Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône

publicité
Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires
et du cône terminal
J. Kerdraon
Les différents éléments issus du bilan neurologique permettent de définir un type de fonctionnement du périnée central, périphérique ou mixte. Lors d’une lésion médullaire complète
stabilisée, le syndrome lésionnel se définit comme le segment médullaire dont les limites
métamériques supérieures et inférieures sont le siège d’au moins un signe clinique déficitaire.
Un fonctionnement vésico-sphinctérien de type hyperéflectique, des dyssynergies vésico- et
recto-sphinctériennes ainsi qu’une spasticité périnéale et parfois des douleurs s’installent après
lésion complète au-dessus de S1. Les syndromes liés à une lésion médullaire incomplète se
définissent par une épargne plus ou moins complète des fonctions sensitives sacrées (S4-S5).
Certaines formes topographiques plus ou moins pures déterminent des atteintes périnéales assez
univoques (syndrome central de la moelle, syndrome spinal antérieur, syndrome de Brown
Sequard). Ailleurs, le retentissement périnéal est fonction de l’étendue en niveau et hauteur de
la lésion. Les troubles neuropérinéaux secondaires à une lésion du cône terminal sont déroutantes par la constatation de dissociations fréquentes entre les données de l’examen clinique
explorant les fonctions sensori-motrices et le type de dysfonctionnement végétatif impliqué
dans les fonctions génito-sexuelles, vésico-sphinctériennes et anorectales.
INTRODUCTION
Les déficiences pelvi-périnéales après lésion
médullaire conjuguent les conséquences d’une
atteinte des voies longues de la sensibilité et de la
motricité volontaire aux perturbations des fonctions autonomes sous contrôle volontaire de la
sphère vésico-sphinctérienne, anorectale et génitosexuelle. La diversité des causes et des profils
évolutifs rend difficile toute systématisation
unique. Ce sont dans les étiologies traumatiques
et vasculaires que certains tableaux d’atteinte neuropérinéale seront le mieux individualisés, fonction du niveau et de l’étendue de l’atteinte médullaire. Dans ce cadre, une mention à part doit être
faite aux lésions du cône terminal en regard de
leur diagnostic souvent difficile dans les formes
de début et de leur pronostic évolutif bien distinct des lésions périphériques pures.
CLASSIFICATION
ANATOMO-FONCTIONNELLE
L’évaluation des déficiences périnéales après lésion
médullaire repose sur un examen clinique neurologique et général. La classification proposée par
l’American Spinal Injury Association (ASIA) utilise les dermatomes (sensibilité au piquer et toucher
bilatéral) et les myotomes (motricité volontaire)
pour déterminer le niveau de la lésion, son caractère complet ou incomplet (1). Dans les métamères
C1 à C4, D2 à L1 et S3 à S5, le niveau métamérique est uniquement renseigné par le niveau sensitif. Dans cette classification, le niveau neurologique est ainsi établi comme le niveau le plus distal
où sensibilité et motricité sont intègres.
Les moyens d’explorer cliniquement le système
parasympathique sacré sont réduits. L’étude cli-
510
Pelvi-périnéologie
nique des réactions végétatives cutanées sous
médiation sympathique permet, en association avec
les données du bilan des sensibilités viscérales
(tableau I), de définir un niveau d’atteinte végétative (2). L’étude du dermographisme réflexe définit
la hauteur du niveau réflexe vasomoteur. L’examen
de la pilomotricité trouve une expression clinique
de métamérisation identique aux réflexes sudoraux.
Les différents éléments issus du bilan neurologique (motricité volontaire, motricité réflexe, sensibilité tégumentaire, proprioceptive et viscérale,
bilan végétatif) (18) permettent de définir un type
de fonctionnement du périnée central, périphérique
ou mixte. Lors d’une lésion médullaire complète
stabilisée, le syndrome lésionnel se définit comme
le segment médullaire dont les limites métamériques supérieures et inférieures sont le siège d’au
moins un signe clinique déficitaire.
