ(z)
k
donc
+∞
z
z
z2
1
= zeγz Π (1 + )(1 − + O( 2 ))
k=1
Γ(z)
k
k
k
donc
+∞
z2
z2
z z2
1
γz
= ze Π (1 − 2 + O( 2 ) + O( 2 ))
k=1
Γ(z)
k
k
k k
La série
X z2
z2
z z2
+ O( 2 ) + O( 2 ))
k2
k
k k
est normalement convergente sur tout compact de C, donc par le théorème
d’analyticité d’un produit Γ1 se prolonge en une fonction entière. De plus Γ ne
s’annule pas sinon Γ1 aurait des pôles.
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
11
2.2. La fonction ζ de Riemann.
Définition 2.14. On définit la fonction ζ de Riemann dans le demi-plan
ouvert P = {z ∈ C | Re(z) > 1} par :
X1
ζ(z) =
nz
n≥1
Cette définition a bien un sens car |
série convergente car Re(z) > 1.
1
nz
|=
1
nRe(z)
qui est le terme général d’une
Plan : Cette partie est inspirée de l’article de Riemann de 1859, nous
démontrons les résultats suivants :
• ζ est analytique sur Re(z) > 1
• La formule intégrale de ζ : Pour tout z tel que Re(z) > 1
Z +∞ z−1
1
t
ζ(z) =
dt
Γ(z) 0
et − 1
• ζ se prolonge analytiquement à C − {1}.
• Le point 1 est un pôle simple de résidu 1.
• L’equation fonctionnelle de ζ
∀s ∈ C − {1} ζ(s) = 2(2π)s−1 sin( πs
2 )Γ(1 − s)ζ(1 − s)
P −log(n)
Proposition 2.15. ζ est analytique sur P et ζ 0 (z) =
dans P.
nz
n≥1
Preuve : Soit K un compact de P = {z ∈ C | Rez > 1}.
1
Il existe r ∈ R∗+ tel que pour tout z dans K, Re(z) > α > 1 donc nRe(z)
< n1α
La série converge normalement sur tout compact de C et comme z 7→ n1z est
analytique dans P, par le théorème classique sur les suites de fonctions
P −ln(n)
holomorphes on en déduit que ζ est analytique sur P et ζ 0 (z) =
dans
nz
n≥1
P.
Proposition 2.16. Pour tout z tel que Re(z) > 1
Z +∞ z−1
1
t
ζ(z) =
dt
Γ(z) 0
et − 1
C’est la formule intégrale de ζ.
Preuve : Soit z tel que Rez > 1 alors
Z +∞
1
1
tz−1 e−nt dt = z
Γ(z) 0
n
Donc
Z
1 X +∞ z−1 −nt
ζ(z) =
t e dt
Γ(z) n≥1 0
12
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De plus
XZ
n≥1
+∞
−nt z−1
|e
t
| dt =
0
n≥1
Par le théorème de Beppo-Levi
Z
X Z +∞
| e−nt tz−1 | dt =
n≥1
0
XZ
0
+∞
+∞
tRe(z)−1 e−nt dt
0
e−t Re(z)−1
t
dt < +∞
1 − e−t
Le théorème d’intégration termes à termes s’applique :
Z +∞ z−1
1
t
dt
ζ(z) =
Γ(z) 0
et − 1
Théorème 2.17. ζ se prolonge analytiquement à C − {1}. Le point 1 est un
pôle simple de résidu 1.
Nous introduisons le contour de Hankel γε,r :
Fig. 2. Contour de Hankel γε,r
Lemme 2.18. Soient ε > 0 et 0 < r < 2π et z ∈ C. Soit
Z
(−ξ)z−1
f (z) =
dξ où (−ξ)z = ezlog(−ξ)
ξ
γε,r e − 1
Log étant défini sur C − R− .
La fonction f est entière, nulle pour tout entier k > 1 et
pour tout z ∈ C − {1, 2, ..} on a
Γ(1 − z)
ζ(z) =
f (z)
2iπ
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
13
Preuve :
Plan de la preuve :
– On montre que f est bien définie et holomorphe sur C.
– On prouve ensuite que pour sur le demi-plan Re(z) > 1 on a :
Z +∞ z−1
t
dt
f (z) = (eiπz − e−iπz )
et − 1
0
– On constate que f s’annule pour tout entier k > 1.
– On prolonge ζ.
Commençons
par montrer que la fonction f est bien définie : On pose
√
2
2
x= r −ε
γ1 :] − ∞; −x] → C t 7→ −t + iε
γ2 : [α, 2π − α] → C t 7→ reit
γ3 : [x, +∞[→ C t 7→ t − iε
donc
Z −x
Z +∞
Z 2π−α
(t − iε)z−1
(−t + iε)z−1
(−reit )z
dt
f (z) =
dt +
dt + i
−t+iε
et−iε − 1
1 − ereit
−∞ 1 − e
x
α
donc
Z
Z
Z
−x
f (z) =
+∞
f1 (t, z)dt +
2π−α
f2 (t, z)dt +
−∞
x
f3 (t, z)dt
α
Remarquons que
| (t − iε)z−1 | eRe((z−1)log(t−iε))
| f1 (t, z) |=
=
| e−t+iε − 1 |
| e−t+iε − 1 |
donc
1
2
2
e 2 Re(z−1)ln(t +ε ) e−im(z)arg(t−iε)
| f1 (t, z) |=
| e−t+iε − 1 |
d’où
1
2
2
et e 2 Re(z−1)ln(t +ε )
∼ C(z)et tRe(z−1)
| f1 (t, z) |= C(z)
iε
t
−∞
|e −e |
qui est intégrable au voisinage de −∞ pour tout z ∈ C.
De même t 7→ f2 (t, z) intégrable au voisinage de +∞ pour tout z ∈ C
Enfin t 7→ f3 (t, z) est continue donc intégrable sur [α, 2π − α].
Donc f est bien définie.
Montrons que f est entière à l’aide du théorème d’analyticité de Lebesgue.
