L`Autobiographie de Still enfin accessible

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L'Autobiographie de Still enfin accessible
Interview de Pierre Tricot réalisée par Alain Andrieux ostéopathe DO MRO (F) pour la revue
Aesculape1 au moment de la sortie de la traduction de l’Autobiographie de Still publiée
par les éditions Sully.
Alain Andrieux : Pierre, tout d'abord, quelles motivations t'ont poussé à te lancer dans cette
entreprise ?
Pierre Tricot : Alors que l'ostéopathie se développe en France depuis plus de 25 ans, aucun texte
fondateur n'a été traduit. Enseignant depuis une quinzaine d'années, je déplore que l'enseignement
de l'ostéopathie en France, ne se réfère pratiquement pas aux sources. Je veux dire par là que les
textes essentiels d'ostéopathie sont non seulement indisponibles en français mais également difficiles
à se procurer en anglais. C'est ainsi que l'on perd l'essentiel d'un corps de connaissances. De Still,
nous connaissons les principales anecdotes, concernant son impuissance à guérir ses enfants lors
d'une épidémie de méningite, le traitement de cas de dysenterie, etc. Mais l'essentiel est-il vraiment là
?
J'essaie de travailler sur les textes fondateurs depuis plusieurs années déjà, mais l'anglais de Still a
toujours été pour moi difficile. Pourtant, je ressentais un impérieux besoin de connaître davantage
l'histoire et les essentiels de cet homme. Je me suis donc plongé dans l'Autobiographie, pensant à
juste titre y découvrir le cheminement de Still. Malheureusement, je ne parvenais pas à lire
directement dans le texte. Pour pouvoir pénétrer le sujet, j'ai dû traduire par écrit. En faisant cela, ce
que je découvrais me fascinait tellement que j'ai désiré partager ce message. C'est ainsi qu'a
commencé l'aventure.
AA : Qu'est-ce qui te semble essentiel chez Still ?
PT : Difficile de répondre brièvement. On peut dire qu'il fut un philosophe éminemment pragmatique.
En ce sens, il est typiquement américain. L'autre chose essentielle est sans doute la conscience de
l'universalité de la vie, l'existence de relations mutuelles entre les organismes et leur environnement et
au sein même d'un organisme, entre les parties qui le constituent.
AA : Peut-on dire que Still fut le premier à appliquer l'écologie telle que la définissait Ernst Haeckel en
1886 : « la science des êtres vivants et du monde qui les entoure » au domaine de la santé, alors qu'il
n'a sans doute pas connu ce mot ?
PT : Il fut certainement pionnier dans ce domaine. Il est parvenu à une compréhension du vivant toute
nouvelle pour l'époque et encore très originale aujourd'hui. Mais comme tout précurseur, il eut de
grandes difficultés à se faire comprendre.
AA : Comment est née l'ostéopathie ?
PT : Bien entendu, elle n'est pas née en un jour. Elle est le fruit d'une quête qui a duré plus de vingt
années. Le moteur de cette quête fut l'insatisfaction de Still en tant que médecin à soulager et guérir
ses semblables. Dès les années 1850, il commença de chercher, notamment en disséquant des
cadavres d'indiens pour tenter de comprendre le fonctionnement de l'organisme.
Toute la période précédant la guerre de Sécession fut également très importante pour Still. Le Kansas
où il vivait alors était un véritable creuset bouillonnant. Une âpre lutte opposait les partisans de
l'esclavage et leurs opposants. Des colons arrivaient sans cesses de l'Est et du Nord des USA.
Certains venaient simplement chercher fortune mais beaucoup venaient par idéalisme antiesclavagiste, pour contrebalancer les influences des états limitrophes franchement pro-esclavagistes.
Still rencontra beaucoup de ces nouveaux venus, dont certains très cultivés, lui permirent de découvrir
de nombreux courants scientifiques, philosophiques et spirituels de l'époque. Sa seconde épouse
Mary Elvira était issue d'un de ces milieux intellectuels de la région de New York. Non seulement elle
le soutint dans sa recherche et ses épreuves, mais elle lui fournit un lien constant avec ces milieux
intellectuels, particulièrement avides de connaissances et de compréhension.
1
Aesculape n°13, Juillet-août 1998, pp. 25-28.
