Achats compulsifs - Fun-Mooc

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Définition de l’addiction
• Addiction = (latin addicere) contrainte par corps, terme juridique,
forme d’esclavage
• Processus par lequel un comportement qui peut fonctionner à la
fois pour produire du plaisir et pour soulager un malaise intérieur
est utilisé sur un mode caractérisé par l’échec répété dans le
contrôle de ce comportement et sa persistance en dépit des
conséquences négatives (Goodman 1990)
• Répétition de séquences comportementales chargées de plaisir et
sous-tendues par un désir irrépressible (Marks 1990)
Critères du trouble addictif de Goodman
(1990)
•
•
•
•
•
Impossibilité de résister aux impulsions à réaliser ce type de comportement
Sensation croissante de tension précédant immédiatement le début du
comportement
Plaisir ou soulagement pendant sa durée
Sensation de perte de contrôle pendant le comportement
Présence d’au moins cinq des neufs critères :
– Préoccupation fréquente
– Intensité et durée> souhait
– Tentatives pour réduire/contrôler/ abandonner
– Temps passé (avant, pendant, après)
– Survenue dans obligations de la vie quotidienne
– Sacrifices/ autres activités
– Perpetuation malgré lucidité
– Tolérance
– Agitation ou irritabilité si manque
Critère(s) présents > 1 mois ou plus
« les addictions sans drogue »
• Conduites morbides
• Principal élément = assuétude à un comportement
qui par sa répétition entraîne la perte de contrôle et
des dommages
• Construites sur le modèle des addictions avec produit
• L’appartenance de ces comportements au spectre des
addictions est discutée
Caractéristiques cliniques des addictions
sans drogues (Marks 1990)
• Désir de s’engager dans une séquence comportementale potentiellement
dangereuse (craving)
• Tension croissante jusqu’à ce que la séquence comportementale soit
terminée
• La fin de l’achat réduit de manière temporaire la tension
• L’envie, le désir, la tension réapparaissent quelques heures, jours ou
semaines plus tard
• Existence de facteurs déclenchants externes
• Facteurs déclenchants et conditionnants internes
• Tonalité hédonique des premiers temps de l’addiction
Une évolution commune
• Début fréquent à l’adolescence ou chez l’adulte jeune
• Évolution souvent fluctuante avec période
d’exacerbation et d’accalmie voire d’abstinence
• Guérisons spontanées possibles
Des bases neurobiologiques et
génétiques communes
• Données chez les joueurs pathologiques, les sujets
alcoolodépendants et toxicomanes
• Dysfonction du cortex préfrontal, altération du
contrôle des impulsions et des fonctions de prise de
décision
• Même système de neurotransmission
(sérotoninergique et dopaminergique)
• Rôle de l’allèle A1 du récepteur D2
Arguments épidémiologiques
• Cooccurrence importante entre les addictions
comportementales et les addictions aux produits
• Cooccurrence comparable entre addictions
comportementales, addiction aux substances et
troubles psychiatriques, en faveur
d’une « vulnérabilité addictive »
Des modalités thérapeutiques
communes
• Approche multidisciplinaire indispensable
• Psychothérapie individuelle
• Intérêt des groupes thérapeutiques et des
groupes d’entraide
• Place limitée de la chimiothérapie
• Nécessité de soutenir l’entourage
LES ACHATS COMPULSIFS
Achats et « société acheteuse »
•
Les tentations sont permanentes : "Nous vivons dans une société où
l’impulsivité du consommateur est sollicitée par tous les moyens"
(J. Cottraux)
•
Les achats imprévus ou compulsifs tiennent une large place dans la
consommation moderne, entre 25% et 65% selon les chiffres du Credoc
•
"Consommer dans un pays riche, c'est à la fois satisfaire un besoin et
s'accorder un plaisir qui va au-delà de ce strict besoin"
(Robert Rochefort, directeur du CREDOC, La société des consommateurs)
Certains achats, on le sait, renforcent notre identité, nous valorisent
socialement, nous consolent, rassurent notre narcissisme. Les publicitaires
l'ont bien compris qui savent comment nous tenter et stimuler notre goût
pour les nouveautés.