Choc spinal
Cet état définit, au décours d’une lésion médullaire
d’installation brutale, la disparition de toute activité
motrice, sensitive et réflexe en dessous de la limite
supérieure du syndrôme lésionnel. La durée du
choc dans les derniers métamères sacrés est brève,
comme en témoigne la réapparition des réflexes
du cône quelques heures après l’accident neurologique (3). Il apparaît dès les premières heures un
renforcement des pressions de clôture urétrale par
activation des centres orthosympathiques dorsolombaires et somatiques sacrés. L’inactivation persistante des centres parasympathiques a pour
conséquence une rétention d’urine constante avec
abolition du besoin. Une autre expression de cette
libération de l’activité sous-lésionnelle peut être la
survenue d’un pseudo-priapisme chez l’homme.
Vessie réflexe
LÉSION MÉDULLAIRE
COMPLÈTE
Lors d’une lésion médullaire complète, il n’existe
aucune fonction motrice ou sensitive au moins
dans les derniers métamères sacrés. Les centres
parasympathiques sacrés ne sont plus inhibés par
le centre mictionnel protubérantiel.
3RXPRQ (VWRPDF
&
&
&
&
&
&
'
'
'
'
'
'
'
'
'
'
'
'
/
/
/
/
/
6
6
6
6
7HVWLFXOH
2YDLUH
*UrOH
3URVWDWH 8WpUXV
&{ORQ
5HLQ
8UHWqUH
Un fonctionnement vésico-sphinctérien de type
hyperréflectique s’installe après lésion complète
au-dessus de S1. Ce trouble de l’inhibition détrusorienne répond à des critères spécifiques d’une
interruption des voies longues spino-ponto-spinales (4) qui associent perte de l’initiation et de
l’inhibition volontaire de la miction, contractions
détrusoriennes à partir de messages afférents
eSLGLG\PH
5HFWXP 9HVVLH
$QQH[HV
Tableau I – Systématisation
de la sensibilité viscérale
selon Déjerine (18).
Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal
aberrants homo- ou hétérosegmentaires, extéroceptifs ou viscéraux. Une des expressions de cette
réorganisation du réflexe mictionnel est l’induction de contractions détrusoriennes après instillation d’eau glaçée (5). Le besoin normal est remplacé par un équivalent dont la nature diffère
suivant le niveau lésionnel :
– lors des atteintes sus-jacentes à D6, il existe
des manifestations d’hyperréflexie autonome à la
distension vésicale de traduction clinique stéréotypée chez un même patient ;
– lors des atteintes médullaires de D6 à D10,
il peut exister une sensation de plénitude vésicale
à la distension ;
– lors des atteintes entre D10 et S1, cette sensation est véhiculée par le contingent splanchnique en déterminant une sensation de tension
abdominale.
Dyssynergie vésico-sphinctérienne
Conséquence d’une interruption sur les voies
spino-ponto-spinales, la dyssynergie vésicosphinctérienne est le plus souvent associée aux
lésions complètes, aux complications du haut
appareil urinaire et aux pressions intravésicales
élevées. Les lésions complètes présentent pour
l’essentiel des dyssynergies continues, quelle que
soit la hauteur du syndrôme lésionnel (6).
La résultante fonctionnelle va des fuites incontrôlées répétées à des situations de semi-rétention,
d’émissions d’urines presque satisfaisantes à des
jets successifs plus ou moins saccadés. La
vidange vésicale incomplète est la règle.
Corollaire de l’hyperréflexie et de la dyssynergie, l’hyperpression vésicale associée au
résidu postmictionnel détermine les complications classiques que sont l’infection urinaire, le
reflux vésico-urétéral, l’urétérohydronéphrose, la
lithiase. Elle génère aussi le reflux intra-prostatique et l’infection prostatique et génitale. Autrefois cause principale de décès chez le blessé
médullaire, une meilleure connaissance de l’évolution et des facteurs pronostiques de ce type de
neurovessie contribue à dégager un profil de
patients à risques et des propositions individuelles de suivi (7).