Soit K un compact du demi-plan Re(z) > 0, la fonction (z, t) 7→ e−im(z)arg(t−iε)
est bornée par une constante M ∈ R+ sur K×] − ∞, −x]. De plus il existe
η, β > 0 tels que ∀z ∈ K η > Re(z) > β > 0 d’où :
1
1
M et (t2 + ε2 ) 2 (η−1)
M et (t2 + ε2 ) 2 (β−1)
+χ|t2 +ε2 |>1 (t)
∈ L1 (]−∞, −x[)
| f1 (t, z) |≤ χ|t2 +ε2 |≤1 (t)
iε
t
iε
t
|e −e |
|e −e |
14
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
1
1
M e−t (t2 + ε2 ) 2 (β−1)
M e−t (t2 + ε2 ) 2 (η−1)
| f2 (t, z) |≤ χ|t2 +ε2 |≤1 (t)
+χ|t2 +ε2 |>1 (t)
∈ L1 ([x, +∞[)
iε
−t
iε
−t
|e −e |
|e −e |
| reit |Re(z)
rη
≤
∈ L1 (]α, 2π − α[)
it
it
re
re
|e −1| |e −1|
De plus les fonctions z 7→ f1 (t, z), z 7→ f2 (t, z), z 7→ f3 (t, z) sont entières
donc par le théorème d’analyticité de Lebesgue : f est entière. On se place sur
| f3 (t, z) |≤
le demi-plan Re(z)√> 1 et on fait tendre les paramètres vers 0.
log(−t + iε) = ln( t2 + ε2 ) + iarg(−t + iε) donc :
e(z−1)log(−t+iε)
tRe(z)−1 eπ|z|
|
|≤|
|∈ L1 [x, +∞[
t−iε
t
e
−1
e −1
de plus
e(z−1)log(−t+iε)
eiπz tz−1
→
et−iε − 1 ε→0 et − 1
donc par le théorème de convergence dominée de Lebesgue on a
Z +∞
Z +∞ z−1
t
f2 (t, z)dt → eiπz
dt
ε→0
et − 1
x
r
−
tz−1
et −1
∈ L1 (R+ ) donc par le théorème de Lebesgue on a :
Z +∞
Z +∞ z−1
t
iπz
dt
f2 (t, z)dt → e
r→0
et − 1
x
0
de même on a
Z +∞
Z +∞ z−1
t
−iπz
f1 (t, z)dt → −e
dt
ε→0
et − 1
x
0
de plus
r→0
et enfin
Z
2π−α
f3 (t, z)dt → 0
α
r→0
Tous les chemins γε,r sont homotopes entre eux dans l’ouvert C − R+ , par le
théorème d’homotopie f est indépendante de ε et r d’où pour Re(z) > 1 :
Z +∞ z−1
t
iπz
−iπz
f (z) = (e − e
)
dt
et − 1
0
donc d’après la proposition 2.16 on a
f (z) = (eiπz − e−iπz )Γ(z)ζ(z)
et donc
1
1
f (z)
Γ(z) 2isin(πz)
De plus par la formule des compléments on a
ζ(z) =
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
∀z ∈ C − {1, 2, 3, ...} ζ(z) =
15
Γ(1 − z)
f (z)
2iπ
Preuve du théorème 2.18 :
On a d’après le lemme pour Re(z) > 1 ζ(z) = Γ(1−z)
2iπ f (z).
f est entière et s’annule pour tout entier k > 1.
De plus z 7→ Γ(1 − z) est holomorphe sur C − {1, 2, 3, ...} et les points
{1, 2, 3...} sont des pôles simples.
Donc la fonction z 7→ Γ(1−z)
2iπ f (z) est analytique sur C − {1}.
Comme ζ est analytique sur Re(z) > 1 on obtient ainsi un prolongement de ζ
à C − {1}.
Par le principe du prolongement analytique, ce prolongement est unique.
1 est un pôle simple et reste a chercher le résidu. Le résidu de Γ en 0 vaut 1.
En appliquant le théorème des résidus à l’intégrale définissant f on obtient
f (1) = 2iπ. Donc ζ admet un pôle simple en 1 de résidu 1.
Théorème 2.19. l’équation fonctionnelle.
πs
)Γ(1 − s)ζ(1 − s)
2
Preuve : Soit 0 < r < 2π.Le contour γε̃,r − γε,(2k+1)π entoure, dans le sens
inverse les pôles z = 2nπi avec n ∈ {±1, ±2, ..., ±k}.
∀s ∈ C − {1} ζ(s) = 2(2π)s−1 sin(
Fig. 3.
Par application du théorème des résidus on a :
Z
Z
X
(−z)s−1
(−z)s−1
f (s) =
dz
=
dz
−
2πi
(−2nπi)s−1
z
z
γε̃,r e − 1
γε,(2k+1)π e − 1
1≤|n|≤k
Admettons pour le moment que pour s tel que Re(s) < 0 :
Z
| (−z)s−1 (ez − 1)−1 | dz → 0
γε,(2k+1)π
k→+∞
16
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Donc en prenant s tel que Re(s) < 0 et en faisant tendre k vers l’infini on
obtient :
f (s) = (2πi)s (eiπs − 1)eiπs ζ(1 − s)
Or
Γ(1 − s)
f (s)
ζ(s) =
2iπ
donc : pour Re(s) < 0
πs
ζ(s) = 2(2π)s−1 sin( )Γ(1 − s)ζ(1 − s)
2
Par prolongement analytique l’expression est valable pour tout s ∈ C − {1}.
Reste à prouver ce qui a été admis. On considère le contour de Hankel suivant
γε,(2k+1)π .
Sur ce contour | ez − 1 |−1 reste borné et il existe une borne indépendante de k.
Soit α positif on a
1
1
∀z ∈ C Re(z) > α | z
|≤| α
|
e −1
e −1
de même
1
1
|≤| −α
|
∀z ∈ C Re(z) < −α | z
e −1
e −1
Enfin, il existe β > 0 tel que γε,π ∩ [−α, α] × R ⊂ [−α, α] × [β, π]
la fonction z 7→ ez1−1 est holomorphe sur ce compact donc bornée.
1
1
supγε,π ∩[−α,α]×R (z 7→ z
) < sup[−α,α]×[β,π] (z 7→ z
)
e −1
e −1
De plus
∀k ≥ 2 γε,(2k+1)π ∩ [−α, α] × R ⊂ [−α, α] × [β + 2kπ, (2k + 1)π]
donc
1
1
)
≤
sup
(z
→
7
).
[−α,α]×[β,(2k+1)π]
ez − 1
ez − 1
Enfin l’exponentielle complexe est 2iπ périodique
donc
1
1
) = sup[−α,α]×[β,π] (z 7→ z
)
sup[−α,α]×[β,(2k+1)π] (z 7→ z
e −1
e −1
donc
1
1
) ≤ sup[−α,α]×[β,π] (z 7→ z
) =: M
supγε,π ∩[−α,α]×R (z 7→ z
e −1
e −1
Paramétrons le contour comme précédemment, et désignons par Cε,(2k+1)π la
+
−
portion de cercle et Dε,(2k+1)π
et Dε,(2k+1)π
les deux demi-droites.
