Lettre bimensuelle n°51 (16-31 janvier 2011) Le but de SIDABLOG est d’exposer, par le biais de lettres d’informations bimensuelles accessibles à tous, le contenu d’articles scientifiques récemment publiés dans les plus importantes revues internationales. Vers un modèle de la capside A l’intérieur des virus, on trouve un compartiment conique qui renferme le génome appelé la capside. Il est formé d’environ 250 composés de forme hexagonale (hexamères) et de 12 de forme pentagonale (pentamères) permettant de fermer la structure à chaque extrémité : 5 à l’extrémité la plus étroite, 7 à l’extrémité la plus large. On connaît aujourd’hui la structure de chacun de ces composants et on peut ainsi modéliser la capside dans son ensemble. Des chercheurs viennent en effet de décrypter la structure de ces composants. Ils ont identifié, il y a deux ans, la structure des hexamères et les différentes liaisons de ces éléments au sein de la capside. Ces dernières révèlent le rôle important de l’interface intramoléculaire dans la stabilisation de l’édifice1. La structure générale de la capside se présente néanmoins comme une mosaïque. En effet, chaque hexamère se présente comme « une fleur sans bouton » contenant 6 protéines de capside (CA), « ses pétales ». Chaque protéine est constituée quant à elle de 2 domaines, les domaines C-terminal (CTD) et N-terminal (NTD), reliés entre eux par une boucle flexible. Jusqu’alors, la structure globale de la capside ne pouvait être déterminée sans connaitre les pentamères. Récemment, selon la même méthode, ces chercheurs se sont concentrés sur la structure spatiale des pentamères. Ils ont ainsi découvert que les assemblages des hexamères et des pentamères sont quasiment équivalents. Ils nécessitent ensuite un réarrangement minutieux pour se lier au sein de la capside. Ils ont également montré qu’il faut deux types de rotation entre les corps « rigides » de cette capside pour permettre ce réarrangement. Cet assemblage semble contrôlé par des interactions électrostatiques. 1 Voir lettre SIDABLOG n°19. Alors qu’il n’est pas encore possible d’obtenir directement la structure de la capside virale, on peut la modéliser à partir de la connaissance de ses éléments. La capside serait ainsi composée de 1056 protéines CA et présenterait un changement de courbure continu grâce aux flexions des interfaces NTDCTD. On pense que les pentamères accentuent les changements de courbure de certaines zones. Atomic-level modelling of the HIV capsid. Pornillos O, Ganser-Pornillos BK, Yeager M. Nature. 2011 Jan 20;469(7330):424-7. A la recherche d’un vaccin protecteur La découverte d’un vaccin protégeant efficacement contre l’infection par le VIH reste depuis longtemps l’un des principaux objectifs des chercheurs. Cependant, très peu de vaccins ont été testés chez l’homme en raison des difficultés de mise en place des essais à grande échelle. A ce jour, un seul a montré un effet de protection partielle2. Des chercheurs du National Institut of Health3 proposent aujourd’hui une approche séquentielle et plus rationnelle de conduite des essais vaccinaux. Pour de nombreuses maladies infectieuses, des personnes guérissent naturellement par des voies immunitaires spécifiques et sont ainsi protégées de toute réinfection ultérieure. Ceci permet normalement de définir des voies pour le développement d’un vaccin efficace, mais pour le VIH, on ne parvient pas à faire de même. De nombreuses études tentent tout de même de définir un corrélat immunitaire d’une protection pouvant aider à établir si un vaccin serait efficace pour un essai clinique sur l’homme. La connaissance de la réponse immunitaire protectrice est nécessaire car de nombreux vaccins candidats ont été réalisés de façon empirique, sans connaître réellement les mécanismes biologiques de protection. Les observations faites par les chercheurs présentent aussi des limites. Chez les personnes exposées mais non infectées, on ne comprend toujours pas les mécanismes de protection. A côté, des facteurs génétiques déjà identifiés, on pense qu’une immunité non spécifique locale, au niveau des muqueuses, pourrait expliquer ces observations sans que l’on en comprenne les mécanismes pour les transposer à un vaccin. Aussi, différentes équipes étudient les patients appelés « contrôleurs élites » qui sont infectés mais qui contrôlent l’infection et ne développent aucun symptôme4. Néanmoins, les mécanismes immunologiques permettent simplement de contrôler le virus mais ne sont pas efficaces pour prévenir l’infection. Les essais traditionnels sont réalisés sur un grand nombre de patients et sur une longue durée afin que le nombre de personnes qui se seraient infectées puissent être suffisamment important pour que les effets protecteurs se révèlent. Il est donc aisé d’imaginer que la mesure d’une réaction immunitaire, en réponse au vaccin, peu de temps après le début de l’essai, serait nécessaire pour rationaliser la recherche vaccinale. Il faudrait donc une technique à la fois nouvelle et meilleure. Ces scientifiques pensent que la recherche vaccinale doit passer par une approche adaptative des essais cliniques. Si en cours d’essais, on peut mesurer rapidement une réponse immunitaire, on peut alors traiter de nouveaux patients, en tenant compte des observations, et obtenir au fur et à mesure une cohorte suffisamment importante. Cela permettrait d’augmenter la probabilité d’observer une résistance, même partielle, de l’organisme à l’infection. Ces chercheurs envisagent donc les essais cliniques comme un moyen de définir une réaction immunitaire anti-VIH, même partielle, et non comme l’occasion de développer un produit vaccinal immédiat. Ils doivent être successifs en tenant compte à chaque étape des résultats obtenus pour améliorer progressivement l’effet protecteur d’un vaccin. 2 Voir les lettres d’actualités de SIDABLOG : Peut-être un vaccin ? Un vaccin anti-VIH ? Restons prudents. Institution gouvernementale des États-Unis qui s'occupe de la recherche médicale et biomédicale. 4 Voir lettre SIDABLOG n°11. 3 The quest for a T cell-based immune correlate of protection against HIV: a story of trials and errors. Koup RA, Graham BS, Douek DC. Nat Rev Immunol. 2011 Jan;11(1):65-70.