Les conséquences économiques de l’élargissement de
l’Union européenne.
Introduction.
L’UE a connu son quatrième élargissement le 1er mai 2004. Avec 10 nouveaux pays,
représentant 1/3 de la population mais seulement 3,7% de son PIB à 25, c’est la plus grand
élargissement jamais opéré.
I) À court terme, les conséquences économiques sont significatives pour les nouveaux
membres mais restent modestes pour les membres actuels.
A) Pour les économies de nouveaux membres, l’élargissement induit de nombreux chocs
positifs, dont la plupart ont déjà été intégrés.
1) Fortes entrées de capitaux étrangers.
Les stocks d’IDE dans les nouveaux pays membres ont triplé entre 1995 et 2001 (le stock
atteint 120 milliards€ en 2001. Toutefois, la répartition des IDE reste inégale (Pologne
principale bénéficiaire).
On est passé de flux d’IDE consécutifs à des privatisations à des « vrais » IDE.
Les IDE permettent aux PECO d’atteindre un stock de capital proche de celui de l’UE (210%
du PIB). Ils permettent d’améliorer la technologie des PECO et de diversifier les exportations
(la part des matières premières dans les exportations chute de 27% en 1994 à 21%
aujourd’hui).
Le taux d’investissement dans les PECO est de 26,5%, contre 20% dans l’Union à 15.
Les PECO ont souvent mené une politique favorable aux IDE (exemple : Estonie : l’impôt sur
les sociétés est de 0%).
Toutefois, les PECO doivent veiller à maîtriser leur dette extérieure et accroître leur niveau
d’épargne interne.
2) Un choc commercial asymétrique.
Des accords commerciaux ont été signés dès la chute du mur.
Entre 1988 et 1998, les exportations vers l’UE ont été multipliées par 6,5 et les
importations par 4,5. L’élargissement va encore réduire de 10% les coûts réels du
commerce.
Le choc commercial à venir est asymétrique : les PECO ne représentent que 4% des
échanges de l’Union, alors qu’ils réalisent plus des 2/3 de leurs échanges avec l’Union.
Principaux secteurs des PECO : sidérurgie, verre, construction. Les PECO sont
fortement ouverts (République tchèque : 90%, Pologne : 30%)
(Peu de conséquence de fait pour l’agriculture. L’agriculture des PECO est trop peu
productive, malgré ses 28% de surface agricoles de l’Union et 60% de main d’œuvre.)
Afin de conserver leur avantage compétitif commercial, les PECO mènent une
politique de changes glissants, dépréciant le taux de change nominal de leur monnaie afin de
compenser en partie les effets de l’inflation (en partie seulement, pour maintenir une pression
sur l’inflation).
3) Un marché du travail calme menacé par l’inflation.
Sans doute pas d’émigration massive.
Vers une hausse des salaires. Celle-ci doit suivre la hausse de productivité. Attention à
une trop rapide convergence des salaires type Allemagne de l’est.
4) Le coût à court terme de l’élargissement.
Coûts liés notamment à la protection de l’environnement.
Coûts qui empêchent des investissements dans d’autres domaines alors que les besoins
en financement sont grands.
B) A court terme, peu d’effet sur les pays de l’Europe à 15.
1) Faible choc commercial.
Les nouveaux membres ne représentent que 3,7% du PIB à 25. (leur PIB par tête =
45% du PIB par tête moyen de l’Union à 15). Pour comparaison, l’Espagne et le Portugal
représentaient 8,2%.
Les PECO ne représentent que 4% du commerce de l’Union (soit 112 milliards$),
soit juste leur part dans le PIB de l’Union ! Toutefois, ce commerce est en forte croissance
(7% par an).
2) Peu de risque de détournement des investissements.
S’agissant des flux externes, il n’y a pas de détournement des IDE.
Même en flux internes, la progression des flux vers l’Union à 15 était plus forte ces 5
dernières années que celles vers les PECO.
La différence dans les coûts salariaux ne laisse pas à penser à une fuite des IDE vers les
PECO.
3) Peu d’effets sur le marché du travail à 15.
On n’a pas observé d’importants flux migratoires lors des précédents élargissements.
A l’horizon 2020, la proportion de citoyens des PECO vivant dans l’Europe à 15
devrait être de 1% (3,5% en Allemagne, mais l’Allemagne a de toutes façons besoin d’un flux
de 300 000 personnes par an pour maintenir sa population active).