Nous obtenons les majorations suivantes :
Z
|
(−z)s−1 (ez − 1)−1 dz |≤ 2πC(s)((2k + 1)π)Re(s)
supγε,π ∩[−α,α]×R (z 7→
Cε,(2k+1)π
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
17
avec C(s) constante positive. Or Re(s) < 0 donc
Z
|
(−z)s−1 (ez − 1)−1 dz | → 0
k→∞
Cε,(2k+1)π
De plus
Z
|
s−1
(−z)
Z
−1
z
∞
(e − 1) dz |≤ C(s)
±
Dε,(2k+1)π
1
(t2 + ε2 ) 2 (Re(s)−1) dt
αk
où C(s) est une autre constante positive.
1
Or Re(s) < 0 donc la fonction t 7→ (t2 + ε2 ) 2 (Re(s)−1) est intégrable au
voisinage de l’infini, donc :
Z
|
(−z)s−1 (ez − 1)−1 dz | → 0
k→∞
±
Dε,(2k+1)π
Finalement :
Pour s tel que Re(s) < 0 :
Z
|
(−z)s−1 (ez − 1)−1 dz | → 0
k→+∞
γε,(2k+1)π
2.3. Développement de ζ en produit Eulérien et localisation des
zéros.
Théorème 2.20. Pour tout s ∈ C tel que Re(s) > 1 on a :
ζ(s) = Π (1 − p1s )−1 où P désigne l’ensemble des nombres premiers.
p∈P
ζ ne s’annule pas sur Re(s) > 1.
Preuve : Soit K un compactPde Re(s) > 1 il existe η tel que pour tout s dans
1
K Re(s) > η > 1 et donc
ps converge normalement sur K. On a donc
p∈P
convergence uniforme de la série sur tout compact de {Re(s) > 1}, de plus,
s 7→ p1s est analytique sur {Re(s) > 1} donc par le théorème d’analyticité d’un
produit, le produit Π (1 − p1s ) est convergent et les zéros dans le demi-plan
p∈P
{Re(s) > 1} sont les s tels que 1 − p1s = 0 pour un certain p premier.
Il n’y a pas de zéros donc l’inverse a un sens.
On a
+∞
1 −1 X 1
(1 − s ) =
p
pks
k=1
donc
X 1
1 −1
Π (1 − s ) =
p∈P
p
ns
p≤N
n∈ε(N )
où ε(N ) désigne l’ensemble des entiers dont les diviseurs premiers valent au
plus n.
18
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
De plus ε(N ) ⊃ {1, .., N } donc
N
P
n=1
1
nRe(s)
≤
P
n∈ε(N )
|
1
ns
|.
Puis pour Re(s) > 1
| ζ(s) − Π (1 −
p∈P
p≤N
X 1
1 −1
)
|≤
ps
nRe(s)
n>N
→
N →+∞
0
Proposition 2.21. Les seuls zéros de la fonction ζ dans le demi-plan
Re(s) < 0 sont situés en -2,-4,...,-2n,... De plus ces zéros sont simples. On les
appelle les zéros triviaux de ζ.
Preuve : L’équation fonctionnelle s’écrit
πz
)Γ(1 − z)ζ(1 − z)
2
Nous avons prouvé que ζ et Γ ne s’annulent pas sur Re(s) > 1 il en est de
même pour Γ.
L’équation fonctionnelle montre donc que les zéros de ζ sur Re(s) < 0 sont
ceux de la fonction s 7→ sin( πs
2 )
∀z ∈ C − {1} ζ(z) = 2(2π)z−1 sin(
Proposition 2.22. Les zéros non trivaux de ζ sont contenus dans la bande
0 ≤ Re(s) ≤ 1 ils sont symétriques par rapport aux droites Re(s) = 12 et
Im(s)=0.
Preuve : La fonction ζ étant réelle, pour s ∈]1, +∞[ ζ(s) = ζ(s̄).
Or s 7→ ζ(s̄) étant holomorphe, par le théorème des zéros isolés on a pour
tout s ∈ C − {1} ζ(s) = ζ(s̄). Donc si s est un zéro trivial alors il en est de
même de s̄. De plus l’équation fonctionnelle montre que si s est un zéro non
trivial alors il en est de même de 1-s. De plus il n’y aucun zéros sur Re(s)¿1.
Donc les zéros non triviaux sont contenus dans la bande 0 ≤ Re(s) ≤ 1
Théorème 2.23. La fonction ζ ne s’annule pas sur les droites Re(s) = 0 et
Re(s) = 1.
preuve : cf exercice 1.27.1 de [3]
On peut démontrer que ζ ne s’annule pas sur ces droites par des moyens
d’analyse harmonique (cf article de J-B Bost). Nous préférons donner une
preuve n’utilisant que de l’analyse complexe car cette partie n’utilise que de
telles méthodes. De plus la preuve suivante ouvre la voie à une preuve du
théorème des nombres premiers.
Par le théorème d’analyticité d’un produit, on peut calculer la dérivée
logarithmique de ζ dans le demi-plan Re(s) > 1 :
X
ζ 0 (s)
p−s
=−
log(p)
ζ(s)
1 − p1s
p∈P
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
donc
19
X
ζ 0 (s)
=−
log(p)(pm )−s
ζ(s)
p∈P
m≥1
La famille est commutativement convergente car sommable, en effet
X
ζ 0 (Re(s))
< +∞
| log(p)(pm )−s |=
ζ(Re(s))
p∈P
m≥1
Donc pour Re(s) > 1
∞
X
ζ0
− (s) =
Λ(n)n−s
ζ
n=1
où Λ(n) = ln(p) lorsque n = pj où p ∈ P et j ∈ N∗ et Λ(n) = 0 lorsque n n’est
pas de cette forme.
Considérons une fonction f holomorphe au voisinage d’un point a ou
admettant en ce point une singularité polaire. Alors l’ordre de f en a que l’on
note ω(f, a) vaut :
f0
ω(f, a) = lim Re(ε (a + ε)).
ε→0
f
ε>0
En effet : en notant n = ω(f, a) on peut écrire f (z) = (z − a)n g(z) avec g
holomorphe au voisinage de a et g(a) 6= 0 d’où en dérivant logarithmiquement
on a :
f0
n
g0
(z) =
+ (z)
f
z−a g
On peut prendre z − a = ε puis prendre la partie réelle d’où :
g0
f0
Re(ε (a + ε)) = n + Re(ε (z))
f
g
il ne reste qu’à passer à la limite.
