IPAC 2012-2013 BTS Economie Générale Chapitre 4 Les fondements de l’échange international I. La complémentarité dans l’échange international A. Comment s’explique l’échange de biens complémentaires ? 1. Par les inégalités de dotations en ressources Les conditions climatiques variables d’un pays à l’autre expliquent que les productions agricoles diffèrent : l’Afrique du Nord peut faire pousser des agrumes que l’Europe du Nord ne parvient pas à cultiver à coût raisonnable. Les ressources du sous-sol ne se trouvent pas en même quantité : certains pays sont richement dotés en pétrole, d’autres le sont en phosphate, d’autres encore en minerai de fer. Ainsi, les pays échangent entre eux pour se procurer les biens qu’ils ne trouvent pas sur leur territoire. 2. Par les différences de coûts Adam Smith (théorie des avantages absolus, 1776) montre qu’il est intéressant pour les pays de se spécialiser dans les biens pour lesquels ils possèdent un avantage absolu en termes de coût, et d’importer les autres biens du reste du monde. La production de richesses augmente avec la spécialisation. Par exemple, la Chine se spécialise dans les productions industrielles, l’Inde dans les productions de services. Cependant, Adam Smith n’évoque pas le cas des pays qui ne disposent d’aucun avantage absolu. David Ricardo (théorie des avantages comparatifs, 1817) indique que même les nations qui ne connaissent aucun avantage absolu doivent se spécialiser dans les productions pour lesquelles elles sont le moins désavantagées par rapport aux autres nations. Là encore, il en résulte un accroissement des quantités produites. B. Comment s’expliquent les avantages comparatifs des nations ? 1. Par l’existence de rendements croissants L’avantage comparatif d’un pays peut s’expliquer par les économies d’échelle réalisées au moment de la production. Parce qu’il produit en grande quantité, un pays voit ses coûts unitaires baisser plus vite (rendements croissants) que les pays qui produisent moins. D’ailleurs, même si où aucun pays ne disposait d’avantage comparatif, la spécialisation internationale et l’échange entre les pays serait préférable en présence de rendements croissants, comme le montre Paul Krugman (1989). Encore une fois, la production de richesses s’accroît grâce à la spécialisation. 21 L Partie 1 : La coordination des décisions économiques par l’échange RN. IPAC 2012-2013 BTS Economie Générale 2. Par des dotations différentes en facteurs de production E. Hecksher, B. Ohlin et P. Samuelson (loi des dotations en facteurs de production ou théorème HOS) concluent que les pays obtiennent un avantage comparatif selon leurs dotations en facteurs de production. Ils doivent se spécialiser dans les productions qui incorporent le facteur relativement le plus abondant sur leur territoire (travail non qualifié, travail qualifié, capital, terre). C’est la relative abondance du facteur qui fait que son coût est comparativement plus faible. Ainsi, les pays qui disposent d’une main-d’œuvre abondante ont intérêt à se spécialiser dans les productions nécessitant beaucoup de main-d’œuvre : par exemple, la Chine utilise sa main-d’œuvre abondante (travail peu qualifié), et l’Allemagne son savoir-faire technologique (travail très qualifié). II. La similitude dans l’échange international A. Qu’est-ce que la similitude dans l’échange international ? 1. Un commerce de produits similaires Si l’on suit la loi des avantages comparatifs ou encore la loi des dotations en facteurs de production, on débouche sur une logique de l’échange international en terme de complémentarité. La spécialisation des pays fait qu’ils importent des biens différents de ceux qu’ils exportent, conformément à ce que l’on nomme « commerce interbranche ». Or, l’observation des échanges réels montre que les échanges internationaux portent en grande partie sur des produits similaires : les pays exportent des biens qu’ils importent également, dans le cadre de ce que l’on appelle « commerce intra branche » ou « commerce croisé » : par exemple, la France exporte du vin aux États-Unis, mais en importe aussi de Californie. 2. Un commerce entre pays semblables La loi des dotations en facteurs de production laisse supposer que les pays qui commercent entre eux sont de différente nature : les pays en développement exportent vers les pays développés des biens utilisant surtout le facteur travail, lesquels exportent vers les pays en développement des biens utilisant surtout le facteur capital. Là encore, l’observation des échanges montre que la réalité est plus complexe : les pays développés commercent surtout entre eux (pour plus de 70 % de leurs exportations) et assez peu avec les pays en développement. Les échanges ont donc plutôt lieu entre des pays à niveau de développement voisin. B. Comment expliquer la similitude dans l’échange international ? 1. Par l’importance de la demande interne Un produit est d’abord conçu pour satisfaire une clientèle sur un territoire. D’ailleurs, plus la taille du pays est grande, plus il est possible de réaliser des économies d’échelle, c’est-à-dire de faire naître un avantage comparatif. Par la suite, lorsque ce produit est destiné à l’exportation, il intéresse surtout les pays dont le niveau de vie permet de se l’offrir, donc 22 L Partie 1 : La coordination des décisions économiques par l’échange RN. IPAC 2012-2013 BTS Economie Générale des pays au niveau de vie comparable à celui du pays exportateur. Les téléviseurs à écran plat et les iPod sont surtout écoulés, dans un premier temps, dans les pays développés. 2. Par une demande de différence de la part des consommateurs Les produits que les pays échangent dans le cadre du commerce intrabranche ne sont pas totalement homogènes : une automobile Renault n’est pas identique à une automobile Mercedes. Les ménages cherchent à se démarquer en matière de consommation et expriment une demande de variété. 3. Par la différenciation des produits Pour Paul Krugman (1989), le commerce de similitude s’explique aussi par l’existence d’économies d’échelle (ou rendements croissants). Par exemple, lorsque plusieurs pays fabriquent chacun tous les éléments d’une gamme de produits, les économies d’échelle réalisées sont peu importantes. Si ces pays différencient leur production en fabriquant un seul élément de la gamme de produits, les économies d’échelle apparaissent ; par exemple, un constructeur automobile produirait des 4×4 dans un pays, des cabriolets dans un autre, des berlines dans un troisième. Des flux croisés d’exportation et d’importation de véhicules automobiles s’observent ainsi entre pays, mais ces véhicules sont différenciés. III. Le rôle des entreprises mondiales dans l’échange international A. Comment les entreprises organisent-elles leur production à l’échelle mondiale ? Les entreprises organisent leur production à l’échelle mondiale dans le cadre de ce que l’on appelle la décomposition internationale des processus productifs (DIPP). Le processus de production d’un bien est réparti entre plusieurs pays selon leurs avantages comparatifs respectifs, au lieu que toutes les étapes du processus soient répétées à l’identique dans plusieurs pays. Ainsi, à chaque étape du processus de production, il est possible de réaliser des économies d’échelle, même si la décomposition des processus de production induit des coûts de transport plus élevés entre les différentes étapes. La DIPP ne devient rentable que lorsque les gains obtenus grâce à la réalisation d’économies d’échelle l’emportent sur les suppléments de coûts d’acheminement des sous-ensembles de production d’une étape à l’autre du processus. B. Quel est le poids des entreprises dans le commerce mondial ? Les entreprises mondiales sont à l’origine d’un commerce intrafirme qui représente près du tiers du commerce mondial. Ce commerce « fermé » correspond aux exportations et importations entre filiales d’un même groupe implantées dans des pays différents. Ce type de commerce concerne bien entendu des activités dont le processus de production peut être décomposé (exemples : automobile, électronique). 23 L Partie 1 : La coordination des décisions économiques par l’échange RN.