Dissection des artères nourricières du cerveau: anticoagulation ou

Dissection des arresnourricières
du cerveau: anticoagulation ou inhibiteurs
de l’agrégation plaquettaire?
Stefan Engeltera,b,Felix Fluria,Andrea Maruggc,Philippe Lyrera
aNeurologie und StrokeUnit; Universitätsspital Basel, bFelix Platter-Spital Basel, cPraxis Claragraben, Basel
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Introduction
La dissection de la carotide interneoudel’artère
vertébraleest l’unedes causes d’ictus lesplus fré-
quenteschezles personnesjeunesoud’âge moyen.
Jusqu’à 45 ans, un accident vasculaire cérébral
(ictus)sur quatre estdûàune dissection.Son in-
cidence estestimée à2,6/10000 habitants [1].La
dissection de la carotideinterne extracrânienne,
abrégée ci-dessousedissection carotidienne»,
semble être deuxfoisplusfquente quecelle de
l’artère vertébrale (dissection vertébrale).
Lesdissectionspeuventsemanifester cliniquement
par une ischémie cérébrale(ictus ou TIA), mais
aussi par un syndrome de compression locale (pa-
résiedes nerfscniens postérieurs, syndrome de
Horner).Des acouphènes synchrones aux pulsa-
tions peuvent parfoisaussi être un symptôme de
dissection. Les symptômes cités sont souvent as-
sociés àdes douleurslocalisées au niveau de la
bifurcation et de la région latérocervicale dans la
dissection carotidienne (carotidodynie),douleurs
pouvant irradier vers le visage, l’oreille ou l’œil,
là où elles sont parfoisleplusnettement ressen-
ties. Lorsd’une dissection vertébrale, ces douleurs
sont localisées dans la nuque [2].
En présence de tels symptômes, le diagnosticde
suspicion de dissection carotidienne ou vertébrale
pourra être confirmé par la neuroéchographie
(fig. 1 xet 2A x)oulatomographie par réso-
nance magnétique (fig. 2B). La sensibilitédela
neuroéchographie estmoins bonne que celle de
l’IRM.Elle peuttoutefois fournirdes éléments sug-
gestifs du diagnosticàlaphase aiguë déjà, et l’IRM
peut être faussement négative dansles premiers
jours d’un hématome de la paroi.
Le sujet de cet article n’est pas le diagnostic mais
le traitement antithrombotique de la dissection
carotidienne/vertébraleextracrânienne. En effet,
compte tenu des bénéficesetrisques, sontraite-
ment par anticoagulation ou inhibitiondel’agré-
gation plaquettaire esttoujours controversé.
L’anticoagulation est très souvent recommandée,
mais cet avis est purement empiriquecar il ne re-
pose sur aucune étudecontrôlée et il est contro-
Vous trouverez les questions àchoix multiple concernant cet article àlapage 375 ou sur internet sous www.smf-cme.ch.
Quintessence
(La dissection des portionsextracrâniennes des artèrescarotide interne
(«dissectioncarotidienne»)ouvertébrale(«dissectionvertébrale»)est l’unedes
causes d’ictus lesplus fréquentes chezles personnesjeunesoud’âge moyen.
(L’utilisationtsrépanduedes anticoagulants lorsd’une dissectioncarotidienne
ou vertébrale n’est basée sur aucune preuve.
(Sur la basedeconsidérationsphysiopathologiques,d’expériences cliniques et
d’une méta-analyse systématique de la dissection carotidienne, il existe autant
d’arguments pour que contre l’anticoagulation.
(Une étude randomiséeetcontrôléecomparant l’inhibition de l’agrégation
plaquettaire àl’anticoagulationlorsd’une dissection estdoncnécessaire et éthi-
quementparfaitement justifiée.
(En attendant,ladécision en faveur de l’anticoagulationoudel’inhibition de
l’agrégationplaquettaire ne peut être prise qu’au cas par cas,sur la basedecer-
tainescaractéristiques cliniques ou paracliniques.
(Un déficit clinique grave(NIH-Stroke ScaleScore 015), une dissection intra-
crânienne associée,des syndromesdecompressionlocaux sans TIA ni ictus,de
même qu’une pathologie concomitanteavecrisque accru d’hémorragie parlent
plutôt en faveur des inhibiteurs de l’agrégationplaquettaire.
