Corpus Médical– Faculté de Médecine de Grenoble
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La toxoplasmose
Docteur Marie-Pierre BRENIER-PINCHART, Professeur Hervé PELLOUX
Mai 2003
Pré-Requis :
QCM (choix multiples).
Résumé :
La toxoplasmose est une maladie cosmopolite due à un protozoaire, parasite
opportuniste, Toxoplasma gondii. Son cycle fait intervenir le chat comme hôte définitif,
l’homme s’infectant le plus souvent par ingestion de viande contaminée par la forme
kystique du parasite. T. gondii est responsable de 2 types d’atteintes cliniques :
toxoplasmose congénitale transmise de la mère au fœtus en cas de primo infection
maternelle pendant la grossesse (infection materno-foetale), et réactivation d’une
infection ancienne chez les patients immunodéprimés (localisation le plus souvent
cérébrale). Le diagnostic des différentes formes de toxoplasmose fait intervenir la
clinique, l’imagerie et plusieurs types de techniques biologiques : sérologies, cultures,
biologie moléculaire. Les protocoles de traitement sont différents selon les tableaux
cliniques de la maladie, même si les médicaments disponibles sont peu nombreux.
Mots-clés :
Toxoplasmose, Toxoplasma gondii, toxoplasmose congénitale, toxoplasmose cérébrale,
immunodépression, sérologie.
1. Définition
La toxoplasmose est une parasitose causée par un protozoaire : Toxoplasma gondii. Les 3
formes cliniques sont : la toxoplasmose acquise, en général inapparente ou bénigne, la
toxoplasmose congénitale qui peut être à l’origine de fœtopathies graves, et la toxoplasmose
de l’immunodéprimé.
2. Agent pathogène
T. gondii existe sous trois formes :
La forme végétative (tachyzoïte) a une forme d’arc et mesure 5 à 10 mcm. Elle se
multiplie dans les cellules de l’hôte (principalement dans la lignée macrophagique).
Les tachyzoïtes sont les formes du parasite à l’origine des lésions cliniques.
Le kyste est sphérique ou ovoïde, et mesure jusqu’à 200m. Il résulte de nombreuses
multiplications d’une forme végétative qui a colonisé une cellule hôte. Le kyste
contient plusieurs centaines ou milliers de bradyzoïtes, formes à division lente, non
pathogènes. Les kystes sont localisés principalement dans le tissu nerveux et les
muscles, et représentent la principale forme de dissémination du parasite
(carnivorisme). Ils entretiennent l’immunité de l’hôte immunocompétent.
L’oocyste est le fruit de la multiplication sexuée du parasite dans l’intestin du chat. Il
peut être responsable de la contamination humaine par les aliments souillés par les
feces des chats.
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Photo : Toxoplasma gondii : Division d’un tachyzoite
(Service de Parasitologie-Mycologie, CHU de Grenoble)
3. Cycle
Le cycle incomplet fait intervenir uniquement des hôtes intermédiaires (omnivores ou
carnivores) qui se contaminent par ingestion de kystes contenus dans la chair consommée. Les
kystes libèrent des toxoplasmes qui se multiplient et vont à leur tour donner des kystes
intratissulaires.
Le cycle complet se déroule chez l’hôte intermédiaire puis chez l’hôte définitif, le chat, qui
s’infeste par carnivorisme. Les formes végétatives libérées se reproduisent par multiplication
sexuée dans son intestin, qui aboutira à la formation d’oocystes rejetés dans le milieu
extérieur avec ses fèces.
4. Répartition géographique. Prévalence.
La toxoplasmose humaine est présente sous tous les climats, mais sa fréquence dépend de
l’alimentation et du mode de vie. En France, la séroprévalence de la toxoplasmose dans la
population est d’environ 50 à 60%, et l’incidence de la toxoplasmose congénitale est de 1 à 2
pour 1000 naissances.
