Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal J. Kerdraon Les différents éléments issus du bilan neurologique permettent de définir un type de fonctionnement du périnée central, périphérique ou mixte. Lors d’une lésion médullaire complète stabilisée, le syndrome lésionnel se définit comme le segment médullaire dont les limites métamériques supérieures et inférieures sont le siège d’au moins un signe clinique déficitaire. Un fonctionnement vésico-sphinctérien de type hyperéflectique, des dyssynergies vésico- et recto-sphinctériennes ainsi qu’une spasticité périnéale et parfois des douleurs s’installent après lésion complète au-dessus de S1. Les syndromes liés à une lésion médullaire incomplète se définissent par une épargne plus ou moins complète des fonctions sensitives sacrées (S4-S5). Certaines formes topographiques plus ou moins pures déterminent des atteintes périnéales assez univoques (syndrome central de la moelle, syndrome spinal antérieur, syndrome de Brown Sequard). Ailleurs, le retentissement périnéal est fonction de l’étendue en niveau et hauteur de la lésion. Les troubles neuropérinéaux secondaires à une lésion du cône terminal sont déroutantes par la constatation de dissociations fréquentes entre les données de l’examen clinique explorant les fonctions sensori-motrices et le type de dysfonctionnement végétatif impliqué dans les fonctions génito-sexuelles, vésico-sphinctériennes et anorectales. INTRODUCTION Les déficiences pelvi-périnéales après lésion médullaire conjuguent les conséquences d’une atteinte des voies longues de la sensibilité et de la motricité volontaire aux perturbations des fonctions autonomes sous contrôle volontaire de la sphère vésico-sphinctérienne, anorectale et génitosexuelle. La diversité des causes et des profils évolutifs rend difficile toute systématisation unique. Ce sont dans les étiologies traumatiques et vasculaires que certains tableaux d’atteinte neuropérinéale seront le mieux individualisés, fonction du niveau et de l’étendue de l’atteinte médullaire. Dans ce cadre, une mention à part doit être faite aux lésions du cône terminal en regard de leur diagnostic souvent difficile dans les formes de début et de leur pronostic évolutif bien distinct des lésions périphériques pures. CLASSIFICATION ANATOMO-FONCTIONNELLE L’évaluation des déficiences périnéales après lésion médullaire repose sur un examen clinique neurologique et général. La classification proposée par l’American Spinal Injury Association (ASIA) utilise les dermatomes (sensibilité au piquer et toucher bilatéral) et les myotomes (motricité volontaire) pour déterminer le niveau de la lésion, son caractère complet ou incomplet (1). Dans les métamères C1 à C4, D2 à L1 et S3 à S5, le niveau métamérique est uniquement renseigné par le niveau sensitif. Dans cette classification, le niveau neurologique est ainsi établi comme le niveau le plus distal où sensibilité et motricité sont intègres. Les moyens d’explorer cliniquement le système parasympathique sacré sont réduits. L’étude cli- 510 Pelvi-périnéologie nique des réactions végétatives cutanées sous médiation sympathique permet, en association avec les données du bilan des sensibilités viscérales (tableau I), de définir un niveau d’atteinte végétative (2). L’étude du dermographisme réflexe définit la hauteur du niveau réflexe vasomoteur. L’examen de la pilomotricité trouve une expression clinique de métamérisation identique aux réflexes sudoraux. Les différents éléments issus du bilan neurologique (motricité volontaire, motricité réflexe, sensibilité tégumentaire, proprioceptive et viscérale, bilan végétatif) (18) permettent de définir un type de fonctionnement du périnée central, périphérique ou mixte. Lors d’une lésion médullaire complète stabilisée, le syndrome lésionnel se définit comme le segment médullaire dont les limites métamériques supérieures et inférieures sont le siège d’au moins un signe clinique déficitaire. Choc spinal Cet état définit, au décours d’une lésion médullaire d’installation brutale, la disparition de toute activité motrice, sensitive et réflexe en dessous de la limite supérieure du syndrôme lésionnel. La durée du choc dans les derniers métamères sacrés est brève, comme en témoigne la réapparition des réflexes du cône quelques heures après l’accident neurologique (3). Il apparaît dès les premières heures un renforcement des pressions de clôture urétrale par activation des centres orthosympathiques dorsolombaires et somatiques sacrés. L’inactivation persistante des centres parasympathiques a pour conséquence une rétention d’urine constante avec abolition du besoin. Une autre expression de cette libération de l’activité sous-lésionnelle peut être la survenue d’un pseudo-priapisme chez l’homme. Vessie réflexe LÉSION MÉDULLAIRE COMPLÈTE Lors d’une lésion médullaire complète, il n’existe aucune fonction motrice ou sensitive au moins dans les derniers métamères sacrés. Les centres parasympathiques sacrés ne sont plus inhibés par le centre mictionnel protubérantiel. 