On a
∞
X
ζ0
−Re( (s)) =
Λ(n)n−Re(s) cos(im(s)log(n))
ζ
n=1
Remarquons que (1 + cos(θ))2 = 32 + 2cos(θ) + 12 cos(2θ).
Donc
ζ0
ζ0
ζ0
3Re(ε (1 + ε)) + 4Re(ε (1 + ε + i.im(s))) + Re(ε (1 + ε + 2i.im(s))) ≤ 0
ζ
ζ
ζ
par le petit lemme précédant on a :
3ω(ζ, 1) + 4ω(ζ, 1 + i.im(s)) + ω(ζ, 1 + 2i.im(s)) ≤ 0
Conséquence supposons im(s) 6= 0, on a ω(1 + 2i.im(s)) ≥ 0 (ζ n’a qu’un pôle
en 1) d’où
3
3
0 ≤ ω(ζ, 1 + i.im(s)) ≤ − ω(ζ, 1) =
4
4
20
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
ω(ζ, 1 + i.im(s)) étant un entier on a donc : ω(ζ, 1 + i.im(s)) = 0 Donc la
fonction ζ ne s’annule pas sur Re(s)=1 et par symétrie par rapport à la droite
Re(s) = 21 elle ne s’annule sur la droite Re(s)=0.
Remarque 2.24. Nous venons d’introduire Λ, c’est la fonction de
Van Mangoldt. Elle fait partie des fonctions arithmétiques de la théorie des
nombres, et s’obtient naturellement à partir de la fonction ζ, preuve du rôle
central de cette fonction en théorie analytique des nombres. Il existe de
nombreuses preuves du théorème des nombres premiers. En particulier les
théorèmes Tauberiens et le lemme d’Ikehara permettent une preuve rapide du
théorème.
Cette preuve est proposée comme problème dans [1] (problème 7) nous
donnons ici la trame. On introduit une fonction de comptage
traditionnellement appellée ψ définie par :
X
ψ(x) =
Λ(n)
n≤x
et on prouve pour Re(s) > 1 que :
Z +∞
ζ0
− (s) = s
x−s−1 ψ(x)dx
ζ
1
x
La fonction ψ est liée à la fonction π. On prouve que π(x) ∼ log(x)
est
équivalent à ψ(x) ∼ x. Enfin ce dernier équivalent résulte du lemme d’Ikehara.
Remarque 2.25. Riemann dans son article de 1859 a émis l’hypothèse que les
zéros non triviaux de ζ se situent en fait sur Re(s) = 12 , hypothèse qui de nos
jours n’a pas été démontrée. Néanmoins Hardy a prouvé en 1914 qu’il y a une
infinité de zéros sur la droite Re(s) = 21 . En 1921 Hardy et Litllewood ont
prouvé que le nombre de zéros entre 0 et T est supérieur à KT où K > 0.
Mieux, en 1942 Selberg prouva que ce nombre est supérieur à KTlog(T).
Montgomery établit en 1973 que la répartition statistique des zéros est la
même que celle des valeurs propres d’une classe de matrices aléatoires.
Ceci confirme l’idée classiquement attribuée à Hilbert et Polya selon laquelle
les zéros seraient reliés aux valeurs propres d’un opérateur auto-adjoint. Enfin
le calcul numérique montre que les 1.500.000.000 zéros dans la bande critique
sont bien sur la droite Re(s) = 12 .
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
21
3. Le théorème des nombres premiers
3.1. Etude de la série de Dirichlet ζP .
Définition 3.1. Une série de Dirichlet est une série, dépendant d’une
variable complexe s de la forme
+∞
X
an
n=1
ns
où les coefficients sont des nombres complexes s.
Proposition 3.2. Si la série converge absolument pour une valeur s = s0
alors elle converge normalement sur le demi-plan Re(s) ≥ Re(s0 ) et définit
alors une fonction holomorphe sur le demi-plan Re(s) > Re(s0 ). L’abscisse de
convergence absolue σ est définie comme la borne inférieure des réels Re(s)
où on a convergence absolue en s. Bref la fonction est définie et holomorphe
sur Re(s) > σ.
Définition 3.3. On note ζP la série de Dirichlet définie par
X1
ζP (s) =
.
ps
p∈P
P1
La série
p diverge donc son abscisse de convergence est supérieure ou égale
p∈P
à 1 elle converge absolument sur tout demi-plan Re(s) > ρ > 1 donc son
abscisse de convergence est 1, et ζP est holomorphe sur Re(s) > 1.
n
n
P
Preuve : soit un = Π 1−1 1 et considérons ln(un ) = − ln(1 − p1i ).
i=1
pi
i=1
La série de terme général ln(1 −
Or
1
pi )
est de même nature que la suite un .
+∞
X 1
1
=
pi
1 − p1n
i=0 n
Or tout nombre n1 peut s’écrire comme produit d’inverse de puissances de
nombres premiers
n.
P 1 inférieurs ou égaux àP
1
Donc un >
n donc un diverge. D’où
pn diverge.
Le but de cette partie est de prouver le theorème suivant :
Théorème 3.4. Pour tout t ∈ R∗ , ζP admet un prolongement holomorphe au
voisinage de 1+it.
De plus ζP admet une singularité logarithmique en 1 donc
t 7→ ζP (1 + it) − log( it1 ) se prolonge de manière C ∞ au voisinage de 0.
Ce théorème sera d’une importance cruciale pour la preuve du théorème des
nombres premiers.
22
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Sa démonstration nécessite les deux propositions suivantes.
Proposition 3.5. Posons, pour tout s ∈]1, +∞[
g(s) = log(ζ(s)) − ζP (s)
La fonction g ainsi définie se prolonge en une fonction holomorphe sur le
demi-plan Re(s) > 12 .
Preuve : Le développement eulérien de ζ montre que pour tout s ∈]1, +∞[
X
1
1
g(s) =
[−log(1 − s ) − s ]
p
p
p∈P
1
ps
On a pour Re(s) > 0 ∈ B(O, 1) boule ouverte de centre O et de rayon 1.
Donc pour tout s ∈ C avec Re(s) > 0 1 − p1s ∈
/ R− .
On considère donc la détermination du log sur C − R− .
La fonction s 7→ −log(1 − p1s ) − p1s est analytique sur Re(s) > 0
P
Il reste à montrer que
[−log(1 − p1s ) − p1s ] converge pour tout s tel que
p∈P
1
2
Re(s) > avec convergence normale sur chaque demi-plan {Re(s) > ρ > 12 }.