4) Craintes non fondées du dumping social et de la concurrence déloyale.
Rappel : différence de salaire = différence de productivité.
Les dépenses sociales sont élevées dans les PECO (30% du PIB dans les trois principaux
candidats).
II) À long terme, l’élargissement constitue un changement d’échelle pour l’économie de
l’Union, tout en développant le potentiel de croissance des nouveaux membres.
A) Pour l’économie de l’Union, un changement d’échelle mais pas un bouleversement des
équilibres structurels.
1) Elargissement du marché unique.
Vers un marché de 450 millions de personnes (économies d’échelles, meilleures
allocations…)
2) Les flux démographiques ne devraient pas permettre de résoudre les problèmes
conjoncturels.
L’immigration peut aider à résorber les pénuries de main d’œuvre sectorielles. Mais ce
n’est pas une solution au problème des retraites notamment. De fait, les PECO connaissent
déjà une stagnation de leur population, voire une baisse (-0,04% en Hongrie en 2003).
3) Conséquences limitées pour l’€ et la politique monétaire.
2007 : pays Baltes et Slovénie dans l’€
2010 : Pologne et République tchèque
Les PECO souhaitent rentrer dans l’€ pour bénéficier de taux d’intérêt et de primes de risques
faibles, et se prémunir contre les crises de liquidité. Cette rentrée dans l’€ ne doit pas être trop
rapide. Les PECO ont besoin de déficits publics et d’inflation.
Sauf pays Baltes et Slovénie, ils ne remplissent pas les critères (forts déficits), hormis celui de
dette publique.
Influence secondaire de l’entrée des nouveaux membres sur le taux de change de l’€ (guidé
par d’autres paramètres type déficits et perspectives de croissance)
Objectif d’inflation de la BCE : il est désormais d’autour 2%, ce qui devrait intégrer les PECO
lorsqu’ils auront effectué leur entrée. Les effets Balassa Samuelson devraient être finis d’ici
2010. Par contre, les processus décisionnels au sein de la BCE devraient être revus. Pour
pouvoir fonctionner à 14 puis 20 membres et plus.
B) Pour les économies des nouveaux membres, l’élargissement a donné lieu à de grandes
réformes structurelles qui ouvrent de forts potentiels de croissance.
1) L’intégration de l’acquis communautaire.
Le troisième critère d’adhésion, dit « critère économique de Copenhague », du nom
du sommet en 1993, prévoyait que les futurs adhérents présentent « une économie de marché
viable ainsi que la capacité de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché
à l’intérieur de l’Union ».
D’où de nombreuses réformes dans les PECO avant l’adhésion : droit de la propriété,
droit des sociétés, droit de la concurrence, codes de commerce, propriété intellectuelle.
Croissance du PIB plus forte dans les PECO : 3,5% en 2003 contre 0,5 pour la
zone €. A METTRE A JOUR
2) Elargissement et gains de productivité.
Actuellement, la productivité moyenne du travail dans les PECO est de 53%
inférieure à la moyenne de l’Union à 15.
Mais déjà, les transferts technologiques et les transferts de capitaux permettent une
productivité proche de la moyenne européenne dans certains secteurs (commerce, services
financiers), voire supérieure (services financiers slovaques, qui a une productivité de 7%
supérieure à celle de l’Union à 15)
3) Elargissement et baisse de la prime de risque, et donc du coût du capital.
Au fur et à mesure que la prime de risque diminuera, les IDE devraient être remplacés
par des prêts bancaires (encore à 50% de leur capacité) puis par les marchés financiers.
4) La question des nouveaux pays limitrophes.
Un des vrais problèmes économiques de l’élargissement risque de se poser pour les
nouveaux pays limitrophes de l’Union. Ils risquent de perdre une part de leur marché
traditionnel, notamment dans le domaine agricole.
Des discussions ont débuté avec ces pays (Ukraine, Biélorussie).
L’élargissement constitue une opportunité. La réussite (exemple irlandais) n’est pas
obligatoire : Portugal et Grèce sont restés en bas de l’échelle.
Deux conditions de la réussite : que le niveau des salaires suivent le niveau de
productivité ; que des réformes structurelles soient entreprises (éducation, cadre législatif).
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