3RXPRQ (VWRPDF & & & & & & ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' ' / / / / / 6 6 6 6 7HVWLFXOH 2YDLUH *UrOH 3URVWDWH 8WpUXV &{ORQ 5HLQ 8UHWqUH Un fonctionnement vésico-sphinctérien de type hyperréflectique s’installe après lésion complète au-dessus de S1. Ce trouble de l’inhibition détrusorienne répond à des critères spécifiques d’une interruption des voies longues spino-ponto-spinales (4) qui associent perte de l’initiation et de l’inhibition volontaire de la miction, contractions détrusoriennes à partir de messages afférents eSLGLG\PH 5HFWXP 9HVVLH $QQH[HV Tableau I – Systématisation de la sensibilité viscérale selon Déjerine (18). Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal aberrants homo- ou hétérosegmentaires, extéroceptifs ou viscéraux. Une des expressions de cette réorganisation du réflexe mictionnel est l’induction de contractions détrusoriennes après instillation d’eau glaçée (5). Le besoin normal est remplacé par un équivalent dont la nature diffère suivant le niveau lésionnel : – lors des atteintes sus-jacentes à D6, il existe des manifestations d’hyperréflexie autonome à la distension vésicale de traduction clinique stéréotypée chez un même patient ; – lors des atteintes médullaires de D6 à D10, il peut exister une sensation de plénitude vésicale à la distension ; – lors des atteintes entre D10 et S1, cette sensation est véhiculée par le contingent splanchnique en déterminant une sensation de tension abdominale. Dyssynergie vésico-sphinctérienne Conséquence d’une interruption sur les voies spino-ponto-spinales, la dyssynergie vésicosphinctérienne est le plus souvent associée aux lésions complètes, aux complications du haut appareil urinaire et aux pressions intravésicales élevées. Les lésions complètes présentent pour l’essentiel des dyssynergies continues, quelle que soit la hauteur du syndrôme lésionnel (6). La résultante fonctionnelle va des fuites incontrôlées répétées à des situations de semi-rétention, d’émissions d’urines presque satisfaisantes à des jets successifs plus ou moins saccadés. La vidange vésicale incomplète est la règle. Corollaire de l’hyperréflexie et de la dyssynergie, l’hyperpression vésicale associée au résidu postmictionnel détermine les complications classiques que sont l’infection urinaire, le reflux vésico-urétéral, l’urétérohydronéphrose, la lithiase. Elle génère aussi le reflux intra-prostatique et l’infection prostatique et génitale. Autrefois cause principale de décès chez le blessé médullaire, une meilleure connaissance de l’évolution et des facteurs pronostiques de ce type de neurovessie contribue à dégager un profil de patients à risques et des propositions individuelles de suivi (7). Déficiences anorectales Les lésions médullaires complètes s’accompagnent toujours d’un dysfonctionnement colo- 511 rectal dont l’étiopathogénie n’est toujours pas entièrement élucidée. La constipation en est le symptôme de départ par deux mécanismes possibles. Le ralentissement du transit colique peut être constaté en cas de lésion spinale. Lorsque la lésion est au-dessus des centres sympathique et parasympathique, le transit n’est pas modifié par rapport aux groupes contrôles. Si les centres dorso-lombaires sont en secteur lésionnel, on assiste à un ralentissement du transit rectosigmoïdien (11). En cas de lésion spinale suprasacrée complète, le réflexe défécatoire est présent mais perturbé par le biais d’un réflexe recto-anal inhibiteur anormal en amplitude et/ou en durée. On constate alors une dyssynergie anorectale. La constipation de transit et la dyssynergie anorectale concourent au développement de fécalomes rectosigmoïdiens, responsables de pullulation microbienne et de lyse, puis d’épisodes diarrhéiques. L’incontinence fécale est la conjonction des anomalies du contenu mais également l’abolition de la commande striée et de la sensibilité discriminative du contenu rectal. Conséquence de l’émergence de néoréflexes viscéro-viscéraux, la dilatation du canal anal ou du rectum chez le paraplégique peut