Soit ρ > 0, alors pour tout s tels que Re(s) ≥ ρ et tout p ∈ P : | p1s |≤ p1ρ ≤ 21ρ ,
il existe une constante C(ρ) ∈ R∗+ :
1
| u |≤ ρ donc | log(1 − u) + u |≤ C(ρ) | u |2
2
(car log(1-u)+u est holomorphe, et admet un zéro d’ordre 2 en 0).
Et donc | log(1 − p1s ) + p1s |≤ C(ρ)
p2ρ qui est le terme général d’une série
convergente si 2ρ > 1.
Donc g se prolonge en une fonction holomorphe sur le demi-plan Re(s) > 12 .
Proposition 3.6. Soit s0 ∈ C tel que Re(s0 ) = 1 et n l’ordre de ζ en s0
La fonction holomorphe sur Re(s) > 1 : ζP (s) − nlog(s − s0 ) se prolonge en
une fonction holomorphe au voisinage de s0 .
log désigne la détermination principale du logarithme sur C − R−
Preuve : On a pour tout s tel que Res > 1 :
exp(ζP (s) − nlog(s − s0 )) = (s − s0 )−n exp(ζP (s)) = (s − s0 )−n ζ(s)exp(−g(s)).
Cette fonction ne s’annule pas en s0 , car g est holomorphe sur Re(s) > 21 et
ζ(s)
(s−s0 )n est une série entière.
Pour r ∈ R∗+ suffisament petit pour tout s ∈ B(s0 , r) on a
exp(ϕ(s)) = exp(ζP (s) − nlog(s − s0 ))
où ϕ est holomorphe sur B(s0 , r).
En effet exp : C → C∗ est surjective et localement biholomorphe. Comme
B(s0 , r) ∩ {Re(s) > 1} est connexe il existe k ∈ Z tel que :
ζp (s) − nlog(s − s0 ) = ϕ(s) + 2ikπ
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
23
La fonction s 7→ ϕ(s) + 2ikπ constitue le prolongement holomorphe cherché.
Nous avons précédemment montré que la fonction ζ ne s’annule pas sur la
droite Re(s) = 1 d’où le théorème.
3.2. Le théorème des nombres premiers par la transformée de
Fourier.
3.2.1. L’idée de Kahane.
Soit x un réel. On définit π(x) comme le nombre de nombres premiers
inférieurs ou égaux à x. Remarquons que pour x < 2, π(x) = 0. Par la suite on
ne raisonne que pour x > 0. Nous nous proposons de démontrer dans cette
deuxième partie le théorème suivant :
Théorème 3.7. On a l’équivalent suivant au voisinage de +∞ : π(x) ∼
x
ln(x) .
Nous démontrons le résultat équivalent suivant :
π(ey )
1
∼
ey y→+∞ y
y
)
L’idée de Kahane est simple : voir π(e
ey comme une transformée de Fourier,
puis chercher un développement asymptotique d’une intégrale de Fourier.
On ne peut pas appliquer la formule d’inversion de Fourier à la fonction
π(ey )
ey car si le théorème des nombres premiers est vrai celle-ci n’est pas dans
L1 (R).
y
)
Mais y 7→ π(e
est continue par morceaux nulle sur R− et majorée par 1 sur
y
e
R+ . Cette fonction est donc localement intégrable à croissance lente, elle
définit donc un élément de S 0 (R). Nous commençons donc par chercher la
transformée de Fourier de cette fonction au sens des distributions.
y
)
3.2.2. Transformée de Fourier de π(e
ey .
Soit ϕ ∈ S(R) par dualité on a :
π(ey )
π(ey )
< F y , ϕ >=< y , Fϕ >
e
e
c’est à dire
Z
π(ey )
π(ey )
Fϕ(y)dy
< F y , ϕ >=
y
e
R e
On remarque que pour y ∈ R
X
y
π(e ) =
1[ln(p),∞[ (y)
p∈P
d’où
π(ey )
< F y , ϕ >=
e
Z X
R p∈P
1[ln(p),∞[ (y)e−y Fϕ(y)dy
24
Or
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Z X
−y
| 1[ln(p),∞[ (y)e
R p∈P
π(ey )
| Fϕ(y) | dy
|| Fϕ(y) | dy =
y
R e
Z
y
)
Comme Fϕ ∈ S(R), on a π(e
ey | Fϕ(y) | est intégrable au voisinage de +∞.
De plus cette fonction est nulle sur R− et continue par morceaux et bornée
y
)
sur R+ donc y → π(e
| Fϕ(y) |∈ L1 (R).
y
e
Par le théorème d’intégration termes à termes, on a donc
XZ
π(ey )
< F y , ϕ >=
1[ln(p),∞[ (y)e−y Fϕ(y)dy
e
R
p∈P
donc
X
π(ey )
< y , Fϕ >=
e
p∈P
donc
<
Z
1R− (log(p) − y)elog(p)−y e−log(p) Fϕ(y)dy
R
X1
π(ey )
,
Fϕ
>=
(f0 ∗ Fϕ)(log(p))
ey
p
p∈P
x
1
avec f0 : x → f0 (x) = 1R− (x)e ∈ L (R)
Or on a
Z
F −1 (f0 ) : t 7→
e2iπty 1R− (y)ey dy =
R
1
1 + 2iπt
Donc
X1
π(ey )
ϕ(t)
F(
)(log(p))
∀ϕ ∈ S(R) < F y , ϕ >=
e
p 1 + 2iπt
p∈P
P1
Une idée tout à fait naturelle est d’introduire la mesure, µ =
p δlog(p) , puis
p∈P
d’en prendre la transformée de Fourier... et de voir l’égalité précédente
comme :
ϕ(t)
ϕ(t)
π(ey )
) >=< Fµ,
>
∀ϕ ∈ S(R) < y , ϕ >=< µ, (
e
1 + 2iπt
1 + 2iπt
3.2.3. La transformée
P 1de Fourier de µ.
On considère µ =
p δlog(p) .
p∈P
∀ϕ ∈ D(R) < µ, ϕ >=
X1
p∈P
p
δlog(p) (ϕ) < +∞
De plus pour K compact, ϕ ∈ D(R) à support dans K :
X
1
|< µ, ϕ >|≤
|| ϕ ||∞
p
p∈P ∩ exp(K)
ainsi µ est une mesure.
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
Soit ϕ ∈ S(R) alors y 2 ϕ(y) → 0 quand y → ∞, ainsi
1
1
2
|
(log(p))
ϕ(log(p))
|≤
plog(p)2
p( log(p))2
qui est le terme général d’une série convergente.
Donc µ se prolonge à S(R).
De plus on a |< µ, ϕ >|≤ cste || x2 ϕ(x) ||∞ donc µ est continue sur S(R).