(S’il yades signaux échographiquessuggestifs d’embolies (High Intensity
Transient Signals ou HITS)malgréun(double) traitement antiplaquettaire, en cas
de (pseudo)occlusion de l’artère disséquée, de TIA/ictus multiples danslemême
territoire artérieloudethrombus intra-artérielflottant, c’estàl’anticoagulation
qu’il faudrait donnerlapréférence.
Summary
Dissection of brain-supplying arteries:
anticoagulation or antiplatelets?
(Cervical artery dissection is acommon cause of strokeinyoungerpatients.
(Widespread use of anticoagulantsinpatients withcervical artery dissection
(CAD)isnot evidence-based.
(On the basis of pathophysiological considerations,clinicalexperience andthe
findingsofasystematic meta-analysisoncarotid dissection,thereare arguments
both in favourand againstimmediate anticoagulationinCAD patients.
(Thus, arandomised controlledtrial comparing antiplatelets withanticoagu-
lation is needful and ethically justified.
(Alternatively,antithrombotic treatmentdecisions canbeindividuallytailored
on the basis of particular clinical and paraclinical characteristics.
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versé parmi les experts [3–5]. En pratique clinique,
il s’agit de décidercomment prévenir le plus effica-
cementpossibleles infarctus cérébraux. Concrè-
tement,c’estauclinicien de décider, en fonction
de son évaluation des bénéfices et des risques de
ces deux méthodesdetraitement pour sonpatient,
s’ildoitletraiter par anticoagulation ou par des
inhibiteurs de l’agrégation plaquettaire. Pourpou-
voir choisir le traitement optimal, quelques consi-
dérations physiopathologiques, les expériences
cliniques faites avec ces deuxoptions thérapeu-
tiques ainsi queles conclusions d’une méta-ana-
lyse systématique des antithrombotiques dans la
dissection carotidienne extracrânienne peuvent
être utiles, et ce sont elles quisont àlabase de cet
article [6].
Argumentsphysiopathologiques
pour uneanticoagulation précoce
Une dissection des artères nourricières du cer-
veau se produit lorsque du sang pénètredans la
paroi artérielle àlafaveurd’une rupture de l’in-
tima avec formation d’un hématome intramural.
Si le sang reste dansl’espace sous-adventitiel,cela
peut provoquerunsyndrome de compressionlo-
cale, en généraldouloureux (syndrome de Horner,
parésie de nerfs crâniens) ou évoluer vers l’hé-
morragiesous-arachnoïdienne [2].Cette dernière
est plusfquente dans les dissections intracrâ-
niennesquedansles extracrâniennesenraison des
différencesdestructure des parois. L’hématome
peutd’autrepartréduire la lumière des artères
carotides ou vertébrales et déclencher une isché-
mie cérébrale. Une telle ischémie, secondair
une dissection carotidienne ou vertébrale, peut
d’une partrésulter de thrombo-embolies àpartir
de l’intima lésée, mais aussi d’une perturbation
hémodynamique. La genèse emboliquesemble
être la plusimportante. L’échographie Doppler
transcrânienne permet d’enregistrerdans2
60% des cas des «High Intensity Transient Signals
(HITS)»–considérés comme en rapportavec des
embolies –dans l’artère cérébrale moyenne [7].
D’anciennes études, quiont recouruàl’angiogra-
phie conventionnellepour confirmerlediagnostic,
ont pu montrer des occlusions des artères céré-
brales antérieures ou moyennes chez 40 à50%
des patients ayant des dissections. L’analyse des
infarctus par imagerieduparenchyme cérébral
(TC,IRM-T2,IRM par diffusion)montredesimages
suspectes d’embolies chez la plupartdes patients.
Faitintéressant, les images des infarctus sont dif-
férentes selon quel’artère disséquée est occluse
ou seulement sténosée [8].
Les résultatsdelaneuroéchographie et de l’angio-
graphie ainsi que l’analyse de l’image des infarctus
montrent quel’embolie artério-artérielle est le mé-
canismeleplus important de l’infarctus, alors que
la perturbation hémodynamiquenesemble jouer
qu’unrôle mineurchez la plupartdes patients.