déterminer une inhibition du réflexe mictionnel et vice-versa. Spasticité périnéale La spasticité de la musculature périnéale s’apparente aux caractéristiques cliniques observées au niveau d’autres muscles striés en secteur souslésionnel, c’est-à-dire l’exagération du réflexe d’étirement sur les muscles accessibles aux touchers pelviens, l’irradiation de la zone réflexogène, les spasmes ou l’hypertonie périnéale. Son expression la plus constante accompagne la dyssynergie vésico-sphinctérienne en déterminant une contraction « en masse » de l’ensemble des effecteurs musculaires du périnée. L’hypertonie périnéale est favorisée par les stimuli locaux, la stase veineuse, elle-même aggravée par la station assise permanente et la stase stercorale. Cette hypertonie peut entraîner un cercle vicieux : l’émission de selles étant plus difficile, les déclenchements sont plus agressifs et vont euxmême majorer l’hypertonie anale. Cette hypertonie anale peut contribuer à la stase gazeuse, au météorisme abdominal et en retour peut retentir 512 Pelvi-périnéologie sur les paramètres ventilatoires chez le tétraplégique. L’hypertonie et les spasmes des autres muscles périphériques interfèrent avec une bonne gestion de l’hygiène périnéale, de la réalisation des sondages, voire les possibilités de déclenchement du réflexe mictionnel en cas de contractures abdominales. Déficiences génito-sexuelles Les tableaux rencontrés diffèrent suivant le niveau lésionnel. Le centre parasympathique de la colonne intermédio-latérale de la moelle sacrée (S2-S3-S4) est le centre principal contrôlant l’érection réflexe. Les centres sympathiques de la moelle dorso-lombaire et leurs fibres empruntant le plexus pelvien, via les nerfs hypogastriques, ont un rôle dans la médiation des érections psychogènes, dans la phase d’émission de l’éjaculation et dans la fermeture du col vésical pendant la phase d’expulsion du sperme. L’intervention des boucles réflexes somatiques sacrées permet l’auto-entretien de l’érection ainsi que la contraction des muscles striés péniens lors de la phase d’expulsion. Lorsque la lésion laisse persister un automatisme médullaire sous-lésionnel au niveau des centres parasympathiques sacrés et des centres dorso-lombaires, l’érection et les rapports sexuels restent possibles. Il s’agit d’érections réflexes obtenues par stimulation directe de la région génitale. Ces érections sont déconnectées de tout contrôle central et sont donc généralement faciles à obtenir. Chez 529 patients blessés médullaires, Bors et Comarr (8) observent que 63 à 94 % d’entre eux conservent des érections, que les rapports sont possibles pour 23 à 34 % des cas. La fréquence des érections est plus importante en cas de lésion incomplète que complète et lors des lésions médullaires de niveau supérieur. Les érections réflexes sont ainsi observées dans tous les cas lors d’une lésion haute (9). Cette érection peut toutefois être insuffisante en qualité et en durée pour permettre une pénétration. Les érections psychogènes peuvent être de même obtenues dans les lésions basses. Cette dernière s’observe lorsque la sensibilité testiculaire (D10) reste présente, associée à un syndrome lésionnel situé sous la charnière dorso-lombaire. Les érections mixtes répondent à un niveau lésionnel situé entre les centres parasympathiques sacrés et les centres dorso-lombaires en les épargnant. Tous niveaux confondus, l’éjaculation est rare, entre 3 et 19,7 % des cas. Celle-ci s’effectue de façon clonique dès qu’il existe une épargne dorso-lombaire lors d’une lésion suprasacrée (19). Chez la femme, les mêmes centres médullaires contribuent à la fonction génito-sexuelle. L’érection clitoridienne et la lubrification vaginale réflexe sont sous contrôle du centre parasympathique sacré. La lubrification vaginale psychogène dépend des centres dorso-lombaires. En fonction du niveau de l’atteinte suprasacrée, une sensibilité des organes génitaux internes peut être présente, en particulier le col de l’utérus dont l’intégration est de niveau D10 L1. La stimulation du périnée peut être à l’origine de fuites d’urines, toujours très mal vécues (la vidange vésicale avant toute rapport est une bonne précaution). Des contractures importantes peuvent être parfois un obstacle à la pénétration. Un équivalent d’orgasme peut être obtenu par stimulation des zones érogènes secondaires. D’une manière générale, la préservation ou non d’une sensation orgasmique ne semble pas corrélée de façon constante ni au niveau, ni à l’étendue de l’atteinte médullaire (10). Lorsqu’elle est présente, celle-ci peut s’accompagner de manifestations satellites, telles qu’une sédation des contractures, des manifestations d’hyperréflexie autonome, voire de douleurs. Déficiences cutanées et cutanéo-muqueuses Les escarres constituent une source fréquente de complication chez le blessé médullaire et déterminent pour leur propre compte une cause de déséquilibre des fonctions neuropérinéales. Elles intéressent en premier lieu la région périnéale (sacrum et région ischiatique) avec une incidence annuelle jusqu’à 30 % chez le tétraplégique. Les facteurs corrélés à l’apparition des escarres sont l’âge, le sexe masculin, la durée de rééducation (supérieure à 1 an), l’atteinte motrice complète (doublement du risque), l’atteinte sensitive complète (risque augmenté d’un facteur 1,5) (12). Les complications proctologiques (anites, hémorroïdes et fissures anales) sont une conséquence des modifications trophiques, circulatoires et de la physiologie anorectale. L’absence de message sensitif douloureux contribue au développement d’abcès de la marge anale. La dérégulation du tonus musculaire en secteur sous- lésionnel associée aux poussées défécatoires favorise la sur- Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal venue de prolapsus hémorroïdaires ou muqueux, souvent non réductibles, épithélialisés. Douleurs D’une incidence variant entre 33 et 94 % après lésion médullaire (14), les douleurs sous-lésionnelles se projettent habituellement dans les membres inférieurs et parfois au niveau périnéal. Leur caractère multiforme est appréhendé au travers des nouvelles classifications (13) qui distinguent : – les douleurs diffuses intéressant une large partie du territoire anesthésié, permanentes, à type de brûlures, de paresthésies ou de sensations d’étau ; – les douleurs viscérales de topographie imprécise, à type de crampes, profondes et intéressant la région abdomino-pelvienne. Celles-ci ne peuvent être systématiquement interprétées comme le témoin d’une pathologie locale sous-lésionnelle. À l’instar de ce qui est observé dans les autres myotomes en secteur sous lésionnel, ces douleurs peuvent accompagner les spasmes des muscles périnéaux. Hyperréflexie autonome Celle-ci correspond à une réponse végétative majeure à un stimulus nociceptif sous-lésionnel, le plus souvent viscéral (distension vésicale, infection urétro-prostatique ou gynécologique, lésion proctologique) et survenant lors de lésions supérieures à D6. Tout acte proctologique ou endovésical est susceptible de déclencher une hyperréflexie autonome (HRA) qui s’exprime par une poussée hypertensive parfois maligne, des céphalées, un érythème sus-lésionnel, une bradycardie, des sueurs. Celle-ci peut survenir lors de l’accouchement (deux tiers des blessées médullaires) et doit être systématiquement prévenue par la réalisation d’une péridurale. Paraostéoarthropathies neurogènes Fréquents puisque présents dans 20 à 60 % des cas selon les critères d’évaluation, ces ostéomes interviennent comme épine irritative locorégionale susceptible de déséquilibrer l’équilibre vésico-sphinctérien. Les limitations des amplitudes articulaires interfèrent avec la réalisation 513 des sondages chez la femme ou l’accomplissement des rapports sexuels. Les répercussions possibles sur l’assise et une bonne répartition des appuis sont sources de contractures douloureuses. LÉSION MÉDULLAIRE INCOMPLÈTE Quelle que soit l’étiologie, les syndromes incomplets se définissent par une épargne plus ou moins complète des fonctions sensitives sacrées (S4-S5). Certaines formes topographiques plus ou moins pures déterminent des atteintes périnéales assez univoques. Ailleurs, le retentissement périnéal est fonction de l’étendue en niveau et hauteur de la lésion : – Le syndrome central de la moelle constitue plus de la moitié des lésions incomplètes, conséquence de la nécrose centro-médullaire à marche descendante « en crayon » lors des lésions médullaires cervicales. Fonction de l’étendue de la lésion centro-médullaire, les conséquences neuropérinéales sont généralement modestes avec préservation de l’essentiel des fonctions autonomes, eu égard au caractère suspendu des lésions de niveau cervical (15). Conséquence de l’organisation somatotopique des voies spinothalamiques, les différentes modalités sensitives sont classiquement préservées en territoire sacré. Avec l’étendue de l’atteinte, il peut s’observer des troubles de la sensibilité vibratoire associés à des signes de paraparésie spastique de la musculature périnéale ; – Le syndrome spinal antérieur, conséquence d’une lésion médullaire préservant les colonnes postérieures et les cornes dorsales de la moelle, détermine un déficit de la commande volontaire périnéale avec perte de la sensibilité thermoalgique tégumentaire dans les métamères sacrés. Les troubles vésico-sphinctériens sont classiques avec une mention particulière pour le caractère indolore de la rétention par atteinte bilatérale des voies spinothalamiques (16). L’atteinte des voies motrices corticospinales, des boucles spino-ponto-spinales détermine les aspects d’une vessie de type hyperréflectique ; – Le syndrome d’hémisection de moelle (Brown-Sequard), lorsqu’il est pur, détermine une hypoesthésie thermoalgique controlatérale, un déficit sensitif profond et un syndrome pyramidal homolatéraux à la lésion. En raison de l’unilatéra- 514 Pelvi-périnéologie lité de l’atteinte, les troubles vésico-sphinctériens peuvent se présenter de façon dissociée associant une vessie hyperréflexique avec dyssynergie vésico-striée mais persistance d’un certain degré d’inhibition volontaire du réflexe mictionnel et de motricité volontaire des sphincters. LÉSIONS DU CÔNE TERMINAL Les troubles neuropérinéaux secondaires à une lésion du cône terminal se distinguent en raison des dissociations fréquentes entre les données de l’examen clinique explorant les fonctions sensorimotrices et le type de dysfonctionnement végétatif impliqué dans les fonctions génito-sexuelles, vésico-sphinctériennes et anorectales. Pour des raisons de contiguité anatomique, une lésion du cône terminal peut ainsi correspondre à une atteinte incomplète du cône terminal ou une lésion complète de l’épicône intéressant le segment médullaire lombosacré associée à une lésion uni- ou pluriradiculaire sacrée. En cas de lésion aiguë et récente, l’examen moteur et réflexe du cône terminal ne peut différencier une sidération par choc spinal d’une atteinte radiculomédullaire sacrée (tableau 2). Ni l’examen sensitif à cette phase initiale (17) ni l’examen neuropérinéal à distance (20) ne sont prédictifs du type de comportement vésico-sphinctérien ou de son évolution. Dans tous les cas, les explorations électrophysiologiques apportent des arguments Métamère Atteinte motrice pour une atteinte périphérique affectant le contingent somatique sacré (21). La présentation clinique est donc non univoque et comporte des signes cliniques d’atteinte périphérique et centrale. L’atteinte périphérique périnéale (tableau II) peut être prédominante et associée à un ou des signes pyramidaux : réflexes vifs et diffusés au niveau des membres inférieurs, réflexes du cône vifs, signe de Babinski. À l’inverse, le tableau clinique peut être celui d’une paraparésie spastique à laquelle s’associent des signes discrets d’atteinte périphérique sous forme d’hypoesthésie périnéale ou d’une hypotonie du sphincter anal. Les troubles anorectaux sont non spécifiques d’une lésion du cône et associent aux conséquences de l’atteinte suprasacrée, des signes d’atteinte segmentaire sacrée dont les plus caractéristiques seraient une diminution de la perception rectale associée à une absence de réponse réflexe du sphincter anal externe (24). Les troubles génito-sexuels, variables dans leur sémiologie, associent le plus souvent anéréction réflexe et anéjaculation chez l’homme. Aucune corrélation n’est là encore observée entre la typologie du trouble et les données de l’examen clinique et électrophysiologique (23). Les troubles vésico-sphinctériens sont dominés par la dysurie. Aux facteurs de risque propres aux dysfonctionnements vésico-sphinctériens d’origine centrale peuvent s’associer une hypocompliance détrusorienne secondaire à l’atteinte périphérique sacrée (22), source de régime de hautes pressions et de complications uronéphrologiques. Atteinte sensitive Niveau réflexe S1 Triceps sural Face ext. de jambe Bord ext. du pied Achilléen S2 Intrinsèques du pied Fléchisseurs des orteils Face post. cuisse Médio-plantaire Bulbocaverneux Clitorido-anal S3 Sphincter anal Périnée antérieur Face post. fesse Bulbocaverneux Clitorido-anal S4 Sphincter anal Périnée antérieur Marge anale Bulbocaverneux Clitorido-anal S5 Triangle rétroanal Tableau II – Métamérisation médullaire sacrée. Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal Références 515 13. Siddal PJ, Taylor DA, Cousins MJ (1997) Classification of pain following spinal cord injury. Spinal cord 35: 69-75 1. Ditunno JF, Young W, Donovan WJ et al. 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