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Sa détermination à trouver autre chose fut renforcée par son expérience de médecin chirurgien aux
armées au cours de la guerre de Sécession. Là encore, il se sentit impuissant à soulager ses
semblables : « l'équipement de la trousse du chirurgien était complet lorsqu'elle contenait du calomel,
de la quinine, du whisky, de l'opium, des chiffons et un scalpel. Si un patient avait un pied dans la
tombe, et un demi-litre de whisky dans une bouteille, le docteur devait travailler aussi dur pour faire
sortir le whisky de la bouteille que pour maintenir le pied hors de la tombe. »2 Il faut savoir qu'un tiers
des morts au cours de cette guerre furent secondaires à la maladie et non aux blessures reçues au
combat.
À son retour de la guerre, il constata également que dans les régions où les médecins étaient plus
rares, la mortalité infantile était moins forte : « Au cours de la guerre civile, j'avais remarqué que dans
les parties du Missouri et du Kansas où les docteurs avaient cessé d'exercer, les enfants ne
mouraient pas. »3
Juste après la guerre de Sécession, l'événement qui exacerbera sa quête fut la totale impuissance
des médecins à soigner ses enfants atteints de méningite cérébro-spinale : « C'est lorsque je me
tenais là, regardant fixement trois membres de ma famille – deux de mes propres enfants et un
enfant que nous avions adopté –, tous morts de la méningite cérébro-spinale que je me posai les
sérieuses questions « Avec la maladie Dieu a-t-il abandonné l'homme dans un monde d'incertitude ?
L'incertitude, qu'est-ce que c'est ? Que donner, et pour quel résultat ? Et une fois mort, savons-nous
où il va ? » Je décidai alors que Dieu n'était pas un Dieu d'incertitude, mais un Dieu de vérité. Et
toutes Ses œuvres, spirituelles et matérielles, sont harmonieuses. Sa loi de vie animale est absolue.
Un Dieu si avisé a certainement placé le remède au sein même de la demeure matérielle dans
laquelle habite l'esprit de vie. »4
AA : Connaît-on les principales influences qui le conduisirent à la formulation de l'ostéopathie ?
PT : Nous connaissons aujourd'hui un certain nombre d'influences essentielles. Certaines sont reliées
à son éducation et à sa jeunesse, d'autres viennent de ses contacts ultérieurs. Du méthodisme (son
père était pasteur méthodiste), il reçut une grande exigence et une grande rigueur personnelles, une
haine avérée pour l'alcool, les drogues et les « plaisirs futiles ». Egalement une foi profonde en notre
essence spirituelle et en la possibilité d'une amélioration continue. Son commerce avec les indiens
Shawnee (son père s'occupa d'eux un temps) lui a certainement apporté des connaissances en
médecine, notamment l'utilisation des plantes. Il en parle très peu et nous ne disposons pas
d'informations d'autres sources, mais il serait étonnant qu'il n'ait pas appris avec eux quelques leçons
essentielles sur la vie.
Viennent ensuite les influences de certains grands courants considérés à l'époque comme
scientifiques, tels la phrénologie et le mesmérisme. De la phrénologie, il a retiré une vénération pour
le cerveau et le système nerveux. Il a utilisé le mesmérisme au cours d'une période de sa vie
professionnelle. Il dit lui-même « Comme Paul, j'essayais tout, les bonnes choses et les mauvaises.
»5 A la fin du chapitre 8 de l'Autobiographie, il décrit comment il utilisa une suggestion hypnotique
(Mesmer est considéré comme l'inventeur de l'hypnose) pour guérir un alcoolique de son vice.
Puis viennent de grands courants philosophiques, notamment, le darwinisme. L’Evolution des
espèces de Darwin fut publiée en 1859. Still fut interrompu dans son étude par la guerre de
Sécession. Il fera remarquer que les conséquences pratiques des idées transformistes ne lui furent
pas immédiatement évidentes : « Il y a quarante ans, j'ai trouvé un parchemin au Kansas ; j'ai
essayé de le lire, sans y parvenir. L'écriture manuscrite était très lisible et la langue correcte, mais
j'étais atteint des oreillons de l'ignorance… Je n'étais pas entraîné à raisonner au-delà de la coutume
obsolète. »6
Enfin, Still fut très influencé par les écrits d'Herbert Spencer, dont la philosophie, toute influencée par
le transformisme de Darwin, a reçu le nom d'évolutionnisme. Tout en affirmant le caractère
inconnaissable de la nature intime de l'univers, il voulut donner une explication globale de l'évolution
des êtres à partir des lois ordinaires de la mécanique (à laquelle Still était particulièrement sensible).
