Effets secondaires de la corticothérapie chez la personne âgée

Les corticoïdes sont employés pour leurs propriétés anti-inflammatoires puissantes, leurs effets anti-
allergiques et leurs actions immunosuppressives. Il existe deux types de prescription de ces molécules.
Les cures courtes concernent essentiellement les pathologies arthritiques aigues et l’asthme. Ils sont
également utilisés lors de périodes déterminées pour leurs activités antalgiques ou anti-émétiques lors de
chimiothérapies anti-cancéreuses, notamment dans le traitement d’un myélome. Ils peuvent également
êtres utilisés en traitement prolongé, comme dans la maladie de Horton ou la polyarthrite rhumatoïde.
Les modalités de prescription chez les personnes âgées sont les mêmes que chez l’adulte jeune. En
revanche, la surveillance et la prévention de l’apparition d’effets secondaires de ces traitements doivent
être particulièrement rigoureuses dans la population des personnes de plus de 75 ans.
Les effets secondaires des corticoïdes administrés par voie systémique sont d’autant plus nombreux et
d’autant plus fréquents que le traitement est délivré de manière prolongée et à dose importante. Ils ne
sont pas spécifiques aux sujets âgés mais s’intègrent dans un contexte multifactoriel avec des
conséquences parfois sévères. Ces effets indésirables, pourtant bien connus, sont en pratique souvent
négligés.
EFFETS SUR L’APPAREIL LOCOMOTEUR
Ces effets peuvent être responsables d’une perte d’autonomie chez les patients âgés.
- L’ostéoporose cortisonique touche essentiellement le rachis et les côtes. Elle s’ajoute aux effets des
carences vitaminiques et hormonales, l’ostéopénie liée à l’âge et l’éventuelle immobilisation liée à la
pathologie nécessitant cette corticothérapie. Soixante-douze pour cent des tassements vertébraux et 47 %
des fractures de hanche survenant au Royaume-Uni sont attribués à la prise de corticoïdes par voie orale.
La survenue de cette ostéoporose est liée essentiellement à la dose quotidienne administrée: elle est plus
fréquente pour des doses supérieures à 7,5 mg par jour de prednisolone ou de prednisone. L’ostéoporose
est alors d’installation rapide : les mesures préventives telle que la supplémentation en calcium et en
vitamine D, voire l’administration de bisphosphonates doivent donc être mises en œuvre précocement.
- L’ostéonécrose aseptique atteint le plus souvent les têtes fémorales mais aussi parfois les têtes
humérales ou les condyles fémoraux. Il n’y a pas de relation mise en évidence entre la durée ou la
posologie de la corticothérapie et la survenue de cette ostéonécrose.
- La myopathie cortisonique est généralement indolore, de topographie rhizomélique et symétrique. Elle
potentialise la sarcopénie du sujet âgé. Ces atteintes peuvent avoir un retentissement fonctionnel
important. La prescription d’une kinésithérapie motrice doit être évoquée à titre préventif lors de
l’instauration d’une corticothérapie chez le sujet âgé.
COMPLICATIONS ENDOCRINIENNES ET METABOLIQUES
Ces complications peuvent être responsables d’une morbi-mortalité non négligeable. Une
corticothérapie peut provoquer la décompensation ou la révélation d’un diabète sous-jacent.
- Une décompensation hyperosmolaire d’un diabète jusque là équilibré peut survenir après
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Effets secondaires de la
corticothérapie chez
la personne âgée
Mise au point
V. Peigne
Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris
l’introduction d’une corticothérapie. Une prévention par un régime pauvre en sucres rapides peut être
utile, à condition d’avoir évalué au préalable l’état nutritionnel du patient. L’arrêt de la corticothérapie
entraîne souvent un retour à l’état antérieur.
- La rétention sodée peut avoir des répercussions tensionnelles par aggravation d’une hypertension
artérielle (HTA) pré-existante ou son instauration. Un régime pauvre en sel peut être bénéfique mais est
souvent déconseillé chez le sujet âgé en raison de son caractère anorexigène.
- L’hypokaliémie doit être guettée et corrigée par une supplémentation potassique orale.
- L’obésité cushingoïde est un reflet de l’hypercorticisme iatrogène. Il n’y a pas de traitement
spécifique.
- Des troubles des fonctions sexuelles peuvent survenir. La freination de l’axe corticotrope, avec risque
d’insuffisance surrénalienne aiguë à l’arrêt du traitement doit être recherchée par un test au Synacthène®
lorsque l’on envisage de mettre fin à une corticothérapie prolongée.
MALADIES INFECTIEUSES
Les corticoïdes peuvent favoriser des infections parfois redoutables comme les infections bactériennes
de tous types, la réactivation d’une tuberculose latente ou d’une anguillulose maligne lors de contact
possible préalable. Il paraît raisonnable de discuter une prophylaxie anti-tuberculeuse par isoniazide lors
de l’instauration d’une corticothérapie en cas d’antécédent de tuberculose. Les facteurs suivants doivent
être pris en compte: nature des traitements anti-tuberculeux reçus, durée prévisible de la corticothérapie,
existence d’autres causes d’immunodépression. L’anguillulose maligne doit être prévenue par un
traitement anti-parasitaire par tiabenzol avant le début de la corticothérapie (importance de
l’interrogatoire à la recherche d’un voyage en zone d’endémie).
TROUBLES NEUROPSYCHIQUES
Des manifestations neuropsychiques bénignes comme des insomnies ou une excitation anormale sont
fréquentes. Plus rarement, une corticothérapie peut être à l’origine d’épisodes psychotiques. Une étude
française rétrospective a ainsi permis de noter la survenue de complications psychiatriques chez 16% des
patients recevant une corticothérapie au long cours pour une maladie de Horton, essentiellement sous la
forme de troubles de l’humeur, d’épisodes dépressifs ou maniaques. La survenue de ces événements est
plus fréquente dans le premier mois de traitement et en cas d’administration de doses élevées de
corticoïdes.
AUTRES PATHOLOGIES IMPUTABLES A LA CORTICOTHERAPIE
- Les effets secondaires cutanés de la corticothérapie sont une fragilité de la peau, l’apparition de
vergetures et d’acné. La corticothérapie peut également être responsable d’un retard de cicatrisation.
- La cataracte capsulaire postérieure est l’effet secondaire oculaire le plus fréquent; le glaucome à
angle aigu induit par les corticoïdes est rare.
- Les corticoïdes augmentent les risques de formation d’ulcères gastro-duodénaux lors d’un traitement
par anti-inflammatoire non stéroïdien. Par contre, ils ne sont pas gastro-toxiques par eux-mêmes.
CONCLUSION
Les corticoïdes restent des médicaments d’intérêt majeur chez le patient âgé, principalement dans la
prise en charge des maladies inflammatoires. Leur utilisation nécessite cependant quelques précautions,
en particulier en ce qui concerne le risque infectieux et la potentialisation de l’ostéoporose. Lors de la
survenue d’effets secondaires trop importants, il est nécessaire de réduire rapidement les posologies, en
prenant garde au risque de rechute de la pathologie qui est à l’origine de cette prescription.
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