Achats et société
•
Des systèmes incitateurs :
- Société de consommation, publicités, magazines, soldes
« Parce que vous le valez bien! »
- Achats indicateurs de statut
- L’argent et le pouvoir: « le pouvoir d’achat »
•
Des systèmes facilitateurs :
- Système des Crédits (faciles, rapides, revolving…) banalisation de l’achat à
crédit
- Moyens de paiements « invisibles », dématérialisés ( CB, Internet)
- Achats à distance (Internet, catalogue)
- Publicité, Soldes, promotions
- Magasins ouverts « non stop »
Un peu d’histoire
• Phénomène ancien sur l’échelle de l’humanité
• Cas décrits depuis l’Antiquité, assimilés à une transgression sociale, à la
prodigalité, à la dépense excessive. L’excès de dépense était considéré
comme « contraire au bonheur et à la tranquillité de l’âme », menace
pour l’équilibre social et pour la transmission des patrimoines familiaux
• Premiers textes cliniques : Kraepelin (1915) et Bleuler(1930)
«oniomanisme » = manie d’acheter, comportement impulsif, excessif et
irréfléchi
• Apparaît sous le terme de « Prodigalité » en 1960 dans le Manuel
alphabétique de Psychiatrie
• Non incluse dans la CIM et le DSM
• Appartient au spectre des troubles du contrôle des impulsions
Evolution des classifications : le
DSM-V
• Plusieurs changements importants concernant les achats
compulsifs :
– Description de plusieurs troubles autonomes parmi les
troubles du contrôles des impulsions non spécifiés ailleurs
– Introduction dans la catégorie des troubles compulsifsimpulsifs : « C-I shopping », « C-I internet use disorder »,
« C-I Sexual behavior »
Epidémiologie
Prévalence
•
•
•
Varie entre 1,1%, 5 %, et 16% selon les travaux en
population générale
Une étude réalisée parmi 200 femmes acheteuses dans un
grand magasin parisien a montré une prévalence du trouble
autour de 32,5 %
Des études plus récentes avancent une prévalence entre 6
et 7%, ou de 5,8% en population générale
Epidémiologie
Caractéristiques socio-démographiques
• Les femmes (80 à 95 % des acheteurs compulsifs selon les
études), le plus souvent mariées vivant dans les pays à fort
développement économique
• L’âge moyen de début de la maladie se situe entre 17 et 30
ans selon les travaux
• Christenson distingue même l’âge de début du trouble à 17,5
ans de l’âge moyen de prise de conscience du trouble à 29,5
ans
• La relation tre le niveau de revenus et la prévalence des
acheteurs compulsifs n’a pas été établie avec précision dans
la littérature
Clinique des achats compulsifs
• Sensation d’euphorie, plaisir et d’excitation au moment de
l’achat
• Sous-tendu par une envie irrépressible, un besoin
incontrôlable d’achats d’objets inutiles en plusieurs
exemplaires, ne laisse pas de place à la frustration
• En grande quantité et en de nombreux exemplaires
identiques
• Divers états émotionnels apparaissent faciliter les achats
compulsifs au moment de l’achat
• Impossibilité de différer l’achat, équivalent de syndrome de
sevrage
• Carte bleue +++
Critères d’achats compulsifs
(Mc Elroy)
• Pensées envahissantes et gênantes concernant les achats ou
comportement d’achat inadapté ou impulsions d’achat correspondant à
au moins une des propositions suivantes :
- Pensées envahissantes et gênantes concernant les achats ou
impulsions d’achats vécues comme irrépressibles, intrusives et
dépourvues de sens
- Achats fréquents supérieurs aux capacités financières, achats
fréquents d’objets inutiles ou achats durant plus longtemps que prévu
•
•
Les pensées, les impulsions ou le comportement provoquent une gêne
marquée, font perdre du temps ou perturbent sensiblement le
fonctionnement social ou les loisirs ou entraînent des difficultés