Déficiences anorectales
Les lésions médullaires complètes s’accompagnent toujours d’un dysfonctionnement colo-
511
rectal dont l’étiopathogénie n’est toujours pas
entièrement élucidée. La constipation en est le
symptôme de départ par deux mécanismes possibles.
Le ralentissement du transit colique peut être
constaté en cas de lésion spinale. Lorsque la
lésion est au-dessus des centres sympathique et
parasympathique, le transit n’est pas modifié par
rapport aux groupes contrôles. Si les centres
dorso-lombaires sont en secteur lésionnel, on
assiste à un ralentissement du transit rectosigmoïdien (11).
En cas de lésion spinale suprasacrée complète,
le réflexe défécatoire est présent mais perturbé
par le biais d’un réflexe recto-anal inhibiteur
anormal en amplitude et/ou en durée. On constate
alors une dyssynergie anorectale.
La constipation de transit et la dyssynergie
anorectale concourent au développement de fécalomes rectosigmoïdiens, responsables de pullulation microbienne et de lyse, puis d’épisodes diarrhéiques. L’incontinence fécale est la conjonction
des anomalies du contenu mais également l’abolition de la commande striée et de la sensibilité
discriminative du contenu rectal. Conséquence
de l’émergence de néoréflexes viscéro-viscéraux,
la dilatation du canal anal ou du rectum chez le
paraplégique peut déterminer une inhibition du
réflexe mictionnel et vice-versa.
Spasticité périnéale
La spasticité de la musculature périnéale s’apparente aux caractéristiques cliniques observées au
niveau d’autres muscles striés en secteur souslésionnel, c’est-à-dire l’exagération du réflexe
d’étirement sur les muscles accessibles aux touchers pelviens, l’irradiation de la zone réflexogène, les spasmes ou l’hypertonie périnéale. Son
expression la plus constante accompagne la dyssynergie vésico-sphinctérienne en déterminant
une contraction « en masse » de l’ensemble des
effecteurs musculaires du périnée. L’hypertonie
périnéale est favorisée par les stimuli locaux, la
stase veineuse, elle-même aggravée par la station
assise permanente et la stase stercorale. Cette
hypertonie peut entraîner un cercle vicieux :
l’émission de selles étant plus difficile, les
déclenchements sont plus agressifs et vont euxmême majorer l’hypertonie anale. Cette hypertonie anale peut contribuer à la stase gazeuse, au
météorisme abdominal et en retour peut retentir
512
Pelvi-périnéologie
sur les paramètres ventilatoires chez le tétraplégique. L’hypertonie et les spasmes des autres
muscles périphériques interfèrent avec une bonne
gestion de l’hygiène périnéale, de la réalisation
des sondages, voire les possibilités de déclenchement du réflexe mictionnel en cas de contractures abdominales.
Déficiences génito-sexuelles
Les tableaux rencontrés diffèrent suivant le
niveau lésionnel. Le centre parasympathique de la
colonne intermédio-latérale de la moelle sacrée
(S2-S3-S4) est le centre principal contrôlant
l’érection réflexe. Les centres sympathiques de la
moelle dorso-lombaire et leurs fibres empruntant
le plexus pelvien, via les nerfs hypogastriques,
ont un rôle dans la médiation des érections psychogènes, dans la phase d’émission de l’éjaculation et dans la fermeture du col vésical pendant
la phase d’expulsion du sperme. L’intervention
des boucles réflexes somatiques sacrées permet
l’auto-entretien de l’érection ainsi que la contraction des muscles striés péniens lors de la phase
d’expulsion. Lorsque la lésion laisse persister un
automatisme médullaire sous-lésionnel au niveau
des centres parasympathiques sacrés et des
centres dorso-lombaires, l’érection et les rapports
sexuels restent possibles. Il s’agit d’érections
réflexes obtenues par stimulation directe de la
région génitale. Ces érections sont déconnectées
de tout contrôle central et sont donc généralement faciles à obtenir. Chez 529 patients blessés
médullaires, Bors et Comarr (8) observent que 63
à 94 % d’entre eux conservent des érections, que
les rapports sont possibles pour 23 à 34 % des
cas. La fréquence des érections est plus importante en cas de lésion incomplète que complète et
lors des lésions médullaires de niveau supérieur.
