LES RESEAUX DE REGULATION GENETIQUE
L’OPERON TRYPTOPHANE COMME PARADIGME
I PRESENTATION DE L’OPERON TRYPTOPHANE
Le contrôle concerté de l'expression des gènes est essentiel pour le maintien équilibré de la
croissance cellulaire. Ce contrôle permet à la cellule d'ajuster ses synthèses aux conditions
environnementales. Ce que nous connaissons actuellement sur la régulation de la transcription
chez les procaryotes repose sur un modèle, le modèle de l’opéron, proposé il y a quelques années
par François Jacob et Jacques Monod en 1961. Suivant ce modèle, un opéron est un groupe de
gènes comprenant un opérateur (accepteur de l'enzyme de transcription), un promoteur commun
et un ou plusieurs gènes structuraux c’est-à-dire de gènes codant pour des protéines ayant un rôle
spécifique dans le développement de la cellule, par opposition aux protéines gulatrices, dont la
fonction est de réguler l’expression des autres gènes. Dans le cas de l’opéron tryptophane, il s’agit
de cinq gènes adjacents le long de la molécule d’ADN d’e-coli : les gènes trpE, trpD, trpC,
trpB et trpA. Ces gènes codent pour cinq enzymes qui catalysent les réactions de synthèse du
tryptophane à partir du chorismate dont le processus est indiqué dans la figure ci dessous. En
effet, vu que les bactéries peuvent se développer sur un milieu minimum, elles sont donc capables
de synthétiser les vingt acides aminés qui entrent dans la composition des protéines. Cependant,
les bactéries peuvent développer des mécanismes capables de réprimer la synthèse des enzymes
nécessaires à la biosynthèse de certains acides aminés lorsque ceux-ci sont disponibles dans le
milieu.
Figure1 : Organisation de l'opéron tryptophane
Donc une fois transcrit et traduit, les cinq gènes dans l’opéron tryptophane donnent lieu aux
enzymes que Escherichia coli a besoin pour synthétiser le tryptophane à partir du chorismate.
Si cet acide aminé est présent dans le milieu, la bactérie la consomme et la transcription des
gènes est bloquée. Ce phénomène constitue une bascule génétique.
II REGULATION DE L’OPERON TRYPTOPHANE
Avant d’expliquer le fonctionnement de la régulation négative de l’opéron tryptophane,
nous revenons sur le processus de transcription déjà décrit. Nous avons dit que ce processus se
fait grâce à un enzyme, l’ARN-polymérase, qui détecte le début du gène et ouvre localement la
molécule d’ADN. La détection du début d’un gène est une phase capitale. Elle se fait grâce à un
site particulier, appelée promoteur, qui consiste en une séquence spécifique de paires de bases qui
est située avant le début de la séquence propre du gène. Un promoteur est de taille variable, de
l’ordre en général de quelques dizaines de paires de bases. La spécificité de la séquence du
promoteur est de présenter une affinité plus ou moins forte avec la polymérase, permettant ainsi
de la fixer au début du gène, de manière à commencer la transcription. De manière analogue, il
existe un site appelé terminateur situé juste après le gène, qui donne à l’enzyme le signal de fin de
transcription : lorsqu’elle rencontre le terminateur, la liaison de la polymérase avec l’ADN
devient instable, les deux molécules sont alors séparées et la molécule d’ARN-m construite est
libérée. Dans le cas de l’opéron tryptophane, les cinq gènes structurels étant adjacents, il n’y a
qu’un seul promoteur, située avant le gène trpE et un seul site terminateur, après le gène trpA. La
phase de transcription est donc unique pour les cinq gènes : une seule molécule d’ARN est
construite ; puis elle est séparée pour permettre de produire les cinq protéines.
Le fait que les gènes ayant des fonctions connexes soient regroupés dans une même unité de
transcription représente un avantage important : ils forment un ensemble qui peut être commandé
par un seul interrupteur. Lorsque le tryptophane est absent du milieu nutritif et que la bactérie
Ecoli doit le fabriquer elle-même, elle synthétise toutes les enzymes de la voie métabolique en
même temps. L’interrupteur en question est un segment d’ADN appelé opérateur. Son
emplacement et son nom reflètent bien sa fonction : il est situé à l’intérieur du promoteur ou entre
le promoteur et les gènes codant pour les enzymes nécessaires ;cela lui permet de réguler l’accès
de l’ARN polymérase à ces gènes. L’ensemble formé par les gènes, l’opérateur et le promoteur
(tout le tronçon d’ADN nécessaire à la production des enzymes de la voie du tryptophane)
constitue un opéron. Celui que nous étudions ici est l’opéron tryptophane, l’un des nombreux
opérons découverts chez Ecoli.
