Actes du 25
e
Congrès International de l’AFM – Londres, 14 et 15 mai 2009
L'idéologie de marque perçue par le consommateur à travers les slogans
publicitaires : proposition d'une échelle de mesure
Olivier FOURE
ATER - Université Cergy-Pontoise
06 63 25 83 65
Michel DESBORDES
Professeur
ISC School of Management, Paris
Actes du 25
e
Congrès International de l’AFM – Londres, 14 et 15 mai 2009
L'idéologie de marque perçue par le consommateur à travers les slogans publicitaires :
proposition d'une échelle de mesure
Résumé
A l'instar de "I am what I am" de Reebok, des signatures publicitaires inédites surgissent du
creuset sportif au début des années 2000. D'autres univers de marque ont emboîté le pas pour
constituer un florilège de slogans à résonance idéologique. L'idéologie de marque, un concept
récent dans la littérature marketing, non opérationnalisé et méconnu du point de vue du
consommateur. Cet article propose d'éclairer le construit d'idéologie de marque perçue en
l'opérationnalisant à l'aide d'une échelle de mesure. Un cheminement méthodologique articulé
autour de trois phases, exploratoire, transitoire et quantitative, permet d'aboutir à une échelle
multidimensionnelle, fiable et valide.
Mots-clés : idéologie, marque, publicité, perception du consommateur, échelle de mesure.
Brand ideology perceived by the consumer through advertising slogans: proposition of a
measurement scale
Abstract
Manner of "I am what I am" (Reebok), new advertising claims rise from area sport at the
beginning of 2000s. Other brand fields have followed suit to make up a group of slogans with
ideological echo. Brand ideology, a recent concept in marketing literature, not measured and
unknown from the consumer point of view. This paper proposes to clarify the concept of
brand ideology perceived, making it operational with a measurement scale. A methodological
process based upon three stages, exploratory, transitory and quantitative, permits to lead to a
multidimensional, reliable and valid scale.
Key words: ideology, brand, publicity, consumer perception, measurement scale.
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Introduction
Le début des années 2000 marque l'émergence de signatures publicitaires d'un nouveau genre.
A l'instar d'Adidas
1
et de Reebok
2
, les marques sportives répondent en écho à Nike et à son
fameux slogan assertif : "Just do it". Dans ces signatures, les dimensions identitaire et
séditieuse le disputent à la composante énergétique, intrinsèque au champ sportif. D'autres
univers de marques ont emboîté le pas (parfum, informatique, télécommunications), charriant
à leur tour des dimensions spécifiques, davantage existentielles. Un ensemble de slogans
émerge, qui semble exprimer une idéologie émise par la marque.
Après la thèse défaitiste du déclin des idéologies, c'est le thème de sa résurgence qui prévaut
dans la littérature. Résurgence qui procède de la nécessité de dépasser le champ d'application
traditionnel de la philosophie, de la politique et du social. Cette nouvelle dynamique
s'accompagne d'une extension de l'idéologie, laquelle s'inscrit alors dans un usage
conjoncturel, dans une réalité sociale contemporaine. Elle perdrait sa dimension polémique
pour devenir un véritable objet scientifique (Capdevila, 2004).
Dans le cadre de cet article, la marque constitue cette forme de réalité sociale contemporaine
que nous proposons pour accueillir le concept d'idéologie. La marque, qui occupe une place
prééminente dans la société d'hyperconsommation, dont la sphère d'influence est en essor
permanent (Kapferer, 1993), et dont la dimension immatérielle recèle un pouvoir d'orientation
aux confins du tichisme (Lipovetsky, 2006). Dans la large panoplie des moyens
d'expression de la marque, nous allons focaliser notre étude sur le slogan publicitaire.
Les exemples de slogans
3
glanés dans la littérature montrent à quel point ce vecteur de
communication peut s'avérer fécond en termes de diffusion idéologique (Riou, 2002 ;
Maréchal, 2005 ; Lipovetsky, 2006). A cette association composée d'un concept, l'idéologie,
d'un champ d'application moderne, la marque, d'un vecteur de diffusion, le slogan publicitaire,
nous adjoignons l'angle de perceptions, celui du public consommateur. Voici égrenées les
quatre composantes de notre objet de recherche : l'idéologie de marque perçue par le
consommateur à travers le slogan publicitaire.
Cet article se propose de mettre en lumière le concept d'idéologie de marque perçue par le
consommateur, a priori latent. Pour répondre à cet enjeu descriptif, nous allons chercher à
bâtir une échelle de mesure multidimensionnelle, dotée des qualités de fiabilité et de validité.
1
"Impossible is nothing".
2
"Break the rules", puis "I am what I am".