Les érections réflexes sont ainsi observées dans
tous les cas lors d’une lésion haute (9). Cette
érection peut toutefois être insuffisante en qualité
et en durée pour permettre une pénétration. Les
érections psychogènes peuvent être de même
obtenues dans les lésions basses. Cette dernière
s’observe lorsque la sensibilité testiculaire (D10)
reste présente, associée à un syndrome lésionnel
situé sous la charnière dorso-lombaire. Les érections mixtes répondent à un niveau lésionnel situé
entre les centres parasympathiques sacrés et les
centres dorso-lombaires en les épargnant. Tous
niveaux confondus, l’éjaculation est rare, entre
3 et 19,7 % des cas. Celle-ci s’effectue de façon
clonique dès qu’il existe une épargne dorso-lombaire lors d’une lésion suprasacrée (19).
Chez la femme, les mêmes centres médullaires
contribuent à la fonction génito-sexuelle. L’érection clitoridienne et la lubrification vaginale
réflexe sont sous contrôle du centre parasympathique sacré. La lubrification vaginale psychogène dépend des centres dorso-lombaires. En
fonction du niveau de l’atteinte suprasacrée, une
sensibilité des organes génitaux internes peut être
présente, en particulier le col de l’utérus dont
l’intégration est de niveau D10 L1. La stimulation du périnée peut être à l’origine de fuites
d’urines, toujours très mal vécues (la vidange
vésicale avant toute rapport est une bonne précaution). Des contractures importantes peuvent
être parfois un obstacle à la pénétration. Un équivalent d’orgasme peut être obtenu par stimulation
des zones érogènes secondaires.
D’une manière générale, la préservation ou
non d’une sensation orgasmique ne semble pas
corrélée de façon constante ni au niveau, ni à
l’étendue de l’atteinte médullaire (10). Lorsqu’elle est présente, celle-ci peut s’accompagner
de manifestations satellites, telles qu’une sédation
des contractures, des manifestations d’hyperréflexie autonome, voire de douleurs.
Déficiences cutanées
et cutanéo-muqueuses
Les escarres constituent une source fréquente de
complication chez le blessé médullaire et déterminent pour leur propre compte une cause de
déséquilibre des fonctions neuropérinéales. Elles
intéressent en premier lieu la région périnéale
(sacrum et région ischiatique) avec une incidence
annuelle jusqu’à 30 % chez le tétraplégique. Les
facteurs corrélés à l’apparition des escarres sont
l’âge, le sexe masculin, la durée de rééducation
(supérieure à 1 an), l’atteinte motrice complète
(doublement du risque), l’atteinte sensitive complète (risque augmenté d’un facteur 1,5) (12). Les
complications proctologiques (anites, hémorroïdes et fissures anales) sont une conséquence
des modifications trophiques, circulatoires et de
la physiologie anorectale. L’absence de message
sensitif douloureux contribue au développement
d’abcès de la marge anale. La dérégulation du
tonus musculaire en secteur sous- lésionnel associée aux poussées défécatoires favorise la sur-
Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal
venue de prolapsus hémorroïdaires ou muqueux,
souvent non réductibles, épithélialisés.
Douleurs
D’une incidence variant entre 33 et 94 % après
lésion médullaire (14), les douleurs sous-lésionnelles se projettent habituellement dans les
membres inférieurs et parfois au niveau périnéal.