Donc µ est un élément de S 0 (R), cherchons Fµ.
Soit ϕ ∈ S(R)
X1
Fϕ(log(p))
< Fµ, ϕ >=< µ, Fϕ >=
p
p∈P
donc
< Fµ, ϕ >=
X1 Z
p∈P
ainsi si on peut échanger
P
p
e−2iπlog(p)t ϕ(t)dt
R
R
et , il vient
Z
XZ
1
ζP (1 + 2iπt)ϕ(t)dt
∀ϕ ∈ S(R) < Fµ, ϕ >=
ϕ(t)dt =
1+2iπt
R p
R
p∈P
Ce qui fait obstacle au théorème d’intégration termes à termes est le fait
suivant :
Z X
XZ
1
1
| 1+2iπt || ϕ(t) | dt =
| ϕ(t) | dt = +∞
p
p
R p∈P
p∈P R
P1
car
p diverge.
p∈P
D’ou l’idée de remplacer 1 + 2iπt par 1 + 2iπt + ε, ε > 0
Le théorème d’intégration termes à termes s’applique alors :
Z X
XZ
1
1
ϕ(t)dt =
ϕ(t)dt
1+ε+2iπt
1+ε+2iπt
p
R
R p
p∈P
p∈P
Reste à prouver :
XZ
1
XZ
1
ϕ(t)dt =< Fµ, ϕ >
p1+2iπt
p∈P
p∈P
Z
Z
b) lim
ζP (1 + 2iπt + ε)ϕ(t)dt =
ζP (1 + 2iπt)ϕ(t)dt
a) lim
ε→0+
ε→0+
R
p
ϕ(t)dt =
1+ε+2iπt
R
R
R
a) Dans le premier cas on introduit logiquement
X 1
µε =
δlogp
p1+ε
p∈P
Montrons que µε → µ dans S 0 (R).
Puis par continuité de Fsur S 0 (R) Fµε → Fµ.
25
26
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Soit ϕ ∈ S(R) alors (log(p))2 ϕ(log(p)) → 0 quand p → +∞
donc | (log(p))2 ϕ(log(p)) |≤ M pour tout p.
D’où pour tout ε > 0
1
M
1
(log(p))2 ϕ(log(p)) |≤
| 1+ε
2
p log(p)
p(log(p))2
qui est le terme général d’une série convergente.
Donc la série de fonctions en ε converge uniformément sur [0,+∞[ on peut
donc passer à la limite en 0.
D’où µε → µ dans S 0 (R) et Fµε → Fµ dans S 0 (R).
b) Dans le deuxième cas on se restreindra aux éléments ϕ de D(R), il suffit
donc de prouver pour tout [a, b] ⊂ R
Z
| ζP (1 + 2iπt + ε) − ζP (1 + 2iπt) | → 0
ε→0
[a,b]
Ici intervient le comportement local de ζP au voisinage de Re(s)=1.
Par le théorème 3.6 la fonction h définie par h(s) = ζP (s) + log(1 − s) est C ∞
au voisinage de Re(s)=1 donc :
Z
| ζP (1 + 2iπt + ε) − ζP (1 + 2iπt) | dt
[a,b]
Z
Z
≤
| h(1+2iπt+ε)−h(1+2iπt) | dt+
| log(−2iπt−ε)−log(−2iπt) | dt
[a,b]
[a,b]
On peut supposer que 0 ≤ ε ≤ 1 d’où (t, ε) ∈ [a, b] × [0, 1]
1 + 2iπt appartient à un compact K, h étant holomorphe sur ce compact, on a
| h(1 + 2iπt + ε) − h(1 + 2iπt) |≤ εsupx∈K | h0 (x) |
de plus
log(−2iπt − ε) = ln(| −2iπt − ε |) + iarg(−2iπt − ε)
| log(−2iπt + ε) − log(−2iπt) |→ 0
ε→0
1
| log(−2iπt + ε) − log(−2iπt) |≤| ln(4πt2 + 1) + ln(2πt) | +2π ∈ L1 (a, b)
2
Par application du théorème de Lebesgue :
Z
lim
| log(−2iπt − ε) − log(−2iπt) | dt = 0
ε→0
d’où
[a,b]
Z
| ζP (1 + 2iπt + ε) − ζP (1 + 2iπt) | dt = 0
lim
ε→0
[a,b]
d’où
Z
∀ϕ ∈ D(R) on a lim
ε→0
Z
ζP (1 + 2iπt + ε)ϕ(t) =
[a,b]
ζP (1 + 2iπt)ϕ(t)dt
[a,b]
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
donc
27
Z
∀ϕ ∈ D(R) < Fµ, ϕ >=
ζP (1 + 2iπt)ϕ(t)dt
R
Finalement :
π(ey )
∀ϕ ∈ D(R) < F y , ϕ >=
e
Z
ζP (1 + 2iπt)
R
ϕ(t)
dt
1 + 2iπt
3.2.4. Vers une version lissée du théorème.
Considérons x 7→ ψ(x − y) transformée de Fourier de t 7→ e2iπty ϕ(t) avec
ϕ ∈ D(R).
On a donc
Z
Z
π(ex )
ϕ(t)e2iπty
ψ(x − y) x dx =
ζP (1 + 2iπt)
dt
e
1 + 2iπt
R
R
Si on fait ψ = δ on obtient :
Z
π(ex )
π(ey )
ψ(x − y) x dx = y
e
e
R
y
)
Idée : approcher δ par une famille de fonctions Ψ que l’on ”convole” avec π(e
y
e
y
)
pour obtenir π(e
y
e .
R
2iπty
Faire un développement asymptotique de R ζP (1 + 2iπt) ϕ(t)e
1+2iπt dt
On aura ainsi le théorème.
Cherchons en premier le développement asymptotique, nous obtiendrons alors
un théorème lissé.
t 7→ ζP (1 + 2iπt) − log( it1 ) est une fonction C ∞ sur R d’après la première
partie.
D’où
Z
Z Z
ϕ(t)e2iπty
1 ϕ(t)e2iπty
1 ϕ(t)e2iπty
ζP (1+2iπt)
dt =
ζP (1 + 2iπt) − log( )
dt+ log( )
dt
1 + 2iπt
it 1 + 2iπt
it 1 + 2iπt
R
R
R
Examinons la convergence de ces deux termes.
