L’image du corps en soins palliatifs
- De la dynamique psychocorporelle et de l’identité du malade,
Une approche psychomotrice -
« Je n’étais pas comme ça ». « Je ne peux plus bouger ».
C’est par les mots de Mme L., atteinte d’une SLA, que j’ai choisi de commencer mon
intervention. Ces mots me sont familiers. Dans le service de SSR, comme dans le service
d’USP dans lesquels j’interviens, ils résonnent à chaque rencontre avec mes patients, plus ou
moins âgés.
Quand on m’a demandé de venir parler de l’approche psychomotrice dans un service de
soins palliatifs, c’est, m’a t-on dit, pour parler avant tout du corps, entité à part entière (?)
qui aurait, semble-t-il, au fil des débats, tendance à s’effacer derrière Dame Psyché.
Comme vous à cet instant, je me suis retrouvée délicatement plongée au cœur du débat
corps/esprit, qui sous-tend la définition de mon métier. Psychomotricité…
« Psycho » : nous avons déjà les psychologues me direz-vous et « motricité » : il y a des
kinésithérapeutes !
Qu’est-ce que la psychomotricité ? Et en quoi une psychomotricienne est-elle à même de
parler du corps du malade ?
Parler du corps du malade, rien de plus habituel me direz-vous, c’est ce que font les
soignants à longueur de journée, lorsqu’ils interrogent leur patient sur son degré de douleur,
lorsqu’ils observent, écoutent et tentent de comprendre ses symptômes physiques. La tâche
première des soignants n’est-elle pas d’ailleurs de prendre soin du corps du patient ?
Cet objet corps que l’on voit chaque jour, que l’on déplace, mobilise, ausculte, que l’on
pique, lave, qui est lourd, qui sent parfois mauvais (malgré les soins), qui est déformé, rouge,
qui ne bouge plus, qui a mal. Le corps du patient, aides-soignants, infirmiers, médecins, le
connaissent très (trop ?) bien.
Le patient a ce corps, qui le limite, qui le lâche, qui fait qu’il va mourir. L’équipe soignante a
des moyens médicamenteux pour apaiser sa douleur physique et s’y attelle, mais faire face à
la souffrance morale de la perte et de l’imminence de la mort est tout autre. Voilà pourquoi,
outre le suivi des troubles organiques et physiques, nous avons tous besoin de réfléchir aux
processus psychologiques en jeu, sur lesquels nous nous concentrons et débattons aux staffs
avec l’éclairage des psychologues, lors de groupes de paroles ou encore lors de conférences
comme celles-ci.
« L’image du corps en soins palliatifs», un titre qui peut heurter les non-initiés, et qui peut
mettre mal à l’aise les initiés, à la pensée des corps traumatisés, décharnés, déformés,
auxquels les patients et nous-mêmes, soignants, sommes confrontés.