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Module 3 octobre/décembre 2002
Caroline Faure
Maître de Conférence
Université de Toulon
Management des ressources humaines et conduite du changement
I - Positionnement du MRH dans les organisations publiques :
1 Définition et finalité du MRH :
Finalité des RH : mettre en adéquation des individus et des emplois. L’inadéquation entre l’emploi
effectif et la fiche de poste peut entraîner des conflits. Il faut faire en sorte que l’individu évolue avec
son emploi et que l’emploi évolue en fonction de la personne.
La gestion du personnel est essentiellement administrative : les personnes sont gérées en tant que
stock. L’objectif est de gérer les éléments constitutifs de la paye, les absences, congés, retraites…
C’est un volet fondamental. Il faut aussi s’assurer de la conformité des pratiques à la réglementation.
La gestion des RH est plus ambitieuse : il s’agit de développer les compétences des personnes et
d’assurer la gestion des emplois (fiches de poste) ainsi que le prévisionnel des emplois. Elle prend en
compte l’individu en tant que tel et pas au niveau collectif.
Le management des RH est encore plus ambitieux : on prend en compte l’individu dans son
environnement de travail. Les actions vont porter sur le couple personne : mission. On va agir par
rapport à l’environnement. on personnalise la relation de gestion avec les individus.
Personnaliser : à mi-chemin entre l’individuel et le collectif. Traduire la stratégie globale en objectifs
opérationnels pour x individus/environnement.
Secteur public et MRH :
Le MRH couvre : la gestion administrative, la gestion et le développement des RH, les relations et
négociations avec les partenaires sociaux, l’organisation du travail et la vie au travail.
Ces quatre familles recouvrent un certain nombre de politiques : ensemble de décisions relatives à
l’emploi, aux rémunérations, et les politiques liées aux négociations sociales, à la formation.
Le secteur public est à mi-chemin entre la gestion du personnel et la gestion des RH. On est plus
dans une logique de gestion administrative.
On repère dans le secteur public une volonté de mettre en place une politique de gestion des
compétences : mise en place de politiques d’évaluations du personnel, de plans de formation et
refonte des fiches de poste.
Première étape vers le management : mise à jour des fiches de poste, grilles d’activité (ou grilles de
compétences).
2 Vecteurs de l’insatisfaction récurrente des agents :
Constantes sur l’insatisfaction des agents : les agents perçoivent les systèmes de promotion
(notation, avancement) et de rémunération comme peu équitables. Ils se plaignent du peu de
perspectives en matière de mobilité et d’évolution de carrière.
L’insatisfaction est indépendante du niveau hiérarchique des agents.
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Premier vecteur d’insatisfaction : contenu du travail :
Formation « à la carte » .
Faible prise en compte des performances individuelles .
Le plafonnement de carrière réduit les défis dans l’emploi .
Des actes de management réducteurs : faible autonomie (ou énorme autonomie, mais pas pilotée),
routine, faible valeur ajoutée au travail, enrichissement personnel limité…
Problème de la polyvalence : ça dévalorise le travail individuel.
Deuxième vecteur d’insatisfaction : style de management :
Héritage du statut général de 1946 : valeurs de discipline et de respect, obéissance au supérieur.
Structures mentales liées aux cadres : cadres B : culture de management centrée sur l’expertise
technique ; cadres A : culture de management centrée sur le politique.
Pour les cadres, la gestion du personnel reste une fonction essentiellement administrative. Le
développement des RH est occulté. Le statut et la gestion paritaire sont vécus comme facteurs de
blocage. Le rôle managérial est freiné. Le manque d’engagement génère des lassitudes.
Troisième vecteur d’insatisfaction : déficit des politiques RH :
Reconnaissance non objective des performances.
Les gens perçoivent les politiques de GRH comme inaccessibles et inefficaces. Elles sont critiquées
par ceux qui veulent une reconnaissance ou qui s’investissent. Elles sont faiblement instrumentées
afin de valoriser le contenu du travail et peu relayées par un engagement significatif de l’encadrant.
Dans le secteur public, la marge de progrès n’est pas très grande.
Impact des insatisfactions :
Sur les comportements : départ (turnover) ; expression et recherche active de changement
(conflit) ; manque de loyauté envers la structure ; adoption de comportements de retrait (passivité).