(Stroke severity of NIH stroke scalescore 015, concomitant intracranialdis-
section, localcompression syndromes withoutischaemic events, or concomitant
diseases with increased bleedingriskargue in favourofantiplatelets.
(In CAD patients with (pseudo-) occlusionofthe dissected artery andwith
high intensity transientsignals in transcranialultrasoundstudies despite (dual)
antiplatelets,multipleischaemic events in the same circulation or afree-float-
ingthrombus,immediate anticoagulationistobepreferred.
Figure 1
Echographie Doppler duplexd’une dissection extracrânienne de la carotide interne gauche:
dilatation hypoéchogène de la paroi artérielle (correspondant àunhématome intramural)
cervicale haute (flèche blanche). Il yaenplus une sténose de moyenne importance –selon les
critères hémodynamiques –delacarotide interne distale avecabsence de lésions
athérosclérotiques.
Figure2
Echographie duplexneurovasculaire (A) et tomographie par résonance magnétique (B) d’une
dissection vertébrale extracrânienne.
Neuroéchographie d’une a. vertébrale avecdilatation de la paroi correspondant àunhématome
intramural, qui se traduit àl’IRM (T1-saturation lipide+débit) par une accentuation falciforme
du signal (flèche).
Clichés IRM reproduits avecl’aimable autorisation du PD Dr S. Wetzel, Neuroradiologie, Hôpital
universitaire de le.
AB
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fois plus élevéd’hémorragiesintracrâniennes
symptomatiques [12]. Ellenedoit doncgénéra-
lement pas être administréed’embléeaprèsun
accident vasculaire cérébral aigu –surtout quand
il estd’originecardio-embolique.Nul ne peut dire
dansquelle mesure on peut utiliserces résultats
pour lespatients ayantdes dissections. Car dans
la dissection carotidienneuniquement extracrâ-
nienne, le risque d’hémorragie intracérébrale
comme complicationdutraitement sembltre
minime:une méta-analyse systématique aretrouvé
une hémorragie intracrâniennechezdeux des
414(0,5%) patients anticoagulés,etchez aucun
des 157patients traitéspar un inhibiteur de l’agré-
gation plaquettaire [5]. De plus,vuque dansune
étude multicentrique une thrombolysen’a provo-
qué aucunehémorragie intracrâniennechezles
patients ayantune dissection carotidienne[14],
le risque d’une tellehémorragie symptomatique
résultantdel’anticoagulationest probablement
plus faibleque chezles patients victimesd’infarc-
tus cérébraux d’originecardio-emboliques.
Selon l’étude «Warfarin versus Aspirin for Sec-
ondary Stroke Prevention(WARSS)»,l’anticoagu-
lationsembleneprésenteraucun avantage dans
l’ictus d’origineartérielle(noncardiaque) [13].
Chezles victimesd’ictus avec gravedéficit neu-
rologique,l’anticoagulationimmédiatepeutmême
être dangereuse, car les transformations hémor-
ragiques symptomatiques sont plusfquentes
chez ces patients gravement atteints. Selon les re-
commandations générales de l’American Stroke
Association, les patients ayant des dissections ca-
rotidiennes ou vertébrales et un NIH-Stroke Scale
Score 015 ne devraient pas être anticoagulés.
Expériences cliniques avecles
inhibiteurs de l’agrégation plaquettaire
et l’anticoagulation dans les dissections
Les dissectionsauniveaucervical des artèresnour-
ricièresducerveauprovoquentgénéralementdes
symptômes d’ischémie cérébraleoudecompres-
sion locale. Des hémorragies sous-arachnoï-
diennespeuvengalement se produire,maiselles
sont plus fréquentes,ilest vrai,avec les dissections
intracrâniennes qu’avec cellesqui sont extracrâ-
niennes.Sur 116patients ayantune dissection
carotidienneouvertébralecervicale, quatre (3%)
ontprésenté une hémorragie sous-arachnoï-
dienne.C’estpourquoiilfaut absolument deman-
der une TC ou une IRM du parenchymecérébral
avant tout traitement antithrombotique, et surtout
avant toute anticoagulation. Le faitque les hémor-
ragiessontplus fréquentes (jusqu’à 20%) avec les
dissectionsintracrâniennes peut être un argument
en faveurdelaréticenceàl’anticoagulation en cas
de progression de la dissection en aval.