Le monde se transforme et évolue de l'inorganique vers le biologique, le psychologique et le social : à
chacun de ces stades se vérifie la loi de complexité croissante, par l'adaptation de plus en plus
2
A. T. Still : Autobiographie, p. 167-68.
Ibid. p. 242.
4
Ibid. p. 76.
5
Ibid. p. 113.
6
A. T. Still : Autobiographie p. 127.
3
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précise des fonctions aux conditions changeantes du milieu, par l'intégration toujours plus grande des
parties au tout et par la diversification des relations sociales. Dans Premiers Principes (1862) et
Principes de biologie (1864), A. T. Still trouvera les formulations des lois de cause et effet et surtout
l'énoncé des notions de structure et de fonction ainsi que l'expression de leur relation mutuelle, pierre
angulaire de la philosophie ostéo- pathique.
AA: Tu parles de lente maturation, pourtant, dans l'Autobiographie, Still évoque une illumination qu'il
aurait eue le 22 juin 1874 affirmant qu'elle correspond à la naissance de l'ostéopathie.
PT : Les deux ne sont pas incompatibles. L'illumination dont parle Still ressemble à ces moments de
prise de conscience soudaine dans lesquels un ensemble de faits, de connaissances, d'expériences
apparemment disparates s'intègrent tout à coup en un tout cohérent, apportant instantanément une
compréhension évidente à un problème jusqu'alors non résolu. La soudaineté et la profondeur de la
prise de conscience peuvent être tellement submergeantes qu'on leur accorde une dimension divine,
mais cet instant a sans doute été préparé par de longues périodes de recherches, de
questionnements, d'expérimentations et de tâtonnements.
Nous n'avons pas de certitude absolue nous indiquant que la révélation du 22 juin 1874 soit
directement reliée à la lecture de Premiers Principes, mais la relation que fait Still de ce moment peut
nous le suggérer : « Il y a vingt deux ans aujourd'hui, à midi, je fus touché – non pas au cœur, mais
au pôle de la raison. Ce pôle était alors dans une bien mauvaise condition pour recevoir une flèche
chargée de principes philosophiques. Depuis, je me suis toujours souvenu de ce jour mémorable,
et le célèbre… »7
AA : Le doute plane toujours en France : Still était-il médecin ou non ?
PT : Il était médecin, mais nous ne pouvons comparer la situation des états pionniers d'Amérique des
années 1840-70 à ce que nous connaissons aujourd'hui. À cette époque, la médecine ne s'apprenait
pas dans des écoles, sauf sans doute dans les états du Nord et de l'Est des Etats-Unis, nettement
plus avancés dans leur civilisation. Dans sa biographie de Still, Carol Trowbridge écrit : « Andrew
Taylor Still pratiquait la médecine avec son père depuis 1849, sa formation se faisant par
apprentissage direct, comme pour la plupart des médecins américains de l'époque. Pendant une
période d'environs deux ans, les étudiants médecins mélangeaient les médecines, observaient les
patients et apprenaient la thérapeutique. Cette expérience pratique était soutenue par la lecture de
livres de médecine se trouvant dans la bibliothèque du médecin. Des dons d'observation, une
connaissance en histoire naturelle et une connaissance de l'environnement du foyer du patient ainsi
que du climat local, constituaient des éléments importants dans l'enseignement informel du médecin
du dix neuvième siècle. [...] Aucun entraînement formel n'était requis pour une personne voulant
accrocher une plaque de médecin car aucune loi réglementant l'exercice de la médecine n'exista
avant les années 1870 et 1880 »8
Immédiatement après la guerre de Sécession, Still tentera d'intégrer une école mais, « il fut dégoûté
par les enseignements et n'alla pas jusqu'au diplôme. 9 Evidemment, un diplôme d'une école médicale
de l'époque ne signifiait pas grand chose, si ce n'est un papier à accrocher au mur. Les conditions
exigées pour entrer dans ces entreprises pour la plupart commerciales se réduisaient généralement à
la capacité de payer les frais de scolarité. L'étudiant devait assister à un cours de deux années de
conférences échelonnées de novembre à février, la seconde année présentant le même programme
que la première, sans entraînement clinique et comme beaucoup d'étudiants étaient illettrés, seul un
bref examen oral était requis pour obtenir le diplôme »10
AA : Still a-t-il laissé la description de techniques de traitement, expliqué la manière dont il établissait
son diagnostic ostéopathique ?
PT : Still n'a laissé pratiquement aucune description de techniques. Il mettait l'accent sur la
philosophie et la compréhension du cas du patient. Une fois que le problème était compris, il estimait
7
Ibid., p. 237 Discours de Still dans le Memorial Hall du collège de Kirksville, le 22 juin 1895.