Tout d’abord :
1
ϕ(t)
ζP (1 + 2iπt) − log( )
∈ D(R) ⊂ S(R)
it 1 + 2iπt
donc
ϕ(t)
1
∈ S(R)
F −1 (ζP (1 + 2iπt) − log( ))
it 1 + 2iπt
donc
ϕ(t)
1
1
−1
= o( )
F
(ζP (1 + 2iπt) − log( ))
it 1 + 2iπt
y
Considérons maintenant
Z
1 ϕ(t)e2iπty
log( )
dt
it 1 + 2iπt
R
28
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
On a
1 ϕ(t)
log( )
∈ L1 (R)
it 1 + 2iπt
donc par le lemme de Riemann Lebesgue l’intégrale tend vers 0 quand
y → ∞. Il reste à préciser comment se fait cette convergence vers 0.
Lemme 3.8. Si ϕ ∈ D(R) alors
Z
1 ϕ(t) 2iπty
ϕ(0)
1
log( )
e
dt =
+ o( )
it 1 + 2iπt
y
y
R
Preuve : Considérons
1 ϕ(t)e2iπty
2iπy log( )
dt
it 1 + 2iπt
R
Z
En effet on a dans S 0 (R) :
Z
1 ϕ(t)e2iπty
1
ϕ(t)
1 d
ϕ(t)
−1 d
2iπy log( )
dt = −F
(log( ))
+ log( ) (
))
it 1 + 2iπt
dt
it 1 + 2iπt
it dt 1 + 2iπt
R
Comme toutes les fonctions sont dans L1 (R) la transformée dans S 0 (R) est
donnée par la formule intégrale. De plus ces fonctions en y sont continues et
égales dans S 0 (R) donc égales en tout point.
ϕ(t)
)) = 0
Par le lemme de Riemann Lebesgue : lim F −1 (log( it1 ) dtd ( 1+2iπt
y→+∞
De plus
d
1
ϕ(t)
d
1
ϕ(t)
(log( ))
) = −F −1 ( log( )) ∗ F −1 (
)
dt
it 1 + 2iπt
dt
it
1 + 2iπt
On peut montrer que
1
d
F −1 ( log( )) = −2iπ1R+
dt
it
d’où
Z y
d
1
ϕ(t)
ϕ(t)
−F −1 ( log( ))
)(y) = −
2iπF −1 (
)dt
dt
it 1 + 2iπt
1 + 2iπt
−∞
Par le théorème de Lebesgue
Z y
Z
ϕ(t)
lim 2iπ
F −1 (
)dt = 2iπ F −1 ϕ(t)dt = 2iπϕ(0)
y→+∞
1 + 2iπt
−∞
R
d’où
Z
Z
1 ϕ(t)e2iπty
ϕ(0)
1
1
1
log( )
dt =
+ o( ) =
ψ(x)dx + o( )
it 1 + 2iπt
y
y
y R
y
R
F −1 (
Nous venons de prouver le théorème des nombres premiers version
lissée :
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
29
Théorème 3.9. Pour toute fonction ψ transformée de Fourier d’une fonction
de D(R), on a, lorsque y tend vers +∞
Z
Z
1
π(ex )
1
ψ(x)dx + o( )
ψ(x − y) x dx =
e
y R
y
R
3.2.5. Fin de la preuve du théorème des nombres premiers.
Si nous pouvions dans le théorème lissé remplacer ψ par δ nous aurions le
théorème classique des nombres premiers.
L’idée est donc simple : approcher le dirac par une suite de fonctions.
Soit ψ une fonctionR à valeurs positives, transformée de Fourier d’un élément
de D(R), telle que
R ψ(x)dx =1. Considérons la famille de fonction indexée
par λ > 0 λ 7→ ψλ : t 7→ λ1 ψ( λt ) .
Les fonctions ψλ satisfont aux mêmes conditions que ψ et de plus :
Z
Z
(1) lim+
ψλ (t)dt = lim+
ψ(t)dt = 0
λ→0
et
|t|≥ε
λ→0
Z
(2) lim+
λ→0
|t|≥ε
|t|≥ λε
Z
| t | ψλ (t)dt = lim+ λ
λ→0
| t | ψ(t)dt = 0
|t|≥ λε
Pour prouver le théorème des nombres premiers on va raisonner avec les outils
liminf et limsup.
a) Montrons que
yπ(ey )
limsup
≤1
ey
y→∞
On a
Z
Z y+ε
π(ex )
π(ex )
ψλ (x − y) x dx ≥
ψλ (x − y) x dx
e
e
R
y−ε
donc
Z
Z
π(ex )
π(ey−ε ) y+ε
ψλ (x − y) x dx ≥ y+ε
ψλ (x − y)dx
e
e
R
y−ε
donc
Z
Z
π(ey−ε ) +ε
π(ex )
ψλ (x − y) x dx ≥ y+ε
ψλ (t)dt
e
e
R
−ε
R +ε
d’apres (1) on peut choisir λ tel que −ε ψλ (t)dt ≥ 1 − ε
d’où par le théorème lissé :
Z
π(ex )
1
1
π(ey−ε )
(1 − ε) ≤
ψλ(ε) (x − y) x dx = + oψ(λ(ε)) ( )
y+ε
e
e
y
y
R
En fait, si on reprend la preuve du théorème lissé, en remplaçant ϕ(t) par
ϕ(λt), on peut montrer que ce oψ(λ(ε)) ( y1 ) ne dépend pas de λ.
Donc en faisant tendre ε vers 0 :
yπ(ey )
≤1
limsup
ey
y→∞
30
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
b) Montrons que
liminf
y
π(ey ) ≥ 1
ey
y→+∞
ex
.
π(ex ) ≤ M x+1
On a pour tout x ≥ 0
Ceci a un sens même quand x → 0 car π(ex ) = 0 pour x < 1.