5. Physiopathologie
En ce qui concerne la toxoplasmose congénitale, la transmission materno-foetale trans
placentaire joue un rôle primordial dans le risque encouru par le fœtus. La contamination
placentaire n’est possible que pendant la phase parasitémique de la mère, et, si le placenta est
intact, la transmission ne peut pas, théoriquement, avoir lieu. La barrière placentaire très
efficace en début de grossesse explique le fait que le risque de transmission augmente avec
l’age de celle-ci. Par contre, la gravité des lésions chez le fœtus infecté évolue de façon
inverse. Les lésions graves sont retrouvées lors des infections du début de grossesse.
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Chez les patients atteints de SIDA, les toxoplasmoses cliniques (principalement cérébrales)
correspondent à des réactivations de toxoplasmoses anciennes secondaires à la rupture des
kystes. Ces réactivations surviennent lorsque la baisse de l’immunité cellulaire du patient
(taux de lymphocytes CD4 bas) ne permet plus de maintenir l’équilibre avec les formes
quiescentes du parasite.
En cas de greffe (organes solides, moelle osseuse) la toxoplasmose peut être due là aussi à
une réactivation d’une infection ancienne chez le receveur immunodéprimé, ou à la
transmission de T. gondii par un greffon infecté (cœur par exemple).
6. Clinique
6.1. Toxoplasmose acquise
Elle est le plus souvent inapparente. Lorsque des symptômes cliniques sont présents, il s’agit
de la triade symptomatique : fièvre, adénopathies (principalement cervicales) et asthénie. Les
formes cliniques graves sont extrêmement rares.
6.2. Toxoplasmose congénitale
Forme majeure : encéphalo-méningo-myélite toxoplasmique. Elle est devenu très rare depuis
la mise en place du dépistage au cours de la grossesse dans les années 70. Elle associe une
modification de la taille de crâne, des signes neurologiques, des calcifications intra-crâniennes
et des signes oculaires (choriorétinite ++). L’évolution est sévère.
Formes viscérales : ictère néo-natal, hépato-spléno-mégalie, anasarque.
Formes dégradées ou retardées : les signes en sont un retard psycho-moteur, une
macrocéphalie, des crises convulsives, une choriorétinite.
Formes inapparentes ou infra-cliniques : ce sont actuellement les plus fréquentes (80% des
cas). Elles sont aussi appelées « formes sérologiques » car seule la sérologie de l’enfant
prouve qu’il est infecté. Le risque clinique principal est l’apparition de choriorétinites dans
l’enfance, l’adolescence ou à l’age adulte.
6.3. Toxoplasmose de l’immunodéprimé
Il s’agit le plus souvent d’une encéphalite (fièvre, céphalées, troubles de la conscience, signes
de focalisation). La dissémination de T. gondii (parasitémie) peut conduire à des localisations
viscérales diverses (poumon, foie...)
6.4. Toxoplasmose oculaire
Elle réalise le plus souvent une uvéite postérieure (choriorétinite), qui est la conséquence la
plus fréquente de la toxoplasmose congénitale. Elle peut aussi survenir en cas de
toxoplasmose chez les patients atteints de SIDA.
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7. Diagnostic
7.1. Imagerie
Elle a surtout sa place dans la toxoplasmose congénitale et chez l’immunodéprimé. En cas
d’infection congénitale, l’échographie obstétricale permet de diagnostiquer les éventuelles
lésions fœtales in utero, argument majeur dans la conduite à tenir en ce qui concerne la
grossesse. Après la naissance, les techniques d’imagerie sont utiles pour évaluer les lésions
neurologiques et la présence de calcifications cérébrales. Chez les patients immunodéprimés,
l’imagerie est, avec la clinique et l’évolution sous traitement, l’élément clé pour le diagnostic
de la toxoplasmose cérébrale.
7.2. Diagnostic biologique
La démarche biologique, ainsi que les techniques utilisées, sont différentes selon la situation
clinique considérée.
Shématiquement :
La toxoplasmose acquise de l’immunocompétent (pendant la grossesse ou hors
grossesse) est diagnostiquée par la sérologie.
La toxoplasmose fœtale est mise en évidence par l’étude du liquide amniotique (mise
en évidence du parasite par biologie moléculaire et cultures).
A la naissance, l’infection congénitale peut être diagnostiquée par les techniques
sérologiques permettant la comparaison des profils immunologiques de la mère et de
l’enfant.