Leur caractère multiforme est appréhendé au travers des nouvelles classifications (13) qui distinguent :
– les douleurs diffuses intéressant une large
partie du territoire anesthésié, permanentes, à
type de brûlures, de paresthésies ou de sensations
d’étau ;
– les douleurs viscérales de topographie imprécise, à type de crampes, profondes et intéressant
la région abdomino-pelvienne.
Celles-ci ne peuvent être systématiquement
interprétées comme le témoin d’une pathologie
locale sous-lésionnelle. À l’instar de ce qui est
observé dans les autres myotomes en secteur sous
lésionnel, ces douleurs peuvent accompagner les
spasmes des muscles périnéaux.
Hyperréflexie autonome
Celle-ci correspond à une réponse végétative
majeure à un stimulus nociceptif sous-lésionnel,
le plus souvent viscéral (distension vésicale,
infection urétro-prostatique ou gynécologique,
lésion proctologique) et survenant lors de lésions
supérieures à D6. Tout acte proctologique ou
endovésical est susceptible de déclencher une
hyperréflexie autonome (HRA) qui s’exprime par
une poussée hypertensive parfois maligne, des
céphalées, un érythème sus-lésionnel, une bradycardie, des sueurs. Celle-ci peut survenir lors de
l’accouchement (deux tiers des blessées médullaires) et doit être systématiquement prévenue
par la réalisation d’une péridurale.
Paraostéoarthropathies neurogènes
Fréquents puisque présents dans 20 à 60 % des
cas selon les critères d’évaluation, ces ostéomes
interviennent comme épine irritative locorégionale susceptible de déséquilibrer l’équilibre
vésico-sphinctérien. Les limitations des amplitudes articulaires interfèrent avec la réalisation
513
des sondages chez la femme ou l’accomplissement des rapports sexuels. Les répercussions possibles sur l’assise et une bonne répartition des
appuis sont sources de contractures douloureuses.
LÉSION MÉDULLAIRE
INCOMPLÈTE
Quelle que soit l’étiologie, les syndromes incomplets se définissent par une épargne plus ou moins
complète des fonctions sensitives sacrées (S4-S5).
Certaines formes topographiques plus ou moins
pures déterminent des atteintes périnéales assez
univoques. Ailleurs, le retentissement périnéal est
fonction de l’étendue en niveau et hauteur de la
lésion :
– Le syndrome central de la moelle constitue
plus de la moitié des lésions incomplètes, conséquence de la nécrose centro-médullaire à marche
descendante « en crayon » lors des lésions médullaires cervicales. Fonction de l’étendue de la lésion
centro-médullaire, les conséquences neuropérinéales sont généralement modestes avec préservation de l’essentiel des fonctions autonomes, eu
égard au caractère suspendu des lésions de niveau
cervical (15). Conséquence de l’organisation
somatotopique des voies spinothalamiques, les différentes modalités sensitives sont classiquement
préservées en territoire sacré. Avec l’étendue de
l’atteinte, il peut s’observer des troubles de la sensibilité vibratoire associés à des signes de paraparésie spastique de la musculature périnéale ;
– Le syndrome spinal antérieur, conséquence
d’une lésion médullaire préservant les colonnes
postérieures et les cornes dorsales de la moelle,
détermine un déficit de la commande volontaire
périnéale avec perte de la sensibilité thermoalgique
tégumentaire dans les métamères sacrés. Les
troubles vésico-sphinctériens sont classiques avec
une mention particulière pour le caractère indolore
de la rétention par atteinte bilatérale des voies spinothalamiques (16). L’atteinte des voies motrices
corticospinales, des boucles spino-ponto-spinales
détermine les aspects d’une vessie de type hyperréflectique ;
– Le syndrome d’hémisection de moelle
(Brown-Sequard), lorsqu’il est pur, détermine une
hypoesthésie thermoalgique controlatérale, un
déficit sensitif profond et un syndrome pyramidal
homolatéraux à la lésion. En raison de l’unilatéra-
514
Pelvi-périnéologie
lité de l’atteinte, les troubles vésico-sphinctériens
peuvent se présenter de façon dissociée associant
une vessie hyperréflexique avec dyssynergie
vésico-striée mais persistance d’un certain degré
d’inhibition volontaire du réflexe mictionnel et de
motricité volontaire des sphincters.