La pathogenèseembolique pourrait être enfaveur
de l’anticoagulation, tout comme pour l’infarctus
d’originecardio-embolique danslafibrillation
auriculaire. Maislatransposition des résultats des
études sur la fibrillation auriculaire aux patients
souffrant de dissections des artères nourricières
du cerveau est sujette àcaution, en raison des dif-
férences dans les mécanismes pathogénétiques,
les âges et les profils de risque.
Un autreargument (toutaumoins théorique) en
faveurd’une anticoagulation précoceest celuidu
risquedeformation d’un thrombus en aval d’une
occlusion carotidienne/cérébrale totale suite àune
dissection.Dans60à80% des dissections, une
recanalisation de l’artère obstruéeseproduit en
l’espace de trois mois. Ces patients courent en
outre le risque que des fragments de thrombus se
détachentpendantleprocessus de recanalisa-
tion, avec pour conséquence des obstructionsdes
artèresintracrâniennes avec infarctus d’origine
embolique.
Arguments physiopathologiques
contreune anticoagulation
Comme lesdissectionscarotidiennes et/ouver-
brales correspondent àunhématomeintramural,
l’anticoagulationpeut faire augmentercedernier,
théoriquement tout au moins. Si le diamètre de
l’artère est ainsi augmenté, cela peutprovoquer
ou accentuer des symptômes de compression lo-
cale, comme un syndrome de Horner douloureux
ou des parésies centrales. Si la lumière vasculaire
diminue, il en résulteune perturbation de l’hémo-
dynamique. Les cas danslesquels une progres-
sion de la sténose allant jusqu’àl’occlusion de l’ar-
tère disséquéeaéconstatée [9, 10]confirment
qu’une perturbation hémodynamique n’est pas
qu’un scénario théorique, mais que le risque d’in-
farctus d’originehémodynamique –«low-flow» –
estbien réel. Il n’est actuellement pas possiblede
savoir si et avec quelle fréquence,une telle occlu-
sion –àretardement –seproduit sous inhibiteurs
de l’agrégation plaquettaire. On ignore aussi s’il
fautinterpréter la relation entre anticoagulation
et occlusion artérielle àretardement comme étant
causaleoudue au hasard.
Il n’y aaucuntude comparativedesubstances
antithrombotiquesdansles dissectionscaroti-
dienneset/ou vertébrales.Dansunetellesituation,
pour estimer le risque et lesbénéfices, on peut uti-
liser,par analogie, les résultats d’études de popu-
lations victimes d’accidents vasculaires cérébraux
d’autres étiologies.
Une méta-analyse récemmentpubliéeamontré
que le bilanbénéfice/risque de l’anticoagulation
immédiate aprèsunictus,sanstenir compte de
sotiologie,n’est pas positif, pas plus àcourt
qu’à long terme [11]. Dansl’ictus cardiogèneem-
bolique, l’anticoagulationmiseenroutedansles
48 heures associée àunrisque environtrois
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onvictimesd’un accident vasculaire céré-
bral.Dansune série allemande portantsur plus
de 100patients avec une dissection,iln’y aeuau-
cun ictus pendanttoute la phase d’observation,que
ce soit danslegroupe anticoaguléoudanscelui
sous inhibiteurs de l’agrégationplaquettaire. Une
TIA enregistréechezunpatientparmiles
113anticoagulés,maischezsix des neuf mis sous
inhibiteursdel’agrégationplaquettaire.Parcontre,
un des patients anticoagulés victime d’une
hémorragieintracrânienne symptomatique,cequi
n’a pas été observé dans l’autre groupe. Tout cela
montre bien àquelpoint il est important de peser
les bénéfices potentiels et les risques de ces deux
options thérapeutiques.
