Brevet de Technicien supérieur Commerce international 2ème année Economie générale – L’offre de biens publics mondiaux Source : Economie & Management n° 136 - juin 2010 --------------------------------------------------------------------------Biens communs, biens collectifs, biens publics semblent des termes proches mais ne sont pas identiques. Selon Philippe Hugon1, Les biens publics mondiaux (BPM) constituent une nouvelle manière - de penser l’action collective, - de refonder la gouvernance mondiale et - de légitimer des politiques publiques de développement. La question des BPM s’inscrit dans le contexte de la mondialisation et du double mouvement qui la caractérise : a - Déclin relatif de l’espace et des pouvoirs publics face à la montée des sphères privées pour produire des biens collectifs, - Des conflits se développent relatifs à la marchandisation et à la privatisation dans les domaines d’intérêt collectif (droit de propriété intellectuelle pour breveter le vivant, appropriation de la connaissance, etc.), b – Débordement des Etats-nations face à l’internationalisation et à la transnationalisation de questions telles que : - la pollution atmosphérique, - les gaz à effet de serre, - la gestion de l’eau, - les risques épidémiologiques - la stratégie des FMN sur les paradis fiscaux Aucune autorité supranationale n’existe pour produire et financer ces biens dont les effets externes s’internationalisent. Quels enjeux pose la notion de BPM ? a - Le concept de BPM s’insère dans la théorie néoclassique : - théorie des externalités - des biens collectifs - des biens communs - des jeux non coopératifs (Cf. le cours de 1ère année) b – Il se réfère aux théories - des public choice - institutionnalistes - des droits ou de l’économie politique internationale Certaines théories veulent transposer au niveau mondial l’hypothèse de l’individu rationnel optant pour des choix utilitaristes. D’autres approches veulent aborder la question de la propriété collective, de l’équité et des droits, des limites de la marchandisation. 1 Professeur émérite à l’université Paris Ouest Nanterre 1 Trois disciplines présentent ces multiples aspects : - L’économie de l’environnement en donnant une valeur économique à des biens supposés libres, - L’économie de la connaissance qui soulève le dilemme entre l’incitation à produire et l’accès libre, - L’économie politique internationale. Mais la mobilisation du concept de BPM par les décideurs publics, les organisations internationales et par la société civile permet de penser et de construire de nouveaux rapports mondiaux fondée sur un minimum de consensus afin de dépasser les affrontements interétatiques. Ce concept permettrait ainsi de : - Refonder l’aide publique au développement, - Donner la priorité aux relations multilatérales, - Clarifier la notion de régulation mondiale, de citoyenneté transnationale, de taxation mondiale pour financer ces BPM. Selon diverses sources, PNUD, Agence française de développement, Banque mondiale, plusieurs critères se dégagent pour différencier les BPM : a - Selon la nature intrinsèque du bien : - Les biens naturels (eau, climat, air…) - Les biens immatériels (la connaissance, etc.) b – Selon leur dimension spatiale ou territoriale : - Mondiale ou planétaire (la couche d’ozone…) - Internationale ou régionale (eau…) c – Selon qu’il s’agisse de flux ou de stock : - Biens de consommation - Stocks ou patrimoines collectifs (connaissances, diversité génétique, pollution…) d – Selon leur dimension intertemporelle : - Les BPM possèdent des effets intergénérationnels différents, - Les risques de réchauffement climatique ou la stabilité financière ne présentent pas les mêmes horizons temporels. e – Selon les pays concernés : - BPM « à la portée du meilleur » : production et acquisition de connaissances, vaccins contre les grandes endémies, produits par les pays les plus développés. La question : l’accessibilité des exclus du fait de l’appropriabilité des biens - BPM dépendant « du maillon le plus faible » : éradication des épidémies, lutte contre le terrorisme, le contrôle des paradis fiscaux… La question : les risques subis par les pays riches de la part des passagers clandestins et des incitations (pollué payeur) et des contrôles (des paradis fiscaux) pour produire ces biens - BPM « additifs » : ils résultent de la somme des efforts de tous les acteurs : la réduction d’émission de gaz à effet de serre. 