financières (dettes, interdit bancaire)
Le comportement excessif d’achat n’apparaît pas uniquement pendant
les périodes de manie ou d’hypomanie
Stern (1962) : 4 types d’achats
compulsifs
• Achats compulsifs planifiés : intention d’acheter mais des
facteurs entre en jeu (promotion, date…)
• Achats compulsifs « souvenirs » : le sujet voit l’objet et se
rappelle une décision d’achat qu’il avait oublié
• Achats compulsifs « suggérés » : le sujet voit l’objet pour la
première fois et décide de l’acheter pour la nouveauté ou
autres
• Achats compulsifs « purs » : achats complètement
imprévisibles
Quels objets? (Christenson 1994)
• vêtements (94% des cas)
• chaussures (95%)
• bijoux (42%)
• produits de beauté ( 35%)
• antiquités (25%)
• disques (22%)
• automobiles (17%)
• appareils vidéos, audio , informatiques (15%)
• livres (12%)
• objets d’arts (4%)
Caractéristiques spécifiques
des achats compulsifs
•
•
•
•
Accomplissement solitaire
Souvent des cadeaux à soi même ou pour les autres
Souvent choisis en fonction de l’image sociale associée
Investissement de la situation d’achat (1/3 achats considérés
comme une occasion exceptionnelle à ne pas manquer)
• Objet a moins d’intérêt que la situation d’achat
• Objets acquis souvent moins utilisés que prévus
Comparaison de l’achat chez les témoins et
les acheteurs compulsifs (Lejoyeux 1999)
Effet de la
publicité
Changement de
choix dans le
magasin
Shopping seul
Recherche des
soldes
% achats
pendant les
soldes
% achats
comptant/ Crédit
AC +
(N=21)
19 %
Témoins
(N=31)
19%
19%
32%
85 %
57 %
61 %
32 %
26 %
19 %
72 %
86 %
Comparaison de l’achat chez les témoins et
les acheteurs compulsifs (Lejoyeux 1999)
AC +
(N=21)
49 %
Achats
« nécessaires »/
auto-cadeaux
% achats dus au 14%
statut social
% d’occasions 31 %
exceptionnelles
% achats moins 57 %
utilisés que
prévu
Témoin
(N=31)
71%
2%
15 %
16 %
Des conséquences lourdes :
Le surendettement
• L’endettement toucherait 83% des acheteurs compulsifs
• Honte, culpabilité >> comme la maladie physique chez le patient
alcoolo-dépendant, le surendettement ne suffit pas à stopper le
comportement problématique. Au contraire, c’est un « drame » de plus,
un échec, qui peut alimenter le besoin de se faire plaisir, la compulsion
• Vol d’argent à l’entourage ou au travail
• Question de la curatelle (formes sévères et à la demande du patient)
Comorbidités
• Association régulière à d’autres troubles psychiatriques (Black
1998)
- alcoolodépendance (18 %)
- drogues illicites (22%)
- dépression (61%) (achats compulsifs chez 32% des dépressifs.
90% des acheteurs sont déprimés, selon Mc Elroy)
- attaques de panique (15 %)
- boulimie (9%)
• Antécédents familiaux plus fréquents de dépression et
d’alcoolodépendance
Achats compulsifs et personnalité (1)
• Association fréquente trouble de la personnalité et achats
compulsifs
• Schlosser et al (1994) : 60 % ont un trouble de la personnalité
(22% obsessionnelle, 15% évitante 15% borderline)
• Pas de personnalité spécifique
• Des dimensions de personnalité fréquemment associées
– Impulsivité
– Recherche de sensation
– Faible assertivité, faible estime de soi
Achats compulsifs et personnalité (2)
Narcissique, dépendante, hystérique
– Achat = mode de satisfaction immédiate de besoins de réassurance.
Impression de toute-puissance
– Dimension narcissique des achats de vêtement, de produits de
beauté
Etat-limite
– Comportements impulsifs (dépenses inconsidérées, vols, conduite
automobile à risque, abus de drogues, boulimie)
– Modalités relationnelles particulières (labilité affective, alternance
de sentiments excessifs d'amour et de haine...)