Méta-analyse systématique desanti-
thrombotiques dans la dissection
carotidienne extracrânienne
Les études contrôlées comparant lesantithrom-
botiques aux placebosouàd’autres témoins sont
aussi peu nombreusesque cellescomparant les
anticoagulants aux inhibiteurs de l’agrégation
plaquettaire dansladissection carotidienneou
vertébrale. C’estpourquoilaméthodologie de la
CochraneReview appliquée,sous la forme
d’une méta-analyse systématique, àtoutes les
études non randomisées et séries de cas ayant
traité au moins quatre patients, soit par inhibi-
teursdel’agrégation plaquettaire soit par anti-
coagulants, et stratifiél’«outcome» en fonction de
l’option antithrombotiquechoisie [5].Les pre-
mières variables d’«outcome» ont été soit «décès»
soit «décès ou handicap»jusqu’au terme de la pé-
riode d’observation. 26 études ont été recensées
pourune analyse comparative, portant sur un to-
tal de 327 patients ayant reçusoit un inhibiteur
de l’agrégationplaquettaire soit un anticoagulant.
Deux des 109patients sous inhibiteurs de l’agré-
gation plaquettaire (1,8%) et quatre des 218sous
anticoagulants (1,8%) sont décédés pendantla
période d’observation.L’odds ratio de Peto avec
1,59 (intervalledeconfianceà95% 0,22–11,59)
n’a montré aucune différencesignificative entre
ces deuxoptions thérapeutiques. Et même pour
«décès ou handicap», il n’y aeuaucune différence
significative entre les deuxgroupes de traite-
ment, avec une oddsratiodePeto de 1,94 (inter-
valle de confianceà95% 0,76–4,91).
Etuderandomisée et contrôlée
Les considérationsphysiopathologiques dontila
étéquestionplus haut, lesobservationscliniques
et paracliniques ainsi que lesrésultatsdelaméta-
analysesystématiquemontrent bien qu’unegrande
étuderandomisée et contrôlée est souhaitable et
éthiquement parfaitement justifiée pourfaire la
comparaison entre anticoagulation et inhibition
Expériences cliniques sur la prévention
de (nouvelles) ischémies cérébrales
De nombreux patients décriventdes symptômes
d’alarmeavant leur ictus (TIA, douleurs àlocali-
sations typiques). Mais la latence entre ces symp-
mes et le déclenchement de l’ictusest de quelques
minutes àquelques heures chez la moitiéd’entre
eux,cequi faitque la chanced’une intervention
préventive est minime.
Dans le monitoring par échographie transcrâ-
nienne, les patients ayant des dissections avec ic-
tus ont plussouvent des signaux transitoires de
haute intensité (HighIntensity Transient Signals;
HITS)que ceuxayant des symptômes unique-
ment non ischémiques (par ex. syndrome de Hor-
ner douloureux). Dans de petites séries, pratique-
ment tous les patients avec une dissection et ayant
eu des épisodes répétés d’ischémie présentaient
de tels signaux d’embolies àl’échographie. Ces
deuxconstatations permettent de penser queles
patients ayant des signaux échographiques d’em-
bolies ont un risqueaugmenté de faire un ictus,
et qu’ils ont besoind’untraitement antithrombo-
tique plunergique queceuxqui ne présentent
pas de tels signaux.Maismalheureusement, ces
signaux d’embolies peuvent apparaître ou per-
sister malgréletraitement antithrombotique. Il
n’existe pas non plusderelation entre le nombre
de signaux emboliques enregistrés par unité de
temps et le choixdel’anticoagulation ou des inhi-
biteursdel’agrégation plaquettaire.
Dans les sténoses carotidiennes athéroscléro-
tiques, une petite étudeapumontrer queles si-
gnauchographiques d’embolies pouvaient être
mieuxatténués par les inhibiteursdel’agrégation
plaquettaire quepar les anticoagulants [15].L’as-
sociationaspirine et clopidogrel est plusefficace
que l’aspirineenmonothérapie [16]. Mais l’obser-
vation d’un cas amontré queles signaux embo-
liques, apparusenassociation avec des accidents
ischémiques cliniques, ont persisté malgrécette
double thérapie antiagrégante, même en associa-
tion àl’héparine i.v. Les signaux échographiques
d’embolies peuventdontreutiles pour identi-
fier lespatients avec une dissection et àhautrisque
d’ischémie; mais personne ne peut actuellement
dire quellessontles meilleuresoptionspréven-
tives.
