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I) INTRODUCTION
Médecin généraliste depuis 37 ans, j’ai eu la chance d’exercer une médecine variée et
riche d’expériences humaines multiples touchant toutes les générations et toutes les couches
sociales.
Peu de jeunes médecins généralistes peuvent évoquer les merveilleux souvenirs de la
pratique d’accouchements en maternité mais aussi parfois à domicile, la joie partagée des
naissances avec les familles et le bonheur caché d’avoir participé à l’arrivée d’une nouvelle vie.
Donner la vie, accompagner une vie qui s’éteint, c’est un contraste saisissant pour le
médecin que l’on a choisi d’être.
A la fin des années 70 le diagnostic de « maladie grave et incurable » était le plus
souvent tacitement caché, l’expression de la finitude était « tabou » et les médecins se
contentaient d’essayer de soulager la douleur physique. C’était une époque où la prescription
des morphiniques était réalisée sur un carnet à souches délivré par le Conseil de l’Ordre des
Médecins. Il s’appelait « Carnet de toxiques ». Le terme toxique n’engageait pas beaucoup les
patients à recevoir les morphiniques, ni les médecins à les prescrire. Il n’était pas rare qu’un
médecin de cette époque ne possédait pas ce fameux carnet.
En effet beaucoup rechignaient à le commander ou à utiliser ces antalgiques toxiques
qu’ils « réservaient » aux dernières heures de la phase ultime.
En 2003, j’ai fait le choix d’une médecine mixte libérale et institutionnelle, dans le cadre
d’une coordination en EHPAD, en même temps qu’une formation gériatrique et de prise en
charge des démences.
Au fil des années, j’ai assisté à l’évolution légitime des exigences d’une population en
matière de fin de vie et tout en gardant les yeux ouverts, j’ai constaté les carences multiples de
nos décisions et de nos interventions. Tant sur le plan de l’évaluation des situations cliniques et
des soins apportés, que du soutien et de l’information redevable au patient et à sa famille.
De ces constats répétés la décision mûrit. Nous nous devions d’améliorer les conditions
de l’accompagnement de fin de vie de nos patients et de nous former afin de tenter d’obtenir la
maîtrise médicale et technique nous permettant de nous concentrer sur la dimension
d’accompagnement.
En 2013 j’ai, avec l’aide de soignants volontaires, posé les bases de la création d’une «
unité de soins de confort » à l’intérieur de l’EHPAD. Les fiches de postes ont été modifiées, un
crédit interne minimal a été alloué et les premiers soins ont pu être apportés à la grande
satisfaction des personnes âgées et de leurs familles.
C’est cette expérience quelque peu novatrice dans sa conception pour une maison de
retraite, que je voudrais faire partager.