Document n° 2 : Tribunal des conflits, 18 octobre 1999, Aéroports de Paris et Air France
c/ TAT
Vu, enregistrée à son secrétariat le 15 juin 1999, la lettre par laquelle le garde des sceaux,
ministre de la justice, a transmis au tribunal le dossier de la procédure opposant
AEROPORTS DE PARIS et la société Compagnie Nationale AIR FRANCE à la société TAT
European Airlines devant la cour d’appel de Paris ;
Vu le déclinatoire présenté le 31 décembre 1998 par le PREFET DE LA REGION D’ILE-DE-
FRANCE, PREFET DE PARIS, tendant à voir déclarer la juridiction de l’ordre judiciaire
incompétente ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du
16 fructidor an III ; Vu la loi du 24 mai 1872 ; Vu l’ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l’ordonnance des 12-21 mars 1983 modifiée ; Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la
concurrence ;
[…]
Considérant que la Cour d’appel de Paris a été saisie conformément à l’article 2 de la loi n°
87-499 du 6 juillet 1987 d’un recours contre la décision du Conseil de la concurrence qui a
prononcé des sanctions pécuniaires à l’encontre de l’établissement public AEROPORTS DE
PARIS et de la compagnie Air France ; qu’à la charge de ces derniers ont été relevées des
pratiques d’entente illicite ayant conduit au regroupement dans l’aérogare d’Orly-Ouest du
trafic du groupe Air-France ; qu’en outre, a été retenu contre AEROPORTS DE PARIS un
abus de position dominante consistant, d’une part, dans le refus opposé le 17 juin 1994 à la
société TAT European Airlines d’ouvrir à partir de l’aérogare d’Orly-Ouest de nouvelles
liaisons et d’autre part, dans le fait d’avoir imposé à ladite société de ne pas recourir à son
propre personnel mais d’utiliser les services d’assistance en escale d’AEROPORTS DE
PARIS sur l’aérogare d’Orly-Sud alors qu’une telle obligation n’était pas imposée à la
Compagnie Air France ;
Considérant que si dans la mesure où elles effectuent des activités de production, de
distribution ou de services les personnes publiques peuvent être sanctionnées par le Conseil de
la concurrence agissant sous le contrôle de l’autorité judiciaire, les décisions par lesquelles
ces personnes assurent la mission de service public qui leur incombe au moyen de
prérogatives de puissance publique, relèvent de la compétence de la juridiction administrative
pour en apprécier la légalité et, le cas échéant, pour statuer sur la mise en jeu de la
responsabilité encourue par ces personnes publiques ;
Considérant que les décisions de regrouper à l’aérogare d’Orly-Ouest les activités du groupe
Air-France et de refuser à la société TAT European Airlines d’ouvrir de nouvelles lignes à
partir de cette aérogare qui se rattachent à la gestion du domaine public constituent l’usage de
prérogatives de puissance publique ; qu’il suit de là qu’en ce qui concerne les pratiques
relevées par le Conseil de la concurrence qui sont en réalité indissociables de la réorganisation
des aérogares d’Orly décidée par l’établissement public puis approuvée, le 4 mai 1994, par le
ministre de l’équipement, du transport et du logement, c’est à bon droit que le conflit a été
élevé ;
Considérant en revanche, que sont détachables de l’appréciation de la légalité d’un acte
administratif, les pratiques d’AEROPORTS DE PARIS susceptibles de constituer un abus de
position dominante consistant dans l’obligation faite à la Compagnie TAT European Airlines
d’utiliser les services d’assistance en escale de cet établissement public en substitution à ses
personnels ; que c’est par suite à tort que l’arrêté de conflit a revendiqué pour la juridiction
administrative la connaissance desdites pratiques