LÉSIONS DU CÔNE TERMINAL
Les troubles neuropérinéaux secondaires à une
lésion du cône terminal se distinguent en raison
des dissociations fréquentes entre les données de
l’examen clinique explorant les fonctions sensorimotrices et le type de dysfonctionnement végétatif impliqué dans les fonctions génito-sexuelles,
vésico-sphinctériennes et anorectales. Pour des
raisons de contiguité anatomique, une lésion du
cône terminal peut ainsi correspondre à une
atteinte incomplète du cône terminal ou une
lésion complète de l’épicône intéressant le segment médullaire lombosacré associée à une
lésion uni- ou pluriradiculaire sacrée. En cas de
lésion aiguë et récente, l’examen moteur et
réflexe du cône terminal ne peut différencier une
sidération par choc spinal d’une atteinte radiculomédullaire sacrée (tableau 2). Ni l’examen sensitif à cette phase initiale (17) ni l’examen neuropérinéal à distance (20) ne sont prédictifs du
type de comportement vésico-sphinctérien ou de
son évolution. Dans tous les cas, les explorations
électrophysiologiques apportent des arguments
Métamère
Atteinte motrice
pour une atteinte périphérique affectant le contingent somatique sacré (21).
La présentation clinique est donc non univoque et comporte des signes cliniques d’atteinte
périphérique et centrale. L’atteinte périphérique
périnéale (tableau II) peut être prédominante et
associée à un ou des signes pyramidaux : réflexes
vifs et diffusés au niveau des membres inférieurs,
réflexes du cône vifs, signe de Babinski. À l’inverse, le tableau clinique peut être celui d’une
paraparésie spastique à laquelle s’associent des
signes discrets d’atteinte périphérique sous forme
d’hypoesthésie périnéale ou d’une hypotonie du
sphincter anal.
Les troubles anorectaux sont non spécifiques
d’une lésion du cône et associent aux conséquences de l’atteinte suprasacrée, des signes d’atteinte segmentaire sacrée dont les plus caractéristiques seraient une diminution de la perception
rectale associée à une absence de réponse réflexe
du sphincter anal externe (24).
Les troubles génito-sexuels, variables dans leur
sémiologie, associent le plus souvent anéréction
réflexe et anéjaculation chez l’homme. Aucune
corrélation n’est là encore observée entre la typologie du trouble et les données de l’examen clinique et électrophysiologique (23).
Les troubles vésico-sphinctériens sont dominés
par la dysurie. Aux facteurs de risque propres
aux dysfonctionnements vésico-sphinctériens
d’origine centrale peuvent s’associer une hypocompliance détrusorienne secondaire à l’atteinte
périphérique sacrée (22), source de régime de
hautes pressions et de complications uronéphrologiques.
Atteinte sensitive
Niveau réflexe
S1
Triceps sural
Face ext. de jambe
Bord ext. du pied
Achilléen
S2
Intrinsèques du pied
Fléchisseurs des orteils
Face post. cuisse
Médio-plantaire
Bulbocaverneux
Clitorido-anal
S3
Sphincter anal
Périnée antérieur
Face post. fesse
Bulbocaverneux
Clitorido-anal
S4
Sphincter anal
Périnée antérieur
Marge anale
Bulbocaverneux
Clitorido-anal
S5
Triangle rétroanal
Tableau II – Métamérisation médullaire sacrée.
Conséquences fonctionnelles des lésions médullaires et du cône terminal
Références
515
13. Siddal PJ, Taylor DA, Cousins MJ (1997) Classification of pain following spinal cord injury. Spinal cord
35: 69-75
1. Ditunno JF, Young W, Donovan WJ et al. (1994) The
International Standards Booklet for Neurological and
Functional Classification of Spinal Cord Injury. Paraplegia 32: 70-80
14. Remy-Neris O (1998) Douleurs neurogènes et lésion
médullaires. In JG Prévinaire, Eds Frison-Roche
(ANMSR) « Douleur neurologique et rééducation ».