Un nouvelaccident cérébral ischémique dé-
crit chezdes patients ayantune dissection caroti-
dienne sous inhibiteurs de l’agrégationplaquet-
taire, et même sous anticoagulation efficace [5].
Un ictus ne peut dontreexclu, même sous anti-
coagulation.
Une étude canadienne(n=105)acompté plus
d’accidentictus, TIA ou décès» danslegroupe
aspirine (12,4%)que danslegroupe des anti-
coagulés(8,3%).Cela exactement le contraire
dansune étude mexicaineportantsur 130pa-
tients avec une dissection: 10% des patients anti-
coagulés, mais 7% seulement de ceuxsous aspirine
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(ictus contre TIA contre symptômes de compres-
sionpurementlocaux), l’importance du déficit
clinique et la proportiondes patients sous traite-
ment antithrombotique.Laproportiondes dis-
sections carotidiennes doit être identique àcelle
des dissectionsvertébrales dansles deux bras de
traitement,car il peut yavoir des différencesdans
l’incidence des hémorragies. Le traitement doit
être mis en routeleplus rapidement possible, car
lesaccidentsischémiques àrépétition se produi-
sent principalement au cours des premiers jours
ou des premièressemaines. Avec les données
dont nous disposons àl’heure actuelle, nous es-
timons qu’ilfaudrait au moins 1400 patients dans
chaque bras de traitement pourpouvoir enregis-
trer une différencede5%aumoins par rapport
aux patients décédés ou handicapés àvie (de20
à15%). Une telle étudeseheurtera très probable-
ment àdes difficultés au niveau du financement et
du recrutement des patients vu quel’industrien’a
aucun intérêt commercial àcontribuer àsaréa-
lisation. Maiselle est très importante et mettrait
finàlacontroverse de plusieurs dizaines d’an-
nées sur l’anticoagulation immédiate ou non des
patients ayant une dissection. En fait, une étude
de faisabilité adéjà commencéenGrande-Bre-
tagne. Si une étudesur la dissection est effectuée
chez nous –etnous yréfléchissons –ilfaudraen-
couragerla participation.Mais enattendant,puisse
le tableau 1 pêtre utile pourprendreune déci-
sion thérapeutiqueindividuelle.
de l’agrégation plaquettaire dans la dissection
carotidienne ou vertébrale. Le protocole de cette
étudedoitcomporter une définition de la dissec-
tion, des critères diagnostiques précis, une allo-
cation stricte d’attribution par randomisation au
traitement, un bras anticoagulation et un bras
inhibition de l’agrégation plaquettaire, de même
qu’une observation de l’évolution indépendante,
en aveugle. Les deuxbrasdetraitement doivent
dans toute la mesuredupossible être équilibrés
en ce quiconcerne la symptomatologie clinique
Ta bleau 1. Arguments cliniques et paracliniques pour et contreune anticoagulation
précoce des patients ayant une dissection extracrânienne des arrescarotide interne ou
vertébrale.
Arguments pour une anticoagulation précoce
Signaux d’embolie àl’échographie (HITS) malgré double antiagrégation plaquettaire
Occlusion ou pseudo-occlusion de l’artère disséquée
Multiples TIA/accidents vasculaires cérébraux
Thrombus flottant dans l’artère disséquée
Arguments contre une anticoagulation précoce
Grave déficit clinique (NIH-StrokeScale Score 015)
Paspossible d’avoir une imagerie du parenchyme cérébral (TC/IRM)
Dissection intracrânienne concomitante
Syndromes de compression locale sans TIA ni ictus
Maladie concomitante avecrisque accrud’hémorragie
Ce tableau se base sur des considérations physiopathologiques, des observations cliniques
et conclusions analogiques et représente le point de vue des auteurs. Il n’apas la prétention
d’être exhaustif.
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D’autres références sont disponibles auprèsdes auteurs.
Correspondance:
PD Dr S. Engelter
Leitender Arzt Neurologie
Hirnschlagbehandlungskette
Universitätsspital Basel –
Felix Platter-Spital
Cervical Artery Dissection
in Ischemic StrokePatients
(CADISP)-Study Group
Petersgraben 4
CH-4031 Basel
378-382 Engelter 113-07_f.qxp 8.5.2008 14:52 Uhr Seite 382
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