Personnalité antisociale
– Troubles des conduites (vols, agressions, vandalisme, fugues, rixes)
apparus avant quinze ans
– Difficultés à tolérer la frustration et à contrôler l'impulsivité,
l'irritabilité et l'agressivité
Achats compulsifs équivalent du TOC ?
– Argument en faveur :
• Envie d'achat = obsession anxiogène, intrusive,
envahissante que le sujet essaie en vain de chasser.
Soulagement des affects négatifs au moment de la
dépense
• Résistance = Lutte anxieuse
– Argument en défaveur :
• Caractère hédonique et risqué du comportement
d'achat
Achats compulsifs équivalent d’un trouble
du contrôle des impulsions ?
• Arguments en faveur :
– Troubles du comportement répétés, impulsions
irrésistibles, tension avant le passage à l'acte,
apaisement après
– Association à d'autres troubles du contrôle des
impulsions
Achats compulsifs, une forme de
boulimie ?
• Clinique :
– Evacuation chez le boulimique et l'acheteur (objets donnés,
rendus, vendus, jetés)
• Association fréquente (Faber et coll 1995) chez 197
femmes obèses :
– 15 % des obèses boulimiques contre seulement 4,4 % des
obèses non boulimiques présentent des achats
compulsifs(p<0,05)
– 54,2 % des acheteurs compulsifs et 20,8 % des témoins
présentent des accès boulimiques (p <0,05)
Diagnostics différentiels
•
•
•
•
•
Collectionnisme (un groupe d’objet idolâtré)
Accumulateurs (amasser pour se rassurer sans forcément
acheter – e x: coupures de presse), ne pas savoir jeter
Manie (excessif en tout : logorrhée, tachypsychie,
mégalomanie, hyperactivité, insomnie, boulimie, chaleur…)
Délire (achats pour des motifs bizarres)
Démence (perte de la valeur de l’argent, oubli d’avoir déjà
acheté)
Modèles explicatifs
• Moyen de restaurer l’équilibre intrapsychique (Krueger 1988)
• Personnalités névrotiques présentant dépression, faible
estime de soi (De la Gandara 1993)
• Achats pour consoler l’enfant que le sujet a été « cadeaux à
travers le temps » ou moyen de retrouver à travers l’objet le
bonheur et la sécurité de l’enfance
• Agressivité à travers l’achat et dimension masochiste,
conduite d’échec, nécessité de se mettre en danger
Quelques déterminants de l’achat compulsif
•
•
•
•
•
•
•
•
Dimensions agressives
Intolérance à la frustration
Recherche de sensation
Tendance à la répétition des séquences comportementales
Réparation narcissique
Lutte contre la dysphorie
Surinvestissement du pouvoir des objets
Recherche de consolation dans l’acquisition (troubles anxiodépressifs associés), d’effets euphorisants
• Hypersensibilité au contexte d’achat (vendeur, pub)
Théorie de l’apprentissage (1)
Le conditionnement classique
L’apprentissage résulte de l’association répétée d’un
stimulus neutre (conditionnel) avec un stimulus qui
évoque une réponse (inconditionnel) de sorte que le
stimulus conditionnel en vient finalement à évoquer la
réponse
Théorie de l’apprentissage (2)
Conditionnement opérant
L’apprentissage résulte des conséquences d’une action
du sujet et de ses effets sur l’environnement
Apprentissage social
L’apprentissage repose sur la prise de modèles,
l’identification et les interactions humaines
Approches cognitives
• Les phénomènes cognitifs participent à la détermination des
comportements
• Le traitement de l’information dépend de structures
cognitives qui transforment les informations en événements
cognitifs qui déclenchent ou maintiennent les
comportements
• Les troubles psychopathologiques résultent d’une altération
du traitement de l’information
Théories cognitives et comportementales
de l’achat compulsif
• Achats compulsifs provoqués et maintenus par
des phénomènes de l’ordre du conditionnement
• Effet « positif » de l’achat retenu par le
psychisme comme un moyen pour faire face
Conditionnement opérant
• Expérience de l'effet contra-dépressif de l'achat chez le déprimé =
induction de conditionnement
• La survenue ultérieure de symptômes dépressifs est perçue comme une
incitation à acheter
• Amélioration transitoire de l'humeur pendant l'achat : valeur de
gratification ou de renforcement positif pérennise le comportement
• Fin de l'achat compulsif : dépression ou de culpabilité favorisant une
nouvelle séquence d'achat
• « Cercle vicieux comportemental » : la dépression aggrave l'achat qui
aggrave la dépression
Modèle cognitif de maintien des
addictions de Beck et Coll.