Paris, 75-83
2. Thomas A (1928) Les moyens d’étude du système
sympathique et leur valeur. Rapport de la 7e Réunion
Neurologique Internationale. Rev Neurol 1: 767
15. Maury M (1981) La paraplégie. Flammarion Edit,
Paris
3. Guttman L (1970) Spinal shock and reflex behaviour
in man. Paraplegia 8: 100-9
4. Fall M, Geirsson G, Lindström S (1995) Toward a
new classification of overactive bladders. Neurourol
Urodyn 14: 635-46
5. Bors E, Blinn KA (1957) Reflex activity from the
vesical mucosa in paraplegic patients.
AMA Arch Neurol Psychiatry 78: 339-54
6. Weld JK (2000) Clinical significance of detrusor
sphincter dyssynergia type in patients with post traumatic spinal cord injury. Urology 56: 565-9
7. Labat JJ Perrouin-Verbe B (2002) Évolution et suivi
des troubles vésico-sphinctériens du blessé médullaire. In « Troubles vésico-sphinctériens. Actualités en
2002. » G Amarenco, JG Prévinaire. Springer-Verlag
France, Paris, 51-66
8. Bors E, Comarr AE (1960) Neurological disturbances
of sexual function with special reference to 529
patients with spinal cord injury. Urol Surv 10: 191222
9. Courtois F, Charvier MD, Leriche A et al. (1993)
Sexual function in spinal cord injury men. Assessing
sexual capability. Paraplegia 31: 771-84
16. Morrisson JFB « Sensations arising from de lower
urinary tract » In Torrens M, Morrisson JFB « The
physiology of the lower urinary tract ». SpringerVerlag Edit, Berlin
17. Schurch B, Schmid DM, Kaegi K (2003) Value of
sensory examination in predicting bladder function
in patients with T12-L1 fractures and spinal cord
injury. Arch phys Rehabil 84: 83-9
18. Déjerine J (1914) Sémiologie des affections du système nerveux, 1re Ed Masson, Paris : Vol 2
19. Chapelle PA, Colbeau-Justin P, Durand J et al. (1982)
Troubles de l’éjaculation au cours des paraplégies
traumatiques. Ann Urol 16: 86-92
20. Pesce F, castellano V, Finazzi Agro E et al. (1997)
Voiding dysfunction in patients with spinal cord
lesions at the thoraco-lumbar vertebral junction.
Spinal Cord 35: 37-9
21. Amarenco G, Houssin B, Lacroix P et al. (1988)
Sémiologie urodynamique et électrophysiologique
des atteintes du cône terminal. Actualités en rééducation fonctionnelle et réadaptation. 13e série. Masson,
67-72
10. Sipski ML (1998) Sexual functionning in the spinal
cord injured. Int J Impot Res 10: S128-S130
22. Buzelin JM, Labat JJ, Glemain P et al. (1987) Comment explorer une vessie acontractile ? J Urol 93:
485-90
11. Weber J (1994) Constipation in spinal cord lesions,
multiple sclerosis and diabetes mellitus. In : Constipation. Kamm MA and Lennard-Jones JE Eds. Petersfield Wrightson Biomedical Publishing Ltd: 273-7
23. Podnar S, Oblak C, Vodusek DB (2002) Sexual function in men with cauda equina lesions: a clinical and
electromyographic study. J Neurol Neurosurg Psychiatry 73: 715-20
12. Byrne DW, Salzberg CA (1996) Major risk factors for
pressure ulcers in the spinal cord disabled: a litterature review. Spinal Cord 34: 255-63
24. Sun WM, Read NW (1990) Occult spinal lésions : a
common undetetected cause of faecal incontinence.
Lancet 20: 166
Téléchargement