Loyauté : courage de dire, de faire, de faire ce qu’on a dit.
Différents comportements : individuels ; catégoriels ; groupes d’activité, équipes ; groupes de
pression.
Sur les pratiques de travail : dysfonctionnements : non-qualité des prestations ; écart de
productivité ; régulation de l’absentéisme ; rotation du personnel.
Sur la rentabilité : cela se traduit par des coûts de non-qualité, qui sont des coûts cachés :
surconsommation de matière ; surtemps ; sursalaires ; non-production (arrêt de travail) ; non création
de potentiel.
3 Les freins au développement des RH :
Spécificités du secteur public : il existe un paradigme spécifique du secteur public, qui réside dans
l’élection : deux volets entrent en collusion : les politiques doivent montrer l’efficacité de leur politique
sur le court terme (échéances électorales) ; le personnel travaille sur le temps. Cette situation est
déstabilisante en terme de management.
Un autre problème se situe dans la difficulté de faire l’évaluation d’une action. Le produit des activités
des agents est immatériel le résultat est difficile à formaliser, évaluer.
On est surtout dans la prestation de service on n’a pas tous les indicateurs : on ne peut évaluer à
partir de critères financiers.
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Souvent, le service est co-produit avec le client (ex : montage d’un dossier avec un usager). Le
succès des prestations nécessite le concours actif des bénéficiaires.
Le cadre des activités est ancré dans des logiques particulières : la stabilité de l’emploi, l’historique de
la gestion paritaire, l’étendard de l’équité.
Le cadre réglementaire est vécu comme une contrainte : la logique de gestion du personnel est
l’application de règles. Elle se traduit par 6 points :
Classification des emplois (corps, grades, échelons).
Grilles indiciaires de rémunération.
Négociation avec les instances représentatives (instances paritaires).
Promotion et avancement en liaison avec le quota des emplois.
Mobilité (géographique et fonctionnelle).
Garantie de l’emploi.
4 - Des opportunités particulières :
Des atouts à reconnaître :
Stabilité du personnel et stabilité dans les missions.
Attachement au service public largement partagé par les agents : on peut s’appuyer
dessus pour développer des compétences. Le message passe bien car l’objectif in fine est de mieux
servir les usagers.
Très bon niveau de recrutement initial.
Une attente insistante de reconnaissance et de valorisation des personnels : les agents
demandent souvent l’équité (rétribution/performances). L’équité peut se construire à partir de critères
relativement objectifs, car c’est une valeur.
Des marges de manœuvre à explorer :
La gestion des carrières.
Le concours interne.
Les systèmes d’affectation et de mutations.
La rémunération.
L’évaluation du personnel.
On est moins bridé par les statuts que par les us et coutumes.
« C’est moins le statut qu’une accumulation de comportements et de mauvaises habitudes qui limitent
l’efficacité du service public » (Brunhes 1989).
5 une gestion des RH renouvelée :
Elle doit s’élargir à une autre conception.
Une démarche de développement des RH au service d’une politique d’amélioration de la qualité du
service public.
Elle doit : dépasser la seule dimension « administrative du personnel »
Assurer le nécessaire équilibre entre les impératifs statutaires propres à la fonction
publique et la volonté de développement des personnes et des compétences.
Trois défis majeurs :
1er Rentabilité du secteur public crédibilité et viabilité du SP et capacité du SP à se développer.
La rentabilité dans le SP permet de développer une activité et de sortir d’une logique régressive.
2ème qualité du SP exigences des usagers, des autorités de tutelle. La qualité ne peut pas être
rentable à court terme.
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Logique de rentabilité et qualité peuvent être contradictoires.
3ème Evolution des environnements évolution des agents. Il faut des agents bien formés pour
gérer leur relation avec les usagers (couple agent/usager).
Développement d’une GRH tournée :
vers les usagers. Il faut donc un management de proximité des agents ;
vers l’économique. Il faut donc développer la création de potentiel.
Une GRH renouvelée obéit à 5 logiques :
Personnalisation : passer d’une logique de gestion des stocks à une personnalisation : des
rémunérations, des objectifs, des postes.