Stimulus
- interne
externe
Attentes
Croyances
Poursuite/reprise de la
consommation
Pensées
automatiques
Recherche de la
substance (action)
Craving
Pensées
permissives
Modèle de Beck appliqué aux achats
Humeur triste
Coup de blues
Achats
On est moins triste
quand on s’achète
qq chose
Acheter me
fera plaisir
Recherche d’argent
Aller dans le magasin
Craving
J’ai bien le
droit de me
Faire plaisir
Exemples de pensées associées
aux achats compulsifs
Pensées automatiques :
« Je vais faire une affaire »
« Je ne l’ai pas cela, dans cette couleur»
« J’ai pris du poids »
« Je n’ai rien à me mettre »
Pensées permissives :
« Payer en 3 fois »
« Sinon il ne l’auront plus »
« Je pourrais toujours l’échanger ou le revendre »
Une pathologie de la relation à l’argent
• L’argent, objet tabou qui exerce à la fois fascination et répulsion
• Le manque d’argent associé à l’exclusion
• Des fausses croyances concernant l’argent
– « Seul l’argent permet d’obtenir le respect et l’admiration »
– « Dépenser me permet d’être bien »
– « Plus je dépense, plus je suis riche, plus j’existe aux yeux des
autres »
– « Etre au top dans ma présentation, quitte à acheter chaque semaine
de nouvelle tenues est la seule manière d’être reconnu comme
compétent au travail »
Facteurs biologiques (génétiques,
physiologiques et cérébraux)
• Antécédents familiaux
• Comorbidité entre addiction aux achats et autres
TCI
• Fréquence plus importante d’achats et TCI chez les
sujets avec troubles organiques et cérébrolésés
• Certains médicaments comme les IRS améliorent
les déficits d’activation cérébrale
Facteurs psychologiques,
variables de personnalité
•
•
•
•
•
•
•
Estime de soi basse
Anxiété
Dépression
Besoin d’approbation, de reconnaissance
Colère
Fantaisie, imagination
Motivation de vengeance
Facteurs sociologiques
• Plus d’incidence dans les pays où les opportunités d’achats
sont fortes
• Plus d’incidence chez les femmes
• Messages publicitaires sur l’acquisition d’objets comme
solution des problèmes personnels
• Développement du consumérisme et absence de conscience
sociale quant à l’achat
• Désintégration sociale comme conséquence négative de la
société de consommation
Facteurs neurobiologiques
• Probablement circuits similaires aux autres
addictions comportementales impliquant le
circuit de la récompense mais pas de preuve
Les échelles d’évaluation
•
Auto-questionnaires des achats compulsifs :

QEVA ou questionnaire d’évaluation des achats de
Adès.J et Lejoyeux. M (1997 )
Compulsive Buying Scale
Test de dépistage de Echeburua


Test de dépistage (Echeburua 1999)
1.
2.
3.
4.
5.
Croyez vous que vous avez un problème de contrôle avec vos
achats ?
Vous sentez vous coupable d’avoir acheté ou dépensé plus que ce
que vous aviez planifié ou d’avoir acquis des objets non
nécessaires ?
Avez-vous essayé d’arrêter d’acheter sans y parvenir ?
Avez-vous tendance à utiliser des prêts et des crédits pour faire
des achats ou pour payer des dettes ?
Essayez-vous d’occulter ou mentir sur le prix de ce que vous avez
acheté pour éviter les reproches de votre entourage ?