Figure 2: Représentation schématique de la régulation de l’opéron tryptophane
Si l’opérateur est le lieu s’exerce la régulation de la transcription, qu’est ce qui détermine son
activation ou son inactivation ? En fait, à l’état naturel, il est activé. L’ARN polymérase peut se
lier au promoteur et transcrire les gènes de l’opéron. Mais l’opéron peut être inactivé par une
protéine appelée répresseur. Celui-ci se lie à l’opérateur et empêche l’ARN polymérase de se
fixer au promoteur, interrompant ainsi la transcription des gènes. Les répresseurs protéiques sont
spécifiques, c'est-à-dire qu’ils ne reconnaissent que l’opérateur d’un certain opéron et ils ne
peuvent se lier qu’a lui. Le répresseur qui inactive l’opéron trp n’a aucun effet sur les autres
opérons présents dans le génome d’E coli.
Le répresseur est le produit d’un gène appelé gène régulateur. Le gène régulateur trpR, qui code
pour le répresseur de trp, se trouve à une certaines distance de l’opéron qu’il contrôle et possède
son propre promoteur. La transcription du gène trpR produit une molécule d’ARNm. Celle-ci est
traduite en un répresseur inactif qui diffuse. Les gènes régulateurs sont transcrits de façon
continu, mais à un rythme lent, et il y a toujours quelques molécules de répresseur dans la cellule.
Mais si tel est le cas, pourquoi l’opéron trp n’est-il pas inactivé en permanence ?
Premièrement, la liaison entre un répresseur et un opérateur est réversible. L’opérateur
oscille entre le mode « activé » et « inactivé » ; la durée relative de chacun de ces états dépend du
nombre de molécules de répresseur actives qui sont présentes dans la cellule. Deuxièmement, le
répresseur est, à l’instar de la plupart des protéines régulatrices, une protéine allostérique, c'est-à-
dire qu’il peut lui-même revêtir deux formes : active ou inactive. Le répresseur est synthétisé sous
sa forme inactive, qui a peu d’affinité pour l’opérateur trp. Il n’adopte sa configuration active que
si le tryptophane se lie à lui ; il peut alors se lier à l’opérateur et inactiver l’opéron.
Dans ce processus, le tryptophane joue le rôle de corépresseur. Un corépresseur est une
petite molécule qui agit conjointement avec un répresseur protéique pour désactiver un opéron.
Lorsque la concentration de tryptophane augmente, un nombre croissant de molécule de cette
substance se lie aux molécules de répresseur ; l’une de celle-ci peut alors se fixer à l’opérateur trp
et inactiver la production du tryptophane. Lorsque la concentration de tryptophane diminue, la
transcription des gènes de l’opéron reprend. Cet exemple montre comment l’expression génique
permet de répondre rapidement aux fluctuations des milieux interne et externe de la cellule.
Le processus de régulation décrit plus haut porte le nom de rétroaction négative.
L’adjectif “négatif” vient du fait que le rôle de la molécule régulatrice est un rôle inhibiteur. Ce
processus permet à la cellule d’adapter la transcription des enzymes à la présence ou à l’absence
de tryptophane. Ce sont ces boucles de rétroaction qui sont à l’origine de la notion de réseau
génétique. En outre le tryptophane peut se lier à l’enzyme(anthranilate) pour inhiber(freiner) sa
transcription
III MODELISATION DE L’OPERON TRYPTOPHANE
FIGURE 3 : Système de régulation de l’opéron tryptophane
1. MODELE DE BLISS
Un des premiers modèles mathématiques De l'opéron tryptophane a été présenté par Bliss.
en 1982. Les variables indépendantes de ce modèle sont les concentrations du trp mRNA (M),
la concentration de l'anthranilate synthase (E) qui, selon bliss, l'enzyme le plus important de
point de vue régulation, et la concentration en tryptophane (T).Les équations régissant
l'évolution dynamique de ces trois variables sont :
Km: Taux de transcription de l’opéron non réprimé
τm : délai entre l’initiation de la transcription et celle de la traduction
O : concentration de l’opéron
K1 : taux de dégradation.
R(t) : taux de l’opéron non réprimé à l’instant t, avec m=4
Kp : Taux de traduction,
τp : délai entre initiation de la traduction et l’apparence de l’enzyme
K2 :. taux de dégradation
Kt : Taux de production de tryptophane
I (T ) : fraction d’enzyme non inhibé avec n=2
G(T ) : Taux de consommation du tryptophane
K : taux de dégradation
2. MODELE DE SINHA
En 1988, Sinha a présenté un modèle différent pour L'opéron tryptophane dans lequel
La pression est modelée avec plus détails. Les variables utilisés sont toujours celles
utilisées par bliss. Les équations sont devenues alors :
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