Toxicomanie
Document de travail à l’intention du
Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et
de l’assurance contre les accidents du travail
Octobre 2009
Révisé en septembre 2013
préparé par le
Dr Tony George, M.D., FRCPC
professeur de psychiatrie,
codirecteur, Division du cerveau et de la thérapeutique
du Département de psychiatrie
de l’Université de Toronto
Directeur médical, Traitement des maladies mentales complexes
Chef, Division de traitement de la schizophrénie
Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH)
Le Dr Tony George est professeur de psychiatrie et codirecteur de la Division du cerveau
et de la thérapeutique du Département de psychiatrie de l’Université de Toronto. Il
est également directeur médical du Programme de traitement des maladies mentales
complexes et chef de la Division de traitement de la schizophrénie du Centre de
toxicomanie et de santé mentale (CAMH).
Le Dr George a fait ses études de premier cycle et ses études de médecine à
l’Université Dalhousie d’Halifax en Nouvelle-Écosse au Canada où il a obtenu son
doctorat en médecine en 1992. Il a fait sa résidence en psychiatrie (1992-1996) pour
ensuite faire un stage de spécialisation en neurosciences/psychopharmacologie de la
toxicomanie (de 1996 à 1998) à la faculté de médecine de la Yale University School à
New Haven au Connecticut. Il s’est joint au corps professoral de la faculté médicale de
Yale en 1998.
Avant de venir à Toronto en septembre 2006, le Dr George était professeur agrégé de
psychiatrie de la faculté de médecine de Yale et directeur du programme de recherche
Toxicomanie
sur les fumeurs atteints de maladies mentales (PRISM) au Connecticut Mental Health
Center où il a établi le premier programme de recherche clinique au monde visant à
comprendre et à traiter les cas de comorbidité faisant intervenir la dépendance à la
nicotine et la maladie mentale. Ses recherches sont nancées par le National Institute
on Drug Abuse (NIDA) du National Institute of Health et par le NARSAD depuis la n
des années 90 et, plus récemment, par les Instituts de recherche en santé du Canada
(IRSC) et la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI). Il a à son actif plus de
190 articles évalués par des pairs parus dans des revues prestigieuses telles que
The Archives of General Psychiatry, Biological Psychiatry, The American Journal of
Psychiatry et Trends in Pharmacological Sciences. Il est corédacteur de la prestigieuse
revue de psychiatrie Neuropsychopharmacology et a rédigé en 2007 la publication
de Medication Treatment for Nicotine Dependence, un ouvrage de premier plan sur le
traitement pharmacologique de la dépendance à la nicotine.
Ce document de travail médical sera utile à toute personne en quête de renseignements
généraux sur le sujet médical traité. Il vise à donner un aperçu général d’un sujet médical
fréquent dans les appels.
Chaque document de travail médical est rédigé par un expert reconnu dans son domaine qui a
été choisi sur la recommandation des conseillers médicaux du Tribunal. Chaque auteur a pour
directive de brosser un tableau équilibré de l’état des connaissances médicales sur le sujet traité.
Les documents de travail médicaux ne font pas l’objet d’un examen par les pairs, et ils sont
rédigés pour être compris par les personnes n’appartenant pas à la profession médicale.
Les documents de travail médicaux ne reètent pas nécessairement le point de vue du Tribunal.
Les décideurs du Tribunal peuvent tenir compte des renseignements contenus dans les
documents de travail médicaux et s’appuyer sur ceux-ci, mais le Tribunal n’est pas lié par les
opinions exprimées dans ces documents. Chaque décision du Tribunal doit être fondée sur les
faits entourant le cas particulier visé. Les décideurs du Tribunal reconnaissent que les parties à
un appel peuvent toujours s’appuyer sur un document de travail médical, s’en servir pour établir
une distinction ou le contester à l’aide d’autres éléments de preuve. Voir Kamara c. Ontario
(Workplace Safety and Insurance Appeals Tribunal) [2009] O.J. No. 2080 (Ont Div Court).
Traduit de l’anglais par A+ Translations
Odette Côté, trad. a. (Canada)
Membre du Conseil des traducteurs et interprètes du Canada
(par afliation à l’Association des traducteurs et interprètes de l’Ontario)
Toxicomanie
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LA TOXICOMANIE
1. Introduction :
La toxicomanie désigne les conséquences néfastes liées à la recherche compulsive
de certaines substances. D’après les estimations, le fardeau économique annuel
de la dépendance à l’alcool et à d’autres substances, et des maladies mentales
concomitantes, serait de 40 à 52 milliards de dollars au Canada [1, 2] et avoisinerait
les 559 milliards aux États-Unis [3]. Par ailleurs, le Canada manque cruellement de
services d’évaluation et de traitement de la toxicomanie, les services de traitement
spécialisés ne sont souvent disponibles que dans les centres urbains, et la demande
dépasse très largement la capacité de traitement. À vrai dire, seulement 10 à 12 %
des personnes aux prises avec un problème de toxicomanie cherchent véritablement
un traitement [4], et l’insufsance dans la capacité constitue un obstacle considérable
au traitement et au rétablissement de ces personnes. Heureusement, la dépendance
à l’alcool et à d’autres substances est de plus en plus largement reconnue comme
une maladie chronique, qui nécessite un traitement médical et doit bénécier d’une
protection de l’assurance-santé et d’une couverture d'invalidité [5]. À cette n, elle
est considérée comme une forme de handicap aux termes du Code des droits de la
personne de l’Ontario.