Questionnaire d’achats compulsifs
d’Adès et Lejoyeux (1)
Questionnaire d’achats compulsifs
d’Adès et Lejoyeux (2)
Conclusion
• L’addiction comportementale pour être reconnue
comme telle, doit entraîner une souffrance
significative personnelle ou sociale et relève donc du
soin
• Certaines « nouvelles addictions » semblent valides,
d’autres plus discutables
• Risque de médicalisation de l’excès
PRISE EN CHARGE
DES ACHATS COMPULSIFS
I - INTRODUCTION
La demande de soins
• Souvent tardive, encouragée ou suscitée par
l’entourage
• Parfois à l’occasion d’un autre trouble psychiatrique
• Proposée par les services sociaux, sollicités pour un
secours financier ou un dossier de surendettement qui
leur apparaît atypique
L’entourage
• Souvent point de vue « moral », propos
culpabilisants ou stigmatisants : « elle ne fait pas
d’effort » ; « c’est un manque de volonté »
• Demande de mise en place rapide d’une mesure de
protection
• Pessimisme sur l’évolution et les possibilités de
traitement
• Réactions d’agressivité et de découragement
pourront être entendues et apaisées dès le premier
entretien
Traitement des comorbidités
• Temps important du traitement
• La comorbidité est fréquente, en particulier avec
la dépression et autres conduites addictives
Traitement pharmacologique
• Quelques études avec des IRS montrent des résultats peu
concluants du fait de limites méthodologiques :
– 2 études sous fluvoxamine (Floxyfral) en double aveugle contre
placebo n’ont pas montré de différence significative
– Une étude sous citalopram (Seroplex) en ouvert suivie d’une
phase d’interruption en double aveugle montre de meilleurs
résultats sous citalopram mais non significatif du fait de la taille
de l’échantillon
• Quelques petites études en ouvert ont rapporté une amélioration
sous citalopram et sous naltrexone
II - TRAITEMENTS
PSYCHOTHERAPEUTIQUES
Les thérapies cognitives et
comportementales
• Efficacité largement prouvée dans la prise en charge
des comportements addictifs
• Plusieurs études prometteuses concernant les TCC des
achats compulsifs
– Etude Mitchell (2006) 28 patients ont bénéficié de 12 séances de TCC
pendant 10 semaines
A 6 semaines réduction significative du nombre d’épisodes d’achats
et du temps passé par rapport au groupe témoin, amélioration
maintenue à 6 mois
– Etude de Mueller (2008) sur 31 patients
Amélioration maintenue à 6 mois
Objectif des TCC
• Evaluation des dépendances comportementales
• Restauration d’un comportement d’achats normal, non excessif. L’achat
doit reprendre sa fonction utilitaire, désacralisé, « dépouillé de ses
significations irrationnelles »
• « Découplage » entre facteur conditionnant et comportement, correction
des croyances erronées
• Restauration de l’estime de soi, affirmation de soi
• Prise en charge des troubles anxio-dépressifs associés
• Gestion des émotions et développement de nouvelles stratégies de
coping
• Gestion des conséquences financières
1- Diagnostic
Diagnostic
• Achats compulsifs : critères Mc Elroy
• Mini International Neuropsychiatric Interview
(MINI) : pas d’autres diagnostics
• Axe II : personnalité antisociale (DSM IV),
l’échelle MMPI-2
2- Ligne(s) de base
Ligne(s) de base
• Questionnaire des Achats Compulsifs d’Adès et
Lejoyeux : 19 items
• Une passation lors de la première consultation :
score>10
• Cette échelle sera proposée tous les deux mois
lors de la consultation
• MADRS, Hamilton…
3 - Analyse fonctionnelle
Analyse fonctionnelle (définition)
• Etude des relations entre les « comportementsproblèmes », les pensées, les émotions et
l’environnement social et physique
• Grilles d’analyse fonctionnelle
Analyse fonctionnelle (objectif)
• Recueil des données permettant l’élaboration et
la formation d’hypothèses sur :
- les déterminants
- les facteurs d’apparition/de maintien