Chez l’immunodéprimé, la sérologie permet d’affirmer l’existence d’une infection
ancienne et donc le risque de réactivation.
7.2.1. Toxoplasmose acquise de la femme enceinte
Le dépistage sérologique est obligatoire lors de l’examen prénuptial. Si la sérologie est
positive et signe une immunité ancienne, le risque de toxoplasmose acquise pendant la
grossesse est nul et un suivi inutile. En cas de négativité sérologique lors de la déclaration de
grossesse, des sérologies mensuelles (IgG et IgM spécifiques) doivent être pratiquées jusqu’à
l’accouchement afin de détecter une éventuelle séroconversion.
Les techniques les plus utilisées pour déterminer le statut sérologique d’une femme enceinte
sont les techniques immunoenzymatiques, d’immunocapture et l’immunofluorescence. Les
isotypes d’immunoglobulines recherchés sont les IgG et les IgM, parfois les IgA. En cas de
séroconversion, (apparition d’IgM et d’IgG) il faudra dater avec le plus de précision possible
l’infection maternelle en utilisant les courbes d’apparition des anticorps anti-T. gondii. La
conduite à tenir diagnostique et thérapeutique dépend de la date de l’infection maternelle par
rapport à la grossesse.
Il faut retenir que l’interprétation des résultats sérologiques doit être réalisée par un biologiste
connaissant parfaitement les techniques utilisées.
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7.2.2. Toxoplasmose fœtale
En cas de séroconversion maternelle pendant la grossesse, le diagnostic anténatal a pour but
de déterminer l’éventuelle infection du fœtus après transmission trans-placentaire de T.gondii,
cette transmission survenant dans environ 30% des cas. La ponction de liquide amniotique
(amniocentèse) est réalisée à partir de la 14eme semaine d’aménorrhée, et 4 semaines après la
date présumée d’infection maternelle. Elle est indiquée par toutes les équipes pour les
séroconversion du 2eme trimestre de la grossesse. Les techniques biologiques utilisées sont
principalement la PCR (mise en évidence de l’ADN du parasite) et l’inoculation à la souris.
L’échographie mensuelle permet de détecter les éventuelles lésions cliniques du fœtus.
7.2.3. Toxoplasmose du nouveau-né
A la naissance, chez le nouveau-né, l’examen clinique doit impérativement comprendre un
examen neurologique complet, ainsi qu’un fond d’œil et des radios du crâne face et profil. La
sérologie doit rechercher les anticorps (IgG, IgM, IgA) synthétisés par le nouveau-né s’il est
infecté. Le western-blot peut permettre de différencier les anticorps transmis par la mère de
ceux synthétisés par le nouveau-né. Le suivi clinique et biologique de l’enfant est
indispensable pour définitivement déterminer s’il est infecté ou non. En l’absence d’infection
congénitale, les IgG transmises par la mère disparaîtront avant l’âge de 1 an.
7.2.4. Toxoplasmose de l’immunodéprimé
En cas de toxoplasmose cérébrale, l’imagerie et l’évolution sous traitement sont les éléments
majeurs du diagnostic. La biologie (sérologie) ne sert qu’à objectiver la présence d’IgG et
donc la possibilité d’une réactivation toxoplasmique. Devant une suspicion de toxoplasmose
disséminée, la recherche de T. gondii dans le sang (parasitémie) ou dans divers prélèvements
et biopsies peut affirmer le diagnostic.
7.2.5. Toxoplasmose oculaire
Le diagnostic de toxoplasmose oculaire suspecté cliniquement peut être confirmé par la
comparaison de taux d’anticorps spécifiques de l’humeur aqueuse avec celui du sérum ainsi
que par la recherche de l’ADN de T. gondii dans le même type de prélèvement.
8. Schémas thérapeutiques
Pour des protocoles plus complets et précis, se reporter aux références citées au début de la
question.
Il existe peu de médicaments indiqués, et validés, pour le traitement de la toxoplasmose. Il
s’agit principalement de :
La spiramycine (Rovamycine®)
L’association pyriméthamine-sulfadoxine (Fansidar®)
L’association pyriméthamine-sulfadiazine (Malocide®-Adiazine®)
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