Ce document de travail médical contient un aperçu des principes qui sous-tendent
l’évaluation et le traitement des troubles de toxicomanie. Il décrit également les
changements apportés au DSM-5 à propos des diagnostics de la toxicomanie et
passe en revue quelques thèmes récurrents dans les cas soumis au Tribunal d’appel
de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail.
2. Dénitions :
L’American Psychiatric Association [6] a publié en mai 2013 la nouvelle version de
ses critères diagnostiques pour les troubles de psychiatrie et de toxicomanie, le
Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition (DSM-5). Dans
cette édition, les intitulés « abus » et « dépendance » ont été remplacés par la seule
catégorie des « troubles liés à l’utilisation d’une substance » (ainsi, le « trouble lié à
l’utilisation d’alcool » a remplacé les catégories « abus d’alcool » et « dépendance
alcoolique »). Ci-après gure un résumé de la terminologie actuelle (voir [4]) :
Troubles liés à l’utilisation d’une substance : ensemble de symptômes cognitifs,
comportementaux et physiologiques indiquant qu’une personne continue à utiliser
une substance malgré les problèmes signicatifs engendrés par cette utilisation. Les
critères diagnostiques pour ces troubles sont les suivants :
Critère A : mode d’utilisation problématique d’une substance conduisant à une
altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement signicative, et
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caractérisé par la présence d’au moins 2 des 11 critères suivants au cours des 12
derniers mois :
1. Consommation de la substance en quantité plus importante ou pendant une
période plus longue que prévu.
2. Envie persistante d’utiliser la substance, ou efforts infructueux pour diminuer ou
contrôler cette utilisation.
3. Mobilisation d’une grande quantité de temps pour se procurer la substance,
l’utiliser ou récupérer de ses effets.
4. État de manque se traduisant par une puissante envie ou un besoin irrésistible
d’utiliser la substance.
5. Utilisation répétée de la substance, qui conduit à l’incapacité de remplir des
obligations majeures au travail, à l’école ou à la maison.
6. Utilisation de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux
récurrents, causés ou exacerbés par les effets de cette substance.
7. Abandon ou réduction d’activités sociales, professionnelles ou récréatives
importantes à cause de l’utilisation de la substance.
8. Utilisation répétée de la substance dans des situations où cela peut être
physiquement dangereux.
9. Poursuite de l’utilisation tout en sachant que celle-ci peut provoquer un problème
psychologique ou physique, ou exacerber un problème existant.
10. Apparition d’une tolérance, caractérisée par : a) un besoin de quantités
notablement plus fortes de la substance pour obtenir l’intoxication ou l’effet
désiré; b) un effet notablement diminué en cas d’utilisation continue d’une même
quantité de cette substance.
11. Sevrage se manifestant par : a) l’apparition d’un syndrome de sevrage
caractéristique de la substance, à l’arrêt ou à la réduction de son utilisation; b) la
nécessité d’utiliser la substance elle-même ou une substance très proche pour
soulager ou éviter les symptômes de sevrage.
Critères de rémission
a) Rémission précoce – absence des critères susmentionnés au cours des 3 à 12
derniers mois.
b) Rémission prolongée – absence des critères susmentionnés depuis 12 mois ou
plus.
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Gravité
Légère – Présence de 2 à 3 des critères susmentionnés.
Moyenne – Présence de 4 à 5 des critères susmentionnés.
Sévère – Présence d’au moins 6 des 11 critères susmentionnés.
Il faut souligner que dans le DSM-5, la plupart des critères qui dans le DSM-IV
caractérisaient l’« abus d’une substance » et la « dépendance à une substance
» ont été regroupés sous l’intitulé « troubles liés à l’utilisation d’une substance ».
Toutefois, les considérations d’ordre « judiciaire » ont été exclues, et l’état de manque
a été ajouté au rang des caractéristiques. Le tableau ci-après contient un résumé
des changements apportés à la classication des troubles liés à l’utilisation d’une
substance dans le DSM-5 par rapport au DSM-IV :
Tableau 1 : Changements apportés à la classication de l’utilisation inappropriée d’une
substance dans le DSM-5 par rapport au DSM-IV.
Changement DSM-IV DSM-5
Classication catégorielle Présence des
diagnostics d’abus et de
dépendance
Suppression de la
terminologie relative
à l’abus et à la
dépendance et création
du diagnostic de «
troubles liés à l’utilisation
d’une substance ».
Considérations d’ordre
judiciaire
Inclusion dans les
critères du DSM-IV
concernant l’abus d’une
substance (critère no 3)
Suppression de cette
mention dans le
diagnostic des troubles
liés à l’utilisation d’une
substance.
État de manque Non mentionné dans le
DSM-IV
Ajouté au DSM-5
parmi les 11 critères
diagnostiques des
troubles liés à l’utilisation
d’une substance (un
diagnostic de troubles
liés à l’utilisation d’une
substance est posé
quand le patient présente
au moins 2 des 11
critères).
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