des comportements problèmes du patient
Analyse fonctionnelle
• N’est pas un diagnostic
• Modèle interactif permettant de mettre en lien
le comportement problème avec les cognitions
et émotions ainsi qu’à ses antécédents et à ses
conséquences
Exemple AF (synchronique)
•
•
•
•
•
•
•
Situation : Conflit avec sa fille
Emotions/sensations : Tristesse, colère
Cognitions :
Ma fille a été épouvantable avec moi, j’ai bien mérité de me faire un petit
cadeau
Il faut que j’achète quelque chose pour me calmer et me consoler
Signification : les objets sont un remède à mes maux, « un doudou »
Imagerie : une protection, un bouclier
Comportement :
Achat impulsif d’objets (vêtements, chaussures, cosmétiques) en quantité
importante avec perte de contrôle
Conséquences :
A court terme : Diminution de la colère, et de la tristesse juste après l’achat
(sortie du magasin)
A long terme : Culpabilité et honte, maintien d’une mauvaise estime de soi et
de l’affect dépressif, Difficultés financières (incapacité à payer le loyer, dossier
de sur endettement)
Anticipation : Acheter me permettra d’oublier mes problèmes et d’être moins
triste
Grille SECCA (Cottraux, 1985)
synchronie
Exemple AF (diachronique)
• Données structurelles :
Antécédents de tentative de suicide
Angoisse d’abandon suite au décès du grand père, du départ du frère
ainé, et du placement en famille d’accueil
Antécédent d’alcoolodépendance et de dépression chez le père
Faible assertivité, susceptibilité à l’ennui, sentiment chronique de vide
• Facteurs initiaux :
Argent de poche, premiers salaires
Accès à de nouveaux moyens de paiement (carte bancaire, chéquier)
• Facteurs de maintien :
Syndrome dépressif, dépendance affective, mauvaise interaction avec
sa fille, faible assertivité
• Facteurs précipitants
Divorce, difficultés relationnelles au travail, licenciement,
condamnation, conflits avec sa fille
4 - Analyse de la demande
Analyse de la demande
• Après avoir construit l’analyse fonctionnelle
• Demande d’arrêt du comportement d’achat compulsif
• Retrouver un équilibre entre ses capacités
financières, ses besoins réels et la dimension de
plaisir, une relation plus sereine vis-à-vis des achats,
et pouvoir rembourser les dettes contractées
• Améliorer son humeur dépressive
5 - Prise en charge
A - Entretien motivationnel
• Faire émerger la motivation intrinsèque +++
• Désamorcer les résistances tout en respectant sa liberté
de choix et de décision afin de contourner la résistance
• Encourager le malade à envisager lui-même les aspects de
son comportement qui peuvent être problématiques
• Acronyme : OVER
• Mettre le patient face à ses contradictions, et au décalage
entre sa motivation et les actions réellement entreprises
• Balance décisionnelle
Exemple de balance décisionnelle
AVANTAGES DE POURSUIVRE LES
ACHATS COMPULSIFS
INCONVENIENTS DE POURSUIVRE
LES ACHATS COMPULSIFS
Plaisir
Conséquences financières
Sentiment d’exister
Conflits familiaux
Se sentir mieux
Modèle inadapté pour les enfants
Bouffée d’oxygène
Culpabilité
Paraitre « une bourgeoise »
Mensonges
Lutter contre l’ennui
Soulager une idée obsédante
B - Contrat thérapeutique
• Construit par le thérapeute en collaboration avec le
patient
• Information sur les TCC
• Objectif d’abstinence complète : consultation
médicale + groupe de parole jeu
• Thérapie (10 Cs) + Consolidation (10 Cs)
• Registre d’achat
• Taches comportementales
Exemple de registre d’achats
Date
anxiété
humeur
Envie
d’achat
Achats
objet ?
Prix ?
Facteur
déclenchant
Pensées
permissives
stratégies
C - Entretien avec les proches
• Les achats compulsifs : une maladie / un manque de
volonté
• Exposition des modalités de prise en charge
• Les relations interpersonnelles
• Eviter d’être infantilisante pour le patient, et veiller à
renforcer les moments positifs.