Z
Z +∞
π(ex )
π(ex )
ψλ (x − y) x dx =
ψλ (x − y) x dx
e
e
0
R
Z y−ε
Z
Z
y+ε
+∞
π(ex )
π(ex )
π(ex )
=
ψλ (x − y) x dx +
ψλ (x − y) x dx +
ψλ (x − y) x dx
e
e
e
0
y−ε
y+ε
donc
Z
π(ex )
ψλ (x − y) x dx ≤
e
R
Z
Z +∞
Z y−ε
M
π(ey+ε ) y+ε
M
ψλ (x − y)
dx + y−ε
ψλ (x − y)dx +
ψλ (x − y)
dx
x+1
e
x+1
0
y−ε
y+ε
La fonction x 7→ (x + 1)−1 est convexe pour tout x ∈ [0, y] on a donc
Z y−ε
Z −ε
M
M
ψλ (x − y)
dx ≤
(1+ | t |)ψλ (t)dx
x+1
y + 1 −∞
0
de plus
Z y+ε
Z
ψλ (x − y)dx ≤
ψλ (t)dt = 1
y−ε
et
R
Z
M
M +∞
ψλ (x − y)
dx ≤
ψλ (t)dt
x
+
1
y
y+ε
ε
or d’après (2) et (1) on peut choisir λ tel que
Z
Z +∞
(1+ | t |)ϕλ (t)dt ≤ ε et
ψλ (t)dt ≤ ε
Z
+∞
|t|≤ε
il vient
ε
1
1
π(ey+ε ) M ε
π(ex )
ψλ (x − y) x dx = + o( ) ≤ y−ε +
e
y
y
e
y
R
comme ε > 0 arbitraire on a
y
liminf y π(ey ) ≥ 1
y→+∞ e
et ainsi
y
lim y π(ey ) = 1
y→+∞ e
c’est à dire
x
π(x) ∼
∞ ln(x)
Z
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
31
Remarque 3.10. A travers le prolongement C ∞ de t 7→ ζP (1 + it) − log( it1 ), la
preuve du théorème des nombres premiers ci dessus, repose en fait
uniquement sur la non annulation de ζ sur Re(s)=1. Nous établissons la
réciproque ci dessous.
Théorème 3.11. Le théorème des nombres premiers est équivalent à la non
annulation de ζ sur Re(s) = 1
Preuve : Par une transformation d’Abel on obtient la formule de sommation
suivante :
Pour toute suite de nombres complexes (an )n∈N∗ et tout N ∈ N∗ on a :
N
−1
X
X
ap = π(N )aN +
π(n)(an − an+1 ).
n=1
p∈P
p≤N
Conséquence : si Re(s) > 1
∞
X
X
1
−s
ζP (s) =
p =
π(n)n−s [1 − (1 + )−s ].
n
n=1
p∈P
On pose pour (s, n) ∈ C × N∗ :
1
s
1 − (1 − )−s = + R(n, s)
n
n
Donc
ζP (s) = s
∞
X
n=1
π(n)n
−s−1
+
∞
X
π(n)n−s R(n, s)
n=1
Si s évolue dans un compact alors il existe une constante CK ne dépendant
que de K telle que : | R(n, s) |≤ CnK2 . Ainsi la seconde somme converge pour
tout s tel que Re(s) > 0, normalement sur tout compact de Re(s) > 0 et
définit donc une fonction holomorphe sur ce demi-plan. Pour étudier la
première somme on introduit la série de Dirichlet
+∞
X
1 1
Z(s) :=
log(n) ns
n=2
L’abscisse de convergence (absolue) vaut 1 et pour Re(s) > 1 on a
+∞
X
1
0
Z (s) = −
= 1 − ζ(s)
s
n
n=2
Conséquence Z admet comme ζ un prolongement holomorphe au voisinage de
1+it, t 6= 0. Comme de plus ζ possède un pôle simple en 1, avec comme résidu
1, il vient de plus lorsque σ > 0 tend vers 0 :
Z(1 + σ) = log(σ −1 ) + O(1).
32
ELIMANE BA ET MICHEL RAIBAUT
Le théorème des nombres premiers nous permet d’appliquer le lemme suivant :
∞
P
Lemme 3.12. Si
an n−s est une série de Dirichlet, à coefficient réels
n=1
positifs dont l’abscisse de convergence σ0 est réelle, qui diverge en σ0 , si on se
∞
P
donne en plus une série de Dirichlet,
bn n−s à coéfficients complexes telle
n=1
que
bn
=1
lim
n→+∞ an
Alors on a lorsque Re(s) > σ0 tend vers σ0 :
∞
∞
∞
X
X
X
−s
−s
|
bn n −
an n |= o(
bn n−Re(s) )
n=1
n=1
n=1
Donc lorsque Re(s) tend vers 1+ :
∞
X
π(n) 1
− Z(s) |= o(log(Re(s) − 1)−1 )
|
s
n n
n=1
d’où pour tout t ∈ R∗+ , lorsque σ tend vers 0
∞
X
π(n) 1
= o(log(σ −1 ))
1+σ+it
n n
n=1
Par holomorphie de la seconde somme on vient de prouver que pour tout
t ∈ R∗
ζP (1 + σ + it) = o(log(σ −1 ))
lorsque σ > 0 tend vers 0. Or par la proposition 3.5 ceci équivaut à la non
annulation de ζ.
En effet si ζ n’a pas de zéros sur 1+iR alors elle est holomorphe au voisinage
de la droite Re(s) = 1 avec une singularité logarithmique en 1 donc pour tout
t non nul ζP (1 + σ + it) a une limite finie lorsque σ → 0.
Donc
ζP (1 + σ + it) = o(log(σ −1 ))
Réciproquement si ζ a un zero en 1+it alors par la proposition 3.5
ζP (1 + σ + it) − nlog(σ)est holomorphe donc a une limite finie lorsque σ → 0.
Donc
ζP (1 + σ + it) 6= o(log(σ −1 ))
LE THÉORÈME DES NOMBRES PREMIERS VU PAR KAHANE
33
4. Epilogue
Nous donnons sans preuve les résultats suivants : Le théorème des nombres
premiers est équivalent à
1) pn ∼ nlog(n)
P où pn est le nième nombre premier
2) ψ(x) :=
log(p) ∼ x
p∈P
p≤x
Nous disposons des théorèmes de Mertens suivant : Lorsque x tend vers +∞,
on a :
X log(p)
X1
∼ log(x) et
∼ loglog(x)
p
p
p∈P
p∈P
p≤x
p≤x
Enfin remarquons que pour tout λ ∈]1 + ∞[, le théorème des nombres
premiers montre que, lorsque x tend vers +∞, on a :
λx
π(λx) ∼
logx
et donc
λ−1
π(λx) − π(x) ∼
logx
d’où :
Pour tout λ ∈]1, +∞[, il existe x(λ) ∈ R+ tel que, pour tout x ≤ x(λ),
l’intervalle ]x, λx] contienne un nombre premier.
5. Bibliographie
[0]. BOST Jean-Benoı̂t -Le théorème des nombres premiers et la
transformation de Fourier, article.
[1]. CANDELPERGHER Bernard -Fonctions d’une variable complexe,
Armand Colin, 1995.
[2]. CANDELPERGHER Bernard - Calcul Intégral, Cassini, à paraı̂tre.
[3]. WAGSCHALL Claude - Fonctions holomorphes et Equations
différentielles, Hermann, 2003.
[4]. TENEMBAUM Gérald et MENDES FRANCE Michel - Les nombres
premiers,
Que sais-je ?, 2000.
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