3
"Be yourself" de Calvin Klein ; "N'imitez pas innovez" de Hugo Boss ; "Deviens ce que tu es" de
Lacoste ; "Think different" de Apple…
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Notre démarche de développement d'échelle s'articule autour de trois phases successives :
exploratoire, transitoire et quantitative.
Notre communication se structure autour de quatre parties. Dans un premier temps, le cadre
théorique permet de présenter les positions des auteurs au sujet du concept d'idéologie dans
son acception traditionnelle (philosophique) et marketing (idéologie publicitaire et idéologie
de marque). La démarche méthodologique de construction de l'échelle constitue la deuxième
partie. Elle détaille les phases exploratoire et quantitative, leurs étapes constitutives, les
principaux éléments relatifs aux recueils et aux analyses. Dans un troisième temps, les
résultats majeurs sont exposés. Enfin, la conclusion aborde les apports, limites et voies de
recherche.
1. Cadre théorique
1.1. Soubassement philosophique de l'idéologie
C'est d'abord la puissance de l'idéologie qui apparaît prégnante (Ricoeur, 1997). Dans une
même veine, Capdevila (2004) témoigne de la prolifération des usages disciplinaires de
l'idéologie, tout en soulignant la polysémie du concept. Dans une perspective plus
modélisante, nous pouvons développer la typologie des trois fonctions de l'idéologie conçue
par Ricoeur (1997). Dans sa fonction de distorsion, fondamentale pour l'auteur, l'idéologie est
composée des représentations, des conceptions, des idées élaborées à partir de la réalité ; elle
représente alors une image déformée du réel. La fonction de légitimation vise à justifier
l'autorité, puisque tout système de domination requiert non seulement une soumission
physique mais aussi un consentement. Enfin la fonction d'intégration lui confère un aspect
plus positif : l'idéologie assure la préservation de l'identité culturelle d'un groupe menacée par
des tensions. L'impact de cette taxinomie recueille des avis contradictoires dans la littérature.
Capdevila (2004) met l'accent sur son ambiguïté ; Marion (2004) la juge comme un standard
qui inspire sa propre modélisation.
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1.2. Idéologie dans la littérature marketing
Une revue de littérature chronologique permet de rendre compte de l'apparition et de l'ancrage
du concept d'idéologie publicitaire. Pionnière en la matière, Bardin (1975) présente la
publicité comme lieu de production idéologique. Plus tard, Cathelat (1992) se situe à l'unisson
de cette thèse. Le moule idéologique de la publicité est conçu, dans lequel viennent se couler
d'autres références du marketing. La fonction idéologique de la publicité, qui transmet une
vision du monde à une époque les idéaux s'étiolent, est évoquée par Erra (2003). En écho,
Lipovetsky (2006) décrit également cette nouvelle forme de publicité qui délivre des
messages et des valeurs à travers les slogans. Auparavant, Floch (2003) soulignait l'existence
"d'idéologies publicitaires". Cet aperçu montre que la notion d'idéologie publicitaire a peu
évolué : une publicité vision sur le monde et agent de diffusion culturelle.
L'auteur qui pousse le plus en avant la notion d'idéologie de marque est sans conteste Riou
(2002). L'auteur recense six nouvelles mécaniques publicitaires générées par la société
postmoderne, et utilisées par les grandes marques à cible jeune. L'une de ces caniques est
la mutation des marques en gourous qui prennent le relais des idéologies traditionnelles, et qui
énoncent un point de vue dans un espace idéologique laissé vacant.
Citons également en renfort quelques auteurs qui, en citant explicitement le terme "idéologie",
l'arriment à celui de "marque" et contribuent ainsi à l'éclosion de notre concept. Les marques
structurent l'espace public et assument un nouveau rôle face à l'effritement des anciens
référents idéologiques (Weil, 2001). Mais cette nouvelle attribution est avant tout l'apanage
des grandes marques à forte identité, celles qui possèdent une vision sur le monde (Sicard,
2001). Constat partapar Breton (2000) qui remarque que l'affrontement entre ces "géants"
du marketing est de nature idéologique.
Si la notion d'idéologie publicitaire semble aujourd'hui enracinée dans la littérature, celle
d'idéologie de marque affleure à peine depuis le début des années 2000, et demeure donc en
construction. Dans une perspective plus opérationnelle, le concept d'idéologie est peu répandu
dans le milieu académique (Marion, 2004), avec comme corollaire l'absence de mesure
(Mucchielli, 2000). Enfin son positionnement dans le pôle de l'émission (marque) est
manifeste, au détriment du pôle de la réception (consommateur) : la réception des messages à
caractère existentiel demeure inconnue, faute d'étude empirique (Maréchal, 2005).
L'idéologie de marque, un concept récent, non opérationnalisé à ce jour et enfin inédit si nous
considérons l'approche par le consommateur : ces trois éléments issus du cadre théorique
semblent attester du potentiel heuristique de notre objet de recherche.
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