Carol Trowbridge : A. T. Still 1828-1917, p. 54-54, Thomas Jefferson University Press, Kirksville, Mo, 1992.
9
George M. Laughlin, “ Demande si seulement A. T. Still était docteur, ” Osteopathic Physician 15 (January
1909) : 8. Bien que ni l'existence de l'école de Kansas City à cette époque, ni la présence de Still n'aient été
vérifiées, étant donné le respect de la famille pour l'instruction formelle, il est possible que Still se soit
effectivement inscrit à quelque école. Son frère James reçut un diplôme médical du Collège médical Rush en
1864.
10
Ibid. p. 96.
8
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que la technique utilisée pour libérer ce qui était contraint avait peu d'importance.
En octobre dernier, nous sommes allés à Kirksville avec un groupe d'ostéopathes œuvrant au sein
des associations d'enfants handicapés et nous avons assisté à la présentation que fit Richard Van
Buskirk, un ostéopathe américain, des techniques de Still. Il a fondé son travail sur les textes d'un des
tous premiers étudiants d'A. T. Still : Charles Hazzard qui enseigna au collège de Kirksville. 11 Il ne
s'agit pas de techniques manipulatives telles que nous les connaissons aujourd'hui (haute vélocité
basse amplitude), mais de techniques s'effectuant en compression, consistant à amener le segment à
traiter dans sa position de facilitation, sans forcer le mouvement, à attendre le relâchement des
structures environnantes, puis à ramener les leviers dans leur position physiologique toujours sous
légère compression.
Ces techniques n'ont rien à voir avec les techniques de craquement que nous connaissons
aujourd'hui. Au cours du même voyage, nous avons eu la chance de rencontrer un arrière petit fils
d'A. T. Still, Richard Still Jr, qui vit à Kirksville et y exerce la profession d'ostéopathe. Il n'a pas connu
son arrière grand-père, mais il a bien connu son grand père (Harry Mix Still) et a baigné dans le bain
ostéopathique dès sa plus tendre enfance. Nous l'avons vu travailler et il ne pratique pas la
manipulation comme nous la connaissons. Il nous a même affirmé qu'A. T. Still ne pratiquait ni ne
préconisait l'utilisation de ses techniques.
Le fait qu'il ne nous ai pas laissé de description techniques peut nous gêner aujourd'hui, mais en
même temps, on peut y voir une manifestation de son génie. Un héritage technique n'aurait pas
manqué d'être un boulet pour l'ostéopathie, induisant de nombreux conflits pour savoir qui est ou n'est
pas ostéopathe, orthodoxe ou non. En mettant à ce point l'accent sur la philosophie, il a laissé une
grande liberté de manœuvre (si je puis me permettre ce jeu de mots) à ces successeurs : être
ostéopathe, ce n'est pas pratiquer telle ou telle technique, mais respecter les concepts de base de
l'ostéopathie, ce qui n'est pas si facile que cela.
AA : Connaît-on ses plus proches élèves, ceux qui ont pu mieux transmettre son enseignement sans
le déformer ?
PT : Je crois qu'aujourd'hui, cela n'a pas beaucoup de sens. Il faut comprendre que très vite
l'ostéopathie a échappé à Still. La création du collège de Kirksville date de 1892. Entre 1896 et 1899,
trente collèges légitimes d'ostéopathie se sont créés aux USA. À partir de ce moment, il ne lui a plus
été possible de contrôler le mouvement, ni son développement. Il en conçut d'ailleurs de l'amertume :
« Ils me citèrent comme le fondateur et le créateur de la plus grande science jamais donnée à
l'homme. Mais quand vint le moment de dire ce qui était meilleur dans l'intérêt de l'école et de son
futur, alors ils n'eurent que faire de mon savoir ou de mon avis. Ils coururent vers d'étranges Dieux.
Mon coeur fut attristé. Comme une poule rassemble les siens sous son aile, j'aurais voulu vous
rassembler, vous, mes enfants, mais vous n'avez pas voulu...12 »
Nous pouvons cependant noter que les grands noms de l'ostéopathie, quelle qu'ait été leur approche
pratique ou technique ont toujours fait grand cas des principes philosophiques et ont toujours essayé
de les respecter. C'est ainsi que cette approche présente la particularité, tout en reposant sur un
fondement philosophique sûr et stable de permettre une variété de pratiques étonnante, permettant
des approches aussi différentes que celles de Downing, Littlejohn, Fryette, Sutherland, etc.
