Les vingt et une associations, dont la Ligue nationale contre le cancer, Aides, l'Association
française contre les myopathies et l'Union nationale des associations familiales, avaient salué, à
la fin juin 1999, les intentions de Lionel Jospin clôturant les états généraux de la santé. Le
premier ministre avait alors exprimé sa volonté de faire reconnaître le droit des malades par une
loi figurant dans le code de santé publique ( Le Monde du 1er juillet 1999), censée affirmer le
droit à l'information, au consentement, au respect de la dignité de la personne malade, et donner
à chacun la possibilité d'un accès direct à son propre dossier médical.
Actuellement, l'accès au dossier médical est régi par le décret du 30 mars 1992, intégré au Code
de la santé publique (article R. 710-2-2) : « La communication du dossier médical intervient, sur
la demande de la personne qui est ou a été hospitalisée ou de son représentant légal ou de ses
ayants droit en cas de décès, par l'intermédiaire d'un praticien qu'ils désignent à cet effet. »
Cependant, les associations d'usagers de la santé font état de nombreux témoignages sur les
difficultés à obtenir gain de cause. Il faut donc changer la loi. Tout le monde est d'accord sur ce
point. Modifier ces dispositions se heurte toutefois à un premier obstacle : le calendrier politique.
L'échéance des législatives de mars 2001 conduit chaque ministère à vouloir faire passer ses
projets de loi avant la fin de l'année et le début de la campagne électorale. Il existe une autre
difficulté : la question de l'accès direct au dossier médical ne ferait pas l'unanimité dans les rangs
du gouvernement.
Lors de la conférence de presse du CISS, le 14 mars, Christian Saout, président d'Aides, et Pierre
Lascoumes, l'un des deux coordonnateurs du CISS, ont indiqué que Mme Gillot y serait
favorable, mais pas sa ministre de tutelle, Martine Aubry. Ce dont cette dernière se défend
énergiquement.
« LE PARTI DES UNS OU DES AUTRES »
S'exprimant lors du colloque de l'Assemblée nationale, Mme Gillot s'en est expliquée : « Si nous
n'avons toujours pas présenté de projet de texte, c'est parce qu'avec Martine Aubry nous ne
voulons pas prendre, à ce stade, le parti des uns ou des autres. » Les réticences ne sont en effet
pas minces au sein du corps médical, pour des motifs qui vont de la protection du patient jusqu'à
la propriété intellectuelle du médecin sur ses notes.
La distance entre les positions des associations d'usagers et les instances médicales paraît
cependant s'amenuiser. Lors du colloque, le président de l'ordre national des médecins, le
professeur Bernard Glorion, a fait un nouveau pas en avant en affirmant que « l'accès direct doit
être parfaitement reconnu, à condition que le patient soit bien informé de son contenu, et à
condition aussi que l'on se soit interrogé sur le risque pour un patient qu'un employeur ou un
assureur lui demande de voir son dossier. Mais nous y sommes favorables. »
Au coeur du débat se trouve l'information réclamée par le patient. La jurisprudence oblige
désormais le praticien à apporter la preuve qu'il a bien fourni cette information. Cette évolution a
conduit certains médecins à se contenter de faire signer une décharge par les patients, sans que
ceux-ci aient toujours bien compris l'information qu'ils sont censés avoir reçue. De plus, comme
l'a souligné le rapport d'Etienne Cagniard sur « la place des usagers dans le système de santé »,
les commissions de conciliation, prévues dans chaque établissement de soins par les ordonnances