Le jeune dieu fait la moue. D’un naturel rêveur et contemplatif, il ne se sent ni belliqueux, ni
guerrier, ni brave. Mais comment pourrait-il désobéir à son père ? Il échange sa lyre contre un arc et
des flèches et s’en va.
Apollon considère longuement la bête depuis le ciel. Son regard parcourt les lacets formés par le
corps du reptile. Lentement, il saisit une flèche dans son carquois, bande son arme divine et tire. Le
trait se plante entre les deux yeux du Python. L’animal se cabre de douleur.
Apollon remet immédiatement le monstre en joue. Le second projectile s’enfonce à côté du premier.
La bête, folle de rage, s’arc-boute et crache un venin noir. Le dieu récidive trois, quatre, dix, trente,
cent, cinq cents, huit cents fois. Il perce de mille flèches le crâne et le corps de l’animal.
Python se tord en tous sens puis s’immobilise enfin, sans vie. Apollon, lève les bras au ciel en signe
de victoire. C’est là son premier acte de bravoure !
Les nouveaux hommes ont vu les traits d’Apollon fendre l’air.
- Les petits-enfants de nos petits-enfants doivent se souvenir de ce que tu as fait pour nous !
déclarent-ils.
- Pour garder la mémoire de mon geste, répond le dieu, vous organiserez, à chaque retour du
printemps, des joutes athlétiques à l’endroit même où Python a péri. Vous appellerez ces
rencontres les « jeux pythiques ».
Par son exploit, Apollon a aussi libéré l’accès au temple de Thémis. Il rend visite à la déesse. Celle-
ci le félicite pour son courage et l’initie à la divination.
- Désormais, dit-elle, c’est toi qui seras le gardien de ce sanctuaire où les mortels viennent
chercher les cléfs de leur avenir.
Le dieu choisit alors, parmi les nouveaux humains, une femme qui devra habiter en permanence le
lieu sacré. Pour la nommer, il décide, encore une fois, d’utiliser le nom du monstre qu’il vient de
vaincre : elle s’appellera la Pythie. Elle sera l’intermédiaire entre les hommes et les dieux et
transmettra les paroles divines. Mais ces paroles garderont la forme d’oracles mystérieux, d’énigmes
que les hommes devront déchiffrer.
Chapitre 2 : Apollon et Cupidon
Puis Apollon reprend sa route à travers les nuages. Il rencontre bientôt le dieu de l’amour et du désir,
Cupidon, volant dans le ciel. Il est plutôt petit, plutôt dodu, plutôt joufflu. Il a deux petites ailes dans
son dos et tient un arc qui parait minuscule à côté de celui d’Apollon.
Ses flèches dorées et pointues ont un pouvoir exceptionnel : elles déclenchent un sentiment
passionné dans le cœur de celles et ceux qui les reçoivent. Mais Cupidon possède également une
autre sorte de flèche bien différente. Leur pointe est émoussée et contient du plomb. Ces flèches là
ont la particularité de chasser l’amour.