AA : Still a-t-il évoqué sous un quelconque vocable ce que Sutherland appela plus tard le Mécanisme
Respiratoire Primaire ?
PT : À ma connaissance, non. La principale évocation de Still pouvant être rapprochée du concept
crânien de Sutherland, c'est l'évocation du liquide céphalo-rachidien : « le fluide cérébro-spinal est
l'élément le plus connu contenu dans le corps humain, et à moins que le cerveau ne fournisse le fluide
en abondance, une condition d'incapacité du corps persistera. Celui qui est capable de raisonner
verra que ce grand fleuve de vie doit être abouché pour que le champ assoiffé soit irrigué
immédiatement, sinon la moisson de la santé sera pour toujours perdue. »13 Sutherland s'appuie
11
Un article intitulé Une technique manipulative d'Andrew Taylor Still, a été publié par ce même auteur dans le
journal de l'association ostéopathique américaine d'octobre 1996.
12
Note manuscrite non datée et non paginée, trouvée au dos d'un autre manuscrit : Comment être un grand
penseur (source : Carol Trowbridge : A. T. Still p. 198. The Thomas Jefferson University Press, Kirksville, Mo,
1991).
13
A. T. Still : Philosophy of Osteopathy, p. 39, Publication de l'American Academy of Osteopathy, Newark, Ohio,
1986.
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d'ailleurs sur cette affirmation pour développer ses hypothèses sur le Mécanisme Respiratoire
Primaire.
AA : Alors le Mécanisme Respiratoire Primaire existe donc ?
PT : L'étude et la description que fit Sutherland du Mécanisme Respiratoire Primaire repose
essentiellement sur des observations et des expériences menées sur lui-même, avant de les
appliquer à d'autres. À partir de ces expériences et d'une connaissance anatomique très fine, W. G.
Sutherland a émis des hypothèses dont l'objectif était de tenter de donner une explication rationnelle à
ce qu'il avait expérimenté et perçu. Il a toujours été reproché à cette approche de ne pas reposer sur
des bases scientifiques. Il est certain que les critères retenus aujourd'hui comme scientifiques ne
conviennent pas à l'appréciation du Mécanisme Respiratoire Primaire.
Pourtant, lorsque je fais des conférences, j'utilise une expérience très simple pour faire sentir aux
gens leur propre M.R.P. : je leur fais gonfler un ballon de baudruche et le tenir simplement entre les
deux mains, les coudes reposant sur les genoux ou sur une table. Quasiment tous perçoivent
l'alternance de gonflement rétraction, alors même qu'ils n'ont aucune éducation palpatoire et que je ne
leur dis pas ce qu'ils devraient percevoir. Ils sentent leur M.R.P., même lorsqu'ils cessent de respirer,
ce qui tenterait à prouver que cette pulsation n'est pas liée aussi directement à la respiration
thoracique que certains l'affirment. Je crois vraiment que dans l'état actuel de notre savoir, la
prudence est de rigueur. Pour moi le doute prévaut. Mais douter ne veux pas dire rejeter ou
considérer comme faux. Cela signifie : « je ne sais pas ». Cette attitude est réellement scientifique.
AA : Le Mécanisme Respiratoire Primaire n'est-il pas tout simplement l'expression de la vie ?
PT : En tout cas, je suis certain que lorsque la vie n'est pas présente dans le corps, le Mécanisme
Respiratoire Primaire ne s'y manifeste plus. Mais l'étude de la vie échappe à la science...
L'Académie d'Ostéopathie, la plus jeune des instances représentatives de l'ostéopathie en France,
vient de contribuer à une meilleure compréhension de la démarche du fondateur de l'ostéopathie,
Andrew Taylor Still. Contribution également à la découverte des circonstances qui l'amenèrent à la fin
du siècle dernier à poser les bases d'un concept de la santé fondé sur la respect de la Nature et la
capacité du corps humain à répondre aux exigences du maintien de cette santé. Il découle de
l'observation des phénomènes associés à la vie dont la traduction la plus évidente est le mouvement.
Vie et mouvement, mobilité, motilité, sont si étroitement associés que l'une ne peut exister sans les
autres, et inversement.
Remercions Pierre Tricot, ostéopathe, membre du Registre des Ostéopathes de France, d'avoir traduit
l'Autobiographie de Still. Il nous a semblé intéressant de l'interroger sur les découvertes qu'il a pu faire
en parcourant les différentes étapes de la vie de cet homme génial.
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