Adaptation : au niveau quantitatif, travailler sur la mobilité. Au niveau qualitatif, augmenter
les compétences (formation). La mobilité interne entre différents services permet de travailler sur des
parcours de gestion de carrière.
Partage : de la fonction RH avec les encadrants : prise en charge par les encadrants de leur
rôle de formateur.
Mobilisation : il est difficile d’agir directement sur la motivation : quand une personne atteint
son but, elle perd sa motivation. Par contre, on peut créer des facteurs de mobilisation du personnel.
Mobilisation : canaliser les énergies dans l’action par des méthodes. Ex : donner des objectifs, des
projets.
C’est autour de l’action que se loge la motivation.
Apprendre à manager, c’est apprendre à faire agir.
Anticipation : elle se traduit par la gestion prévisionnelle : monter des plans de formation,
préparer les emplois de demain.
La conception renouvelée de la GRH se traduit par 6 grands principes d’action :
La recherche d’une gestion de proximité.
La professionnalisation des recrutements (concours, critères).
L’évaluation des agents : l’entretien individuel.
La mobilité : facteur de dynamisme pour les personnes et services (limite : ne pas pousser la
polyvalence à l’extrême).
La formation continue, levier puissant d’adaptation des agents.
La transparence des règles et des critères de gestion, condition de succès de l’émergence d’une
nouvelle culture de GRH.
Le rôle des responsables des RH évolue : ils deviennent des partenaires stratégiques : ils
fournissent les moyens et les ressources. Ils travaillent en accord avec la Direction. Ils doivent devenir
des agents du changement et faire évoluer les services vers une organisation plus satisfaisante. Ils
sont des consultants internes en communication.
Les résistances au changement sont des réactions naturelles et légitimes. Le rôle du professionnel
des RH est donc de créer un chemin d’apprentissage pour accompagner l’agent vers le nouveau
poste. Il faut aussi une prise de conscience par le terrain.
Quand on fait un diagnostic, c’est bien de reprendre les phrases des agents : cela crée un effet miroir.
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II La performance socio-économique des RH :
1 Notion de performances sociales et économiques :
La performance revêt trois dimensions : efficacité (résultats/objectifs) ; efficience (résultats/moyens) ;
effectivité (être satisfait du résultat).
a) Performance sociale : articulation de 6 domaines :
Conditions de travail : matériel et fournitures ; conditions physiques du travail (ex : travail de nuit) ;
ambiance de travail (climat social).
Organisation du travail : répartition des tâches, des postes à faible ou forte valeur ajoutée.
L’autonomie, si elle est instaurées, doit être concertée.
Gestion du temps : respect des délais.
Communication, coordination, concertation (CCC) :
Communication : va au delà de l’information. C’est un échange.
Coordination : agencement des tâches les unes par rapport aux autres. Synchronisation des
opérations.
Concertation : prise de décision en commun, ou construction d’une décision.
Il peut y avoir des problèmes de CCC : il peut y avoir communication, coordination et pas
concertation…
La circulation de l’information se fait à trois niveaux : descente, partage, remontée. Il peut y avoir une
rupture aux trois niveaux.
On a une information « molle » quand la qualité de l’information qui descend ou la compréhension sur
le terrain est approximative.
Plus il y a de dysfonctionnements dans la qualité de la descente de l’information, moins il y a
d’information qui circule entre les services, et moins la remontée se fait.
il faut renforcer la ligne descendante : s’assurer de la qualité de l’information qui descend.
On a parfois des informations pas adaptées, pas comprises, pas stimulantes. Stimuler, c’est amener
une réponse de type « oui » ou « non ».
L’information doit être opérationnelle. La formulation est donc importante : qui fait quoi et quand.
Formation intégrée : adéquation entre le bagage de compétences des gens et les fonctions qu’ils
occupent : les dispositifs de formation sont-ils adaptés aux besoins ? la formation intégrée se fait sur
poste.
Mise en œuvre stratégique :
Existe t’il une stratégie ? Est-elle déclinée en objectifs concrets, opérationnels ? Le mode de
management et la gestion du personnel sont-ils facilitateurs ?
La problématique réside aussi dans le passage à l’acte : actions concrètes sur le terrain. Il est donc
important de repérer les éléments qui vont freiner le passage à l’acte.
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