D – Psycho-éducation
• Objectif : apporter une connaissance sur le trouble et de
ses conséquences sur le sujet et les proches
• But : améliorer la qualité de vie
• Bonne représentation de la maladie addictive permettra de
mieux gérer les situations à risque, de savoir quand
consulter son thérapeute et reconnaître les signaux d’alerte
à risque de rechute
• Parler des achats compulsifs à son entourage, afin de leur
faire comprendre la maladie addictive
• Accepter de remettre en cause certaines habitudes de vie
et adapter son environnement
• Lectures, informations…
E - Identifier les situations à risque
• Feuilleter un catalogue de vêtements : 1/10
• Voir une publicité de vêtements ou de cosmétiques à la
télévision : 2/10
• Recevoir un e-mail d’offre promotionnelle :3/10
• Recevoir un carton d’invitation pour des soldes privées 4/10
• Versement du salaire : 5/10
• Etre invitée à une soirée ou à un diner : 6/10
• Dispute avec sa fille : 7/10
• Passer devant un grand magasin 8/10
• Se retrouver seule dans les Grands Magasins (Printemps,
Galeries Lafayette) : 9/10
• Toucher un vêtement : 10/10
F - Travail comportemental
• Activation comportementale
• Evitement des stimuli et des lieux à risque
Ne pas se rendre seul dans les grands magasins
Changer d’email et de numéro de téléphone
Confier la carte bleu, avoir de petites sommes en espèces
• Elaboration du plan d’urgence
• Distinction faux pas/rechute
• Séances de relaxation
G - Prise en charge cognitive (1/2)
• Restructuration cognitive
G - Prise en charge cognitive (2/2)
• L’exposition en imagination
• Le questionnement socratique conduira le malade à
s’interroger sur ses convictions, ses croyances et ses
attentes, et à les remettre en cause
• Les techniques de la flèche descendante et les
techniques de résolution de problème : identifier les
schémas cognitifs et les assouplir
H - Autres mesures :
Gestion d’un budget
• Carnet dépenses/recettes mensuelles
• Modifications des virements automatiques
• Confier la carte bleu, petites sommes en
espèces
• Assistance sociale
• Mesures de protection
III - Exemples de programme
de prise en charge
Programme de prise en charge TCC (1)
(Romo 2007)
• Programme en 10 séances
• Proposé après plusieurs entretiens afin d’effectuer
l’anamnèse, l’analyse fonctionnelle et le passage de
questionnaires d’évaluation.
• Information sur les TCC
• Association à des séances de groupes utilisant des
techniques motivationnelles
Programme de prise en charge TCC (2)
(Romo 2007)
Séance 1 : Analyse fonctionnelle, prise de conscience de la maladie, lien
émotions-cognitions-comportements, registre d’achats, soutien de
l’entourage
Séance 2 : Examen du registre d’achat à chaque séance. Planification des
achats (contrôle des stimulus, budget hebdomadaire, paiements en
espèce), introduction relaxation et exposition en imagination
Séance 3 : Relaxation et exposition en imagination
Séance 4 : Repérage d’état émotionnels pouvant déclencher les achats,
Réflexion sur les processus de pensée qui altèrent l’état émotionnel et
conduisent au comportement d’achat. Identification des pensées
dysfonctionnelles liées aux achats
Séance 5 : Résolution de problème, travail sur les pensées automatiques
et alternatives. Recherche d’expérience confirmant puis invalidant les
pensées automatiques
Programme de prise en charge TCC (3)
(Romo 2007)
Séance 6 : Travail sur l’image de soi, la dévalorisation, le perfectionnisme.
Recherche des points positifs et négatifs dans la gestion des situations
Séance 7 : Affirmation de soi avec jeux de rôle et exposition en
imagination. Travail sur demandes, refus critiques et compliments.
Information sur les styles de communication
Séance 8 : Travail sur l’assertivité en situation d’achat
Séance 9 : Résolution de situations problématiques ou d’urgence,
différents niveau de gravité, importance de l’anticipation et de demander
de l’aide. Recherche de situation où ils ont eux même apporté de l’aide
Séance 10 : Bilan et perspectives. Evaluation des changements à l’aide
d’échelles.
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