2 LA GOUVERNANCE DES BIENS PUBLICS MONDIAUX Rappel du cours et TD de 1ère année : Paul Samuelson distingue deux critères pour qualifier un bien public : - La non-rivalité : la consommation de ce bien par un individu ne gêne pas la consommation des autres personnes ; - La non-exclusion : personne ne peut exclure quiconque de la consommation de ce bien. La défense nationale d’une personne ne s’exerce pas au détriment de celle des autres individus (non-rivalité) et personne ne peut exclure quiconque dans une nation de cette défense (non-exclusion). I – Les enjeux du concept de bien public - Comment faire payer, dans un cadre marchand classique, les consommateurs ? Mancur Olson conceptualise, en 1965, la théorie du « passager clandestin » : autant faire supporter le coût d’un bien par les autres, puisque tout le monde pourra ensuite en profiter. Le libre fonctionnement du marché ne permet pas de produire en quantités suffisantes des biens publics : aucun agent économique privé ne voudra investir dans la production d’un bien que personne ne paiera. - L’existence de biens publics génère des externalités positives : la croissance endogène, les infrastructures publiques - Leur absence entraîne des externalités négatives : qualité de l’air, stabilité politique… A l’échelle d’un pays, seul l’Etat peut organiser la production des biens publics en mutualisant leur financement par l’impôt - Les théories de L’Ecole des choix publics mettent en évidence le comportement opportuniste éventuel des responsables politiques : clientélisme, influence des groupes de pression… - Cette critique explique l’existence, en France, des autorités administratives uniques qui représentent un compromis entre la gestion étatique et la prévention de toutes les influences (électorales, lobbying, corruption…) II – Le bien public au niveau mondial La question des BPM s’inscrit dans le contexte de la mondialisation et du double mouvement qui la caractérise : a - Déclin relatif de l’espace et des pouvoirs publics face à la montée des sphères privées pour produire des biens collectifs, - Des conflits se développent relatifs à la marchandisation et à la privatisation dans les domaines d’intérêt collectif (droit de propriété intellectuelle pour breveter le vivant, appropriation de la connaissance, etc.), 3 b – Débordement des Etats-nations face à l’internationalisation et à la transnationalisation de questions telles que : - la pollution atmosphérique, - les gaz à effet de serre, - la gestion de l’eau, - les risques épidémiologiques - la stratégie des FMN sur les paradis fiscaux Aucune autorité supranationale n’existe pour produire et financer ces biens dont les effets externes s’internationalisent. Selon la nature des biens, les conséquences diffèrent : - La connaissance - L’environnement - La stabilité financière A – Quelle gouvernance pour les BPM ? Plusieurs approches : 1 - Jan Kooiman : « Modèle, ou structure, qui émerge dans un système sociopolitique en tant que résultat commun de l’interaction de tous les acteurs en présence. - Il ne peut être réduit à un seul acteur ou à un groupe d’acteurs en particulier. (…) - Qui dit gouvernance dit guider/orienter. - Il s’agit du processus par lequel les organisations humaines, qu’elles soient privées, publiques ou civiques, prennent elles-mêmes la barre pour se gouverner » 2 – Commission générale de terminologie et de néologie ; avis publié au JORF du 22 avril 2009 : « la gouvernance est la manière de concevoir et d’exercer l’autorité à la tête d’une entreprise, d’une organisation, d’un Etat (…). Elle s’apprécie non seulement en tenant compte du degré d’organisation et d’efficience, mais aussi et surtout d’après des critères tels que la transparence, la participation et le partage des responsabilités ». 3 – Au niveau européen : « ensemble des règles, processus et comportements qui influent sur l’exercice des pouvoirs au niveau européen ». Cette pluralité de définitions montre que la gouvernance s’appuie sur les notions d’organisations, de pouvoirs, de droits, d’obligations, de mécanismes de coordination, de partage de responsabilités… 4 – Le processus de transition du niveau national à l’échelle mondiale constitue en soi un élément de gouvernance. Le défi consiste à amener les nations sensibles au maintien de leurs prérogatives nationales à adhérer puis participer à la gouvernance de BPM, phénomène qui induit un transfert de leurs compétences, une ingérence dans leurs affaires et une perte de leur pouvoir de décision. B – La gouvernance des BPM à externalités positives C – La libéralisation des échanges D - La gouvernance complexe des BPM à externalités négatives 4